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Classes de niveau : variations internationales dans les regroupements d’élèves et la constitution de classes au collège

“Ability” grouping: A review of international research and practices in grouping students by attainment in secondary schools
Anna Mazenod
p. 93-108

Résumés

Cet article synthétise les apports récents de la recherche internationale sur les pratiques liées à la constitution de classes de niveau au collège. L’article explicite les usages terminologiques anglo-saxons courants dans ce domaine et défend la pertinence de ces recherches pour les politiques éducatives en France. L’article s’appuie en particulier sur les résultats d’une importante étude, menée récemment en Angleterre, sur la mixité sociale, les expériences scolaires et la pédagogie dans les classes de niveau. L’article explore également les raisons expliquant la prédominance de ces pratiques dans le contexte anglais et les difficultés rencontrées pour les faire évoluer.

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Texte intégral

Introduction

1En dépit de leur ancienneté (Dupriez & Draelants, 2004), les pratiques et les débats concernant l’organisation de classes de niveau restent un sujet important sur le plan international. En effet, ces pratiques sont aujourd’hui fréquentes, voire dominantes, dans plusieurs systèmes éducatifs européens, entraînant des conséquences potentielles sur les inégalités scolaires. En France, les contributions récentes à ce débat sont peu nombreuses, ce qui peut s’expliquer par le fait que les classes de niveau sont considérées comme une pratique « technique », ancrée dans l’organisation de l’enseignement et de ce fait éloignée des attentes du grand public, ou encore par le fait qu’elles ne font pas l’objet d’une application officielle dans les écoles françaises avant le lycée.

2Cet article présente une synthèse des résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students menée au sein de l’Institute of Education de l’University College de Londres (UCL) entre 2014 et 2018. Cette enquête avait pour objectif d’étudier, dans les écoles secondaires anglaises (équivalents des collèges français), les pratiques de regroupement des élèves (classes de niveau ou classes hétérogènes), les pédagogies utilisées, et l’impact de ces dernières sur la confiance en soi et les expériences de scolarisation des élèves. Cet article montre que la variété des pratiques de regroupement des élèves, qui sont loin de n’être que des questions « techniques » ou opérationnelles, contribue à la construction de trajectoires scolaires différentes (Ball, 1981 ; Mehan, 1992).

3La variété des termes mobilisés pour décrire les pratiques de regroupement des élèves dans la littérature académique internationale peut s’avérer déroutante. La constitution de classes de niveau est un exemple de regroupement d’élèves basé sur l’aptitude. Ce type de regroupement peut se retrouver entre les classes d’un même établissement (par exemple « tracking » aux États-Unis ou « setting » en Angleterre), au sein d’une classe (par exemple, groupes de tables), ou entre établissements (par exemple, écoles académiques ou professionnelles en Belgique). Les enquêtes françaises (Duru-Bellat & Mingat, 1997 ; van Zanten, 2001 ; Riegert & Ly, 2015) dévoilent la réalité des pratiques de regroupement par niveau et leur mise en œuvre, indirecte, dans un système éducatif où elles ont en principe été abolies. Riegert et Ly (2015) montrent par exemple que les classes des collèges français sont loin d’être hétérogènes, les pratiques de l’offre et le choix des langues ayant effectivement créé des « classes de niveau ». Dans la recherche internationale, cette pratique « indirecte » de regroupement des élèves par niveau est connue sous l’appellation « de facto tracking » (Lucas & Berends, 2002).

4Avant de présenter les données, la méthode et les résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students, l’article revient sur les différentes pratiques de regroupement d’élèves, tournées vers la création de classes homogènes. Il conclut que la constitution de classes de niveau, qu’elle soit réalisée par des moyens directs ou indirects, a des effets potentiellement négatifs sur les résultats académiques et la confiance en soi des élèves, en fonction de leur placement dans les différents groupes de niveau, et que la mise en œuvre des pratiques de regroupement permet très difficilement d’atteindre l’équité sociale.

Vers l’idéal de l’homogénéité des classes : « setting », « streaming » et « tracking »

5Bien que l’homogénéité des classes soit considérée comme un idéal impossible à atteindre (Oakes, 2005 ; Zakhartchouk, 2014), elle constitue néanmoins l’objectif visé par les classes de niveau dans la tradition anglo-saxonne. De son côté, la notion d’aptitude renvoie à une idée ancienne mais omniprésente : celle que chaque étudiant posséderait une capacité scolaire innée que les écoles et les enseignants devraient simplement exploiter (voir par exemple van Ijzendoorn, Juffer & Poelhuis, 2005 ; Oakes, Wells, Jones et al., 1997).

6En Angleterre, les classes de niveau prédominent dans l’enseignement de l’anglais et des mathématiques au sein des écoles secondaires (OECD, 2013 ; Jerrim, Greany & Perera, 2018) et sont également courantes dans les écoles primaires (Hallam & Parsons, 2013 ; Bradbury & Roberts-Holmes, 2017 ; Towers, Taylor, Tereshchenko et al., 2020). Dans les écoles secondaires, la composition des classes de niveau s’organise au départ des résultats des tests nationaux standardisés, des examens propres à l’école, du jugement des enseignants ou encore du transfert des informations issues des écoles primaires (Ireson & Hallam, 2001 ; Muijs & Dunne, 2010). En Angleterre, la pratique la plus fréquente est celle du « setting », dans laquelle le regroupement des élèves diffère selon la matière : un élève pourra être placé dans la classe des « meilleurs élèves » en mathématiques et en même temps dans la classe des « moins bons élèves » en anglais. On trouve également la pratique du « streaming », dans laquelle les groupes sont constitués selon l’aptitude des élèves dans une ou deux matières, puis généralisés aux autres matières. Ainsi, les élèves qui ont été jugés « très bons » (par exemple selon les résultats de tests nationaux en mathématiques et anglais) sont rassemblés dans le même groupe pour toutes leurs matières.

7Aux États-Unis, l’objectif d’homogénéité des compétences préside également à la création de regroupements d’élèves (Oakes, 2005). La constitution de classes de niveau dans l’enseignement de l’anglais et des mathématiques a augmenté ces dernières années (Loveless, 2013). Les pratiques de regroupement des élèves selon l’aptitude y sont connues sous le nom de « tracking », terme propre au contexte nord-américain mais de plus en plus présent dans les publications académiques internationales. Ce terme peut désigner les pratiques de regroupement d’élèves selon l’aptitude, entre établissements ou par la constitution de classes de niveau au sein d’un même établissement. Pour clarifier cette distinction importante, Chmielewski (2014) appelle la pratique de constitution de classes de niveau dans un établissement « course-by-course-tracking ». Elle utilise cette spécification pour montrer la comparabilité et les effets de ces pratiques dans une étude internationale basée sur les données PISA.

8La multitude des termes désignant les différentes pratiques de constitution de classes de niveau peut compromettre la comparaison des résultats de recherche sur le plan international. Qu’il s’agisse de tracking, de streaming ou encore de setting, le fil rouge commun aux pratiques d’homogénéisation des classes par l’aptitude scolaire tient dans l’attente d’effets positifs sur les résultats académiques des élèves et sur les conditions pédagogiques (Kulik & Kulik, 1982 ; Hallinan & Sorenson, 1987 ; Cahan, Linchevski, Ygra et al., 1996). Quelques études ont en effet trouvé des effets positifs sur les résultats des élèves placés dans les classes de niveau plus élevé (Kulik & Kulik, 1982 ; Ireson & Hallam, 2001). Le mouvement inverse se produit dans les classes de niveau plus faible (Boaler & Wiliam, 2001 ; Burris & Welner, 2005). Des études plus récentes suggèrent même qu’il n’existe aucun effet positif sur les résultats des élèves, quel que soit le niveau présumé de la classe, ou que cet effet est marginal (Higgins, Katsipataki, Coleman et al., 2016 ; Steenbergen-Hu, Makel & Olszewski-Kubilius, 2016).

9Dans le contexte français, l’instauration en 1975 du collège unique marque la mise à distance du principe d’homogénéité et interdit effectivement la constitution de classes de niveau. Malgré l’abolition officielle de cette pratique, plusieurs travaux ont souligné le maintien d’une répartition non aléatoire des élèves dans les classes (Duru-Bellat & Mingat, 1997 ; Payet, 1997), contribuant aux écarts de progression des élèves à l’école primaire (Davezies, 2005) puis au collège (Duru-Bellat & Mingat, 1997). Ces répartitions s’apparentent à des classes de niveau qui peuvent se constituer à travers l’offre de choix des langues (Duru-Bellat, 2014 ; Riegert & Ly, 2015) mais aussi à travers l’affectation des élèves dans les classes, affectation fondée sur le jugement des enseignants ou sur un ensemble de critères plus opaques (Payet, 1997). Une fois constituées, ces classes de niveau peuvent avoir des effets significatifs sur les expériences et les progrès scolaires des élèves à travers une combinaison de facteurs, incluant les effets-pairs, les exigences et attentes des enseignants et l’étiquetage des élèves selon leur « classement » dans la hiérarchie des classes de niveau (Duru-Bellat, Le Bastard-Landrier, Piquée et al., 2004 ; Bressoux, 2016 ; Deauvieau & Terrail, 2020). Cette combinaison de facteurs peut expliquer l’importance de l’effet-classe au-delà de l’effet-établissement dans les résultats des élèves (Bressoux, 2016) ainsi que dans leurs attitudes (Grisay, 1997).

10Les résultats de ces recherches soulignent les parallèles que l’on peut établir entre les pratiques françaises de constitution « indirecte » de classes de niveau et les pratiques anglo-saxonnes de setting, streaming et tracking. Que l’on se place à l’échelle des établissements ou à celle du système éducatif, ces dernières s’appliquent d’une façon relativement plus transparente que les pratiques de classes de niveau en France. L’opacité de ces pratiques dans les écoles françaises les rend invisibles aux yeux du grand public et complexes à saisir pour la recherche. Une des difficultés importantes est liée au sens donné au concept d’hétérogénéité des élèves dans la politique éducative et les dispositifs pédagogiques.

11Si, dans le contexte français, l’hétérogénéité s’entend à la fois au prisme des aptitudes scolaires et des milieux socio-économiques des différents élèves, les débats anglo-saxons l’associent uniquement aux aptitudes scolaires des élèves. Les débats sur l’hétérogénéité socio-économique des classes se réfèrent plutôt au « social mixing » ou aux « socio-economic differentials ». En Angleterre, la prédominance de la constitution de classes de niveau pour l’enseignement des matières-clés comme l’anglais et les mathématiques fait de l’hétérogénéité liée aux écarts d’aptitudes académiques des élèves un objet de recherche concret et réel.

12Le principe d’égalité est primordial dans la politique éducative française, et l’hétérogénéité des élèves, qu’elle soit socio-économique ou liée aux aptitudes, reste une thématique très sensible. En comparaison, en France, les classes de niveau représentent un objet de recherche plus flou. Néanmoins, les résultats des recherches françaises dévoilent des pratiques de constitution de « bonnes » classes pour attirer les « bons » élèves, notamment issus des milieux favorisés (van Zanten, 2001), et mettent en lumière l’importance donnée au jugement des enseignants concernant les attitudes des élèves face à l’école et aux conditions d’enseignement (Payet, 1997 ; Leroy-Audouin & Suchaut, 2005) en vue de la répartition dans les classes. Dans ces pratiques de regroupement, l’aptitude des élèves est utilisée comme un argument pour permettre une répartition plus hétérogène ou au contraire plus homogène des effectifs (Leroy-Audouin & Suchaut, 2005). Le débat sur la mise en œuvre de pratiques pédagogiques devant permettre d’appréhender l’hétérogénéité des élèves est complexifié par la crainte que certaines formes de différenciation se transforment en individualisation discriminante de l’enseignement et des apprentissages, et contreviennent ainsi au principe d’égalité.

13Avant de terminer cette discussion sur la terminologie internationale liée aux classes de niveau, il est aussi pertinent de rappeler que les classes de niveau se démarquent des groupes de besoin. Les groupes de besoin se distinguent des classes de niveau surtout par leur caractère temporaire (Meirieu, 1985). Les enseignants peuvent constituer de tels groupes pour mieux répondre aux besoins particuliers des élèves sur une courte période, pas pour toute l’année scolaire. L’idée de formation de groupes de besoin n’est pas non plus nécessairement liée à l’aptitude perçue des élèves mais peut relever du développement des connaissances ou des compétences spécifiques dans une matière.

Données et méthode : l’enquête Best Practice in Grouping Students

14L’enquête Best Practice in Grouping Students a été financée par l’Education Endownment Fund entre 2014 et 2018 et menée par une équipe de recherche composée de chercheurs de l’UCL Institute of Education et de la Queen’s University Belfast. Le but de l’enquête était d’étudier les pratiques liées à la constitution de classes pour l’enseignement de l’anglais et des mathématiques (classes de niveau ou classes hétérogènes) dans les écoles secondaires en Angleterre ainsi que leur potentiel impact sur les expériences de scolarisation des élèves (voir Francis, Archer, Hodgen et al., 2017 pour plus d’informations sur les objectifs de l’étude). Cet article présente les résultats de la partie de l’étude spécifique aux classes de niveau.

15L’enquête a utilisé des méthodes mixtes (données administratives, questionnaires, entretiens et focus-groups) pour suivre, dans 139 établissements anglais, les apprentissages et les expériences scolaires des élèves au cours de leurs première et deuxième années d’école secondaire. Les établissements ont été sélectionnés par le biais de la publicité faite dans des publications professionnelles et grâce au réseau de directions d’établissements scolaires (voir Taylor, Francis, Archer et al., 2017 pour plus de détails). L’anglais et les mathématiques ont été choisis parce qu’ils occupent une place centrale dans les programmes nationaux, et sont relativement différents quant à leurs contenus et aux pédagogies utilisées.

  • 1 Le tableau 1 en annexe récapitule la structure de l’échantillon des élèves, et le tableau 2 récapi (...)

16Plus de 13 000 élèves et près de 600 enseignants1 ont répondu aux questionnaires en ligne au début de la première année et à la fin de la deuxième année de l’étude. Des tests de performance en mathématiques et en anglais ont été administrés aux élèves et complétés en ligne à l’école, également au début de la première et à la fin de la deuxième année. Les questionnaires se sont en partie appuyés sur les questionnaires développés par Ireson et Hallam (2001) dans leur recherche sur les classes de niveau en Angleterre. De nouvelles questions ont été ajoutées, par exemple pour identifier les pratiques spécifiques de la constitution des classes, les critères d’affectation des élèves et la pédagogie mise en œuvre par les enseignants. Les questionnaires ont fait l’objet d’un essai pilote avec un groupe d’élèves et d’enseignants.

17Le questionnaire destiné aux élèves mesurait leurs attitudes et expériences par rapport à la pratique de constitution de classes dans leur école ainsi que leur confiance en soi. Le questionnaire incluait aussi quelques questions sociodémographiques. Ces questions (portant par exemple sur le métier des parents et leur niveau d’éducation) et les tests de performance ont été construits pour mesurer les différences en termes de caractéristiques sociodémographiques et de résultats scolaires antérieurs.

18Dix écoles ont été sélectionnées pour participer à la collecte de données qualitatives (entretiens avec des enseignants et focus-groups avec les élèves) afin d’approfondir les données provenant des questionnaires et de mieux comprendre l’attitude des élèves et des enseignants à l’égard de différentes pratiques de constitution des classes. L’échantillon d’écoles pour la collecte de données qualitatives est réparti dans toute l’Angleterre. Il se caractérise par une diversité dans la qualité de l’enseignement telle que jugée par l’Ofsted (Office de l’inspection des écoles). Au total, 246 élèves et 54 enseignants ont été interviewés. Les entretiens semi-directifs individuels avec les enseignants ont duré en moyenne 40 minutes. Les enseignants ont été invités à parler de la manière dont s’organisent les regroupements d’élèves dans leur école et à décrire leur expérience d’enseignement dans leurs classes. Les focus-groups avec les élèves étaient également semi-directifs et ont duré en moyenne 45 minutes. Les élèves ont été invités à parler de leurs expériences concernant l’apprentissage et de l’enseignement en anglais et mathématiques dans leur classe. Les enseignants et les élèves ont été informés que leur participation était volontaire et que les données resteraient confidentielles.

19Un autre élément important de l’enquête était de tester une « intervention » pilote pendant deux ans. Une « intervention » était introduite dans la moitié des écoles ayant des classes de niveau en anglais et/ou en mathématiques avec le but de limiter les effets négatifs présumés des classes de niveau. Cette « intervention » a été évaluée de manière indépendante au moyen d’un essai contrôlé randomisé permettant de déterminer si « l’intervention » a eu un effet sur les résultats et la confiance en soi des élèves qui y ont participé. Pour « l’intervention », les écoles s’étaient inscrites et réparties au hasard dans le groupe témoin « business as usual ». En d’autres termes, ces écoles se sont conformées à leurs pratiques habituelles dans la constitution de classes de niveau, sans apporter de changement. Les écoles du groupe « intervention » ont dû respecter un ensemble de pratiques préconisées par l’enquête ; notamment constituer au maximum quatre niveaux de classes, éviter d’affecter les enseignants les moins expérimentés dans les classes de niveau les plus faibles et permettre aux élèves de changer de classe à des moments précis de l’année selon leurs résultats dans la matière2.

20Pour les besoins de l’analyse, les données relatives à la constitution de classes de niveau (nombre de classes et affectation des élèves) ont été catégorisées en trois groupes distincts : classes de niveau plus élevé, niveau moyen et niveau plus faible. Par exemple, pour une école avec cinq classes de niveau en mathématiques, la classe de niveau plus élevé était catégorisée en tant que classe 1, les trois classes de niveau du milieu en tant que classe 2 et la classe de niveau plus faible en tant que classe 3.

Résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students

21Les principaux résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students sont ici présentés en trois temps : 1) composition définitive des classes de niveau ; 2) confiance en soi et expériences scolaires ; 3) organisation de l’enseignement, de l’apprentissage et de la pédagogie. Cette synthèse des résultats met en valeur les aspects les plus pertinents pour le contexte français : elle ne permet pas d’inclure des données plus complètes. Les lecteurs souhaitant plus de détails sur différents aspects sont invités à consulter les publications anglophones de l’enquête indiquées dans chaque partie.

Composition définitive des classes

22Les résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students confirment que la constitution de classes de niveau selon l’aptitude des élèves a tendance à créer des classes plus homogènes en termes de composition sociale.

  • 3 Classe de niveau en anglais : v2 = 41,1, d.f. = 4, p  0,001 ; classe de niveau en mathématiques : (...)
  • 4 Classe de niveau en anglais : v2 = 148, d.f. = 2, p  0.001 ; classe de niveau en mathématiques : v (...)

23En effet, dans les classes de niveau plus faible, les élèves issus de milieux défavorisés étaient surreprésentés. Les élèves issus de la classe ouvrière3 et ceux ayant droit à des repas gratuits à l’école4 – indicateur des élèves issus des milieux défavorisés – avaient statistiquement plus de chances de faire partie des classes de niveau moyen et plus faible (Archer, Francis, Miller et al., 2018).

24Ces résultats confirment les résultats des recherches anglaises antérieures démontrant que la composition définitive des classes de niveau est fortement liée à la classe sociale et à d’autres indicateurs socio-économiques (Ball, 1981 ; Muijs & Dunne, 2010 ; Kutnick, Sebba, Blatchford et al., 2005). Muijs et Dunne (2010) par exemple ont montré que l’aptitude scolaire n’est qu’un facteur parmi d’autres du placement d’un élève dans une classe de niveau particulière, à côté de facteurs potentiellement plus puissants comme la classe sociale. Ces résultats mettent en question la tradition anglo-saxonne de constitution des classes de niveau et la place qu’y jouent les aptitudes scolaires des élèves, censées en être le critère central.

  • 5 v2 = 27,7, d.f. = 2, p < 0,001.
  • 6 v2 = 43,6, d.f. = 2, p < 0,001.
  • 7 Classe de niveau en anglais : v2 = 23,8, d.f. = 6, p = 0,001 ; classe de niveau en mathématiques : (...)

25Dans les écoles de l’échantillon, la constitution de classes de niveau semble aussi renforcer les inégalités scolaires entre les sexes et selon l’origine ethnique (Archer, Francis, Miller et al., 2018). Une proportion statistiquement plus élevée de garçons a été placée dans les groupes de niveau plus faible en anglais (60 % de garçons contre 40 % de filles)5 et plus de garçons ont été placés dans les groupes de niveau plus élevé en mathématiques (56 % de garçons contre 44 % de filles)6. Les élèves blancs étaient davantage susceptibles d’être placés dans les groupes de niveau plus élevé en anglais (81 %) et en mathématiques (77 %), tandis que les élèves noirs et d’origine mixte (ainsi que les élèves asiatiques dans le cas de l’anglais) étaient davantage susceptibles d’être placés dans les groupes de niveau plus faible dans les deux matières7. Ces résultats se situent dans la continuité des recherches internationales soulignant les tendances inégalitaires inhérentes à la constitution des classes de niveau en matière liées à l’origine ethnique des élèves, notamment la plus forte probabilité de placement d’élèves issus des populations minoritaires dans des classes de niveau plus faible (Gillborn & Youdell, 2000 ; Hallinan, 1996 ; Modica, 2015 ; Shaw, Menzies, Bernandes et al., 2016). Les résultats concernant les inégalités scolaires entre les sexes convergent avec quelques recherches précédentes (Campbell, 2014 ; Hallam & Parsons, 2013), même si d’autres études n’ont pas trouvé de lien entre la constitution des classes de niveau et le genre (Muijs & Dunne, 2010).

  • 8 8 271 élèves dans 48 écoles.
  • 9 15,7 % dans des classes de niveau plus élevé, 15,5 % dans des classes de niveau plus bas que celui (...)
  • 10 Odds ratios estimés à l’aide de modèles de régression logistique binaire.

26Pour éclairer la dynamique existant entre la constitution des classes de niveau et les différentes inégalités scolaires potentielles (notamment les effets de classe sociale, genre et origine ethnique), une analyse approfondie utilisant des données liées aux élèves placés dans un groupe différent de celui qui leur aurait été affecté selon leurs aptitudes scolaires a été effectuée. Pour établir la nature des pratiques « habituelles » de constitution des classes de niveau, seules ont été incluses les données issues des écoles du groupe témoin. L’analyse s’est focalisée sur la répartition des élèves dans les classes de niveau en mathématiques8 (voir Connolly, Taylor, Francis et al., 2019 pour plus de détails sur la méthodologie de cette analyse). L’analyse montre qu’une proportion significative des élèves (31 %) a été placée dans un groupe différent de celui qui aurait été constitué en s’appuyant seulement sur les résultats obtenus dans des examens nationaux de fin d’école primaire (Connolly, Taylor, Francis et al., 2019). Certains élèves ont été placés dans des classes de niveau plus élevé et d’autres dans des classes de niveau plus faible9. L’analyse de ces cas n’a pas montré de lien entre le statut socio-économique et l’affectation erronée, contrairement à des conclusions de recherches antérieures (par exemple, Muijs & Dunne, 2010). Cependant, la recherche a mis en évidence que la répartition des élèves entre les classes de niveau entretenait une relation très préoccupante avec l’origine ethnique et le genre des élèves (Connolly, Taylor, Francis et al., 2019). L’enquête montre que les élèves noirs étaient 2,43 fois plus et les élèves asiatiques 1,65 fois plus susceptibles d’être placés dans une classe de niveau plus faible en mathématiques que les élèves blancs que si la classe leur avait été affectée selon leurs seuls résultats académiques10. Au contraire, les élèves blancs étaient 2,09 fois plus susceptibles que les élèves noirs et 1,72 fois plus que les élèves asiatiques de se voir attribuer une classe de mathématiques de niveau supérieur que si la classe leur avait été affectée selon leurs seuls résultats académiques. Les filles étaient 1,53 fois plus susceptibles que les garçons de se trouver dans un groupe de niveau plus faible en mathématiques que le niveau attendu selon leurs résultats.

27Ainsi, les résultats de l’enquête témoignent de la difficulté de l’application du principe de constitution des classes de niveau selon les résultats académiques. Ces résultats suggèrent fortement que la mise en place des classes de niveau en première année de l’école secondaire exacerbe les inégalités en termes de genre et d’origine ethnique. La surreprésentation des élèves issus des milieux défavorisés dans des classes de niveau plus faible est aussi confirmée bien qu’aucun lien direct entre une affectation erronée dans un groupe et la classe sociale n’ait été détecté.

Confiance en soi et expériences scolaires

28Les résultats de la recherche suggèrent que les pratiques de constitution de classes de niveau peuvent avoir un impact significatif pour les élèves selon leur affectation dans la hiérarchie académique établie par ces pratiques. L’enquête a notamment étudié la perspective des élèves selon leurs expériences scolaires et l’évolution de leur confiance en eux.

Confiance en soi : résultats des données quantitatives

29L’analyse des données quantitatives suggère qu’il existe des relations significatives entre la confiance en soi des élèves et leur affectation dans une classe de niveau (Francis, Connolly, Archer et al., 2017). Ces relations ont émergé des données mesurant l’aptitude scolaire des élèves, le genre et les caractéristiques socio-économiques. Ces résultats soutiennent les conclusions des études internationales précédentes qui ont trouvé une relation significative entre la constitution de classes de niveau et la confiance en soi (Dunne & Gazeley, 2008 ; Ireson & Hallam, 2001 ; Chmielewski, Dumont & Trautwein, 2013). Dunne et Gazeley (2008) par exemple ont mobilisé des variables de contrôle diverses (l’origine socio-économique, la réussite scolaire, le genre) et montré que les élèves placés dans des classes de niveau plus élevé ont tendance à avoir une confiance en soi plus élevée que leurs camarades placés dans des classes de niveau plus faible.

  • 11 Le tableau 3 en annexe indique la fiabilité et les statistiques récapitulatives des mesures de la (...)
  • 12 Analyse utilisant des modèles multiniveaux (étudiants = niveau 1, classes de niveau = niveau 2, éc (...)

30Une découverte importante de l’enquête consiste dans l’existence de ces relations pour deux mesures différentes de la confiance en soi : la confiance en soi dans les matières (en mathématiques et en anglais), mais aussi la confiance en soi en un sens plus global11 (voir Francis, Connolly, Archer et al., 2017 pour une discussion de ces deux mesures de la confiance en soi). Les élèves des classes de niveau plus élevé éprouvaient une augmentation significative de leur confiance en soi dans la matière (mathématiques ou anglais) en comparaison aux élèves regroupés dans les classes de niveau moyen12. Une évolution similaire dans le domaine de la confiance en soi générale a été aussi observée de la première année à la deuxième année (Francis, Craig, Hodgen et al., 2020). Au contraire, les élèves placés dans les classes de niveau faible en mathématiques enregistrent une baisse significative de leur confiance en soi dans la matière et de confiance en soi en général par rapport à la classe de niveau moyen. Les élèves dans les classes de niveau plus faible en anglais éprouvent une tendance non significative à la baisse de confiance en soi dans la matière et de confiance en soi en général.

Expériences scolaires : résultats des données qualitatives

31Les résultats des focus-groups avec les élèves suggèrent qu’en fonction de leur placement dans la hiérarchie des classes de niveau, les élèves mobiliseraient des discours différents pour décrire leur expérience scolaire (Archer, Francis, Miller et al., 2018). Les élèves qui se trouvent dans les classes de niveau plus élevé décrivent leur expérience scolaire en se sentant « fiers », « confiants » et « supérieurs ». La majorité de ces élèves étaient aussi conscients que leurs camarades qui se trouvaient dans les classes de niveau plus faible pourraient se sentir moins contents quant à leur placement. La majorité des élèves de classes de niveau plus élevé ont considéré qu’ils méritaient leur position, que celle-ci était « naturelle » et « méritée ». Ils ont défendu la légitimité d’établir des classes de niveau en s’appuyant sur des discours relatifs au talent, aux capacités et à la méritocratie. Selon ces étudiants, la constitution des classes de niveau n’est pas une pratique injuste qui produit des résultats inégaux. Il s’agit plutôt d’une approche de « bon sens ».

  • 13 Les prénoms des élèves et des enseignants ont été anonymés.

32À l’inverse, les élèves regroupés dans les classes de niveau plus faible semblaient avoir des expériences plus négatives que leurs camarades des classes de niveau plus élevé. La citation de Kevin13, un garçon de la classe ouvrière, relevant du « set » 4 (classe de niveau la plus faible dans son école) en anglais et en mathématiques, rend compte de l’attitude des élèves qui semblent résignés à l’inévitabilité de rester cantonnés à des classes de faible niveau :

J’ai entendu des gens, ils ont tendance à paniquer à l’idée d’être déplacés d’une classe de niveau supérieur à une classe de niveau plus faible. Ils sont même jaloux si les gens sont déplacés d’un niveau à l’autre. Moi j’ai envie de leur dire « Ne t’inquiète pas pour ça. Il suffit de s’y habituer ».

33Ces sentiments évoquent une acceptation des normes de répartition des élèves dans des classes différentes et suggèrent une internalisation de sa place dans la hiérarchie des valeurs et du potentiel académiques.

La prophétie boule-de-neige

34Ensemble, ces résultats issus de données quantitatives et qualitatives soutiennent les conclusions des études internationales précédentes sur les effets potentiellement significatifs des pratiques de constitution de classes de niveau sur les expériences scolaires et l’évolution de la confiance en soi. Ces effets ont été expliqués par l’hypothèse de la prophétie auto-réalisatrice qui se produit au travers de l’étiquetage des élèves selon leur classe de niveau (Oakes, 2005 ; Ireson & Hallam, 2001 ; Rubin, 2008 ; Watanabe, 2008). Dans ce processus, les attentes et les exigences des enseignants vis-à-vis des étudiants peuvent contribuer à l’attribution de l’étiquette « mauvais élèves » aux élèves des classes de niveau plus faible et de l’étiquette « bons élèves » aux élèves des classes de niveau plus élevé. L’idée de capacités innées est évidente dans l’association du potentiel scolaire à l’affectation dans les classes de niveau (Oakes, Wells, Jones et al., 1997 ; Hart, Dixon, Drummond et al., 2004). Au-delà des attentes et des exigences des enseignants et des approches pédagogiques différentes (voir partie suivante), plusieurs facteurs liés aux interactions entre les élèves, à leur perception de soi et à leurs aspirations scolaires peuvent contribuer à la création d’une prophétie auto-réalisatrice chez les élèves placés dans des classes de faible niveau et augmenter leur risque d’obtenir des résultats scolaires inférieurs (Oakes, 2005 ; Hart, Dixon, Drummond et al., 2004 ; Rubin, 2008 ; Watanabe, 2008).

35L’importance de l’hypothèse de la prophétie auto-réalisatrice dans le contexte scolaire, d’abord proposée par Rosenthal et Jacobson (1968), a été contestée par des chercheurs remarquant que les résultats scolaires qui peuvent être attribués aux attentes et exigences différentes des enseignants restent modestes et transitoires (Jussim & Harber, 2005). Ces études sur l’hypothèse de la prophétie auto-réalisatrice dans le domaine de la psychologie ont d’ailleurs seulement mis l’accent sur les effets des attentes et des exigences des enseignants vis-à-vis des étudiants, tout en négligeant les autres facteurs de la prophétie auto-réalisatrice (par exemple les effets des interactions entre les élèves et la pédagogie).

36D’autres chercheurs ont souligné la dimension relative de la confiance en soi des élèves qui dépend autant de la composition du groupe auquel ils appartiennent que de leur aptitude académique. Les études démontrant le « Big-fish-little-pond effect » suggèrent que la confiance en soi d’un élève dépend du point d’où s’effectue sa comparaison à d’autres. Intervient notamment le fait que la confiance en soi des élèves d’aptitude scolaire similaire est plus élevée chez les élèves scolarisés dans un établissement où la moyenne de l’aptitude académique des élèves est plus faible (Marsh & Parker, 1984 ; Marsh, Seaton, Trautwein et al., 2008). Les résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students suggèrent néanmoins que les effets liés à la constitution de classes de niveau au sein d’un établissement scolaire sont plus importants.

37Pour développer la conceptualisation de la prophétie auto-réalisatrice, une re-conceptualisation, celle de la « prophétie boule-de-neige » (Snowball prophecy), est proposée par les chercheurs de l’enquête (Francis, Craig, Hodgen et al., 2020). Cette conceptualisation se concentre sur l’augmentation des écarts au fil du temps entre les classes de niveau plus élevé et les classes de niveau plus bas. La métaphore de la boule-de-neige illustre comment les aspects pédagogiques et les interactions entre élèves peuvent s’ajouter couche après couche et créer des écarts importants dans les expériences d’apprentissage et dans la réussite scolaire des élèves situés dans des classes de niveau différentes.

Organisation de l’enseignement, de l’apprentissage et de la pédagogie

38Une autre partie importante des résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students concerne l’organisation de l’enseignement, de l’apprentissage et de la pédagogie dans des classes de niveau différent. Les pratiques de classes de niveau sont souvent légitimées par l’idée que la constitution de classes plus homogènes se fondant sur l’aptitude des élèves est censée permettre un enseignement mieux ciblé et plus efficace (Hallinan & Sorenson, 1987 ; Cahan, Linchevski, Ygra et al., 1996). Néanmoins, les recherches internationales ont démontré que l’organisation de classes de niveau produit, en fonction de la position qu’y occupent les élèves, une différenciation inégalitaire de la qualité d’apprentissage et d’enseignement (Oakes, Wells, Jones et al., 1997 ; Ireson & Hallam, 2001 ; Hart, Dixon, Drummond et al., 2004).

39Les données qualitatives de l’enquête témoignent des efforts exercés par des écoles et des enseignants pour assurer la parité et la qualité de l’enseignement dans chaque classe indépendamment du niveau (Mazenod, Francis, Archer et al., 2019). Un professeur des écoles interviewé (Anthony, école U) remarque par exemple qu’il est essentiel d’assurer une « bonne qualité de l’enseignement » dans des classes de niveau plus faible. Un autre professeur des écoles (Dev, école T) suggère que l’enseignement dans des classes de niveau plus faible devrait être assuré par « un enseignant reconnu comme le meilleur enseignant » au sein de l’établissement. Cela signalerait à tous les élèves et enseignants l’importance accordée à l’apprentissage et à l’enseignement dans ces classes.

  • 14 Voir le tableau 4 en annexe.

40L’ensemble des données qualitatives et quantitatives suggèrent néanmoins que ces efforts restent insuffisants. Les données quantitatives suggèrent un biais d’allocation des enseignants dans les classes de niveau : les enseignants hautement qualifiés dans leur matière avaient moins de chance d’être affectés à des classes de niveau faible (Francis, Archer, Mazenod et al., 2019)14. Les résultats des questionnaires auprès des enseignants montrent clairement que la grande majorité (70 %) des enseignants adaptent leur pédagogie selon le niveau de la classe et 74 % considèrent que les élèves dans des classes de niveau plus élevé devraient aborder plus de contenus en détail que les élèves des autres classes (Mazenod, Francis, Archer et al., 2019). Une majorité (61 %) a constaté que leur pédagogie dans des classes de niveau plus faible inclut plus de répétition que dans d’autres classes de niveau et 64 % des enseignants attendent plus d’autonomie et de travail indépendant de la part des élèves dans des classes de niveau plus élevé (Mazenod, Francis, Archer et al., 2019).

41En matière de discipline et d’exigences scolaires, les élèves ont assez unanimement souligné le caractère plus tolérant et détendu des classes de faible niveau, impliquant une « alimentation à la cuillère » et un moindre investissement dans l’autonomie des élèves (Archer, Francis, Miller et al., 2018 ; Mazenod, Francis, Archer et al., 2019). Ces différences dans la pédagogie et dans l’environnement d’apprentissage entre les différentes classes de niveau ont été résumées par un professeur des écoles frustré par les pratiques de constitution des classes de niveau dans son école :

Certains de nos élèves de la classe 6 [classe de niveau le plus bas] pourraient facilement être dans la classe 4, mais si tu es affecté dans la classe 6, tu es traité comme un élève de la classe 6, et une grande partie du travail que tu fais est répétitif et terne, et ne te fait pas avancer (Max, école S).

42Ces éléments se situent dans la continuité des résultats mis en lumière par les recherches internationales. Ces dernières ont notamment souligné la tendance des classes de niveau à créer des conditions d’apprentissage moins avantageuses dans les classes les plus faibles que dans les classes les plus élevées, même si l’intention de départ est de rendre l’apprentissage plus adapté et efficace (Rosenholtz & Simpson, 1984 ; Oakes, 2005 ; Wiliam & Bartholomew, 2004). Ces conditions peuvent contribuer à la prophétie auto-réalisatrice déjà évoquée dans la partie précédente des résultats.

Discussion

43En continuité avec des recherches anglaises précédentes (Ireson & Hallam, 2001 ; Hart, Dixon, Drummond et al., 2004 ; Muijs & Dunne, 2010), les résultats de l’enquête Best Practice in Grouping Students suggèrent que les pratiques de constitution de classes de niveau contribuent aux inégalités scolaires. Les écoles étudiées semblent avoir du mal à établir des classes de niveau selon la manière dont elles ont été conçues. Les résultats de l’enquête mettent fondamentalement en question la cohérence de ces pratiques du fait qu’un tiers des élèves se trouvent dans une classe de niveau différente de celle attendue selon l’aptitude scolaire attestée (Connolly, Taylor, Francis et al., 2019). Les chercheurs de l’enquête établissent effectivement que la constitution de classes de niveau est un processus par lequel la reproduction sociale et culturelle des inégalités et les relations de domination sont mises en place dans les écoles anglaises (Archer, Francis, Miller et al., 2018). Cette lecture est aussi pertinente pour le contexte français car un lien fort entre les caractéristiques socio-économiques et la composition indirecte de classes de niveau a été identifié dans les collèges (Duru-Bellat, 2014 ; Riegert & Ly, 2015).

44Également en continuité avec des recherches précédentes (Oakes, 2005 ; Hart, Dixon, Drummond et al., 2004), les résultats de l’enquête suggèrent que la constitution de classes de niveau désavantage doublement les élèves qui ont le plus besoin de soutien (Francis, Archer, Hodgen et al., 2017). Ces pratiques ont des effets importants sur la confiance en soi des élèves. Les résultats suggèrent notamment que l’écart dans la confiance en soi entre les élèves dans des classes de niveau plus élevé et les élèves dans des classes de niveau plus faible en mathématiques augmente au fil du temps (Francis, Craig, Hodgen et al., 2020). D’autres éléments, comme l’adaptation de l’apprentissage, de l’enseignement et des exigences professorales au sein des différentes classes de niveau, renforcent les écarts en matière de confiance en soi au fil du temps (Francis, Craig, Hodgen et al., 2020 ; Mazenod, Hodgen, Francis et al., 2019). Ensemble, ces éléments peuvent contribuer à la prophétie auto-réalisatrice. Pour éclairer le processus d’étiquetage lié à la constitution de classes de niveau, les chercheurs de l’enquête proposent une nouvelle conceptualisation de la prophétie auto-réalisatrice : la prophétie boule-de-neige (Francis, Craig, Hodgen et al., 2020). Cette nouvelle conceptualisation met en avant la temporalité de ces processus dans lesquels l’étiquetage et l’internalisation des attentes des enseignants par les élèves influencent les aspirations des élèves eux-mêmes à court terme, entraînant une dynamique négative sur les résultats et aspirations à moyen et long terme.

45Des différences dans les aspirations et dans les résultats scolaires des élèves selon les classes de niveau ont aussi été détectées en France (Duru-Bellat, 2014). Comme cela a déjà été évoqué, la recherche visant à étudier la constitution de classes de niveau est potentiellement plus difficile à mettre en place dans les écoles françaises car les pratiques de constitution de classes sont souvent moins transparentes et plus ambiguës. Néanmoins, un effet cumulatif important d’inégalités sociales de réussite au fil de temps, comparable à la prophétie boule-de-neige, est aussi constaté en France (Duru-Bellat, 2002 ; Broccolichi & Sinthon, 2011).

46Si les résultats de l’enquête sont convaincants concernant les classes de niveau en mathématiques et le lien avec la confiance en soi, le cas des classes de niveau en anglais reste à creuser. Des analyses identiques ont été complétées, soit pour les données à propos des classes de niveau en mathématiques, soit pour les données à propos des classes de niveau en anglais. Dans ces dernières, un écart initial dans la confiance en soi entre les classes de niveau a été détecté mais cet écart n’a pas augmenté au fil du temps. Une explication de cette différence pourrait être liée aux didactiques propres à ces deux matières clés.

47Les résultats de l’enquête suscitent des questions fondamentales liées à la pédagogie et aux conditions d’apprentissage dans des classes de niveau différentes. La différenciation de l’enseignement et des apprentissages selon les besoins des élèves favorise la réussite de tous les apprenants (Tomlinson, 2008). Quand la différenciation de l’enseignement et des apprentissages devient structurelle, ce qu’analyse Gamoran (2010) dans le cas de la constitution de classes de niveau, la différenciation de la pédagogie, les attentes et les exigences des enseignants vis-à-vis des élèves peuvent contrarier la réussite de tous.

48Pourquoi donc ces pratiques persistent-elles en Angleterre et ailleurs ? Jeannie Oakes et ses collègues (1997) suggèrent que souvent les enseignants ressentent le besoin de classer ou trier les élèves d’une façon ou d’une autre pour mieux maîtriser l’enseignement et l’apprentissage. La constitution de classes de niveau pourrait donc être conçue comme la solution à un besoin potentiellement universel des enseignants de classer ou trier des élèves pour mieux organiser leur enseignement.

49La deuxième explication est liée au manque d’expériences alternatives. Le volet qualitatif de l’enquête suggère qu’en Angleterre, la plupart des enseignants en mathématiques ne pourraient pas imaginer une autre façon d’enseigner les mathématiques dans les écoles secondaires qu’avec des classes de niveau. Pour ces enseignants, un bon enseignement, surtout en mathématiques, est inimaginable dans des classes hétérogènes, et ce, parce que la grande majorité des enseignants interviewés n’a jamais enseigné les mathématiques dans des classes hétérogènes. Dans ce contexte, ne pas constituer de classes de niveau en mathématiques serait prendre un grand risque (Taylor, Francis, Archer et al., 2017). La rareté des expériences de l’apprentissage et de l’enseignement en mathématiques en dehors du contexte de regroupement par aptitude peut donc expliquer la persistance de pratiques de classes de niveau, en tout cas pour cette matière. Les résultats de l’enquête qualitative suggèrent aussi que les enseignants et les écoles ont tendance à minimiser l’impact des classes de niveau sur les élèves malgré la preuve de certains effets négatifs (Francis, Connolly, Archer et al., 2017 ; Taylor, Francis, Archer et al., 2017).

50La persistance des pratiques de constitution des classes de niveau est aussi évidemment liée au contexte sociétal et culturel. Dans le contexte anglais marqué par la hiérarchie et la ségrégation par aptitude (Francis, Archer, Hodgen et al., 2017) et où la réussite scolaire est tenue pour l’objectif premier de l’éducation (Pring, 2013), la constitution de classes de niveau est construite comme pratique normale et naturelle. S’y ajoutent les effets de pressions politiques qui ont contribué à une forte compétition entre les écoles publiques. Prendre le risque de constituer des classes autrement devient alors une décision encore plus difficile (Taylor, Francis, Archer et al., 2017). Dans la compétition entre les écoles pour attirer les élèves, les écoles subissent la pression consistant à ne pas décevoir les parents appartenant à la classe moyenne, persuadés des bienfaits des classes de niveau.

51Les risques associés au changement du système et de la logique de regroupement des élèves ont été bien documentés dans la recherche américaine sur le « detracking » ces 25 dernières années. Ce champ de recherche en développement se concentre sur les expérimentations et expériences des écoles américaines qui ont tenté de changer leurs pratiques de constitution de classe de niveau (tracking) pour aller vers la constitution de classes hétérogènes. Les résultats mis en avant par ce champ de recherche suggèrent qu’il existe plusieurs types d’obstacles à surmonter dans le processus de changement, notamment des obstacles normatifs, politiques et techniques (Oakes, Wells, Jones et al., 1997 ; Gamoran, 2010). Les obstacles normatifs sont liés à la supposition d’une capacité académique innée de chaque élève et à la conviction que l’enseignement et l’apprentissage doivent être structurés autour de ces différentes capacités (Oakes, Wells, Jones et al., 1997 ; Yonezawa, Wells & Serna, 2002). Les obstacles politiques proviennent par exemple des intérêts particuliers des parents des élèves ayant de bons résultats scolaires et des enseignants ayant des préférences pour enseigner à des classes de niveau plus élevé (Oakes, Wells, Jones et al., 1997 ; Wells & Serna, 1996 ; Welner, 2001). L’obstacle potentiellement le plus important est lié aux compétences des enseignants à enseigner au sein de classes hétérogènes (Gamoran, 2010). Si ce dernier frein n’est pas levé, la probabilité de résoudre les obstacles normatifs et politiques est faible (Gamoran, 2010). L’acquisition par les enseignants de compétences et de techniques pour l’enseignement auprès de classes hétérogènes semble cruciale en matière de réussite du detracking. Gamoran (2010) estime que l’utilisation de techniques de différenciation dans les classes hétérogènes en vue de répondre aux besoins particuliers des élèves a permis d’identifier des cas pour lesquels le detracking a été une réussite.

  • 15 Voir en ligne : <https://www.ucl.ac.uk/ioe/departments-and-centres/departments/curriculum-pedagogy-and-assessment/student-grouping-study-investigating-impact-setting-and-mixed-attainment-grouping> (consulté le 23 juillet 2021).

52Malheureusement, l’enquête Best Practice in Grouping Students n’offre pas de solutions pour pallier les difficultés documentées par la recherche sur le detracking. Une partie de l’enquête a eu pour objet de tenter d’étudier la question de l’enseignement au sein de classes hétérogènes, mais le petit nombre d’écoles recrutées pour cette partie de la recherche (ce qui reflète la prédominance des classes de niveau dans le contexte anglais) n’a permis de produire que des débuts de résultats. Un nouveau volet en cours dans la continuité de l’enquête originale offrira potentiellement plus de résultats sur ces questions15. Entre temps, mener des études comparatives sur l’enseignement dans les classes hétérogènes – dans les systèmes éducatifs où ces pratiques prédominent – permettrait de repérer des pistes plus riches pour identifier les compétences et les techniques favorisant l’enseignement dans un tel contexte. Pour produire des résultats valables, il faudrait néanmoins clarifier et opérationnaliser des variables mesurant des dimensions différentes de l’hétérogénéité dans les classes, telles que mentionnées plus haut.

Conclusion

53Cet article a rassemblé les résultats de recherches internationales montrant la variété des pratiques de constitution de classes de niveau (setting, streaming et tracking) mais aussi leur leitmotiv : l’idéal de l’homogénéité d’aptitudes des élèves dans la classe. L’article se concentre sur les résultats d’une enquête récente en Angleterre sur les classes de niveau (setting) dans des écoles secondaires et explique pourquoi ces résultats sont également pertinents pour le contexte français.

54Les résultats montrent que la mise en place des classes de niveau exacerbe les inégalités existantes, surtout les inégalités liées au genre et à l’origine ethnique. Au travers de la « prophétie boule-de-neige », nouvelle conceptualisation de la prophétie auto-réalisatrice, les effets cumulatifs sur la confiance en soi des élèves (attentes des enseignants, différences dans l’enseignement et l’apprentissage et interactions entre élèves) peuvent au fil du temps augmenter les risques, pour les élèves des classes de niveau plus faible, d’obtenir des résultats scolaires inférieurs. Les résultats témoignent également des difficultés dans la mise en place des classes de niveau par les écoles et les enseignants lorsqu’ils entendent procéder strictement en fonction des résultats scolaires des élèves : un tiers des élèves a été affecté à une classe de niveau incorrecte si le critère considéré est celui de leurs résultats académiques précédents. Néanmoins, en Angleterre, les politiques d’éducation liées à la logique de compétition entre les écoles encouragent la constitution de classes de niveau, et les conditions culturelles peuvent d’ailleurs expliquer la persistance de ces pratiques.

55L’argument clé de cet article est qu’il est impératif en France de prendre en compte les résultats de ces recherches internationales menées sur la constitution de classes de niveau. Certaines pratiques de choix des matières dans les collèges peuvent créer de façon indirecte des classes de niveau par défaut ; des résultats de recherche récente en France (Riegert & Ly, 2015) suggèrent que les effets de cette constitution « indirecte » de classes de niveau sont similaires aux effets de constitution de classes de niveau en Angleterre.

56La recherche américaine sur les expériences des écoles ayant opté pour remplacer la constitution de classes de niveau par la constitution de classes hétérogènes continue à documenter les difficultés auxquelles sont confrontés les écoles et les enseignants dans ce changement de système. Ce qui paraît crucial pour une expérience réussie du retour à l’hétérogénéité, ce sont les compétences et l’expérience des enseignants dans un tel contexte. Ces compétences et expériences sont en fait importantes dans tout enseignement auprès de classes hétérogènes même dans des contextes éducatifs qui n’ont pas connu de façon explicite la prédominance de la constitution de classes de niveau. Les recherches internationales montrent clairement que la constitution de classes de niveau est une solution imparfaite pour gérer l’hétérogénéité des classes, solution ayant des effets souvent inéquitables. C’est pour cela que notre attention devrait se porter sur l’enseignement auprès des classes hétérogènes et qu’il faut chercher améliorer la préparation des enseignants pour ces classes lors de leur formation initiale et continue.

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Annexe

Annexe

Tableau 1. Caractéristiques de l’échantillon des élèves des écoles avec classes de niveau ayant répondu au questionnaire de la première année (Francis, Connoly, Archer et al., 2017)

Variable Catégorie Effectifs
Genre Garçons 6 095
Filles 5 451
Total 11 546
Statut socio-économique (selon l’activité professionnelle des parents la plus prestigieuse) Cadre 4 938
Intermédiaire 3 541
Ouvrier 1 721
Données manquantes 1 346
Total 11 546
Auto-identification des élèves selon les catégories ethniques suggérées Blanc 8 571
Asiatique 1 052
Noir 698
Origines mixtes 991
Autre 226
Données manquantes 8
Total 11 546
Nombre d’élèves dans les classes de mathématiques de niveau Plus élevé 3 264
Moyen 5 663
Plus faible 1 354
Pas de classe de niveau en mathématiques 1 265
Total 11 546
Nombre d’élèves dans les classes d’anglais de niveau Plus élevé 1 575
Moyen 2 798
Plus faible 745
Pas de classe de niveau en anglais 6 428
Total 11 546

Tableau 2. Caractéristiques de l’échantillon des enseignants ayant répondu au questionnaire de la première année

Variable Catégorie Effectifs
Genre Homme 212
Femme 374
Données manquantes 11
Total 597
Matière enseignée Anglais 175
Mathématiques 362
Autre 24
Données manquantes 36
Total 597

Tableau 3. Fiabilité et statistiques récapitulatives des mesures de la confiance en soi (Francis, Connoly, Archer et al., 2017)*

Échelle de la confiance en soi globale Alpha = 0,84
Moyenne : 25,22 ; écart-type : 3,94
Échelle de la confiance en soi en mathématiques Alpha = 0,88
Moyenne : 27,22 ; écart-type : 5,70
Échelle de la confiance en soi en anglais Alpha = 0,86
Moyenne : 26,54 ; écart-type : 5,88

Note : * : échelles avec un maximum de 35.

Tableau 4. Qualification la plus élevée de l’enseignant dans la matière enseignée selon la classe de niveau (Francis, Archer, Mazenod et al., 2019)

Niveau de qualification de l’enseignant dans la matière enseignée Classe de niveau plus élevé ou moyen Classe de niveau plus faible
Licence ou niveau plus élevé 99 (65 %) 17 (46 %)
Baccalauréat 45 (29 %) 15 (41 %)
Collège 9 (6 %) 5 (14 %)
Total 153 (100 %) 37 (100 %)
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Notes

1 Le tableau 1 en annexe récapitule la structure de l’échantillon des élèves, et le tableau 2 récapitule la structure de l’échantillon des enseignants.

2 Voir en ligne : <https://www.ucl.ac.uk/ioe/departments-and-centres/centres/best-practice-grouping-students> (consulté le 22 juillet 2021) pour plus de détails sur ces recommandations.

3 Classe de niveau en anglais : v2 = 41,1, d.f. = 4, p < 0,001 ; classe de niveau en mathématiques : v2 = 133, d.f. = 4, p < 0,001.

4 Classe de niveau en anglais : v2 = 148, d.f. = 2, p < 0.001 ; classe de niveau en mathématiques : v2 = 286, d.f. = 2, p < 0,001.

5 v2 = 27,7, d.f. = 2, p < 0,001.

6 v2 = 43,6, d.f. = 2, p < 0,001.

7 Classe de niveau en anglais : v2 = 23,8, d.f. = 6, p = 0,001 ; classe de niveau en mathématiques : v2 = 39,6, d.f. = 6, p < 0,001.

8 8 271 élèves dans 48 écoles.

9 15,7 % dans des classes de niveau plus élevé, 15,5 % dans des classes de niveau plus bas que celui attendu.

10 Odds ratios estimés à l’aide de modèles de régression logistique binaire.

11 Le tableau 3 en annexe indique la fiabilité et les statistiques récapitulatives des mesures de la confiance en soi.

12 Analyse utilisant des modèles multiniveaux (étudiants = niveau 1, classes de niveau = niveau 2, écoles = niveau 3).

13 Les prénoms des élèves et des enseignants ont été anonymés.

14 Voir le tableau 4 en annexe.

15 Voir en ligne : <https://www.ucl.ac.uk/ioe/departments-and-centres/departments/curriculum-pedagogy-and-assessment/student-grouping-study-investigating-impact-setting-and-mixed-attainment-grouping> (consulté le 23 juillet 2021).

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Pour citer cet article

Référence papier

Anna Mazenod, « Classes de niveau : variations internationales dans les regroupements d’élèves et la constitution de classes au collège »Revue française de pédagogie, 212 | 2021, 93-108.

Référence électronique

Anna Mazenod, « Classes de niveau : variations internationales dans les regroupements d’élèves et la constitution de classes au collège »Revue française de pédagogie [En ligne], 212 | 2021, mis en ligne le 05 janvier 2025, consulté le 13 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rfp/10850 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rfp.10850

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Auteur

Anna Mazenod

Université Lumière Lyon 2

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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