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Échanges

Développer de nouveaux savoirs pour en finir avec « l’acceptabilité sociale » des risques industriels

Developing New Knowledge to Overcome the "Social Acceptability" of Industrial Risks
Gwenola Le Naour
p. 173-190

Résumés

Résumé : Dans les politiques de gestion des risques industriels, la notion d’acceptabilité sociale renvoie à l’idée que les risques doivent être acceptés par les riverains et que les industriels ont le devoir de se comporter en « bons voisins ». Cette notion est de moins en moins utilisée et beaucoup s’accordent sur le fait que les risques ne peuvent plus être imposés, ce que sous-entendait la notion d’acceptabilité. Les enjeux d’information et de communication ont aussi été mis au cœur de cette politique avec l’idée que les riverains n’étaient pas suffisamment informés et que les industriels ne communiquaient pas assez sur leurs activités et leurs effets. Les échecs répétés des politiques publiques visant à produire du consentement à des équipements industriels polluants invitent à questionner les fondements des politiques de gestion des risques industriels, à proposer des pistes pour renouveler les connaissances autour de ces sites et à insister sur l’apport de disciplines comme la sociologie, l’histoire, la géographie ainsi que les sciences de l’information et de la communication à la compréhension des injustices environnementales et des maladies industrielles.

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Texte intégral

  • 1 Je pense en particulier au Groupement d’intérêt scientifique « Risques collectifs et situations de (...)

1Dans l’article « Doxa de l’acceptabilité sociale contre la santé publique. La “démocratie sanitaire” à l’épreuve de la pandémie de Covid-19 et au-delà », Caroline Ollivier-Yaniv (2023) interroge à la fois les préjugés des personnels politiques et administratifs à l’endroit des usagers, citoyens ou administrés qui nuisent aux possibilités d’écoute et de prise en compte de leurs demandes et la place que pourraient jouer les sciences de la société dans l’amélioration d’un dialogue entre autorités politiques, administratives, usagers et usagères. L’article porte sur la communication gouvernementale en temps de crise de la Covid-19 et sur les autorités sanitaires. Il résonne fortement avec d’autres formes de communication publique et d’autres risques. Les recherches que je conduis depuis maintenant une quinzaine d’années portent sur les politiques de gestion des risques industriels à l’échelle territoriale. Les questions auxquelles je cherche à répondre, en tant que chercheuse et en tant que citoyenne, concernent les stratégies mises en place par les industriels pour faire tolérer leur présence sur les territoires en dépit de tous les dangers que cette présence engendre, ainsi que les formes de résistance mises en place par les résidents et usagers pour vivre avec et malgré ces industries. Mon terrain est le territoire sud-lyonnais, précisément les communes de Feyzin où est implantée une raffinerie depuis les années 1960, Oullins, Saint-Fons et Pierre-Bénite où de nombreuses usines chimiques sont installées, territoire connu sous le nom « couloir » ou « vallée de la chimie ». Les risques industriels, comme les risques sanitaires, sont marqués par des injonctions à « l’acceptabilité sociale » qui sous-entendent que ceux-ci seraient acceptables à condition que les perceptions des habitants et usagers soient modifiés. C’est pour comprendre et changer ces perceptions que des disciplines comme la sociologie ou la psychologie ont été convoquées dans les années 1980. Très vite, de nombreux chercheurs ont refusé de répondre à ce type de commande politique, en proposant des problématiques sur les situations de crise, le rôle du pouvoir politique pour les réguler, etc1.

2Ces recherches riches ont souvent laissé de côté des problématiques complexes comme celles des inégalités d’exposition aux risques et des rapports de pouvoir incluant une analyse des stratégies économiques des entreprises et de leur communication territoriale, au plus près de celles et ceux qui subissent quotidiennement nuisances et dangers. Dans cette contribution, je propose de revenir sur ces impensés et de m’appuyer sur l’article de C. Ollivier-Yaniv pour réfléchir au rôle que pourraient jouer des disciplines comme la sociologie, la science politique, l’histoire, la géographie et les sciences de l’information et de la communication dans ces politiques de gestion des risques. Si les points communs entre risques sanitaires et risques industriels sont nombreux – comme une certaine défiance entre autorités administratives, associations et citoyens, une logique de communication très descendante qui vise à changer des pratiques individuelles pour prévenir des risques et une expertise monopolisée par certaines disciplines et certains savoirs –, les différences sont importantes car les risques industriels, hors catastrophes, sont en général discrets et faiblement médiatisés. Il n’y a pas d’infodémie similaire à celle qui est décrite pour la Covid-19, même si les informations sont très nombreuses, contradictoires et dispersées, notamment sur les risques liés aux substances toxiques auxquelles nous sommes toutes et tous plus ou moins exposés.

  • 2 Association nationale des communes pour la maitrise des risques technologiques majeurs (Amaris), 2 (...)

3Dans les politiques de gestion des risques industriels, la notion d’acceptabilité sociale renvoie à l’idée que les risques doivent être acceptés par les riverains et que les industriels ont le devoir de se comporter en « bons voisins ». Aujourd’hui, cette notion est de moins en moins utilisée et beaucoup s’accordent sur le fait que les risques ne peuvent plus être imposés, ce que sous-entendait la notion d’acceptabilité (Baba et Rauffet, 2015 ; Bécot et Le Roux, 2022). Les enjeux d’information et de communication ont également été mis au cœur de cette politique avec l’idée que les riverains n’étaient pas suffisamment informés et que les industriels ne communiquaient pas assez sur leurs activités et leurs effets. Les comités de suivi de site (CSS auparavant CLIC : comités locaux d’information et de concertation) ont été conçus pour répondre à ce besoin en 2005. Ces dispositifs n’ont pas fait leur preuve pour améliorer les relations entre industries à risques et habitants de ces zones polluées2. Ces échecs répétés des politiques publiques visant à produire du consentement à des équipements industriels polluants invitent à questionner les fondements des politiques de gestion des risques industriels, à proposer des pistes pour renouveler les connaissances autour de ces sites et à insister sur l’apport de disciplines des sciences de la société à la compréhension des injustices environnementales et des maladies industrielles.

  • 3 Cette affirmation provient de données issues d'entretiens et d'observations dans le cadre d'une en (...)

4Les politiques de gestion des risques industriels se caractérisent par des périodes de forte conflictualité et des périodes d’atonie ou de silence avec des demandes ou des plaintes individuelles intermittentes, sans action collective organisée (Bécot et Le Naour, 2023). Le silence des habitants est le produit d'une histoire, de stratégies industrielles qui visent à produire du consentement sur les territoires où sont implantées les industries les plus polluantes et à empêcher cette conflictualité de s'exprimer (Pessis, Topçu et Bonneuil, 2013). Dans les années 1970, une usine située à Pierre-Bénite, Produits Chimiques Ugine Kuhlmann, a fait l'objet d'importants débats et de conflits, menés notamment par les syndicats, comme la CFDT, qui a rendu public des dysfonctionnements internes à cette entreprise (Bécot, 2015). Durant des décennies (l’usine a changé plusieurs fois de propriétaire et de nom pour devenir usine du groupe Arkema en 2004), les problèmes ont été gérés en interne entre syndicats et patronat, et les plaintes riveraines sont restées individuelles et intermittentes ; ce qui a abouti à éteindre les contestations organisées et collectives. Depuis mai 2022, suite à une révélation médiatique de l’équipe de journalistes Vert de Rage travaillant pour France Télévisions, et à la diffusion durant l'émission Envoyé Spécial, le 12 mai 2022, d'une séquence faisant état de pollutions importantes aux perfluorés et aux polyfluorés au sud de Lyon, attribuées à l'usine Arkema de Pierre-Bénite, des contestations, notamment habitantes, ont vu le jour. Parallèlement à cette médiatisation et aux mobilisations qu’elle suscite, des associations de défense de l'environnement luttent contre les pollutions et, là-encore, en attribuent clairement la responsabilité à des entreprises qu’elles accusent de polluer illégalement le sol, l’air et l’eau. L’association Notre affaire à tous Lyon (NAAT Lyon) a, entre autres interlocuteurs, intenté une action en justice contre plusieurs industriels pour faire cesser les pollutions et pour que de nouvelles données soient produites sur leurs effets sur la santé humaine. Suite à ces mises en lumière de la responsabilité des industriels présents de longue date sur le territoire, les habitants ont le sentiment d’avoir été trahis, particulièrement ceux qui étaient très investis dans les instances de concertation mises en place à partir de 20063.

5Les séquences de forte conflictualité se caractérisent par une charge critique vis-à-vis des industriels et des données qu’ils produisent (Le Roux et Letté, 2013). Les périodes que l’on peut considérer comme d’accommodement aux risques ce qui ne signifie pas pour autant qu’ils soient acceptés sont des moments durant lesquels les industriels disposent du monopole de l’expertise légitime et sont dans une stratégie de « prévention des accidents de communication » (Boullet, 2012). Or, la politique française des risques industriels fait des acteurs industriels les propriétaires du problème (Gusfield, 2009). Non seulement ils produisent et contrôlent l’essentiel des données, mais ils en assurent aussi la diffusion en cadrant fortement leur communication autour des risques accidentels au détriment des risques chroniques. Ce faisant, ils contribuent au côté des services de l’État à répondre à une non-demande sociale, les habitants n’ayant jamais sollicité d’informations sur les accidents, alors qu’ils réclament régulièrement des informations sur les risques chroniques. Cette absence de données, parallèlement à des découvertes de contaminations importantes au sud de Lyon, aboutit à de nouvelles mobilisations sociales et oblige les chercheurs qui travaillent sur ces questions à s’engager dans des formes inédites de production des savoirs qui nécessitent de tenir compte des incertitudes et des attentes considérables des habitants et salariés.

Des savoirs capturés par les industriels soucieux de prévenir des « accidents de communication »

  • 4 L’action publique s’organise autour d’un échange entre groupes d’intérêt représentant les industri (...)

6Les industriels produisent l’essentiel des informations sur les risques et impacts de leurs activités. Les services administratifs dédiés, dont le corps de l’inspection des installations classées, leur confèrent le monopole de l’expertise légitime et la co-production, à leurs côtés, de la surveillance et de la sécurité des installations classées pour l’environnement. La gestion de l’action publique est ici de type néo-corporatiste4 et aboutit à faire de « l’environnement industriel » une catégorie d’action publique dont les retombées économiques sont considérées comme supérieures par rapport à d’autres problématiques, telles les maladies professionnelles ou les pollutions chroniques (Le Roux, 2020).

7En effet, les exploitants parviennent à domestiquer les atteintes environnementales en devenant les producteurs de l’ensemble des informations censées les documenter. Les législations successives obligent les industriels à produire des documents de mesure et d’information des risques : les études d’impact et les études de dangers (Boullet, 2012). Les études de danger (EDD), définies par le décret du 21 septembre 1977 précisant la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), sont des diagnostics techniques réalisés par les industriels pour faire état des effets des accidents susceptibles de survenir, destinés aux administrations compétentes et consultables par les habitants lors de l’enquête publique précédant l’implantation ou l’extension de l’équipement. Pour cela, l’expertise produite et les informations données sont du ressort des services spécialisés des entreprises concernées.

« Instrument de connaissance au service de la décision, l’analyse de risques est aussi un instrument de pouvoir qui profite aux acteurs qui en maîtrisent les conditions de production, c’est-à-dire les industriels, qui l’utilisent pour toutes les opérations de mise en sécurité de leurs installations, et les services de l’État, qui en ont besoin pour mener à bien leurs opérations de contrôle et de régulation » (Martinais, 2011 : 51).

8Les études d’impact sont, quant à elles, aussi demandées aux exploitants et concernent les installations qui s’implantent, s’agrandissent ou créent de nouveaux ateliers après la loi de 1976. Elles souffrent de nombreuses limites méthodologiques, tant il est complexe de mesurer les effets sur les milieux et la santé de tels équipements. Ces analyses sont le plus souvent confiées à des bureaux d’études financés par les entreprises. Les textes réglementaires entérinent donc une asymétrie d’information. Ils confèrent un pouvoir renouvelé aux industriels qui reprennent la main sur la conduite et le contenu des expertises après une période de flottement durant les années 1970. Fin 1973, outre les études d’impact et de danger, des contrats de branche sont signés entre les industries polluantes et le ministère de l’Environnement. Le premier est signé entre le groupe Péchiney Ugine Kuhlmann (PUK) – dont l’usine de Pierre-Bénite fait partie – et le ministère le 23 juillet 1975. Il vise à limiter les rejets dans l’eau et l’atmosphère des usines du site (Lascoumes, 1994). Cet instrument entérine l’acceptation des risques. En définissant des seuils et en octroyant des financements à l’entreprise, ce type de contrat ouvre un droit à polluer en deçà d’une certaine limite plutôt qu’il n’interdit les pollutions (Fressoz, 2013). Ici s’observe un processus classique de gestion des illégalismes consistant à les intégrer en normalisant les activités de ceux qui commettent des infractions répétées (Aguilera, 2012). Certes, les rejets sont réduits, mais en échange de financements publics (Grandbois, 1988). L’octroi de financements publics aide les entreprises à atteindre les objectifs de réduction des pollutions. Depuis ces contrats, les pollutions sont toujours régulées selon des seuils et valeurs limites pré-établies par des agences de régulation et par des marchés de droits qui imposent des taxes si les seuils sont dépassés (Karsenty et Weber, 2004). Pour les acteurs administratifs qui négocient ces procédures et sont chargés d’inspecter ces entreprises, il s’agit d’obtenir une mise en conformité des entreprises avec la législation sans les sanctionner ; et ce, pour des raisons économiques (Bonnaud, 2005).

9En définitive, les législations concernant les ICPE donnent aux employeurs et aux services de l’État des marges de manœuvre accrues. Elles les légitiment comme les « propriétaires des problèmes publics » (Gusfield, 2009) de la sécurité au travail et de l’environnement industriel. Les législations successives (des années 1970 aux années 2010) font des industriels les producteurs des données concernant à la fois la sécurité et les impacts potentiels de leurs activités. Ces obligations sont autant de ressources qui permettent aux industriels à la fois de définir les risques, mais aussi les moyens de les prévenir (Vlassopoulo, 2007). Les industriels sont ici juges et parties, sans que la question de l’indépendance des méthodes et données produites ne soient réellement questionnées par les services de l’État. Les inspecteurs chargés des installations classées, qui appartiennent au corps des Mines depuis 1972, considèrent que confier la production des données aux industriels les incite à se mettre aux normes (Bonnaud, 2005). Les dernières décennies ont renforcé le monopole de l’expertise des industriels en allégeant les procédures au nom de la simplification administrative, les lois pour un État au service d'une société de confiance et pour l’accélération et de simplification de l'action publique ont considérablement amoindri les évaluations environnementales au profit d’un impératif de réindustrialisation et de croissance économique (Blatrix, 2016 ; Farinetti, 2018 ; Le Roux, 2021 ).

10Les exploitants produisent donc l’essentiel des connaissances sur les risques liés à leurs productions. Ils parviennent à intégrer certains savoirs ou certaines normes (seuils, limites, procédures d’auto-contrôle), tout en délimitant strictement le cercle des participants et les savoirs légitimes (Boullet, 2012). Aux côtés des services de l’État, ils définissent à la fois le périmètre de « l’environnement industriel », le cercle des acteurs invités à en discuter, les instruments permettant de prévenir les nuisances environnementales, ainsi que ceux susceptibles de permettre l’information et la concertation.

11Le monopole de l’expertise légitime sur les risques, détenu par les industriels grâce aux réglementations, est renforcé par la mise en œuvre de politiques de communication centrées sur la sécurité au sein des entreprises et sur les risques majeurs pour les riverains des ICPE. Ces processus aboutissent à un cadrage de la communication qui porte quasi exclusivement sur la dangerosité des produits, isolés les uns des autres, pour ceux qui les manipulent, ainsi que sur les risques accidentels pour les riverains. Alors que dans de nombreux autres cas de politiques publiques locales, la demande des habitants est fortement instrumentalisée (Anquetin et Freyermuth, 2009), ici elle fait l’objet d’un très important travail de cadrage visant à réduire la question de l’information sur les risques industriels aux seuls risques accidentels (Lascoumes, 1998). Les années 1980 et 1990 sont ainsi lourdes d’ambivalences : à l’invisibilisation des « maladies professionnelles » et des « pollutions chroniques » répond une visibilisation des « risques accidentels ». Paradoxalement, alors qu’ils sont les premières victimes de « maladies industrielles » (Jobin, 2006), les riverain·es et, dans une moindre mesure, les salarié·es ne sont pas considéré·es comme légitimes à participer ni à leur prévention, ni aux enquêtes visant à mieux les identifier.

La construction d’une non-demande sociale : communiquer sur les risques majeurs

12Pour les habitants des usines classées pour l’environnement, la communication (au sens d’information sur les risques) est devenue une obligation légale depuis la loi du 22 juillet 1987 – relative à l'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs. L’exploitant doit assurer la diffusion de brochures comportant les consignes destinées aux populations demeurant dans la zone d’application d’un Plan particulier d’intervention tous les cinq ans (Ferrieux, 2015 et 2017a). Les données et connaissances sont produites et mises à disposition du public par les services communication des groupes industriels, sans que les salariés ne puissent réellement les discuter ou les contester (à l’extérieur des entreprises) et, surtout, sans que les voisins ne puissent en évaluer la pertinence, faute d’expertise indépendante. À Lyon, les campagnes d’information sont prises en charge dès 1990 par le groupe risques du Secrétariat permanent pour la prévention des pollutions industrielles et des risques sur l'agglomération lyonnais (Spiral), dont sont membres les représentants des industriels, des services de l’État, des collectivités territoriales et des associations et personnalités qualifiées (Ferrieux, 2017a). La campagne fait donc l’objet d’une réflexion collégiale et les outils d’information et de communication élaborés sont les mêmes pour toutes les entreprises du sud de Lyon. La communication intitulée « les bons réflexes » est toute entière dédiée aux consignes à respecter en cas d’accident.

13S’ajoutent à cette obligation réglementaire des initiatives prises par les industriels sous la forme notamment de journées portes ouvertes, lesquelles sont le plus souvent l’occasion d’expliquer les procédures de sécurité internes et non pas d’informer des produits utilisés et des accidents éventuels. D’autres initiatives visent à créer des instances de dialogue avec le public comme « Terrains d’entente » porté par la société Arkema ou la « Conférence riveraine » à Feyzin co-financée par la société Total et la municipalité (Suraud, 2013). Ces initiatives sont la suite logique de la forte professionnalisation des industriels sur les questions de communication au public et de leur volonté d’en conserver le contrôle en cadrant les débats (Le Noan, 2015 ; Ottinger, 2013).

14Par conséquent, deux dimensions sont évacuées de la communication en direction des riverains : la première concerne les produits utilisés, les rejets (dans l’eau, l’atmosphère, le sol) et leur éventuelle dangerosité, particulièrement pour les riverains ; la seconde porte sur ce qui est produit au sein de ses usines et l’utilité sociale (ou l’inutilité) des productions. À aucun moment il n’est question de présenter les différents toxiques, leurs effets sur les organismes, les seuils et rejets éventuels dans l’atmosphère, les sols ou l’eau, ou encore les produits finis sortant de l’usine.

  • 5 AD Rhône 3091 W 7, demande d’autorisation atelier de fabrication de fluorure de vynilidine et de F (...)

15Sur ces deux points, la méconnaissance des voisins est totale, voire entretenue. Pourtant, des questions sont régulièrement posées, mais sont le plus souvent ignorées car considérées hors sujet et ne relevant pas de la compétence des habitants. Revenons sur une demande d’autorisation d’extension déposée par l’usine Atochem de Pierre-Bénite, en 1985. La demande concerne l’atelier de fabrication de fluorure de vynilidine et de Forane 42b. Suite à cette demande d’autorisation, la section syndicale CGT de l’entreprise a émis d’importantes réserves relayées par la mairie dans une délibération prise par son Conseil municipal en juin 19855. Cette demande d’autorisation nécessite une enquête publique au cours de laquelle un habitant de Pierre-Bénite souhaite des précisions sur le produit fabriqué :

  • 6 AD Rhône 3091 W 7, Observation habitant de Pierre-Bénite, registre d’enquête, 28 mai 1985.

« Faisant partie des 99,5 % des gens ne connaissant rien aux polyfluorures de vinylidène. Je demande à être informé sur ses qualités et ses défauts. Il n’est pas étonnant que ça n’intéresse personne. Quelle retombée sur l’environnement ? Recevez Monsieur mes salutations empressées »6.

16Un mois plus tard, la direction de l’usine répond très vaguement à ces questions sans préciser ni les retombées environnementales éventuelles, ni les spécificités du produit fabriqué.

17Cette remarque et le peu de réponses qu’elle reçoit sont emblématiques du rôle accordé aux riverains dans les politiques de prévention des risques industriels. Ils sont très tôt et durablement cantonnés à un rôle de destinataires de certaines informations. Les années 1990 voient les politiques publiques s’équiper de dispositifs participatifs, censés permettre la participation des parties prenantes (Blondiaux et Sintomer, 2009). Les risques industriels n’échappent pas à la règle de standardisation par la généralisation du modèle du Spiral (Ferrieux, 2017a), puis en 2005, le Grenelle de l’environnement pose le principe d’une « gouvernance à cinq » comprenant les services de l’État, les industriels, les collectivités territoriales, les salariés et les habitants. Cependant, il faut noter que, très tôt, dès le décret de 1810 sur les établissements insalubres et incommodes, les industriels sont soumis à des demandes d’autorisation donnant lieu à des consultations et à la possibilité pour les habitants propriétaires de déposer des questions ou des remarques sur des registres en mairie. Historiquement, ces demandes pour les ateliers et usines les plus dangereux et les plus polluants sont pensées pour protéger par la suite les industriels des plaintes du voisinage et non l’inverse. Geneviève Massard Guilbaud (2011) et Thomas Le Roux (2011) ont prouvé que ces demandes d’autorisation n’étaient pas pensées pour protéger les riverains, mais pour protéger la liberté d’entreprendre des industriels. Après le traumatisme de l’accident d’AZF à Toulouse en 2001 et le constat d’une très grande proximité entre des sites industriels dangereux, des habitations et des équipements recevant du public, comme par exemple des stades ou des écoles (Bonnaud et Martinais, 2008), l’ambition de la loi dite « Bachelot » de 2003 est d’améliorer la concertation et l’information sur les risques industriels. Les salariés et les riverains sont alors définis comme des participants réguliers de cette politique de gestion des risques industriels. En effet, la loi instaure des comités locaux de concertation (CLIC) autour de chaque ICPE qui réunissent, sous l’égide du préfet, cinq collèges : les industriels, les services de l’État, les collectivités territoriales, les salariés et les habitants. Dans les comités locaux d’information et de concertation du sud de Lyon qui prennent forme en 2006 et deviendront en 2012 des comités de suivi de site (CSS), les informations données émanent des services de l’État et des industriels, les riverains les reçoivent sans pouvoir les contester et lorsque des questions sur les pollutions sont posées, celles-ci sont traitées en indiquant que les seuils de rejet sont respectés. De leur côté, les syndicats de travailleurs et les travailleurs n’expriment que très rarement dans ces instances et ne s’allient pas aux riverains contrairement à ce qui était observable dans les années 1970 (Ferrieux, 2017b). Bien qu’ils soient les premiers concernés par les risques liés aux produits toxiques utilisés sur leurs lieux de travail et membres à part entière de ces instances, leur participation aux politiques de prévention des risques reste strictement cantonnée à l’intérieur de l’usine dans un huis-clos avec l’employeur.

  • 7 Archives privées Jean Metzger, documents CHST, 1986-1989. Entretien J. Metzger, 1er mars 2017.

18Les représentants syndicaux des salariés sont associés à la définition de ces risques dans les Commissions d’hygiène et de sécurité créés en 1947 – devenus Comités d’hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en 1982, refondus dans les Comités sociaux d’entreprises en 2017 – dans les entreprises (Ferrieux, 2017b), et dans plusieurs instances à l’échelle confédérale, comme le Conseil supérieur pour la prévention des risques professionnels fondé en 1976 – devenu en 2008 Conseil d’orientation sur les conditions de Travail. Les comptes-rendus des années 1980 du CHSCT d’Atochem de Pierre-Bénite attestent de l’adoption progressive par les syndicalistes des mêmes outils d’analyse que les industriels (arbres de cause, toxicologie). Si les interprétations peuvent différer et générer des conflits, elles font l’objet de négociations en interne à l’usine7. Ces instances permettent aux salariés, représentés par leurs délégués syndicaux, de discuter des risques et de la sécurité dans l’entreprise. Pour autant, leur participation repose sur une capacité à maîtriser le registre expert en vigueur, au sein des politiques de gestion des risques industriels, à savoir une bonne connaissance des procès de production, de la toxicologie (effets des produits sur la santé humaine et de leurs mélanges notamment s’ils peuvent générer des risques d’explosion ou d’incendie) et des enjeux économiques du secteur. Ce faisant, ils limitent drastiquement le nombre de personnes pouvant être considérées comme aptes à participer et les obligent à valider les outils de prévention disponibles (Henry, 2017 ; Counil et Henry, 2018). Pour les syndicats ouvriers, l’adoption du registre expert implique l’adoption d’un langage commun avec les exploitants conduisant à écarter les solutions les plus radicales, comme l’interdiction des produits les plus cancérogènes ou l’usage du droit de retrait (Bourdieu et Boltanski, 1976 ; Evans et Collins, 2007).

19En dépit des injonctions à la participation et de la création d’instances dédiées, l’action publique est peu ouverte et ne permet pas la participation de tous les acteurs et actrices qui le souhaiteraient. Surtout, elle ne permet ni le dialogue, ni l’expression de désaccords, ni la prise en compte des demandes d’informations sur les risques chroniques. Ces politiques publiques restent néo-corporatistes au sens où les intérêts de l’État et des industriels pèsent fortement sur les débats, notamment lors de périodes de crise économique (Bonnaud, Martinais, 2010).

Co-construire les recherches et développer les savoirs alternatifs appropriables

  • 8 Loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la rép (...)

20Jusque dans les années 2010, aucun des protagonistes ne s’interroge sur ce que les habitants souhaitent ou non savoir. Les informations qui leur sont adressées ne sont pas celles qu’ils seraient désireux d’obtenir. Au sein de l’administration et particulièrement après la catastrophe AZF et la mise en œuvre des CLIC prévue par la loi « Bachelot » de 20038, des interrogations émergent sur le faible intérêt manifesté par les riverains et leurs représentants pour l’information sur les risques accidentels. Elles débouchent sur la commande, par la Direction régionale de l’environnement, de l’agriculture et du logement en Rhône-Alpes (Dreal), d’une étude de sciences sociales associant une sociologue du politique, un géographe et une spécialiste des sciences de l’information et la communication (Goepfert, Martinais et Le Naour, 2012). L’enquête et le rapport qui en découle mettent en évidence des demandes habitantes hétérogènes dont la majorité s’interroge sur les risques chroniques et les effets sur la santé d’une exposition répétée à des substances toxiques rejetées par les industries. Les habitants interrogés sont ceux qui vivent à proximité d’usines classées ICPE, ils souhaitent aussi disposer de plus d’informations sur ce que produisent ces usines qui apparaissent comme des entreprises dont ils ne savent finalement pas grand-chose. Si les doutes sur les effets sanitaires – potentiels ou avérés – des pollutions industrielles ne donnent pas lieu à des mobilisations fortes visant à produire de nouvelles données jusqu’en 2022, les riverains interrogés en entretien connaissent les risques et aimeraient en savoir davantage, sans pour autant entreprendre ou demander de plus amples investigations. Pour les riverains, l’information a un coût puisqu’il faut aller à la recherche d’informations éparses produites par différentes institutions, mais elle comporte aussi des risques : ceux de prendre conscience que les usines côtoyées quotidiennement produisent des dangers plus grands que ceux évoqués dans les brochures sur les risques accidentels et qu’il faudrait mieux changer de travail ou déménager alors que tous les salariés ou tous les riverains n’en ont ni les moyens, ni l’envie (Gramaglia, 2023). Les risques accidentels ne font pas l’objet de demande d’information, les riverains les plus proches des usines pensent qu’en cas d’accident grave, les consignes seront peu utiles car s’ils sont présents à leur domicile, ils seront gravement ou létalement affectés et ne pourront rien y faire.

21Dix ans après cette enquête, un reportage diffusé dans Envoyé spécial le 12 mai 2022 (France 2) révèle une vaste contamination à des substances toxiques autour de l’usine Arkema à Pierre-Bénite9 qui mobilise ou remobilise les riverains et salariés de l’usine. Des velléités de savoir réapparaissent chez les habitants de cette zone à risques, le contrat économique et moral entre habitants, travailleurs et industriels est rompu par l’ampleur de la contamination ainsi que le silence de l’industrie. Les mobilisations suivant cette médiatisation mettent en évidence, un défaut de connaissances sur les effets des pollutions industrielles sur la santé, une absence de capacité des services de l’État à communiquer et produire des recommandations suite à cette révélation, ainsi qu’une stratégie de l’industriel de s’exposer le moins possible et s’abriter derrière la règlementation et son respect plutôt qu’à s’engager dans un dialogue avec les autres parties prenantes. Face à une telle situation, les expertises des disciplines des sciences de la société sont peu sollicitées. Classiquement, les services de l’État se tournent vers l’entreprise pour qu’elle produise des données sur ces rejets dont témoignent les rapports mis en ligne sur le site de la Dreal depuis mai 202210. Parallèlement, les agences de santé et les collectivités territoriales s’orientent vers la toxicologie règlementaire et l’épidémiologie pour produire de nouvelles connaissances sur la dangerosité des substances et sur leurs effets sur la santé. La toxicologie règlementaire (Demortain, 2015 ; Dedieu, Jouzel, 2015) produit des valeurs limites établies sur la base de tests in vivo, réalisés en laboratoire sur des animaux. Elles fixent des seuils au-dessus desquels les expositions deviennent dangereuses pour l’homme et permettent de prévoir des mesures de protection, tels les équipements personnels de protection pour les salariés, les relevés de pollution permettant de donner des consignes (rester chez soi ou réduire la vitesse automobile en cas de fortes pollutions). Les limites de cette discipline sont désormais largement connues et documentées, comme les incertitudes de l’extrapolation des résultats de l’animal à l’homme, ou la non prise en compte du cumul d’exposition à des produits toxiques à faibles doses sur le temps long, qui caractérisent pourtant le quotidien de celles et ceux qui respirent un air pollué par plusieurs sources (Jouzel et Prête, 2017). De son côté, l’épidémiologie conventionnelle :

« est définie aujourd’hui comme l’étude des facteurs qui influent sur la santé des populations, s’appuyant sur la détermination et l’analyse de la répartition, de la fréquence et de la gravité d’une maladie parmi les groupes d’individus. Si ses approches sont variées, allant de l’intervention sur le terrain à la modélisation mathématique sophistiquée, toutes mobilisent les statistiques comme outil central » (Bergeron et Boudia, 2015).

22Si l’on souhaite l’appliquer à un bassin industriel, sa méthodologie nécessite notamment de pouvoir comparer les populations des territoires industriels à des populations non exposées, ce qui est complexe dans un monde durablement contaminé (Counil, 2023).

23Paradoxalement, les habitants ne sont pas les premiers à demander les données épidémiologiques, les collectivités territoriales en réclament aussi, notamment la Métropole de Lyon qui finance l'Institut Écocitoyen pour la connaissance des pollutions pour préparer une étude sur les effets de l’exposition aux PFAS sur la santé humaine et l’environnement. Ils ne demandent pas non plus de connaissances toxicologiques nouvelles, considérant que celles déjà disponibles, aux États-Unis, aux Pays-Bas, en Italie et en Belgique, sont suffisantes et prouvent la nocivité des per et polyfluorés. Les habitants et les salariés demandent des analyses biologiques pour connaître leur niveau d’imprégnation, un arrêt des pollutions et des recommandations précises pour réduire leurs expositions. L’argument de la preuve qui leur est opposé, et selon lequel il faudrait prouver la dangerosité des produits avant d’agir, ne les convainc pas. La comparaison avec l’amiante, et le fait qu’il ait fallu attendre des années ainsi que de nombreux décès avant de l’interdire, est fréquemment avancée pour demander des mesures de précaution et de prévention. Pourtant, les autorités régulatrices continuent de demander des « données statistiques probantes » pour décider, y compris dans les politiques de santé. Que peuvent les sciences de la société face à ce type de problème public qui se caractérise par une relative absence de connaissances préalables, une importante médiatisation, une forte demande sociale et une dilution des responsabilités ?

24Les chercheurs et praticiens confrontés à de fortes mobilisations de groupes aux intérêts multiples en capacité de faire pression sur les pouvoirs publics, sont souvent très démunis pour apporter des réponses aux demandes de savoir comment agir pour réduire les risques. Les réponses sous forme d’éléments de langage, de communiqué de presse ou de communication descendante sont généralement contre-productives face à des groupes organisés ou des citoyens très informés. Il en est de même des réponses affichant des certitudes scientifiques dans des contextes incertains et qui ne sont pas audibles par les groupes et individus concernés. Je pense notamment aux communications institutionnelles ayant tendance à minorer les risques alors qu’aucune connaissance n’est disponible ou qu’au contraire celles disponibles sont très inquiétantes. Lorsque les connaissances scientifiques sont incomplètes sur un sujet, la communication publique ne peut pas être identique à des enjeux où des connaissances robustes sont disponibles. L’enjeu n’est plus alors la communication ou la pédagogie, mais les moyens pour produire des savoirs qui permettent de restaurer la confiance des groupes organisés, des citoyens informés et des personnes plus éloignées de la participation, mais concernées pour leur santé.

Conclusion

25Le développement de « savoirs prudents » que Gwen Ottinger (2023 : 200) définit comme « des pratiques d'investigation empirique et d'élaboration de sens répondant aux besoins des participants marginalisés qui pourtant disposent de connaissances sur les pollutions » apparaît comme l’une des issues possibles. Le périmètre des savoirs prudents peut être élargi pour qualifier la production de savoirs originaux et utiles aux premiers concernés, habitants et travailleurs. Pour produire de tels savoirs, les recherches doivent être co-construites et tenir compte des demandes exprimées par les personnes exposées aux pollutions sans imposer des solutions ou protocoles pré-établis. Il s’agit par ce biais de lutter contre les inégalités sociales de santé, de restaurer un dialogue et peut-être une confiance, entre les populations exposées et les autorités chargées de leur régulation. Dans un tel contexte, les recherches qualitatives (sociologiques, politiques, historiques et géographiques entre autres) sont en première ligne pour réfléchir avec les habitants et travailleurs aux données disponibles, aux leviers activables et à la production de nouvelles formes de connaissances que les premiers concernés peuvent trouver utiles et justes. Plus que les sciences de la société, c’est un ensemble de disciplines qui sont invitées à remettre sur le métier leurs épistémologies – dont l’épidémiologie et la toxicologie citées précédemment – non pas pour produire de l’acceptabilité sociale des pollutions et des usines, mais pour réduire les expositions et les inégalités environnementales ; ce qui implique de prendre au sérieux les demandes des personnes les plus exposées.

  • 11 La commune de Saint-Fons connaît en 2020 un taux de pauvreté de 31 % et un taux de chômage de 21,9 (...)

26Un autre écueil s’ajoute à ces défis épistémologiques, celui de pouvoir prendre en compte les demandes des populations plus précaires qui participent peu aux mobilisations sociales contre les pollutions. Les territoires de Saint-Fons et Pierre Bénite sont en effet marqués par des inégalités sociales et des formes de pauvreté importantes11. Les populations très exposées, qui habitent les quartiers d’habitat social les plus proches des usines, ne sont pas les plus mobilisées ce qui pose des questions de justice environnementale et de justice sociale. Le fait de ne pas se mobiliser ne peut être considéré comme équivalent à une acceptation des risques et pollutions. Souvent, ce silence est avant tout le signe d’une absence de possibilité de choisir son lieu de vie et son lieu de travail, ainsi que l’absence d’espace adapté pour exprimer ses craintes et ses besoins.

27Comme l’écrit C. Ollivier-Yanniv « le discours de l’« acceptabilité sociale » est significatif de la place accordée aux sciences de la société, souvent désignées sous la formule globalisante de « sciences humaines et sociales » auxquelles on assigne une fonction instrumentale d’aide à la décision et à la production de l’ « acceptabilité sociale des décisions » (Ollivier-Yaniv, 2023 : 3). Les sciences de la société doivent rester des sciences critiques et réflexives, elles ne peuvent être réduites à l’aide à la décision ou aux changements des comportements individuels à laquelle les cantonnent souvent les autres disciplines et experts administratifs. Leur mission est de contribuer à lutter contre les injustices et inégalités sociales et environnementales et de faire de la protection de la santé une priorité politique face à la croissance des maladies non transmissibles et des expositions toxiques (Cicolella, 2013).

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Notes

1 Je pense en particulier au Groupement d’intérêt scientifique « Risques collectifs et situations de crise » piloté par Claude Gilbert (2008).

2 Association nationale des communes pour la maitrise des risques technologiques majeurs (Amaris), 2023, 2003-2023. « Après vingt ans de PPRT, l’État ne peut pas s’arrêter là », consultable sur : https://www.amaris-villes.org/wp-content/uploads/2023/09/AMARIS-Bilan-PPRT.pdf.

3 Cette affirmation provient de données issues d'entretiens et d'observations dans le cadre d'une enquête en cours.

4 L’action publique s’organise autour d’un échange entre groupes d’intérêt représentant les industriels de la chimie et de la pétrochimie ainsi que les services de l’État, ceci dans un dialogue le plus souvent discret qui échappe au contrôle des citoyens.

5 AD Rhône 3091 W 7, demande d’autorisation atelier de fabrication de fluorure de vynilidine et de Forane 42b, délibération du Conseil Municipal de Pierre-Bénite, juin 1985.

6 AD Rhône 3091 W 7, Observation habitant de Pierre-Bénite, registre d’enquête, 28 mai 1985.

7 Archives privées Jean Metzger, documents CHST, 1986-1989. Entretien J. Metzger, 1er mars 2017.

8 Loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.

9 L’usine de Pierre-Bénite est initialement une usine de production d'acide sulfurique, implantée en 1902 à Pierre Bénite. Elle se spécialise dans la production de gazs et résines fluorés dans les années 1950. Successivement appelée La Volta puis Société d'électrochimie et d'électrométallurgie et des aciéries électriques d'Ugine, (Secemeaeu), elle devient propriété du groupe Ugine Kuhlmann (UK) en 1967, puis deviendra Produits chimiques Ugine Kuhlmann (PCUK) en 1972, filiale du groupe international Péchiney Ugine Kuhlmann (PUK). Elle devient Atochem en 1983, puis Elf Atochem en 1992, puis Atofina, filiale de Total-Fina-Elf en 1999, enfin, Arkema Pierre-Bénite en 2004.

10 Accès : https://www.auvergne-rhone-alpes.developpement-durable.gouv.fr/focus-sur-la-situation-au-sud-de-lyon-a23562.html

11 La commune de Saint-Fons connaît en 2020 un taux de pauvreté de 31 % et un taux de chômage de 21,9 %, celle de Pierre-Bénite affiche un taux de pauvreté de 20 % et un taux de chômage de 14,5 %. À l’échelle nationale pour l’année 2020, le taux de pauvreté est de 18,7 % et le taux de chômage de 8 % (INSEE).

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Pour citer cet article

Référence papier

Gwenola Le Naour, « Développer de nouveaux savoirs pour en finir avec « l’acceptabilité sociale » des risques industriels »Questions de communication, 45 | -1, 173-190.

Référence électronique

Gwenola Le Naour, « Développer de nouveaux savoirs pour en finir avec « l’acceptabilité sociale » des risques industriels »Questions de communication [En ligne], 45 | 2024, mis en ligne le 07 octobre 2024, consulté le 19 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/questionsdecommunication/35240 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11wxa

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Auteur

Gwenola Le Naour

Sciences Po Lyon, Triangle, F-69007, Lyon, France

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