1Le numérique est source d’un renouvellement de l’institution patrimoniale dans ses missions de médiation culturelle, de diffusion et d’accueil des publics. Les musées « doivent tenir compte du développement technologique pour établir un contact plus actif » dans la relation avec les publics ainsi que dans de nouvelles façons de construire le savoir (Baujard, 2019). Des bornes interactives aux dispositifs de réalité virtuelle, nombreux sont les auteurs (Davallon, Le Marec, 2000 ; Miguet, Paquienséguy, 2019) qui ont étudié la diversité des outils numériques dédiés à l’espace d’exposition. Certains se centrent sur la manière dont « les professionnels se saisissent des possibilités du numérique dans le parcours de visite comme en ligne » (Chevry Pébayle, 2019), d’autres resserrent la focale sur le parcours de visite lui-même (Schmitt, 2018) ou sur les interactions des publics avec l’écosystème de l’exposition (Buffoni, 2017 ; Méliani, 2009). Comme le développent Nicolas Navarro et Lise Renaud (2019) dans leur article critique sur la médiation numérique au musée, elle prend « […] les allures d’une étiquette qui permet de désigner, sous une appellation générique, la panoplie des outils mobilisés par les publics, voire par les professionnels des musées ». Ces diverses opportunités portées par les technologies numériques sont davantage vécues comme une injonction à laquelle les institutions culturelles sont soumises (Sandri, 2020).
2Il est attendu, au sein du musée, que les dispositifs de médiation soient déployés pour tisser du lien entre le visiteur, les œuvres et l’institution. Préexistants au numérique, ces dispositifs ont principalement été conçus et le sont toujours, du point de vue de ceux qui vont les utiliser et d’après l’habitude que les institutions ont de classifier leurs publics, soit en public individuel, public scolaire, jeune public hors scolaire, public professionnel, public empêché, etc. Cette conception s’ancre dans un modèle de pensée sociologique (Passeron, 1991) pour lequel les publics appartiennent à des catégories prédéfinies et ne sont pas appréhendés pour eux-mêmes dans leur singularité et leur pluralité de pratiques (Davallon, 1999). Par ailleurs, les institutions de taille importante reflètent cet agencement : leur service des publics est très souvent composé de sous-services, organisés à l’image de cette catégorisation de publics. Ainsi, chacun développe des outils de médiation répondant aux spécificités de son public (livrets scolaires, ateliers ludiques, cartels adaptés, visites guidées, visites en langue des signes française ou encore visites sensorielles, etc.) afin d’accompagner l’expérience de visite.
3Dans cette logique, les individus que le musée n’atteint pas, sont alors pensés comme une nouvelle catégorie : les « non-publics ». Les deux tomes de l’ouvrage Les NON-PUBLICS les arts en réception (2004) coordonné par Pascale Ancel et Alain Pessin témoignent de la nécessité d’apporter des clés de compréhension autour de cette notion. Après avoir rappelé son ancrage historique et sociologique lors des assises de 1968 à Villeurbanne, Laurent Fleury revient sur ses différentes acceptions dans son chapitre sur « L’invention de la notion de “non-public” » (Fleury, 2004 : 53-81). L’auteur s’arrête sur la création du Centre Pompidou, une « expérience [qui] permet de découvrir à la fois une banalisation de l’expression de “non-public”, pour des motifs de stratégies de prospection […] » (Fleury, 2004, tome 1 : 69). Pour Martine Azam, sont considérées comme non-publics, « […] les personnes absentes des lieux, voire “absentes des consciences” des médiateurs de l’art » (Azam, 2004, tome 2 : 68). Actuellement, l’absence de jeunes dans les murs du musée les positionne en non-publics et en fait l’une de ses cibles principales. Pour les atteindre, le musée a besoin d’exister au-delà de son espace architectural de médiation. Cela passe notamment par son insertion dans un territoire et par une implication dans des dynamiques locales identifiées (lors d’événements comme des festivals, rendez-vous publics, anniversaires, etc.), dont il peut se saisir pour accéder à de nouveaux publics.
4Par exemple, de juin à novembre 2022 au sein de l’Hôtel Cabrières-Sabatier d’Espeyran (annexe du musée Fabre), a eu lieu l’exposition « À l’opéra chez les Despous » dont l’objet était de retracer la vie musicale montpelliéraine de la fin du xixᵉ siècle à nos jours en donnant à voir des artefacts de plusieurs époques (partitions, dessins, costumes, diffusions sonores, etc.). Autour de l’exposition, ont été combinés un ensemble de dispositifs et événements, soit des visites guidées, des visites à double voix, un concert-conférence et un week-end en musique. Fruit d’un partenariat entre le musée Fabre, l’Opéra Orchestre National de Montpellier Occitanie et les archives municipales de la ville de Montpellier, elle a offert aux publics des trois structures une expérience visuelle et acoustique. Ainsi, cette événementialisation de la culture favorise les partenariats entre différents types de structures et, par conséquent, permet de croiser des enjeux à la fois de visibilité, relationnels, stratégiques et économiques.
5Pour atteindre ces non-publics, les institutions pensent de nouveaux dispositifs hors les murs qui ne sont pas uniquement développés à l’initiative du musée, mais plus globalement dans une démarche collective portée par une ou plusieurs institutions territoriales (Bourdaa, 2020). Ces dispositifs se déclinent généralement en différents médias numériques ou non, qui participent à la médiatisation d’un objet et d’un événement culturel ou patrimonial. Ici, le numérique constitue une technologie facilitatrice pour rassembler les acteurs et contribue à la mise en récit du propos. Les dispositifs de médiation numériques offrent l’opportunité de capter les jeunes, non-publics identifiés par l’institution muséale, en se rapprochant de leurs pratiques culturelles. Comme Anne Jonchery et Philippe Lombardo (2020) le soulignent dans la conclusion de l’étude sur les pratiques culturelles en temps de confinement « les moins de 40 ans et a fortiori les moins de 25 ans développent […] une plus grande variété de consommations culturelles, leurs univers culturels étant déjà très ancrés dans le numérique ». En effet, les musées partent du principe qu’au quotidien, les jeunes sont connectés et sont usagers de divers réseaux sociaux numériques, d’applications de streaming vidéo/musical et de jeu, etc. De plus, on constate qu’« entre 15 et 28 ans, 83 % de la génération née entre 1995 et 2004 jouaient aux jeux vidéo » (Ibid.). Les musées cherchent donc à créer des dispositifs de médiation au plus près des pratiques des jeunes, notamment en développant des applications reprenant les codes des jeux vidéo. Ainsi, selon Marie-Christine Bordeaux (2016) : « penser les pratiques culturelles par le prisme de la médiation, c’est prendre acte du rôle du sujet dans l’élaboration du sens de son expérience, esthétique et culturelle, et s’intéresser à la question générale de la circulation et de l’appropriation des représentations, des savoirs et des goûts culturels ». Aussi, de plus en plus de dispositifs de type escape game apparaissent dans les espaces d’exposition dans une optique de croisement des publics. Ces dispositifs vidéoludiques sont aussi exploités hors les murs sous forme d’applications pour amener les utilisateurs, dont notamment les jeunes souvent considérés comme non-publics, à se rendre au musée.
6En vue d’illustrer notre propos, nous prenons le cas de Fabre & the City #2 mis en œuvre à l’occasion des 800 ans de la Faculté de Médecine de Montpellier ayant rassemblé 35 partenaires territoriaux, médiatiques, privés et autres. Cette application géolocalisée vise à faire découvrir les collections du musée Fabre de Montpellier Méditerranée Métropole (M3M) au travers d’un dispositif ludique dont l’expérience se déroule hors les murs. À travers la conception du projet, le musée cherche à atteindre différentes catégories d’individus, identifiées comme publics ou non-publics, dont en particulier les jeunes, les familles et les touristes. Ce projet vient s’inscrire dans « l’essor des offres de médiation en direction des familles » (Jonchery, Biraud, 2016 : 9), catégorie hybride (Badulescu, De La Ville, 2018 : 7) et intergénérationnelle qui réunit des publics adultes, jeunes et enfants.
7Le cadrage ainsi opéré nous conduit à considérer l’expérience à vivre par les utilisateurs de dispositifs de médiation vidéoludique. Pour Jean-Jacques Boutaud les « modalités situationnelles de l’expérience » (2015) s’articulent autour de la « […] prédisposition à vivre l’expérience (“l’attente de l’inattendu”), [du] dispositif (configurant l’expérience) et [de la] disponibilité du sujet (ouverture et liberté d’appropriation), acteur d’une expérience phénoménale qui prend sens comme expérience de vie » (2021 : 11). Au-delà des pratiques, le choix du concept d’expérience (Leleu-Merviel, Schmitt et Useille, 2018) nous permet de saisir les émotions des utilisateurs sans perdre de vue le caractère situé de l’action (Quéré, 1997) relevant à la fois des expériences passées et du contexte socio-culturel. Ici, nous considérons l’expérience vécue en tant que processus invitant l’acteur à performer la situation (Winkin, 1996). Les utilisateurs cherchent dans leur background d’expériences socioculturelles proches pour concrétiser l’interaction avec le dispositif. Ils puisent dans leur stock de connaissances pour trouver comment performer la situation.
8Dans cette contribution, nous interrogeons la stratégie de médiation d’un musée en prenant appui sur ses pratiques et plus spécifiquement sur l’expérience d’un dispositif numérique hors les murs. Pour cela, nous commençons par situer et définir le dispositif étudié, ensuite, nous explicitons le protocole d’enquête et les résultats obtenus pour enfin, proposer une lecture du phénomène exploré au regard des recherches en sciences de l’information et de la communication.
9Fabre & the City #2 est la deuxième saison d’une série de dispositifs de médiation numérique hors les murs. Initialement pensée sous forme de websérie graphique, la première saison a été créée en novembre 2018 par le musée Fabre en partenariat avec la Cité Intelligente de M3M. Elle est composée de sept épisodes publiés à intervalle régulier et accessibles à la fois sur un site web dédié et sur une application. Cette dernière propose un parcours géolocalisé élaboré autour d’une dizaine de lieux emblématiques du siècle des Lumières à Montpellier, en écho avec l’exposition Le Musée avant le Musée, La Société des Beaux-arts de Montpellier (1779-1787) montrée par le musée Fabre entre décembre 2017 et mars 2018. Sortie en octobre 2020, dans le contexte particulier de confinement, l’application Fabre & the City #2 a été produite à l’occasion des 800 ans de la Faculté de Médecine de Montpellier. Elle est conçue à l’image d’un escape game ou jeu d’évasion, mêlant histoire de la médecine, œuvres d’art et lieux symboliques de la ville.
10L’application est imaginée en tant qu’« expérience culturelle muséale inscrite dans une temporalité qui dépasse celle de la visite » (Andreacola, 2015). Portée par la chargée de projets numériques du musée, cette initiative s’inscrit dans la volonté de l’institution d’offrir une autre expérience artistique, de prolonger l’espace muséal dans la ville et de dynamiser son image pour, in fine, permettre la rencontre avec de nouveaux publics. De la même manière que le seuil du musée (Schall, 2015) « […] dépasse la seule question de l’espace physique situé à l’entrée de ce dernier […] », ce dispositif de médiation hors les murs fait « […] également seuil en ce sens qu’[il] constitu[e] un passage vers le monde de l’art représenté dans et par le musée et qu’[il] constitu[e], tout autant, un des lieux de l’engagement physique et symbolique du visiteur ». Ainsi, le dispositif ne s’adresse pas directement aux publics du musée, voire même il cherche à capter des non-publics ou des publics éloignés que le musée peine à toucher : son format a, entre autres, été pensé pour « atteindre des amateurs de jeu », notamment les jeunes.
11Dans ce cadre, la chargée de projets numériques met en œuvre une « démarche expérimentale » (selon ses propos) qui lui permet de questionner le caractère innovant de chaque saison, sa capacité à atteindre différents profils de publics ainsi que l’appropriation du dispositif par les utilisateurs. Pour répondre à ces questionnements, elle se rapproche d’institutions de formation et recherche, notamment dans le cadre de conventions. Depuis plusieurs années, l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 et plus particulièrement le département Information-Communication de l’Institut des Technosciences de l’Information et de la Communication (ITIC) mobilise des chercheurs et leurs étudiants de licence et master pour accompagner certains services du musée Fabre dans leur réflexion.
12Depuis 2018, nous entretenons des liens étroits avec différents acteurs du musée selon les projets portés (enquête sur l’appropriation des espaces du musée par ses publics ; organisation de « Fabre Lab’ » : trois rendez-vous de réflexion créative avec les publics au musée ; invitation des équipes du musée lors d’une journée d’étude et, inversement, de chercheurs pour des conférences au musée ; accueil d’étudiants pour des stages, etc.). Au fil des années, ces échanges entre l’université et cette institution ont mené à une acculturation de l’environnement du musée. Entre autres, nous avons dirigé en 2019 un mémoire de recherche centré sur la stratégie de communication déployée par le musée autour de la première saison de Fabre & the City. Dans la continuité des échanges initiés avec la chargée de projets numériques, un projet d’étude de plus grande envergure a été pensé en lien avec la sortie de la seconde saison. Menée en avril 2021, cette enquête porte sur le rapprochement possible des publics jeunes avec l’institution muséale à travers l’expérience d’un dispositif numérique de type vidéoludique. Élaborée à partir d’échanges que nous avons eus avec la chargée de projets numériques du musée, elle répond, entre autres, à des préoccupations de l’institution sur sa stratégie de médiation. L’étude développée dans cet article interroge l’opérativité d’une médiation ludique hors les murs au travers de l’application, la considération des non-publics dans le déploiement d’un dispositif de médiation et la propension de l’expérience du dispositif à constituer une opportunité de capter et engager les (non-publics) jeunes à se rendre sur place.
13Après avoir précisé le contexte dans lequel s’est développée l’application Fabre & the City #2, nous présentons maintenant les méthodes employées pour l’étudier. Dans un premier temps, une description phénoménologique vise à mettre à jour l’expérience subjective du dispositif. S’inscrivant dans le courant de la sociologie des usages qui s’appuie notamment sur les travaux de James J. Gibson (1979 : 127-143), nous cherchons à identifier les affordances inscrites dans le dispositif. Considérées comme propriétés fondamentales d’un objet, les affordances sont des possibilités d’actions latentes dans l’environnement, sans instructions particulières et indépendantes de l’individu. Elles se révèlent à lui dans le cours de l’action et traduisent « […] une relation de l’usager au dispositif. » (Bardini, 1996 : 142). Nous recueillons dans un second temps les expériences vécues par des utilisateurs en situation, lors de déplacements dans la ville vers différents points localisés par l’application.
14Dans cette optique, nous avons mis en œuvre une enquête qualitative mobilisant des étudiants du cours « Analyse des publics » inscrits en troisième année de la licence Information-Communication. Au total, 35 recueils de données ont été réalisés courant avril 2021 auprès de 45 jeunes âgés de 16 à 32 ans dont 40 ont entre 18 et 25 ans. Ces publics sont précisément ceux que le musée cherche à atteindre via l’application Fabre & the City #2. Élaboré dans une visée exploratoire, le protocole d’enquête s’articule autour de méthodes cherchant à révéler l’expérience et les ressentis des jeunes en situation d’utilisation. Il se compose d’une question préalable centrée sur la familiarité des participants avec ce type de dispositif, puis d’un entretien d’explicitation conduit dans le cours de l’action. Ce dernier est couplé à un guide d’observation à découvert sur la navigation (durée/espace consulté), les observations factuelles (actions, postures et attitudes) ainsi que les interactions avec l’application et l’environnement. Les observations sont ensuite vérifiées et complétées lors d’un entretien qualitatif structuré en trois axes : la qualification de l’expérience vécue, l’appréciation des éléments de l’application et l’identification des attentes des participants. Le recueil se conclut par un talon sociologique donnant accès à des informations sur le profil de ces jeunes utilisateurs, à savoir, leur fréquentation du musée Fabre et leurs caractéristiques individuelles.
15Concernant le contexte de l’enquête, précisons que l’environnement qui mène les jeunes à expérimenter ce dispositif de médiation du musée n’a pas été pris en compte. Cet autre cadrage constitue toutefois une piste complémentaire à explorer pour compléter la compréhension du phénomène étudié ici. Ainsi, dans la lignée de Philippe Breton et Serge Proulx, l’étude est centrée sur ce que font effectivement les utilisateurs avec l’application : « La description précise, l’analyse et la compréhension nuancée des phénomènes d’usage et d’appropriation des objets et dispositifs techniques permettent de saisir la complexité et les subtilités de la détermination du phénomène technique dans notre vie quotidienne » (2002 : 254).
16D’après nos échanges avec la chargée de projets numériques, à travers l’application Fabre & the City #2, le musée Fabre cible en priorité les « jeunes joueurs », « les familles avec enfants et adolescents » ainsi que les « touristes ». Les entretiens menés par les étudiants de licence 3 Information-Communication proposent une focale autour de la première cible du musée. Réalisée auprès de 45 jeunes âgés de 16 à 32 ans, dont 32 étudiants issus d’une multitude de disciplines, cette étude permet de comprendre leur expérience de l’application et de dégager des recommandations présentées au musée Fabre.
17Tout d’abord, précisons quelques éléments sur le profil des enquêtés. Seulement quatre d’entre eux se rendent plus de deux fois par an au musée Fabre et 18 ne s’y sont jamais rendus. Pour la seconde moitié de de ces jeunes enquêtés, les visites sont assez rares, entre une à deux fois par an (12) et moins d’une fois par an (11). Parmi les raisons qui les incitent à se rendre dans les murs de l’institution, ces derniers évoquent en majeure partie l’envie d’en apprendre davantage sur les œuvres exposées, le musée Fabre lui-même et son histoire, ainsi qu’un attrait « pour les musées et la peinture en général ». Les enquêtés précisent que ces visites peuvent avoir lieu lorsqu’ils sont « de passage » dans le centre-ville et ont un moment disponible afin de prendre le temps de mieux « apprécier chaque œuvre » (lorsqu’il s’agit d’une seconde visite) ou pour dessiner, en fonction de l’intérêt porté à l’exposition en cours. Au contraire, les freins mentionnés par les enquêtés qui ne se rendent pas au musée sont : un manque d’intérêt pour les musées (plusieurs déclarent ne pas en « ressent[ir] le besoin ») ; une préférence pour des « applications ou interfaces en ligne » ; un attrait plus important pour les espaces extérieurs et activités de plein air ; l’envie de se divertir en faisant l’usage de « dispositifs ludiques » et, enfin, la distance (renforcée par la pandémie) et le manque de temps à accorder à ce type d’activités.
18Le contexte dans lequel le recueil des données a été effectué, soit au cours de la troisième période de confinement en France (du 3 avril au 3 mai 2021) est assez présent dans le discours des enquêtés. Ainsi, certains déclarent que cela leur a « fait prendre conscience de l’importance de la culture » et qu’ils ont pour projet de visiter le musée « lorsque la situation sanitaire le permettra ». Par ailleurs, la découverte de Fabre & the City #2 est annoncée comme moteur d’une visite éventuelle. Parmi les 18 enquêtés n’étant jamais allés au musée, 12 indiquent que l’utilisation de l’application les a motivés à s’y rendre. Envisageons maintenant les affordances auxquelles les utilisateurs peuvent être confrontés.
19Ici, l’objectif n’a pas été de décrire la totalité des fonctionnalités de l’application, seuls le démarrage et les éléments récurrents ont été considérés.
20À l’ouverture de l’application, le premier élément visuel est le logo de Fabre & the City #2 au centre de l’écran. Il s’agit de trois visages d’hommes dans un cercle, le tout en noir et blanc sur fond bleu sombre. Ces visages semblent représenter des personnages marquants dans l’histoire de Montpellier depuis le moyen-âge. Un élément textuel au bas de l’écran, en blanc et petite taille, identifie la société de production. Après trois secondes, une deuxième page sensibilise l’utilisateur à ses responsabilités vis-à-vis de son environnement. Il l’engage à valider le message en appuyant sur « j’ai compris » pour accéder aux contenus de l’application. La narration commence, trois pages d’écran qui se suivent, représentent à l’écrit et visuellement deux personnages : « Théodore et Darya, […] deux étudiants montpelliérains du futur, internes en médecine et passionnés par son histoire ». Sur la dernière page, un personnage plus âgé vêtu d’un toge universitaire invite l’utilisateur à voyager dans le passé accompagné des protagonistes pour découvrir l’évolution de la médecine à Montpellier. Après avoir validé, l’application nous informe que les deux étudiants nous ont envoyé un message. L’utilisateur entre dans un espace de discussion symbolisé par les avatars des étudiants dans deux cercles en haut de l’écran et trois rectangles de texte reprenant les codes d’applications de messagerie. Dans le coin supérieur droit, la lettre « i » encerclée et symbole d’accès aux informations, permet d’ouvrir un volet déplié depuis la droite de l’écran, signifiant l’importance de Darya et Théodore dans l’accomplissement des missions. Le vocabulaire emprunté est relatif au domaine de l’enquête. Remarquons la répétition du même texte sous chacun des deux prénoms.
21L’utilisateur s’engage alors dans le processus de paramétrage de l’application en renseignant ses données personnelles et en l’autorisant à accéder à sa localisation. L’échange est composé de six messages de la part des deux protagonistes et vise à faire connaissance. Après validation, l’application envoie une requête d’autorisation de géolocalisation puis demande à l’utilisateur de prendre connaissance et d’accepter les conditions générales d’utilisation.
22Ensuite, pour entrer dans le jeu, trois parcours sont présentés et des indications sont fournies pour guider l’utilisateur dans son choix :
-
le parcours libre : « sans prescription d’ordre, permettant à l’utilisateur de découvrir les lieux en fonction de ses envies et de ses déplacements1 »,
-
le parcours famille : « un jeu de piste à destination des familles, avec des enfants à partir de 10 ans : un moment d’apprentissage ludique et dynamique à partager2 »,
-
le parcours aventure : « un jeu de piste façon escape game pour les gamers : un parcours de jeu sur mesure, destiné principalement aux jeunes joueurs montpelliérains3 ».
Figure 1 : captures d’écran de Fabre & the City #2 © musée Fabre.
23Un message d’attente apparaît le temps que la géolocalisation s’effectue pour laisser place à un plan de la ville sur fond bordeaux indiquant les lieux à découvrir. Si l’utilisateur se situe dans un périmètre trop éloigné de ces lieux, il voit le plan de la ville, mais n’accède pas aux missions.
24Les parcours famille et aventure sont chacun structurés en quatre missions, considérés comme des étapes que l’utilisateur doit successivement franchir pour arriver devant le musée Fabre. Une entrée gratuite lui est offerte s’il résout l’ensemble des énigmes. Ici, nous nous centrons uniquement sur le parcours libre car ce dernier a fait l’objet de notre enquête. Réunis dans le centre historique de la ville, les 14 missions de ce parcours sont matérialisées par des cercles jaunes et identifiées par le nom du lieu : église Saint-Roch, Notre-Dame des tables, université de médecine, collège royal de médecine, hôpital du Saint-Esprit, au Vase d’or, œuvre de la Miséricorde, société royale des sciences, amphithéâtre Saint-Côme, jardin des plantes, musée Fabre, hôpital Général, hôpital Saint-Éloi et amphithéâtre de dissection. L’utilisateur déambule à son gré parmi les différents points et n’est pas contraint de réussir une mission pour en débloquer une autre.
25En choisissant un point de la carte, une page d’accueil apparaît et présente succinctement le lieu. Dans la partie supérieure de l’écran se trouve un visuel représentatif avec une « année de retour » qui précise la date à laquelle va se dérouler la mission, suivi d’un paragraphe de quelques lignes décrivant « l’histoire ». Enfin, dans la partie inférieure de l’écran, un bouton propose d’« accepter la mission ».
26Une fois que l’utilisateur valide, deux écrans transitoires défilent l’un après l’autre (« chargement de la mission » et « localisation en cours ») pour laisser place à une nouvelle carte, sur fond bleu sombre, de la zone occupée par la mission. L’utilisateur doit maintenant se rapprocher du point de départ identifié par une cible rouge. Un texte au bas de l’écran l’invite à le rejoindre pour commencer. S’il n’est pas suffisamment proche, le bouton « débuter la mission » est grisé et elle n’est pas accessible. Une fois toutes les conditions réunies, un tourbillon noir surgit et, après quelques secondes, la date de la mission apparaît au centre de l’écran. Ici, nous détaillons le cas du « jardin des plantes ». Le fond noir laisse ensuite place à une carte de la ville, à nouveau dans des tons rouge sombre avec un bandeau « explication » comprenant quelques données historiques dans la partie supérieure de l’écran. À l’image des trousses de premiers secours d’époque, une sacoche est disposée sur un cercle jaune au centre de la partie inférieure de l’écran. Constituant l’inventaire, cette dernière, ainsi que les deux icônes se trouvant à sa gauche (quatre flèches pour changer de cadrage) et à sa droite (une cible pointant sa propre position sur la carte) sont fixes, elles ne disparaissent pas de l’écran. Après fermeture du bandeau explicatif, un point rouge indiquant la présence d’un nouveau personnage à rencontrer surgit sur la carte. En s’en approchant, une image fixe du buste de Frédéric Bazille (personnage important dans l’histoire du musée Fabre) apparaît et la zone de texte située juste en dessous l’introduit. Elle contextualise sa présence dans les lieux puis, après quelques explications, propose de guider l’utilisateur dans sa mission. S’il choisit de ne pas l’accepter, la mission s’arrête laissant place à un « tableau d’honneur ». Au contraire, s’il accepte la proposition du narrateur, de nouveaux points prennent place sur la carte invitant l’utilisateur à se déplacer afin d’accéder aux informations qu’ils contiennent. Constituée par 10 points, ou zones d’informations, cette mission est guidée par Frédéric Bazille et plonge l’utilisateur dans une image graphique à 360° qui offre la reconstitution du paysage de la fin du xixe siècle. L’utilisateur parcourt le nombre de points qu’il désire avant de mettre fin à la l’activité. À chaque fin de discussion avec le narrateur, ce dernier lui demande s’il a fini sa « balade ». En affirmant, l’utilisateur accède au tableau d’honneur et à un récapitulatif des badges gagnés durant son parcours, s’il refuse, il pourra simplement continuer.
27Notons que certaines missions comme celle du jardin des plantes, ne sont accessibles qu’à certains moments de la journée (du fait des horaires d’ouverture des lieux).
28À partir des éléments qui viennent d’être décrits, nous repérons les prédispositions de l’application par lesquelles les expériences peuvent avoir lieu pour ses utilisateurs.
-
présentation claire de l’instance énonciatrice et du thème traité ;
-
relation normée au dispositif (paramétrage conventionnel de l’application, personnalisation au début du parcours) ;
-
engagement de l’utilisateur en le mettant en interaction avec une interface familière (cf. applications de messagerie utilisées quotidiennement par les jeunes) ;
-
immersion de l’utilisateur dans l’univers de l’enquête : vocabulaire, symboles (carte, point rouge, sacoche, etc.), tonalité, graphisme, scénarisation ;
-
implication dans l’exploration : découverte d’éléments historiques et agencement des connaissances ;
-
temporalité d’utilisation du dispositif rythmée par les déplacements physiques d’un point à l’autre dans le parcours.
29La description phénoménologique de l’application nous conduit à considérer la manière dont les utilisateurs s’en sont saisis en situation.
30Après s’être laissés guider au gré des déplacements offerts par l’application, le sentiment d’être un aventurier prêt à faire de nouvelles découvertes (grâce aux énigmes et aux « re-découvertes ») émerge du discours des enquêtés. Ils déclarent apprécier l’interface, l’ergonomie et les graphismes de l’application, et décrivent globalement le moment vécu comme une expérience culturelle enrichissante. Néanmoins, après quelques dizaines de minutes, on observe de manière systématique des mouvements d’impatience et des soupirs, témoignant de la démotivation croissante des utilisateurs. D’après eux, leur frustration provient principalement du rythme imposé par l’application dans la résolution des missions. Les temps de lecture d’informations et de visionnage de vidéos sont assez longs (il est impossible d’en sauter des passages) tandis que les temps de déplacement entre les points et à la résolution propre des énigmes sont très rapides. De plus, le manque de précision de la géolocalisation sur la carte contraint les utilisateurs à errer pendant un moment avant de trouver la zone exacte qui débloque l’accès à une nouvelle énigme.
31Ensuite, lorsqu’on leur demande ce qu’il manque à l’application, les participants mentionnent des compléments sonores (elle en est dépourvue, même dans les contenus vidéos), un recalibrage du temps passé sur certaines activités qui permettrait de lever des freins techniques et un lien plus important avec l’environnement de l’expérience, notamment la possibilité de laisser des traces sur les lieux. Dans les recommandations formulées au musée Fabre, plusieurs éléments sont revenus de manière récurrente. D’abord, pour favoriser une expérience plus immersive et ainsi amener l’utilisateur à se concentrer sur l’activité, l’application pourrait comporter des éléments de sons (sous forme de musiques ou voix off). Afin de rendre le dispositif encore plus interactif avec son environnement, il serait, par exemple, possible d’imaginer des QR code à scanner dans la ville, des photos à prendre, ou des images et vidéos en réalité augmentée qui se superposeraient au réel. Aussi, en plus des freins soulevés précédemment, les utilisateurs apprécieraient une réduction du temps passé sur les éléments vidéo et textuels.
32Enfin, bien que les jeunes enquêtés soient globalement satisfaits de l’application et qu’ils témoignent d’un intérêt avéré pour les savoirs patrimoniaux, cette expérience ne déclenchera pas systématiquement l’acte de visite. Toutefois, certains expriment qu’ils sont disposés à s’y rendre à condition d’avoir le temps et d’être intéressés par l’exposition en cours. Ainsi, en continuité des travaux de Florence Andreacola (2014), les éléments mis en lumière nous amènent à nous questionner « sur des situations d’interactions dont les contextes sont à la fois dans et hors de l’espace muséal ainsi que dans des temporalités circonscrites et non circonscrites au moment de la visite ».
33Nous examinons les expériences vécues par une catégorie d’utilisateurs ciblée par le dispositif au regard des propositions inscrites dans l’interface de l’application pour mettre au jour les opportunités qu’ils ont effectivement exploitées.
34Tout d’abord, il n’y a pas d’ambiguïté sur le thème investi par l’application et l’identité narratrice : l’histoire de la médecine à Montpellier racontée par des personnages emblématiques de la ville. La personnalisation de l’interface dès le début du parcours, confortée par l’engagement de l’utilisateur dans des schémas familiers (applications de messagerie), s’essouffle vite. Elle est réduite à un niveau rudimentaire peu impliquant pour les utilisateurs qui auraient préféré une immersion plus prégnante dans l’univers du jeu. Dès l’ouverture de l’application, l’utilisateur est positionné en tant qu’aventurier et c’est effectivement son sentiment. Il est plongé dans l’enquête (graphismes, vocabulaire, symboles, etc.) et impliqué dans l’exploration (agencement des connaissances et intervention des personnages). Les expériences montrent qu’il se prend au jeu, mais pour un temps seulement. Malgré tous les éléments réunis pour engager l’utilisateur dans le parcours, il a envie de s’en détacher. Paradoxalement, ce sont ces mêmes éléments qui desservent la jouabilité de l’application. La complétion de missions, qui s’agence autour d’actions (visionnage de vidéos sans sons, lecture de dialogues, marche, etc.) visant à répondre à une ou plusieurs énigmes, s’effectue à un rythme prédéfini dont on ne peut changer l’allure. Les utilisateurs sont positionnés comme des aventuriers, tant dans ce que l’application propose que dans leurs retours : il manque un maillage entre l’univers du jeu (guidés dans l’histoire de la médecine par des personnages emblématiques du monde de l’art) et les modalités mêmes du jeu (la jouabilité à l’œuvre dans les énigmes distribuées au cours des déplacements offerts par la carte). La catégorie d’utilisateurs étudiée, les jeunes, semble davantage intéressée par le jeu et les défis qu’il représente.
35Aussi, le déplacement physique d’un point à l’autre dans la ville offre à l’utilisateur un temps qui peut être saisi pour : assimiler les informations précédemment obtenues, faire de la marche un moment transition ou être à l’affût de la prochaine interaction. Le recueil témoigne de l’envie des utilisateurs d’être davantage en prise avec le réel et en relation avec d’autres « aventuriers ».
36Pour terminer, les utilisateurs de l’application perçoivent le musée Fabre comme un lieu de savoirs et de connaissances. Cette représentation du musée n’entre pas en corrélation avec l’envie de se divertir affirmée des publics jeunes. L’expérience de l’application révèle l’existence du musée pour eux mais doit entrer en résonance avec d’autres éléments signifiants, afin de déclencher l’acte de visite.
37À travers l’analyse de l’application Fabre & the City #2, cette contribution considère la place d’un dispositif de médiation numérique hors les murs dans la stratégie de médiation d’un musée national.
38Élaboré dans le cadre d’une série, le dispositif évolue au fil des versions en fonction des retours d’expérience. Ainsi l’application vidéoludique succède à une web-série, proposant cette fois-ci à l’utilisateur d’être acteur en participant au dispositif de médiation. Ici, le modèle top-down annoncé par Schafer et Thierry (2011) semble être laissé de côté au profit d’une co-construction entre l’institution et les utilisateurs, concrétisée par le projet à venir d’une troisième saison des dispositifs Fabre & the City. La réflexion engagée par le musée Fabre reste au niveau de l’application (micro-social) notamment sur l’expérience de l’utilisateur, alors qu’un de ses principaux enjeux se situe à un niveau davantage stratégique : faire venir les publics jeunes. La deuxième version de l’application a été pensée en lien avec un événement marquant à l’échelle locale (les 800 ans de la faculté de médecine de Montpellier, le 17 août 2020) fortement médiatisé sans qu’il n’y ait pour autant de relais au sein des murs de l’institution muséale. Le projet étant uniquement porté par une personne d’un service du musée, il n’est pas sujet à discussions et collaborations internes et n’est pas lié aux autres actions de médiation du musée.
39Fabre & the City tend plutôt à avoir une existence indépendante du musée, l’application traite des œuvres et apporte des informations aux utilisateurs en les reliant à des lieux historiques dans la ville. Cherchant à constituer « monument virtuel » (de Bideran, 2012 : 246-296) dont la forme s’enrichit progressivement durant le parcours, les missions et les différents lieux investis prennent une place plus importante dans l’expérience de l’application. Dans ce mouvement vers l’extérieur, le musée perd sa dimension immatérielle et symbolique qui n’est plus perçue par les utilisateurs au cours de leur déambulation dans la ville, guidés vers des points stratégiques les amenant ailleurs : dans d’autres histoires.
40De plus, il nous semble important de rappeler la période singulière de diffusion de Fabre & the City #2 correspondant aux dates du deuxième confinement, soit fin 2020. Le musée n’a donc pas pu compter sur les retombées d’une communication dédiée à l’application. Par ailleurs, nous notons également que la première saison de Fabre & the City a été lancée dans un contexte particulier, l’ouverture d’un centre d’art dans le cœur de ville, soit dans le même secteur que le musée Fabre. Largement soutenu par la métropole et fortement médiatisé, ce centre d’art contemporain constitue un projet d’envergure. Pendant près de deux mois, un événement public (100 artistes dans la ville) investissant plusieurs quartiers de Montpellier et doté d’une application géolocalisée, a accompagné son ouverture. Dans cette configuration, le dispositif de médiation hors les murs n’a pas eu la place escomptée dans l’espace public et médiatique.
41Finalement, cet article permet de pointer l’importance d’élargir le cadre d’appréhension d’un dispositif de médiation lors de sa conception, de sa mise en œuvre et de sa diffusion. Le dispositif présenté dans notre étude s’adresse prioritairement à des jeunes, que le musée qualifie de non-publics et qu’il cherche à atteindre. En écho avec les travaux de Laurent Fleury (2004 : 69) autour de la banalisation du terme de non-public, dans cette situation, parler de non-visiteurs (expression issue de l’allemand nichtbesucher) comme le font les muséologues allemands, nous semble davantage opportun. En effet, les jeunes qui ne se rendent pas au musée Fabre ne sont pas pour autant non-publics de lieux culturels, ils ne le perçoivent simplement pas en tant qu’élément signifiant dans leur univers de références. Comme développé par Guy Saez (2015) : « […] pour qu’un produit culturel soit reçu, encore faut-il qu’il soit attendu, et consistant. […] La théorie de la réception insiste depuis Hans Robert Jauss (1978) sur l’idée d’un horizon d’attente qui permet de percevoir ce qui advient, et même d’anticiper ce qui va advenir ». Ainsi, une des perspectives serait d’explorer les médiations ludiques mises en œuvre pour inciter les jeunes à se rendre au musée et leur donner envie d’investir le lieu en les impliquant dans des activités liées à l’univers muséal. Sur le modèle d’un laboratoire, le musée Fabre développe d’ores et déjà, lors de sa nocturne étudiante annuelle, des partenariats qui offrent l’opportunité aux jeunes d’expérimenter des dispositifs aux multiples formats (escape game, performances, visites olfactives, projections, concerts, etc.). Soulignons qu’« un autre intérêt du numérique dans les actions de médiation, c’est son immense souplesse. Mais cette plasticité même impose de réfléchir soigneusement aux pratiques des publics » (Calenge, 2015). Pour atteindre des non-publics ou non-visiteurs, il est donc nécessaire de considérer leurs pratiques culturelles investies et de les mobiliser dans la conception de dispositifs de médiation.