Navigation – Plan du site

AccueilNuméros37-38Un regard sur l’évolution de l’ad...À la recherche de hauts fonctionn...

Un regard sur l’évolution de l’administration fédérale

À la recherche de hauts fonctionnaires fédéraux. Une analyse du recrutement et de la sélection des hauts fonctionnaires, vingt ans après la réforme Copernic

Annie Hondeghem et Karen Cannoot

Résumé

L'introduction du système de mandat a été l'un des aspects les plus importants de la réforme Copernic. Cela s'est accompagné d'un nouveau système de recrutement et de sélection dont l'objectif était d'attirer des cadres (externes) testés pour leurs capacités de gestion. Cet objectif n'a été que partiellement atteint. Dans cet article, nous analysons les données relatives au recrutement et à la sélection des hauts fonctionnaires pour la période 2018-2021. Nous comparons les résultats avec les données du début de la réforme Copernic. L'analyse montre que les candidats aux postes de haut niveau sont comparativement moins nombreux, que l'entretien avec le jury reste déterminant dans la sélection et que le nombre de lauréats est limité mais représentatif des deux groupes linguistiques.

Haut de page

Texte intégral

I. Introduction

1L'introduction du système de mandat a été l'un des aspects les plus importants de la réforme Copernic (Hondeghem & Depré, 2005). Les hauts fonctionnaires ne seront plus nommés à vie, mais recevront un mandat de six ans. Le renouvellement de leur mandat dépendait de l'évaluation de leurs performances. Le système de mandat devait donner forme à l'un des grands principes de la nouvelle gestion publique, à savoir « laisser les gestionnaires gérer » : leur donner suffisamment de responsabilités, mais aussi leur donner la possibilité de rendre des comptes (Hood, 1991).

2La réforme Copernic devait garantir l'arrivée à la tête de l'administration fédérale de hauts fonctionnaires au profil « nouveau ». Par conséquent, les postes de haut niveau ont également été ouverts aux externes, car l'objectif explicite était d'attirer au gouvernement fédéral des personnes ayant une expérience de gestion dans le secteur privé (Pelgrims, 2005). Dans cette optique, la procédure de sélection a également été revue.

3L'objectif de cet article est d'examiner si le gouvernement fédéral parvient à recruter et à sélectionner les hauts fonctionnaires nécessaires pour diriger les administrations fédérales, vingt ans après la réforme Copernic. Les questions de recherche sont les suivantes :

  • quel est le profil recherché des hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral ?

  • comment se déroule le processus de sélection ?

  • comment améliorer le recrutement et la sélection des hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral ?

4Nous tentons de répondre à ces questions de recherche en analysant les postes vacants au cours de la période 2018-2021. Au total, 123 vacances de postes de haut niveau ont été publiées au cours de cette période. Après l'analyse, nous comparons avec les résultats de la recherche du début de la réforme Copernic (Pelgrims, 2005).

II. Recrutement et sélection

5Le recrutement et la sélection sont une phase cruciale du processus RH. Après tout, cela doit permettre à l'organisation de recruter les personnes adéquates nécessaires sur le marché du travail. Dans un contexte gouvernemental, ce processus est soumis à des exigences spécifiques de transparence et d'égalité de traitement. Dans ce qui suit, nous abordons certains aspects du processus de R&S en général et du recrutement et de la sélection des hauts fonctionnaires fédéraux en particulier.

II.1. Général

6Bien que le recrutement et la sélection soient souvent mentionnés dans le même souffle, il est important de faire la distinction entre ces deux sous-processus. Le recrutement peut être défini comme « toutes les activités menées par l'organisation dans le but principal d'identifier et d'attirer des employés potentiels » (Barber, 1998, p. 4). Le processus de recrutement détermine les employés qui entreront dans l'organisation. Il semble donc naturel que le recrutement affecte toutes les autres fonctions de l'organisation. Le recrutement a un impact considérable sur l'efficacité de l'organisation. Les postes qui restent vacants pendant de longues périodes coûtent de la productivité à l'organisation et coûtent beaucoup de temps et d'efforts au département des ressources humaines. En outre, les postes vacants créent également une instabilité émotionnelle et une baisse du moral des employés dans l'organisation lorsque d'autres employés doivent assumer ces tâches (Choudhury, 2012).

7L'un des plus grands défis du recrutement est la guerre des talents. De nombreuses organisations sont en concurrence pour attirer et retenir un petit bassin de talents (Beechler & Woodward, 2009). Il est donc important pour les organisations de prêter attention à la gestion des talents (Craig, 2015). Dans ce contexte, les talents pour les postes de direction sont particulièrement rares et recherchés (Michaels et al, 2001). Ainsi, le recrutement de talents pour les postes de haut niveau entraîne une productivité et une rentabilité accrues pour l'organisation, qui dépassent largement le coût salarial (Choudhury, 2012).

8Une technique courante utilisée par les organisations pour attirer les talents consiste à recourir à l'image de marque de l'employeur. Ceci est une technique visant à créer une image d'employeur attrayante afin de créer un lien entre l'organisation et les talents qu'elle tente d'attirer et de retenir (Edwards, 2010). La création d'une proposition de valeur pour l'employeur (PVE) est une promesse faite aux employés actuels et futurs dans l'espoir que l'organisation soit perçue comme attrayante. Une PVE attrayante permet à l'organisation d'économiser de l'argent, de réduire la rotation du personnel et d'augmenter la productivité (Choudhury, 2012).

9Une fois que les employés potentiels ont été identifiés, il s'agit de sélectionner les candidats les plus aptes grâce à des techniques de sélection appropriées. Dans le contexte du processus R&S, cela se traduit par la vérification des similitudes entre la personne et l'organisation ou le poste (en anglais : person-organisation fit ou person- job fit). Le processus de sélection se compose de trois phases (Lievens, 2014). Dans un premier temps, les caractéristiques du poste sont identifiées par le biais d'une description de fonction et d'une analyse des compétences. Dans un deuxième temps, les caractéristiques des individus sont mesurées en appliquant différentes techniques de sélection. Enfin, les informations issues des étapes précédentes sont combinées de manière à ce que des conclusions puissent être faites sur l'adéquation du candidat au poste.

10Les organisations utilisent divers critères et techniques de sélection pour prédire le succès futur des candidats dans des emplois spécifiques ou dans l'organisation (Lievens, 2014). Sur la base de ces prévisions de performances professionnelles, ils choisiront d'offrir ou non un emploi aux candidats. Les critères utilisés sont dérivés, entre autres, des descriptions de fonction, de la mission et de la vision de l'organisation. Dans le processus de sélection, des outils sont utilisés pour prédire les critères de sélection choisis. Certaines techniques de sélection ont une meilleure validité prédictive que d'autres (Lievens, 2014). Par exemple, des études menées par Arthur et al. (2003) et Hermelin et al. (2007) montrent qu’un assessment est l'un des meilleurs prédicteurs de la réussite managériale ultérieure.

11Dans le cas spécifique du gouvernement, la question se pose de savoir si certains critères de sélection sont plus importants pour prédire le succès futur des candidats. Ici se pose la question de la spécificité d'un contexte gouvernemental par rapport à un contexte du secteur privé. Les recherches sur la motivation des fonctionnaires soulignent que « l'engagement envers l'intérêt public » est une attitude importante pour les fonctionnaires, ce qu’on appelle PSM ou public service motivation (Perry & Hondeghem, 2008). Ce n'est pas seulement un facteur d'attraction pour travailler dans le gouvernement (Carpenter et al., 2012), mais cela conduirait également à de meilleures performances (Brewer, 2008). La GRH fondée sur les faits impliquerait donc d'utiliser le PSM ou la motivation du service public comme critère de sélection dans les procédures de sélection du gouvernement.

II.2. Recrutement et sélection des hauts fonctionnaires fédéraux

  • 3 Les deux arrêtés royaux ont été modifiés plusieurs fois depuis, mais nous nous référons ici à la ve (...)

12Certaines procédures doivent être suivies lors du recrutement et de la sélection des hauts fonctionnaires fédéraux. Le Selor, en tant qu'organe central du gouvernement fédéral, en est responsable. La procédure est fixée dans l'AR du 29 octobre 2001 pour les fonctions de management et dans l'AR du 2 octobre 2002 pour les fonctions d’encadrement.3

Le processus de recrutement implique une offre d'emploi qui est publiée sur le site web de Selor. Les candidats doivent postuler via l'outil en ligne.

La sélection comprend les cinq étapes suivantes :

  • un processus de sélection formel vérifiant que les candidats répondent aux critères en termes de diplôme et d'expérience de gestion ;

  • un assessment testant les capacités de gestion ;

  • une épreuve orale au cours de laquelle les candidats sont interrogés par un jury sur des sujets de fond ;

  • un classement final dans lequel les candidats sont classés en quatre catégories : A (très approprié), B (approprié), C (moins approprié), D (non approprié) ;

  • une décision sur la nomination

13Les quatre premières étapes sont de la responsabilité de Selor, tandis que la dernière étape est de la responsabilité du fonctionnaire dirigeant ou du ministre principal. C'est un secret public que certains équilibres sont généralement recherchés pour les postes les plus élevés, de sorte que les nominations font souvent aussi partie d'accords au sein du gouvernement (Hondeghem, 2011).

  • 4 L’AR du 20 décembre 2022 change à nouveau la procédure de sélection :
    - Selor est remplacé par le SP (...)

Cette procédure de recrutement et de sélection a quelque peu évolué au cours des vingt dernières années4. Les principaux changements sont les suivants :

  • l’assessment a été remplacée par un assessment informatisé ;

  • les candidats peuvent obtenir des exemptions s'ils ont participé avec succès à un assessment informatisé d'autres procédures de sélection ;

  • les différentes étapes du processus de sélection sont exclusives : si l'on ne passe pas une étape particulière, on ne peut pas participer à l'étape suivante.

14En comparant les résultats obtenus au début de la réforme Copernic, nous verrons que ces changements ont eu un impact sur le déroulement et les lauréats du processus de sélection.

III. Méthodologie

15Pour l'étude, nous avons analysé tous les postes vacants de hauts fonctionnaires fédéraux pendant la période 2018-2021. Au total, 123 postes vacants étaient concernés, dont la répartition était la suivante.

Graphique 1. Évolution du nombre d'emplois vacants par an

Graphique 1. Évolution du nombre d'emplois vacants par an

Ainsi, sur les 123 postes vacants, 28 % datent de 2018, 21 % de 2019, 14 % de 2020 et 37 % de 2021. La baisse en 2020 est principalement due à la crise Covid-19.

16En ce qui concerne le niveau hiérarchique des postes, ce sont principalement des postes vacants de niveau N-1 qui ont été publiés. Les postes vacants de niveau N étaient plus fréquents que ceux de niveau N-2 ou N-1 encadrement.

La figure 1 ci-dessous illustre cette répartition.

Figure 1. Répartition des postes vacants par niveau

Figure 1. Répartition des postes vacants par niveau

Figure 2 : Répartition des postes vacants par grade

Figure 2 : Répartition des postes vacants par grade

17En ce qui concerne le grade des postes, les postes de directeur général sont les plus nombreux. Les postes N-1 encadrement étaient également nombreux. Ces informations sont visibles dans la figure 2 ci-dessus.

18Pour tous ces postes vacants, nous avons tout d'abord analysé le texte du poste vacant. Quelles sont les tâches attendues des hauts fonctionnaires et quel est le profil recherché ?

19En outre, des informations ont été recueillies sur le processus de sélection de ces postes vacants. Combien de candidats y a-t-il eu ; comment cela a-t-il évolué au cours de la procédure de sélection ; quel est la durée de la procédure de sélection ; combien de lauréats la procédure a-t-elle produit ?

20Pour cette information, nous avons pu utiliser un fichier Excel mis à disposition par la DG Recrutement et Développement du SPF BOSA. Il s'agit donc de données administratives primaires sur tous les postes vacants au cours de la période sélectionnée. Cependant, les données ont été collectées en vue du processus de sélection lui-même, et non dans le but de mener des recherches. Cela implique également que certaines données qui auraient pu être intéressantes pour l'étude n'ont pas été collectées. Par exemple, la base de données ne contient pas de données sur l'origine des candidats (secteur public, secteur privé). Les données sur le genre sont également limitées à la dernière étape du processus de sélection (les lauréats). Les données sur le rôle linguistique, en revanche, sont systématiquement enregistrées.

21La banque de données sur laquelle les analyses ont été effectuées pour cet article présente donc certains avantages, notamment en termes de fiabilité ; l'inconvénient étant que certaines analyses ne sont pas possibles en raison du manque de données. Par conséquent, il ne sera pas non plus possible d'effectuer une comparaison complète avec les données relatives au recrutement et à la sélection des hauts fonctionnaires au début de la réforme Copernic.

IV. Résultats5

IV.1. Profil recherché

22Pour savoir quel profil de hauts fonctionnaires est recherché, nous avons d'abord examiné les textes relatifs aux postes vacants. Il en ressort que les éléments les plus importants du contenu du travail des mandataires dans le gouvernement fédéral sont liés aux tâches de gestion, à la participation et à l'organisation de collaborations et de consultations, à la garantie de la performance, à la mise en œuvre de politiques et au leadership. L'établissement de rapports et l'évaluation des performances sont fréquemment mentionnés comme un élément fondamental de la fourniture d'un service de qualité. En outre, la coordination, la représentation, le travail en réseau, l'élaboration de stratégies et la motivation des employés sont fréquemment cités comme des éléments essentiels de l'exercice des fonctions du mandat. La négociation est sporadiquement mentionnée comme contenu du travail des postes de haut niveau.

23En outre, les postes vacants donnent également une image des valeurs générales auxquelles le gouvernement attache de l'importance en tant qu'employeur. La numérisation, le comportement participatif, la connaissance et l'expertise, l'innovation et la responsabilité sont, dans cet ordre, principalement cités ou sous-entendus comme des valeurs souhaitables pour les fonctionnaires dirigeants au sein du gouvernement fédéral. L'agilité, l'orientation client et la durabilité sont également citées comme des valeurs fondamentales de l'administration publique. Enfin, l'importance d'être proactif, la pratique fondée sur des preuves, la transparence, le bien-être et la fiabilité sont sporadiquement mentionnés dans les offres d'emploi. Il est intéressant de noter que chaque poste vacant contient différents éléments d'inclusivité. Toutes les offres d'emploi mentionnent également l'importance de l'égalité de traitement et de l'égalité des chances pour les candidats, l'objectivité et l'égalité des sexes parmi les titulaires de mandats.

24Dans la section « Offre », les postes vacants mentionnent toujours que le salaire des titulaires de mandats est déterminé en fonction de la fourchette salariale attribuée à un poste spécifique. Toutefois, dans certains cas, en 2020 et 2021, une voiture de fonction et des avantages dits « divers » sont nommés. En outre, dans un cas, un régime de pension complémentaire est prévu.

25Les postes vacants énumèrent en outre les compétences requises pour les hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral. Ces compétences sont toujours classées dans la catégorie des compétences génériques ou techniques. Il est frappant de constater que pour tous les postes, les mêmes compétences générales sont mentionnées dans une large mesure. Ce n'est qu'exceptionnellement que certaines compétences, qui sont évaluées lors de l’assessment informatisé, ne sont pas mentionnées. Les exigences permanentes comprennent une certaine capacité d'analyse, une pensée flexible et innovante, une capacité de vision et d'intégration, des compétences en matière de direction et de développement d'individus et de groupes, de coopération, de mise en réseau et d'orientation client. En outre, la responsabilité, la réalisation d'objectifs, la persuasion, la négociation, les compétences en matière de communication, la loyauté et l'intégrité sont toujours mentionnées. Les éléments non permanents comprennent la gestion de l'organisation et le développement personnel. L'exigence de bilinguisme est également exceptionnellement absente.

26Les compétences techniques essentielles englobent une multitude d'exigences en matière de connaissances spécifiques et d'idées concernant l'organisation et le contexte spécifiques. Une proportion importante de ces exigences fait également référence à des connaissances et à une compréhension spécifiques des compétences de gestion. En outre, il est souvent fait référence à une capacité stratégique essentielle ou à la capacité de développer et de communiquer une vision. Des références sporadiques sont faites aux compétences de coopération, à la capacité d'établir et de maintenir des contacts, à la gestion de projets, à l'intérêt et au compromis.

27En résumé, les postes de vacance pour les hauts fonctionnaires fédéraux sont assez standardisés. Les références au contexte gouvernemental spécifique sont limitées. Bien que le modèle de compétences 5+1 du gouvernement fédéral ne s'applique pas aux hauts fonctionnaires, un grand nombre des compétences attendues peuvent néanmoins y être liées.

IV.2. Candidats et lauréats

IV.2.1. Général

28Pour l'ensemble des 123 postes vacants, une moyenne de 17 candidats a postulé. Dans l'ensemble, les candidats néerlandophones étaient plus nombreux que les candidats francophones. Le graphique 2 ci-dessous présente la progression générale des candidats dans la procédure de sélection. En moyenne, trois candidats ont été éliminés lors de la première phase, dont deux francophones et un néerlandophone. Cela signifie qu'en moyenne 14 candidats se rendent à l’assessment informatisé. En moyenne, quatre candidats y sont exemptés. La base de données ne fait pas de distinction entre les exemptions par groupe linguistique. Parmi les candidats qui ont participé à l'assessment informatisée, cinq en moyenne ont réussi. Là encore, le nombre de candidats francophones ayant réussi est inférieur au nombre de candidats néerlandophones ayant réussi. Au final, neuf candidats en moyenne ont été autorisés à passer à l'étape finale de la procédure de sélection. Pendant l'épreuve orale, sept candidats en moyenne sont éliminés.

Graphique 2. Evolution globale des candidats

Graphique 2. Evolution globale des candidats

29En moyenne, les procédures de sélection pour les postes de haut niveau donnent deux lauréats, un francophone et un néerlandophone. En d'autres termes, en moyenne, seuls deux des 17 candidats qui ont postulé s'avèrent convenir pour le poste. A première vue, l'assessment informatisé semble générer beaucoup d'échec. Ceci s’explique par le fait que certains candidats sont exemptés de cette phase dans la sélection. Dans la totalité de la procédure, l’épreuve orale pèse plus lourd. Bien que les candidats néerlandophones aient été plus nombreux tout au long de la procédure de sélection, il y a en moyenne autant de lauréats francophones que néerlandophones.

IV.2.2. Évolution dans le temps

30Au fil du temps, on constate que davantage de candidats ont postulé en moyenne par poste vacant sur la période 2018-2020. En 2021, ce nombre est tombé à 13 candidats par poste vacant. Le graphique 3 ci-dessous montre le nombre moyen et le total de candidats postulant à des postes de haut niveau par an. Il est intéressant de noter qu'il y a eu six postes pour lesquels moins de cinq personnes ont postulé. Cela s'est produit principalement en 2021 et deux fois en 2018.

Graphique 3. Nombre total et moyen de candidats par année

Graphique 3. Nombre total et moyen de candidats par année

31Comme le montre le graphique 4, l’évolution des candidats au cours de la procédure de sélection est assez similaire pour les différentes années. Il est clair qu’en 2021 le nombre de candidats est plus bas dans toutes les phases de la sélection. Néanmoins, le nombre de lauréats est finalement le même.

Au total, neuf postes vacants n'ont pas donné lieu à des lauréats. Ces postes vacants concernaient principalement des postes de 2018.

Graphique 4. Evolution des candidats par année

Graphique 4. Evolution des candidats par année

IV.2.3. Différences par niveau et par grade

32Les positions des niveaux N, N-1 et N-2 suivent généralement le gradient moyen global. Les postes de N-1 encadrement attirent beaucoup plus de candidats, avec une moyenne de 24 candidats par poste vacant, que les postes des autres niveaux. Ceci se traduit par un plus grand nombre de candidats pour les autres phases de la sélection.

33Parmi les postes de niveau N, la majorité se termine avec un seul lauréat. Pour les autres niveaux le résultat de la procédure est de deux lauréats. La progression des candidats par niveau est présentée dans le graphique 5 ci-dessous.

Graphique 5. Evolution des candidats par niveau

Graphique 5. Evolution des candidats par niveau

34Outre le niveau, il est intéressant d'examiner le grade de l'emploi. Certains postes attirent-ils plus de candidats, et le processus de sélection y est-il différent ? En particulier, les catégories de présidents, de directeurs généraux et de postes d’encadrement P&O (Personnel et Organisation) et ICT se distinguent. Les postes de président et d’encadrement attirent en moyenne plus de candidats. Cette différence est significative. Sur le nombre total de postes vacants, 39 avaient plus de 20 candidats. Certains postes de président, comme celui de président du comité exécutif du SPF BOSA, ont attiré un nombre exceptionnellement élevé de candidats.

Le graphique 6 montre l’évolution des candidats dans les postes vacants des différents grades.

Graphique 6. Evolution des candidats par grade

Graphique 6. Evolution des candidats par grade

IV.2.4. À propos des lauréats

35En fin de compte, la question la plus importante dans tout processus de sélection est de savoir si cela a permis de trouver de bons candidats. Les données des sections précédentes ont montré que les 123 postes vacants ont produit en moyenne deux lauréats. En moyenne, il s'agissait d'un lauréat néerlandophone et d'un lauréat francophone. Pour le gouvernement fédéral, où la parité entre les groupes linguistiques est un facteur important, cette constatation est frappante.

36Dans le tableau ci-dessous, nous examinons comment les lauréats se sont répartis entre les différents groupes d'emplois, ainsi que dans quelle catégorie (A, B) ils ont terminé. Comme indiqué, les catégories A et B signifient que le lauréat a été jugé très approprié et approprié respectivement.

Tableau 1. Répartition des lauréats par grade : moyenne

Grade

Nombre de lauréats total

Nombre moyen de lauréats

St Dev

Moyenne A NL

Moyenne A FR

Moyenne B NL

Moyenne B FR

Président

23

2

1.28

0

0

1

1

Directeur

22

2

1.40

1

1

0

1

Directeur général

88

2

1.66

0

0

1

1

Administrateur

23

2

1.55

0

0

1

1

Administrateur général

14

1

1.07

0

1

0

0

Administrateur général
adjoint

12

1

0.42

1

1

0

0

Staff-1 B&CG

11

2

1.72

0

0

1

1

Staff-1 P&O

18

3

1.72

1

0

1

1

Staff-1 ICT

4

1

0.58

0

0

0

0

Staff-1 autre

18

6

1.41

0

1

3

1

Staff-l total

51

3

2.08

0

0

1

1

Total

215

2

1.61

0

0

1

1

37Les 123 postes vacants ont donc donné lieu à un total de 215 lauréats. Cela représente une moyenne de deux lauréats par procédure de sélection. Toutefois, le tableau montre que certains postes vacants produisent plus de lauréats que d’autres. Ceci est particulièrement vrai pour les postes N-1 encadrement.

38En moyenne, les lauréats se retrouvent dans la catégorie B, c'est-à-dire qu'ils sont jugés « aptes ». Cela vaut pour les lauréats néerlandophones et francophones. Comme l'écart-type montre qu'il y a des différences selon les postes vacants, il faut interpréter ces résultats avec caution.

IV.3. Durée de la procédure de sélection

39La base de données dont nous disposons contient également plus d'informations sur le calendrier des différentes parties de la procédure de sélection. Cependant, les écarts types entre les procédures de sélection sont particulièrement importants. Ceci est important lorsque l'on discute des moyennes. Une fois encore, nous abordons d'abord les données générales avant d'analyser l’évolution dans le temps et d'examiner les différences par niveau et par grade.

IV.3.1. Général

40Les postes vacants sont en ligne pendant 26 jours en moyenne avant d'être clôturés et que la procédure de sélection ne commence. La période entre le début de la procédure de sélection et l’assessment informatisé dure généralement 39 jours en moyenne. Il faut compter 14 jours en moyenne pour passer l’assessment informatisé. Pour l'épreuve orale, un jury doit être constitué, ce qui prend en moyenne 8 jours. Le temps nécessaire pour l’épreuve orale est en moyenne de 25 jours. Enfin, il faut communiquer les résultats de la procédure au ministre ou président de l’institution, ce qui prend 24 jours.

  • 6 Si on additionne tous les chiffres dans le graphique 7, on arrive à 136 jours. Ceci s’explique par (...)

41La durée totale de la procédure de sélection pour tous les postes vacants est en moyenne 128 jours6. Ceci représente à peu près 4 à 5 mois, ce qui est assez long pour un processus R&S.

42Le graphique 7 montre le temps moyen de traitement des offres d'emploi pour la partie de la procédure de sélection pour laquelle Selor est compétent. Cela ne comprend pas le temps nécessaire à la décision de nomination. Comme indiqué, d'autres facteurs entrent souvent en jeu ici, comme la recherche d'un équilibre au sommet de l'administration fédérale.

Graphique 7. Temps de traitement moyen des postes vacants

Graphique 7. Temps de traitement moyen des postes vacants

43La base de données de la DG Recrutement et Développement recense les principales raisons de la durée des procédures de sélection. La raison la plus courante est l'effet des vacances d'été. Les goulets d'étranglement dus à un grand nombre de sélections nécessitent également beaucoup d'administration et d'organisation. Une troisième raison importante sont les obstacles dus au covid-19. Enfin, la composition du jury est également un défi qui affecte la durée du processus de sélection. Souvent, on ne trouve pas d'experts techniques ou autres membres du jury ou la disponibilité des membres ne correspond pas. Dans certains cas, le refus du jury par le cabinet entraîne également des retards.

44Dans le graphique 7, on constate qu'en principe, l'ouverture de l'offre, le screening formel, l'épreuve orale et la communication des résultats sont les plus longues. Toutefois, il est important de noter que la durée de la phase du screening formel a été calculée avec les données concernant le point de départ de la procédure de sélection et le début de l'assessment informatisé. La durée de l'épreuve orale a aussi été calculée avec les dates des autres phases de la procédure. Des données explicites sur la durée du screening formel et de l'entretien n'étaient pas disponibles. Il faut donc une certaine caution à interpréter les données.

IV.3.2. Évolution dans le temps

45Le graphique 8 montre la durée de la procédure au cours des années 2018-2021. Il montre que la durée a fortement augmenté entre 2018 et 2020. En 2018, la durée était de 115 jours, en 2019 elle était de 166 jours et en 2020 elle passe à 195 jours. Les problèmes causés par le Covid‑19 peuvent expliquer en partie ce phénomène. En 2021, Selor a réussi à réduire le temps de traitement des sélections à 112 jours. Il s'agissait donc d'un objectif clé, tel qu'exprimé dans la note de politique générale de la ministre De Sutter.

Graphique 8. Temps de traitement moyen des postes vacants par année

Graphique 8. Temps de traitement moyen des postes vacants par année

IV.3.3. Différences par niveau et par grade

46Lorsque l'on compare la durée de la sélection pour les différents niveaux, on ne constate pas de différences significatives. Ce n'est que pour les postes vacants de niveau N-2 que la durée semble être plus long aux différentes étapes du processus de sélection. Le graphique 9 ci-dessous donne un aperçu de cette situation.

Graphique 9. Temps de traitement moyen des postes vacants par niveau

Graphique 9. Temps de traitement moyen des postes vacants par niveau

47Enfin, nous examinons également la durée de la sélection pour les différents grades. Dans l'ensemble, la majorité des catégories suivent dans une certaine mesure la moyenne générale. Nous examinons en particulier les postes de président, de directeur général et les postes d’encadrement P&O et ICT, car ces postes représentent une part importante du nombre total de postes vacants.

48Les postes vacants dans les services ICT sont en ligne pendant une période nettement plus courte que la moyenne générale. Le processus de screening dans cette catégorie est également plus court que la moyenne. Les postes d’encadrement P&O font l'objet d'un screening plus long que la moyenne. Inversement, les assessments informatisés sont en moyenne plus courts pour les postes d’encadrement P&O et plus longs pour les postes d’encadrement ICT. La composition du jury pour les fonctions d’encadrement ICT est nettement plus courte que la moyenne.

49Les fonctions de directeur général suivent le délai moyen global d'exécution dans tous les domaines. Seule la composition du jury prend un peu plus de temps. La durée de la procédure de sélection pour les postes de président est inférieure à la moyenne générale dans tous les domaines. Il convient toutefois de noter que les remises de décision sont plus élevées que la moyenne générale.

Graphique 10. Temps de traitement moyen des postes vacants par grade

Graphique 10. Temps de traitement moyen des postes vacants par grade

IV.4. Discussion

50Dans cette section, les résultats de la section précédente sont analysés plus en profondeur afin de répondre aux questions de recherche. Au cours de cette discussion, nous nous référons également au cadre théorique.

IV.4.1. Le profil recherché des hauts fonctionnaires

51Si l'on compare les résultats de notre étude avec ceux de la littérature, quelques éléments ressortent. Premièrement, certaines qualités souhaitables des hauts fonctionnaires sont confirmées. Par exemple, Bourgault & Van Dorpe (2013) ont confirmé que les compétences en gestion et en leadership sont essentielles pour les postes de mandat. La responsabilité et la performance, ainsi que l'élaboration d'une vision et d'une stratégie, l'établissement de collaborations et une attitude conviviale sont des compétences essentielles pour les hauts fonctionnaires. Cependant, notre recherche met également en évidence des éléments qui n'ont pas été mentionnés dans la littérature. Par exemple, elle fait référence à l'autonomie, à la flexibilité et à la pensée innovante comme étant des qualités nécessaires pour diriger les administrations. Cela peut indiquer que ces qualités sont considérées comme plus importantes ces dernières années.

52Bien que la note de politique générale de la ministre De Sutter fasse référence aux compétences numériques des hauts fonctionnaires, cela n'est pas mentionné dans les offres d'emploi. L'aspect de la motivation du service public (PSM) pour attirer les candidats est également à peine mentionné. La responsabilité envers la société n'est mentionnée ou sous-entendue que quelques fois dans les offres d'emploi. Cependant, l'orientation client en tant que valeur est mentionnée plus fréquemment. En d'autres termes, le PSM ne semble pas être une condition préalable explicite à l'emploi en tant que haut fonctionnaire dans le gouvernement fédéral. Des recherches supplémentaires pourraient éventuellement approfondir cet aspect du processus de recrutement et de sélection.

IV.4.2. Le processus de sélection

53Le processus de sélection reflète un certain nombre de valeurs considérées comme importantes dans un contexte gouvernemental. Les postes vacants sont publiés ouvertement afin que les candidats potentiels en soient informés et aient les mêmes chances d'être sélectionnés dès le départ. Les aspects formels sont considérés comme importants car le non-respect des règles peut entraîner une annulation au Conseil d'État. La procédure de sélection y accorde donc une grande attention. Cela entraîne parfois un retard dans la procédure.

54Comme le veut la littérature, l'assessment est une partie importante de la procédure de sélection. Après tout, elle examine les compétences de gestion des candidats. Ces dernières années, cependant, cette évaluation s'est réduite à un assessment informatisé. La question est donc de savoir si la grande validité de cette technique de sélection est toujours d'actualité.

55Les 123 postes vacants ont attiré en moyenne 17 candidats. Cependant, une grande partie d'entre eux sont éliminés en cours de procédure. Les données montrent que l'épreuve orale explique la plupart des éliminations. Dans les assessments informatisés, la moitié des candidats échouent, mais un certain nombre de candidats sont exemptés de cette partie de la procédure parce qu'ils l'avaient passée dans d'autres procédures de sélection.

56Les procédures de sélection produisent une moyenne de deux lauréats. L’observation est qu’il s'agit d'un lauréat néerlandophone et d'un lauréat francophone. La parité linguistique étant prévue par la loi pour les postes de hauts fonctionnaires, la représentativité peut ainsi être respectée. En moyenne, les lauréats se retrouvent dans la catégorie B. Les procédures de sélection des hauts fonctionnaires fédéraux ne semblent donc pas produire les « meilleurs » candidats. Les données montrent qu’il y a beaucoup de différences entre les sélections ; il faut donc être prudent avant de tirer des conclusions.

57Enfin, les résultats montrent que le processus de recrutement et de sélection prend un temps relativement long. En moyenne, 4 à 5 mois sont nécessaires pour mener à bien le processus. La pandémie de covid‑19 a eu un impact notable sur la durée de la procédure. Il semble toutefois que Selor ait réussi à réduire considérablement la durée de la procédure d'ici 2021. Il s'agissait également d'un objectif explicite dans la note de politique générale de la ministre De Sutter.

V. Comparaison avec le début de la réforme Copernic

58Au début de la réforme Copernic, une étude similaire a été réalisée par Christophe Pelgrims (2005). Il a également examiné le processus de sélection des postes de président, N-1, N-2 et des directeurs d’encadrement. La population totale de son analyse était de 5 233 personnes. Comme certains candidats ont postulé à plus d'un poste, la population se compose de 2 544 individus uniques.

59Pelgrims a analysé 108 postes de direction pour lesquels un manager a finalement été nommé. Contrairement à notre banque de données, il avait non seulement une vue sur les lauréats, mais aussi sur la personne qui a finalement été nommée. Cela lui a également permis d'analyser le profil des managers nommés, d'autant plus qu'il disposait également de certaines données de base pour tous les candidats, telles que le sexe, l'origine (secteur privé ou secteur public), le diplôme, l'âge et l'expérience en cabinet ministériel.

  • 7 Pelgrims, C. (2005). Op zoek naar topmanagers voor de federale administratie In: A. Hondeghem & R. (...)

60Il serait trop long de donner un compte rendu complet des résultats des recherches du début de la réforme Copernic. Nous nous référons donc à la publication originale7 et nous nous limitons ici aux conclusions générales, également en fonction de la comparaison avec nos recherches récentes. Une observation préliminaire importante est que le processus de sélection à cette époque était quelque peu différent, comme déjà mentionné au point II.2.

61En ce qui concerne le nombre de candidats pour les 108 postes de direction, une première observation a été que beaucoup plus d'hommes que de femmes ont postulé, 84,5 % et 15,5 % respectivement. Parmi les candidats, 53,4 % étaient néerlandophones. Parmi les femmes, cependant, il y avait proportionnellement plus de francophones.

62Lors de la sélection initiale de Selor, qui vérifiait si les candidats répondaient aux exigences formelles, 35,6 % des candidats ont été rejetés. Il est remarquable de constater que relativement plus de femmes que d'hommes ont été rejetées. Au final, 2 597 candidats ont été admis à l’assessment. Comme il s'agissait d'un assessment complète et non d'un assessment informatisé comme aujourd'hui, il s'agissait d'une très grande opération sur laquelle les consultants, notamment, gagnaient beaucoup d'argent. Il faut dire que la procédure initiale prévoyait que seuls ceux qui avaient réussi l'épreuve orale devaient passer un assessment, mais à cause de l'arrêt Jadot, l'ordre des épreuves de sélection a été inversé et les candidats ne pouvaient plus être exclus de la procédure (Pelgrims, 2005).

63Sur les 2 597 candidats qui ont participé à l'assessment, 54 ont reçu un score A, 302 un score B, 555 un score C, et 934 un score D. Les autres avaient abandonné. Ainsi, si l'assessment avait été éliminatoire, seuls les candidats ayant obtenu un score A ou B (soit 14 %) seraient passés à l'étape suivante, à savoir l'entretien. L'analyse a montré qu'il n'y avait pas de différence significative de score pour l’assessment entre les hommes et les femmes.

64Après l’assessment, un jury a testé les connaissances techniques des candidats lors d'un entretien. Il en résulte un score A pour 11 % des candidats et un score B pour 16 % des candidats. L'une des conclusions est que les femmes ont obtenu des résultats nettement inférieurs à ceux des hommes. Il a également été constaté que les candidats du secteur public (en particulier les fonctionnaires fédéraux) ont obtenu de meilleurs résultats à l'entretien avec le jury, ce qui peut être logique étant donné l'expertise spécifique dont ils ont pu faire preuve.

65Après l'entretien avec le jury, la délibération a eu lieu pour aboutir à un verdict final. Parmi les candidats, 6 % ont obtenu un score A et 12 % un score B. Nous pouvons considérer ce groupe comme les lauréats, soit un total de 458 personnes. Ainsi, sur un total de 108 postes de direction, on peut dire qu'il y avait en moyenne quatre lauréats par poste. C'est donc le double de la situation actuelle.

66Comme mentionné, Pelgrims a également pu analyser les 108 candidats nommés. Cela peut être résumé comme suit :

  • 89 % étaient des hommes et 11 % des femmes ;

  • la plupart des hauts fonctionnaires nommés avaient des diplômes universitaires en droit, économie, sciences sociales ou psychologie ;

  • l'âge moyen était de 49,7 ans ;

  • 68 % des hauts fonctionnaires nommés venaient du gouvernement fédéral ; seuls 9 % venaient du secteur privé ;

  • un tiers des hauts fonctionnaires nommés ont travaillé dans un cabinet ministériel dans au moins un des trois derniers postes de leur carrière.

67Le profil des « nouveaux » hauts fonctionnaires après la réforme Copernic présente donc des similitudes frappantes avec la situation antérieure (Hondeghem, 1990). Seul l'âge moyen a légèrement diminué ; en effet, auparavant, en raison du système de carrière fermé, on ne devenait haut fonctionnaire qu'en fin de carrière.

68L'avantage comparatif des candidats ayant occupé des postes de cabinet ministériel est également une constante. Cela s'explique facilement par le phénomène des nominations politiques. Toutefois, l'analyse des résultats de l’assessment et de l'épreuve orale montre que les candidats ayant une expérience en cabinet ministériel obtiennent des résultats nettement meilleurs. La conclusion est que les membres du cabinet ministériel acquièrent des connaissances, des compétences et des contacts au cours de leur carrière au sein du cabinet, ce qui leur donne un avantage dans leur recherche d'un nouveau poste dont les candidats sans expérience au sein d’un cabinet doivent manquer (Pelgrims, 2005 : 216).

VI. Conclusion

69Cet article visait à examiner le succès du gouvernement fédéral dans le recrutement et la sélection des hauts fonctionnaires nécessaires pour diriger les administrations fédérales 20 ans après la réforme Copernic. Il s'agissait d'analyser le processus de R&S et de le comparer avec la situation juste après la réforme Copernic.

70Les conclusions suivantes peuvent déjà être tirées de la comparaison :

  • bien que la procédure de recrutement et de sélection soit restée en grande partie la même, il existe un certain nombre de changements significatifs ayant un impact sur le déroulement du processus de sélection ; par exemple, l’assessment a été remplacée par un assessment informatisé ; les candidats peuvent obtenir des exemptions de ce test sur la base de sélections précédentes réussies ; et il existe une exclusion pour passer au tour suivant en cas d'échec ;

    • 8 Le calcul est le suivant : 5 233 personnes ont postulé pour 108 postes de direction, soit une moyen (...)

    le nombre de candidats aux postes de direction a diminué. Alors qu'au début de la réforme Copernic, il y avait en moyenne 48 candidats pour un poste de direction8, ils ne sont plus que 17 dans la période récente, ce qui semble indiquer que le gouvernement fédéral est moins en mesure de se présenter comme un employeur attrayant pour les postes de direction ;

  • bien entendu, le faible nombre de candidats n'est pas nécessairement négatif ; l'important est que les « bons » candidats soient recrutés et sélectionnés. En ce qui concerne ces derniers, il semble que ces dernières années, les lauréats classés A soient moins nombreux. Au début de la réforme Copernic, un tiers des lauréats avaient un score A et deux tiers un score B. Au cours de la période écoulée, la moyenne des lauréats ont un score B. Il semble donc que la qualité des candidats ait diminué ;

  • il est remarquable que le nombre de candidats qui est autorisé à la procédure de sélection après le screening formel est beaucoup plus haut maintenant qu’au début de la réforme Copernic. Tandis que maintenant 82 % des candidats sont autorisés, au début de la réforme ce chiffre n’était que 64,4 %.

71En plus de ces points de comparaison, il y a aussi quelques questions saillantes pour lesquelles nous ne disposons de données que pour le début de la réforme Copernic ou récemment. Les données sur la durée de la procédure ne sont disponibles que pour les sélections récentes. Bien qu'il y ait eu une amélioration en 2021, la durée de la procédure reste assez long et peut donc contribuer à l'abandon des candidats. Les données pour la période passée ne sont pas disponibles sur le profil des candidats et des personnes nommées. Les informations sur les lauréats ne concernent que le sexe. Une observation importante ici est que, bien que l'inclusion soit fortement soulignée dans la note politique de la ministre De Sutter, elle n'est actuellement pas abordée dans le suivi du processus de recrutement et de sélection. Cela soulève des inquiétudes quant à l'importance accordée à l'inclusion tout au long du processus de sélection.

Haut de page

Bibliographie

Arthur, B. W., Edens, P. S., Bell, S. T., “Effectiveness of Training in Organizations”, Journal of Applied Psychology, 88(2), 2003, pp. 234‑245.

Barber, A. E., Recruiting Employees: Individual and organizational perspectives. Thousand Oaks (CA) : Sage Publications, 1998.

Beechler, S., & Woodward, I., “The global “war for talent””, Journal of International Management, 15(3), 2009, pp. 273‑285.

Brewer, G.A., “Employee and organizational performance”, In : Perry, J. & Hondeghem, A., Motivation in Public Management: the call of Public Service. Oxford: Oxford University Press, 2008, pp 136‑156.

Bourgault, J., & Van Dorpe, K., “Managerial reforms, Public Service Bargains and top civil servant identity”, International Review of Administrative Sciences, 79(1), 2013, pp. 49‑70.

Carpenter, J., Doverspike, D., & Miguel, R. F., “Public service motivation as a predictor of attraction to the public sector”, Journal of Vocational Behavior, 80(2), 2012, pp. 509‑523.

Choudhury, J., “Recruitment and retention strategies in changing scenario”, Review of HRM, 1, 2012, pp. 21‑33.

Craig, M., “Cost Effectiveness of Retaining Top Internal Talent in Contrast to Recruiting Top Talent”, Competition Forum, 13(2), 2015, pp. 203‑209.

Edwards, M. R., "An integrative review of employer branding and OB theory", Personnel Review, 39 (1), 2010, pp. 5‑23.

Hermelin, E., Lievens, F., & Robertson, I. T., “The Validity of Assessment Centres for the Prediction of Supervisory Performance Ratings: A meta- analysis”, International Journal of Selection and Assessment, 15(4), 2007, pp. 405‑411.

Hondeghem, A., De loopbaan van de ambtenaar. Tussen droom en werkelijkheid, Leuven, 1990.

Hondeghem, A. & R. Depré (Red.), De Copernicushervorming in perspectief: veranderingsmanagement in de federale overheid, Brugge: Vanden Broele, 2005.

Hondeghem, A., “The national civil service in Belgium”, In : F.M. Van Der Meer (Red.), Civil service systems in Western Europe, Edward Elgar, 2011, pp. 115‑149.

Hood, C., “A public management for all seasons ?”, Public administration, 69, 1991, pp. 3-19.

Lievens, F., Human resource management: Back to basics, Uitgeverij Lannoo nv, 2014.

Michaels, E., Handfield- Jones H., & Axelrod B., The War for Talent, Harvard Business School Press, Boston, MA, 2001.

Pelgrims, C., “Op zoek naar topmanagers voor de federale administratie”, In: A. Hondeghem & R. Depré (Red.), De Copernicushervorming in perspectief: veranderingsmanagement in de federale overheid, Vanden Broele. 2005, pp. 179‑224.

Perry, J., Ed., Hondeghem, A., Ed., Motivation in Public Management: the call of Public Service, Oxford: Oxford University Press, 2008.

Haut de page

Notes

3 Les deux arrêtés royaux ont été modifiés plusieurs fois depuis, mais nous nous référons ici à la version de base. La modification la plus récente date du 20 décembre 2022 et change le processus de sélection. Comme nos données sur le recrutement et la sélection couvrent la période 2018-2021, nous nous référons aux règlements en vigueur durant cette période.

4 L’AR du 20 décembre 2022 change à nouveau la procédure de sélection :
- Selor est remplacé par le SPF BOSA, DG Recrutement et Développement ;
- les fonctions d’encadrement sont considérées comme des fonctions dirigeantes N‑1 ;
- l’assessment informatisé n’est plus éléminatoire ; les résultats de celui-ci sont utilisés pour documenter la procédure orale ;
- il y a une possibilité d’organiser une étape supplémentaire s’il y a trop de candidats pour les postes vacants ;
- s’il reste trop de candidats à la fin de la procédure, il y a une possibilité d’organiser un assessment ;
- la composition du jury doit être équilibrée en termes de genre.

5 Les analyses sont basées sur le mémoire de maîtrise de Karen Cannoot pour le Master en gestion et politique publiques de la KU Leuven, année universitaire 2021-2022. Des résultats plus détaillés peuvent être trouvés dans : Cannoot, K. (2022). De zoektocht naar federale topambtenaren. Een analyse van de rekruterings- en selectieprocedure van topambtenaren in de Belgische federale overheid. 78 p.

6 Si on additionne tous les chiffres dans le graphique 7, on arrive à 136 jours. Ceci s’explique par le fait que le chiffre relatif à la composition du jury est déjà inclus dans les autres chiffres.

7 Pelgrims, C. (2005). Op zoek naar topmanagers voor de federale administratie In: A. Hondeghem & R. Depré (Red.), De Copernicushervorming in perspectief: veranderingsmanagement in de federale overheid. Vanden Broele. (pp. 179‑224).

8 Le calcul est le suivant : 5 233 personnes ont postulé pour 108 postes de direction, soit une moyenne de 48. Même en supposant 2 544 personnes uniques, on arrive toujours à une moyenne de 24.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Graphique 1. Évolution du nombre d'emplois vacants par an
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 24k
Titre Figure 1. Répartition des postes vacants par niveau
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 36k
Titre Figure 2 : Répartition des postes vacants par grade
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 34k
Titre Graphique 2. Evolution globale des candidats
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 68k
Titre Graphique 3. Nombre total et moyen de candidats par année
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 45k
Titre Graphique 4. Evolution des candidats par année
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 60k
Titre Graphique 5. Evolution des candidats par niveau
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 60k
Titre Graphique 6. Evolution des candidats par grade
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 78k
Titre Graphique 7. Temps de traitement moyen des postes vacants
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 52k
Titre Graphique 8. Temps de traitement moyen des postes vacants par année
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 63k
Titre Graphique 9. Temps de traitement moyen des postes vacants par niveau
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 72k
Titre Graphique 10. Temps de traitement moyen des postes vacants par grade
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/docannexe/image/2014/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 83k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Annie Hondeghem et Karen Cannoot, « À la recherche de hauts fonctionnaires fédéraux. Une analyse du recrutement et de la sélection des hauts fonctionnaires, vingt ans après la réforme Copernic »Pyramides [En ligne], 37-38 | 2023, mis en ligne le 02 août 2023, consulté le 15 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pyramides/2014

Haut de page

Auteurs

Annie Hondeghem

A. Hondeghem, Professeure à la KU Leuven, Faculté des sciences sociales. Directrice de l’Instituut voor de Overheid (Public governance institute).

Articles du même auteur

Karen Cannoot

K. CANNOOT, jobcoach coaching & emploi chez emino (asbl).

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search