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Dossier : capitalismes dépendants

La cohérence institutionnelle d’une économie dépendante : formes de l’État et conflits redistributifs autour de la rente au Burkina Faso

Interrogating the Institutional Coherence of a Dependent Economy: Forms of the State and Redistributive Conflicts around the Rent in Burkina Faso
Juliette Alenda et Pierre Robert

Résumés

La dépendance, liée à une insertion déséquilibrée dans le commerce mondial, est une réalité au Burkina Faso. Elle se fonde sur un régime économique de type rentier, principalement basé sur les exportations agricoles. Cependant, les dynamiques de longue période qui traversent l’économie du Burkina Faso sont contrastées et amènent à nous interroger sur la cohérence d’ensemble d’un système économique tiré par la rente. Pour cela, nous étudions plus particulièrement les formes et le rôle de l’État au Burkina Faso d’un point de vue historique. À partir de l’approche régulationniste, nous développons une grille d’analyse qui met en tension les crises et régularités macroéconomiques et institutionnelles avec les rapports sociaux conflictuels qui traversent le pays et conduisent à des compromis institutionnalisés. Nous montrons que l’État, en Haute-Volta puis au Burkina Faso, est le résultat de luttes et d’ententes socio-politiques complexes entre différents groupes, autour de la redistribution des revenus rentiers. Ce système économique s’est maintenu depuis l’indépendance, car ses fondements externes que sont la forme monétaire et la forme d’insertion à l’international ont engendré des rapports de dépendance économique. Mais, il s’est également consolidé et développé par le biais de mécanismes internes, notamment la forme particulière de l’État burkinabé. Nous mettons en évidence également que, malgré les difficultés que pose l’approche régulationniste pour étudier les pays africains, elle reste pertinente pour appréhender les dynamiques de long terme sur ces terrains, car elle met en balance les logiques politiques et économiques.

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Texte intégral

Introduction

1La dépendance est une réalité en Afrique de l’Ouest (Amin, 1973 ; Coquery-Vidrovitch, 1976). Elle est liée à l’insertion à l’international du pays, marquée par des rapports de domination à la fois politiques et économiques avec les pays industrialisés du « centre » (Frank, 1972) et se traduit par des spécialisations inégalitaires, des termes de l’échange défavorables et une faible diversité des débouchés (Lipietz, 1985 ; Ouali, 1986). Cette dépendance se fonde sur un régime économique de type rentier qui caractérise la plupart des économies africaines et plus généralement celles des « pays en développement » (Talha, 2003 ; Hugon, 2013). La rente se définit comme « l’obtention de revenus sans contribution à la production de biens et services supplémentaires » (Hugon, 2013, p. 9). Cependant, les pays d’Afrique de l’Ouest ont suivi des trajectoires variées, qu’il importe d’analyser dans leur contexte, pour comprendre les leviers de sortie du sous-développement et les voies de l’émancipation. Dans ce cadre, nous approfondissons l’analyse de la dépendance par l’approche régulationniste, dans un cas particulier, celui du Burkina Faso.

  • 1 Dans la TR, le régime d’accumulation désigne l’ensemble des régularités assurant une progression gé (...)

2Le caractère rentier de l’économie du Burkina Faso interroge les conditions politiques et institutionnelles de la stabilité d’un tel régime. En situant notre travail dans le cadre de la Théorie de la Régulation (TR), nous interrogeons ainsi la cohérence d’ensemble d’un système économique tiré par la rente (Lazès, 2012 ; Faudot, 2014 ; Boyer, 2015). La régulation est d’autant plus nécessaire dans le cadre d’un régime rentier que l’instabilité y est forte, du fait de la vulnérabilité de ce revenu aux aléas des marchés internationaux et de son caractère indéterminé qui implique qu’il peut être affecté différemment en fonction de la production, la consommation et l’investissement (Talha, 2003 ; Beaulieu, 2008). Cette question se pose à plus forte raison pour le cas burkinabé, car les dynamiques de longue période qui traversent l’économie sont complexes. Malgré le caractère rentier, la balance commerciale demeure déficitaire sur toute la période. Par ailleurs, le constat d’une accumulation « bloquée » (Amin, 1973) – au sens du capital physique et de la production manufacturière (Lipietz, 1985) – du fait de la forte compétitivité des importations est à nuancer. On observe des processus d’industrialisation tirés en partie par ce revenu (Ouali, 1986) qui peuvent constituer les prémisses d’un « régime rentier d’accumulation1 ». De ce fait, le choix du Burkina Faso est pluriel. Il permet d’amener une réflexion exploratoire sur la TR en Afrique subsaharienne. Par ailleurs, il est une entrée pertinente pour mieux comprendre les économies rentières africaines et en saisir les spécificités. Devenu indépendant en 1960, le Burkina Faso a été un pays très instable politiquement jusqu’à la fin de la révolution Sankariste, mais il a connu malgré cela une croissance économique régulière. Protectionniste durant cette période, le pays s’ouvre tardivement aux institutions de Bretton Woods au début des années 1990.

3Interroger la régulation d’un régime rentier invite à une étude de l’évolution des dynamiques macroéconomiques, institutionnelles et politiques et de leurs interactions (deuxième partie). Pour cela, nous proposons d’étudier plus particulièrement la forme et le rôle de l’État au Burkina Faso d’un point de vue historique. La structure rentière d’une économie met en effet l’accent sur cette forme institutionnelle. À partir de l’approche régulationniste, nous développons une grille d’analyse qui met en tension les crises et régularités macroéconomiques et institutionnelles avec les rapports sociaux conflictuels qui traversent le pays et conduisent à des compromis institutionnalisés. Les parties suivantes déclinent notre analyse empirique, que nous décomposons en deux sous-périodes (1960-1987 et 1987-2014) cohérentes du point de vue des dynamiques de longue période que connaissent la Haute-Volta puis le Burkina Faso.

4Cette approche permet d’appréhender les liens qui s’opèrent dans cet espace entre les logiques politiques, institutionnelles et économiques. La forme étatique est ainsi liée aux autres formes institutionnelles (intégration internationale, monnaie, concurrence, rapport salarial) à travers le mode de régulation. Le renforcement du système de rente au Burkina Faso peut alors s’expliquer par une codification particulière des formes institutionnelles à laquelle la forme de l’État contribue au premier rang de la hiérarchie institutionnelle. Ce système économique s’est maintenu depuis l’indépendance, car ses fondements externes que sont la forme monétaire et la forme d’insertion à l’international ont engendré des rapports de dépendance économique, qui ont évolué dans leur forme. Mais, il s’est également consolidé et développé par le biais de mécanismes internes, notamment la forme particulière de l’État burkinabé mixant les contraintes de bonne gouvernance et les pratiques clientélistes. Par ailleurs, par l’étude des fondements internes du mode de régulation et de ses crises, la TR permet de montrer et d’expliquer pourquoi le régime rentier du Burkina Faso a connu des soubresauts et s’est transformé. Les groupes socio-politiques, qui portent des intérêts divergents, sont en lutte afin de bénéficier d’un mode de résolution des conflits redistributifs qui leur garantit un accès aux ressources rentières, mais créent de l’instabilité au niveau institutionnel.

1. Quelle cohérence politique et institutionnelle d’un régime rentier dépendant ? L’étude de la forme étatique du Burkina Faso

1.1. Forme d’insertion internationale dépendante et économie rentière

5La dépendance au Burkina Faso (Ouali, 1986) est le fait d’une structuration rentière de son économie qui implique un rapport de domination extérieure multiple. La réalisation du circuit de la rente (Hausmann, 1981) fait intervenir à la fois le mode d’insertion internationale et la forme monétaire qui déterminent les gains. La rente est dépendante des prix mondiaux des marchés de produits primaires et donc de la demande internationale (Peguin & Talha, 2001 ; Talha, 2003). Dans le cadre du Burkina Faso, ces deux formes institutionnelles renvoient à plusieurs dimensions de la dépendance du pays.

6L’insertion à l’international du Burkina Faso se réalise dans le cadre d’une division internationale du travail inégalitaire. Durant la colonisation, l’économie du Burkina Faso est sous la coupe de l’administration de la métropole et dépend directement de la demande des pays développés (Amin, 1973). Avec l’accession à l’indépendance, les rapports de dépendance mutent, mais la structure inégale des échanges internationaux perdure. L’indépendance laisse ainsi la place à une division internationale du travail qui cantonne le pays à la production et à l’exportation de ressources primaires à faible valeur ajoutée et qui empêche son développement (Mende, 1972).

  • 2 Selon les accords passés avec la France (1962, 1973), cette parité peut être modifiée par les gouve (...)

7La forme d’insertion à l’international « dépendante » est appuyée par le régime monétaire basé sur le Franc CFA (FCFA) qui limite fortement la maîtrise du Burkina Faso sur ses politiques monétaires. Créée en 1945, cette monnaie, gérée en partie par la France, est commune aux États constituant l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine. Elle repose sur la convertibilité illimitée du FCFA en francs, puis en euro, avec une parité fixe sans aucune marge de fluctuations, les transferts de capitaux étant libres entre la zone Franc et la France2. Cette garantie s’appuie sur l’obligation des réserves de changes placées au Trésor français, la responsabilité de cette stabilité revenant alors aux Africains, alors que la France est représentée dans ces instances avec un droit de veto (Nubukpo et al., 2016).

8Pour financer son déficit commercial, le Burkina Faso est obligé d’avoir recours de manière croissante, depuis son indépendance, au financement extérieur. On peut d’ailleurs apprécier l’évolution du phénomène de dépendance à partir de l’évolution de la structure de l’endettement externe, plus généralement en Afrique subsaharienne. En 1980, lorsque la crise de la dette éclate, les banques privées sont très présentes. Elles comptent pour 43 % de la dette extérieure publique, contre 17 % alors pour la part multilatérale et 40 % pour la part bilatérale. Cette crise va entraîner un report de la dette vers les créances multilatérales, et l’augmentation des taux d’intérêt (Toussaint et al., 2015). En échange de ces prêts, le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque mondiale imposent des conditions drastiques à travers les Plans d’Ajustement Structurel (PAS). Cette dépendance financière s’arc-boute sur une domination politique internationale.

9Ces différentes sources de dépendance montrent que la régulation du Burkina Faso dépasse le cadre national et implique une forte contrainte externe relative à l’obtention des gains à l’extérieur. Cependant, ces facteurs caractérisent plusieurs pays ouest-africains. Ils ne permettent donc pas de saisir les spécificités du pays. Or, Le Burkina Faso est marqué lui-même par des singularités. Tout en étant intégré dans le commerce international et en en subissant les effets, il ne constitue pas pour autant une « périphérie » uniquement passive. À travers ses élites politiques, ce pays a mené, et mène toujours, des stratégies actives d’obtention de ressources à l’international qui se répercutent sur les formes de productions et d’emplois (Samuel, 2013).

10La dépendance, comme domination économique et politique externe, peut-elle être le seul élément central qui coordonne l’évolution économique du Burkina Faso ? C’est la question de la diversité des modèles d’économies dépendantes qui se pose ici. La dépendance est certes liée à un rapport de domination extérieure, mais l’Afrique est « ambiguë, plurielle et évolutive », rappelle Philippe Hugon (2013, p. 8-9). Les trajectoires de ces économies sont variées, de sorte que même un régime dominé déploie ses propres spécificités internes, qui permettent de distinguer son modèle de régulation des autres pays subissant les mêmes contraintes. Dans ce cadre, approfondir l’analyse de la dépendance par l’approche régulationniste s’avère pertinent, car cette dernière tente de saisir la cohérence d’ensemble des formes institutionnelles externes et internes au niveau national (Vernières, 2008). De ce fait, cette approche permet d’appréhender les liens qui s’opèrent dans cet espace entre les logiques politiques, institutionnelles et économiques. Il est alors possible de penser plusieurs modes de régulations, qui correspondent à des configurations et modalités particulières des formes institutionnelles (Boyer, 2015). Cet aspect renvoie à l’une des dimensions de l’hypothèse de complémentarité institutionnelle (Amable, Barré & Boyer, 1997 ; Amable, 2005), entre les formes institutionnelles ayant trait, dans le cas du Burkina Faso, aux conditions externes (forme d’insertion à l’international et forme du régime monétaire) et les formes institutionnelles internes (rapport salarial, forme de la concurrence et forme de l’État). La légitimité du mode de régulation s’obtient à un niveau macroéconomique (Lipietz, 1985 ; Boyer, 2015). Pour cela, les formes institutionnelles doivent être complémentaires et s’établir sous forme de hiérarchie, selon le rôle plus ou moins déterminant que joue chacune d’entre elles dans la stabilité d’un régime d’accumulation.

11La régulation d’un régime rentier place notamment l’ordre politique et l’État au premier niveau de cette hiérarchie (Marquès-Pereira & Theret, 2001 ; Peguin & Talha, 2001). C’est l’État qui va déterminer l’affectation et la circulation des rentes (Beaulieu, 2008). La dépense publique est la première modalité de réalisation de la rente. L’ambivalence que contient le revenu rentier implique une tension qui ne peut se résoudre qu’avec un compromis institutionnalisé qui viendra régler la répartition pour un temps (Talha, 2003 ; Lazès, 2012 ; Faudot, 2014). Dans ce cadre, c’est l’État qui détermine la forme de la concurrence et la forme du rapport salarial (Peguin & Talha, 2001 ; Talha, 2003). Par ailleurs, la rente permet de légitimer et de renforcer le pouvoir de l’État, en menant des politiques de développement ou en entretenant des réseaux de clientèles qui induisent une forme de redistribution. Elle devient alors une ressource politique pour les élites étatiques et vient soutenir un mécanisme auto-entretenu : par la rente, l’État peut étendre son action et ses institutions, ce qui en retour renforce le développement du régime rentier (Beaulieu, 2008).

1.2. Étudier la forme de l’État Burkinabé par la TR

12Dans cette perspective, la TR attribue un rôle déterminant à la sphère politique et établit un lien entre les dynamiques politiques, institutionnelles et économiques de long terme. La forme de l’État se définit comme un ensemble de compromis institutionnalisés qui, une fois établis, produisent des règles et des régularités, par exemple dans l’évolution des dépenses publiques ou le partage du revenu (Boyer, 2015). Ces compromis institutionnalisés sont le résultat de rapports de force entre plusieurs groupes socio-politiques qui soutiennent différentes modalités de l’action publique. Ce sont donc les rapports entre ces groupes qui vont produire les règles qui gouvernent ensuite la dynamique économique. Par ailleurs, les compromis institutionnalisés sont instables et donc les rapports de force contribuent au changement social, vers la création d’autres compromis. L’approche régulationniste tente de tenir compte des logiques antagoniques qui peuvent s’opposer dans l’accès au pouvoir politique, tout en montrant la cohérence institutionnelle que trouvent a posteriori ces logiques en produisant de la régulation (Boyer, 2015).

13Cependant, peu de travaux régulationnistes portent sur les pays africains et la mobilisation de cette approche sur ces terrains pose un certain nombre de difficultés méthodologiques (Hugon, 2015). Il y a donc un intérêt à étendre le cadre de la TR en direction de ces pays afin d’enrichir son contenu analytique (El Aoufi, 2009), mais des ajustements sont nécessaires (Vernières, 2008). Comme l’évoque Hugon : « l’État postcolonial a pris le relais de l’administration coloniale tout en devenant progressivement le lieu de constitution de classes accaparant les rentes tant extérieures qu’internes » (Hugon, 2013, p. 19). L’État rentier dispose d’une certaine autonomie (Talha, 2003), mais sa relation à la société est directe et importante, car la légitimité de l’élite au pouvoir dépend des largesses accordées à une partie conséquente de la population. L’État rentier a un rôle redistributeur (Beaulieu, 2008). Les groupes socio-politiques, qui portent des intérêts divergents, sont en lutte afin de bénéficier d’un mode de résolution des conflits redistributifs qui leur garantit un accès aux ressources rentières, mais créent de l’instabilité au niveau institutionnel. Se pose alors la question de l’identification de ces groupes socio-politiques et de leurs rapports antagoniques. En définitive, pour repérer ces groupes socio-politiques, nous avons fait le choix de nous référer essentiellement à la littérature portant sur la question étatique au Burkina Faso et parfois, plus généralement en Afrique de l’Ouest (Bayart, 1989 ; Chabal et Daloz, 1999 ; Hugon, 2013, 2015 ; Mamdani, 1996 ; Otayek, 2013 ; Englebert, 1987 ; Lejeal, 2005 ; Natielse, 2013 ; Samuel, 2013). Leur positionnement diffère des classes sociales dans les économies à dominante capitaliste. « Ces groupes n’existent pas en soi, ils n’ont pas de mécanismes de représentation propres, leurs organisations sont multiples, concurrentes et à légitimité variable » (Lavigne Delville & Thieba, 2015, p. 226).

14Dans le cadre africain, ces formes particulières que prennent de tels groupes sont liées à une prépondérance des logiques clientélistes et à des formes poussées de factionnalisme. La survivance de certaines structures sociales et de systèmes de valeurs vient expliquer à la fois le maintien du système rentier et sa fragilité (Lazès, 2012). Il faut donc accorder de l’importance aux règles coutumières dans l’attribution du pouvoir ou aux communautés d’appartenance et d’adhésion qui jouent un rôle central (Hugon, 2015). Les classes rentières qui se sont constituées pour partie durant la colonisation, et ont accaparé le pouvoir à l’indépendance, disposent d’un pouvoir politique important qui découle du système économique. Mais cela les oblige néanmoins à une confrontation dans le champ politique pour garantir leur revenu. Il nous faut donc tenir compte des configurations particulières entre droits coutumiers et État légal, entre salariat et informalités, entre rural et urbain, ou encore entre mode de production traditionnelle et économie capitaliste (Vernières, 2008 ; El Aoufi, 2009 ; Hugon, 2015). La relation entre institutions formelles et informelles est fondamentale dans la construction des États africains, dans des configurations bien différentes de la construction des États Nations occidentaux pour lesquels la TR est au départ pensée. L’économie est toujours encastrée dans des relations et des réseaux sociaux multiples (Polanyi, 2009 [1944] ; Hugon, 2015). Au Burkina Faso, ces règles se fondent sur un mode de régulation de l’espace politique dit « néo-patrimonial » (Médard, 1991 ; Loada, 2012 ; Meunier, 2001 ; Natielse, 2013), couplant cadre étatique formel et légitimité traditionnelle qui structurent les relations entre forces économiques et forces politiques.

1.3. Une grille d’analyse centrée sur l’État rentier

  • 3 Une précision nous semble nécessaire afin d’examiner les chiffres de cet article avec du recul. En (...)

15La première étape consiste à observer les régularités macroéconomiques sur une longue période à travers plusieurs indicateurs retenus en fonction de leur pertinence dans l’observation de la dynamique rentière et dépendante (balance commerciale, termes de l’échange, balance des paiements3…), mais aussi les irrégularités, dans la mesure où les crises sont centrales dans l’approche de la TR. Il existe plusieurs formes de crises qui sont l’expression des différentes dynamiques qui traversent l’économie et sont fonction de l’incidence avec laquelle ces perturbations impactent le modèle de développement (Boyer, 2015). Ces crises sont donc révélatrices des modalités d’articulation. Dans la TR, la spécificité de ces crises est liée à « la discordance entre les temporalités d’action et d’évolution des formes institutionnelles » (Vercueil, 2016 ; p. 4). Les incohérences rythmiques des institutions créent des désajustements et des contraintes pour les agents, nécessitant des adaptations au sein du système pour les petites crises, jusqu’à une reconfiguration du mode de régulation voire du mode d’accumulation pour les grandes crises.

  • 4 3,2 % par an (Morrisson & Azam, 1999) de 1960 à 1990 en moyenne, et 5,7 % de 1991 à 2014 en moyenne (...)

16Afin de mettre en rapport ces dynamiques macroéconomiques du régime rentier avec la forme étatique qui les soutient, l’analyse se concentre dans un second temps sur les politiques économiques que met en place l’État et les changements politico-institutionnels qu’il connaît. Notre recherche nous amène ainsi à observer sur un temps long – de l’indépendance en 1960 à la fin du régime de Blaise Compaoré en 2014 – les mécanismes institutionnels qui ont permis au Burkina Faso de maintenir une croissance relativement élevée pour la région considérée, notamment à partir des années 19704. Ce qui nous amène à décrire et analyser l’évolution des cinq formes institutionnelles, les rapports qu’elles entretiennent pour chacune des périodes et l’incidence des politiques économiques sur leur structuration.

17Nous analysons dans un troisième temps les compromis institutionnalisés qui fondent l’État. Il s’agit alors d’identifier les groupes socio-politiques et leurs rapports conflictuels qui aboutissent à des compromis et viennent soutenir in fine la forme de l’État par la répartition des ressources du régime rentier qu’elle opère en leur faveur. Ceci nous amène à nous intéresser aux évolutions du régime politique révélatrices de tensions entre ces groupes et qui impliquent de nouvelles configurations des compromis institutionnalisés (Vercueil, 2016).

18De l’ensemble des éléments, nous pouvons développer une grille d’analyse du rôle de l’État dans la dynamique de développement (Figure 1). Pour analyser le cas burkinabé, il faut distinguer les crises exogènes, qui ne mettent pas en danger le mode de régulation, et endogènes, permettant de résorber les déséquilibres formés par les phases de croissance, des crises ayant plus d’incidence : les crises du mode de régulation, entraînant une reconfiguration des formes institutionnelles et les crises du régime d’accumulation, entraînant un bouleversement majeur des formes institutionnelles et crises du mode de développement (effondrement du système) (Boyer, 2015).

Figure 1. Étude de la forme étatique au Burkina Faso – grille d’analyse

Figure 1. Étude de la forme étatique au Burkina Faso – grille d’analyse

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Source : Auteurs

19À partir de cette grille, nous avons divisé la séquence analytique qui suit en deux périodes en fonction des évolutions institutionnelles et macroéconomiques de la Haute-Volta puis du Burkina Faso. Le premier temps s’étend de la décolonisation, en 1960, avec un protectionnisme croissant et une forte instabilité politique, jusqu’à la prise de pouvoir de Compaoré en 1987. Si la mise en œuvre des plans d’ajustements structurels (PAS) n’a lieu que quatre ans plus tard, nous verrons que les premières années du régime Compaoré constituent un moment de reconfiguration avec un compromis institutionnalisé orienté vers la libéralisation. Cette ouverture marque la fin d’une période de crise intense avec l’essoufflement du mode de régulation qui se met en place après l’indépendance sur les bases de l’économie coloniale (Vernières, 2008). La séquence se termine avec la chute du régime de Compaoré en 2014.

2. Protectionnisme, rente et compromis instable : 1960-1987

2.1. Planification interne et insertion difficile au capitalisme international

20Cette première période est marquée par le « modèle postcolonial » ou « modèle néo-colonial de croissance » et son épuisement progressif (Duruflé, 1988, p. 10 ; Hugon, 2013, p. 19). L’économie est tirée principalement par les exportations agricoles. La croissance est positive, mais elle est fortement vulnérable aux aléas climatiques et à l’instabilité des marchés internationaux. Elle connaît une chute en 1976, 1982 et 1984. Selon les années, le coton a représenté au Burkina Faso 55 à 70 % des recettes d’exportations du pays et une tendance autour d’un tiers du PIB, ayant un effet d’entraînement sur d’autres secteurs d’activité (Hauchart, 2007).

21Le modèle « néo-colonial » caractérise une économie de type « rentière » où l’État nouvellement indépendant remplace l’administration française et permet ainsi à l’élite d’accaparer les rentes (Bayart, 1989 ; Hugon, 2013). En 1969, l’État crée une association qui se transformera en Société Voltaïque des fibres textiles (SOFITEX), une société dans laquelle l’État voltaïque détient 65 % du capital. Cette stratégie s’appuie sur une politique protectionniste. Les prix d’achat du coton aux agriculteurs font l’objet d’une fixation ex ante par les organismes d’État qui déterminent ainsi les marges commerciales (Ouali, 1986). L’État organise l’économie de manière à garantir la rente, freinant dès lors toutes autres tentatives d’accumulation. À travers cette stratégie, la forme de la concurrence se voit organisée en régime monopoliste (Hollard, 2006). Le nombre d’établissements et d’entreprises publiques augmente rapidement.

22Les taux de change fixes du FCFA ont maintenu une monnaie surévaluée et appuyé le surplus d’importation, ce qui n’a pas permis de favoriser les investissements (Kabore, 2011). Ils restent cantonnés aux secteurs rentiers, notamment le coton et l’or. « Certains facteurs (capital) ne seront mis en valeur que dans des branches bien déterminées suivant un taux d’investissement défini à l’avance et qu’il n’est pas permis de dépasser » (Ouali, 1986, p. 7). Par conséquent, le secteur industriel demeure embryonnaire et représente seulement 11 % du PIB en 1980. Pis, le pays subit des ponctions importantes exercées par le capital étranger qui l’empêchent de consolider sa capacité d’accumulation. En 1977, le capital social global des 16 plus grandes entreprises du pays était encore maintenu à 43 % par le capital étranger (Ouali, 1986). Mais la richesse créée à l’aide des investissements étrangers (IDE) repart sans qu’elle puisse être réinvestie : « [en 1981] Le Burkina a versé 6,023 millions de plus qu’il n’en a reçu » (Ouali, 1986, p. 29).

23Durant la période, le développement et l’organisation du salariat public deviennent un moyen de distribuer les subsides de la rente à une partie de la population désormais urbanisée. L’État constitue le principal employeur du pays en raison du rôle prépondérant qu’il joue dans le domaine économique. Hérité de la colonisation, le système opère une division entre une classe de salariés citadins – possédant des droits légaux – et la grande masse des travailleurs ruraux (80 % de la population) pour lesquels s’appliquent les règles coutumières (Hilgers & Mazzocchetti, 2010), conduisant la nouvelle classe urbaine salariée dans le circuit de redistribution de la rente. Le besoin de financement est également couvert par les transferts nets provenant des migrants. Dans les années 1970, avec le boom du café en Côte d’Ivoire, puis celui du cacao dans les années 1980, on observe une hausse des transferts très importante (Ouali, 1986).

24La conservation de la structuration coloniale de l’économie de traite va contribuer à maintenir la dépendance qu’exercent les pays industrialisés, et notamment la France, sur la Haute-Volta. Les débouchés restent limités. L’organisation de la production et du commerce extérieur oblige le pays à importer des biens d’équipement, mais aussi des produits alimentaires et pétroliers. L’économie demeure marquée par une balance commerciale structurellement déficitaire. Entre 1975-1987, le taux de couverture des importations par les exportations est inférieur à 50 %. Sur l’ensemble de la période 1960-1991, la hausse des importations est beaucoup plus importante que celle des exportations.

25À partir de la fin des années 1960, ce modèle entre en crise par l’effet cumulé de l’arrêt du soutien des prix, de la dégradation des termes de l’échange, des vagues de sécheresse, de la faiblesse de la productivité et du ralentissement de l’activité économique mondiale à la suite du premier choc pétrolier (Diouf, 1992 ; Duruflé, 1988 ; Coquery-Vidrovitch, 1999). Le modèle colonial connaît un « épuisement progressif » résultant des effets cumulés de différentes crises (Hugon, 2013, p. 19). Les années 1970 laissent place à une « économie d’endettement internationale », qui a retardé la crise tout en l’accentuant, sous la pression externe des banques étrangères et des partenaires commerciaux, et sous la pression interne des décideurs nationaux qui souhaitent réorienter le modèle vers la nationalisation des entreprises étrangères financées largement par l’endettement extérieur. Mais le processus d’import-substitution devient coûteux, en raison de la balance commerciale déficitaire et du recours croissant à l’État (Duruflé, 1988 ; Hugon, 2013). Le premier mode de régulation s’épuise, il ne peut plus résorber les crises endogènes dans un contexte de dégradation de l’environnement international.

2.2. De l’échec de la stratégie d’étatisation à la crise du modèle post-colonial et à l’affirmation d’une structure pleinement rentière

  • 5 On dénombrera alors 41 établissements publics à caractère industriel et commercial, 34 sociétés d’é (...)

26La politique d’import-substitution et la promotion de biens manufacturés ont pour objectif de créer une agro-industrie par l’intégration de la filière cotonnière pour accroître les parts de marchés à l’international et améliorer les termes de l’échange. C’est cet objectif qui conduit à une « stratégie d’étatisation » de l’économie (Ouali, 1986, p. 42) et qui conduit à des dynamiques d’accumulation localisée sectoriellement et temporellement. Elle consiste à réorienter les rentes vers l’investissement productif. L’industrialisation se base alors sur l’État à travers divers plans et celui-ci reste, jusqu’en 1991, le principal investisseur dans le pays5, notamment durant la période Garango.

27Cependant, l’investissement public oscille au gré des régimes politiques. Il augmente continuellement jusqu’en 1974, avant de connaître une phase de baisse puis de stagnation entre 1975 et 1983, et de nouveau une forte hausse sous Sankara (OCDE, 1999). On observe également ce type de tendance avec la politique du commerce extérieur et la politique monétaire. Le taux d’ouverture du Burkina Faso évolue en fonction des gouvernements. Il s’accroît fortement entre 1965 et 1975, ralenti entre 1975-1985, est en baisse entre 1985-1990. On peut également distinguer trois périodes quant à la politique monétaire, faisant succéder une politique structuraliste ou monétariste (Marquès-Pereira & Théret, 2001). Dans les années 1960 et au début des années 1970, les instruments étaient d’inspiration libérale, tout en visant à assurer la qualité des créances bancaires par une surveillance de la solvabilité des entreprises par la BCEAO. La politique monétaire est restrictive. Dans les années 1970, la politique monétaire devient expansionniste afin d’appuyer la politique d’investissement.

28Ces variations de politique économique sont corrélées avec les changements fréquents à la tête de l’État qui marquent cette première période (figure 2). L’instabilité politique est révélatrice d’un régime rentier non stabilisé, en ce qui concerne la redistribution des gains ou l’orientation des rentes, qui témoigne d’un compromis non stabilisé. Les gouvernements et les régimes politiques (civil ou militaire) qui se succèdent font évoluer successivement les objectifs dévolus aux politiques économiques. Nous assistons à un affrontement entre un modèle néocolonial, héritage de la domination française, et une volonté de faire évoluer la structure du régime pour atteindre une forme d’indépendance économique qui viendrait accompagner l’autonomie politique. L’État, qui se construit en parallèle, devient l’arène de ces affrontements entre les intérêts divergents des divers groupes sociaux. La période post-indépendance est ainsi marquée fortement par les jeux d’acteurs portant sur l’orientation des rentes. Ces conflits s’appréhendent comme une tension autour de la « stratégie d’étatisation » de l’économie (Ouali, 1986 ; p. 42) qui vient in fine expliquer l’instabilité politique et institutionnelle en Haute-Volta.

Figure 2. L’évolution politique du Burkina Faso de 1960 à 1998

Figure 2. L’évolution politique du Burkina Faso de 1960 à 1998

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Source : OCDE, 1999

29Le volontarisme politique affiché dans le domaine des infrastructures et des secteurs productifs (CNPS, 2011) et les variations de politiques économiques mettent en évidence les difficultés que rencontre l’État voltaïque à modifier son modèle économique et à engager une stratégie d’accumulation rentière dans un contexte de dépendance forte où les ressources à redistribuer sont limitées. Chaque tentative, alors qu’elle accroît les déficits, se solde également par une aggravation des conflits politiques engendrés par la réorientation des rentes vers l’investissement productif. Ainsi, l’instabilité institutionnelle n’est pas que la résultante d’un système rentier trop coûteux, engendrant des déséquilibres économiques qui se concluent par des troubles politiques (Morrison & Azam, 1999). Elle s’explique au départ par des conflits redistributifs qui tendent à favoriser certains groupes socio-politiques.

30La révolution du régime de Sankara va alors marquer une transition importante entre les deux périodes, avec une reconfiguration de la redistribution de la rente et un bouleversement des compromis institutionnalisés, illustrant l’instabilité graduelle du mode de régulation depuis l’indépendance. En 1983, la Haute-Volta devient le Burkina Faso. Sankara rétablit la contraction budgétaire et instaure une politique d’auto-ajustement toujours couplée avec du protectionnisme. Toutefois l’investissement public marque une nouvelle hausse, quintuplant entre 1984 et 1985. Il sera principalement destiné au développement des campagnes (Brial, 2004).

2.3. Rapports de force et compromis autour de la redistribution de la rente : entre logiques coutumières et clientélistes

31De 1960 jusqu’à la prise de pouvoir par Sankara, les groupes principaux qui soutiennent ce régime restent les mêmes : l’armée, les chefs traditionnels, l’Église catholique, les syndicats représentant les salariés formels et les étudiants (urbains), et les membres du parti si le régime est civil. Le budget est alors un moyen de transférer des ressources au profit de cette clientèle politique au départ minoritaire, mais qui s’étend au fur et à mesure pour asseoir la mainmise et assurer la stabilité du pouvoir en place (Morrisson & Azam, 1999 ; Hilgers & Mazzocchetti, 2010). Les salaires représentent alors la principale part des dépenses courantes de l’État, entre 50 et 66 % entre 1975 et 1987 (CNPS, 2001).

32Même si « l’élite urbaine et la population rurale semblent chacune habiter une planète différente, comme s’il existait au sein du territoire des enclaves culturelles inaccessibles à l’esprit des “cadres” » (Beucher, 2010, p. 38), les tensions économiques demeurent limitées entre ces deux espaces, d’une part grâce à la forte propension des Burkinabés à migrer qui permet de maintenir un équilibre entre les ressources limitées du pays, en terres et en opportunités d’emploi, et d’autre part grâce à la croissance démographique. Elle fait également bénéficier les familles rurales d’une forme de rente migratoire. Dans les années 1960-1970, les transferts monétaires s’élèvent à près de 5,5 milliards de FCFA (Sautter, 1980). Par ailleurs, la noblesse Mossi, qui contrôle la production de coton au centre et à l’est du pays, hérite du rôle qui lui était dévolu durant la colonisation de soutien à l’administration dans la gestion du pays. Elle a contribué à la formation de l’État burkinabé. Cet État s’est ainsi construit à cheval entre des formes de gouvernement anciennes comme récentes (Beucher, 2017). Une loi étatique qui n’a pas l’assentiment du chef local n’a que peu de chance d’être respectée (Bado, 2015). Cependant, à l’ouest, la majorité des producteurs de coton est issue de diverses sociétés acéphales ou segmentaires, échappant à l’influence des chefs traditionnels (Ouedraogo, 2006). Le régime au pouvoir ne peut donc passer par ces chefs pour obtenir le soutien des populations, leur conférant de facto une autonomie politique locale (Loada, 2012). Enfin, l’Église catholique joue un rôle important. Elle conserve la place convoitée d’institution de formation des élites qu’elle occupait déjà durant la colonisation, alors que les leaders musulmans étaient fortement réprimés dans un pays où l’islam est majoritaire (Koussoubé et al., 2015).

33La période Sankara marque une évolution dans plusieurs domaines. Les syndicats, ainsi que les chefs traditionnels jugés responsables du retard des campagnes, sont mis de côté, voire réprimés, au profit de la paysannerie, dont le nouveau régime cherche à faire une « classe révolutionnaire » (Salifou, 2007). Une réforme est mise en place pour le développement et l’extension du système de santé et d’assistance sociale à l’ensemble de la population. L’Église, durant cette période, reste volontairement discrète (Kane, 2015). Cependant, les tensions vont s’accumuler aux plus hautes sphères du pouvoir et dégrader une légitimité des institutions formelles déjà difficile à asseoir (Samuel, 2013). Les syndicats vont peu à peu s’unifier à nouveau. Les pressions internationales vont appuyer le mécontentement des anciennes coalitions politiques laissées pour compte par l’auto-ajustement (Zagré, 1994). En effet, l’auto-ajustement ne permet ni le rééchelonnement ni la remise de la dette. Pour le FMI et la BIRD, le pays ne peut se développer que par les PAS. Ainsi :

[les] effets découlant des mesures de compression des dépenses, par la diminution des effectifs et la réduction des avantages, ont été anéantis par l’obligation qu’avait le gouvernement d’imputer certaines dépenses au budget de l’État alors qu’elles étaient auparavant financées par les partenaires de coopération. (Zagré, 1994, p. 175-176)

3. De la transition de 1987 à la stabilisation du compromis institutionnalisé dans les années 1990 et 2000

3.1. Une stratégie active de gains à l’international

34En 1987, après l’assassinat de Sankara, le pouvoir passe aux mains de Compaoré et, à partir de 1991, le pays devient un régime civil ; la politique « d’auto-ajustement » perdure jusqu’à cette date. Mais durant cette période transitionnelle, Compaoré prépare la refonte de l’État et de l’économie. Le Burkina Faso s’engage alors dans la voie de l’ajustement structurel. La nouvelle politique économique est formulée en 1991 (Samuel, 2013). Elle mêle libéralisation et planification avec d’une part, le premier PAS adopté par voie démocratique et, d’autre part, le second plan quinquennal de développement populaire, toujours centré sur les investissements dans l’agriculture.

35Avec cette nouvelle politique, le Burkina Faso s’engage alors dans une stratégie active de gains à l’international. La politique d’import-substitution est abandonnée au profit d’un modèle intégral de promotion des exportations de ressources primaires, qui se traduit par une « complexification » du système économique rentier (Magrin, 2010, p. 57) entraînant l’évolution de la structure des exportations. On assiste ainsi au développement du secteur cotonnier, à celui des mines, mais aussi à l’accroissement des volumes d’aides, des rentes de situation et à la hausse de l’envoi des fonds par les migrants. Entre 1981 et 2006, la production de coton va être décuplée. De 1997 à 2007, elle augmente de 17 % par an et la part du Burkina Faso dans les exportations mondiales triple (Banque Mondiale, 2007). Cependant, c’est le secteur minier qui connaît la hausse la plus remarquable. Il représentait 7,9 % du PIB en 2015 d’après le ministère des Mines, pour une prévision de plus de 10 % pour 2020. Le développement des ressources d’export est le fait de l’évolution importante des IDE au Burkina Faso. Dans les années 1990, ils augmentent significativement dans divers domaines, et se renforcent avec la dévaluation du FCFA en 1994. D’une moyenne de 1,8 million de dollars par an entre 1980 et 1991, il passe à 10,2 millions de 1992 à 2001, puis 25,2 millions entre 2002 et 2006 (UNCTAD, 2009).

36La diversification des ressources extérieures est le fait d’une stratégie active de l’État burkinabé qui se concentre également sur de nouvelles formes de rentes, celles issues de l’ouverture démocratique et du respect des normes internationales de « bonne gouvernance ». L’État développe ainsi des techniques de marketing pour maximiser sa rente de situation (Samuel, 2013). La décentralisation va également se mettre en place dans les années 1990, suivant les recommandations internationales. Elle va permettre, pour le pouvoir burkinabé, d’obtenir un espace supplémentaire d’accumulation des ressources, à travers les flux d’aide extérieurs à destination des projets locaux (Natielse, 2013).

37Ainsi, le nouveau régime de croissance ne connaît pas une profonde rupture structurelle, mais plutôt une exacerbation des tendances rentières, dont la provenance des ressources s’est diversifiée (Magrin, 2010). Cependant, cette politique ne modifie la position extérieure du pays qu’à la marge. On assiste à une hausse des exportations (44 %), mais également à une forte détérioration des termes de l’échange, et à une érosion de la compétitivité des produits exportés sur marché international. Cela contraint la politique de stimulation de l’offre intérieure, ce qui n’a pas contribué à une baisse des importations. Malgré la dévaluation, l’ouverture du pays ou encore la hausse des IED, la balance commerciale reste déficitaire, le taux de couverture des importations par les exportations est inférieur à 50 % entre 1988-1999, avec toutefois une pointe à 62,6 % après la dévaluation. Par ailleurs, étant soumises aux aléas des marchés internationaux, les exportations subissent parfois des baisses tendancielles importantes, comme en 1996. L’économie reste donc toujours soumise à des chocs exogènes qui sont en fait inhérents à l’affirmation de sa structure pleinement rentière.

38La structure de l’endettement continue à évoluer. Alors que les créanciers multilatéraux détiennent 54 % de l’encours de la dette en 1980, ce chiffre monte à 88 % en 1997, dont 64 % pour les Institutions de Bretton Woods, ce qui leur permet d’imposer leurs conditionnalités (OCDE, 1999, 2008 ; Bedossa, 2012). La mise en œuvre des PAS à partir de 1991 entraîne une reprise forte du taux d’endettement, qui culmine en 1994 à plus de 60 % du PIB. Par la suite, le Burkina Faso se conformant aux normes internationales, le pays va bénéficier d’importantes annulations de dette durant la décennie 2000, grâce à l’Initiative Pays Pauvres Très Endettés (Samuel, 2013). Le taux d’endettement public passe alors de 57 % du PIB en 2000 à 21,7 % du PIB en 2006 et 24 % en 2010.

39Par conséquent, les PAS et la politique de développement des sources d’export ont surtout accentué la dépendance du Burkina Faso. On assiste à une réduction des marges de manœuvre du pays en contrepartie de l’obtention de gains à l’international et de nouvelles sources de revenus qui contribuent à une structuration pleinement rentière de l’économie.

3.2. Les conséquences de l’abandon de la stratégie d’étatisation

40L’abandon de la stratégie d’« étatisation » va faire évoluer la forme de la concurrence, la forme de l’emploi et la forme monétaire à partir des années 1990. En lien avec les prérequis des institutions internationales, le contrôle des dépenses publiques devient plus strict, couplé avec un programme d’augmentation des recettes fiscales. L’économie du Burkina Faso se structure autour d’un régime concurrentiel tourné vers l’extérieur. Le secteur privé se développe avec la libéralisation des marchés. On assiste à une dérégulation des secteurs productifs et du commerce, une réduction des subventions et une réforme de la fonction publique. Les sociétés d’État sont privatisées et entre 1991 et 1994 ; on élimine la quasi-totalité des restrictions tarifaires, ce qui entraînera une hausse générale du prix des services publics. La période débute également par une baisse de l’investissement avant la dévaluation de 1994, puis une stabilisation à 20 % du PIB.

41Le secteur cotonnier, principale source de rente, est libéralisé (Koussoubé et al., 2015). L’ancien monopole de la SOFITEX est supprimé en 2004. Cette ouverture entraîne une hausse des investissements dans le secteur qui va contribuer à une hausse de la productivité à l’hectare. Mais cette modernisation de l’outil productif renforce la dépendance du pays, car elle est le fait d’importations de biens en capital venant des pays industrialisés, par exemple 97 % des intrants proviennent de multinationales occidentales (Hauchart, 2007). Elle ne permet pas non plus de modifier la spécialisation du pays, qui reste cantonnée à la commercialisation du coton graine sans transformation locale de la matière première brute. Par ailleurs, les sociétés d’exploitations cotonnières sont détenues par des capitaux privés étrangers, même si la production dépend toujours d’un ensemble de petits producteurs familiaux, dont la rémunération, avec les PAS, va dépendre de plus en plus du cours mondial du coton (Indice Cotlook A, qui connaît des variabilités importantes) (Banque Mondiale, 2007).

42Le passage à un régime concurrentiel apporte également deux principaux changements à la forme d’emploi salarial : la libéralisation du marché du travail et la prise en compte du secteur informel. Le régime Compaoré met ainsi fin à une dynamique de transition vers le salariat public. À la fin du régime Sankara s’amorce une période de transition. Le nouveau Code du travail de 1992, puis celui de 2004, avancent vers toujours plus de protection des droits et des acquis sociaux des travailleurs. Mais une rupture intervient à partir de 2008 ; elle reflète l’influence des normes internationales. Un nouveau code du travail est établi, promouvant de nouveaux emplois, plus de souplesse et de flexibilité dans la gestion des relations de travail. L’évolution des salaires privés, toujours issus des négociations collectives, est désormais totalement dissociée des hausses de rémunération appliquées au secteur public. À partir de 1988, le gouvernement cherche à promouvoir l’emploi en stimulant l’initiative privée, en particulier l’auto-emploi informel. Il s’agit de soutenir le développement des petites et moyennes entreprises dans le milieu urbain, tandis que dans le milieu rural, l’effort porte sur la promotion des activités génératrices de revenus. En 2012, la sphère informelle représente 25 % du PIB et emploie environ 70 % de la population active non agricole.

43La politique monétaire est également orientée dans le but d’accompagner la libéralisation des échanges, la promotion des exportations et l’obtention des gains à l’international par le respect des critères internationaux. Les évolutions de la forme monétaire continuent de contribuer à limiter les marges de manœuvre du Burkina Faso et accroissent de facto sa dépendance. La forme monétaire donne ainsi à voir la collusion entre les partenaires extérieurs et les élites du Burkina Faso qui bénéficient toujours de la liberté de circulation des capitaux (Nubukpo et al., 2016).

3.3. Étendre la base clientéliste et obtenir une légitimité sur le plan international pour renforcer le régime rentier

44Le mode « clientéliste » de résolution des conflits redistributifs (Marquès-Pereira & Théret, 2001) entraîne une stabilisation du régime avec le maintien au pouvoir de Compaoré de 1989 à 2014, mais il implique ici un accroissement continuel des bénéficiaires de rente autour de relations dites « néo-patrimoniales », ce qui suppose l’extension des ressources rentières. En mettant l’accent sur la promotion de l’État de droit en même temps que la libéralisation économique, Compaoré essaye d’asseoir sa propre légitimité pour se maintenir au pouvoir. Il travaille à légitimer à nouveau les actions de l’État, à la fois sur les plans interne et externe. Cela passe notamment par le renforcement des procédures légales, « ces dernières ayant été précédemment considérées comme des instruments au service de l’“ordre bourgeois” sous Sankara » (Samuel, 2013, p. 349). Dans le même temps, la mise en œuvre des politiques de désengagement en 1991 est instrumentalisée par les élites dominantes (Koussoubé et al., 2015). Une « démocratie de subsistance » se construit alors (Otayek, 1992) : avec les premières élections des années 1990, les hommes politiques d’une part, à la recherche de ralliements, et les notables et votants d’autre part, à la recherche de rétributions, vont installer une coalition au pouvoir, formée de l’élite politico-militaire, des milieux d’affaires, des notables et de certains leaders révolutionnaires (Samuel, 2013, p. 353).

45Compaoré rétablit donc les coalitions au pouvoir, dans une nouvelle configuration. Les chefs traditionnels occupent toujours une place capitale dans le système politique et le soutien de Compaoré. Ainsi, la libéralisation du secteur du coton n’est pas totale, contrairement aux préconisations de la Banque Mondiale. Les prix agricoles sont augmentés pour se rapprocher des producteurs de l’ouest du pays (Loada, 2012). Les fonctionnaires suspendus sous Sankara sont réintégrés. Le SMIC est relevé pour les salariés, les rémunérations des fonctionnaires sont augmentées. Le dialogue est rétabli avec les syndicats. Le parti développe son pouvoir au niveau local, à travers les chefs de village (Hilgers & Loada, 2013). En revanche, en milieu urbain, les pouvoirs coutumiers perdent de leur influence. Retenant les leçons de la période révolutionnaire, Compaoré fonde également sa légitimité via une ouverture à la société civile et l’implication de cette dernière dans l’adoption de la nouvelle Constitution. L’Église catholique refait entendre sa voix, elle est souvent sollicitée en tant que médiatrice (Kane, 2015).

  • 6 Organisées dans le but de mieux coordonner et aligner les PTF et le gouvernement, sept Troïkas se s (...)

46Sur le plan extérieur, le statut de bon élève du régime de Compaoré quant à la réalisation du PAS lui permet de maximiser sa rente de situation (Samuel, 2013). Un lien étroit uni le pouvoir et les Partenaires Techniques et Financiers (PTF), qui ont créé une première Troïka6 en 2009. Plusieurs cadres ministériels sont ainsi passés par les PTF. Le gouvernement burkinabè est favorable à leur action, et en retour, les PTF permettent de rendre le système rentier toujours plus conforme aux normes internationales (Samuel, 2013 ; Koussoubé et al., 2015). Avec les PAS et la libéralisation qu’ils promeuvent, la tension se fait donc moins vive du fait d’un basculement des forces politiques lié à l’intervention croissante des institutions financières internationales. La participation de plus en plus importante des bailleurs multilatéraux va modifier les rapports entre les forces politiques soutenant des stratégies économiques divergentes. Cela va permettre au Burkina Faso de trouver un compromis stable durant l’ère Compaoré.

Conclusion

47L’étude historique de l’État au Burkina Faso depuis sa décolonisation met en exergue les arrangements complexes qui se sont forgés puis délités entre plusieurs groupes sociopolitiques dominants. Ces compromis permettent de mieux saisir les conditions institutionnelles particulières qui permettent le pilotage et la cohérence sur longue période du système économique rentier burkinabé. La longévité d’un tel système et de sa forme étatique suppose une extension continuelle des bénéficiaires du système de rente qui implique inévitablement une augmentation des ressources rentières. L’acquisition de ces ressources va alors résulter d’une complémentarité entre forme de l’État et forme d’insertion à l’internationale : l’obtention des gains dépend des rapports d’échanges extérieurs, tandis que la forme étatique, comme vecteur des compromis institutionnalisés, détermine la répartition des gains.

48Toutefois, dans le contexte burkinabé, et plus largement celui des pays d’Afrique de l’Ouest, cette approche doit être approfondie. En effet, elle doit tenir compte des luttes et des compromis complexes trouvés entre des acteurs internationaux et nationaux multiples et où interagissent ceux tirant leur légitimité d’un pouvoir ethno-religieux, des logiques patrimoniales, les classes rentières, le salariat urbain et public, les travailleurs informels, les systèmes traditionnels de gouvernance, ou encore les rapports entre État de droit et droits coutumiers (El Aoufi, 2009 ; Hugon, 2015). L’articulation entre l’État burkinabé, les chefs traditionnels Mossi mais aussi les sociétés acéphales illustre bien cette spécificité. L’intégration des chefferies dans la construction de l’État avant et après Sankara, tout en cherchant à limiter leur pouvoir effectif, est nécessaire pour conserver l’assise du pouvoir au niveau local, sur un territoire où, comme souvent en Afrique subsaharienne, le pouvoir central n’a pas prise partout. Les chefs, de leurs côtés, cherchent également ce lien afin de conserver leur pouvoir social, politique et économique. Ainsi, plutôt qu’une construction conjointe entre un État dit moderne et des légitimités traditionnelles, s’est constituée dans certaines zones du pays une cohabitation autour de cette rente.

49Tout comme le Burkina Faso, les pays d’Afrique de l’Ouest ont suivi des cheminements variés, qu’il importe d’analyser dans leur contexte pour comprendre les mécanismes de régulation que ces pays ont pu mobiliser. Prolonger la TR, en examinant la forme particulière de l’État africain et la manière dont il fonde sa légitimité en s’appuyant sur certains groupes socio-politiques, apparaît comme une piste intéressante pour mieux comprendre les réalités complexes derrière des trajectoires similaires dans la région depuis la colonisation jusqu’à nos jours. C’est donc en s’intéressant aux régulations politiques et institutionnelles mises en place pour appuyer des modes de fonctionnements économiques qu’on peut appréhender ces interactions et ainsi éviter tout déterminisme. Néanmoins, l’absence de hiérarchisation implique également, pour la TR, de se poser la question du développement et du sous-développement. Contrairement aux théoriciens de la dépendance, cette question reste peu engagée au sein de l’approche régulationniste, ce qui doit l’amener à s’interroger sur des critères de développement (El Aoufi, 2009).

50Ce travail montre également l’importance de considérer les opportunités d’intégration régionale de l’Afrique de l’Ouest pour peser sur le contenu des accords internationaux. Or aujourd’hui encore, la part principale des échanges, au Burkina comme dans les autres pays de la région, se fait avec l’Europe, dans une continuité de la structure de la division internationale du travail, avec des économies africaines plus similaires que complémentaires. Cependant de nouvelles voix se font entendre, entre critiques envers le FCFA et projets nouveaux, comme la zone de libre-échange en construction, engageant 44 pays signataires.

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Notes

1 Dans la TR, le régime d’accumulation désigne l’ensemble des régularités assurant une progression générale et relativement cohérente de l’accumulation du capital.

2 Selon les accords passés avec la France (1962, 1973), cette parité peut être modifiée par les gouvernements africains « après consultation de la France dans la mesure du possible ». Elle ne fut changée qu'en 1994, par décision de l’État français. Le franc CFA est alors dévalué de 50 % (1 franc CFA = 1 centime de franc).

3 Une précision nous semble nécessaire afin d’examiner les chiffres de cet article avec du recul. En effet, les données en Afrique subsaharienne, principalement sur le long terme, peuvent manquer et montrer des limitations. Nous travaillons ainsi sur la base d’un recoupement des données disponibles auprès des institutions telles que la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement, et des divers documents recueillis pour cette analyse.

4 3,2 % par an (Morrisson & Azam, 1999) de 1960 à 1990 en moyenne, et 5,7 % de 1991 à 2014 en moyenne par an (statistiques de la Banque Mondiale).

5 On dénombrera alors 41 établissements publics à caractère industriel et commercial, 34 sociétés d’économie mixte, 2 entreprises publiques à caractère professionnel, 2 sociétés d’État (CNUCED, 2009).

6 Organisées dans le but de mieux coordonner et aligner les PTF et le gouvernement, sept Troïkas se sont succédé depuis 2009. La présente Troïka est composée par le Grand-Duché du Luxembourg, l’Union Européenne et la Banque Mondiale.

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Table des illustrations

Titre Figure 1. Étude de la forme étatique au Burkina Faso – grille d’analyse
Légende Vous pouvez consulter cette figure en annexe au format PDF
Crédits Source : Auteurs
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/regulation/docannexe/image/13740/img-1.png
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Titre Figure 2. L’évolution politique du Burkina Faso de 1960 à 1998
Légende Vous pouvez consulter cette figure en annexe au format PDF
Crédits Source : OCDE, 1999
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/regulation/docannexe/image/13740/img-2.png
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Pour citer cet article

Référence électronique

Juliette Alenda et Pierre Robert, « La cohérence institutionnelle d’une économie dépendante : formes de l’État et conflits redistributifs autour de la rente au Burkina Faso »Revue de la régulation [En ligne], 24 | 2nd semestre / Autumn 2018, mis en ligne le 18 décembre 2018, consulté le 21 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/regulation/13740 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/regulation.13740

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Auteurs

Juliette Alenda

Postdoctorante AISSR, Département des Sciences Politiques, Université d’Amsterdam, 1012 WX Amsterdam, The Netherlands ; juliettealenda@hotmail.fr

Pierre Robert

Postdoctorant ChairESS, Chercheur associé au Laboratoire CLERSE (UMR 8019), Université de Lille, Maison Européenne des Sciences de l’Homme et de la Société, 2 rue des Canonniers – BP 80217 – 59002 Lille Cedex ; pierrrobert@gmail.com

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