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Varia

Travailler en FLE avec des étudiants exilés : une occasion de sortir des sentiers battus ?

Chantal Dompmartin-Normand et Tepey Sarai Matos Aldana

Résumés

Résumé 

Chaque année depuis 2017, environ 60 étudiants refugiés ou demandeurs d’asile sont reçus à Toulouse au sein d’un dispositif interuniversitaire pour l’apprentissage du FLE. Dans ce Dispositif Langue Accueil Migrants (DiLAMi), développé en parallèle des lieux d’enseignements universitaires locaux du FLE, les acteurs ont cherché dès le début à penser une diversification des pratiques d’enseignement, le type de migration des apprenants et leurs profils invitant à reproblématiser de façon fine la question de l’appropriation de la langue nouvelle au répertoire.

Les choix initiaux de l’équipe se sont portés sur une ouverture vers la ville et en particulier ses artistes et lieux culturels. Le projet est de « faire atelier », se situant dans des pratiques incarnées donnant lieu à performance (Matos et Sourisseau, 2020), afin de favoriser le repaysement (Dompmartin, 2019). Les étudiants exilés se voient ouvrir des espaces et des temps où ils sont potentiellement reconnus comme des sujets de plein exercice dans leur nouveau milieu. En 2022, nous avons voulu mettre à l’épreuve nos hypothèses en interrogeant des ex-étudiants du dispositif. Deux retours sont analysés ici et donnent à voir une réception contrastée de nos propositions. D’un côté, un accueil favorable des projets artistiques, sans pour autant qu’ils soient considérés comme déterminants. De l’autre, un refus de participer, qui paradoxalement est l’occasion d’une expression personnelle fine, dont l’effet est probablement réparateur. Les résultats renvoient donc à la grande diversité des apprenants. Ils permettent de nuancer les objectifs que nous assignons aux projets artistiques au cœur du dispositif et renseignent par sérendipité sur des aspects de leur expérience moins bien cernés et à mieux prendre en compte dorénavant.

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Texte intégral

  • 1 Projet Erasmus + visant la création d’outils pour la formation des enseignants : https://projetsera (...)

1Actuellement de nombreux·euses chercheur·es et acteur·rices du champ du Français Langue Étrangère se mobilisent pour réfléchir les nouveaux enjeux de l’enseignement du Français aux publics issus d’une migration d’urgence (Projet Serafin1, numéros de revue dédiés, par exemple Azaoui et al., 2019 ou Gettliffe et Ardisson, 2022). Cette contribution souhaite contribuer à la réflexion dans ce champ de préoccupations, et témoigner localement du regard que nous posons sur notre action dans le cadre d’un programme nommé Dispositif Langue Accueil Migrants (DiLAMi), créé en 2017 à Toulouse. Il s’agit d’un programme de FLE dit passerelle comme il s’en est créé dans les universités françaises à cette période pour faire face dans l’urgence à ladite « crise migratoire » devenue plus intense à partir de 2015. Il témoigne comme d’autres actions « de l’implication et de l’engagement […] de personnes (enseignants, bénévoles, chercheurs), travaillant dans des structures différentes et œuvrant pour aider ce public hétérogène (mineurs ou majeurs ; isolé, seul ou en famille ; migration contrainte ou délibérée) à retrouver ou à renforcer l’estime de soi et le sentiment d’appartenance », montrant « un « déjà-là » : une réflexion solidement ancrée scientifiquement de la part des personnes engagées dans ces actions d’accueil et de scolarisation des migrants » (Azaoui, Gouaïch & Roubaud, 2019).

  • 2 L’une d’entre elles est co-autrice de cet article.
  • 3 Dont l’autre co-autrice de cet article.
  • 4 Le cadre était très libre au départ du point de vue curriculaire et disposait de financements extér (...)

2Ce programme a été conçu pour l’accueil des réfugiés ou demandeurs d’asile en qualité d’étudiants pour l’apprentissage du FLE, pour répondre à une demande accrue de ce public spécifique, public déjà connu au demeurant, en dégageant de nouvelles ressources logistiques et organisationnelles. L’équipe qui a pris en charge la demande au sein de nos universités toulousaines, fort restreinte au départ, était formée d’une enseignante et deux enseignantes-chercheures2, toutes trois spécialistes de FLE. Très vite, le groupe s’est étoffé de la présence de trois enseignantes3 à plein temps pour s’élargir par la suite. L’ingénierie du programme, dans un cadre initialement peu formalisé4, a été l’occasion de se poser de nombreuses questions : en quoi les profils de ces étudiants rassemblés dans le programme passerelle sont-ils différents de ceux du public FLE « ordinaire » ? Quels sont les objectifs à prioriser ? Y a-t-il des considérations éthiques spécifiques à prendre en compte ? Comment faire de ce programme un lieu le plus adapté possible aux besoins des étudiants ? Comment y insuffler une dynamique ? Comment réfléchir notre action dans une didactique de l’urgence (Beacco, 2012) ? Nous partagions et tentions de démêler nombre de questions complexes, que Gettliffe et Ardisson formulent en 2022, et dont nous sélectionnons ci-dessous un florilège (c’est nous qui mettons en gras) :

Comment créer/maintenir l’envie d’apprendre une langue autre alors que les trajectoires professionnelles et personnelles sont difficilement imaginables ? […] Faut-il penser une période de repos/de convalescence avant les apprentissages linguistiques ou au contraire maintenir/renouer avec des attaches scolaires/de formation ? Les contenus linguistiques doivent-ils être réduits ou fonctionnalisés au maximum (Adami, 2020) ? Quels rôles pour la créativité ou l’expressivité ? Que peut-on imposer, proposer alors que les urgences vitales (logement, santé, finance) mobilisent de nombreuses ressources cognitives ? Quelles places pour l’interculturel, le co-culturel, le transculturel, la médiation, […] ? Comment (re)penser l’articulation entre le linguistique et les institutions démocratiques alors que les déplacés vivent une sorte d’anomie ? […] Doivent-elles [les formations] rester étanches par rapport à des dispositifs plus traditionnels ? Quels rôles de la population locale pour soutenir les apprentissages linguistiques ? (Gettliffe et Ardisson, 2022 : 4) 

3Ces questions serviront de fil rouge au démarrage de notre propos. Les choix d’ingénierie didactique que nous avons faits étaient pensés en rapport avec la complexité que les questions révèlent. L’idée principale est de sortir des sentiers battus pour faire atelier avec des artistes (Dompmartin‑Normand, 2023). Par ce biais, nous espérons générer de la motivation, contourner l’obstacle de l’anomie, en s’ancrant dans le local et dans ses forces vives pour socialiser la langue.

4Après quelques années d’existence du programme, nous avons voulu récemment remettre nos hypothèses à l’épreuve en interrogeant des ex-étudiants du dispositif, par le biais d’entretiens individuels compréhensifs (Kaufmann, 2016). L’analyse de deux entretiens fera l’objet du deuxième temps de notre propos.

Réflexions, intentions, appuis théoriques

5Nous partons du postulat que les attaches avec la formation et le scolaire sont fondamentales. En particulier, l’accès à l’apprentissage de la langue lors de l’arrivée dans le pays tiers est un droit pour tous les publics en exil, enfants comme adultes, et l’accès à la formation devrait être un must. Pour ce qui nous concerne ici, tou·te·s celles et ceux qui auraient interrompu leurs études ou seraient en capacité d’en reprendre méritent d’être accueillis sur les campus français, qu’ils repartent au final pour des études universitaires ou pas. Certes, ils ont de nombreux autres problèmes et, comme indiqué plus haut, « une sorte d’anomie » peut être perçue avec différentes qualités de motivation difficiles à évaluer. L’absentéisme en cours n’est pas strictement révélateur d’un manque de motivation, mais lié aux « urgences vitales (logement, santé, finance) », qui « mobilisent de nombreuses ressources cognitives » (Gettliffe et Ardisson, 2022 : 4). La pyramide de Maslow bien connue (1943) reste valable pour situer nos sujets. Les étages inférieurs des besoins physiologiques et les besoins de sécurité sont instables compte tenu de ce qu’ils ont traversé et des étapes de l’installation concrète qu’ils sont en train de vivre. Les étages supérieurs des besoins d’appartenance, besoins d’estime de soi et besoins d’accomplissement de soi nous paraissent tout aussi fondamentaux, étant justement ébranlés par la migration. Notre action d’enseignement, élargie à une vision de l’accueil dans la langue, peut-elle apporter des éléments dans ces étages-là ? C’est en tout état de cause cette intentionnalité qui a présidé à nos choix didactiques. Nous répondions ainsi d’entrée de jeu par la négative à la question « Les contenus linguistiques doivent-ils être réduits ou fonctionnalisés au maximum ? » (Adami, 2020), au prix de quelques débats entre nous, tant la tentation fonctionnaliste de l’utilité imprègne les représentations, tentation que la dynamique de l’urgence pourrait réactiver.

6Nous partons du cadre théorique de la didactique du plurilinguisme (Candelier, 2008 ; Billiez, 1998) qui considère les objets à enseigner (les langues) comme en contact les uns avec les autres et considère l’apprenant [comme] un acteur social subjectif, dont le rapport à la nouvelle langue dépend de comment elle s’inscrit dans son répertoire déjà-là en fonction de son histoire et de l’ensemble de son expérience. Cette orientation épistémologique nous place dans le « paradigme d’une didactique des langues engagée, critique, sensible et située, à savoir constamment dans la prise en compte dynamique du hors champ socio-politico-culturel de la classe » (Dompmartin, 2019). En sus des langues, les expériences sont en contact dans le répertoire d’un sujet. Les activités de la classe de langue peuvent contribuer à renourrir la « continuité sociobiographique » (Molinié, 2019). La sociologie de la relation au monde nous indique qu’il y a une dynamique entre « le monde qui vient à la rencontre du sujet qui l’éprouve » (et qui le subit) et le sujet qui « par son action, pénètre dans le monde » (Rosa, 2018 : 141). Ainsi, sont en rapport dialectique un « caractère pathique » (violent et imprévisible) du monde, où le sujet est « réagissant » face à son destin, et la « relation intentionnaliste » où le sujet évolue en explorateur, acteur, maitrisant la situation voire la dominant (Rosa, 2018). La théorie de l’énaction nous permet de comprendre la relation complexe de transformation qui a lieu entre le sujet apprenant et l’objet à apprendre : « […] la cognition, loin d’être la représentation d’un monde pré-donné, est l’avènement conjoint d’un monde et d’un esprit » (Varela, Thompson & Rosch, 1993 : 35).

7Le résultat dans l’apprentissage de la langue émerge continuellement à travers nos interactions avec les autres, avec le tout de l’expérience, avec les autres personnes, avec les espaces. Aden nous rappelle que « […] nous sommes constitués de langage dans un devenir continu que nous faisons émerger avec d’autres » (Aden, 2017). Nous établissons ainsi des relations avec tous les éléments qui nous entourent lors de l’expérience d’appropriation, nous menant à une transformation, étayée par la motivation. Les quatre piliers de celle-ci (Viau, 2011) sont la perception de la valeur significative d'une activité, la perception de sa propre compétence, la perception de contrôlabilité et la perception du plaisir. Les étudiants seraient motivés s’ils perçoivent la pertinence des contenus, ainsi que l’utilité des activités proposées en vue d’atteindre leurs objectifs, prenant conscience de leur propre capacité et ayant un certain degré de contrôle sur le déroulement des activités. Ils ont ou pas une sensation du plaisir dans les activités proposées. La prise en compte de tous ces éléments aide les enseignants à « penser une éducation qui reconnaît la diversité et le potentiel de chaque [apprenant] et qui développe la créativité et l’autonomie plutôt que la conformité et la dépendance » (Aden, 2017 : 8).

  • 5 L’embodiment (ou encorporation ou cognition incarnée) est un concept issu de la psychologie cogniti (...)
  • 6 L’empouvoirement ou empowerment est une notion issue de la psychologie sociale. L’augmentation du p (...)

8Ces fondements théoriques nous ont menées à proposer des actions culturelles, artistiques, collectives et plurilingues. Nous avons mis en place des projets en nous appuyant sur la puissance de l’art et du faire art (ou faire œuvre comme dirait Paul Valery) comme révélateur, comme un lieu d’encorporation de la langue5 et comme lieu d’empouvoirement6, visant un apprentissage sensible. Dans les projets, nous avons sollicité les sens et les émotions des apprenants, mobilisant des dimensions artistique, poétique, créative, esthétique. Le travail consiste en un accompagnement de la mise en mots de fragments expérientiels par la médiation de fictions, de mises en scène et de productions artistiques. Lequel accompagnement n’est pas de tout repos pour les enseignantes, car il « convoque des compétences sociologiques et cliniques chez les enseignants et formateurs de langue du pays d’accueil […], désireux de conduire les publics en migration vers une plus grande performativité sociale/linguistique » (Molinié, 2019).

S’ancrer dans le local – expériencer7 hors les murs de l’université

  • 7 Ce verbe, calqué sur l’anglais to experience, qui se différentie de to experiment, est maintenant c (...)

9Nous avons postulé qu’à partir d’artefacts extérieurs, au groupe, aux individus, au programme académique d’enseignement du FLE et aux espaces académiques conventionnels, il y aurait une médiation de l’expérience intime des sujets, propice à l’appropriation du français. Chaque étudiant devient acteur dans chaque démarche artistique collective, menant des tâches qui impliquent un passage par le corps et des interactions avec l’environnement et avec les autres. Le travail a lieu, en partie, dans des lieux culturels de renom de Toulouse (Cave Poésie, Théâtre de la Cité, Grainerie, etc.) avec des artistes reconnus (compagnies de théâtre, musiciens…), avec lesquels nous avons développé, au long de six années de l’existence du dispositif des projets autour de la radio, du théâtre, de la musique, des arts plastiques, de la photographie et du cirque.

10Chaque projet est construit en 4 phases, dont la base est systématiquement l’écriture créative : d’abord une sensibilisation pour éveiller la motivation à la participation active (lectures, spectacles...), puis la création et mise en voix des textes (travail sur la grammaire, la syntaxe, l’orthographe, la cohérence, la progression, la cohésion, la phonétique…), puis un affinage artistique (ateliers, répétitions...), enfin une représentation/restitution sur une scène d’un lieu culturel, devant un public.

11Nous faisons l’hypothèse qu’une expérience à la fois collective et personnelle dans des lieux d’expression avec des acteurs de la culture contribue à l’appropriation de la langue, au sens de Castellotti, pour qui cela signifie « ce qui advient en propre » (Castellotti, 2017 : 43), pour le locuteur et sujet social, « ce qui devient sien à ses propres yeux, ce qu’il auto-légitime, ayant traversé dans un processus des étapes d’affiliation à titre personnel et de légitimation par la reconnaissance d’autrui. L’appropriation serait donc ce qui advient au cours de l’apprentissage, à travers lui, voire malgré lui, dans des points de bascule, qui s’incarnent […] dans des pratiques situées et signifiantes de la langue nouvelle avec les autres » (Dompmartin‑Normand, 2023 : 31).

12Les étudiants exilés, indéniablement minorisés par leur situation sociale de départ (arrivant sans l’avoir choisi, dépendant de l’accueil d’autrui…), se voient ouvrir des espaces et des temps où ils sont potentiellement reconnus comme des sujets, des acteurs sociaux de plein exercice dans leur nouveau milieu. Participer à la vie culturelle de la ville leur permet une prise de responsabilités, par une implication réelle et concrète dans des actions et des interactions extra-didactiques.

13Par ailleurs, l’interculturalité et le plurilinguisme trouvent dans les projets un espace ouvert où les apprenants peuvent s’exprimer et exprimer leurs cultures d’origine également dans leur(s) langue(s) première(s), dans un travail d’élaboration de textes plurilingues et de mise en voix alternant les langues, notamment lors de représentations et restitutions qui sont les points d’orgue de chaque projet.

14Notre question de recherche d’aujourd'hui est de savoir si nos intentions didactiques ont véritablement les effets escomptés ou pas aux yeux des sujets. C’est un feed-back émique que nous voulons susciter. De quelles manières les projets artistiques, que nous considérons comme l’ADN de notre programme, sont-ils effectivement vécus ? Il s’agit d’affiner les retours, au-delà du processus évaluatif global fait par les groupes régulièrement.

Évaluer l’action

15Des évaluations, sous la forme de questionnaires à réponses anonymes, ont été proposées aux étudiants à la fin de chaque projet. Dans la plupart des cas (90% de réponses), leurs retours sont positifs. Ils font référence à l’utilité du travail réalisé et à l’atmosphère que cela crée entre participants : l’importance de pouvoir s’amuser, la solidarité, la confiance, l’intégration, la motivation, le sentiment d’appartenance, la solidarité, la positivité, la communication, l’interaction avec les autres, l’apaisement, l’empathie, la concentration, le travail d’équipe, la connexion avec les autres, le fait de vivre des moments heureux, de rire, de partager des émotions et de l’énergie, de pouvoir communiquer avec son corps, d’avoir un espace pour l’expression et le plaisir, de développer le courage nécessaire pour prendre la parole. Les apprenants font également souvent référence, de manière spontanée, au grand niveau de professionnalisme, d’organisation, de sérieux, de réactivité, de compréhension, d’écoute, d’empathie, de respect, de générosité et de créativité dont les intervenants extérieurs et les partenaires font preuve auprès d’eux et de l’équipe enseignante.

16De plus lors des restitutions publiques du travail, beaucoup d’émotion circule et beaucoup de satisfactions sont exprimées. Si les personnes dans le public ne comprennent pas directement les langues des étudiants, le courant passe pourtant : public et étudiants « translangagent » (Garcia et Wei, 2014). L’intention et les sentiments derrière les mots sont transmis et la ferveur avec laquelle sont lus, à la radio, sur scène, les textes plurilingues selon des modalités d’alternance variées travaillées avec les artistes est émouvante et appréciée du public.

  • 8 Seulement 2 pour cette contribution, pour des raisons de temporalité serrée.

17De telles appréciations positives globales corroborent nos hypothèses, mais nous avons voulu voir un peu plus loin et procéder à des entretiens individuels8. Nous nous centrons ici sur deux cas a priori contrastés. Le premier témoignage émane d’une jeune femme M. qui a accueilli les propositions artistiques favorablement. Qu’en dit-elle, a posteriori ? Les activités artistiques sont-elles déterminantes à ses yeux pour l’efficience du programme ? Le second témoignage émane de H., un jeune homme qui était hostile à ces activités, sentiment qu’il a exprimé. Quelles sont les raisons de sa résistance ? Que doit-on comprendre ?

Le cas de M. : elle adhère aux activités artistiques, mais ce n’est pas « essentiel »

  • 9 L’entretien a été mené par CDN, co-autrice, et ce paragraphe concernant M. représente son analyse d (...)

18L’entretien9 a eu lieu le 3 juin 2022 et a duré 48 minutes. Il intervient alors que M. est sortie du dispositif depuis un an, ayant intégré à la suite le cursus de FLE ordinaire. Conformément à l’éthique de la recherche, il lui est précisé que l’anonymat dans le traitement des données est garanti. Ce qui donne lieu la première séquence significative de l’échange. M. vient d’obtenir le statut de réfugiée après 2 ans en France et est anxieuse de cet anonymat, sachant que sa vie et celle de sa famille ont été grandement menacées dans son pays. Elle ne veut pas que son lieu de vie actuel soit identifié par les services secrets de son pays. Même publier des indications sur son âge, son pays d’origine et son ancien métier et a fortiori son vrai prénom est risqué. Elle précise tout cela au début de l’entretien revenant sur une inquiétude. En effet, quelques temps avant, a eu lieu une cérémonie de remise de diplômes, en présence des officiels de l’université et des représentants des collectivités territoriales, qui co-financent le dispositif, et en présence de la presse.

  • 10 Je (CDN) m’empresse de faire savoir le problème et les « publications » sont retirées ou rectifiées (...)

19« La cérémonie pour féliciter : [ce n’était] pas important pour moi. Je ne voulais pas y aller ». Elle a accepté d’y participer uniquement par loyauté envers sa professeure. Mais elle profite de l’entretien recherche pour mentionner qu’elle a constaté que la médiatisation de l’événement sur les réseaux sociaux ne préserve pas suffisamment son anonymat. Elle demande à ce que son prénom soit effacé et son visage flouté sur les photographies, en particulier du blog de la représentante politique. « Je veux [me] cacher » dit-elle, « je dois me cacher »10. La démarche de recherche permet de révéler d’emblée une vigilance que les acteurs des dispositifs d’enseignement pour ce public doivent solidement construire, pointant le hiatus entre l’enjeu des acteurs universitaires et financeurs externes de faire de l’action une vitrine de leur engagement sociétal et humanitaire et l’intérêt direct et immédiat des participants.

20Dans une deuxième séquence de l’entretien, M. abonde dans le sens des retours positifs collectés précédemment au plan des groupes.

21« Les ateliers ont un impact positif sur notre psychisme » (M.)

22« Cela aide à surmonter le stress, la timidité, les barrières de communication, la tristesse, la pression de la vie et nous évite de nous sentir submergés dans les pensées négatives et difficiles, de sortir du sérieux et de la sévérité dans laquelle on vit. » (M.)

23L’entretien se poursuit à partir d’un dessin réflexif (Castelloti et Moore, 2009 ; Molinié, 2009) élaboré sur la consigne suivante : Raconte-moi l’aventure DILAMI, en même temps que l’aventure de venir en France. M. dessine ceci.

Figure 1. Le dessin de M.

24Nous sommes d’abord frappées par l’aspect très géométrique, analytique, clinique de cette représentation graphique. Le commentaire que M. en fera semble indiquer qu’elle est une personnalité très réfléchie et très rationnelle.

25Le premier rectangle à gauche la représente avant son arrivée en France. « J’ai dessiné moi-même, c’est moi quand j’ai quitté mon pays ».

26Ce rectangle est plein : plein de compétences professionnelles, de niveau d’études, de statut social, de compétences linguistiques, de santé morale/mentale et physique et surtout plein de confiance en soi, plein d’espoir dans l’avenir.

27A l’inverse, le deuxième rectangle est très vide : il ne reste plus qu’un peu de confiance en soi et d’espoir. C’est surtout ce qu’elle a vécu dans le premier pays où elle est arrivée avant la France et où elle est restée deux ans. « Après l’émigration, j’ai tout perdu… la confiance en moi, la santé, mes habiletés professionnelles. Chaque jour on perd une partie de la confiance en soi. »

28Le troisième rectangle représente sa personne après le programme (« la méthode »). Le rectangle est plein de nouveau. « Avec le Dilami, j’ai rempli le vide. Maintenant je suis très positive ».

  • 11 Archipel est une association de promotion de la pratique des arts plastiques et la Cave poésie est (...)

29Elle place un point rouge dans ce rectangle, qu’elle commente à l’écrit avec les énoncés : « rapport perdu avec la société : histoire, chansons, visites, lois ». Ce point rouge est au bout d’une flèche qui provient d’un autre schéma en cercle cette fois-ci, qui détaille les compétences visées par « la méthode », avec une proportion du temps consacré à chaque habilité : « aptitude de écrire, lire » « écouter », « parler ». Elle explicite le morceau de camembert « parler » : la partie conséquente qu’elle a mise en rouge est celle qui correspond aux atelier artistiques (« Activités culturelles, atelier, Archipel, Cave11 »). « Les activités culturelles donnaient le temps de parler » alors que « dans les autres cours c’est surtout la prof qui parle, la partie consacrée à parler a été très très petite ».

30Selon elle, les activités artistiques ont effectivement contribué à renouer le lien avec le monde. A propos du rectangle n°2, elle dit : « Mon rapport au monde était complètement coupé. On se sentait très très seul dans ce monde. […] un enfant qui ne peut pas parler il crie, mais comme adulte on ne peut rien faire ».

31Elle poursuit : « Dans les études au Dilami, j’ai trouvé la confiance en moi. J’ai le moyen de les retrouver. Le programme a permis de remplir tout le vide ».

32« Car ce n’était pas seulement apprentissage de la langue. Il y avait d’autres buts à côté. Ça a marché ! » C’était « une possibilité brillante. En faisant les ateliers par exemple la lecture à voix haute, c’est pas seulement l’apprentissage de la langue mais l’acquisition de la confiance, la possibilité de s’approcher à la société. Je me sentais plus près des Français… je comprenais mieux la société… toutes ses activités aident ». « Un Dilami sans les activités culturelles » serait un « lieu plus fermé ». Elle valorise la « possibilité de s’approcher à la société » : « Quand on chante, je me sentais plus proche des Français ».

  • 12 Les études sur la motivation évoquent cette opposition : extrinsèque (les notes, la pression extern (...)

33Néanmoins, c’est aussi tout le travail d’apprentissage de la langue, y compris les activités classiques, dont la grammaire, qu’elle a valorisé : « Tout ça va avec l’habileté de parler en français. La langue c’est tout. Le moyen est la langue ! » Elle décrit ainsi sa motivation comme étant intrinsèque12, n’ayant pas vraiment besoin d’être soutenue : « j’avais une soif de la langue ». Intrinsèque à sa situation et liée au fait qu’elle n’avait pas le choix de retourner dans son pays.

34Elle thématise la diversité des personnes du groupe et de leur motivation :

35« Les réfugiés sont très différents [les uns des autres], c’est bien que tout le monde le comprend, tout le monde ne fuit pas la famine, certains fuient la situation politique et ceux-là sont éduqués, cultivés et ceux-là ont besoin de la relation à la société. Certains ont moins soif que d’autres de communiquer avec le monde […] ceux qui ont une possibilité, même petite, même imaginaire, de repartir [elle parle là plutôt des étudiants internationaux ‘ordinaires’], ce n’est pas pareil. La petite possibilité imaginaire, derrière la tête, leur donne le calme, avoir un refuge au cas où on ne réussit pas à s’insérer, à récupérer son statut social. Ceux qui ne peuvent pas repartir, nous avons la soif la plus grande […] [nous avons] un seul choix ». Ce nous renvoie surtout à la catégorie de réfugiés dans laquelle elle se place, à savoir les personnes « éduquées et cultivées ». Elle critique au passage d’autres qui, selon elle, se contentent de peu concernant le français, « qui ne font rien qui n’apprennent pas la langue ». Elle est consciente de la complexité de la vie des autres : « ils souffrent psychiquement, ils souffrent tous », mais déplore que souvent « ils ne respectent pas les professeurs ». Elle insiste sur ces différences et sur les difficultés de cohésion du groupe, est très choquée du manque de respect envers les professeurs, marqué en particulier par l’absentéisme et les « devoirs non faits » ou le refus de participer (cf. infra).

  • 13 Revenu de Solidarité Active.

36« […] peut-être ils veulent seulement le RSA13 et pas vraiment travailler », alors qu’elle est hautement motivée pour « retrouver un métier et un statut social », même si elle sait que « ce sera difficile » car « pour nous, recevoir le RSA c’est méprisant ».

37Elle mentionne les bienfaits du programme, qui sont tout à fait dans la logique appropriative, d’augmentation du pouvoir d’agir, de prise de repères et de meilleure inscription dans le nouvel environnement que nous souhaitons promouvoir : « J’ai appris ce qu’il me manque pour pouvoir participer. Je me suis repérée dans cette société. Je sais quoi faire pour pouvoir participer où je veux […] dans le groupe des intellectuels ».

38Elle commentera dans la suite de l’entretien la suite de son expérience. En effet, l’année suivant le programme passerelle, elle a intégré le cursus FLE ordinaire, dans lequel les activités artistiques étaient moins présentes ou du moins pas dans la logique de projets transversaux. Les cours y étaient plus « académiques » ou en tous cas plus rangés dans des cases disciplinaires séparées, et le public était un mélange d’étudiants internationaux toutes catégories. Elle déclare avoir préféré ces cours-là.

  • 14 CADA : centre d’accueil pour demandeurs d’asile.

39« Il faut laisser participer [les étudiants exilés] au programme de la langue normal. Quand on les regroupe, ceux qui sont dans ce groupe se sentent enfermés. On est au CADA14, on est dans la même situation, on va au Dilami, [on se retrouve] les mêmes (rires) »

  • 15 Tels qu’ils sont en tous cas organisés à Toulouse dans notre contexte, car dans d’autres université (...)

40Ce qu’elle pointe, c’est l’effet ghetto des programmes passerelles15 ; elle évoque le désir de ne pas être collée à l’identité de réfugié (« il faut enlever l’étiquette »), le désir de « passer plus inaperçue », de « se rapprocher de la société » : [maintenant je n’ai] pas envie d’être mélangée avec ceux qui arrivent, [car dans ce cas] aux yeux des Français, je suis la même [que ceux qui arrivent] ».

41Elle déclare, en riant, que « les étudiants du Dilami, ont tous quitté vite le groupe Whatsapp » après le programme, et quand ils se croisent dans les couloirs de la faculté « ils ne disent plus bonjour ; ils font semblant de ne pas se connaitre [rires] ». « Quand c’est fini on veut tourner la page ».

42Elle mentionne un micro-évènement qui l’a « gênée ». Elle est retournée dans les locaux d’une association où avait eu lieu un travail d’arts plastiques avec le groupe d’exilés, pour y faire une activité en tant que simple participante. Or l’animatrice l’a reconnue et lui a dit : « ah oui vous étiez avec le groupe Dilami ». Elle rit encore et me dit : « Je préfère qu’on ne sache pas ! Je veux être moi et pas une réfugiée ».

43Le témoignage de M. nous amène à relativiser l’effet d’empouvoirement que nous avions assigné aux ateliers artistiques. Dans ce que l’étudiante peut avoir conscientisé, cet effet n’est pas saillant ou indépendant de l’apprentissage de la langue dans les autres espaces.

44En revanche, sa thématisation de l’effet ghetto est à remarquer. Elle nous semble très utile à notre réflexion générale sur l’accueil des étudiants exilés. Selon M., il et elles aspirent à être traités comme des étudiants ordinaires, pas seulement ramenés à la catégorisation « exilés » qui gomme leur différence et représente un stigmate.

45L’autre personne interrogée a été choisie en raison du refus de participer aux activités artistiques.

Le cas de H. : un refus de s’engager dans des activités artistiques16

  • 16 Cette partie de l’enquête a été menée par TM, co-autrice de cet article, qui est aussi l’enseignant (...)
  • 17 Nous n’avons retenu que son cas car c’est le seul étudiant ayant manifesté explicitement, et à main (...)

46Étant donné que le taux d’absentéisme lors des ateliers était important, malgré les évaluations globalement positives des étudiants, nous avons cherché à en connaître les raisons17. L’étudiant H. s’est porté volontaire pour fournir des explications à ce désengagement. Il avait déjà manifesté, lors des enquêtes d’évaluation des activités proposées, qu’il n’appréciait pas ces ateliers, que cela ne lui apportait rien ni en tant qu’individu ni en tant que membre du groupe, qu’il n’avait pas apprécié le fait de devoir « jouer » ou s’asseoir par terre, et que sa seule suggestion était d’éliminer ces activités du programme du diplôme ou de les rendre optionnelles, mais surtout pas obligatoires.

« Quand vous avez dit qu'il y a beaucoup d'absents aux ateliers, je me suis dit que c'était un bon moment pour expliquer mon point de vue. » (H. 12/2021)

47Nous lui avons donc proposé d'écrire ce qu’il en pensait et de bien vouloir nous accorder du temps pour l’interviewer. Il a également été encouragé à communiquer une demande spécifique à travers l’envoi d’une lettre dont le contenu serait discuté au sein de l'équipe. Il s’est ensuivi des échanges multiples par courriel et plusieurs conversations en tête à tête (qui forment notre corpus d’entretiens), avant et après la fin de l’année académique.

48Il a envoyé sa lettre formelle, très riche en arguments, à la coordination du dispositif. Il demandait d’être exempté des activités artistiques et culturelles, déclarant que son stress et sa dépression y étaient liés.

49« Je souhaiterais obtenir l'approbation pour ne pas participer aux activités culturelles à cause de ma situation sanitaire [...] Ce problème constitue un obstacle physique et psychologique pour moi. J’ai commencé à sentir que je n’aime pas l'université à cause des activités culturelles. Elles doivent être un espace pour prendre du plaisir et pour connaître la culture française, mais elles sont devenues une source de stress. » (H. 01/2022)

50L’équipe pédagogique a envisagé un aménagement des ateliers (ne pas lui demander de s'assoir par terre, ne pas le mettre sur scène face au regard des autres...). D’autres propositions ont été faites empruntant plus clairement une logique du détour : lui donner un rôle différent par rapport à celui de ses collègues, par exemple, faire un reportage sur le projet. Des débats ont eu lieu : comment tenir la posture de l’équipe dans ces activités ? Comment tenir compte de sa demande et de son mal-être sans créer un précédent ? Nous avons pris conscience du fait que nous tenions à notre conception du dispositif avec des activités artistiques en fil rouge, persuadées que notre architecture était utile et vertueuse. Notre enthousiasme étant communicatif, celui des artistes également, les étudiants s’impliquent de fait pour la plupart grandement et la réception que fait le public de nos spectacles est très bonne, ainsi que celle de nos « commanditaires » internes (les universités) et externes (les financeurs politiques).

51Le défi est pourtant de se laisser interpeller par les obstacles. Pour H, le défi a consisté à accueillir sa résistance et son blocage face aux activités artistiques proposées, ses critiques de la culture et des structures d’accueil en France, ses ressentis et ses représentations, lesquels sont en lien avec sa réalité personnelle, son métier d’avant, sa culture d’origine et des problèmes physiques et psychologiques personnels.

52H. est un jeune ingénieur convaincu que les personnes ayant un parcours scientifique ne peuvent trouver ces activités qu’inintéressantes. De son point de vue, elles ne devraient être proposées qu’aux personnes qui s’intéressent aux Arts et Lettres. Ce type d’activités est une source de stress importante pour ceux qui, selon ses dires, apprécient le théâtre, le cinéma, la poésie, la musique mais seulement en tant que spectateurs et non en tant qu’acteurs. Pour cette raison, H. déclare que « la présence-participation à ces ateliers devrait être optionnelle », n’ayant un intérêt que si les étudiants souhaitent développer un parcours amateur ou professionnel dans ces champs disciplinaires. « J’ai besoin de faire quelque chose [qui] m’attire, pas quelque chose qui me stresse » (H. 05/2022).

53Cette représentation s’alimente chez H. d’éléments de sa culture d’origine tels que la vision que l’on a de ce genre d’activités dans son pays (du Proche‑Orient). Dans son pays, tout ce qui est ludique n’est important et utile que pour les enfants. Le fait qu’un adulte y participe est très gênant car infantilisant. C’est une honte culturellement. « C’est une question d’honneur », souligne H. (05/2022).

54En matière de proxémie, le fait de toucher les autres ou d’être touché par eux produit une gêne très importante chez H. Dans son environnement, les gens ne se touchent pas aussi facilement que cela peut se faire, par exemple, lors des activités d’échauffement théâtral fortement ritualisées par les intervenants-artistes lors des ateliers. De la même manière, faire des mouvements « bizarres » devant les autres et leur poser des questions peut être vécu comme un comportement très indélicat. « C’est incompréhensible pour moi. Je le vis mal » (H.05/2022). Les questions de proxémie sont très culturelles, mais aussi très individuelles. Ainsi H. est un étudiant souffrant de difficultés physiques qui le fatiguent énormément et qui rendent sa relation à son corps très négative. Toute activité demandant des efforts physiques est inconfortable. Ces problèmes physiques ont des conséquences psychologiques importantes pour H., qui l’empêchent de s’épanouir en se risquant à un apprentissage qui passe par le corps. Le rapport de H. à son propre corps et au contact corporel avec les autres représente un vrai problème. Pour lui, devoir se montrer en train de faire certains mouvements devant les autres et/ou devoir trop les approcher était une vraie souffrance. Ainsi, nous sommes amenées à reconsidérer/réévaluer la dimension passage par le corps, préconisée par l’énaction (Aden, 2017) et les approches artistiques en général.

55Par ailleurs, les consignes au groupe, qui visent la réussite du projet d’un point de vue artistique en vue de la représentation, deviennent pour H. des contraintes insurmontables. Même le respect d’un code vestimentaire spécifique (pantalon noir et chemise blanche) a représenté un tourment pour cet étudiant. Personne dans le groupe, y compris l’équipe d’intervenants artistiques, ne soupçonnait que cela était aussi difficile pour lui. H. a dû admettre qu’il n’avait pas les ressources économiques nécessaires pour s’acheter un pantalon et une chemise convenables.

56Sans s’en rendre compte, les autres participants contribuaient au blocage de H. En effet, ils exerçaient de la pression les uns sur les autres : à travers le rappel systématique et insistant dans leur groupe WhatsApp des règles convenues par la plupart et par le regard négatif, voire intrusif, qu’ils pouvaient porter sur ceux qui sortaient de la norme, sans explication évidente.

« Il y a beaucoup de curieux dans notre classe. Spécialement, il y avait quelques personnes dans notre groupe WhatsApp qui nous rappelaient à l'obligation de nous habiller d’une certaine manière [...] Je m'exposais à l'embarras et je ne pouvais pas le clarifier, c'est un sujet sensible pour moi. C'était le mieux pour tous de ne pas me voir venir le jour de la restitution finale » (H. 05/2022)

57Pour ce qui est du lien de H. avec la société d’accueil, il a thématisé s’être retrouvé face à des contradictions rendant sa résistance au travail proposé encore plus puissante. En effet, H. imaginait que la France lui permettrait de se sentir libre et en sécurité, ce à quoi il avait légitimement aspiré en quittant son pays, où sa différence était discriminée. Dans les activités artistiques, il a eu l’impression d’être soumis à de nouvelles pressions l’éloignant de son souhait profond. « Quand le problème s’est passé dans ma vie [...] j’ai fui, j’ai préféré d’être exilé en France parce que je crois en ses valeurs et sa laïcité […] je les aime et respecte » (H. 05/2022)

58Il exprime avec émotion son besoin de liberté, l’importance qu’avait pour lui le fait de se libérer des contraintes et des impositions qui ont façonné son existence dans son pays : « Je suis venu en France pour faire arrêter les contraintes que j’avais dans la vie. » (H. 05/2022). Or, il dit se retrouver maintenant face à d’autres injonctions qui lui rappellent la réalité à laquelle il voulait échapper : « J'ai obtenu l'asile pour vivre en France sereinement et reconstruire ma vie. Comme je suis en France, je n'aime pas être obligé de faire quelque chose que je n'aime pas » (H. 05/2022).

  • 18 Grosso modo comme ceux du FLI (français langue d’intégration) ou du CIR (contrat d’intégration répu (...)

59Dans les éléments provoquant son incompréhension et sa résistance, H. place également, en sus des projets artistiques, tout ce que le programme met en place sous la rubrique éducation à la citoyenneté. Ce vocable a également fait l’objet de débats dans notre équipe, cette orientation étant thématisée dans des programmes similaires, indexés sur la politique de l’État français. Ainsi les objets et objectifs inscrits au cahier des charges des programmes passerelles18 prévoient d’inclure des thèmes pour « éduquer aux valeurs », à « la citoyenneté ». Dans notre équipe, les opinions sur ce discours n’étaient pas unanimes. Certaines n’avaient pas d’opinion sur ce sujet, tandis que d’autres étaient fortement politiquement critiques sur cet aspect apparemment incontournable dudit « cahier des charges ».

60H. se dit « saturé » par la répétition « lourde et futile, incessante », des idées figées autour des valeurs qu’il connaît, respecte et applique, qu’il ressent comme une pression irrespectueuse. Ces idées et valeurs lui ont justement fait choisir la France pour son exil. Cette répétition lui donne la sensation que la France est contre lui et contre tous les exilés. H. assure que c’est excessif et que cet excès est une particularité de la France. Pour lui, cette pression pousse les migrants à s’isoler dans leurs communautés « pour éviter qu’on leur vole leur essence », ce qui est dangereux car cela devient une potentielle source d’extrémisme. Il donne comme exemple la présence excessive d’explications autour de la laïcité qui lui semblent cibler en réalité l’Islam et aller donc paradoxalement à l’encontre du principe même de laïcité. Il s’insurge contre le trop d’informations à ce sujet : « Vous recevez l’information sans cesse, partout, tout le temps » (H. 05/2022).

61Concernant le volet artistique et culturel, il imaginait qu’on lui proposerait un parcours de spectateur où il pourrait acquérir des connaissances notamment historiques sur la société française et qu’on lui demanderait ensuite d’écrire des textes académiques, comme des essais, pour améliorer son niveau de langue. Il dit être confronté au contraire à un travail rabaissant, comme s’il faisait partie d’un public en difficulté nécessitant des éducateurs spécialisés : « [c’est] comme si on était bête, comme si on est rien [...] ces ateliers me donnent l’impression [que les intervenants pensent] que je n'ai pas de culture [...] comme si je suis venu du désert et comme si je suis bête » (H. 05/2022).

62H. est très critique d’une vision qui considère européocentrée. Selon lui, les intervenants donnent l’impression de se placer dans une posture supérieure à celle des apprenants, laissant sous-entendre que dans les pays de ces derniers le niveau de développement culturel est faible, ainsi que leur connaissance de l’univers. Cela le met en colère. Selon lui, on considère qu’une activité vue sous un regard positif en Europe doit l’être aussi partout ailleurs. Il est très critique aussi face au caractère obligatoire de ces activités. Il ne comprend pas pourquoi on l’oblige, « comme dans une dictature », à faire quelque chose qui ne lui convient pas et qui ne l’intéresse pas.

63Plus tard dans l’interaction, il explique que dans son pays, il aurait été contraint au silence, malgré son mécontentement. Ce silence serait la conséquence d’une habitude provoquée par la peur que les gens ayant vécu des dictatures peuvent développer. Selon lui, c’est bien cela qui lui est arrivé (garder le silence trop longtemps, avoir peur), autant qu’à ses collègues qui lui auraient avoué être d’accord avec lui quant à l’importance de rendre ces ateliers non obligatoires. D’après H. « sur 24 étudiants, 4 aimaient [les ateliers], les autres non. ». Il explique même, que souvent ils « organisaient la fuite » en prenant leurs rendez-vous médicaux exprès le jour de l’atelier. D’après H., autant lui que ses collègues contournaient la question par peur de parler. Jusqu’au jour où on lui a proposé de développer ses idées à ce sujet, opportunité qu’il a saisie. « Si je ne dis pas ça, je resterai seul avec mon problème. C'est la seule méthode que je connais pour exprimer mon opinion » (H. 05/2022).

  • 19 L’autrice a forgé ce néologisme comme antonyme de dépaysement et quasi-synonyme d’intégration ou ac (...)

64La demande de H. est arrivée tard dans l’année (janvier), nous n’avons pas pu lui donner une suite radicalement différente (autres ateliers pour lui, régime d’exception ?), mis à part le temps consacré à parler avec lui. Il a fini son année en continuant à suivre les ateliers, dans une position aménagée minimale, sans pouvoir se libérer apparemment des conclusions les plus dures auxquelles il est arrivé, qui comprenait une part de « procès d’intention » dans laquelle nous ne reconnaissons pas notre engagement. Pour lui, ces ateliers sont créés dans « l’objectif de faire perdre du temps aux étudiants afin qu’ils/elles ne puissent pas bien apprendre la langue et qu’ils/elles se voient obligés d’oublier leurs métiers et leurs projets de base pour devenir des ouvriers ». La charge est donc bien sévère. Nous arrivons à la conclusion, probablement évidente, qu’il est important de remettre continument en question nos choix pédagogiques, non pas pour tout changer mais pour mieux prendre en compte une réception plurielle par des sujets divers, aux histoires complexes, dont nous ne percevons que la partie émergée. Précisément le passage par les arts était vu par certaines d’entre nous comme une manière habile de répondre au cahier des charges « citoyenneté », par un chemin indirect, un détour, faisant subtilement converger éthique et esthétique (Ricoeur), sans nous mettre en porte à faux avec nos propres valeurs ni imposer un discours axiologique. Mais l’art et la médiation artistique ne sont pas tout à fait la panacée dont nous rêvons, sans doute parce que l’empouvoirement ou le repaysement19 (Dompmartin‑Normand, 2019) sont des processus de longue haleine, auxquels nos actions didactiques ne peuvent contribuer que modestement, localement et artisanalement, dans un cheminement appropriatif singulier à chaque individu.

Conclusion

65De manière générale, les activités avec les artistes qui sont au cœur de notre dispositif et qui en font l’originalité ont des effets positifs chez les sujets. Même H., à partir de sa non-adhésion aux projets artistiques, a pu « en profiter » car il a pu exprimer sa différence. Quant à M., elle y a adhéré sans pour autant les considérer, les déclarer comme fondamentaux, mais elle dit néanmoins avoir pu renourrir dans le programme son lien « coupé à la société » et reconnait le plaisir qu’elle y a pris.

66Le témoignage de nos deux sujets nous a en tous cas donné la possibilité – à nous, chercheure et enseignante impliquées dans ce dispositif, et à l’équipe entière auprès de laquelle nous avons fait une restitution – de nous reposer des questions importantes sur nos choix et notamment sur la vision de l’équipe en interne, et celle des intervenants extérieurs, plus ou moins conscientisée, pouvant guider ces choix. La critique de H. sur l’éducation aux valeurs et à la citoyenneté peut-elle être entendue par les décideurs ? C’est une autre question…

67Pour ne pas se laisser piéger dans de nouvelles doxas (par exemple : l’art serait l’alpha et l’omega), il faut réinventer toujours nos actions et les reproblématiser car « tout système est une mutilation et une sclérose » nous dit Edgar Morin, qui poursuit : « tout effort vigoureux de la pensée tend au système » (Morin, 1959 : 235). Être conscients des cultures des étudiants, toujours penser les activités en respectant liberté d’action, de choix, de prise de décision serait notre manière de « prendre la diversité au sérieux » (Huver & Bel, 2015), en réaffirmant que face à la complexité des profils d’étudiants, il n’y a pas de recettes absolues. Le sens de la relation doit primer, reliant au réel au sens large, en adoptant autant que faire se peut et aussi souvent que possible des stratégies du détour (Perregaux, 2002 : 93). Interroger longuement H. suite à son refus de participer correspond à une logique à la fois instinctive, réfléchie et éthique de son enseignante et constitue en soi une pratique du détour. Cette logique a été encouragée par le regard de recherche que nous portons ensemble sur notre intervention, un regard qui permet de faire un pas de côté et de réinterroger, sans se dédire, l’institutionnalisation des actions. Les questions sur la manière de développer des pratiques et des outils d’intervention et de recherche sensibles aux contextes et aux participants restent ainsi ouvertes, tous contextes confondus et pour ce public d’exilés particulièrement. Nous comptons continuer à essayer d’apporter des éléments de réponse de l’intérieur de nos pratiques d’enseignante et de chercheure, la recherche sur les dispositifs d’enseignement participant indéniablement d’une écologie de l’action au sens de Morin (1999), en proposant d’assumer les incertitudes et de construire et reconstruire la distance critique nécessaire.

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Notes

1 Projet Erasmus + visant la création d’outils pour la formation des enseignants : https://projetserafin.com

2 L’une d’entre elles est co-autrice de cet article.

3 Dont l’autre co-autrice de cet article.

4 Le cadre était très libre au départ du point de vue curriculaire et disposait de financements extérieurs à l’université. La formation était non diplômante, avant qu’on œuvre à sa pérennisation en la transformant en Diplôme Universitaire. Dans ce processus d’institutionnalisation des programmes passerelles, l’appui du réseau MEnS (Migrants dans l’Enseignement Supérieur) a été structurant.

5 L’embodiment (ou encorporation ou cognition incarnée) est un concept issu de la psychologie cognitive. Voir discussion de ce terme dans Eschenauer, 2018.

6 L’empouvoirement ou empowerment est une notion issue de la psychologie sociale. L’augmentation du pouvoir d’agir, que cette notion recouvre, est vue comme un phénomène qui s’active dans le social. Le terme, forgé aux États-Unis, renvoie à une double entrée : « a psychological sense of personal control or influence and a concern with actual social influence » (Rappaport, 1987 : 121).

7 Ce verbe, calqué sur l’anglais to experience, qui se différentie de to experiment, est maintenant circulant en DLC. Pour une discussion de la notion d’expérience voir Eschenauer 2017 (pp. 165 à 170) et Dompmartin-Normand 2023 (pp. 105, 55 et suivantes).

8 Seulement 2 pour cette contribution, pour des raisons de temporalité serrée.

9 L’entretien a été mené par CDN, co-autrice, et ce paragraphe concernant M. représente son analyse des données.

10 Je (CDN) m’empresse de faire savoir le problème et les « publications » sont retirées ou rectifiées.

11 Archipel est une association de promotion de la pratique des arts plastiques et la Cave poésie est une salle de spectacle. Ces deux lieux toulousains font partie des lieux qui accueillent nos projets. Qu’ils soient remerciés de leur engagement.

12 Les études sur la motivation évoquent cette opposition : extrinsèque (les notes, la pression externe) versus intrinsèque (la motivation très personnelle et intime des sujets).

13 Revenu de Solidarité Active.

14 CADA : centre d’accueil pour demandeurs d’asile.

15 Tels qu’ils sont en tous cas organisés à Toulouse dans notre contexte, car dans d’autres universités, les exilés sont insérés dans les groupes de niveaux ordinaires de l’école de FLE. Le financement extérieur et le fait que notre dispositif soit interuniversitaire (3 universités partenaires) nous a conduites à cette structuration de classes en parallèle des autres classes de FLE.

16 Cette partie de l’enquête a été menée par TM, co-autrice de cet article, qui est aussi l’enseignante du groupe où évolue H. Elle est donc aux premières loges pour observer son refus, mais aussi mise en situation de devoir y réagir promptement et d’accompagner le processus.

17 Nous n’avons retenu que son cas car c’est le seul étudiant ayant manifesté explicitement, et à maintes reprises, du rejet vis-à-vis des activités artistiques.

18 Grosso modo comme ceux du FLI (français langue d’intégration) ou du CIR (contrat d’intégration républicaine).

19 L’autrice a forgé ce néologisme comme antonyme de dépaysement et quasi-synonyme d’intégration ou acculturation, ces deux derniers termes portant de son point de vue des connotations figeantes (cf. Dompmartin-Normand, 2023).

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Table des illustrations

Légende Figure 1. Le dessin de M.
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Fichier image/png, 387k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Chantal Dompmartin-Normand et Tepey Sarai Matos Aldana, « Travailler en FLE avec des étudiants exilés : une occasion de sortir des sentiers battus ?  »Recherches en didactique des langues et des cultures [En ligne], 22-3 | 2024, mis en ligne le 09 décembre 2024, consulté le 12 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rdlc/14839 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12wr9

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Auteurs

Chantal Dompmartin-Normand

Université Toulouse 2-Jean Jaurès

Laboratoire CLLE

Chantal Dompmartin est Maitresse de conférences HDR à l’Université de Toulouse. Membre du laboratoire CLLE (Cognition, Langues, Langage, Ergonomie), elle enseigne principalement au Département d’Études du Français Langue Étrangère. Ses recherches portent sur l’appropriation du Français Langue Étrangère par des sujets plurilingues, en particulier à travers des démarches d’écriture en atelier, et d’autres approches sensibles passant par les arts. Elle a participé à la création et elle participe actuellement à la coordination du Dispositif Langue, Accueil, Migrants (DiLAMi), programme passerelle pour les étudiants exilés.

chantal.dompmartin[at]univ-tlse2.fr

Articles du même auteur

Tepey Sarai Matos Aldana

Université Toulouse 2-Jean Jaurès

Laboratoire LERASS

Tepey Matos est docteure en Sciences du langage appliquées à l’enseignement du Français langue étrangère, discipline qu’elle enseigne, en particulier dans le DiLAMi. Ses travaux de recherche sont centrés sur les attitudes, la motivation et les représentations de apprenants de FLE, et sur l’amélioration de l’expérience d’apprentissage des apprenants aux plans cognitif, affectif et comportemental.

tepey.matos-aldana[at]univ-tlse2.fr

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