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Introduction : Historicité et historicisation en didactique des langues et des cultures

Isabelle Cros et Amélie Leconte

Texte intégral

1Le 20 janvier 2023 se tenait la 8ème édition des Journées Notions en Questions (NeQ) organisée à Aix-Marseille Université en collaboration avec l’Acedle et la SIHFLES1. Elle rassemblait des chercheurs d’horizons divers pour interroger la notion d’historicité et son corollaire méthodologique, l’historicisation, à l’aune de la didactique des langues et des cultures (désormais DDLC). Fidèle à la tradition de ces Journées NeQ, il s’agissait de les penser dans une perspective dialogique et réflexive, pour en explorer la complexité. La collaboration avec la SIHFLES s’est imposée comme une évidence, en raison de l’importance de cette association « née d’un besoin d’histoire » en 1987 sous l’impulsion de Reboullet, afin de « réintroduire la longue durée dans l’appréciation des innovations engagées un peu partout dans le monde, [de] rappeler les formes de l’expérience et du savoir accumulés, [qui] constituaient le contrepoint indispensable à ce très large mouvement d’innovation »2. Cette association place en effet l’historicité au cœur de son approche en visant à « sortir d’une vision historique doublement réductrice : s’en tenant à un listage de méthodologies récentes d’enseignement et les présentant comme autant d’avancées de chacune par rapport à la précédente » (Coste, infra ; voir aussi sur l’histoire de la SIHFLES, Coste, 2013).

2Très fertile dans le champ historique, en particulier à travers les différents « régimes d’historicité » (Hartog, 2003), l’historicité désigne « la manière dont passé, présent et futur s’articulent dans une société donnée, la capacité qu’ont les acteurs sociaux à inscrire leur présent dans une histoire, bref, pour reprendre l’expression la plus simple, les modes de rapport au temps » (Deluermoz, 2013, p. 4). Cette « capacité » des acteurs à « penser [le présent] comme situé dans un temps non pas neutre mais signifiant, par la conception qu’ils s’en font, les interprétations qu’ils s’en donnent et les récits qu’ils en forgent » (Bantigny, 2013, p. 15) irrigue de manière croissante toute épistémologie de la connaissance. Les sciences du langage dans l’espace francophone ne sont pas en reste puisque, notamment sous l’influence du poète et traductologue Henri Meschonnic (1982, 1999, 2012), cette tendance y est également palpable. Elle est corroborée, par exemple, par les travaux de Besse en DDLC sur les méthodes de langues (2000, 2012) ou sur les « innovations pédagogiques » (2016), les travaux d’Auroux en histoire de la linguistique sur les « modes d’historicisation » (2006) ou sur l’origine des langues (2007). La tendance se poursuit plus récemment avec notamment une « esquisse d’historicisation » de l’approche neurolinguistique pour l’enseignement des langues étrangères et secondes réalisée par David Bel (2023) ou l’article de Jacques Guilhaumou (2024) sur les relations entre histoire et linguistique au prisme de l’analyse du discours.

3Quel qu’en soit cependant l’ancrage disciplinaire ou l’objet, cette historicisation permet de dévoiler certains impensés, de se méfier des « fausses ruptures et fausses continuités » (Martin, 2002), de déconstruire ou relativiser certaines évidences ou certains allants de soi en rendant apparent le caractère contingent des concepts, des approches et des discours qui les construisent. C’est ce que montre entre autres les recherches de Chiss (2020) sur le français comme « langue de culture » et le « génie de la langue française » ou encore les travaux d’Orlandi (2011) sur « le processus de grammatisation brésilienne du portugais » qui révèlent les subversions du pouvoir colonial dans la construction de la notion de « langue nationale » au Brésil. C’est dans le même ordre d’idée que Moussirou-Mouyama interroge la notion de « langue partenaire » à la lueur de ses conditions d’émergence en soulignant que « [l]a question linguistique est inséparable, dans le contexte africain, à la fois de la question didactique et de ce que l’on nomme les "questions de développement" [...] » (Moussirou-Mouyama, 2015, p. 8). L’approche historicisante imprègne d’ailleurs la linguistique pour le développement, autrement nommée linguistique du développement social (Metangmo-Tatou, 2019 ; Zouogbo, 2022), qui, cherchant à « mordre sur l’histoire et ses déterminismes » (Agresti, 2022, p. 37), intègre dans son approche non seulement le fait que « [l]e présent sort du passé, en dérive et le continue » (Durkheim, 1938) mais aussi, pour reprendre l’expression de Marshall Sahlins devenue célèbre, « différentes cultures, différentes historicités » (Sahlins, 1985).

  • 3 CLIODIL : Histoire et historicités en didactique des langues

4En France, la création au sein du DILTEC (Sorbonne Nouvelle) par Valérie Spaëth en 2017 du programme de recherche CLIODIL3 est un autre indice fort de cet intérêt pour l’historicité en didactique des langues, programme qui vise à promouvoir la recherche en histoire en didactique du FLES et qui s’est donné comme objectif de « procéder à l’historicisation des objets [dans ce domaine] (méthodologies, idéologies, manuels, pratiques, etc.) » (Spaëth, 2020, p. 13). À souligner également, l’organisation de plusieurs colloques qui se sont révélés des contributions significatives à (la réflexion sur) l’historicisation de la recherche en DDLC et des concepts connexes. En 2019 se tenait ainsi le colloque « Didactique des langues et plurilinguisme : 30 ans de recherche » qui célébrait les 30 ans de l’Acedle en rendant un hommage particulier à Louise Dabène (voir Galligani & Dompmartin, 2021a et 2021b) puis en 2021, le colloque « Histoire des idées dans la recherche en didactique des langues : 1945-2015 », organisé à l’Université de Tours sous la houlette de Véronique Castellotti et Marc Debono.

5Bien que d’autres événements et travaux témoignent encore de cette montée d’intérêt pour l’historicité en sciences du langage, il n’en demeure pas moins marginal, particulièrement en DDLC (voir dans ce volume Burrows, 1.1 et Huver, 1.1 infra). En effet, malgré ces contributions remarquables, la recherche comme l’intervention dans le domaine de la DDLC mobilisent encore assez peu ces notions d’historicité et d’historicisation, qui se limitent souvent à une entrée en matière contextualisante factuelle, (pratiquement) indépendante de la recherche elle-même, souvent empirique et synchronique. Ces deux notions - empirie et synchronie -, s’inscrivant justement dans une histoire des idées, sont problématisées depuis longtemps en sciences sociales (voir Bosa, 2011) et particulièrement en sciences du langage (voir Chiss, 1978 ; Chiss & Puech, 1999).

  • 4 Voir par exemple les textes programmatiques de Porcher (1984), Reboullet (1987), Puren (1994) ou en (...)

6Il existe bien sûr des initiatives historicisantes en DDLC, et ce depuis plusieurs décennies4. Mais ces approches historicisantes n’ont pas de place centrale dans le champ didactique, comme si l’historicité et l’historicisation étaient condamnées à rester le supplément d’âme quelque peu anecdotique d’une discipline dont le cœur serait une intervention ayant prioritairement à composer avec les contingences du présent et à inventer son futur. Or, elles y seraient particulièrement pertinentes, dans la mesure où langues et cultures sont pétries d'histoire, de même que les processus de leur transmission et d’appropriation ainsi que les situations dans lesquelles elles sont transmises et appropriées. Il s’agit d’envisager « la démarche d’historicisation, comme le suggère Humboldt [...] en tant que condition essentielle de la compréhension des langues » (Feussi, 2019, p. 6). C’est d’ailleurs ce que propose l’approche appropriative des langues (Castellotti, 2017) qui accorde une place essentielle « aux expériences plurielles, à la diversité des projets et histoires des personnes et des institutions dans les questions didactiques » (Feussi, Ibid., p. 12). Ces considérations sont également au cœur de la question de la transmission linguistique qui n’est en rien un simple phénomène ponctuel mais un processus à la fois diachronique et synchronique qui s’inscrit dans le temps mais aussi dans l’espace où prennent place des sujets et qui sont autant d’acteurs de l’histoire (Leconte, 2023). La bien nommée « crise de la transmission » (Bertrand, 2008) traduit justement la complexité du processus transmissionnel tel qu’a pu l’analyser Barotini (2014), en relevant que « l’entrée par la langue et non avec le locuteur [...] conduit à évacuer, au moins partiellement, la problématique de l’expérience de la transmission ». Car c’est bien à travers une historicisation de l’expérience individuelle ou collective que la démarche historicisante se révèle.

  • 5 La notion de “sujet interprétant” renvoie notamment à Derrida (1967a, 1967b) qui critique l’idée d' (...)

7Ce numéro de RDLC vise donc à repenser les apports, la pertinence et les éventuelles limites de la mobilisation des notions d’historicité et d’historicisation en DDLC, tant du point de vue de la recherche que de l’intervention, à travers les questionnements suivants : comment comprendre l’historicité en DDLC, cette notion éminemment transdisciplinaire ? En quoi procéder à l’historicisation dans notre discipline peut-il être pertinent, à différents niveaux : historicisation de la recherche ; historicisation de l’enseignement ; historicisation des langues, des cultures ; historicisation en tant que notion au fondement de certains types d’interventions didactiques ; historicisation des personnes impliquées ; etc. ? De quelle manière l’historicisation, comme démarche heuristique, peut-elle se décliner à tous les niveaux de la recherche et de l’intervention en DDLC, afin de soutenir la définition et la mise en œuvre d’une posture réflexive et critique, tant pour le chercheur, l’apprenant que l’enseignant-formateur ? En particulier, procéder à l’historicisation de l’histoire de l’enseignement des langues (Puren & Galisson, 1988 ; Germain, 1993) ouvre-t-il à l’écriture d’une « autre histoire » (Spaëth, 2014), favorisant en formation des enseignants des pratiques plus éclairées et situées ? Dans quelle mesure la mise en histoire du sujet interprétant5, qu’il soit enseignant, chercheur ou apprenant, et la mise au jour des conditions et des modalités de son interprétance, pour reprendre le terme de Benveniste, participe-t-elle de cette historicisation ? Cette mobilisation de la subjectivité voire de l'herméneutique à des fins d’apprentissage, de formation et de recherche favorise-t-elle l’agentivité (Guilhaumou, 2012) ? Mais encore, dans une visée interventionniste, conciliable avec ces approches, comment mettre en œuvre l’historicité comme démarche didactique, en classe ? À ces nombreuses questions, ce numéro apportera une modeste contribution que nous espérons néanmoins utile dans ce vaste chantier encore ouvert qu’est l’introduction de l’approche historicisante en DDLC, dans la recherche, et plus largement dans l’enseignement et la formation.

  • 6 CEVIPOF : Centre de Recherches Politiques de Sciences Po

8Le premier chapitre « Continuums et ruptures : histoire, historiographie, historicité, historicisation – enjeux notionnels en didactique des langues » vise à cerner la notion d’historicité par rapport à des notions connexes et pourtant distinctes, en privilégiant une approche plus théorique et épistémologique à partir de regards croisés entre différents domaines disciplinaires. Souvent assimilée à tort à la simple histoire d’une discipline ou d’un concept, la notion d’historicité renvoie en réalité plus spécifiquement au « rapport général que les hommes entretiennent avec le passé et l’avenir » (Lefort, 1952) et se « niche à l’intersection d’un « horizon d’attente » et d’un « espace d’expérience » (Koselleck, 1990). Comment ainsi définir l’historicité (d’une discipline, d’un concept, etc.), sans la réduire à son histoire et en la distinguant de la fabrique historiographique, réifiante ? Et quelle pertinence pour la DDLC, de cet « instrument et [de ce] moment de compréhension des phénomènes » qu’est l’historicisation, démarche de connaissance caractérisée par sa volonté de dévoilement des construits (Audren et al., 2003, p. 516) ? Transcendant les frontières disciplinaires, Alexandre Escudier et Alice Burrows nous apportent des éléments de réponse pour mieux comprendre cette « expérience socialisée du temps », et ses enjeux transversaux, contradictoires voire parfois polémiques, mais formatifs et scientifiques. Dans « Historicité(s) et niveaux de réalité : essai de balisage conceptuel », l’historien Alexandre Escudier (CEVIPOF6) clarifie tout d’abord les acceptions possibles de la notion, dont la polysémie et l’opacité sont à juste titre soulignées : l’historicité comme matière historique (objet), l’historicité comme historicisation (cognition), et l’historicité comme expérience socialisée du temps. Il met ensuite en évidence « certaines impasses contemporaines relatives au constructivisme et à la réduction de la notion à l’idée d’ « agentivité des acteurs microsociologiques » (Escudier, infra). Puis, afin de renverser ce qu’il désigne comme un « double réductionnisme » (Ibid.), il prône, à rebours de l’opposition traditionnelle entre sciences historiques et théorie générale de la nature humaine, « une anthropologie "élargie" pouvant servir de cadre analytique à l’ensemble des sciences humaines et sociales », dont pourraient notamment se saisir les praticiens en didactique des langues. C’est en particulier en ce sens qu'œuvre Alice Burrows (Université Sorbonne nouvelle) en répondant à la question nodale « pourquoi mobiliser l’historicité en didactique des langues et des cultures ? » et en traitant de « l’émergence de questionnements sur les modalités et les enjeux de production de [l’]histoire » (Burrows, infra) en DDLC. Suite à un utile état des lieux des recherches en histoire en DDLC, qui opère une classification de ces modes de production du savoir historique, Burrows relit et relie à la DDLC les définitions conceptuelles posées par Escudier. Elle prône quant à elle une approche de l’historicité en DDLC comme « expérience socialisée du temps vécu » afin d'envisager l’histoire des méthodologies comme une composante de l’histoire de la pratique sociale d’enseignement-apprentissage des langues. Il s’agit dès lors de comprendre les apports possibles de ce concept une fois redéfini non seulement en recherche mais aussi en formation des enseignants. La richesse épistémologique de ces deux articles n’épuise cependant pas pour autant le débat conceptuel, comme le suggèrent les pistes finales ouvertes par Burrows (infra).

  • 7 Crédif : Centre de recherche et d’étude pour la diffusion du français

9Le chapitre 2, « Historiciser : pertinence des démarches et postures en DDLC », ouvre la réflexion sur la manière dont une démarche de recherche historicisante serait spécifiquement apte à construire une posture critique originale en questionnant les allant-de-soi notionnels, ces « impensés du domaine et catégories doxiques » en DDLC (Castellotti, 2015), circulant dans notre champ (autour de notions telles que, sans exhaustivité : langue, culture, altérité, diversité mais aussi autonomisation, collaboration, etc.). Pourquoi adopter plus largement cette perspective historicisante en recherche en DDLC ? Et comment l’adapter à son champ, son objet, son concept, en lien avec sa trajectoire personnelle de chercheur ? En quoi cette historicisation fragmentée, à travers l’historicisation de parcours personnels, peut-elle participer à l’avènement de l’historicité de la discipline, sachant que « l’historicité n’est pas une vérité à chercher mais un problème à poser ; elle n’est pas le maintien des rapports dans leur état mais leur transformation ; elle n’est pas la polémique mais la critique » (Martin, 2002) ? C’est à travers un retour réflexif et historicisé que Daniel Coste nous apporte des éléments de réponse, lui qui fut et demeure un des acteurs majeurs du champ du FLE tant dans son rôle d’enseignant-chercheur (Coste, 1970, 1988, 1990, 2013, pour ne citer que certains de ses nombreux travaux partis de la linguistique appliquée pour aboutir à la DDLC) que par son implication dans la politique linguistique et éducative (Coste, 1984) au Crédif7 et au Conseil de l’Europe. C’est ainsi en tout logique, « sous forme d’un témoignage personnel », qu’il nous invite à partager dans son parcours professionnel mais aussi plus intime, « certains moments, certains segments de [son] champ d’expérience, revisités à partir de [son] hic et nunc » (Coste, Ibid.). Il se prête ainsi à la démarche sociobiographique (Molinié, 2016) de son « passé incorporé » (Ibid.), à travers trois figures familiales, mais avec un réel souci d’ « objectivation », au prisme de cinq moments où se nouent l’histoire collective de la didactologie-didactique du FLE entre 1960 et 1990 et son histoire personnelle. Il montre « comment [l’histoire collective] s’y intègre, y fait sens et dans le même mouvement contribue à le façonner et à l’infléchir » (Huver, infra), en revenant sur son premier séjour aux États-Unis, l’élaboration du Français Fondamental, le Centenaire de l’ENS de Saint-Cloud, sa recherche doctorale sous la direction d’Encrevé, la création de la SIHFLES. Cinq moments plus un, puisque son expérience au Conseil de l’Europe dans le cadre de la rédaction du CECR est évoquée aux marges de son témoignage. En « (presque) réponse à Daniel Coste », Emmanuelle Huver (Dynadiv, Université de Tours) croise la notion d’historicité et de pluralité en répondant sous cet angle à la question déjà posée par Alice Burrows sur le pourquoi de l’historicisation de la (recherche en) DDL afin de mettre en évidence « ce que fait la diversité à la DDL », prémisse fondamentale, en prenant « en considération [l]es différentes versions de l’histoire, autrement dit du conflit des interprétations », non pas afin de « faire de l’histoire pour documenter et reconstituer, mais pour pluraliser, dans une visée réflexive » (Huver, infra). Son positionnement ouvre avec l’article d’Escudier (infra) un « dialogue agonistique » ou du moins illustre la « pluralité des interprétations », comme elle l’appelle de ses vœux. Elle s’attache en outre à questionner les enjeux et les difficultés dans l’historicisation de la DDL à partir de celle de ses acteurs, en particulier des chercheurs. En effet, comme le note aussi Escudier (infra), la menace du relativisme plane sur cette approche de l’historicité, pensée comme « expérience herméneutique » (expression qu’elle emprunte à Papasaïka, 2019) et sensible, fondée sur des témoignages, ou une démarche plus phénoménologique. L’article de Coste (infra), qu’elle replace dans un contexte de recherche plus général, lui fournit un point d’analyse pour interroger les enjeux liés à cette démarche de recherche en didactologie consistant à « s’intéress[er] à l’épistémologie des domaines de recherche au prisme des récits de vie des chercheurs qui les configurent » (Huver, infra). L’enjeu ne se limite pas à incarner la recherche par ces récits de vie mais l’historicisation peut se révéler un puissant levier pour resituer « historialement, les enjeux économiques, sociaux, politiques [...], les enjeux locaux, voire parfois individuels » (Huver, infra) de dispositifs ou notions en DDL jugés irréfutables. Malgré son intérêt, Huver (infra) met aussi en évidence les écueils que pose l’historicisation du chercheur. Elle soulève ainsi la problématique de la « sincérité » des témoins et la « véracité du témoignage », non seulement en raison de la fragilisation de la posture d’expertise que peut représenter une telle démarche, mais aussi des « creux et des silences » qui peuvent interférer dans le témoignage, tant du côté du témoin que du chercheur menant l’entretien. Sans compter que le chercheur menant l’entretien peut céder à une tentative hagiographique dans le traitement des données ainsi recueillies.

10Le troisième chapitre se focalise davantage sur l’historicisation du point de vue des personnes et prolonge ainsi les propos d’Huver en interrogeant d’une part les apports scientifiques d’une approche du sujet interprétant par la mise en histoire des chercheurs et d’autre part les apports formatifs de cette même approche par la mise en histoire des enseignants en formation. Une partie des sciences du langage, notamment en sociolinguistique (Nossik, 2011 ; Canut et al., 2018) et en DDLC s’inspire des démarches qualitatives anthropologiques, ethnologiques et sociologiques de type récit de vie (Bertaux, 2005) pour ouvrir leurs réflexions à l’écriture et la mise en histoire de soi en formation et en recherche. En rendent compte par exemple les travaux autour du journal de bord en formation d’enseignants (Cadet, 2006) ou encore autour de la sociobiographie (Molinié, 2016). Comment l’écriture de soi permet-elle le développement d’une posture de « praticien réflexif » (Schön, 1993) chez l’enseignant de langue et chez le chercheur ? En recherche en sciences humaines, la reconnaissance croissante de l’(inter)subjectivité (Favret-Saada, 1990 ; Lagrave, 2021) appelle de plus à une double historicisation à laquelle n’échappe pas la DDLC : celle de l’objet de recherche mais aussi celle du chercheur. L’enjeu méthodologique du « je » en recherche (Olivier de Sardan, 2000 ; Caratini, 2013) est donc de concilier l’exigence de rigueur et l’implication subjective du chercheur, tout en accueillant la subjectivité du sujet en constructeur de sens dans une perspective phénoménologique. Faisant écho aux enjeux et aux écueils soulevés par Huver dans l’historicisation des chercheurs, Anne-Sophie Cayet (DILTEC, Université de la Sorbonne nouvelle & SUL, Aix-Marseille Université) aborde cette dernière dans le cadre de leur formation notamment doctorale. Dans sa contribution, elle tente de répondre à la question suivante : « en quoi une « herméneutique du sujet » (Foucault, 2001) induite par des pratiques réflexives sociobiographiques peut-elle jouer un rôle dans la constitution d’une identité professionnelle et scientifique, particulièrement chez les jeunes chercheurs ? » (Cayet, infra). Cayet dessine d’abord les contours de la notion d’historicité d’un point de vue philosophique en s’appuyant sur Gadamer, Heidegger, Dewey ou encore sur la sociologie clinique et notamment la « clinique de l’historicité » (de Gaulejac, 2020) qui envisage le récit de vie comme outil émancipateur et de transformation. Plaçant au cœur de son propos la réflexivité et le dialogisme comme les « matrices de l’historicité » et posant le primat de l’expérience et de l’interprétation sur la vérité ou le savoir absolu, elle défend l’idée selon laquelle, pour le chercheur (en formation), l’enjeu n’est pas « d’accéder au Sens, mais de conférer du sens » (Cayet, infra). Le récit de soi apparaît ainsi comme un outil puissant de (trans)formation s’il est envisagé comme « un processus dynamique et itératif qui s’inscrit dans des espaces dialogiques de co-construction de sens capables de faire émerger des interprétations jusque-là insoupçonnées par le sujet » (Cayet, infra). En s’appuyant sur des exemples tirés de sa propre expérience et issus d’un corpus de thèses et d’entretiens avec de jeunes chercheurs, elle explore les implications et les enjeux méthodologiques et épistémologiques de cette approche de la formation doctorale qui vise à « relier parcours de vie et parcours de recherche » (Cayet, infra). Cayet rend notamment compte d’une recherche-action au cours de laquelle elle a pu expérimenter ladite approche à travers le recours aux entretiens compréhensifs et au « portfolio du doctorant réflexif » (Cayet & Ruet, 2023) mettant ainsi à jour certains effets concrets de la « méthodologie sociobiographique » comme la possibilité de « s’émanciper de son terrain » (Cayet, infra). En s’inscrivant résolument, aux côtés de Muriel Molinié, dans le projet de « formalisation d’une formation à la recherche (initiale, doctorale) qui inclut la biographisation des parcours intellectuels », Cayet soulève enfin la question des enjeux éthiques et politiques de « l’historicisation dans et par la recherche » en insistant sur les tensions inhérentes à ce projet. Nathalie Thamin (Université de Franche-Comté) répond à Sophie Cayet en faisant le choix de centrer son propos sur la « professionnalisation des enseignants de langue en contexte diversitaire » dans le cadre des recherches collaboratives notamment. Si elle rejoint Cayet sur de nombreux points et notamment sur les apports indéniables, en formation, des approches historicisantes, réflexives et biographiques dont elle se saisit également, elle insiste cependant sur la nécessité d’envisager l’historicité et l’historicisation à l’aune de notions connexes telles que contexte, agentivité, transmission et appropriation dont elle se propose de clarifier la portée en DDLC. Thamin propose des exemples concrets d’expériences en formation initiale et continue des enseignants, impliquant une démarche d’historicisation et de décentration. Ces exemples incluent la biographie langagière et l’intégration de médiations artistiques, telles que le théâtre, pour favoriser le développement « de valeurs citoyennes et d’altérité, d’interculturalité et des habiletés réflexives, émancipatrices et critiques » (Thamin, infra). Cayet et Thamin alimentent ainsi, chacune à leur manière, la réflexion sur les effets de l’historicisation des expériences individuelles et collectives qui apparaît sous leur plume indissociable de la construction de l’identité professionnelle des enseignants et des chercheurs.

  • 8 Sur les pédagogies critiques, voir Pererira & de Cock, 2019.

11Dans le chapitre 4, l’historicité se retrouve au cœur de démarches didactiques à travers la contribution d’Hara Papasaïka (DYNADIV, Université de Tours) qui nous ancre davantage dans le terrain pédagogique, et auquel répond Émilie Kasazian (INSPE Académie de Versailles – CY Cergy), à travers la notion de contextualisation, et de ses liens avec l’historicisation, en interrogeant la continuité entre langues et histoire, comme matière disciplinaire. Tant dans la recherche en DDLC que dans les préconisations pédagogiques et didactiques institutionnelles, le présentisme et le mythe du progrès (Hartog, 2003) ne tendent-ils pas à prédominer (Santos, 2016) ? En formation didactique notamment, la primauté d’un modèle historiographique téléologique, universaliste et positiviste (Clavères, 1990) menace d’imposer la dernière configuration méthodologique (méthodologie communicative, approche actionnelle, etc.) comme panacée pédagogique, au mépris de la prise en compte du contexte et de la « diversité diversitaire » (Debono et al., 2013). D’où la nécessité de contribuer à mettre en évidence la « fabrication » (Audren et al., 2003) du champ afin de déconstruire les évidences que l’enseignement peut contribuer malgré lui à véhiculer, notamment au niveau culturel : le « paysage imaginaire » (Appadurai, 2005 [1996]) influe en effet sur les mémoires collectives (Halbwachs, 1950), touchant jusqu’aux pratiques pédagogiques et didactiques. Les récits de soi (Deprez, 1996) et biographies langagières interrogent notamment chez les apprenants de langue cette fabrication au niveau individuel. L’historicité est alors, dans ce cas, conçue comme une mise en récit interprétatif (Ricœur, 2000), qui participe à la construction d’une culture éducative propre pour les apprenants (Aguilar et al., 2014 ; Debono et al., Ibid. ; Castellotti, 2009). Ainsi, l’historicité en tant que démarche didactique et d’enseignement, via le recours à l’historicisation, pourrait constituer un appui pour aborder autrement les enseignements de langues/cultures, dans une perspective plurilingue et interculturelle. Celle-ci prendrait en effet mieux en compte la complexité (Morin, 1994) grâce à la mise en relation et en altérité des histoires en contact. Le document historique en classe de langue, mais aussi évidemment la classe d’histoire (voir le projet Interdid, de Kasazian), constituent alors des espaces privilégiés pour interroger cette fabrication, ancrée dans un contexte local. Comment mettre alors en évidence, en classe, ce savant tissage de la mémoire individuelle et de l’histoire collective (Spaëth, 2020) ? En quoi favorise-t-il l’apprentissage et plus encore l’émancipation (Molinié, 2016) ? Sachant que l’histoire est souvent racontée au filtre d’une histoire nationale puis réinterprétée à travers le filtre personnel, comment travailler l’interculturel en diachronie en redonnant toute leur épaisseur historique aux cultures, à rebours du simplisme qu’entraîne souvent l’approche comparative en synchronie (Papasaïka, 2019) ? La recherche de Papasaïka interroge sous l’angle épistémologique mais aussi opérationnel la pertinence en DDLC du recours à la notion d’historicité et à l’historicisation envisagée cette fois dans une approche didactique, altéritaire et critique. Sa démarche pourrait d’ailleurs être corrélée aux pédagogies critiques développées à partir des travaux de Paulo Freire8 qui visent l’émancipation des élèves et des enseignants notamment en développant leur sens critique à partir de leur expérience vécue. À partir d’une expérimentation menée dans un collège en Grèce qui exploite des documents historiques en classe de FLE (en l’occurrence sur les Ottomans), elle veut inciter les élèves à interroger leurs propres certitudes en comparant les récits historiques en français et en grec et en réfléchissant à la manière dont le langage façonne leur compréhension du monde. Papasaïka cherche en effet à faire en sorte que les élèves perçoivent « les langues comme des brèches à des manières différentes de comprendre et de vivre le monde » (infra). Nourrie de Merleau-Ponty, Ricœur, de Certeau ou encore Foucault, elle pose que l’historicité implique que les mots ne sont jamais neutres mais au contraire façonnés par des héritages, des expériences collectives et des mémoires partagées. Sa démarche repose sur le postulat que l’historicisation des langues permet de mettre en lumière la diversité des temporalités et la pluralité des interprétations à partir desquelles les significations langagières se construisent. Il s’agit alors de montrer que les récits historiques ne sont pas figés, mais constituent des productions dynamiques et contextualisées, le fruit d’interprétations influencées par les espaces-temps dans lesquels les locuteurs évoluent. À travers la démarche qu’elle propose, elle offre des pistes concrètes pour mettre en œuvre une démarche didactique historicisante qui dévoile la pluralité des interprétations, parfois conflictuelles. Comme le signale Huver dans l’article qu’elle propose dans ce volume, « [e]n DDL (sur des terrains scolaires ou non), cette démarche est moins présente, voire complètement absente » (Huver, infra). Huver souligne ainsi l’originalité du travail de thèse de Papasaïka (2019), « qui fait du conflit des interprétations historiques le centre d’activités didactiques pour un enseignement des langues fondé sur les principes de diversité et de réflexivité » (Huver, infra). Cette approche amène Émilie Kasazian, répondante de Papasakaï, à s’interroger sur les finalités d’enseignement de la discipline de didactique des langues. Elle envisage ainsi une didactique plurielle, interreliée aux autres disciplines scolaires, l’histoire en particulier puisqu’elle a en commun avec la didactique des langues d’ouvrir à l’altérité. « Au-delà de la spécificité du langage disciplinaire, [conclut-elle], outre les dimensions langagières qui émanent des genres discursifs propres au domaine de l’histoire, on peut voir la langue comme celle qui transforme et qui amène les apprenants à une prise en charge énonciative des éléments du cours en leur laissant une place de choix dans le processus d’appropriation » (Kasazian, infra).

  • 9 Serge Ritman, sous son nom de plume.

12Loin d’être un débat abstrait, la question de l’historicité est centrale en DDLC en raison de ses liens étroits avec la théorie du langage, « lieu majeur où se fonde, et combat, l’historicité radicale du sens et de la société qui s’élabore, depuis Humboldt et Saussure, et passe par Benveniste » (Meschonnic, 1988, pp. 10-11). C’est avec les mots du chercheur et poète Serge Martin9, grand lecteur de Meschonnic, que nous avons l’infini regret de ne pas avoir pu, comme convenu et espéré, entendre lors de la journée NeQ ni lire dans ce volume, que nous souhaitons non pas conclure mais ouvrir cette introduction, lui rendant ainsi un juste hommage pour nous avoir accompagnés par ses écrits dans l’appréhension de cette notion ardue qu’est l’historicité, jugée par Meschonnic lui-même comme « difficile », à l’instar de « l’altérité » (Meschonnic, 1989).

Avec le concept d’historicité radicale du langage et dans l’état de ses écrits publiés, Meschonnic met en crise toutes les disciplines. Il demande tout simplement à chacune de revoir son concept d’historicité sous peine de devoir admettre qu’il est autre chose que ce qu’elle dit qu’il est, historicisation de ses objets et de ses recherches, alors que bien souvent elle fait tout pour supprimer ce rapport à l’histoire, à son histoire, du moins nombre de ses aspects. Je me contente de lister ces mises en crise qu’opèrent les ouvrages de Meschonnic, sachant bien qu’il ne s’agit que d’indications et que la liste est loin d’être complète :

– pour la théorie et les sciences humaines : l’historicité n’est pas une vérité à chercher mais un problème à poser ; elle n’est pas le maintien des rapports dans leur état mais leur transformation ; elle n’est pas la polémique mais la critique ; [...]

– pour la linguistique : l’historicité n’est pas la perspective diachronique opposée à la statique d’un état de langue, mais dans la tenue du couple synchronie-diachronie le primat du système comme force d’historicisation ; [...]

– pour la politique linguistique : l’historicité n’est pas la recherche d’une identité perdue ou à venir confondant les discours sur la langue avec celle-ci mais la recherche de la pluralité dans le temps et dans l’espace associée à la continuité d’identités longues par-dessus toutes les fausses ruptures et fausses continuités ; [...]

L’historicité radicale du langage [...] impose à chaque notion qu’on croyait instrumentale de se transformer : le sens devenant signifiance ; la forme, valeur ; la structure, système ; l’essence, spécificité ; le discontinu, continu ; la totalité, infini ; le contemporain, moderne ; la poésie, poème... et l’exposé, rapport. Ce qui demande plus que de changer de nomenclature (Martin, 2002).

Ce numéro dans son entier, comme cette citation, se veut donc aussi une invitation à (re)lire Meschonnic, et à penser l’historicité dans le champ de la didactique des langues et des cultures ‒ mais aussi bien au-delà.

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Bibliographie

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Notes

1 Société internationale pour l’histoire du français langue étrangère ou seconde

2 Voir le site de la SIHFLES : https://www.sihfles.org/association/

3 CLIODIL : Histoire et historicités en didactique des langues

4 Voir par exemple les textes programmatiques de Porcher (1984), Reboullet (1987), Puren (1994) ou encore Coste (1990) et plus récemment Burrows (2018), Papasakaï (2019), Spaëth (2020), pour n’en citer que quelques-uns.

5 La notion de “sujet interprétant” renvoie notamment à Derrida (1967a, 1967b) qui critique l’idée d'un sens fixe ou originaire, Derrida défend l’idée que le sujet qui interprète un texte participe activement à la construction du sens, plutôt que de découvrir une vérité déjà là. Sur le sujet interprétant, voir Achard-Bayle et al., 2018.

6 CEVIPOF : Centre de Recherches Politiques de Sciences Po

7 Crédif : Centre de recherche et d’étude pour la diffusion du français

8 Sur les pédagogies critiques, voir Pererira & de Cock, 2019.

9 Serge Ritman, sous son nom de plume.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Isabelle Cros et Amélie Leconte, « Introduction : Historicité et historicisation en didactique des langues et des cultures »Recherches en didactique des langues et des cultures [En ligne], 22-3 | 2024, mis en ligne le , consulté le 15 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rdlc/14334 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12wr6

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Auteurs

Isabelle Cros

Aix-Marseille Université, Laboratoire Parole et Langage, UMR 7309 CNRS (France)
Isabelle CROS est maîtresse de conférences en didactique des langues et des cultures à Aix-Marseille Université (AMU). Elle est formatrice de formateurs à l’Inspé d’Aix-en-Provence, en MEEF FLE (didactique du FLES et des langues), en MEEF Mention 1er degré (en didactique du français langue première), et en MEEF Mention PIF/Néo (pratiques et ingénierie de la formation numérique). Elle dispense en outre des enseignements en lien avec l’écriture créative. Elle est rattachée au laboratoire Laboratoire Parole et langage, et membre de l’équipe LEdA (Langues, Éducation & Apprentissage). Sa thèse, Contribution à une histoire du français langue étrangère au prisme des idéologies linguistiques (1945-1962), réalisée sous la direction de Valérie Spaëth (2016), l’a amenée à aborder la didactique du FLES dans une perspective empruntant à la sociolinguistique historique. Elle a été membre du groupe CLIODIL, projet de recherche visant à créer des ponts entre les chercheurs de didactique des langues s’intéressant à l’Histoire. Ses recherches actuelles, s’ouvrant aux recherches-créations, s’orientent vers les plurilittératies (plurilingue et numérique), qui sont au cœur des questionnements du réseau scientifique Lire et écrire entre les langues (LEEL), qu’elle a co-créé avec Anne Godard.
isabelle.cros[at]univ-amu.fr

Articles du même auteur

Amélie Leconte

Aix-Marseille Université, Laboratoire Parole et Langage, UMR 7309 CNRS (France)
Amélie Leconte est maîtresse de conférences à Aix-Marseille Université (AMU). Elle est directrice du Département de FLES d'AMU depuis 2021 dans lequel elle enseigne notamment les didactiques en contextes, l'analyse des politiques linguistiques, l'ingénierie de projet de formation. Elle est co-fondatrice et co-responsable du SUPFLES (Stages Universitaires de Professionnalisation en FLE/S) d'AMU au sein duquel elle coordonne depuis 2018 des programmes de formation pour des publics d'enseignants de FLES en contextes variés. Au sein du Laboratoire Parole et langage, elle fait partie de l'équipe SystUS (Systèmes, Usages, Sociétés). Titulaire d'une thèse de doctorat en sociolinguistique sous la direction de Louis-Jean Calvet (2014), elle est spécialisée en politologie linguistique scolaire. Ses travaux de recherche s'articulent à l'intersection de la politique linguistique et de la planification de l'acquisition linguistique en contexte éducatif fortement multilingue et des approches interculturelles et plurilingues dans la scolarisation et l'enseignement des langues-cultures. Ses travaux de recherche s'orientent vers la décolonisation des savoirs et la linguistique pour le développement, explorant les intersections entre les pratiques langagières, les inégalités épistémiques et les enjeux de justice sociale dans les contextes postcoloniaux. Elle est membre du réseau scientifique Peuple, langue, culture, développement (Poclande) dont elle est vice-présidente depuis octobre 2024, de l'Observatoire du plurilinguisme africain (OPA) et du consortium scientifique Lire et écrire entre les langues (LEEL).
amelie.leconte[at]univ-amu.fr

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