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Maud PELISSIER et Nicolas PELISSIER (Dir.), 2017. Métamorphoses numériques : Art, culture et communication

Paris, L’Harmattan. 280 p. ISBN 9782343132617. 29,00 euros
Rime Fetnan
Référence(s) :

Maud Pelissier et Nicolas Pelissier (Dir.), 2017. Métamorphoses numériques: Art, culture et communication. Paris, L’Harmattan.280 p. ISBN 9782343132617, 29,00 euros

Texte intégral

1Cet ouvrage, dirigé par Maud Pélissier (Université de Toulon) et Nicolas Pélissier (Université Nice Sophia Antipolis), est la première publication collective issue du réseau de recherche CREAMED (Création en méditerranée), créé en 2014 et qui a évolué depuis peu en un « réseau régional thématique de chercheurs en région PACA Méditerranée ». L’ouvrage rend compte des principales préoccupations du réseau, qui se structure autour de quatre axes principaux : CULTE (CULtures, arts et patrimoines pour le développement durable des TErritoires) ; NERF (Nouvelles Ecritures du Réel et de la Fiction) ; ACT (Art, Création, Technologies) et FHB (Frontières de l’Humain et Biotechnologiques).

2L’objectif de l’ensemble du réseau, comme exposé dans les premières lignes de l’ouvrage, consiste en l’analyse des mutations et reconfigurations des « industries culturelles, des institutions et des technologiques, au sein de dispositifs sociotechniques d’informations et de communication » (p. 11).

3Comme en témoigne le titre de la publication, il s’agit donc pour ces chercheurs de porter un regard info-communicationnel sur les dispositifs de « création », de « médiation » et de « réception » dans un contexte marqué par la « révolution technologique » provoquée par le numérique. Pensé comme un « voyage intellectuel » (p. 17), l’ouvrage ne prétend ni à l’exhaustivité, ni à l’homogénéité : il offre au lecteur différents points de vue sur une problématique commune, suffisamment large pour que tous les domaines de la culture puissent s’y retrouver (institutions muséales, patrimoine, journalisme, arts vivants, art contemporain, cinéma, médiation etc.). Les seize auteurs – dont la diversité des statuts et des profils constitue un enrichissement certain – sont répartis dans les quatre parties qui structurent l’ouvrage :

4La première partie, qui s’intitule « Arts, patrimoines et médiation sociotechnique : vers un choc des cultures ? » aborde les mutations subies par les processus de patrimonialisation, de médiation et d’artification sous l’influence des technologies numériques. L’article de Paul Rasse (p. 23), reprend en partie la thèse proposée dans son dernier ouvrage (Le musée réinventé : culture, patrimoine, médiation, 2017) mais en se focalisant sur les transformations du musée d’art depuis ses origines jusqu’à sa transformation récente en média. Toujours dans le domaine muséal, la contribution de Linda Idjeraoui-Ravez (p. 35), poursuit la problématique de la mutation du « musée 1.0 » au « musée 3.0 », en s’interrogeant spécifiquement sur ce que l’auteure appelle les « cyber-pratiques » dans le champ de la médiation. Ce qui intéresse l’auteure, ce ne sont pas seulement les nouveaux dispositifs mis à disposition des publics par les institutions, mais bien l’évolution des valeurs qui structurent la relation entre institutions et publics : valeur de lien, valeur d’usage, valeur d’expérience et valeur expérientielle augmentée.

5C’est ensuite à la transformation du concept de patrimoine à l’ère de la mondialisation que s’attelle l’article d’Iva Zunjik (p. 49), à travers l’analyse de plusieurs documents produits par l’UNESCO ayant introduit le concept de « valeur universelle exceptionnelle ». Si l’article, de par sa dimension diachronique et internationale est d’un intérêt certain, il est dommage que la question de l’influence du numérique sur la construction de la VUE et sur sa préservation ne soit abordée qu’en conclusion. Cette première partie s’achève sur deux articles consacrés au processus d’artification dans deux domaines distincts : celui du Street art, exploré par Christian Gerini (p. 67), et celui de l’industrie de la mode, par Véronique Anderlini-Pillet (p. 81).

6Si dans le premier, Christian Gerini explique que les processus d’artification sont antérieurs à l’arrivée d’internet, les bouleversements auxquels il a donné lieu méritent d’être mis en lumière. L’auteur montre ainsi que le web constitue l’impensé des travaux des sociologues de l’art, notamment « la mesure de l’impact des réseaux socionumériques sur la reconnaissance de l’art en général, sur l’émergence de nouvelles valeurs, sur l’artification […] » (p. 71). À travers ce que l’auteur appelle une « méthodologie croisée » (des entretiens en présentiel ainsi qu’une enquête menée en ligne), celui-ci met en avant le rôle d’internet dans le champ des arts urbains, tant dans leur reconnaissance au sein du milieu artistique que dans leur marchandisation. Véronique Anderlini-Pillet aboutit aux mêmes conclusions en s’intéressant aux « pratiques créatives dans l’espace marchand » à travers l’exemple spécifique du book du styliste, décrit par l’auteure comme permettant « de mettre en récit le processus de création et de la déployer dans l’industrie puis dans l’espace marchand » (p. 81). Dans sa contribution, l’auteure se base sur sa propre expérience professionnelle de styliste pour proposer une analyse de cet objet protéiforme qu’est le book. Si le rôle d’internet (ou plus largement, du numérique) dans les éventuelles transformations de l’objet n’est pas détaillé par l’auteure, c’est peut-être que la dimension sacrée du book, sur laquelle l’auteure insiste beaucoup, l’a préservé de toute dématérialisation totale.

7La deuxième partie de l’ouvrage poursuit dans le domaine des industries culturelles en s’intéressant aux transformations des pratiques créatives, dans les champs spécifiques du journalisme (Nicolas Pélisser), des biens culturels édités du livre et de la musique enregistrée (Maud Pélissier) et du cinéma (Bruno Girard). Le dernier article de cette partie s’éloigne de ces préoccupations en développant une réflexion philosophique sur le rôle des savoirs humanistes à l’heure de la « pédagogie numérique » (Valentina Tirloni). Dans le premier article (p. 97), Nicolas Pélissier retrace l’apparition du « journalisme de création » et dresse d’abord un panorama de ses formes les plus caractéristiques (les mooks, le livre de journaliste, la BD-reportage, le webdocumentaire de création ou encore le newsgaming), qui témoignent de l’influence du numérique dans les pratiques journalistiques au xxie siècle.

8Dans la deuxième partie de sa contribution, Nicolas Pélissier s’interroge sur l’émergence d’un nouveau paradigme, celui du « journalisme créatif » au sein duquel les pratiques énoncées plus haut pourraient s’inscrire, et qui reprend plusieurs des caractéristiques du « journalisme narratif » tout en s’en détachant par certains aspects. À partir de cette généalogie, l’auteur propose une définition du journalisme de création (p. 109) qui permet d’appréhender les transformations les plus récentes du journalisme. Des préoccupations similaires occupent Maud Pélissier dans son article sur les « communs culturels » dans le champ de l’industrie musicale et éditoriale (p. 123). L’auteure s’interroge ainsi sur l’émergence et les enjeux de ces « nouvelles pratiques de création, de médiation et de consommation culturelles » comme outils pour contrer la privatisation et la marchandisation de la culture.

9La troisième partie de l’ouvrage, intitulée « Arts vivants, créations et technologies », constitue une approche originale des mutations technologiques dans le champ de la création car elle met en lumière certaines réflexions d’artistes : Emmanuelle Grangier dans le champ de la danse, Ian Simms dans le domaine de l’art contemporain et Hervé Zénouda dans celui de la musique. Ce dernier propose une réflexion intéressante sur la place de la musique dans le champ des SIC, en proposant d’abord un panorama des recherches en musicologie depuis la seconde moitié du xxe siècle, puis dans une deuxième partie, une épistémologie de la musicologie dans le champ spécifique des SIC (p. 231). Deux chercheurs viennent apporter un regard complémentaire sur l’influence des nouvelles technologies dans l’acte créateur : Fabienne Auffray sur les nouvelles configurations de la relation artiste/spectateur auxquelles les progrès techniques et scientifiques ont donné lieu (p. 203) ; et Franck Renucci, qui poursuit cette réflexion sur le thème de « la rencontre avec l’autre » et de ses apports pour la recherche dans les écoles d’art et à l’Université (p. 213).

10La quatrième et dernière partie, sous le titre de « Voyage au cœur des NBIC : Réflexions ouvertes pour le chercheur et l’artiste », est constituée de deux articles qui proposent une réflexion anticipative sur l’avenir du champ culturel dans sa relation aux sciences. Alexandre Carbonneau s’interroge ainsi sur le concept d’« Homme augmenté », qui témoigne de la « collusion reliant les technosciences à l’économie, dans la perspective d’une poursuite de l’impératif de la production de soi […] » (p. 254) et met en lumière les possibles conséquences de cette « mathématisation du vivant sur le plan social, économique mais aussi psychologique ». Enfin, Marcin Sobieszczanski propose d’établir un pont entre les SIC et les sciences cognitives, en soulignant l’apport de ces dernières au domaine spécifique de l’étude des médias (p. 263), dans une perspective épistémologique.

11De part son caractère actuel et pluridisciplinaire, Métamorphoses numériques apporte des réflexions pertinentes quant aux transformations les plus récentes de la culture au sens large à l’ère des technologies numériques. Malgré la spécificité des cas évoqués par les auteurs, l’ouvrage constitue un outil intéressant ouvrant sur des problématiques plus larges liées à l’épistémologie des SIC.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Rime Fetnan, « Maud PELISSIER et Nicolas PELISSIER (Dir.), 2017. Métamorphoses numériques : Art, culture et communication »Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 14 | 2018, mis en ligne le 01 septembre 2018, consulté le 19 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rfsic/4452 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rfsic.4452

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Auteur

Rime Fetnan

Rime Fetnan (laboratoire MICA, EA 4426) est ATER en Arts plastiques et Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université Bordeaux Montaigne. Dans le cadre de sa thèse, elle travaille sur la construction et la légitimation des imaginaires de l’altérité au sein des biennales internationales d’art contemporain en Europe. Courriel : rime.fetnan@u-bordeaux-montaigne.fr

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