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Deuxième partie
Lectures

ABÛ KABÎR AL-HUDHALÎ, Zuhayra ! Quatre poèmes à sa fille sur la vieillesse et la mort, édition bilingue, traduits de l’arabe, présentés et annotés par Pierre LARCHER, collection La petite bibliothèque de Sindbad, Paris et Arles, Sindbad/Actes Sud, 2014, 76 p.

Daniela Rodica Firanescu

Notes de la rédaction

En raison de sa longueur ce compte rendu est publié seulement en format électronique

Texte intégral

1La parution (2014) du volume Zuhayra !, le quatrième d’une série (Larcher, 2000, 2004, 2012), vient non seulement élargir ce que nous avons appelé « le “corpus Larcher” à caractère personnel et distinctif (par l’ampleur ou le nombre des poèmes traduits, la qualité de la traduction et le style de présentation) qui recouvre la majeure partie du territoire que la poésie arabe d’avant l’Islam a acquis dans la littérature, non pas “de”, mais “en” langue française » (Firanescu, 2013 : 271), mais aussi enrichir et nuancer ce corpus d’une manière toute particulière. Cela est dû tant au choix du texte traduit, le dīwān d’Abū Kabīr al-Hudhalīà propos duquel le traducteur note dans la Préface (p. 9) : « En le parcourant, je fus vite convaincu qu’il n'était pas seulement intéressant pour sa forme, mais aussi bien pour le fond » – qu’à une certaine évolution du style de la traduction, les deux volets dont nous traiterons brièvement ici.

2P. Larcher choisit ce petit dīwān comprenant quatre poèmes composés dans une tonalité grave, reliée au thème de la réflexion réaliste (parfois aux accents violents, cruels) d’un ancien guerrier (incarnation de la vraie murūʼa bédouine antéislamique) sur la vieillesse et la mort. Les textes, rappelant les lamentations élégiaques (marāthī), sont chargés de tension dramatique, dans les parties évoquant les exploits sanglants du guerrier et de ses compagnons, et d’une profonde amertume, dans celles où le poète exprime les sentiments troublants qu’il éprouve à l’égard de son état d’impuissance. Le tout compose, ainsi que le traducteur l’indique dans la Préface, « l’image d’une Arabia infelix et pour tout dire tragique » (p. 9).

3La déploration de l’état de vieillesse est présente dans la poésie antéislamique ; on la rencontre, pour en donner un exemple illustre, chez Zuhayr, dans la troisième partie de sa Mu‘allaqa. Mais alors que Zuhayr, « las des fardeaux de la vie » (cf. la traduction de Larcher, 2000 : 81, vers 47), formule des réflexions plutôt rationnelles (des maximes, ḥikam) et générales (généralisantes, aussi) sur la vieillesse, Abū Kabīr parle avec ardeur de sa propre combustion, dans des termes purement subjectifs, imprégnés du goût (celui de la coloquinte) du “vécu”, avec une sincérité non dissimulée, faisant de sa fille le témoin de son déchirement :

« Zuhayra ! A la vieillesse échappe-t-on ? / Ou n’est-t-il point de voie vers jeunesse qui fuit ? // Jeunesse a perdu ton père, fors son souvenir ; / Etonne-toi donc de l’action du temps, admire ! // Zuhayra ! Malheur à toi ! Qu’a donc ma tête ? / Plus jeunesse elle perd, plus couleur elle prend, // Exécrable ! / Partie, sa gaîté ! / Désormais chenu, / Raie des cheveux incendiée, rognures grisâtres ! // Privé je suis de ce que tu sais ! Désormais // Ma personne à ses frères est objet de dégoût ! // (…) O malheureux que je suis ! La voie d’un vieillard ? / La blancheur de ta face ? Pour la terre rougeâtre ! // ».

4C’est justement cet aspect relié à la transfiguration poétique de la tragédie personnelle, subjective, qui imprime aux poèmes un caractère tout particulier et c’est ce même aspect qui leur confère la force de transcender les époques et les matrices culturelles pour joindre la tragédie grecque dans ce qu’elle a de plus caractéristique et universel à la fois : le côté humain de la souffrance de l’âme piégée par des expériences tragiques.

5La présence symbolique de Zuhayra, que le père-poète choisit comme confidente de sa lourde confession, nous a fait penser, au premier moment, à Euripide, avec ses drames dont les héroïnes sont des femmes de très fort caractère : Médée, Andromaque, Hécube, Electre, mais surtout Iphigénie (dans Iphigénie à Aulis), si attachée à son père, prête à se sacrifier pour le soulager de ses tourments. La lecture des poèmes d’Abū Kabīr traduits par P. Larcher éveille des échos du dialogue entre Agamemnon et Iphigénie (cf. la traduction de Hinstin, 1923) :

« IPHIGÉNIE : Salut! tu as bien fait de m’appeler auprès de toi, ô mon père. AGAMEMNON : Ai-je bien fait, ou non? je l’ignore, mon enfant. IPHIGÉNIE : Tu me revois avec plaisir; et cependant, hélas! de quel air soucieux tu me regardes! AGAMEMNON : Bien des soins préoccupent un roi, un chef d'armée. IPHIGÉNIE : Sois maintenant tout à moi; ne te laisse pas aller à d’autres pensées. AGAMEMNON : Mais c’est près de toi, de toi seule, que je suis en ce moment, et non ailleurs ».

6Abū Kabīr, de son côté, semble, en effet, n’être près que de sa fille Zuhayra, au moment où il s’abandonne à égrener ses souvenirs et se laisse emporter par sa verve au fil des histoires du passé...

7Ensuite, comme Zuhayra est invoquée constamment dans le dīwān, c'est Antigone (d’Oedipe à Colone) de Sophocle qui nous est venue à l'esprit, elle qui suit son père, vieux et aveugle, en exil, tout comme Zuhayra suit, de manière symbolique, son père rendu impuissant dans son voyage d’adieu au fil de la mémoire de ses exploits passés, de ses triomphes et chutes. Zuhayra est une Antigone dont on n’entend pas la voix, subtile présence dans la structure sous-jacente du texte.

8Toute une tradition poétique arabe nous montre des femmes, dans la lignée de la célèbre al-Khansā’, qui, appelées à le faire ou le faisant de leur plein gré, pleurent les morts dans des poèmes élégiaques. Le fait d’invoquer une femme de la famille et de lui demander de se lamenter après sa mort est présent chez les poètes arabes anciens, écho de la coutume selon laquelle c’est aux femmes que revient le devoir de pleurer les morts. Lorsque la femme en question est elle-même poétesse, il se peut que le poète lui demande de devenir le chroniqueur post mortem de ses exploits et le garant de sa gloire. Pour n’en prendre qu’un exemple, rappelons-nous les vers (94-95 de la Mu‘allaqa, dans la traduction de P. Larcher, 2000 : 70) du fameux Ṭarafa ibn al-‘Abd :

« Si je meurs, fais-moi donc la grâce, dont je suis digne : / Lacère, sur moi, ta robe, ô fille de Ma‘bad, // Ne me traite pas en homme, dont le soin n’est pas / Mon soin, qui ne vaut ni mon prix, ni ma présence ».

9Qui est en fait la “fille de Ma‘bad” ? Cela ne semble pas être très clair, car elle pourrait être la sœur de Ṭarafa (cf. EI2, article  « Ṭarafa »), sa demi-sœur ou sa tante (cf. Scott Meisami et Starkey, 1998 ; al-Khirnīq) ou bien sa nièce (la fille de son frère aîné), d’après d’autres sources. Pour Larcher (comme pour Max Seligsohn, traducteur du dīwān de Ṭarafa (1901)), elle est sa nièce. Il serait tentant de croire qu’en fait Ṭarafa lance l’invitation (de composer une élégie-éloge après sa mort) à sa sœur, qui n’est autre que la poétesse Khirnīq, dont le talent poétique aurait été reconnu par Ṭarafa, afin de pouvoir spéculer autour de la motivation de la présence de la “fille de Ma‘bad” dans le texte de Ṭarafa et ensuite se poser la question de savoir si la Zuhayra d’Abū Kabīr, à son tour, ne serait pas supposée jouer un rôle similaire à celui de Khirnīq, sinon en composant des thrènes pour la perpétuation du souvenir de son père, du moins en le pleurant et en préservant sa glorieuse mémoire ; nous nous contenterons, pourtant, d’observer que, pour sa part, Abū Kabīr ne lance pas à sa fille un appel direct à devenir sa chroniqueuse, mais en fait la confidente de sa tragique amertume ainsi que le témoin de son ultime bravoure : la lutte contre l’impuissance, avec pour seul sabre la mémoire, coulée en lingots d’or, en vers inoubliables.

10Abū Kabīr désire s’assurer que sa fille se souviendra de lui ; pourtant, il ne veut pas qu’elle se rappelle le vieillard impuissant (que lui-même dévisage avec sarcasme, invitant sa fille : « Etonne-toi donc de l’action du temps, admire ! »), mais, au contraire, il désire ardemment qu’elle garde l’image du guerrier glorieux qu’il fut : c’est à cette fin qu’il lui raconte ses actes de bravoure. Son dīwān est l’héritage qu’il lui laisse, dans l’espoir consolateur qu’elle se souviendra de lui. Le lien de complicité intime entre père et fille rappelle encore une fois la tragédie grecque, surtout que dans le quatrième poème la figure d’un fils (Khalāwa) n’apparaît que fugitivement (peut-être aussi parce qu’il est trop petit, à ce que les vers semblent suggérer, pour comprendre le déchirement du père ?), n’étant pas préféré à la fille en tant que témoin et confident. Ce fils n’est invoqué que dans ce poème, de manière suggestive, le dernier du dīwān ; il n’est pas “l’élu” de son père pour lui faire voir le spectacle de son agonie (dans l’esprit de “vanité des vanités, tout est vanité”) que le père réserve à la fille. C’est Zuhayra qui est l’élue pour le sacrifice. Encore une fois, des échos d’Euripide – du dialogue d’Iphigénie avec son père – viennent à l’esprit, car, malgré les circonstances différentes (voire opposées, car c’est la fille, Iphigénie, qui va être vouée à la mort, avec l’accord du père), la tension dramatique est issue de l’imminence de la séparation entre père et fille, due à la mort, à la grande “traversée” qui s’impose, séparation contre laquelle les humains n’ont d’autre arme que la volonté de se souvenir :

« IPHIGÉNIE : Tu pars donc pour un long voyage, ô mon père, et tu me laisses? AGAMEMNON : Toi aussi, ma fille, tu vas faire comme ton père. IPHIGÉNIE : Ah! s’il t’était permis de m’emmener, et à moi de te suivre, sur ton navire! AGAMEMNON : Il te reste aussi à faire une traversée, où tu te souviendras de ton père » (cf. la traduction de Hinstin).

11Chez Abū Kabīr, Zuhayra n’est pas vouée à la mort physique, mais le sacrifice lui est pourtant demandé par le père : elle est appelée à contempler ses tourments, sa dégradation physique (qu’il ne cache pas), ses souvenirs des batailles et bagarres sanglantes, ses aventures amoureuses même, sa désolation, son angoisse du trépas, ce qui équivaut à la “traversée” euripidienne.

12La traduction en français de ces poèmes réalisée par P. Larcher, comparée à sa traduction d’autres poèmes antéislamiques, nous semble moins désambiguïsante, et plus concise ou concentrée. Beaucoup de notes explicatives portent justement sur l’ambiguïté des vers originaux et la motivation des choix sémantiques du traducteur, les ajouts à l’intérieur du texte étant plutôt “d’intelligibilité” et non pas sensés faciliter le décodage “sur place”. Alors les notes deviennent partie intégrante de la lecture du texte traduit, absolument vitales pour la compréhension, au-delà du fait qu’elles sont le lieu de récupération-exposition d’histoires préparant le lecteur à comprendre l’arrière-plan culturel (exemple : notes au vers 7, p. 58, au vers 17, p. 59-60). Elles ne désambiguïsent pas d’une manière détaillée, mais juste autant qu’il est nécessaire pour une lecture active, créatrice du sens poétique, qui garde, certes, un certain degré d’ambiguïté constitutive.

13L’évolution du style de traduction est due, d’un côté, à la nature du texte à traduire, caractérisé par la concision de l’expression, la densité de l’information, ainsi que par le changement abrupt de sujet, parfois à l’intérieur du même vers, et, de l’autre, au fait que le traducteur semble s’adresser à un public qu’il a déjà formé à travers ses traductions de la poésie arabe antéislamique : avisé des difficultés de celle-ci, il est déjà familiarisé avec le style de traduction “larcherien” et prêt à savourer les provocations sémantiques et stylistiques.

14L’âme qui fait couler la mémoire en lingots d’or étant une âme troublée, il y a un souffle agonisant qui traverse les poèmes, entraînant parfois le désordre des idées, d’autres fois des formulations métonymiques, elliptiques, suivant le mécanisme d’implicitation, et, assez souvent, des ambiguïtés qui forcent même le lecteur de l’original arabe à relire des segments de texte afin d’aboutir à la compréhension. Ce ne sont pas des eaux qui dorment, mais des eaux agitées, qui secouent le navire du traducteur et ébranle celui du lecteur dans sa quête du sens. Alors le traducteur choisit parfois une solution provocatrice dans tous les sens : le transfert de l’ambiguïté du texte arabe vers le texte en français. Il y a un équilibre subtile réalisé par le traducteur entre deux mouvements : a) transfert d’ambiguïté et b) désambiguïsation, opérée soit dans le texte traduit (par le choix d’un mot explicitant, en français, le sens du mot arabe), soit dans les notes. Dans les parties des poèmes où le poète déplore son état présent de décadence, la formulation directe, déclarative, n’engendre généralement pas d’ambiguïtés. La combinaison subtile des deux mouvements mentionnés ci-dessus (que l’espace d’un compte rendu nous permet seulement de suggérer ici) est bien évidente dans la traduction de celles des parties des poèmes où le poète évoque ses exploits passés, recomposant, à partir des images fulgurantes surgies de sa mémoire, des tableaux souvent très fragmentaires de scènes plus amples ; les vers 10-12 du deuxième poème (p. 41-42) en sont une bonne illustration :

15– Ah! Que d’hommes j’ai fait descendre au tombeau, comme / Seaux au puits : tel le sabre, encore jeunes et beaux ! //. La note associée à ce vers explique que la comparaison introduite par “comme” constitue l’explicitation d’une métaphore dans l’original, ceci « pour des raisons d’intelligibilité ») ;

16Et puis, je suis parti, te cachant mon état : / Doigts tremblants, déviant, comme un bancal en marchant ! //. Ce vers 11 n’a pas de note associée ; le pronom “te” en français fait penser à Zuhayra, à qui le poète s’est adressé directement au début du poème, et correspond au pronom affixe féminin -ki, ce qui soutient la cohérence de la lecture ayant la fille comme témoin, ou “interlocutrice” du père-poète. Mais le vers contient néanmoins une ambiguïté foncière quant à ce “tu”, car, tout en admettant que la vocalisation en arabe est bien -ki, on n’a pas les moyens de discerner si “le fait de cacher son état” (encore une ambiguïté enchâssée : “état de remords” ou bien “état d’épuisement” ?) est un fait du passé ou du présent de la parole ; il serait bizarre de le considérer comme un fait du passé, car cela supposerait soit la présence de la fille sur le lieu de bataille soit la confession du père-guerrier à sa fille, lors de son retour de la guerre ; on l’interpréterait plutôt comme un fait du présent du discours : on notera que le vers original dit wa-lā abiththu-ki “et je ne te dévoile pas [mon secret]”, là où la traduction rend le sens implicite, celui de “cacher”, mais la démarcation n’est pas claire. Le traducteur, en gardant -ki/“te” (alors qu’il aurait pu l’éliminer), maintient la pluralité d’interprétations rendues possibles par le vers original.

17– Un modèle, pour toi, ces hommes abattus / Aux mottes de Tiryam, chouettes qui errent, sans tombe ? // Tel que l’indique la note de ce vers 12, le traducteur désambiguïse ce qu’il trouve être, dans l’original, “par trop métonymique pour être compris” quant à l’image des chouettes, rendant le vers français juste intelligible, mais pas sémantiquement complet sans l’apport de l’explication plus ample contenue dans la note. Il garde le mot “chouettes” de l’original, mais reconstruit l’image poétique, en faisant une métaphore partiellement éclairante, dont le sens complet ne se dévoile que lorsque la lecture intègre l’élément culturel spécifique rattaché au symbole des chouettes, explicité dans la note.

18Prosodiquement, ici comme dans ses traductions antérieures de la série, P. Larcher adapte l’alexandrin (avec accent sur le rythme, non pas sur la rime) pour rendre le mètre kāmil, l’un des mètres longs qui « permettent aux poètes d’adopter des procédés d’expression les mieux venus dans un cadre rythmique harmonieux » (Arazi, 1991 : 112, se référant à la relation entre mètre et genre poétique, gharaḍ, dans le système métrique arabe tel qu'il est exposé par Ḥāzim al-Qarṭājannī dans son Minhāj al-bulaghā’ wa-sirāj al-ʼudabāʼ) : « (…) mon alexandrin est “libéré” : ses libertés sont celles qu’y mettait la poésie épique médiévale, qui, dite et non chantée, pratiquait la “passe” (…) ». En effet, cette remarque du traducteur nous fait observer que ces poèmes ne se prêtent pas à être chantés, mais plutôt à être récités d’une manière “cantilénante” (le mot “cantilénant” est d’ailleurs utilisé par le traducteur pour rendre une image auditive, reliée au mot arabe tarannum, à l’intérieur du vers 8 du dernier poème et l’acception du terme de cantilène chez le traducteur est expliquée dans la note à ce même vers), qui prête de l’importance au rythme.

19A côté de la musicalité engendrée par les mouvements rythmiques, il nous a semblé « entendre », dès le début de la lecture, en tant que musique de fond, en sourdine, les accords du luth de Munir Bachir, le grand artiste irakien du ‘ūd classique, « austère alchimiste des sons » qui « est paradoxalement à la fois le plus traditionnel et le moins conventionnel, le plus individualiste et le moins iconoclaste des musiciens arabes contemporains » (Aubert, 1988). C'est surtout la musique de l’album Maqamat (1993) – nous gardons la transcription non académique – et notamment la sonorité de deux pièces – “Maqam al-Asil, Invocation” et “Maqamat Mukhalif, Awshar, Sigah, Saba” – que nous avons associée à la récitation des poèmes d’Abū Kabīr dans leur version française réalisée par P. Larcher, peut-être, en premier lieu, à cause du fait que ces modes musicaux expressifs sont rattachés aux dispositions graves de l’âme – tristesse, amertume, inquiétude, mélancolie, ainsi qu’au tumulte affectif, à l’ardeur des sentiments, qui se dégagent aussi des poèmes d’Abū Kabīr.

20L’arabisant de formation classique qu’est Pierre Larcher a saisi là l’envergure universelle du thème des poèmes, la tonalité qui les rapproche de la poésie tragique grecque, ainsi que leurs vertus poétiques, faisant le choix très inspiré de donner vie, dans une langue de portée universelle, à un fragment de la poésie arabe classique qui n’attendait qu’à être mis en circulation afin d'entrer en dialogue avec les grands textes classiques et de compléter l’image de la poésie arabe antéislamique avec un morceau original, de grande valeur symbolique. Ensuite, le traducteur de grand talent qu’est Pierre Larcher a fait de ces poèmes l’objet d’une reconstruction philologique et poétique en français, qui – belle, majestueuse et troublante – les propulse sur l’orbite des grands textes, à vocation universelle, de la tragédie humaine.

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Bibliographie

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Arazi Albert, 1991, « Métrique et Language Poétique », in Sasson Somekh (ed.), Studies in Medieval Arabic and Hebrew Poetics, p. 107-136.

Aubert Laurent, 1988, Critique du CD Munir Bachir en concert / live. Paris. [Inédit MCM 260006 (1988)], Le Monde de la Musique, no 114, septembre 1988, p. 82. [En ligne http://0-www-jstor-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/discover/10.2307/40240315?uid=3739432&uid=2129&uid=2&uid=70&uid=3737720&uid=4&sid=21103410684921]

EI2 = Encyclopédie de l’Islam, 2e édition, 11 vols, 1960-2005. Leiden et Paris, Brill et Maisonneuve et Larose, art. “Ṭarafa” (J.E. Montgomery) [en ligne : http://0-referenceworks-brillonline-com.catalogue.libraries.london.ac.uk/reference-worksBrill Online, 2014].

Euripide, Iphigénie à Aulis, in G. Hinstin, Euripide. Théâtre et fragments. Tome second. Paris : Hachette, 1923 [en ligne : http://remacle.org/bloodwolf/tragediens/euripide/iphigenieaulis.htm]

Firanescu Rodica, 2001, compte rendu de Larcher (2000), Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée 91-92-93-94, juillet 2001, p. 419-424 [en ligne http://remmm.revues.org/2753]

— 2008, « Cher comme poivre – L’art de la traduction des Mu‘allaqât en français dans la version de Pierre Larcher », Synergies Monde Arabe, Revue du GERFLINT, 5, p. 47-60, Riyadh [En ligne: ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Mondearabe5/firanescu.pdf].

— 2013, compte rendu de Larcher (2012), Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée 134, décembre 2013, p. 271-273 [En ligne : http://remmm.revues.org/7965]

Larcher Pierre, 2000, Les Muʻallaqȃt. Les sept poèmes préislamiques, préfacés par André Miquel, traduits et commentés par Pierre Larcher, coll. Les immémoriaux. Saint-Clément-de Rivière, Fata Morgana.

— 2004, Le Guetteur de mirages. Cinq poèmes préislamiques d’al-A‘shâ Maymûn, ‘Abîd b. al-Abras et al-Nâbigha al-Dhubyânî traduits de l’arabe et commentés par Pierre Larcher, Petite bibliothèque de Sindbad. Paris et Arles, Sindbad/Actes Sud.

— 2012, Le brigand et l’amant. Deux poèmes préislamiques de Taʼabbata Sharran et Imruʼ al-Qays, traduits de l’arabe et commentés, suivis des adaptations de Goethe et d'Armand Robin et de deux études sur celles-ci, Paris et Arles, Sindbad/Actes Sud.

Scott Meisami J. et Starkey P. (eds), 1998, Encyclopedia of Arabic Literature, Volume 2.

Seligsohn Max, 1901, Dîwân de Tarafa ibn al-‘Abd al-Bakrî accompagné du commentaire de Yoûsouf al-A‘lam de Santa-Maria (...), publié, traduit et annoté par Max Seligsohn, Paris, Librairie Emile Bouillon, Editeur.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Daniela Rodica Firanescu, « ABÛ KABÎR AL-HUDHALÎ, Zuhayra ! Quatre poèmes à sa fille sur la vieillesse et la mort, édition bilingue, traduits de l’arabe, présentés et annotés par Pierre LARCHER, collection La petite bibliothèque de Sindbad, Paris et Arles, Sindbad/Actes Sud, 2014, 76 p.  »Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée [En ligne], 137 | 2015, mis en ligne le 22 juillet 2014, consulté le 15 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/remmm/8616 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/remmm.8616

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