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Dossier

Quelle place pour les communicants politiques à l’ère des campagnes WhatsApp au Brésil ?

Camila Moreira Cesar et Nina Fernandes Dos Santos
p. 77-96

Résumés

Cet article interroge les caractéristiques des équipes professionnelles des campagnes au moment de l’éclatement des lieux et formes de production et de la diffusion des messages politiques. Cette étude, qui a pour arrière-plan l’élection brésilienne de 2018, met en exergue l’importance de l’application WhatsApp en tant que dispositif de communication politique. À partir d’une enquête menée en ligne auprès d’un échantillon d’électeurs de différentes régions du Brésil, nous cherchons à comprendre les dynamiques de partage de contenus politiques par le biais de l’application ainsi que les comportements et motivations qui sous-tendaient l’action des usagers. En s’intéressant au rôle des électeurs « communs », c’est-à-dire à ceux situés en dehors des cadres professionnels ou militants, notre but est de mettre en lumière les limites des campagnes postmodernes au Brésil et ce, malgré le rôle histori­quement important des consultants politiques dans les contextes électoraux.

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Texte intégral

  • 1 Avritzer, Leonardo. O pêndulo da democracia. São Paulo, Todavia, 2019.
  • 2 Ce mélange est évident dans la devise de campagne de Jair Bolsonaro : Brasil acima de tudo, Deus ac (...)

1Se déroulant dans une atmosphère hostile à la politique renforcée par l’opération anticorruption « Lava Jato », la présidentielle brésilienne de 2018 se présenta comme un terrain favorable à des forces partisanes nouvelles et peu connues dans le scénario politique, comme le Novo (le « Parti du Nouveau ») et le PSL (Parti Social-Libéral) de Jair Bolsonaro1. En s’appuyant sur la peur de la crise économique et la désaffection des gens à l’encontre de la démocratie, et après l’incarcération de Lula da Silva, qui était en tête des sondages électoraux, Bolsonaro parvint à s’imposer devant tous les autres candidats issus des partis traditionnels. À cela, s’ajoutait une stratégie de communication électorale rompant avec le modèle de campagne axé sur le marke­ting politique et très centré sur la télévision qui prédominait jusqu’alors au Brésil. A contrario, l’élection de 2018 se focalisa quant à elle sur les cercles privés, accessibles par le biais des dis­positifs de communication numériques comme les groupes WhatsApp, mais aussi dans le cadre de l’Église, notamment au sein de la branche néopentecôtiste2.

  • 3 L’enquête TIC Domicílios 2018 a indiqué que 70 % des Brésiliens utilisaient internet. Au sein des c (...)
  • 4 Norris, P. (2000). A Virtuous Circle : Political Communications in Postindustrial Societies. Cam­br (...)

2En partant du constat que les campagnes traversent des transformations substantielles au Brésil, et que celles-ci sont renforcées par l’emprise du numérique sur les habitudes informationnelles et communicationnelles des Brésiliens3, cet article examine l’importance grandissante des médias sociaux et, en particulier, de l’application WhatsApp dans la communication électorale au sein du pays. À l’aune des particularités de l’élection de 2018, nous nous proposons d’interroger à nouveaux frais la place des consultants politiques dans un contexte d’évolution des formats des campagnes post-modernes4. Notre hypothèse est que l’extension de l’accès à Internet et la popularisation des médias sociaux (Twitter, Facebook, Instagram) ainsi que d’autres outils de communication numérique depuis les années 2010 ont élargi les lieux de production de la communication électorale, en déplaçant la foca­lisation initiale des conseillers de communication professionnels sur les électeurs.

3Afin de rendre compte de ce phénomène, cette étude est divisée en deux parties. Dans un pre­mier temps, le cadre théorique caractérise la communication politique électorale brésilienne pour ensuite s’intéresser à la façon dont l’emprise du numérique a progressivement transformé les dynamiques des campagnes au Brésil. En s’appuyant sur une enquête en ligne au sujet des utilisations politiques de WhatsApp durant le dernier scrutin, la seconde partie de cet article portera sur l’importance de cette application en tant que dispositif de communication politique par rapport à d’autres formes traditionnelles, telles que la presse ou les équipes profession­nelles des campagnes. À partir des réponses obtenues, nous mettrons également en lumière les habitudes et motivations des citoyens lambda dans le partage et la propagation des contenus politiques, notamment de ceux de nature négative vis-à-vis des candidats.

De la télévision au smartphone : la nouvelle donne de la communication électorale brésilienne

Le style publicitaire de la communication élec­torale au Brésil

  • 5 Voir : Albuquerque, A. (2000). « Um outro quarto poder : imprensa e compromisso político no Brasil  (...)

4Organisée 29 ans après la dernière élection au suffrage universel, la présidentielle de 1989 se déroula dans une nouvelle conjoncture politique, économique et institutionnelle, mais aussi dans un environnement médiatique particulier dans lequel la télévision constituait un espace privilégié de construction de la représentation politique5.

  • 6 Les « Maharajas » faisaient référence à de hauts fonctionnaires ayant des salaires très élevés et c (...)

5La première présidentielle post-dictature opposa ainsi deux personnalités politiques défendant des projets complètement différents et mobi­lisant des stratégies de campagne opposées : d’un côté Lula da Silva, issu du milieu ouvrier, engagé dans la défense des pauvres et tenant un discours fortement marqué par une rhétorique « crue » et critique vis-à-vis des élites et, de l’autre, Collor, outsider soutenu par les grands conglomérats médiatiques, dont l’image jeune et dynamique était en adéquation avec les attentes de renouvellement de la politique qui attiraient l’électorat brésilien. Ayant adopté une stratégie politico-électorale sous-tendue par le marketing politique, le candidat du PRN a trouvé dans la promesse de « la fin des Maharajas »6 une façon de faire écho à l’insatisfaction populaire à l’égard du fonctionnement archaïque de l’État et du per­sonnel politique en général.

  • 7 Selon la loi électorale brésilienne, l’État offre du temps à l’antenne aux candidats de chaque part (...)

6Si d’autres facteurs, tels que la conjoncture poli­tique nationale et internationale, le favoritisme des médias envers Collor ou les rumeurs sur la vie privée de Lula ont certes contribué au résultat de cette élection, l’aspect communicationnel nova­teur de cette dernière n’a toutefois pas manqué de s’accentuer dans les années 1990-2000. Cette atmosphère souligne également le rôle majeur des professionnels de la communication dans l’uni­vers politique, dont le travail devenait d’autant plus important dans la mesure où l’Horaire Gratuit de Propagande Électorale (HGPE) s’im­posait comme une vitrine incontournable pour les candidats7. Diffusé sur toutes les chaînes de télévision et à la radio pendant toute la période électorale, l’HGPE a reconfiguré les formats des campagnes électorales des années 1990, désor­mais élaborées à l’aide des sondages et grâce à la contribution de spécialistes en communication tels que les marketeurs et publicitaires, participant à la construction de l’image des candidats auprès de l’opinion publique.

  • 8 Gomes, Wilson (2004). Transformações da políti­ca..., op.cit., p. 292, notre traduction.

7Mais, si la droite a joué le rôle de pionnière dans le recours à des techniques plus profes­sionnelles, c’est la victoire de la gauche de Lula lors de la présidentielle de 2002 qui couronna la prééminence de la logique publicitaire de la communication politique électorale au Brésil. Réticent à l’utilisation massive du marketing lors des trois élections précédentes (1989, 1994 et 1998), le PT finit par recruter le publicitaire Duda Mendonça à l’occasion du scrutin de 2002. Selon Wilson Gomes, cette élection peut être considérée comme « un spectacle de professionnalisation de campagne durant lequel le public a fréquem­ment éprouvé des difficultés pour comprendre s’il s’agissait d’une compétition dont le résultat permettrait de choisir celui qui était le candidat préféré de la sphère civile ou bien d’évaluer celui qui aurait été le meilleur consultant politique8. »

8L’emprise du numérique sur l’espace public brési­lien va progressivement reconfigurer ce scénario, les campagnes se structurant désormais autour de deux axes majeurs : les stratégies télévisuelles, dont l’HPGE et les débats télévisés demeurent des moments-clés, et les stratégies numériques, la sphère digitale élargissant le terrain qu’il incombe aux candidats de conquérir. Les élec­tions de 2010, 2014 et plus encore celle de 2018, illustrent l’évolution des formats des campagnes, des dynamiques de l’espace public politique aussi bien que des casquettes des consultants politiques au sein des équipes de communication des forces partisanes de tous bords. En plus de se montrer capables de maîtriser des codes et grammaires publicitaires et télévisuelles, les communicants doivent désormais être de plus en plus polyva­lents afin d’orchestrer des campagnes politiques dans un environnement tout aussi mouvant, au sein duquel les citoyens ordinaires jouent un rôle particulièrement important.

Les usages politiques de WhatsApp durant l’élection de 2018 au Brésil : au-delà des campagnes postmodernes ?

  • 9 Voir : Putnam, R. D. 2000. Bowling Alone : The Collapse and Revival of American Community. New York (...)
  • 10 Voir Norris, P. (2000). A Virtuous Circle : Political Communications…, op. cit.

9Dans les années 2000, les travaux de Pippa Norris rejoignent les thèses sur la détérioration de l’autorité des partis politiques et de l’engagement citoyen9 répandues dans la littérature spécialisée et proposent une approche des campagnes poli­tiques à partir de ce nouveau scénario. L’auteure identifie l’affaiblissement des formes tradition­nelles des mobilisations partisanes américaines, telles que les rassemblements dans les quartiers et les meetings politiques. La survalorisation des professionnels de la communication poli­tique (les « spin doctors ») est aussi identifiée comme un nouvel élément non négligeable. Selon Norris, ces changements font partie d’un proces­sus de modernisation qui traverse tout à la fois l’organisation des partis politiques, les médias et les électeurs10.

10L’auteure fait ainsi la distinction entre trois types de campagnes politiques ; la campagne pré-moderne, en vigueur jusque dans les années 1950, marquée par une communication interpersonnelle directe entre candidat et électeur, l’action des médias partisans et une forte fidélité partisane chez les citoyens ; la campagne moderne, qui se développe entre 1960-1980, se caractérise quant à elle par la nationalisation des campagnes politiques, surtout en raison de la télévision ; enfin, ce que Norris appelle l’âge des campagnes postmodernes, commence au cours des années 1990 et se distingue des types précédents par la centralité des professionnels de la communica­tion, qui en viennent à partager avec les politiciens les décisions stratégiques des campagnes. De leur côté, les médias se multiplient et deviennent de plus en plus fragmentés, tandis que les électeurs interagissent pour leur part avec les campagnes grâce aux nouveaux médias électroniques, ce qui peut être envisagé comme une sorte de retour à la logique pré-moderne.

11Même si plusieurs éléments de la caractérisation des campagnes postmodernes demeurent actuels, l’élection brésilienne de 2018 se présente comme un défi lancé à ce modèle. En ce qui concerne les médias, deux caractéristiques semblent centrales.

12La première est la prééminence du rôle de la télévision dans les campagnes politiques au Brésil, ce qui peut s’expliquer par l’ampleur de la pénétration des appareils de télévision dans les foyers et l’importance de l’HGPE en tant que lieu de visibilité des candidats. Cet espace gratuit de propagande électorale donne des contours très particuliers à l’importance des médias de masse chez les Brésiliens. Néanmoins, la place des médias numériques, notamment des réseaux sociaux et des applications de messagerie ins­tantanée, s’avère indéniable. Selon un rapport de l’Institut Reuters publié en 2019, au Brésil, les médias numériques sont mentionnés par 87 % des interviewés comme des sources d’informations tandis que la télévision apparaît quant à elle à la deuxième place, avec 73 % des mentions. Les services les plus mentionnés sont Facebook (54 %), WhatsApp (53 %) et YouTube (42 %).

13Il s’avère que ces médias ne semblent pas corres­pondre à la distinction faite par Norris entre les médias qui mènent une action plus locale et où les usagers sont les plus actifs – caractéristiques des campagnes pré-modernes – et ceux qui ont un impact national et dans lesquels ils se montrent plus passifs – caractéristiques des campagnes modernes. Ils seraient, en effet, plutôt un mélange entre les niveaux d’interactivité du modèle pré-moderne et l’impact national, voire international, caractéristique typique du modèle moderne. Ce sont justement ces croisements entre les différents modèles qui n’apparaissent pas dans la typologie proposée par Norris.

  • 11 Cardon, D. (2010). La démocratie internet. Pro­messes et limites. Paris, Seuil et La république des (...)
  • 12 Valeriani, A., et Vaccari, C. (2018). « Political talk on mobile instant messaging services : a com (...)
  • 13 Santos, J. G. B. dos. (2019). « Mobile networks and the Brazilian 2018 Presidential Election : from (...)
  • 14 Cf. Enquête TIC Domicilios 2018 citée précé­demment.

14Si les réseaux socio-numériques ouvrent d’autres espaces de débat public11 et augmentent l’ampleur du débat électoral bien au-delà du contrôle des communicants professionnels, la dissémination de l’usage des applications de la messagerie instantanée y ajoute encore une couche de complexité. Ces dernières permettent aux indi­vidus et aux groupes d’échanger des messages multimédias, ce sous la forme de textes par le biais de leurs appareils mobiles12. C’est WhatsApp qui, parmi les applications permettant ce type d’échanges, est la plus utilisée au monde et le Brésil n’échappe pas à cette tendance. L’usage de ce service a concerné 120 millions de Brésiliens en 201813. Ce nombre remarquable trouve un écho certain dans la popularisation des smartphones, ainsi que leur pénétration au sein de la population14, ce qui élargit, par ricochet, la dissémination de l’usage de cette application.

  • 15 Boyd, D. M., et Ellison, N. B. (2007). « Social network sites : Definition, history, and scholarshi (...)

15À la différence des médias sociaux, qui per­mettent aux usagers (1) de créer un profil public ou semi-public dans un système délimité, (2) d’articuler une liste d’autres utilisateurs avec lesquels ils partagent une connexion, ainsi que (3) d’afficher et de parcourir leur liste de connexions et celles établies par d’autres utilisateurs du sys­tème15, les messageries instantanées sont quant à elles des espaces de communication moins ouverts et visibles.

  • 16 Santos, J. G. dos, Freitas, M., Aldé, A., Santos, K., et Cunha, V. C. C. (2019). « WhatsApp, políti (...)
  • 17 Voir notamment : Santos, J. G. B. dos. (2019). Mobile networks and the Brazilian 2018 Presidential (...)

16WhatsApp possède un design de réseau privé avec cryptage de bout en bout16. Cette struc­ture plus fermée peut encourager l’expression politique de personnes dont l’exposition sur les médias sociaux les mettrait mal à l’aise, pourtant, elle n’empêche pas la grande et rapide dissé­mination des messages. Étant donné que cette plateforme n’offre pas la possibilité de mener des actions de publicité ni de ciblage – comme sur Facebook ou Twitter – la dissémination des contenus vers d’autres usagers dépend de l’action individuelle. Dans une étude portant sur l’usage de l’application dans les élections brésiliennes de 2018, Francisco Brito Cruz et al soulignent que la circulation d’informations par le biais de WhatsApp est possible grâce à un mélange entre action volontaire et action payée – cela rendant donc visibles des indices d’une action professionnelle – dans une structure fort décentralisée. Cette structure, qui diffère sensiblement de la logique de fonctionnement des médias sociaux, n’a pas empêché l’investissement poli­tique de cet environnement de communication au Brésil, soit par les équipes de la campagne officielle, soit par des supporteurs des candidats, comme en témoignent de nombreux articles publiés dans la presse, ainsi que des analyses menées dans des travaux académiques17. Il demeure important de souligner que, même si l’opacité de ce réseau fait écran à la compréhension de l’ampleur de ce phénomène, comme nous verrons plus avant, ses conséquences sur la dynamique politique sont loin d’être négli­geables.

17Cela étant, bien que l’analyse de la campagne brésilienne de 2018 à l’aune du modèle postmo­derne de Norris soit tout à fait acceptable – si l’on considère la fragmentation médiatique et l’importance des communicants au sein de la structure politique – elle ne peut se faire que sous certaines réserves. L’usage massif des médias numériques et, dernièrement, de l’appli­cation WhatsApp, a engendré une restructuration des mécanismes de circulation des messages politiques au Brésil. Dans ce contexte, le rôle des communicants demeure certes central, mais ne s’avère plus suffisant pour une communication persuasive effective.

Vers la fin du règne des communicants politiques ?

  • 18 Pour reprendre le titre du documentaire portant sur le rôle des marketeurs dans la vie politique br (...)
  • 19 Benkler, Yochai ; Faris, Robert and Roberts, Hal (2018). Network Propaganda : Manipulation, Disin­f (...)
  • 20 Voir notamment : Coleman, S. (2005). « New mediation and direct representation : reconceptu­alizing (...)

18Alors que les campagnes des années 1990-2000 ont été axées sur le tandem télévision-marketing et les « architectes du pouvoir »18 qui sont les experts en communication, celles de la décennie suivante mettent quant à elles la maîtrise tech­nique des consultants à l’épreuve d’un électorat de plus en plus morcelé et polarisé face aux dangers de la vie politique brésilienne. Au moment où les instances de médiation tradition­nelles se voient confrontées aux enjeux d’une « crise épistémique » des démocraties occidentales19, les réseaux gagnent en importance en tant que sources d’informations, y compris pour des sujets politiques. Mais si cette nouvelle atmos­phère reconfigure les conditions et formes de participation et de représentation politiques20, elle pulvérise les flux de la communication politique et réactualise le débat autour des acteurs responsables de sa mise en opération.

  • 21 Voir Howard, Philip N. (2006). New media campaigns and the managed citizen. Cambridge : Cambridge U (...)

19À ce sujet, Philip N. Howard souligne la façon dont les nouvelles technologies ont non seu­lement renouvelé l’éventail technologique des candidats, mais aussi opéré un changement au sein des partis et du profil des professionnels des équipes de campagne. Le résultat de cette restructuration, explique l’auteur, est l’émergence de la « campagne hypermédia, une organisation politique agile définie par sa capacité à adopter de façon innovante les technologies numériques à des fins expressément politiques et sa capacité à adapter de façon innovante sa structure orga­nisationnelle pour se conformer aux nouvelles pratiques de communication21. »

  • 22 Voir Badouard, Romain (2017). Le désenchante­ment de l’internet. Désinformation, rumeur et propa­ga (...)
  • 23 Voir Henrie, Kenneth ; Gilde, Christian (2019). « An examination of the impact of astroturfing on n (...)
  • 24 Un reportage publié dans le journal A Folha de São Paulo en février 2017 a montré comment se struct (...)

20Outre la sophistication de la communication politique, il convient de signaler également les aléas de la campagne hypermédia, tout d’abord, parce que l’évolution des outils numériques et leur utilisation à des fins électorales mettent en lumière l’affaiblissement des frontières entre les domaines public et privé dans l’orchestration des stratégies de communication des acteurs et équipes politiques. Des publications sponsori­sées, la diffusion de contenus politiques ciblés à partir des données personnelles des profils des usagers sur les réseaux socio-numériques ou, plus particulièrement au Brésil, la création des groupes WhatsApp publics pour des supporteurs des candidats, montrent la nature indéniable­ment hybride et « intrusive » des campagnes récentes. En second lieu, ces dynamiques de la communication politique contemporaine favo­risent l’émergence de phénomènes associés à des formes renouvelées de manipulation et de propagande. Romain Badouard explique à ce sujet que la diffusion de fausses informations sur la Toile et leurs effets politiques trouvent leur force dans la logique strictement sociale d’une telle pratique, fondée sur les liens de confiance entre les membres d’une même communauté virtuelle qui partagent a priori les mêmes valeurs et intérêts22. De façon complémentaire, Kenneth Henrie et Christian Gilde insistent sur l’usage des techniques d’« astroturfing » numérique en guise de stratégie politique23. Selon ces auteurs, l’ano­nymat offert par les plateformes peut renforcer l’efficacité des campagnes de manipulation et de propagande, tout individu ayant accès aux médias sociaux étant dès lors en mesure de propager des mensonges présentés comme une position répandue, ce qui facilite la dissémination de fausses nouvelles24.

  • 25 Voir Théviot, Anaïs (2016). « Web-stratège : un métier politique comme les autres ? Analyse com­par (...)
  • 26 Voir Gomes, W., Fernandes, B., Reis, L., et Silva, T. (2009). « ‘Politics 2.0’ : a campanha online (...)
  • 27 Voir Gomes, W., Fernandes, B., Reis, L., et Silva, T. (2009). « ‘Politics 2.0’... », art. cit., p. (...)
  • 28 Voir Bucci, Eugênio (2019). « Seriam as fake news mais eficazes para campanhas de direita ? Uma hip (...)

21Cependant, si la diversification des dispositifs et de leurs usages par les équipes de campagne constitue sans conteste des changements majeurs dans les conditions de production et de circulation de la communication politique contemporaine, la survalorisation de la dimension technique de ce phénomène tend à reléguer les acteurs qui les créent, les gèrent et les utilisent à une place secon­daire dans les travaux consacrés à ce thème25. C’est ainsi qu’au Brésil, l’attention des chercheurs à l’âge des e-campagnes porte principalement sur les usages des outils numériques par les candidats, sans pour autant considérer l’importance de la structure professionnelle qui, bien qu’agencée autrement, est encore très présente derrière les visages des personnalités politiques. Le passage des campagnes électorales d’un stage de « proto-web » (logique diffusionniste via e-mails et sites officiels des candidats) à la fin des années 1990 à celui de « post-web » (interactivité et usages sys­tématiques et professionnels des outils) au cours des années 2000-2010, reconfigure le modus operandi de la compétition électorale26. Fondée sur la dimension sociale d’Internet, cette dernière phase se caractérise par une communication coo­pérative, dans laquelle les internautes jouent un rôle actif dans « la production des contenus et des procédures de diffusion virale des informations et [des actions] de mobilisation27. » Ce scénario décrit l’atmosphère dans laquelle s’est déroulée l’élection de 2018 au Brésil, où les stratèges du digital ont joué un rôle majeur, surtout dans le camp de l’extrême droite28. Cependant, les profils et les logiques d’action de ces acteurs demeurent difficiles à saisir du fait de l’architecture et du modus operandi des plateformes numériques.

22À la lumière des réflexions théoriques esquissées jusqu’ici, la partie empirique de notre étude vise ainsi à faire dialoguer ces différentes perspectives à partir de l’étude portant sur les usages de Whats-App en tant que canal d’information politique lors de la dernière élection au Brésil. En nous intéressant aux citoyens lambda, nous cherche­rons à comprendre comment cette partie de la population, située a priori en dehors des cadres professionnels ou militants, s’est appropriée des contenus politiques reçus via cette appli­cation et a contribué ou non à l’intensification de la polarisation politique durant l’élection brésilienne.

Méthodologie et discussion des résultats

23Compte tenu du rôle central des acteurs non professionnels dans le processus électoral de 2018 au Brésil, nous nous sommes penchées sur les citoyens afin de mieux comprendre les dynamiques de communication politique pendant l’élection de 2018. Ce choix avait pour but de mettre en exergue la dimension professionnelle des campagnes actuelles, tout en s’intéressant au repositionnement des électeurs en leur sein.

24Du fait de la place occupée par les dispositifs et plateformes numériques lors du dernier scrutin, nous avons effectué un sondage en ligne, diffusé sur les médias sociaux, entre le 20 novembre 2019 et le 15 janvier 2020. Ce questionnaire comportait 18 questions et interrogeait les Brésiliens repérés sur la base de trois points : la relation entre récep­tion et dissémination d’informations politiques via WhatsApp, les habitudes et motivations de ces personnes s’étant montrées très actives dans la diffusion de messages politiques et l’impor­tance pour elles de cette application par rapport à d’autres sources d’informations pendant les élections de 2018 au Brésil.

  • 29 Creswell, J.W. (2004). Educational Research. Planning, Conducting, and Evaluating Quantitative and (...)
  • 30 Voir Santos, J. G. B. dos. (2019) : « Mobile networks … », art.cit.

25Cette enquête a reposé sur la stratégie de la « boule de neige », une forme d’échantillonnage consistant à diffuser le questionnaire auprès des individus correspondant aux caractéristiques souhaitées – c’est-à-dire des électeurs brésiliens qui se sentaient sensiblement concernés par les élections de 2018 – puis de leur demander de le relayer auprès d’autres personnes ayant un profil similaire29. En plus de constituer une méthode efficace pour faire circuler le sondage auprès d’un plus large réseau, cette stratégie de la boule de neige se rapproche des modalités de diffusion de contenus politiques lors des échéances élec­torales30.

  • 31 Au Brésil, la post-graduation désigne les études au niveau master et/ou doctorat aussi bien que des (...)

26Sur un total de 572 répondants, 37 % se situaient dans la tranche d’âge des 25-35 ans, 62 % étaient des femmes, 27 % des diplômés du supérieur et 44 % avaient poursuivi leurs études au niveau de la post-graduation31. Tout en respectant les limites de l’échantillon ainsi que les effets de réseautage sur sa constitution, le profil des participants souligne la relative jeunesse des usagers de cette application et la pénétration de cette dernière chez des publics variés, notamment en termes d’âge et de niveau d’études.

27À partir de ce préambule, nous présenterons et discuterons des résultats de l’enquête en interrogeant les usages politiques de WhatsApp dans le cadre du contexte électoral de 2018 au Brésil.

Réception et dissémination d’informations

28En ce qui concerne les flux des messages politiques lors de l’élection de 2018, 92 % des répondants (n = 572) ont déclaré avoir reçu des informations politiques par le biais de WhatsApp (Tableau 1). Ce taux est pourtant moins élevé (68 %) lorsque la question porte sur l’envoi de messages de cette nature via l’application (Tableau 2).

Avez-vous reçu des informations politiques via WhatsApp pendant les élections 2018 ?

Réponses

Pourcentage

Oui

524

92%

Non

47

8%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

1

0%

Total

572

100%

Tableau 1 – Réception d’informations politiques par WhatsApp

Avez-vous envoyé des informations politiques par WhatsApp pendant les élections 2018 ?

Réponses

Pourcentage

Oui

390

68%

Non

179

31%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

3

1%

Total

572

100%

Tableau 2 – Envoi d’informations politiques par WhatsApp

29Afin d’examiner la façon dont la réception des messages politiques s’articule avec l’action d’envoi de ces contenus sur WhatsApp, nous avons analysé séparément les répondants ayant reçu des informations politiques (n = 524) et ceux qui n’en ont pas reçues (n = 47). Dans le premier cas (Tableau 3), 73 % déclarent avoir aussi envoyé des messages de ce type. En revanche, lorsque l’on examine le second groupe (Tableau 4), l’on constate que seuls 19 % confirment l’avoir fait.

Parmi ceux qui ont reçu des informations politiques, combien ont également envoyé des informations politiques ?

Réponses

Pourcentage

Oui

380

73%

Non

142

27%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

2

0%

Total

524

100%

Tableau 3 – Envoi d’informations politiques par WhatsApp parmi ceux qui en ont aussi reçues

Parmi ceux qui n'ont pas reçu d’informations politiques, combien ont envoyé des informations politiques ?

Réponses

Pourcentage

Oui

9

19%

Non

37

79%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

1

2%

Total

47

100%

Tableau 4 - Envoi d’informations politiques par WhatsApp parmi ceux qui n’en ont pas reçues

30Une première interprétation à cet égard suggère que l’envoi de messages politiques a été une pra­tique beaucoup plus récurrente chez les enquêtés en ayant également reçus. Cependant, même si cela pouvait amener à envisager WhatsApp comme une façon d’investir le débat politique, ce résultat amène à considérer que les usagers sont plutôt enclins à transmettre des messages qu’ils reçoivent qu’à en créer eux-mêmes. Une telle dynamique met en évidence tout à la fois le rôle central des électeurs dans la circulation des contenus politiques et la nécessité de pôles de production d’informations capables d’alimenter les flux.

  • 32 Chaque groupe WhatsApp dispose d’au moins un modérateur, qui est la personne responsable de l’ajout (...)

31Ceci étant, il faut également considérer que les caractéristiques de WhatsApp permettent plusieurs types de communications interper­sonnelles. Cet outil peut être utilisé pour une conversation entre deux personnes, mais permet également de créer des groupes comportant jusqu’à 256 membres. Étant donné que cette application ne possède pas de directoire général de ses usagers accessible à tous et que ces der­niers ne peuvent se mettre en contact qu’avec des personnes dont ils ont le numéro de portable, la création des groupes WhatsApp peut se faire de deux manières : à l’initiative des modérateurs, grâce à l’ajout des personnes de leur liste de contacts, ou bien en créant des groupes ouverts, accessibles par le biais de liens rendus publics (sur les sites de campagne, par exemple). Ainsi, n’importe qui peut y participer sans qu’une invita­tion s’avère nécessaire. Cette modalité permet dès lors de créer des groupes beaucoup plus larges et divers, qui ne dépendent pas des réseaux sociaux préétablis par les modérateurs32.

  • 33 Voir Santos, J. G. B. dos. (2019). « Mobile networks… », art.cit. Le fait que ces groupes soient ou (...)

32Ces espaces donnent lieu à des dynamiques de dissémination d’informations très particulières et importantes pour comprendre la circulation virale des contenus publiés sur WhatsApp33.

  • 34 Voir Evangelista, R., et Bruno, F. (2019) : « Whats-App and political… », art.cit. et Chagas, Vikto (...)

33En considérant l’importance des conversations groupées chez les Brésiliens34, nous avons interrogé nos répondants concernant l’envoi de messages politiques à des destinataires multiples. Il s’avère que, parmi ceux ayant envoyé des messages politiques pendant les élections 2018 (n = 390), 87 % ont affirmé les avoir diffusés sur des groupes (Tableau 5).

Parmi ceux qui ont envoyé des informations politiques par WhatsApp, combien les ont-ils envoyées à des groupes pendant les élections 2018 ?

Réponses

Pourcentage

Oui

341

87%

Non

47

12%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

2

1%

Total

390

100%

Tableau 5 – Envoi d’informations politiques à des groupes WhatsApp

34Ces informations corroborent la place privilégiée de WhatsApp dans la production et surtout, la diffusion de la communication électorale de 2018 au Brésil. Ainsi, la compréhension de la nécessité de s’y inscrire peut dès lors expliquer la multiplication et le succès des groupes WhatsApp publics animés par des supporteurs de candidats de tous bords.

Habitudes et motivations de l’envoi d’informa­tions politiques par WhatsApp

35Une fois identifiées les pratiques générales de réception et d’envoi d’informations politiques sur l’application, nous nous sommes intéressées aux habitudes et motivations des usagers concernant le partage des contenus sur ce réseau. Pour étudier ce point, nous avons isolé les répondants ayant déclaré avoir envoyé des informations politiques (n = 390).

  • 35 Étant donné que les usagers membres des conver­sations groupées appartiennent souvent à plusieurs g (...)

36L’ampleur de l’usage des groupes WhatsApp au Brésil découle d’une multitude de finalités auxquelles ils se prêtent. Ils sont souvent struc­turés autour des relations familiales, amicales ou professionnelles, mais peuvent aussi se fonder sur des thématiques ou intérêts communs. Nous avons donc interrogé les répondants sur le(s) type(s) de groupes sur lesquels ils avaient partagé des messages politiques pendant des élections35.

37Comme nous pouvons le constater dans le Tableau 6, les groupes de relations familiales et amicales sont largement les plus utilisés pour l’envoi d’informations politiques, tandis que ceux de soutien à des candidats apparaissent à la quatrième place. Ces espaces sont devenus une véritable arène à l’occasion du scrutin et leurs messages textuels et multimédias – à l’instar des mèmes mais aussi des vidéos et notes vocales, souvent anonymes d’ailleurs – ont trouvé dans les cercles des relations ordinaires des gens un terrain propice à leur propagation.

Parmi ceux qui ont envoyé des informations politiques à des groupes WhatsApp, à quel type de groupes ont-ils envoyé ces informations ?

Réponses

Pourcentage

Groupes d’amis

295

76%

Groupes de famille

235

60%

Groupes de collègues de travail ou scolaires/universitaires

156

40%

Groupes de soutien à l’un des candidats

105

27%

Autres

36

9%

Tableau 6 – Types de groupes auxquels des messages politiques ont été envoyés

38Bien que les technologies numériques aient pour effet d’amplifier les flux d’informations et de communication, la dissémination des contenus politiques en ligne passe en grande partie par des réseaux sociaux traditionnels, préalablement aux liens virtuels. En ce qui concerne WhatsApp, cette application peut se révéler un frein à la communication professionnelle des équipes de campagne. Si ces dernières peuvent désormais facilement créer et animer des groupes de soutien aux candidats, l’efficacité d’une telle stratégie se heurte à la nécessité de pénétrer des cercles sociaux plus fermés, structurés autour de relations préexistantes. Ce « retour aux origines » rend non seulement visibles les limites des logiques verticales des campagnes traditionnelles mais engendre aussi une redéfinition de l’organisa­tion des équipes et des rôles des responsables en orchestrant la communication, celle-ci s’opérant désormais dans une arène où se mêlent domaine public et domaine privé.

39Concernant les motivations poussant les per­sonnes à envoyer des messages politiques à des groupes WhatsApp, la plupart d’entre elles ont déclaré l’avoir fait pour informer les gens (65 %) tandis que l’intention de les convaincre de voter contre un candidat apparaît en deuxième position (57 %). Par ailleurs, parmi les 253 personnes se trouvant dans la première situation, 106 ont indiqué n’avoir qu’un seul but, celui d’informer, alors que 142 ont, en outre, manifesté l’objectif de convaincre des gens de voter pour ou contre un candidat. Il est intéressant de noter que, parmi ceux appartenant à cette catégorie, 57 % assurent avoir relayé des messages contre un certain can­didat et seuls 4 % l’ont fait afin de convaincre de voter pour quelqu’un.

  • 36 Voir Sousa, I. J. ; de Marques, F. P. J. Campanha negativa nas eleições de 2014. In Cervi, E. U., M (...)

40L’importance des contenus comportant des attaques contre les adversaires n’est pas une nouveauté au Brésil. Ícaro Sousa et Francisco Marques rappellent que la visée négative repré­sentait déjà presque 25 % des publications Facebook des deux candidats en tête des sondages à la présidentielle de 2014. Selon ces chercheurs, ce résultat est lié au fait que les élections de cette année-là ont été « les plus disputées de l’histoire post-redémocratisation36. »

41La destitution de la présidente Dilma Rousseff, en 2016, et l’incarcération de Lula da Silva, le candidat préféré selon les sondages à la présidentielle de 2018, ont accentué cette polarisation.

  • 37 Voir Walter, A. S., et Vliegenthart, R. (2010). « Negative campaigning across different communicati (...)

42Or, la campagne négative n’est ni exclusive au Brésil, ni construite par les campagnes elles-mêmes. Selon l’étude d’Annemarie Walter et de Rens Vliegenthart sur les élections de 2006 au Pays-Bas37, la négativité devenait bien plus centrée sur les candidats dans des contextes de communication moins contrôlés par les acteurs politiques. De ce fait, l’exacerbation de la cam­pagne négative à la dernière élection brésilienne peut s’expliquer par la combinaison d’un contexte politique très polarisé et d’un outil de communication moins contrôlé par les équipes officielles.

Si vous avez envoyé des informations politiques à des groupes WhatsApp, pourquoi avez-vous décidé de le faire ?

Réponses

Pourcentage

Pour informer les personnes et animer le débat

253

65%

Pour essayer de convaincre les personnes de voter contre un candidat

221

57%

Pour essayer de convaincre les personnes de voter pour un candidat

14

4%

Autres

25

6%

Tableau 7 – Motivations de l’envoi de messages politiques par WhatsApp

43Le croisement entre le type de groupe choisi pour relayer les messages et les motivations des usagers pour le faire n’a pas présenté de diver­gences, hormis par rapport aux groupes de soutien des candidats. Alors que l’intention d’informer et d’alimenter le débat est manifestement plus marquée que l’objectif de convaincre de voter pour ou contre un candidat dans tous les autres groupes, la perspective persuasive a été fort répandue lorsque les envois concernaient ceux éminemment politiques. Les efforts menés en vue d’une action contre un acteur politique sont corroborés par les réponses concernant l’envoi de contenus négatifs sur les candidats. Avec des différences en termes de fréquences des envois, 87 % des enquêtés ont déclaré avoir envoyé des informations négatives sur les candidats à un moment de la campagne.

Parmi ceux qui ont envoyé des informations politiques par WhatsApp, combien ont envoyé des informations négatives sur des candidats ?

Réponses

Pourcentage

Souvent

198

51%

Quelquefois

142

36%

Jamais

44

11%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

6

2%

Total

390

100%

Tableau 8 – Fréquence des envois de campagne négative par WhatsApp

L’importance de WhatsApp comme source d’informations

44Un dernier aspect auquel nous nous sommes intéressées concerne l’usage de WhatsApp en tant que source d’informations durant l’élection de 2018. Il est étonnant de constater que, même si 92 % des répondants ont déclaré avoir reçu des informations politiques via l’application et 68 % en ont aussi envoyées à d’autres personnes – ce qui témoigne de l’ancrage de l’outil dans les pratiques communicationnelles des Brésiliens – plus de la moitié des enquêtés (56 %) ne les ont pas considérées comme l’un des canaux les plus importants pour s’informer sur le scrutin (Tableau 9).

Considérez-vous WhatsApp comme l’une des plus importantes sources d'informations pendant les élections 2018 ?

Réponses

Pourcentage

Non

323

56%

Oui

239

42%

Je ne sais pas / Je ne veux pas y répondre

10

2%

Total

572

100%

Tableau 9 – Importance de WhatsApp comme source d’informations

45Trois pistes peuvent éclairer la réticence des répondants à situer WhatsApp dans la galaxie des sources d’informations disponibles.

46La première piste que nous soulevons concerne le caractère interpersonnel de cet outil. Alors que les usagers de WhatsApp y ont amplement recours pour des conversations ordinaires, son utilisation spontanée au quotidien conduit ceux-ci à le reléguer – tout du moins par rapport à la position publiquement assumée – à une place marginale dans leurs habitudes informationnelles. De ce fait, la dimension sociale de l’application fait écran à ses usages potentiellement informa­tionnels dans certaines situations, telles que le contexte électoral.

47Une deuxième explication peut être liée à l’imbrication entre WhatsApp et d’autres sources d’informations. À l’inverse des médias sociaux, qui favorisent pour leur part l’interaction entre les usagers, la logique transmissive de cette applica­tion conduirait les enquêtés à y voir moins une source qu’un canal de transmission de contenus issus d’autres médias. Ainsi, cet outil semble remplir une fonction de relais et les messages y circulant, lorsqu’ils sont informatifs et, en l’occurrence, de nature politique, proviennent de pôles de production davantage structurés et orientés vers cette fin.

  • 38 Voir Chagas, Viktor ; Modesto, Michelle ; et Magalhães, Dandara (2019). « O Brasil vai virar Venezu (...)

48Un troisième point, qui nécessite d’être examiné de plus près, concerne la méfiance envers les informations circulant sur WhatsApp. Selon le rapport Reuters Digital Media 2019, la confiance générale dans les médias était de 48 % au Brésil tandis que dans le cas des médias sociaux, elle baissait à 31 %. S’y ajoute le phénomène des « fake news », qui trouvent dans ces derniers un terrain fécond à leur propagation rapide, ce problème étant accentué par la place de premier plan occupée par WhatsApp lors de la dernière campagne38. Ainsi, l’association courante entre l’application et la dissémination de fausses nou­velles peut avoir engendré une certaine gêne chez les enquêtés, qui ne souhaitent pas être perçus comme ayant participé à ce phénomène.

49De façon complémentaire, nous pouvons égale­ment souligner l’influence du profil des personnes sondées sur les réponses données à cette question. Du fait que la plupart d’entre elles sont titulaires de diplômes supérieurs, elles seraient davantage réticentes à assumer l’emploi de moyens « moins nobles » dans leurs pratiques informationnelles.

Conclusion

  • 39 Selon Norris, P. (2000). A Virtuous Circle…, op.cit.

50Les éléments relevés dans cet article montrent les défis que la dernière élection brésilienne a posés aux communicants politiques et, plus largement, au paradigme des campagnes postmodernes39. Le nouveau système de communication, fortement orienté vers les stratégies numériques et surtout les services de messageries instantanées, fait basculer la relation entre les campagnes et les citoyens. Les frontières entre les actions profes­sionnelles (équipes de campagne) et celles spon­tanées (citoyens) aussi bien qu’entre les sphères publique et privée, sont devenues beaucoup plus poreuses qu’auparavant.

  • 40 Voir Santos, J. G. B. dos. (2019). « Mobile networks … », art.cit.

51L’importance des conversations politiques pen­dant les élections brésiliennes de 2018 semble indéniable, ainsi 92 % des répondants ont déclaré avoir reçu des informations politiques via Whats-App et 68 % indiqué en avoir envoyées. Or, ces flux sont loin d’avoir lieu indépendamment des pôles de communication des campagnes. Le fait que le pourcentage des personnes ayant relayé des contenus politiques sur l’application soit nette­ment plus élevé que celui correspondant aux gens qui en ont reçus suggère le caractère stratégique des actions de dissémination d’informations. Les logiques de réplication et l’animation des conversations dans ces espaces par des citoyens dépendent des informations susceptibles d’être commentées, répliquées, renvoyées, autrement dit, du fait d’avoir un effet mobilisateur chez les usagers-électeurs. Même si ces flux se produisent désormais dans des contextes de communication dont l’architecture est moins ouverte, comme WhatsApp, cela ne veut pas dire pour autant que la dimension « virale » d’une telle circulation soit affaiblie40.

52À cet égard, les conversations groupées sont apparues comme des espaces privilégiés de diffusion de contenus politiques. Bien que ces groupes puissent être structurés autour de la campagne elle-même (pour soutenir un candidat, par exemple), la circulation des messages de cette nature semble s’opérer de façon plus intense dans des groupes liés à des réseaux d’interconnaissances, formés antérieurement aux liens constitués en ligne.

53Contrairement à l’importance des data pour les stratégies sur les médias sociaux, tels que Face­book, Twitter et Instagram, l’architecture fermée de WhatsApp empêche des actions de micro-ciblage des publics, ce qui freine la communi­cation professionnelle conçue par les équipes de campagne, surtout en termes d’accessibilité aussi bien que de légitimité à communiquer dans un tel environnement, dont les liens s’articulent autour des relations interpersonnelles. En somme, la porosité entre les espaces publics et privés, aussi bien que la vitesse de circulation d’informations entre ces deux dimensions, constituent sans conteste des enjeux pour les experts en communication politique ayant joué, jusqu’à une époque récente, un rôle central dans la communication électorale au Brésil. S’y ajoute le fait que ces espaces deviennent un terrain privilégié pour des campagnes négatives. La nature diffusionniste de cette application favorise la propagation rapide des contenus dans cet espace, ce qui rend diffi­ciles le suivi et le contrôle des flux. Étant donné la généralisation du contexte de désinformation, l’attention à cette dynamique devient d’autant plus cruciale.

54Enfin, nos résultats suggèrent que, si la conver­sation entre les électeurs possède une dynamique complexe au-delà des possibilités d’action des communicants professionnels, elle ne s’anime pas toute seule. Le rôle des professionnels demeure en effet indispensable, soit pour fonctionner en tant que point de départ d’une information (ou d’une contre-information), soit afin d’orienter les électeurs vers des sources d’informations plus fiables. Cet article corrobore ainsi les résultats de l’étude de Viktor Chagas, Michelle Modesto et Dandara Magalhães sur les usages politiques du mème « Le Brésil va devenir le Venezuela » (O Brasil vai virar uma Venezuela, en portugais) dans les groupes de soutien de Bolsonaro en 2018. Outre l’association de la crise du pays voisin au gouvernement du PT, ces auteurs affirment que l’étude des messages permet d’identifier des indices d’une stratégie dans la dissémina­tion des contenus sur les groupes WhatsApp analysés visant à mettre en place un dispositif de campagne négative fondée sur la rhétorique de la peur. L’observation du comportement de certains usagers en termes de régularité des envois et des thèmes des publications, ainsi que des moments de la journée où l’interaction est la plus importante, a amené ces chercheurs à rela­tiviser la supposée « spontanéité » de la création et du fonctionnement des groupes et à y voir une action professionnelle organisée.

  • 41 À l’instar de la création d’agences spécialisées dans la production de contenus politiques pour les (...)

55Ces résultats conduisent à considérer que le changement majeur s’opère moins en ce qui concerne le professionnalisme des équipes de campagne qu’à propos des caractéristiques des acteurs appartenant à ces dernières, étant donné l’élargissement des chaînes de production de l’information à l’heure actuelle41.

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Notes

1 Avritzer, Leonardo. O pêndulo da democracia. São Paulo, Todavia, 2019.

2 Ce mélange est évident dans la devise de campagne de Jair Bolsonaro : Brasil acima de tudo, Deus acima de todos (« Brésil au-dessus de tout, Dieu au-dessus de tous »).

3 L’enquête TIC Domicílios 2018 a indiqué que 70 % des Brésiliens utilisaient internet. Au sein des classes populaires, 85 % le faisaient exclusivement via des téléphones portables. Pour consulter la synthèse de l’étude, voir : https://www.cetic.br/media/analises/tic_domicilios_2018_coletiva_de_imprensa.pdf consulté le 6 avril 2020.

4 Norris, P. (2000). A Virtuous Circle : Political Communications in Postindustrial Societies. Cam­bridge, Cambridge University Press. doi :10.1017/CBO9780511609343.008.

5 Voir : Albuquerque, A. (2000). « Um outro quarto poder : imprensa e compromisso político no Brasil ». Contracampo, n. 4, p. 23-57 ; Albuquerque, A.(1999). « Aqui você vê a verdade na tevê : a propaganda política na televisão ». Niterói, UFF. Albuquerque, A. (1994). « A campanha presidencial no Jornal Nacional : observações preliminares ». Comunicação & Política (O enredo eleitoral). Rio de Janeiro, Cebela, p. 23-40. Gomes, W. (2004). Transformações da política na era da comunicação de massa. Sao Paulo, Paulus. Lima, V. (1990). « Televisão e Política : hipótese sobre a eleição presidencial de 1989 ». Comunicação & Política, São Paulo, SP, v. 9, n.11, p. 29-54. Porto, M. (1997). « As imagens e a expressão de valores políticos : sugestões para a pesquisa sobre televisão ». Textos de Cultura e Comunicação, Salvador, n.37/38, p. 167-186 ; Porto, M. (1996). « Televisão, audiências e hegemonia : notas para um modelo alternativo na pesquisa de recepção ». Comunicação & Política, Rio de Janeiro, v. III, n.3, p. 120-145 ; Porto, M. (1995). « Telenovelas e política : o CR-P da eleição presidencial de 1994 ». Comunicação & Política, Rio de Janeiro, v. 1, n.3, p. 55-76, 1995. Rubim, Antônio (2001). « Novas configurações das eleições na idade mídia ». Opinião Pública, 7(2), p. 168-181.

6 Les « Maharajas » faisaient référence à de hauts fonctionnaires ayant des salaires très élevés et consi­dérés comme disproportionnés. L’image du “chasseur des Maharajas” est devenue l’icône du candidat néo-libéral dans la presse.

7 Selon la loi électorale brésilienne, l’État offre du temps à l’antenne aux candidats de chaque parti ou aux coalitions de partis. Leurs interventions sont program­mées durant les dernières semaines précédant le scrutin et le temps attribué est proportionnel à l’importance de chaque groupe à la Chambre des Députés. Afonso de Albuquerque et Marcia Dias Ribeiro mettent l’accent sur les caractéristiques du modèle brésilien de propa­gande politique télévisuelle, dont la spécificité repose sur la capacité à associer efficacité communicationnelle et gratuité de l’accès à la télévision. Voir : Albuquerque, Afonso de ; Dias Ribeiro, Marcia (2002). « Propagan­da política e a construção da imagem partidária no Brasil ». Civitas - Revista de Ciências Sociais, vol. 2, núm. 2, dezembro, p. 309-326.

8 Gomes, Wilson (2004). Transformações da políti­ca..., op.cit., p. 292, notre traduction.

9 Voir : Putnam, R. D. 2000. Bowling Alone : The Collapse and Revival of American Community. New York : Simon & Schuster.

10 Voir Norris, P. (2000). A Virtuous Circle : Political Communications…, op. cit.

11 Cardon, D. (2010). La démocratie internet. Pro­messes et limites. Paris, Seuil et La république des idées.

12 Valeriani, A., et Vaccari, C. (2018). « Political talk on mobile instant messaging services : a comparative analysis of Germany, Italy, and the UK ». Information Communication and Society, 21(11), 1715–1731. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1080/1369118X.2017.1350730

13 Santos, J. G. B. dos. (2019). « Mobile networks and the Brazilian 2018 Presidential Election : from techno­logical design to social appropriation ». BrazilStudies Program One Pager, (2), 5–6.

14 Cf. Enquête TIC Domicilios 2018 citée précé­demment.

15 Boyd, D. M., et Ellison, N. B. (2007). « Social network sites : Definition, history, and scholarship ». Journal of Computer-Mediated Com­munication, 13(1), 210–230. http://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1111/j.1083-6101.2007.00393.x

16 Santos, J. G. dos, Freitas, M., Aldé, A., Santos, K., et Cunha, V. C. C. (2019). « WhatsApp, política mobile e desinformação : a hidra nas eleições presidenciais de 2018 ». Comunicação e Sociedade, 41(2), p. 307–334.

17 Voir notamment : Santos, J. G. B. dos. (2019). Mobile networks and the Brazilian 2018 Presidential Election : from technological design to social appro­priation. Brazil Studies Program One Pager, (2), 5–6. ; Evangelista, R., et Bruno, F. (2019). « WhatsApp and political instability in Brazil : targeted messages and political radicalisation ». Internet Policy Review, 8(4), 1–23. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.14763/2019.4.1434 ; Chagas, Viktor ; Modesto, Michelle ; et Magalhães, Dandara (2019). « O Brasil vai virar Venezuela : medo, memes e enquadramentos emocionais no WhatsApp pró-Bol­sonaro ». Esferas, (14), 1. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.31501/esf.v0i14.10374

18 Pour reprendre le titre du documentaire portant sur le rôle des marketeurs dans la vie politique brésilienne dirigé par la politologue Alessandra Aldé et l’histo­rien Vicente Ferraz en 2010. Voir : Buarque, Cristina (2010). « Fragmento do documentário Arquitetos do Poder e conversa da diretora Alessandra Aldé ». Revista Estudos Políticos, 1.2, p. 117-120.

19 Benkler, Yochai ; Faris, Robert and Roberts, Hal (2018). Network Propaganda : Manipulation, Disin­formation, and Radicalization in American Politics, Oxford, Oxford University Press.

20 Voir notamment : Coleman, S. (2005). « New mediation and direct representation : reconceptu­alizing representation in the digital age ». New media & society, Vol7(2), p. 177–198. DOI : 10.1177/1461444805050745 ; Dahlgren, P. (2012). « Web et participation politique : quelles promesses et quels pièges ? », Questions de Communication, 21, p. 13–24 ; Monnoyer-Smith, L., et Wojcik, S. (2014). « La participation politique en ligne, vers un renouvel­lement des problématiques ? », Participations, p. 5–29.

21 Voir Howard, Philip N. (2006). New media campaigns and the managed citizen. Cambridge : Cambridge University Press, p. 1-2, notre traduction.

22 Voir Badouard, Romain (2017). Le désenchante­ment de l’internet. Désinformation, rumeur et propa­gande. Limoges, FYP éditions.

23 Voir Henrie, Kenneth ; Gilde, Christian (2019). « An examination of the impact of astroturfing on nationalism : a persuasion knowledge perspective ». Social Sciences, 8(38), p. 1-11.

24 Un reportage publié dans le journal A Folha de São Paulo en février 2017 a montré comment se structure la fabrication des « fake news » au Brésil. Voir : https://www1.folha.uol.com.br/ilustrissima/2017/02/1859808-como-funciona-a-engrenagem-das-noticias-falsas-no-brasil.shtml , consulté le 7 février 2020.

25 Voir Théviot, Anaïs (2016). « Web-stratège : un métier politique comme les autres ? Analyse com­parative des profils sociologiques des acteurs de la communication numérique du PS et de l’UMP ». In Charles Gadéa et Stéphane Olivesi (dir.). Professions et professionnels de la communication, Toulouse, Octares Éditions, p. 103-120.

26 Voir Gomes, W., Fernandes, B., Reis, L., et Silva, T. (2009). « ‘Politics 2.0’ : a campanha online de Barack Obama em 2008 ». Revista de Sociologia e Política, 17(34), p. 29-43.

27 Voir Gomes, W., Fernandes, B., Reis, L., et Silva, T. (2009). « ‘Politics 2.0’... », art. cit., p. 32, notre traduction.

28 Voir Bucci, Eugênio (2019). « Seriam as fake news mais eficazes para campanhas de direita ? Uma hipó­tese a partir das eleições de 2018 no Brasil », Novos Olhares, vol. 8, n° 2, p. 21-29.

29 Creswell, J.W. (2004). Educational Research. Planning, Conducting, and Evaluating Quantitative and Qualitative Research (2 ed.). Pearson Education, Upper Saddle River, USA. La méthode traditionnelle de la boule de neige est basée sur l’application, sur place, des questionnaires et la demande de recomman­dation d’autres personnes susceptibles de participer à l’étude. Comme l’affirme Pastinelli (2011), le terrain numérique, tout comme les autres, a ses spécificités. Cela entraîne l’adéquation des méthodes utilisées, sans nécessairement invalider la logique des méthodes traditionnelles. Voir : Pastinelli, M. (2011). « Pour en finir avec l’ethnographie du virtuel  ! Des enjeux méthodologiques de l’enquête de terrain en ligne ». Anthropologie et Sociétés, 35, p. 35–52.

30 Voir Santos, J. G. B. dos. (2019) : « Mobile networks … », art.cit.

31 Au Brésil, la post-graduation désigne les études au niveau master et/ou doctorat aussi bien que des formations spécialisées de type MBA. Au titre de cette enquête, nous considérons toutes ces modalités confondues.

32 Chaque groupe WhatsApp dispose d’au moins un modérateur, qui est la personne responsable de l’ajout et l’exclusion de membres aussi bien que de l’éven­tuelle suppression du groupe.

33 Voir Santos, J. G. B. dos. (2019). « Mobile networks… », art.cit. Le fait que ces groupes soient ouverts, avec des liens publics, permet également aux chercheurs de travailler plus librement sur les données circulant dans ces contextes.

34 Voir Evangelista, R., et Bruno, F. (2019) : « Whats-App and political… », art.cit. et Chagas, Viktor ; Modesto, Michelle ; et Magalhães, Dandara (2019). « O Brasil vaivirar Venezuela… », art.cit.

35 Étant donné que les usagers membres des conver­sations groupées appartiennent souvent à plusieurs groupes à la fois, cette question était à choix multiples.

36 Voir Sousa, I. J. ; de Marques, F. P. J. Campanha negativa nas eleições de 2014. In Cervi, E. U., Mas­suchin, M. G., & Carvalho, F. C. De. (2016). Internet e eleições no Brasil. Curitiba : CPOP. Retrieved from https://creativecommons.org/licenses/ by/3.0/br/legal­code, p. 211, notre traduction.

37 Voir Walter, A. S., et Vliegenthart, R. (2010). « Negative campaigning across different communication channels : Different ball games ? ». International Journal of Press/Politics, 15(4), 441–461. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1177/1940161210374122

38 Voir Chagas, Viktor ; Modesto, Michelle ; et Magalhães, Dandara (2019). « O Brasil vai virar Venezuela…, art.cit. Voir aussi : Bucci, Eugênio (2019). « Seriam as fake news mais eficazes para campanhas de direita ? Uma hipótese a partir das eleições de 2018 no Brasil », Novos Olhares, vol. 8, n° 2, p. 21-29.

39 Selon Norris, P. (2000). A Virtuous Circle…, op.cit.

40 Voir Santos, J. G. B. dos. (2019). « Mobile networks … », art.cit.

41 À l’instar de la création d’agences spécialisées dans la production de contenus politiques pour les équipes de campagne des candidats lors de la dernière élection au Brésil. Voir : https://www1.folha.uol.com.br/poder/2020/02/ex-funcionario-de-empresa-de-disparo-em-massa-mente-a-cpi-e-insulta-reporter-da-folha.shtml consulté le 9 février 2020.

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Pour citer cet article

Référence papier

Camila Moreira Cesar et Nina Fernandes Dos Santos, « Quelle place pour les communicants politiques à l’ère des campagnes WhatsApp au Brésil ? »Quaderni, 101 | 2020, 77-96.

Référence électronique

Camila Moreira Cesar et Nina Fernandes Dos Santos, « Quelle place pour les communicants politiques à l’ère des campagnes WhatsApp au Brésil ? »Quaderni [En ligne], 101 | Été 2020, mis en ligne le 02 janvier 2023, consulté le 13 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/quaderni/1737 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/quaderni.1737

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Auteurs

Camila Moreira Cesar

Université Sorbonne Nouvelle Paris 3

Nina Fernandes Dos Santos

Institut National de Science et Technologie en Démocratie Numérique / Brésil

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Droits d’auteur

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