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Pierre Bourdieu et l’Algérie : Le savant et la politique

Pierre Bourdieu and Algeria: the scholar and politics
Kamel Chachoua

Résumés

Partant des recherches ethnosociologiques de Pierre Bourdieu sur l’Algérie, effectuées à la fin des années 1950, cet article revient, de façon relativement critique, sur l’idée reçue et largement admise par de nombreux analystes et commentateurs scientifiques et médiatiques qui considèrent que les interventions de Pierre Bourdieu dans l’espace public datent du début des années 1960 à propos de la guerre d’Algérie et/ou que les premiers écrits de Pierre Bourdieu sur l’Algérie avaient le même caractère très engagé que celui de La misère du monde publié en 1993. Selon d’autres, Pierre Bourdieu serait même le père intellectuel du militantisme culturel berbère. Or, il nous semble – et c’est le propos de ce texte – que la puissance, l’élégance et la finesse scientifique et politique de l’œuvre sociologique et ethnologique de Pierre Bourdieu sur l’Algérie en général et la Kabylie en particulier doit toute sa distinction au caractère « poli » et « dépolitisé » de son style, de son approche et de son rapport à ses objets scientifiques et à la politique.

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Texte intégral

« Comment parvenir à arracher les intellectuels aux tentations du pouvoir politique et à l’hétéronomie sans pour autant les pousser, les enfermer et les isoler dans leur tour d’ivoire, comment continuer et concilier l’autonomie scientifique et l’engagement politique et ainsi travailler à faire triompher les valeurs humaines de la justice et de la dignité »

Pierre Bourdieu, les Règles de l’Art, Genèse et structure du champ littéraire, Paris, Seuil, 1992.

Cinquante ans après…

  • 1 Pour un échantillon non exhaustif, on peut citer : Colonna, 2003 : 25-38 ; Martin-Criado, 2008 ; Bo (...)
  • 2 Nous préparons actuellement avec la collaboration de Fella Benjilali et Abdesslam El Madini, la tra (...)

1L’œuvre de Pierre Bourdieu sur l’Algérie peut être considérée, cinquante ans après sa conception, comme l’une des plus connues et des plus utilisées dans l’espace des études sociologiques et anthropologiques méditerranéennes, comme le montrent ses nombreuses éditions, rééditions et traductions ainsi que les réactions négatives et l’hostilité qu’elle suscite dix ans après le décès de son auteur (2002)1. Cette diffusion reste cependant tardive, inégale et souvent cantonnée aux pays de l’Europe occidentale et méridionale (France, Allemagne, Italie, Espagne) ainsi qu’à l’Amérique du Nord et au Maghreb littoral plus particulièrement. L’homme et l’œuvre restent encore aujourd’hui largement ignorés en Afrique et dans le monde arabe en général bien que quelques traductions partielles et circonstancielles vers l’arabe aient été réalisées ici et là dans quelques capitales du Proche-Orient (Damas, Le Caire, Beyrouth). Ce qui est cependant surprenant et paradoxal, c’est qu’aucun des textes ou livres de P. Bourdieu sur l’Algérie n’est concerné par ces traductions2.

2En Algérie même, P. Bourdieu est davantage connu pour son nom que pour son œuvre. Aucun de ses ouvrages n’est en vente dans aucune librairie, ni n’a fait l’objet d’une (ré)édition, d’une traduction ni même d’une contrefaçon ; son « œuvre française », comme la collection de la revue Actes de la recherches en science sociales qu’il avait fondée en 1975 (Boltanski, 2008 : 15-47), est souvent rare et toujours incomplète dans les bibliothèques académiques et publiques et, enfin, on ne connaît pas, jusqu’ici, de thèses, de livres, de revues consacrés à « l’œuvre algérienne » de P. Bourdieu, bien que certains de ses livres, comme Le Déracinement ou Esquisse d’une théorie de la pratique, précédée de trois études d’ethnologie kabyle, restent fréquents et visibles dans les bibliographies, les mémoires et certaines thèses consacrées à la Kabylie. Ce qui fait d’ailleurs que P. Bourdieu est plus connu dans les départements d’architecture, des études amazighes (ie. berbères) de Tizi-Ouzou et de Bejaia et dans le département de sociologie d’Alger, où subsiste encore un important noyau d’anciens jeunes assistants familiers de son œuvre, plutôt que dans celui des universités de l’intérieur ou dans les disciplines de science politique et/ou de philosophie, par exemple.

3Cela dit, P. Bourdieu fait partie - peut-on dire - de l’inconscient de la discipline sociologique algérienne (c’est-à-dire de son histoire) pour reprendre une expression durkheimienne qu’il aime souvent utiliser (Bourdieu, 1979 : 397-416). Il avait suivi, soutenu, accueilli dans son laboratoire parisien de sociologie (Centre de sociologie de l’éducation et de la culture), plusieurs grands noms actuels de la sociologie algérienne qui furent, au début des années 1970/1975, parmi les premiers doctorants de la toute première génération de sociologues algériens (Haddab, 1979 ; Colonna, 1976). Cet intérêt scientifique et stratégique de P. Bourdieu pour les sciences sociales algérienne obéissait, selon lui

« à la volonté de trouver une base internationale à cette nouvelle science, par une action pédagogique tournée notamment vers la Hongrie, qui se libérait doucement du diamat et découvrait la statistique (de la pauvreté notamment), et vers l’Algérie, alors phare des luttes du tiers-monde et du Brésil ».

4P. Bourdieu reste, en effet, l’un des seuls sociologues de l’Algérie qui a jusqu’ici réussi à donner de « vrais » disciples algériens à la sociologie algérienne. Tous, hommes ou femmes, ont publié, enseigné, c’est-à-dire bien souvent lutté dans des moments et des contextes « hostiles » pour la sociologie de/en Algérie ; sans eux, le colloque en hommage à P. Bourdieu que nous avons organisé les 2, 3, 4 juin 2006 au CNRPAH (Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques) - une maison que P. Bourdieu avait aimé et loué distinctement (Bourdieu, 1980 : 35, note 24) -, aurait été moins évident autour d’une discipline (ie. la sociologie) meurtrie par l’exil et le terrorisme (six assassinats, sans compter les journalistes issus de la discipline) dans une capitale qui se redresse à peine de ses blessures.

5Les « travaux algériens » de P. Bourdieu n’aident pas seulement à connaître le cheminement biographique d’un des grands maîtres de la sociologie du xxe siècle mais aussi et surtout, à comprendre autrement la société algérienne des années 1950-1960, une décennie durant laquelle les Algériens ont « découvert » drastiquement et dramatiquement les choses par leur absence, ou plutôt par leurs contraires : le travail par le chômage, le logement moderne par le bidonville, la justice par l’arbitraire, le temps par l’ennui, le calcul par l’incertitude et l’insécurité de l’avenir et, last but not least, la libération et l’indépendance nationale par la domination coloniale. Toute l’âme et tout le charme de l’œuvre algérienne de P. Bourdieu est dans ce qu’elle nous livre des images et des portraits sociologiques et authentiques sur la vie « ordinaire » de ces milliers d’hommes et de femmes, de paysans déracinés, de chômeurs, de vendeurs à la sauvette qu’il (lui et toute son équipe) avait rencontrés dans les camps et dans les champs, dans les villes et les bidonvilles et qui ont souffert, autrement que par la torture, l’emprisonnement ou l’exécution.

6Relire les textes de P. Bourdieu sur la guerre d’Algérie, regarder les photographies qu’il avait prises entre 1959 et 1960, reprendre ses problématiques « ethno-philosophiques » sur l’honneur, le don et les pratiques rituelles, comprendre « l’asymétrie » qu’il montrait entre les dispositions subjectives des sujets et les impératifs objectifs du monde social et économique moderne c’est, sans aucun doute, élaborer et collaborer à l’avènement d’une « sociologie algérienne », moderne, compréhensive, réflexive et autonome. Plus qu’un modèle épistémologique, l’œuvre ethnosociologique de P. Bourdieu tend à devenir aussi, de décennie en décennie, un véritable « conservatoire » des techniques et des pratiques sociales, culturelles et économiques traditionnelles aujourd’hui disparues.

Du « drame » algérien à La misère du monde : radiologie d’une « dis-continuité »

7C’est dans une Algérie ni « libre » ni « assujettie » qu’arrive, en 1955, P. Bourdieu, alors jeune normalien agrégé de philosophie. À ce moment-là, il (lui comme bon nombre de jeunes métropolitain(e)s éduqué(e)s de sa génération) ignorait presque tout de la société algérienne colonisée depuis 125 ans. En effet, ni son origine sociale paysanne et provinciale, ni sa formation scolaire érudite et prestigieuse (ENS), ni le paysage politique français de l’époque ne l’avaient préparé ou initié à la connaissance ou seulement à la familiarité avec l’Algérie, considérée alors comme un département français. Une méconnaissance institutionnalisée et intégrée par l’absence de toute science et de toute référence aux sociétés colonisées dans le système scolaire français. P. Bourdieu, comme tous les énarques métropolitains amenés en Algérie dans le cadre du « plan de Constantine », ne se sentait ni « chez lui », ni à l’étranger, ni dans un monde « proche » et « familier », ni dans un monde « autre » et « lointain ». La guerre de libération algérienne n’était pour eux ni une guerre civile, ni une guerre entre nations (l’Algérie était considérée comme un département français) et les Algériens (dés le déclenchement de la guerre) n’étaient plus perçus soudainement comme des indigènes, des Arabes, des musulmans ou des colonisés, mais comme des militants, des rebelles et des adversaires intrépides et farouches. L’Algérie n’est plus alors ce pays « d’Arabes et de Kabyles », cette « colonie française d’Afrique du Nord » mais un pays et une nation en devenir. Tous les regards, tous les préjugés, tous les clichés traditionnels véhiculés par le sens commun et une partie de la littérature coloniale se sont trouvés, « du jour au lendemain », démentis et à tout le moins périmés et dépassés. Quant à la science sociale coloniale, et à la discipline ethnologique en particulier (alors prestigieuse, notamment avec/après la publication de Tristes Tropiques par Claude Lévi-Strauss), elle s’est trouvée « culpabilisée » et en même temps désignée comme « complice et collaboratrice » de l’ordre colonial ; une accusation qui lui a valu ultérieurement, en Algérie d’abord et ailleurs ensuite, un bannissement scientifique et politique dont elle ne s’est presque plus jamais remise.

  • 3 Cf la table des matières de Sociologie de l’Algérie, Bourdieu, 1958.

8C’est ce contexte-là qui va « contraindre » P. Bourdieu à se convertir de la philosophie à la sociologie et surtout à marquer ses distances critiques vis-à-vis de la science sociale coloniale comme le montre son « choix » du titre même de son premier ouvrage, Sociologie de l’Algérie, qui mérite plutôt celui d’Ethnologie de l’Algérie, à cause non seulement de son caractère, selon ses propres mots, « culturaliste et américaniste » mais surtout de son contenu3 (les arabophones, les Kabyles, les mozabites, la société chawiya, l’islam, etc.). Ses références théoriques et bibliographiques qui usent davantage des noms d’auteurs consacrés par la science sociale centrale (parisienne et américaine) plutôt que de ceux de la science coloniale - à l’exception de quelques durkheimiens « Maghrébinisants » comme Edmond Doutté, René Maunier, Jacques Berque, André Nouschi - qu’il a pourtant abondamment lus, utilisés et analysés. Ce livre (Sociologie de l’Algérie) que P. Bourdieu couvre à chaque fois qu’il l’évoque d’un nouveau « reproche » (un livre de jeunesse, un livre culturaliste, un livre arraché, un petit livre…) est pourtant celui qui a « ennobli » et renouvelé l’ethnologie coloniale ne serait-ce que parce qu’il est « poli », « respectueux » et complètement « dépolitisé ». Il n’évoque même pas la guerre. Une ethno-sociologie belle et démunie de tout « égocentrisme » comme de tout « exocentrisme » ; en effet, P. Bourdieu parlait des arabophones, des Mozabites et des Kabyles comme il aurait parlé des Béarnais ou des Parisiens comme le montrent ses travaux ultérieurs sur la société française en général et son Béarn natal en particulier. Par ailleurs, le fait que Sociologie de l’Algérie soit édité aux Presses Universitaire de France avait certainement donné un « prestige » scientifique et symbolique à l’ouvrage ainsi qu’une « identité » métropolitaine, parisienne plutôt que coloniale. Enfin, sa traduction et sa publication aux États-Unis (en 1962), avec une préface de Raymond Aron (qui avait donné à Bourdieu (2004 : 48) l’opportunité de rentrer en France et de devenir son assistant à la Sorbonne), avaient consacré P. Bourdieu dans le paysage scientifique français et américain. Les deux ou trois articles « politiques » qu’il publiera après son retour en France dans des revues engagées en faveur de l’indépendance de l’Algérie et de la décolonisation, comme Les Temps Modernes ou Esprit, sont tournés davantage vers la libération sociologique de l’Algérie, des paysans et prolétaires algériens notamment, plutôt qu’au soutien politique et médiatique de l’indépendance de l’Algérie.

9C’est cette passion scientifique, et cette neutralité politique aussi, qui l’avaient porté à être critique à l’égard de beaucoup d’autres intellectuels connus et reconnus dans le champ politique et scientifique du moment, comme le montre sa critique virulente de Michel Leiris (Bourdieu, 1963 : 258) qui fut l’un des premiers à poser la question de la culpabilité des ethnologues coloniaux. Il fut aussi discrètement critique à l’égard de Franz Fanon (Bourdieu, 1963 : 312) auquel il reprochait d’avoir considéré la paysannerie prolétarisée et déracinée comme une force révolutionnaire et enfin, il fut aussi critique envers Germaine Tillon (Bourdieu, 1959 : 52-64) qu’il « accusait » de considérer tous les phénomènes de désagrégation sociale survenus en Algérie comme de simples phénomènes d’acculturation, réduisant et oubliant ainsi l’impact historique de la dépossession foncière et de la colonisation en général. Ce n’est pas tout, P. Bourdieu (2005 : 328) avait sévèrement « raillé » les interventions et les opinions politiques des intellectuels français sur l’Algérie qu’il avait constamment qualifiées de « ridicules » et « d’irresponsables » : « Les Français à l’époque, disait-il, qu’ils soient pour ou contre l’indépendance de l’Algérie, avaient pour point commun de mal connaître ce pays, et ils avaient d’aussi mauvaises raisons d’être pour, que d’être contre » (Bourdieu, 2005 : 328). En somme, P. Bourdieu n’était ni proche des militants actifs de l’Algérie française (qui qualifiaient ses travaux de « feuilles de choux » et s’offusquaient même à l’annonce de l’une de ses conférences données sur « la culture algérienne » en 1959 à Alger (Sayad, 1995 : 7-56)), ni loin des militants indépendantistes algériens qui constituaient un groupe important parmi ses étudiants et enquêteurs à la faculté d’Alger. (Il avait la même position lors des événements de Mai 1968 en France envers lesquels il avait une franche sympathie mais aussi une grande suspicion (Castel, 2003 : 348)).

10À l’exception des articles qu’il publie en France après son départ/retour d’Algérie en 1960 et qui, bien que politiques, ne peuvent être considérés comme des textes engagés, on ne trouve pas ailleurs et avant, notamment dans son premier livre, Sociologie de l’Algérie, publié en 1958, de trace de la guerre de libération qui faisait alors rage à Alger même. De même, les Photographies d’Algérie, toutes prises en pleine guerre dans les environs d’Alger entre 1959 et 1960, ne montrent aucune arme (un seul tank), aucun militaire, aucun mort et même aucun Européen. Enfin le questionnaire que P. Bourdieu avait rédigé pour l’enquête de l’antenne algérienne de l’INSEE (devenu après l’indépendance AARDES) ne compte aucune question sur la guerre, le mot même n’y figure pas.

11Il nous semble, en effet, que la puissance scientifique et politique de l’œuvre algérienne de P. Bourdieu (bien qu’essentiellement rédigée après son départ d’Algérie et publiée après l’indépendance et en France) découle du caractère « poli » et « dépolitisé » de son style et de son approche scientifique, prudente et respectueuse :

12« J’ai retardé, disait-il, jusqu’à aujourd’hui la publication de certains articles en édition courante, non par crainte d’être mal compris mais par peur de blesser (…). J’ai essayé de faire en sorte que mes textes soient respectueux. Mon écriture sur la Kabylie a été complètement transformée par ça. Je n’ai jamais écrit une phrase commençant par « les Kabyles pensent que » ou bien « le premier jour du printemps, les Kabyles vont porter des rameaux d’oliviers ». C’est toujours « on » ou « ils ». C’est très important qu’un Kabyle puisse le lire sans se sentir « exotisé », c'est-à-dire exclu par le regard » (Dubois, Durand et Winkin, 2005 : 331).

13L’affinité affective et élective de P. Bourdieu avec l’Algérie est en effet plus sociale et sociologique que politique. Une affinité plus compréhensible par son origine sociale (paysanne) et géographique (provinciale) plutôt que par des considérations politiques ou militantes. En réponse à Michel Leiris, écrivain, ethnologue et auteur de L’Afrique fantôme, qui avait, dans un texte sur l’ethnologie en Martinique, soutenu la connivence et la complicité coupable des ethnologues avec l’administration coloniale, P. Bourdieu (1963 : 258) soulignait que la position de l’ethnologue en situation coloniale n’est pas « d’une autre nature que celle qui lie à sa classe le sociologue étudiant sa propre société » et que, ajoutait-il, « si les barrières de classe séparent les individus de la même société, les solidarités de classe ne rapprochent-elles pas, par-delà la barrière coloniale, des individus de sociétés différentes ? ». Enfin, cette affinité éthique et sociale transparaît aussi dans cette « confession » où il dit, en 2001, un an avant sa mort, que :

« L’Algérie est ce qui m’a permis de m’accepter moi-même. Le regard d’ethnologue compréhensif que j’ai pris sur l’Algérie, j’ai pu le prendre sur moi-même, sur les gens de mon pays, sur mes parents, sur l’accent de mon père, de ma mère et récupérer tout ça sans drame, ce qui est un des grands problèmes de tous les intellectuels déracinés, enfermés dans l’alternative du populisme ou au contraire de la honte de soi liée au racisme de classe » (Bourdieu, 2003 : 42-44).

14Pour toutes ces raisons, il est difficile de suivre certains auteurs quand ils disent qu’il y a un lien « évident » entre « l’engagement » politique de P. Bourdieu en Algérie dans les années 1960 et son « engagement » en France dans les années 1990 : « Tous ceux qui connaissaient les travaux de Bourdieu et qui étaient attentifs à sa démarche depuis suffisamment longtemps, disait Alain Accardo (2003 : 15), savaient que son intervention de décembre 1995 en pleine agora, de même que son appel à une refondation de la gauche, pour « une gauche vraiment de gauche », se situaient dans la logique d’une démarche dont les motivations fondamentales et les principaux axes présentaient une grande constance, depuis ses premières recherches en Algérie », ce que confirment bien Franck Poupeau et Thierry Discepolo, pour qui « les interventions du sociologue (P. Bourdieu) dans l’espace public datent de son entrée dans la vie intellectuelle, au début des années 1960 à propos de la guerre d’Algérie » (Bourdieu, 2002 : 17). Jacques Bouveresse (2003 : 70), pour sa part, affirme que : « Les écrits de Bourdieu, depuis les tout premiers, qui sont liés à l’expérience de la colonisation en Algérie, jusqu’aux plus récents, ont toujours présenté le même caractère très engagé ». S’il est vrai qu’on peut toujours interpréter, donner et trouver à tel ou tel texte de P. Bourdieu sur l’Algérie un sens politique, il n’est pas toujours évident que celui-ci soit la traduction d’un « engagement » et d’une « croyance » politique de l’auteur. P. Bourdieu, on l’a dit, n’était pas un « indépendantiste » farouche, il n’était pas non plus un « partisan » du colonialisme dont il est, à notre avis, l’un des rares et des meilleurs analystes. D’ailleurs, quand P. Bourdieu lui-même avait évoqué cette idée de continuité et de permanence « politique » entre, Travail et Travailleurs en Algérie et La misère du monde il ne choisit pas (ne trouve pas) un texte politique et « militant » mais un entretien sociologique avec un « cuistot kabyle », ce qu’on ne peut pas considérer comme un plaidoyer militant pour l’indépendance de l’Algérie mais une véritable réflexion sur le chômage, bref une sorte de continuité dans la démarche et l’exposition des résultats de la recherche plutôt qu’un « engagement » politique et militant dans le sens de Jacques Bouveresse ou d’Alain Accardo : « On dit souvent que j’ai beaucoup changé depuis quelques années, depuis La misère du monde en particulier. En fait, dit P. Bourdieu, on oublie de se demander si ce n’est pas la perception qu’on a de moi et de mon travail qui a changé. Par exemple, il y a dans Travail et travailleurs en Algérie un entretien avec un cuisinier d’Alger, intitulé « Un sociologue spontané », qui aurait pu être inclus dans La misère du monde… En fait, les gens qui le voudraient entendraient déjà Travail et travailleurs en Algérie ou Les héritiers comme des livres politiques » (Delsaut et Rivière, 2001 : 236-237).

15Bien que La misère du monde (Bourdieu (dir.), 1993) présente sans doute un « air de famille » avec Travail et travailleurs en Algérie, les deux livres ne sont guère comparables à cause justement du contexte politique de l’enquête et de sa publication. Le mot même de misère est rare dans les textes algériens de P. Bourdieu des années 1960. Si La misère du monde est en effet présentée comme une misère politique et « scandaleuse », la « misère algérienne » des années 1960 était, quant à elle, présentée et exposée dans Travail et travailleurs en Algérie comme une misère objective, à sa place, née du choc de deux civilisations et de l’introduction d’une économie moderne dans une société précapitaliste, bref, une « misère exotique », et même assortie d’une touche d’humour méthodologique, comme le montrent ces quelques extraits « satiriques » de son ouvrage, Travail et Travailleurs en Algérie, que P. Bourdieu aimait bien rappeler : « Je reste en empruntant à l’un et à l’autre comme une épluchure sur l’eau », « Pourquoi je n’ai pas de travail ? Parce que je n’ai pas de volailles à offrir », « Comment ! Tu me demandes des nouvelles de ma femme maintenant ! », « Partout où je frappe, je suis précédé de Dieu, un sac de ciment sur le dos et une truelle à la main ; j’ouvre une porte, il cimente celle qui est devant ». Une touche de dérision « introuvable » et « impensable » dans le modèle de La misère du monde de 1993.

P. Bourdieu et l’Algérie indépendante : ni retrait ni engagement

  • 4 Bourdieu, 1992 : 17-22. Voir aussi la préface de P. Bourdieu au livre d’Abdelmalek Sayad, 1999 : 11 (...)

16C’est aussi cette position de prudence et de politesse éthique et politique vis-à-vis de l’Algérie – entre le marteau et l’enclume – qui fait que P. Bourdieu avait toujours évité toute intervention dans les débats publics et politiques sur l’Algérie auxquels, pourtant tout le « poussait » et l’invitait, notamment les médias. À l’exception de quelques articles qui se comptent sur les doigts d’une seule main, la revue Actes n’a consacré aucun numéro à l’Algérie ni au fait colonial ou à l’islam. Mis à part les toutes dernières années de sa vie qui coïncident avec les événements tragiques de l’Algérie des années 1990, où il s’est trouvé impliqué malgré lui, P. Bourdieu avait involontairement et progressivement « réduit », dès le milieu des années 1970, son « intérêt » et son attention scientifique pour « l’Algérie », qu’il ne suivait d’ailleurs que de loin en loin, par l’entremise de ses étudiants algériens mais surtout par ses deux amis, Abdelmalek Sayad et Mouloud Mammeri, auxquels il a rendu deux hommages affectueux et instructifs4. Cette « distanciation » avec l’Algérie s’est accrue, d’abord, après le bannissement de la discipline ethnologique en Algérie décidé lors du XXIVe Congrès international de sociologie qui s’était tenu à Alger en mars 1974, puis, au début des années 1980 notamment, par l’ascension « fulgurante » de P. Bourdieu dans le champ scientifique national et international (lancement de la revue Actes, élection au Collège de France et sortie de ses premières traductions en anglais et en allemand, notamment) que montre bien l’affluence des étudiants et des chercheurs étrangers (de Russie, d’Amérique, de l’Europe du Nord et de l’Est) dans le centre de sociologie de l’éducation et de la culture qu’il dirigeait (Mauger, 2005). Enfin, la disparition prématurée de quelques grands noms de la philosophie française (comme Jean-Paul Sartre, Michel Foucault, Raymond Aron…), la « retraite » de certains autres (comme Claude Lévi-Strauss), durant la décennie 1975-1985 qui est aussi celle qui a marqué l’usure et la somnolence des grands courants idéologiques et philosophiques du moment (marxisme, structuralisme, la lutte des classes) ont, directement ou indirectement, précipité la propulsion de P. Bourdieu au premier rang du hit parade des philosophes et intellectuels français. La publication, au début des années 1980, de La distinction (Minuit, 1979), Le sens pratique (Minuit, 1980) et Homo academicus (Minuit, 1984) qui figurent parmi les best sellers des sciences humaines en France et en Europe en général, sont une forme de couronnement dans le champ des sciences sociales française et internationale. Il faut souligner et rappeler aussi qu’à ce moment-là (1975-1986), le champ de production et d’édition anthropologique et sociologique sur l’Algérie, et le monde arabe et musulman en général, avait – suite au contexte politique marqué par la révolution iranienne et le début de ce qu’on appelle l’islam politique – été le témoin d’un virage cognitif, passant subitement « d’un marxisme dur à un culturalisme mou » (Colonna et Haddab, 1983 : 8). Enfin, il faut rappeler aussi que le paysage politique des années 1970-1990, marqué par des événements et des confrontations politiques « durs » et « complexes », (comme le mouvement berbère de 1980 par exemple) a certainement éloigné, transformé, et réduit « durablement », l’intérêt scientifique de P. Bourdieu pour l’Algérie.

  • 5 En somme, P. Bourdieu n’a jamais rien publié dans la revue Awal à l’exception d’un entretien et d’u (...)
  • 6 En effet la mention « La revue Awal est fondée en 1985 par Mouloud Mammeri et Tassadit Yacine avec (...)
  • 7 ibidem

17En effet, et contrairement à ce qu’écrit Paul A. Silverstein (2003 : note 48, 34) qui considère P. Bourdieu comme « le père intellectuel du militantisme culturel berbère (…) directement impliqué dans la création en 1967 de l’académie berbère d’échanges et de recherches culturels et en 1972, du groupe d’études berbère de l’université de Paris-Vincennes (…) et qui a fourni, en 1985, à l’écrivain et lettré kabyle Mouloud Mammeri l’occasion de mettre en place le Centre d’études et de recherches Amazigh et sa revue Awal à la Maison des sciences de l’homme et a fondé en 1993 le comité de soutien aux intellectuels Algériens », il faut souligner que P. Bourdieu, n’a jamais, (sauf rare et discrète exception), manifesté « d’engagement » et de soutien « politique » au mouvement berbère, ni à aucun autre mouvement ou partis politiques algériens. Ce qui n’empêche pas de deviner, derrière cette « neutralité » un véritable engagement intime et citoyen pour une Algérie moderne et démocratique. Dans l’entretien qu’il accorde au journal Libération en avril 1980, lors du premier mouvement politique de « plein air » en Algérie indépendante appelé « le printemps kabyle », déclenché par les étudiants, les lycéens et les travailleurs des usines de Tizi-Ouzou, P. Bourdieu n’exprime pas une solidarité ouverte au mouvement mais se livre à une fine et subtile dépolitisation historique et sociologique du mouvement qu’il considère comme l’expression « des contradictions linguistiques léguées par le colonisateur » et comme « l’un des effets de la domination croisée entre différences sociales et différences linguistiques », en concluant que « toutes ces querelles linguistiques ne concernent guère les plus démunis économiquement et linguistiquement » (Bourdieu, 1980 : 37-43) ; un jugement lucide et (im)-prudent mais qu’on peut considérer aussi comme « démobilisateur » et « osé » eu égard aux violences physiques que venaient de subir, trois ou quatre nuits auparavant, les étudiantes et les étudiants de la cité universitaire de Tizi-Ouzou qui furent livrés le 20 avril 1980 à l’aube aux chiens et aux matraques des policiers. Quant au soutien de P. Bourdieu à la revue Awal que celle-ci affiche en page de garde5 et qu’on peut lire effectivement avec Paul A Silveirstein comme un signe de soutien militant, il est à nos yeux, trop « ostentatoire » pour être honnête6. Enfin, P. Bourdieu n’était pas, comme l’affirme Paul A. Silverstein7, le fondateur du Comité international de soutien aux intellectuels Algériens (CISIA) qu’il avait accepté de présider après la vague d’assassinats terroristes et des menaces de mort à l’encontre des intellectuels et journalistes algériens et notamment après l’assassinat « odieux » du sociologue Mohammed Boukhobza, l’un de ses anciens étudiants. Il n’a été, tout bien pesé, ni pour « les dialoguistes » ni contre les « éradicateurs », bien que certains le disaient et le voulaient plus proche des premiers que des seconds. Cela dit, le plus grand signe ou le plus beau « clin d’œil » qui prouve le soutien et la complicité positive de P. Bourdieu avec le mouvement culturel berbère comme avec de nombreuses associations et initiatives publiques algériennes (de l’immigration notamment) c’est d’avoir laissé « tout le monde » ou presque, emprunter son nom ou solliciter son soutien (son capital symbolique) pour tout ce qui leur semblait digne de son nom et de son soutien.

  • 8 Revue fondée par Emile Durkheim en 1895.

18Si l’Algérie reste – au moins indirectement – partout « visible » dans l’œuvre de P. Bourdieu, le monde musulman et africain en général reste marginal pour ne pas dire totalement absent dans les travaux du centre qu’il dirigeait et de la revue Actes de la recherche en sciences sociales qu’il avait fondée (Boltanski, 2008 : 117). Une « absence » identique à celle qu’on peut observer dans L’année sociologique8, organe principal de publication des études durkheimiennes qui représentait alors, à la fin du xixe et au début du xxe siècle, le cœur et le centre de la sociologie et de l’anthropologie française, laquelle avait, elle aussi en son temps, brillé par son positivisme, son anticléricalisme et son « désintérêt » pour les sociétés coloniales d’Afrique du Nord et plus généralement pour l’islam (Valensi, 1984 : 227-244 ; Colonna, 1995). Une « mutilation » que P. Bourdieu (1994 : 15) avait « psychanalysée », en 1994, dans un avant-propos dialogué avec Jacques Maitre :

« L’autre chose, disait-il, que j’ai découverte par autoanalyse, armé de l’histoire de la discipline (travail qu’il faudrait faire et que j’ai simplement esquissé), c’est que cette période, de Renan à la guerre de 1914, a été dominée par la constitution de la science sociale contre la religion et que, dans l’inconscient de notre discipline, il y a cette négation, ce refus originel. J’ai eu à découvrir dans ma propre tête toutes les mutilations que j’avais héritées d’une tradition laïque, renforcée par les présupposés implicites de ma science. Il y a des sujets qu’on n’aborde pas, ou seulement avec la plus grande prudence. Il y a des manières d’aborder certains sujets qui sont un peu dangereuses et, finalement, on accepte les mutilations que la science a dû accepter pour se constituer. Tout ce qui est de l’ordre des objets traditionnels de la religion et de la métaphysique, on se sent tenu - par une adhésion implicite qui est liée à l’entrée dans la profession - de le mettre entre parenthèses. Il y a une espèce de refoulement qui est exigé du professionnel ».

19En effet, cette « négation », ce « refoulement » et ce « refus originel » de la religion dont parle P. Bourdieu « saute aux yeux » à la lecture d’un de ses textes intitulé Dévoiler et divulguer le refoulé (2004 : 49-54) qu’il avait écrit en guise d’ouverture du colloque international, « Algérie-France-Islam » organisé au Frankreich-Zentrum de l’université Albert Ludwig de Fribourg les 27 et 28 octobre 1995 ; un moment, rappelons- le, « fulgurant » de l’islamisme et de la violence politique en Algérie. Ce discours scientifique qui est à lui seul tout un programme de recherche sur l’Algérie et notamment sur « l’inconscient colonial », sur la guerre d’Algérie, sur l’État, les intellectuels, la France, l’immigration, n’évoque pas, mais alors pas du tout, l’Islam. En effet, pour lui comme pour Durkheim – et sans aucune naïveté – « la société c’est Dieu » (Bourdieu, 1997 : 288).

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Bibliographie

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Notes

1 Pour un échantillon non exhaustif, on peut citer : Colonna, 2003 : 25-38 ; Martin-Criado, 2008 ; Bourdieu, 2008 ; Bouveresse, 2003 ; Cornaton, 2010.

2 Nous préparons actuellement avec la collaboration de Fella Benjilali et Abdesslam El Madini, la traduction vers l’arabe « des travaux algériens » de P. Bourdieu qui paraîtra prochainement, à Alger, aux éditions du Centre National de Recherches Préhistoriques Anthropologiques et Historiques (CNRPAH).

3 Cf la table des matières de Sociologie de l’Algérie, Bourdieu, 1958.

4 Bourdieu, 1992 : 17-22. Voir aussi la préface de P. Bourdieu au livre d’Abdelmalek Sayad, 1999 : 11-13.

5 En somme, P. Bourdieu n’a jamais rien publié dans la revue Awal à l’exception d’un entretien et d’un hommage avec/à Mouloud Mammeri repris du journal Libération.

6 En effet la mention « La revue Awal est fondée en 1985 par Mouloud Mammeri et Tassadit Yacine avec le soutien de P. Bourdieu » qu’on lit sur la deuxième page de couverture de la revue Awal ne figure qu’à partir du n° 5 (année 1989), soit après le décès, en 1989, de son fondateur, Mouloud Mammeri.

7 ibidem

8 Revue fondée par Emile Durkheim en 1895.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Kamel Chachoua, « Pierre Bourdieu et l’Algérie : Le savant et la politique »Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée [En ligne], 131 | 2012, mis en ligne le 16 mars 2012, consulté le 22 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/remmm/7522 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/remmm.7522

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Auteur

Kamel Chachoua

IDEMEC/CNRS, Aix-en-Provence

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