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AccueilNuméros99-100DossierHommage à Lucien Sfez

Texte intégral

1Enseignant reconnu et apprécié, spécialiste des questions de communication et auteur de nombreux ouvrages de référence, Lucien Sfez est mort le 30 décembre 2018 à l’âge de 81 ans.

2Questionneur des mythologies de notre temps, artisan de concepts nouveaux et décrypteur visionnaire des utopies émergentes, Lucien Sfez, professeur émérite à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, nous laisse une œuvre importante composée d’une vingtaine d’ouvrages, pour beaucoup devenus des classiques de philosophie politique. Cette œuvre multidisciplinaire à la fois épistémologique, polémique et prospective, est une déconstruction permanente et une traque acharnée des idéologies saisies à leur naissance.

3Lucien Sfez, mort le 30 décembre 2018, à Paris, à l’âge de 81 ans, commence sa carrière univer­sitaire à 25 ans comme assistant à la faculté de droit de Paris où il soutient son doctorat d’État en 1964, sous la direction de Jean Rivero. Il est ensuite durant deux années, chargé de cours à la faculté de droit de Strasbourg. En 1966, il obtient son agrégation de droit public et de science politique, et publie sa thèse sous le titre Essai sur la contribution du doyen Hauriou au droit administratif français.

4Nommé maître de conférences agrégé à la faculté de droit de Lille en 1967, il rejoint l’université Paris-Dauphine en 1968. Deux ans plus tard, il y est nommé professeur titulaire de science politique ; il y enseignera jusqu’en 1989. Il critique l’idéologie managériale qui s’empare de l’État dans L’Administration prospective (Armand Colin, 1970). Puis il ouvre un nouveau front qui va marquer, avec la critique de l’idéo­logie de la décision dans Critique de la décision (FNSP, 1973), et voit advenir la crise profonde de la représentation politique dans La Politique symbolique (PUF, « Quadrige »), paru d’abord sous le titre L’Enfer et le Paradis en 1978. Il poursuit sa critique des grandes figures symbo­liques dans Leçons sur l’égalité (FNSP, 1984).

Attentif, rigoureux et exigeant

5Simultanément à son activité d’enseignant-chercheur, toujours à l’écoute, attentif à ses étudiants, rigoureux et exigeant, il exerce à partir de 1983, la présidence du Conseil national de la communication audiovisuelle (CNCA). Créé par la loi du 27 juillet 1982, le CNCA était un orga­nisme consultatif contribuant à la régulation du secteur audiovisuel. Composé d’une cinquantaine de membres représentant la société civile, il fut un lieu d’échanges et de dialogue intense entre les forces sociales, économiques, culturelles et cultuelles de la société française. Lucien Sfez en fut l’animateur durant trois ans, jusqu’à sa suppression par la loi Léotard de 1986.

6C’est toujours à Dauphine qu’il fonde alors Quaderni, revue de la communication qui fête son 100e numéro. Après la publication remarquée de Critique de la communication (Seuil) en 1988, il entreprend la direction du Dictionnaire critique de la communication en deux volumes, publié aux PUF en 1993. Travailleur infatigable, Lucien Sfez a été aussi directeur de la collection « La Politique éclatée » aux Presses universitaires de France.

7Professeur de science politique à l’université Paris-I Sorbonne de 1989 à 2005, il y dirigea l’École doctorale de science politique, le DEA « Communication, technologies et pouvoir » et le Centre de recherche et d’études sur la décision administrative et politique. Durant ces années, la réflexion de Lucien Sfez s’est concentrée sur la technique, question nodale des sociétés occi­dentales. Il s’attaque à la critique des imaginaires technologiques, dont le rêve biotechnologique. En 1995, il présente dans La Santé parfaite (Seuil), une théorie de l’utopie technologique puis dresse dans Technique et idéologie : Un enjeu de pouvoir (Seuil, 2002), une synthèse des rapports entretenus entre la politique et la technique.

8À la vingtaine d’ouvrages personnels traduits dans de nombreuses langues, Lucien Sfez a ajouté la direction de plusieurs ouvrages collectifs, fruits de colloques ouvrant des problématiques neuves, notamment au Centre culturel international de Cerisy-la-Salle (Manche).

9Un des grands mérites de Lucien Sfez a été de proposer une des premières analyses globales des recompositions idéologiques à la fin du XXe siècle, après la ruine des « grands récits ». À l’opposé de ceux qui s’étaient habitués à la « fin des idéologies » ou à l’entrée dans la « postmo­dernité », Lucien Sfez voyait se profiler un nouvel agencement du savoir et du pouvoir autour de la religion de la communication et des utopies technologiques.

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Pour citer cet article

Référence papier

Pierre Musso, « Hommage à Lucien Sfez »Quaderni, 99-100 | 2020, 7-8.

Référence électronique

Pierre Musso, « Hommage à Lucien Sfez »Quaderni [En ligne], 99-100 | Hiver 2019-2020, mis en ligne le 05 janvier 2020, consulté le 17 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/quaderni/1530 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/quaderni.1530

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Auteur

Pierre Musso

Institut d’Études Avancées de Nantes

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Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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