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Dossier. Journalisme cuturel en mutation : quelles pratiques éditoriales ?

Écrire la culture : histoire et perspectives du journalisme culturel

Writing Culture: History and Prospects of Cultural Journalism
Lucie Alexis et Flore Di Sciullo
p. 7-28

Résumés

Résumé : Critique culturelle, prescription, recommandation, guide, promotion, intermédiation, etc., le journalisme culturel charrie dans son sillage un grand nombre de notions, certes semblables, mais qui impliquent des approches et des usages différenciés. Reste alors à les identifier, les répertorier, les analyser. Il s'agit d'examiner spécifiquement les pratiques éditoriales de ce type de journalisme, dans les entreprises médiatiques et les institutions culturelles. Où se situe sa spécificité, d’un point de vue discursif, sémantique, morphologique ? Dans un contexte de transition numérique et de facilitation des prises de parole amateures, comment s’assume et se transforme la critique culturelle ? L’engagement et l’implication du critique dans les arènes publiques constituent-ils un vecteur de pérennisation de son utilité en tant que prescripteur ? C’est à ces quelques questions que ce dossier, comme le texte qui l’introduit, tente de répondre, dans une perspective interdisciplinaire et transnationale, en identifiant plusieurs axes de réflexion : les effets de légitimation du journalisme culturel pour des « niches » dans les productions culturelles, les rapprochements voire les collusions entre journalisme culturel et productions institutionnelles, enfin la politisation du journalisme culturel et son entrelacement avec la médiatisation de conflits internationaux.

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Texte intégral

1Dans un contexte où la culture est particulièrement publicisée et à l’heure de la critique profane et des algorithmes de recommandation, a-t-on encore besoin de médias culturels ? À l’inverse, dans un monde où l’on parle plus que jamais d’abondance informationnelle et de profusion de contenus, il semblerait que la critique culturelle ait encore toute sa place. Quelle est sa spécificité aujourd’hui ? Quelles sont les pratiques éditoriales participant d’une légitimation de ses discours ? Plus globalement, comment écrire (au sens large) la culture ?

2Les médias culturels se caractérisent par une diversité de formats (magazine, revue, pureplayer, newsletter, émission de télévision et de radio, etc.) au sein desquels sont déployés des sujets variés ayant des finalités de publication pouvant aller de la recommandation d’événements à une analyse des tendances de l’actualité culturelle, en passant par les comptes rendus. Ce dossier thématique traite des pratiques éditoriales dans les entreprises médiatiques et les institutions culturelles. Il y est donc question des mécanismes qui confèrent à la critique une identité spécifique qui ne peut désormais plus être définie à partir des seules vocations de jugement de goût et de prescription. Cet aspect de la pratique journalistique permet de fertiles dialogues entre les disciplines. C'est pourquoi ce dossier porte sur les formes d’écriture de la culture. Dans le sillage d’études sur la spécificité et les reconfigurations du journalisme culturel – il faut rappeler l’importance du dossier thématique de la revue Quaderni. Communication, technologie, pouvoir (Paris, 1987 en cours) en 2006 « La critique culturelle, positionnement journalistique ou intellectuel ? » – et tentant de replacer la réflexion sur le journalisme culturel dans le contexte contemporain, l’accent est moins sur la critique ou la prescription que sur le journalisme comme pratique à la fois discursive et professionnelle, ainsi que sur les usages qui sont faits du journalisme culturel : la circulation de la critique culturelle, de ses normes et de ses valeurs dans l’espace public, les interrelations entre les sphères politiques, marchandes, institutionnelles.

3Dès lors, avant de présenter chacune des contributions, cette introduction suivra quatre dynamiques qui se veulent un retour sur la genèse de la critique culturelle, un état de l’art des travaux sur les pratiques professionnelles associées à l’activité de critique, un éclairage sur les jeux d’interstices entre différentes sphères socio-politiques traversant ce journalisme. Viendra en premier lieu une exploration des origines de la critique culturelle en mettant en lumière quelques moments historiques clés. Ensuite, sera examinée la manière dont le modèle traditionnel de la critique culturelle est remis en question, perdant peu à peu son statut de référence incontestée. Les différents statuts et compétences des professionnels du journalisme culturel seront aussi étudiés, soulignant la diversité des approches et des expertises. Enfin, l’analyse portera sur la possibilité d’un journalisme qui navigue entre le domaine culturel, le secteur marchand et les territoires du politique, et s’intéressera aux interactions complexes qui s’y produisent.

Genèse de la critique culturelle et inscription progressive dans le paysage médiatique

4Dans un premier temps, cet article introductif entend établir les repères historiques de la critique culturelle, afin d’en saisir les origines et de comprendre comment elle s’inscrit dans le cadre particulier de l’activité journalistique au cours du temps.

  • 1 Citation originale : « These intellectuals were characterized by their willingness to use their cr (...)

5Dès le xviie siècle, une forme nouvelle s’installe et consiste à exercer un jugement sur les productions artistiques et littéraires. En effet, c’est en 1660 que paraît Le Pour et le contre (Londres, 1733-1740) de l’Abbé Antoine François Prévost, qu’il décrit comme un « ouvrage périodique d’un goût nouveau, dans lequel on s’explique librement sur tout ce qui peut intéresser la curiosité du public en matière de sciences, d’arts, de livres, d’auteurs, etc., sans prendre aucun parti, sans offenser personne » (cité par Sgard, dans Roux, 1994 : 18). Ce format éditorial se développe lentement pour s’imposer comme un genre distinct au xviiie avec Denis Diderot (1765 et 1767), qui en fait un exercice de commentaire subjectif d’œuvres qu’il découvre dans les Salons de l’Académie. La critique est alors un exercice littéraire et esthétique. Il s’agit de sélectionner certaines œuvres parmi la masse de celles observées et de les évaluer. À ce propos, Marion Zilio (2019) observe que la critique culturelle, dans la forme connue encore aujourd’hui, s’est développée en même temps que l’esprit philosophique, tel que formulé par Emmanuel Kant (1724-1804), et l’esprit des Lumières, où elle relève de l’autonomie du jugement de chacun. Au même moment, la notion de culture prend un sens nouveau et devient synonyme d’agent de valorisation et de mobilité sociale (Nguyên-Duy, 2001). La formulation du jugement de goût est donc indissociable de l’érudition ; d’où le fait que la figure du critique corresponde un temps à celle de l’intellectuel. D’ailleurs, Daniel Siedell (2002 : 20) place la critique culturelle au xixe siècle dans une filiation directe avec les intellectuels publics : « [C]es intellectuels étaient caractérisés par leur détermination à user de leurs outils critiques pour faire se recouper une grande variété de questions politiques, sociales, culturelles, et le plus souvent (bien que non exclusivement) une critique gauchiste du pouvoir institutionnel1 ». Il est rejoint dans ce constat par Rémy Rieffel (2006), considérant le positionnement intellectuel comme un critère de « distinction », au sens bourdieusien du terme, pour les journalistes qui peuvent ainsi affirmer d’un seul geste leur domaine de spécialité, leur connaissance d’un secteur particulier et leur positionnement politique. Dans son premier siècle d’existence, la critique culturelle diffusée dans la presse est donc le plus souvent une réflexion essentiellement esthétique, produite par un homme de lettres, et s’adressant à un public initié (Nguyen-Duy et Cotte, dans Rieffel et Watine, 2002).

6Le jugement de goût se pare progressivement d’une légitimité, d’une autorité discursive. Cette posture se confirme et prend de l’ampleur à mesure que la presse se développe. En effet, c’est avec la presse que la critique culturelle se diversifie et les pages culture jouent à ce titre un rôle central :

« Sous le joug des différents régimes jusqu’à la multiplication des feuilles partisanes durant la période révolutionnaire, la presse écrite n’a connu ses premiers espaces de liberté qu’à travers les rubriques littéraires ou théâtrales du xviie et xviiie siècles. La critique culturelle constitue ainsi en France l’un des premiers genres journalistiques et du même coup le foyer d’une revendication d’indépendance » (Croissant et al, 2015 : 6).

  • 2 L’étude porte sur la France, l’Allemagne, les Pays-Bas et les États-Unis.
  • 3 Citation originale : « By increasing the amount of calendar information and supplying brief inform (...)

7Ainsi que le note William Spano (2011 : 166), à partir de l’entre-deux-guerres, la dimension marchande de la culture s’accompagne dans la presse de modes de traitement spécifiques pour la culture, comme en témoigne l’essor des rubriques « échos » : « [L]es rubriques consacrées aux parutions de disques, livres ou autres, ainsi que les entretiens menés avec des personnalités marquantes de l’actualité culturelle, incarnent notamment les réponses apportées par la presse au développement d’une consommation culturelle de masse ». Ce mouvement s’accentue encore dans les années 1970, avec une industrialisation de la culture qui implique une conception davantage marchande des industries culturelles et créatives, institutionnalisées par les médias de masse qui apportent à la culture un lieu de diffusion, de valorisation et de légitimation. Si, initialement, la critique concerne surtout une culture artistique et littéraire, elle englobe de plus en plus d’objets : le cinéma, la musique, « de même que les nombreuses et parfois surprenantes manifestations d’une culture populaire qui était jusqu’alors boudée » (Nguyen-Duy et Cotte, dans Rieffel et Watine : 282). Cette industrialisation est aidée du développement des médias de masse et des news magazine en particulier, qui se dotent de pages culture (Lafosse et Rieffel, 2002 : 291-314). Plus récemment encore, c’est dans ces magazines que les formats de journalisme culturel évoluent et peuvent aussi prendre la forme de conseils, de listes, etc. C’est ce que constate Rémy Rieffel (2022 : 203) en traitant la période 1989-2019 en France : « Le genre “critique” dans son acception classique (jugements argumentés et souvent érudits) est en régression au profit d’avant-papiers, de portraits, de reportages ». Il est rejoint sur ce point par Marc Verboord et Susan Janssen (dans Kristensen et From, 2017 : 244-245), qui tirent toutefois une conclusion positive d’un comptage mené sur la période 1955-2004 dans plusieurs pays2 : « [E]n augmentant le nombre d’informations sur le calendrier culturel et en fournissant des informations brèves concernant un large nombre de produits culturels, les journaux ont aussi répondu aux besoins de nombreux lecteurs d’être tenu au courant des événements dans le domaine des arts et de la culture 3».

8L’histoire de la critique culturelle peut donc brièvement se résumer au passage d’une critique des Beaux-Arts s’adressant aux élites pour se transformer et aboutir à un journalisme qui traiterait de l’ensemble des productions culturelles en s’adressant au grand public. C’est aussi le statut de celles et de ceux qui prennent en charge la critique culturelle qui évolue. En effet, Matthieu Béra (2006 : 87-88) observe que « [p]eu de critiques d’art se saisissent de leur activité comme d’une ressource à partir de laquelle construire un positionnement intellectuel ». Il identifie alors différentes « trappes », différents pièges dans lesquels beaucoup de journalistes culturels tombent malgré eux et en raison desquels un positionnement intellectuel serait désormais difficile à maintenir : la « trappe esthétique » – soit une dépolitisation du discours critique qui se cantonnerait alors à des questions formelles – ; la « trappe magazine » – la critique se rapprocherait alors du marketing éditorial –, la « trappe didactique » où le journaliste se fait passeur de savoir sans prendre position, et la « trappe journalistique » qui répond à un impératif de neutralisation de la subjectivité. Si le positionnement intellectuel était au départ consubstantiel du journalisme culturel, il n’est désormais plus qu’une option parmi d’autres, voire une posture antagoniste à celle du journaliste. Ainsi Jean Serroy (cité par Roux, 1995 : 114-115) oppose-t-il « critique journalistique » et « critique universitaire », l’une étant « doublement liée au temps présent : par l’exigence d’actualité qu’elle implique d’une part, mais aussi par le délai impératif de publication qu’elle impose », l’autre « port[ant] sur des œuvres qui s’inscrivent dans l’histoire » qui en rend compte par l’inscription « dans une critique, un imaginaire, une écriture, qui déborde le cadre de la seule publication ». On retrouve cette dichotomie dans les analyses d’Olivier Alexandre (2016 : 270) sur la critique de cinéma, en particulier celle des Cahiers du cinéma : « Un premier ensemble de travaux se consacre à ses formes savantes, tandis qu’un second à ses expressions populaires ». La trajectoire du journalisme culturel peut donc se résumer comme un double mouvement de diversification (des sujets qu’il traite, des formes qu’il peut prendre : écrite, audiovisuelle, numérique, etc.), mais aussi celui d’un certain affaiblissement : raréfaction dans les médias généralistes, remise en question du poids de la prescription, mise en concurrence avec d’autres acteurs comme le manager (Chiapello, 1998), l’attaché de presse (Naulin, 2010) ou encore l’influenceur (Appiotti, Coquelin et Malet, 2023), et d’autres modes de recommandation, à commencer par les algorithmes comme ceux des plateformes audiovisuelles (Vayre, 2017 ; Paquienséguy, 2017 ; Poiroux, 2022). Face à ces injonctions (numérisation, diversification, etc.), quelles sont les caractéristiques du journalisme culturel, si tant est qu’il y en ait ? Comment les médias envisagent-ils l’évolution de leur ligne éditoriale face aux défis que constituent, entre autres facteurs, le vieillissement du lectorat et la baisse des ventes de médias imprimées ?

Déplacements d’un modèle éditorial « consacré et consacrant »

9« Autopromo et silence radio : “à partir du moment où tu racontes ta vie avec un storytelling d’enfer, tu n’as plus besoin de journaliste” » (Mang, 2023) ; « Influenceurs et célébrités sont de meilleures sources d’information que les journalistes aux yeux des jeunes » (Anonyme, 2023) ; « Le critique culturel est mort, vive la smart curation » (Martel, 2015) ; « The Death of Criticism or Everyone Is a Critic » (Kaiser, 2011 cité par Kristensen et From, 2017: 296). Ces quelques articles publiés dans des médias d’information généralistes, bien que peu nuancés, recoupent des constats similaires : les transformations profondes de la culture et son organisation socio-économique, mais aussi ce qui est nommé communément sa « plateformisation » et la numérisation progressive de ses usages en tête, ont des conséquences directes sur ses procédés de valorisation. En d’autres termes : les réseaux socio-numériques prendraient la place des journalistes et la critique culturelle n’aurait plus vraiment lieu d’être. Elle serait alors supplantée par d’autres modes de recommandation et une diversification des figures du prescripteur culturel, ces procédés induiraient par là une transformation des modalités d’accès aux biens culturels.

10Plusieurs éléments sont à souligner pour expliquer les mutations du journalisme culturel et les différents facteurs de sa mise en concurrence avec d’autres formes de recommandations. C’est d’abord l’hyper-choix et l’atomisation de l’offre culturelle (Chapelain et Ducas, 2018 : 10), induite en grande partie par l’émergence des « plateformes numériques » dans les domaines des industries culturelles (Bullich et Schmitt, 2019 ; Barbier et Severo, 2021 ; Thuillas et Wiard, 2023). C’est aussi la montée en puissance de la prescription amateure qui instituent de nouvelles figures d’autorité (Pasquier, 2014 ; Bonaccorsi et Croissant, 2017) et s’inscrit dans un « paradigme participatif » (Candel [2007] cité par Croissant et Bonaccorsi, 2017 : 68), où l’on passerait d’un modèle « consacrant et vertical » à un modèle basé sur le partage et la valorisation collective (Chapelain et Ducas, 2018 : 14). Par ailleurs, il est question d’une subjectivité plus marquée permise par le déplacement vers les espaces numériques : « [À] la différence de la critique d’art papier, dont la légitimité s’appuie sur le support de publication où elle est insérée, le processus d’autoédition implique une construction personnelle beaucoup plus marquée de l’autorité critique » (Rialland, 2014 : 120). Les pratiques discursives engagées sur Internet déplacent les lieux de prise de parole et « sont envisagées comme des espaces de reterritorialisation, de recomposition entre les acteurs » (Juanals et Minel, 2020 : 115). Dès lors qu’on l’englobe sous ses formes papier et numérique, amateure et professionnelle, la critique culturelle implique donc des jeux d’allers-retours entre différentes formes de construction de l’auctorialité et différentes modalités de légitimation, de valorisation des productions culturelles, ainsi que des institutions qui les produisent et les diffusent. Enfin, s’observent la diversification non seulement de celles et ceux qui prennent en charge l’activité de critique culturelle, mais aussi l’hybridation de ses formats médiatiques. À la subsistance de certains genres consacrés qui persistent comme l’entretien (Dupeyrat et Harel-Vivier, 2013) ou le compte rendu d’exposition (Deflaux, 2010 ; Glicenstein, 2010 ; Poli, 2010), s’ajoutent des déclinaisons sur les médias numériques comme les chaînes YouTube, les émissions de streaming sur Twitch ou encore les productions sonores sous la forme de podcasts natifs.

  • 4 Citation originale : « Current and interconnected processes of commercialisation, professionalizat (...)

11Si des mutations sont indéniablement à l’œuvre, le journalisme culturel persiste et reste un pilier tant des pratiques journalistiques que des modes d’accès à la culture. De fait, Rémy Rieffel (2022 : 270) montre que si la presse écrite semble avoir en partie perdu de son pouvoir de prescription, plusieurs titres, en France, demeurent influents dans les secteurs de la pensée et de la création. De même, Nette Kristensen et Ummi From (2017 : 33-34) soulignent que ces mutations ont aussi un effet dynamisant : « Des processus actuels et interconnectés de commercialisation, de professionnalisation, de numérisation et de mondialisation ont élargi et revitalisé le rôle du journalisme culturel dans la société4 ». Nombre de titres de presse culturelle poursuivent leur publication malgré des tirages réduits et l’on trouve toujours des titres de référence, tant généralistes que dédiées à des secteurs et sous-secteurs spécifiques. Le seul exemple des arts visuels permet de le constater. En effet, en plus des magazines généralistes (art press, [Paris, 1972 en cours], Beaux-arts magazine [Paris, 1983 en cours], L’Œil [Paris, 1955 en cours], L’Hebdo du quotidien de l’art [Paris, 2011 en cours]), on compte un certain nombre de publications tournées vers des sous-domaines de l’art contemporain : Profane (Paris, 2015 en cours) pour les pratiques amateurs, Roven (Paris, 2009 en cours) pour le dessin, L’Incroyable (Paris, 2015 en cours) pour la jeunesse des artistes, Billebaude (Paris, 2012 en cours) pour l’animalité et la nature, ce à quoi s’ajoutent des parutions numériques : médias en lignes (Point contemporain), blogs et plateformes (Le Beau vice, Jeunes critiques d’art), podcasts (« L’esprit critique » sur Médiapart, « Ça a commencé comme ça » sur Binge Audio/collection Pinault, etc.). Et l’on pourrait décliner la démonstration pour bien d’autres domaines culturels.

12Le journalisme culturel évolue donc, quant à savoir si ces mutations sont à chercher du côté des médias ou de la culture, la réponse semble plutôt se situer au sein des pratiques professionnelles et usages des biens culturels et médiatiques.

Profession reporter culturel : différents statuts, différentes compétences

13Au cœur de la spécialité du journalisme culturel se déploient une multitude de compétences propres à chaque professionnel, déterminant leur statut et leurs fonctions au sein de ce domaine et intimement liées à la spécificité de la matière traitée. De fait, la profession de journaliste culturel engage des pratiques hybrides, impliquant d’autres types d’acteurs.

14La tentative de définition du journalisme culturel conduit d’emblée à une impasse tautologique : il s’agit de journalisme… qui traite de culture. À cette tautologie succède rapidement une lapalissade pourtant nécessaire : « [U]n critique est un journaliste, mais c’est un journaliste particulier » (Frodon, 2008 : 16). Cette observation de celui qui fut rédacteur en chef des Cahiers du cinéma de 2003 à 2009 (Paris, 1951 en cours) vaut certes pour la critique cinématographique, mais aussi pour l’ensemble du journalisme culturel. Reste alors à cerner ce en quoi consiste cette particularité. Il s’agirait d’une plus grande liberté éditoriale, où l’écriture serait « moins normée » que pour les rubriques politiques ou judiciaires (Marchetti, 2001 : 33). Pour William Spano (2011 : 180), c’est la coexistence, dans un texte journalistique, d’une fonction critique et d’une fonction politique. Pour Nathalie Heinich (2017 : 51), le critique culturel se distingue en ce qu’il faut que ses opinions puissent apparaître aux yeux des lecteurs comme à la fois justes et motivées ; la spécialité et le professionnalisme du critique réside donc en grande partie dans sa capacité à « respecter des régulations, essentielles et non dites ». Les différentes manières de formuler les compétences du journaliste culturel et ce qui viendrait le distinguer – de l’amateur d’une part, des autres spécialités journalistiques d’autre part – recoupe plusieurs domaines de compétences distincts. Tenter d’appréhender en quoi le journaliste culturel est un journaliste particulier implique donc de détailler l’entrelacement de différentes compétences (l’expertise, la prescription, la légitimation) et de différents statuts (précaire, intermédiaire, gatekeeper). Par conséquent, envisager la spécialité culturelle implique un regard interdisciplinaire, qui concerne à la fois une étude socio-économique de la place de leurs jugements dans l’écosystème des industries culturelles, l’analyse du discours critique, ainsi qu’une étude sociologique du statut des journalistes culturels et de leur positionnement.

Précarité et expertise

15Rares sont les journalistes culturels qui bénéficient d’un poste stable au sein d’une rédaction. Pour nombre d’entre eux, l’activité critique implique soit la rédaction pour plusieurs titres simultanés, soit l’adjonction de l’activité critique à une autre (artistique ou universitaire). Le bénéfice qu’ils tirent de leur activité est donc principalement d’ordre symbolique et permet de faire accepter la précarité. C’est l’un des résultats mis en avant par Pierre-Michel Menger (2009 : 11) qui constate que le travail artistique est « modelé par l’incertitude », qui permet l’originalité et l’innovation, la satisfaction que prennent les artistes à créer. Au regard de cette étude, il semble que l’incertitude et la gratification symbolique sont des traits structurants. C’est justement l’un des principaux résultats de l’enquête sociologique menée par Pierre François et Valérie Chartrain (2009) qui soulignent deux principales caractéristiques de la profession critique : une « incertitude économique » souvent appréhendée en amont et un nécessaire recours à une diversification des activités complémentaires. Enfin, il faut remarquer que la spécialité professionnelle du journaliste culturel est aussi celle d’un tiraillement, entre le journalisme et la culture, deux secteurs dans lesquels ils sont subordonnés, se retrouvant « doublement dominés » pour reprendre les termes de Jan Fredrik Hovden et Karl Knapskog (cité par Kristensen et From, 2017 : 161-162). Souvent porté par des jeunes critiques désireux de passer du statut de passionné à celui d’expert, d’amateur à professionnel, le journalisme culturel est une profession parfois sacrificielle, où à la précarité s’ajoutent encore une très forte compétitivité, une légitimité difficile à acquérir et surtout à imposer face à celle des journalistes des hard news (politique, international, etc.).

Prescription et intermédiation

  • 5 Citation originale : « professional tastemakers and authorities legitimation » (notre traduction).

16Une large part de l’activité critique peut se résumer à celle de la prescription : ainsi les journalistes culturels sont-ils définis comme « agent[s] culturel[s] socialement reconnu[s] et légitime[s] (au sens bourdieusien du terme), qui exerce[nt] l’influence, l’expertise et l’autorité – souvent injonctive – d’un savoir privilégié sur l’objet culturel » (Chapelain et Ducas, 2018 : 14), comme des « faiseurs de goût professionnels et des autorités légitimantes » (Maguire et Matthews dans Kristensen et From, 20175) qui « produisent et promeuvent des conceptions de l’art et de la culture » (Dutheil-Pessin et Ribac, 2017). Par cette activité prescriptrice, il fait donc le lien entre les artistes et leurs œuvres, les institutions culturelles et leurs productions, et bien sûr, les publics. Les journalistes culturels font donc partie des intermédiaires de la culture qui contribuent aux mondes de l’art. Mais le journaliste n’est pas seul à assumer cette fonction prescriptrice : non seulement artistes et enseignants peuvent eux aussi la prendre en charge, mais ce sont surtout une myriade d’autres professions et d’autres statuts qui peuvent entrer en jeu pour assurer la passation d’une œuvre à ses publics.

17Or, force est de constater que nombre d’ouvrages portant sur les intermédiaires culturels ne parlent des critiques culturels qu’à la marge, voire pas du tout (Jeanpierre et Roueff, 2014 ; Lizé, Naudier et Sofio, 2014 ; Mauger, 2006 ; Debruyne et Pirolli, 2017). Cette absence des journalistes culturels dans la littérature sur les intermédiaires implique non pas un oubli ni une exclusion arbitraire, mais bien une opération épistémique qui consiste, comme le préconisent Jean-Pierre Benghozi et Thomas Paris (2003 : 207) à « distinguer les fonctions d’intermédiation et les fonctions de prescription ». Si les journalistes ne sont pas placés sur le même plan que les tourneurs, programmateurs de festival, éditeurs ou agents d’artiste, c’est parce que leur degré d’implication dans le fonctionnement des industries culturelles n’est pas le même. Autrement dit, ce qu’ils produisent n’aurait que peu d’influence sur la circulation et la visibilité des artistes, ainsi que de leurs œuvres dans l’espace public. Si prescription il y a, reste en effet à questionner la manière dont celle-ci peut être efficiente et dans quelle mesure.

Efficience et légitimation

  • 6 Le box-office désigne les recettes générées par un film en salle selon le nombre d’entrées.
  • 7 Citation originale : « The negative impact of bad reviews is significantly greater than the positi (...)

18Une critique a-t-elle un effet direct sur les ventes d’un livre, la fréquentation d’une exposition, le succès d’un film au box-office6 ? Si la question mérite d’être posée, elle implique une réalité difficile à objectiver. De plus, les quelques études portant sur la question ont des résultats discordants. Avec un terrain sur la critique théâtrale à Édimbourg, Wesley Shrum (1991 : 368) montre que la visibilité fournie par un compte rendu a plus de poids que la fonction évaluative de celui-ci, peu importe si la critique est positive ou négative. Même constat pour Jean-Samuel Beuscart et Kevin Mellet (2010 : 22) dans leur étude sur la promotion des œuvres culturelles (tous secteurs confondus) : « [D]ans tous les cas, seul l’effet de visibilité est significatif, l’évaluation n’ayant guère d’impact », concluent-ils. En revanche, dans leur étude sur les effets des critiques de cinéma sur le box-office, Suman Basuroy, Subimal Chatterjee et S. Abraham Ravid (2003 : 104) montrent que « [l]’impact négatif des mauvaises critiques est nettement plus important que l’impact positif des bonnes critiques sur les recettes du box-office7». Constatant cet écart dans les résultats, on ne peut donc qu’insister sur la nécessité d’être vigilant quant à la désignation d’une efficience de la critique culturelle. Celle-ci réside, au moins en partie, dans sa dimension légitimante. Le journalisme culturel peut formuler des mots, des concepts pour penser les œuvres : c’est dans un article du critique Louis Chassevent sur le peintre Jean Metzinger (1907) que le terme de « cube » est utilisé pour ensuite être repris et donner son nom au mouvement pictural du « Cubisme ». Un siècle plus tard, le rôle du critique reste d’interpréter et de mettre en mots les tendances à l’œuvre dans la création, contribuant aussi à la construction des réputations artistiques (Cameron, 1995), à l’institutionnalisation de certaines pratiques artistiques – comme l’a montré Jean-Michel Frodon (2008) à propos de la critique cinématographique –, et intégrer dans la culture légitime des sous-secteurs culturels encore peu valorisés. De ce point de vue, le rôle du journaliste culturel assume un statut de gatekeeper (Becker 1982, chapitre 5), dont l’activité est légitimante : ils décident de ce qui mérite d’être connu et le porte à l’attention du public.

Un journalisme à l’interstice du culturel, du marchand et du politique

19Dans le contexte contemporain, les industries culturelles se caractérisent par une structure bipolaire entre le culturel et le marchand. Par exemple, Stéphane Debenedetti rappelle que « la conception dualiste du champ culturel élaborée par Pierre Bourdieu (1992), […] oppose le pôle commercial de la “grande production” au pôle artistique de la “production restreinte” » (Bourgeon-Renault et al., 2014 : 241). Par effet de synecdoque, le journalisme culturel est, lui aussi, pris dans un balancement et des jeux de friction entre le marchand et ce qui relève de sa « production restreinte », à savoir ici, l’engagement politique et le positionnement de ses auteurs.

Proximités avec le marchand

20Plusieurs enquêtes sur le journalisme culturel pointent un brouillage des frontières entre le culturel et le divertissement, entre news et entertainment (Winch, 1997 : 3) qui entraînerait une « tabloïdisation » des médias culturels (Rieffel, 2006 : 56) et mènerait à un effet de commercialisation, à « l’amplification d’une vision consumériste de la culture » (ibid.). Les conséquences de la collusion entre « prescription et promotion » sont par là accentuées, parmi lesquelles une diminution de la critique négative (Béra, 2003), une pression des annonceurs sur les contenus rédactionnels (Charon, 2018), l’instauration de relations étroites avec d’autres secteurs comme celui du luxe (Marti, 2019 ; Mouratidou, 2020), la multiplication de publications qui témoignent souvent d’une démarche de brand content – c’est-à-dire, la déclinaison de l’image d’une marque sur différents supports et sa mise en valeur par un contenu identifiable – comme les magazines internes aux institutions culturelles et même aux marques comme Trois couleurs pour le groupe MK2/UGC ou Epok pour la Fnac (Croissant et al., 2015). Il faut reconnaître que l’industrialisation de la culture a pour conséquence directe que toute forme de prescription ne peut être envisagée sans en prendre en compte ses logiques économiques. Comme le remarquent Brigitte Chapelain et Sylvie Ducas (2018 : 29), « la prescription est devenue un marché à double ressort, son rôle étant à la fois de pousser à l’achat d’un produit et de créer de nouvelles activités dans l’économie culturelle, qu’il s’agisse du secteur technique ou du secteur de contenu ». La collusion entre promotion et prescription n’est donc pas uniquement à envisager sous un prisme négatif, qui consisterait à repérer et dénoncer la victoire de la logique pécuniaire sur celle de la réflexion et de la pensée libre ; il s’agit aussi d’admettre le rôle, plus ou moins maîtrisé, des critiques dans la valorisation et la reconnaissance des carrières artistiques sur le marché de l’art, qu’il soit national ou international (Moulin, 1992 ; Quemin, 2002 ; Quemin et Lévy, 2020).

Proximités avec le politique

  • 8 Citation originale : « Entertainment journalists offer ideological framings and critiques of pop c (...)

21Si le poids d’enjeux marchands sur les pratiques professionnelles comme sur les discours est indéniable, le journalisme culturel n’en est pas moins le lieu privilégié d’engagement pour les intellectuels, ainsi que le montrent les travaux monographiques portant sur les revues littéraires comme Le Figaro littéraire (Paris, 1946-1970 ; Blandin, 2007 et 2010), Esprit (Paris, 1932 en cours ; Boudic, 2005) ou Critique (Paris, 1946 en cours ; Patron, 1999) ; c’est aussi le rôle décisif des engagements politiques des rédacteurs dans l’organisation de la rédaction et l’inflexion de la ligne éditoriale de périodiques culturels qui ne se destinent pas a priori au débat d’idées qui a été démontré pour des revues d’art comme Artforum (New York, 1962 en cours ; Baker, 1984), Tiger’s Eye (New Haven, 1947 en cours ; Franks, 2002), Parachute (Montréal, 1975-2007 ; Pontbriand, 2004) ou Art Press (Di Sciullo, 2021 et 2022), ainsi que pour les pages « culture » de la presse quotidienne (Pourtier, 2006 : 93). Le journalisme culturel doit donc aussi être analysé dans influence directe dans le débat d’idée dans la sphère publique qu’il peut avoir, influence qui pour, Joel Penney (2022 : 34), s’assimile à une logique de soft power dans la mesure où « les journalistes culturels proposent des cadres idéologiques et des critiques de la culture pop qui soulignent l’importance perçue du symbolisme et des représentations médiatiques qui, ce faisant, contribuent à en faire un champ de bataille politique et culturel 8». En somme, les journalistes culturels apparaissent, par les choix éditoriaux qu’ils opèrent, comme des entrepreneurs de cause (Neveu, 2015), par exemple quand ils contribuent à la mise en visibilité des artistes « non occidentaux » (Deflaux, 2004) ou des artistes femmes (Lévy et Quemin, 2011), ou qu’ils offrent aux artistes un espace de prise de parole sur le politique et sur le monde, les introduisant en tant qu’intellectuel (Alexis, 2021). Tout en gardant en tête les injonctions et les contraintes qui structurent les pratiques professionnelles du journaliste culturel, il est donc impératif d’insister sur le rôle déterminant qu’ils peuvent jouer dans une acception démocratique de la culture et dans la participation à un pluralisme des médias.

Des contributions diversifiées autour de trois mouvements : énonciation, hybridation, politisation 

  • 9 Citation originale : « An umbrella term for the media’s reporting and debating on culture, includi (...)

22Ce dossier suit les recommandations de N. Kristensen et U. From (2017 : 35) en proposant une acception large du journalisme culturel, comme « un terme générique désignant les reportages et les débats des médias sur la culture, y compris les arts, la politique des valeurs, la culture populaire, les industries culturelles et les divertissements 9». Les articles qui le composent traitent aussi bien des jeux vidéo, du cinéma fantastique, que du cinéma d’auteur ou de festivals de musique électronique. De même, les textes sélectionnés sont hétérogènes dans les méthodes sollicitées, les domaines culturels étudiés et les corpus constitués, subsumant la plupart des pistes de réflexion évoquées ci-dessus. Si beaucoup d’entre elles tendent à un certain pessimisme, pointant une perte de vitesse du journalisme culturel, une prescription remise en question, une diversification des acteurs qui peuvent la prendre en charge, c’est bien davantage à l’optimisme qu’il faut appeler avant de laisser la place aux contributrices et contributeurs qui, par leurs analyses, mettent en œuvre le mot d’ordre de J.-M. Frodon (2008 : 10) : « Tant qu’il y aura des œuvres, le travail critique aura à s’effectuer » !

23À la question « le journalisme culturel est-il un journalisme comme les autres ? », la réponse est évidemment non, puisque ce dont il traite, la culture et les productions culturelles, se distinguent par leur double nature, à la fois marchande et créative. La question n’est donc pas tant « le journalisme est-il différent ? », mais plutôt, où se loge sa spécification ? Le dossier entend précisément se structurer autour des différentes échelles et des différentes logiques de singularité et de différenciation des pratiques éditoriales du journalisme culturel, qui influent certaines pratiques professionnelles et nous engagent à questionner sa dimension socio-économique. Pour appréhender les écritures de la valorisation des productions culturelles, différents points de vue et différentes méthodes se confrontent : perspectives historique, esthétique, sociologique, sémiotique ou encore économique.

24À travers ces six articles, les huit contributrices et contributeurs s’intéressent aux pratiques éditoriales du journalisme culturel et au positionnement de celles et ceux qui les mettent en œuvre. Elles et ils offrent une exploration diversifiée et complémentaire des évolutions éditoriales dans ce champ spécifique du journalisme qui les conduit à interroger la critique sur les arts (spectacle vivant, festivals) et celle des industries culturelles (cinéma, jeux vidéo, etc.), mais aussi celle de pratiques culturelles considérées comme plus marginales, que le journalisme culturel peut, justement, tendre à légitimer et à populariser telles les musiques électroniques. Dès lors, à travers la structure éditoriale mise en place, une variété d’objets interagissent et dialoguent de manière implicite. L’ancrage théorique est double et concerne, d’une part, l’analyse socio-sémiotique du journalisme et les évolutions des pratiques discursives comme des pratiques professionnelles ; d’autre part, l’approche socio-économique de la culture, qui recoupe la littérature sur les intermédiaires culturels et sur la prescription culturelle, et donc toute l’analyse de la production de la chaîne de valeur.

25L’agencement sélectif des contributions trace un parcours de réflexion, explorant trois axes : l’interaction entre la spécialisation et le journalisme culturel, le contraste entre la prescription et la promotion lors de l’intervention des institutions culturelles dans le domaine journalistique, et les considérations transnationales, qui restent un aspect trop peu étudié pour ce champ d’études.

Niches culturelles et autorité discursive : quels effets éditoriaux de légitimation ?

26Ce premier axe concerne les propriétés éditoriales du journalisme culturel au niveau de ses formes énonciatives et ses caractéristiques discursives. Les conventions éditoriales spécifiques et canoniques de l’écriture de la culture dans les médias se frottent à de nouvelles modalités d’expression, la variété des formes de ce journalisme rend ces visées tout aussi multiples : promotionnelles, informatives, descriptives ou analytiques. Les deux premiers contributeurs, avec des approches monographiques, s’attachent aux formes permettant des manifestations d’une autorité discursive et de son corolaire : une capacité légitimante. Boris Krywicki montre que le numérique a conduit à l’obsolescence des magazines spécialisés en jeu vidéo. En s’appuyant sur des entretiens et une analyse d’articles, le chercheur explore la question des genres journalistiques (Ringoot et Utard, 2009), en étudiant la presse vidéoludique. Il travaille plus particulièrement sur deux genres pour rendre compte d’un jeu vidéo, le « test » et la « critique », qui incarnent des conceptions radicalement opposées, le premier étant proposé au lecteur dans une optique d’achat avec une portée principalement évaluative, quand la seconde se veut plus analytique, avec une portée culturelle. Finalement, c’est toute une nouvelle génération de journalistes spécialisés qui, souhaitant se différencier des pratiques des nouveaux créateurs de contenus, s’inscrit dans une généalogie avec la critique d’art et parie sur le fond plus que sur la démonstration. Dans une perspective inscrite en sociologie des professions, la contribution écrite par Quentin Mazel porte sur la presse spécialisée dans le cinéma fantastique qui se structure comme un microcosme où les logiques de l’amateurisme prédominent. À partir du traitement de dix magazines publiés entre 1977 et 2019, de 253 fanzines publiés entre 1962 et 2019 et d’une campagne de trente entretiens menés avec des critiques, il montre que la passion est la valeur conditionnant les représentations du métier de critique de cinéma et, surtout, permet d’en compenser la grande précarité.

Quand les institutions s’approprient le journalisme culturel : communication, promotion, prescription

27Est ensuite abordée l’hybridation entre les fonctions informationnelle et promotionnelle, dès lors que le discours est assumé par les acteurs d’institutions culturelles qui prennent les habits du journaliste culturel. En effet, deux contributions explorent les logiques de récupération du journalisme culturel dans les secteurs de la communication et du marketing culturel. La prise en charge directe du discours prescriptif par ces institutions et leurs équipes de communicants comme intermédiaires, ou la mise en place d’objets comme les magazines internes des institutions culturelles, témoignent souvent d’une démarche de brand content. Dès lors, peut-on toujours envisager le maintien d’une forme d’écriture indépendante ? Le dossier s’ouvre par le cas des Lettres d’information mensuelle de la Comédie-Française qui permet à Amaïa Errecart et Philippe Fache de révéler la façon dont un acteur historique cherche à la fois à valoriser le patrimoine théâtral dont elle est porteuse et à renouveler son image en tentant de capter un plus large public. À partir de l’analyse sémio-discursive de cet « objet éditorial hybride », les auteur et autrice montrent l’ambivalence entre mission historique de ce théâtre et adaptation au contexte contemporain, qui transparaît dans les contenus se situant à la croisée de l’informatif et de la communication institutionnelle. La manière dont un acteur culturel peut se faire média sans passer par la médiation journalistique est au cœur de l’enquête de Camille Jutant sur le cas d’un site documentaire, We Are Europe, issu d’un partenariat entre des festivals de musiques électroniques. Inscrite dans une perspective sémiotique, cette contribution questionne la frontière ténue entre stratégie de promotion des acteurs culturels et naissance d’une forme de journalisme culturel. L’autrice montre qu’en articulant divers formats médiatiques et différents genres journalistiques, comme l’archivage et le reportage, We Are Europe parvient à assumer plusieurs fonctions concomitantes : informer, promouvoir et divertir sur des enjeux européens qui touchent à la fois aux sphères culturelles et politiques.

Quand la critique culturelle prend la parole sur et dans les conflits internationaux

28Enfin, les deux derniers articles portent sur la capacité du journalisme culturel à contribuer à la structuration du débat public et à la politisation du discours médiatique dans le cadre de conflits internationaux. Envisageant la place de la critique culturelle dans l’espace public, cet axe pose la question des choix éditoriaux opérés dans la mise en visibilité d’un problème public. Il met en lumière les travaux de chercheurs sur des analyses transnationales, perspectives tout à fait importantes à l’heure où deux conflits touchent l’Europe et ses frontières. Les trois derniers contributeurs interrogent ainsi les enjeux sociétaux qui sous-tendent les logiques éditoriales du journalisme culturel. Au sein de leur enquête sur la critique cinématographique dans le contexte du conflit israélo-palestinien, Sandrine Boudana et Jérôme Bourdon comparent pas moins de 400 critiques européennes, américaines et israéliennes de films israéliens et palestiniens sur le temps long (2000-2014) par le biais d’une démarche méthodologique complémentaire : un regard quantitatif sur les contenus et un autre qualitatif sur les discours. Ancrés dans le diptyque critique de cinéma et politique, ils appréhendent les phénomènes d’intertextualité entre les commentaires de films édités dans la presse et la couverture d’un conflit au cœur de l’actualité. Auteur et autrice démontrent alors que ces discours, même lorsqu’ils insistent sur les dimensions formelles et esthétiques des films, ne peuvent faire l’économie du contexte géopolitique et historique qui les sous-tendent, bien que les prises de position et leur degré d’explicitation soient très différenciés selon les énonciateurs. Pour finir, l’étude de Nikolaï Vokuev permet d’éclairer un « tournant éducatif » dans le journalisme culturel russe entre les années 2010 et 2020, en réponse au contexte politique cristallisant une situation de monopole autour de l’information, de la culture et des savoirs. À partir d’entretiens avec des éditeurs de médias culturels à vocation éducative, l’auteur identifie trois mouvements durant ces périodes : la politisation du culturel avec le traitement médiatique de sujets politiques ; la culturalisation du politique avec l’effacement des controverses politiques au sein des discours culturels ; et, enfin, la repolitisation du culturel grâce à l’apparition de nouveaux médias dans le cadre du conflit en Ukraine. Il démontre que, en quelques années, surtout en réaction au conflit russo-ukrainien, plusieurs médias culturels adoptent volontairement une posture pédagogique pour proposer ce qu’il désigne comme une re-politisation du culturel. Ces deux articles trouvent toute leur pertinence dans le contexte actuel, soulignant l’importance et le rôle central de la culture et de sa diffusion.

Conclusion

29En dépit des différentes contraintes qui structurent ce champ médiatique, celui-ci demeure d’une remarquable vitalité et constitue un pôle attractif qui suscite des vocations, ainsi que le montrent les formations françaises dédiées au journalisme culturel, proposées notamment par l’Université Sorbonne Nouvelle, l’Université Paris Nanterre ou l’Université Paul Valéry à Montpellier qui continuent chaque année d’accueillir nombre d’étudiantes et d’étudiants désireux de se professionnaliser dans ce domaine. Du côté de la recherche en sciences humaines et sociales, de futures études pourront venir prolonger les réflexions menées dans le cadre de cette quarante-cinquième livraison de Questions de communication. Comment expliquer l’étonnante vivacité des corpus papier dans les études sur le journalisme culturel, dont témoigne ce dossier, alors même que la transformation numérique des pratiques journalistiques n’est plus à démontrer ? En quoi le journalisme culturel peut-il porter une ambition de démocratisation des pratiques culturelles et comment cette ambition peut-elle être effective ? Une approche par la réception, plus encore que par les pratiques éditoriales des professionnels, reste donc un chantier à poursuivre.

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Notes

1 Citation originale : « These intellectuals were characterized by their willingness to use their critical skills to transverse a wide range of issues political, social, and cultural, most usually, (but not exclusively) from a Leftist critique of institutional power » (notre traduction).

2 L’étude porte sur la France, l’Allemagne, les Pays-Bas et les États-Unis.

3 Citation originale : « By increasing the amount of calendar information and supplying brief information about a large number of cultural products, newspapers also catered to the whish of many readers to be kept abreast of current events and development in the domain of arts and culture » (notre traduction).

4 Citation originale : « Current and interconnected processes of commercialisation, professionalization, digitalisation, and globalisation have widened and revitalised the role of cultural journalism in society » (notre traduction).

5 Citation originale : « professional tastemakers and authorities legitimation » (notre traduction).

6 Le box-office désigne les recettes générées par un film en salle selon le nombre d’entrées.

7 Citation originale : « The negative impact of bad reviews is significantly greater than the positive impact of good reviews on box office revenue » (notre traduction). 

8 Citation originale : « Entertainment journalists offer ideological framings and critiques of pop culture that underline the perceived significance of media representation and symbolism and, in the process, help make it into a political as well as cultural battleground » (notre traduction).

9 Citation originale : « An umbrella term for the media’s reporting and debating on culture, including the arts, value politics, popular culture, the culture industries, and entertainment » (notre traduction).

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Pour citer cet article

Référence papier

Lucie Alexis et Flore Di Sciullo, « Écrire la culture : histoire et perspectives du journalisme culturel »Questions de communication, 45 | -1, 7-28.

Référence électronique

Lucie Alexis et Flore Di Sciullo, « Écrire la culture : histoire et perspectives du journalisme culturel »Questions de communication [En ligne], 45 | 2024, mis en ligne le 07 octobre 2024, consulté le 20 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/questionsdecommunication/34828 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11wx2

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Auteurs

Lucie Alexis

Gresec, Université Grenoble Alpes, F-38400 Saint-Martin-d'Hères, France

Flore Di Sciullo

Carism, Université Paris-Panthéon-Assas, F-75231 Paris, France

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Droits d’auteur

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