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Taiwan

La réforme du secteur des médias. D’importants progrès ont été accomplis sous l’administration de Chen Shui-bian

Gary D. Rawnsley et Ming-Yeh T. Rawnsley

Résumé

La situation des médias constitue un indicateur précieux de la démocratisation. Elle fournit de nombreuses informations sur les niveaux de liberté, de tolérance, de justice sociale et de pluralisme dans un système politique. Cet article passe en revue les changements intervenus dans les médias taiwanais depuis l’abrogation de la loi martiale en 1987, et donne un aperçu de la situation au début du second mandat de Chen Shui-bian. Il est difficile de nier les progrès accomplis et que la situation à Taiwan se rapproche toujours davantage de celle des pays à un stade similaire de consolidation démocratique.

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Notes de la rédaction

Traduit de l’anglais par Blaise Thierrée

Texte intégral

1Lors de son discours d’investiture le 20 mai 2004, le Président Chen Shui-bian a exposé la vision qu’il avait de son deuxième mandat, et les analystes de la politique taiwanaise ont disséqué et commenté le sens et les implications de ses projets. Une phrase, perdue au milieu d’un paragraphe sur les réformes, est passée quasiment inaperçue : « Persister avec les réformes – Nous devons répondre aux longues attentes du peuple en instaurant des réformes dans le système politique et judiciaire, dans le système éducatif et dans les structures financières et fiscales ; en améliorant la qualité des médias1; et en lançant des réformes sociales adaptées ».

2Il était aisé de manquer cette référence aux médias puisque le « projet de reconstruction » constitutionnelle a dominé le discours de Chen Shui-bian. Un verre peut être à moitié plein ou à moitié vide : les plus critiques peuvent affirmer que Chen Shui-bian est passé rapidement sur la réforme des médias parce que son administration la juge peu importante ; alors que les plus optimistes auront retenu que la réforme des médias a été mentionnée, et que cette référence, même brève, montre que beaucoup a déjà été fait dans ce sens.

3Quoi qu’il en soit, dans ce débat, toutes les parties sont d’accord sur le fait que la situation des médias est un indicateur précieux de la démocratisation. Elle fournit de nombreuses informations sur les niveaux de liberté, de tolérance, de justice sociale et de pluralisme dans un système politique2. L’idée que les médias ont été au centre du développement de la culture et des procédures démocratiques à Taiwan est désormais acceptée3. Le paysage médiatique s’est étendu au-delà de tout horizon imaginé auparavant, et le public a maintenant le choix entre une pléthore de supports – imprimés, audiovisuels, en ligne –, prouvant que le marché est devenu authentiquement pluraliste.

4Cet article passe en revue les changements survenus depuis la levée de la loi martiale (jieyanfa) en 1987, et donne un aperçu des perspectives alors que Chen Shui-bian entame son second mandat. Son gouvernement est régulièrement critiqué pour ne pas prêter suffisamment d’attention aux irrégularités qui continuent à entraver le développement de médias libres et démocratiques. Ces détracteurs ont été particulièrement entendus pendant et après l’élection présidentielle controversée de 2004, alors que les médias à dominance « bleue »4 présentèrent une image négative de la campagne électorale, soulevant le problème d’une couverture partiale de la politique5.

5Toutefois, même si les médias taiwanais en sont encore à un stade précoce de démocratisation, on ne peut nier les progrès accomplis, ni le fait que les médias taiwanais se rapprochent de ceux fonctionnant dans des systèmes politiques ayant atteint un stade similaire de consolidation démocratique6.

Sous le Kuomintang

6Lorsque le Kuomintang (Parti Nationaliste) entame le double processus de libéralisation sociale et de démocratisation politique en 1987, l’Etat exerçait depuis trente ans un contrôle strict sur la presse et l’audiovisuel. Le gouvernement avait adopté une série de lois – certaines floues, d’autres plus explicites – qui détaillaient les devoirs des médias et les sanctions encourues en cas de violation. La directive n°3148, promulguée en juin 1951, fournissait au gouvernement l’un des moyens les plus insidieux pour contrôler les médias : cette directive justifiait les contraintes politiques auxquelles était soumise la presse par la nécessité de rationner le papier7. Nombre de lois étaient aussi vagues et arbitraires que possible, donnant ainsi à l’Etat toute latitude dans leur interprétation et leur application. En revanche, le gouvernement ne ressentit pas le besoin de s’abriter derrière le rationnement du papier pour la loi martiale, dont l’article 11 restreignait la liberté de la presse sur la base de la sécurité nationale, tandis que la Loi sur les publications (chubanfa)8 donnait au gouvernement la possibilité de fermer un quotidien par voie administrative, sans procédure légale9. De plus, alors que les censeurs du gouvernement n’inspectaient pas les épreuves des journaux avant leur publication, la machinerie législative autorisait le gouvernement à rappeler et à confisquer des journaux qui avaient imprimé quoi que ce soit en contradiction avec des intérêts politiques ou militaires.

7De fait, la méthode de contrôle la plus directe fut la plus simple : la pleine propriété des entreprises du secteur. Au début des années 1980, le Kuomintang (KMT) possédait quatre quotidiens nationaux, le gouvernement en possédait deux, et l’armée cinq ; pour autant, cette séparation était trompeuse du fait de la superposition de l’autorité politique du parti, de l’Etat et de l’armée. Une structure de propriété similaire régissait les trois chaînes nationales de télévision, Taiwan Television Company (TTV), China Television Company (CTV) et Chinese Television System (CTS). Là encore, elles appartenaient au gouvernement, au parti, et à l’armée (voir tableau 1).

8En outre, le gouvernement du KMT manœuvrait avec succès les médias à travers un réseau clientéliste complexe qui permettait aux agences du KMT, du gouvernement provincial et de l’Etat de contrôler les nominations aux postes-clés. Les rédacteurs en chef des journaux étaient soit membres du KMT, soit soutenaient son agenda politique ; des journalistes et des propriétaires bien disposés à l’égard du pouvoir, et des politiques, occupaient des positions proéminentes et puissantes servant ainsi de « chiens de garde » à l’intérieur même des médias. Par exemple, les propriétaires des deux journaux privés les plus lus, le Zhongguo shibao (China Times) et le Lianhe bao (United Daily News) étaient membres du comité central permanent du KMT. Les journaux privés pouvaient concurrencer la presse gouvernementale, mais à travers leurs patrons, le gouvernement était assuré de leur soutien. « Dans une certaine mesure, l’obligation de rentabilité, le besoin de vendre, devait inciter les journaux privés à prendre leurs distances avec la propagande ; en restant toutefois dans des limites tolérables par le régime, pour ne pas être voués à la disparition »10.

9Les exceptions à ce modèle furent rares, mais laissaient l’espoir que les Taiwanais trouveraient un canal d’expression dans des publications. Le Zili wanbao (Independent Evening News) et le Minzhong ribao (People’s Daily) étaient détenus et dirigés par des Taiwanais. Le Taiwan ribao (Taiwan Times), basé à Kaohsiung, était également privé et indépendant, publiant ce que Bruce Jacobs qualifie de « critiques et éditoriaux ne mâchant pas leurs mots »11. Alors que les médias étaient sujets à des restrictions politiques et légales drastiques, le KMT était prêt à accepter un certain degré d’indépendance de la presse.

10En dépit de ces quelques exceptions, l’environnement politique sous la loi martiale contraignait les médias à céder aux demandes du gouvernement et à n’être que des courroies de transmission de l’idéologie officielle. Les tentatives de s’affranchir de la loi étaient punies sévèrement : pendant la période de la « Terreur Blanche » (baise kongbu), entre 1950 et 1987, des centaines de journalistes, d’écrivains et d’éditeurs furent harcelés, interrogés et souvent jetés en prison12.

Après la levée de la loi martiale

11La levée de la loi martiale en 1987 a permis, avec la libéralisation sociale et la démocratisation politique qui s’en sont suivis, une transformation spectaculaire de l’environnement. Le changement le plus notable fut la prolifération des médias autorisés. Les chiffres sont éloquents ; à la mi-2003, on comptait :

  • 602 journaux (contre 31 entre 1951 et 1987, et 393 en août 1999) ;

  • 174 stations de radio (avant 1993, il n’y en avait que 33 ; les radios où les auditeurs pouvaient intervenir ne furent légalisées qu’en 1994) ;

  • quatre chaînes nationales de télévision (contre trois en 1987) ;

    des centaines de chaînes câblées diffusant des programmes locaux et internationaux (l’émission et la réception de programmes câblés demeurèrent illégales jusqu’en 1993)13. Ces chaînes incluent une télévision publique nationale.

12Le KMT a joué un rôle dans ce processus. En septembre 1989, le directeur de l’Office d’information gouvernemental (GIO, xinwenju)14, Shaw Yu-Ming, déclara que l’autorégulation des médias était préférable à une supervision étatique. Il reconnut également que, dans un système politique démocratique, les médias avaient la responsabilité d’examiner les décisions et l’attitude du gouvernement et de lui demander des comptes : « le gouvernement, dit-il, est placé sous la surveillance des médias, aussi ne convient-il pas que le gouvernement se serve de la voie administrative ou de lois pour les sanctionner. Cela soulèverait des critiques arguant d’entraves mises à la liberté de la presse »15. Chu Jiying, directeur du Département des affaires culturelles du KMT de 1989 à 1994 fit écho à ces sentiments : « Dans une société démocratique, dit-il, la presse est le porte-parole du public et représente les intérêts du public. (…) Je considère que le rôle de porte-parole du parti est de fournir de l’information, non de contrôler l’information. Il doit gérer l’information, non la contrôler. Il doit expliquer la politique du parti aux médias et être le relais de l’opinion publique auprès de ses supérieurs. Le style dominateur et rigide est dépassé en politique »16.

13Le KMT est ainsi passé de l’idée d’exercer des restrictions politiques, économiques et légales sur les médias pour qu’ils servent son agenda idéologique et de développement, à une position où il reconnaissait que son ambition de construire une société démocratique nécessitait des médias libres et indépendants. Ce fut le premier pas vers une séparation des médias et de la politique à Taiwan ; une direction que le Président Chen Shui-bian reprit à son compte après son arrivée au pouvoir en 2000.

Sous Chen Shui-bian

14Durant la campagne électorale de Chen, l’influence des partis dans les médias fut stigmatisée comme un problème urgent à régler. Le Parti démocrate progressiste (PDP), dont Chen était le candidat, avait eu à souffrir du monopole du KMT sur l’information et les médias17, il n’est guère surprenant qu’il ait décidé de s’attaquer à ce problème. Chen comprit qu’il lui faudrait, pour séparer les médias et la politique, s’attaquer d’abord à la question de la propriété.

15Les perspectives s’annonçaient prometteuses. Premièrement, le gouvernement de Chen annonça qu’il renoncerait à toutes ses participations dans le secteur. Ensuite, le gouvernement put s’attaquer à la limitation des influences partisanes et étatiques dans les médias. Ce second objectif était plus difficile à réaliser, et le gouvernement ne formula jamais de plan cohérent. De plus, l’environnement politique n’était pas particulièrement favorable à de telles réformes. Même si Chen emporta la présidence en 2000, la majorité « bleue » au Yuan législatif entravait régulièrement les désirs de réforme gouvernementaux sur nombre de questions essentielles. Enfin, les intérêts politiques dans les médias étaient si puissants et si étroitement imbriqués qu’il était délicat de démêler les complexes réseaux clientélistes qui structuraient le secteur.

16De fait, certains membres du PDP jouissaient de positions privilégiées dans les médias depuis la libéralisation et résistaient au changement. Le cas le plus frappant est celui de Cai Tong-rong (Trong Chai), député du PDP et membre du comité central permanent du Parti : représentant élu, il était également président de Formosa Television (FTV), une chaîne nationale soutenant le PDP qu’il avait aidé à créer en 1997 pour casser le monopole du KMT sur l’audiovisuel18. C’était un test crucial : si le PDP était déterminé à séparer les médias et la politique au point de perdre le contrôle de la seule télévision qui soutenait ouvertement le parti, la sincérité de l’administration ne pouvait plus être mise en doute. Sous la pression du gouvernement et des médias, Cai annonça sa démission en septembre 2003.

17La directrice générale du GIO d’alors (d’avril à octobre 2000), Chung Chin, fut chargée de trouver une solution. « Notre objectif principal, déclara-t-elle devant le comité pour l’éducation et la culture du Yuan législatif, est de nous débarrasser des influences néfastes, à la fois politiques et commerciales, qui pourraient entraver la neutralité dans la collecte et la transmission des nouvelles »19. Les moyens proposés pour parvenir à cet objectif étaient simplistes et n’eurent que peu d’effets. Le comité se réunit, puis mit en sommeil sa proposition d’empêcher le gouvernement, l’Etat et les partis politiques de détenir des participations majoritaires dans les entreprises médiatiques. La raison avancée pour cette marche arrière fut la réticence de ses membres à prendre des mesures potentiellement controversées qui seraient susceptibles d’amoindrir une liberté de parole que Taiwan venait tout juste d’acquérir.

Qui contrôle les chaînes de télévision hertziennes ?

Qui contrôle les chaînes de télévision hertziennes ?

Sources : Wang Zhen-huan, « Guangbo dianshi meiti de Kongzhi quan » (Le contrôle des médias de radiodiffusion et de la télévision), in Zheng Rui-cheng et al. (éds), Jiegou guangdian meiti : jianli guangdian xin zhixu (Déconstruction des médias de radio- et télédiffusion : établir un nouvel ordre pour la radio- et télédiffusion), Taipei, Cheng Society, 1993, pp. 77-128 ; Ming-Yeh T. Rawnsley, Public Service Television in Taiwan, thèse non publiée, Université de Leeds, 1998 ; Chen Bing-hong, Jiegou meiti (Déconstruction du système médiatique), Taipie, Yeh-yeh Book Gallery, 2003, pp. 289-290.

18Finalement, le Yuan législatif céda à la pression de l’exécutif et vota les réformes. En février 2003, le KMT annonça qu’il se conformerait à la nouvelle loi et qu’il vendrait ses actions20. De tels remèdes n’ont pu être appliqués à ce qui semblait être un mal incurable qu’avec l’accord de tous les partis politiques, et en particulier celui du KMT, qui avait le plus à perdre. Les chaînes de télévision TTV et CTS avaient à choisir entre deux options : soit elles devenaient parties d’un nouveau groupe de télévision publique, soit elles suivaient l’exemple de CTV et devenaient privées. En juin 2004, 25 % de TTV appartenaient à des banques dépendant du ministère des Finances, et les ministères de la Défense et de l’Education contrôlaient toujours CTS (voir tableau 1).

19Comme la télévision, la presse est régulièrement critiquée pour sa partialité. Le United Daily News et le China Times, les deux quotidiens au plus fort tirage, ont été accusés d’être les porte-parole de l’alliance bleue, en particulier pendant l’élection présidentielle de 2004. Les critiques ont souligné un manque apparent de professionnalisme chez les journalistes et les rédacteurs, suggérant qu’ils suivaient une ligne politique « bleue »21 dans le choix des sujets et leur manière de les traiter.

20Il s’agit d’une accusation grave, mais injuste, puisque partout dans le monde démocratique les journaux inclinent vers un parti politique ou un courant. Dans un article du quotidien de langue anglaise Taipei Times, Lee Ming-Tsung évoqua le « registre affectif ou légèrement affectif » que le China Times et le United Daily News utilisaient pour décrire les manifestations qui ont suivi l’élection présidentielle de 2004, et concluait qu’il « valait probablement mieux parler de “propagande” plutôt que de “reportages” ou d’“articles” »22. Pourtant, personne un tant soit peu familier avec les tabloïds anglais – en particulier avec ceux qui se positionnent sur le flanc droit de l’échiquier politique – ne s’étonnera que les journaux d’une société démocratique agissent de cette façon. En réalité, le Taipei Times est le petit frère du troisième journal de langue chinoise au plus fort tirage à Taiwan, le Ziyou shibao (Liberty Times). Ce dernier et le Taipei Times suivent leur propre agenda politique en faveur de l’alliance « verte » (c’est-à-dire pro-PDP). Autrement dit, les journaux penchant vers le KMT dominent probablement le marché, mais d’autres journaux reflétant d’autres sensibilités politiques sont également disponibles. Là encore, il n’y a rien d’inhabituel : en Grande-Bretagne, le marché de la presse est dominé par des titres orientés à droite ; mais le Guardian, plutôt de gauche, est vendu à côté du très conservateur Daily Telegraph. Les affinités sont clairement affichées, c’est le choix entre les opinions offertes au lecteur qui est considéré comme positif23.

21Par ailleurs, l’influence de la télévision câblée n’est pas négligeable à Taiwan. À côté des quatre chaînes hertziennes nationales, des centaines de chaînes câblées se disputent l’audience. Depuis sa légalisation en 1993, la télévision câblée est particulièrement prisée par le public, en particulier pendant les élections. D’après l’Annuaire de la publicité taiwanais, les partis politiques ont dépensé 2 milliards de NT$ en spots publicitaires sur les chaînes non câblées (wuxian dianshi) et 5,5 milliards sur les chaînes câblées pour les élections au Yuan législatif24. Un message de dix secondes coûte 33 000 NT$ sur TTV, CTV et CTS, et 30 000 sur TVBS25. Il existe actuellement six grands opérateurs de chaînes câblées (voir tableau 2), et si certains penchent en faveur des « bleus », la plupart se préoccupent essentiellement de leur rentabilité et n’ont pas d’agenda politique particulier.

22Pour œuvrer à la séparation entre médias et politique, le gouvernement taiwanais a également réglementé la possibilité des politiciens à contrôler des chaînes de télévision ou des stations de radio, ou à avoir leurs propres émissions. En mars 2003, quinze élus présentaient ou produisaient des émissions. La plus prolifique était la députée indépendante ex-PDP Chen Wen-chien (Sisy Chen). Jusqu’en avril 2003, elle présentait le Sisy’s News sur Star TV et animait une émission quotidienne sur UFO Radio, UFO Dinner. En mars 2003, son contrat avec Star TV ne fut pas renouvelé en raison, d’après elle, de pressions du PDP. La société Star Group Taiwan Ltd nia toute pression et argua du trop grand nombre d’émissions politiques sur le marché. Star TV diffusait déjà le New Hijacker de l’ancien homme politique Jaw Shaw-Kong, alors que la députée May Chin présentait Lightning the Lamp sur CTS et que Shen Chih-Hwei (député du PFP) animait une émission quotidienne sur Taichung Radio. Nombre d’hommes politiques ont profité – sur le plan politique et commercial – de la prolifération des chaînes télévisées et des stations de radio, relativement simples et peu coûteuses à lancer. Ces émissions fournissent aux politiciens une tribune d’où ils peuvent s’adresser à leurs électeurs. Toutes les célébrités mentionnées ci-dessus font aujourd’hui partie de l’alliance bleue, ce qui vient renforcer les soupçons de la partialité des médias. Certains peuvent ainsi arguer qu’il est normal que le PDP se préoccupe de jouer sur un pied d’égalité ; alors que d’autres diront que le PDP essaie d’étouffer les voix de l’opposition, et restreint la liberté de parole tant chérie à Taiwan.

23Afin de résoudre certains des problèmes liés à cette tendance, le président Chen lança un ultimatum à la fin de son premier mandat : tous les élus et les fonctionnaires devaient renoncer à leurs intérêts dans les médias avant le 5 septembre 2003. Cette mesure concernait 58 personnes, sommées de choisir entre leurs activités politiques et médiatiques. Elle visait à interdire aux fonctionnaires et aux membres de partis politiques de posséder, de financer ou d’agir en tant qu’investisseur, directeur ou responsable de médias. Mais cette mesure fut loin de faire l’unanimité. Certains députés étaient d’avis que le gouvernement aurait également dû interdire aux élus de produire ou d’animer des émissions politiques et/ou d’actualités. Par exemple, pour le député du PDP, Julian Kuo, « les politiciens animant ou produisant des émissions sont comme des athlètes servant en même temps d’arbitres dans une épreuve »26.

24Les critiques taxèrent le PDP d’hypocrisie et accusèrent l’administration d’utiliser les ressources du gouvernement pour promouvoir ses propres visées partisanes. Lorsqu’il était dans l’opposition, le PDP critiquait régulièrement le monopole du KMT sur les médias. Ce soupçon reparut en mars 2003, quand le GIO annonça qu’il prévoyait de combiner les ressources de différentes agences gouvernementales afin d’acheter du temps d’antenne et des espaces publicitaires pour promouvoir les politiques gouvernementales. Ce financement fournirait les ressources pour une campagne de 200 millions de NT$ entre le 1er avril et le 1er juin 2003, et pour 900 millions de NT$ supplémentaires de juillet 2003 à mars 2004. Cela signifie qu’au lieu d’autoriser chaque département du gouvernement à acquérir temps d’antenne et espace publicitaire pour promouvoir sa propre politique, le GIO rassemble tous les budgets promotionnels de ces départements pour un seul achat par an d’un volume d’espace média. En mars 2003, le GIO révéla qu’il avait dépensé plus de 30 millions de NT$ en 2002 en achat de temps d’antenne à la télévision pour promouvoir les politiques gouvernementales.

25L’opposition perçut ces dispositions comme un moyen de donner un coup de fouet à la campagne électorale de Chen Shui-bian aux frais du contribuable, bien que le GIO soit l’Office d’information du gouvernement (et non celui du PDP). Elle allégua que de telles pratiques mettaient en danger la liberté de la presse et étaient en parfaite contradiction avec l’apparente détermination du PDP à mettre un terme à l’imbrication de la politique et des médias. Mais en ne faisant que critiquer ces projets, l’alliance bleue manquait son objectif. Le problème n’était pas d’autoriser le gouvernement à se servir de fonds publics (après tout, il est de la responsabilité du gouvernement de rendre publique sa politique, et ainsi d’être responsable devant l’opinion publique), mais celui de s’assurer que tous les partis politiques concourent avec des chances égales. Comment le système politique peut-il garantir que le GIO demeure le porte-parole du gouvernement, et non celui du parti qui se trouve au pouvoir ? L’opposition bleue a clairement échoué à différencier le parti et le gouvernement, ce qui n’est guère surprenant dans la mesure où cette distinction n’existait pas avant 1987.

26Les problèmes de propriété et de partialité politique ne sont cependant pas les seuls. Comme Chen Shui-bian le suggérait dans son discours d’investiture de 2004, la qualité de la production est également un souci majeur qui requiert une attention urgente.

Le problème de la qualité et de la concurrence

27Le gouvernement taiwanais marche sur la même corde raide que les autres démocraties : dans quelle mesure un système libéral démocratique de marché nécessite-t-il des règles ? Le développement rapide et inquiétant de médias à la recherche de sensationnel exige une réponse urgente à cette question. Ce journalisme dit « jaune », de tabloïd, prospère à Taiwan. Le dernier-né des quotidiens taiwanais est le Pingguo ribao (Apple Daily), dirigé par l’entrepreneur hongkongais Jimmy Lai. Apple Daily, réputé pour ses potins mondains, ses scandales et ses photographies de crimes, est né à Hong Kong, avant d’arriver dans les kiosques taiwanais le 2 mai 2003 avec une diffusion affichée de 750,000 exemplaires27. Il fait suite au succès de la première entreprise taiwanaise de Jimmy Lai, Yizhoukan (Next Magazine), l’hebdomadaire le plus lu. Pour les Taiwanais, la liberté de parole est synonyme de démocratie, et nous voyons là un obstacle majeur à de nouvelles réformes visant à encourager la qualité. Le président d’une ONG importante, Taiwan Media Watch, résume le dilemme : où s’arrête la liberté de parole et où commence la responsabilité morale ?28 Le manque manifeste d’éthique des médias dans leurs comptes-rendus des catastrophes, crimes, et tragédies personnelles montre qu’ils sont incapables d’autodiscipline et d’autorégulation. D’après le Taipei Times, « Une quelconque intervention du gouvernement dans le fonctionnement des médias est inacceptable parce que la liberté de la presse est centrale dans une société civilisée. Mais dans la mesure où un penchant à l’indécence envahit dangereusement nos télévisions, attendre de l’autodiscipline de la part des médias est une option difficile. La seule solution envisageable est de permettre au public de prendre la parole pour dire aux médias ce qu’ils considèrent être de bons programmes »29

28Sous Chen Shui-bian, le GIO discuta des moyens de lutter contre la montée en puissance du sensationnalisme dans les médias, tout en tentant d’établir un cadre réglementaire permettant aux journalistes d’accomplir leur travail sans craindre les interventions gouvernementales. Là encore, le processus fut lent. En juin 2002, le GIO travaillait sur un projet de Loi sur les communications de masse conçue dans le but de « mieux réguler les médias à Taiwan »30. La loi en question aurait pour but « d’interdire l’invasion de l’espace privé par les médias et de les empêcher de violer “l’autonomie” des individus. Elle délimitera également plus clairement le système de classement du contenu des médias et revalorisera le niveau des règles appliquées aux médias, d’ordres donnés par l’exécutif à celui d’un cadre parfaitement légal ». En d’autres termes, le système conçu par le GIO renforcerait en réalité le contrôle sur les médias, plutôt qu’il ne protègerait les médias des interférences du gouvernement. Huang Hui-chen, directeur général du GIO après 2003, reconnaissant que « la liberté de parole à Taiwan est parmi les plus libérales du monde » [sic], avertit qu’on ne devait pas « abuser d’une telle liberté. Il est de la responsabilité des médias d’imprégner le public de valeurs sociales positives […]. Le GIO a imposé de manière agressive des amendes et noté des programmes télévisés, nous prenons nos responsabilités très au sérieux »31.

29L’une des mesures les plus controversées du GIO fut l’attribution de 950 000 NT$ à la Fondation pour la prévention des dommages causés par les médias au public, afin que celle-ci évalue régulièrement les six principaux journaux. L’évaluation devait mesurer « la justice, l’objectivité, la pertinence et l’exactitude », et ses résultats rendus public tous les deux mois. Les opposants à cette proposition n’ont pas seulement remis en question la méthodologie – en effet, comment mesurer la justice et la pertinence ? –, mais ont également jugé que cela représentait un recul de la liberté de la presse.

30Ces propositions qui s’étendent à l’audiovisuel sont assez inquiétantes : « Devant le caractère de plus en plus sensationnel ou inexact des programmes télévisés produits localement, le département de la radio et de la télévision du GIO a décidé de commencer à visionner et à évaluer ces programmes. (…) Parce que de nombreuses émissions télévisées ont porté atteinte à la vie privée et que le sensationnalisme de certains programmes a indisposé le public, nous avons décidé d’agir et de réglementer les émissions télévisées »32, affirma Hong Chong-jan, le nouveau directeur du département. Un tel dirigisme contredit l’engagement pris par Chen Shui-bian que « le gouvernement ne supprimerait pas la liberté de la presse ou la liberté d’expression sous prétexte de considérations de sécurité nationale », et pressa les médias à développer des procédés d’autorégulation.

31Le gouvernement a continué à prendre des mesures pour améliorer la « qualité » des médias. En octobre 2003, s’est ouvert le bureau préparatoire de la nouvelle Commission nationale des communications (guojia chuanbo weiyuanhui). Cette organisation indépendante, responsable devant le Yuan exécutif, supervisera et réglementera les secteurs des télécommunications, des médias et des technologies de l’information. Sa création reflète le brouillage des frontières entre diffusion et communication. Plus inquiétant, cette commission est responsable de la censure des données en ligne, des programmes télévisés et radiophoniques, ainsi que des autres programmes diffusés par des moyens de communication de masse. Les membres de la commission sont nommés par le Premier ministre pour des mandats de cinq ans, et remplaceront le GIO.

32Taiwan fait-il un pas en avant et deux pas en arrière ? Le gouvernement peut-il réellement favoriser la qualité et une meilleure éthique professionnelle en légiférant ? Le gouvernement devrait créer un cadre permettant une autorégulation (par exemple en donnant plus de pouvoir aux activistes et aux groupes travaillant sur les médias dans la société civile) plutôt qu’essayer d’interférer directement dans la production.

33Un des défis les plus pressants est l’absence de loi définissant et réglementant les informations secrètes. L’arbitraire est la règle et donne au gouvernement et au GIO quasiment la même emprise sur les médias que sous le KMT. Par exemple, l’article 21 de la Loi sur la radio et la télévision interdit aux programmes télévisés de répandre des rumeurs ou de présenter des informations qui troubleraient la loi et l’ordre, mais ne fournit aucun détail précis et ne stipule pas dans quelles circonstances le gouvernement pourrait se servir de cette loi. Ni les médias ni le gouvernement ne savent clairement où sont les frontières et où sont les responsabilités. Les journalistes peuvent toujours être victimes d’abus et d’intimidations. Ils sont souvent surveillés, leurs bureaux peuvent être fouillés, et parfois leurs téléphones (ainsi que ceux de leurs familles et amis) sont mis sur écoute.

34Par exemple, en octobre 2000, des membres du Bureau du procureur du district de Taipei ont perquisitionné les bureaux et les domiciles de journalistes travaillant au quotidien du soir du groupe China Times, le Zhongshi wanbao (China Times Express). Ils recherchaient des renseignements sur une affaire de corruption au Bureau national de la sécurité que des fonctionnaires avaient révélée à la presse. Les journalistes se sont plaints qu’ils étaient sous étroite surveillance. Les enquêteurs justifièrent leur action par des raisons de « sécurité nationale ». Ils affirmèrent que les fuites auraient pu inclure des « secrets d’Etat hautement sensibles » qui menaçaient la vie de membres du bureau.

35Toutefois, le plus souvent, les intimidations ne sont pas politiques, mais sont le fait du milieu criminel. Des enquêteurs officiels ont perquisitionné les bureaux de l’hebdomadaire de Jimmy Lai à Taiwan, Next Magazine, et des hommes de main ont saccagé les locaux après que le magazine eut publié des révélations sur certaines activités criminelles. Une forme d’intimidation plus subtile, et de plus en plus populaire, est la menace de poursuites en diffamation. En effet, on dit d’Antonio Chiang, qui fut brièvement le rédacteur en chef du Taiwan ribao (Taiwan Daily) en 1996, que sa principale activité était « d’aller au tribunal », alors que son journal fut poursuivi six fois en trois mois. Les lois contre la diffamation représentent un risque sérieux pour la liberté des médias taiwanais, mais elles sont nécessaires étant donné le développement des reportages à sensation qui violent la vie privée. Là encore, il faut trouver un équilibre, et faire en sorte que les lois contre la diffamation soient si rigoureuses que les médias et le public sachent précisément quelles sont les lois enfreintes, à quelles condamnations ils s’exposent, et quand le recours aux tribunaux est possible.

36Des partisans du libéralisme ont vu la solution dans la régulation par le marché, qui confère du pouvoir aux consommateurs. Commentant les projets de réforme des médias du gouvernement par l’imposition de nouvelles régulations, un membre du cabinet de Chen Shui-bian affirmait sous le couvert de l’anonymat : « moins le gouvernement interfère, mieux c’est. Si les gens n’aiment pas telle ou telle chaîne de télévision ou station de radio dont ils pensent qu’elle est manipulée par tel ou tel parti ou individu qu’il déteste, il suffit qu’ils ne la regardent pas ou ne l’écoutent pas. C’est aussi simple que cela ! ».

37La vie éphémère du Shoudu zaobao (Capital Morning Post), quotidien fondé en mai 1989 par Kang Ning-hsiang, membre de premier plan du PDP, illustre clairement le pouvoir des forces du marché. Le journal fermait ses portes en août 1990, non pas parce qu’il se faisait l’écho d’opinions politiques impopulaires, mais parce qu’il n’avait pas su capter une part suffisante de marché. En 2000, le GIO informait le Taiwan xinwen bao (Taiwan Daily News), journal appartenant au gouvernement provincial de Taiwan et basé à Kaohsiung, qu’il devrait fermer s’il ne devenait pas plus rentable. Le titre a réduit son envergure à une dimension plus locale et licencié 200 personnes. Même des médias contrôlés par l’Etat ne sont pas à l’abri de la main invisible du marché33.

38Pour autant, le marché ne garantit pas la qualité. Au fur et à mesure que la concurrence s’intensifie, les médias sont moins capables d’innovation, et préfèrent se battre pour capter les parts d’audience avec les mêmes formats. Cette concurrence est particulièrement vive dans la télévision, où les chaînes nationales ont désormais pour rivales les chaînes câblées qui gagnent en popularité34.

39En outre, faire comme si la concurrence conférait du pouvoir au consommateur est quelque peu malhonnête. Alors que le gouvernement a contribué à dégager les médias de l’influence politique, un examen attentif de la télévision câblée révèle que le pouvoir est concentré dans les mains de quelques conglomérats très puissants. Pour éviter des situations de monopole, la Loi sur la télévision câblée, adoptée par le Yuan législatif en 1993, stipulait que deux opérateurs au moins devraient desservir chaque région géographique. Mais au cours de la concurrence acharnée qui suivit, certains opérateurs bloquaient les chaînes de leurs concurrents. En même temps, il arrive souvent que les plus gros opérateurs éliminent leurs concurrents de moindre importance. En contradiction avec la Loi sur la télévision câblée, chaque région est désormais dominée par un seul opérateur ; seules quelques régions comptent deux opérateurs ou plus (voir tableau 2).

Le marché de la télévision câblée en décembre 2002

Le marché de la télévision câblée en décembre 2002

Sources : Chen Bing-hong, Jiegou meiti, op. cit. pp. 291-292.
NB : * En prenant pour base que 5,5 millions de foyers sont abonnés à la télévision câblée dans l’île.
** Dans ces régions, certains opérateurs utilisent des noms différents pour obtenir leur licence. Deux opérateurs, ou plus, peuvent appartenir en réalité au même consortium.

40Depuis l’arrivée à la présidence de Chen Shui-bian en 2000, le gouvernement a proposé de nombreux amendements techniques à la Loi sur la télévision câblée pour réduire les possibilités de monopole. Mais cela a eu peu d’impact. Cet échec est à imputer aux mêmes raisons que celles qui ont rendu difficile la réforme dans d’autres secteurs : un Yuan législatif dominé par l’alliance bleue combattant contre un exécutif PDP, et les intérêts politiques et commerciaux de certains députés.

41Les médias taiwanais ont connu une transformation radicale et rapide depuis 1987. Alors qu’ils étaient au service du gouvernement KMT, les médias sont désormais plus forts que jamais auparavant pour mettre en cause les décisions et le comportement de la classe politique. Les médias ont aujourd’hui des obligations de transparence et de responsabilité, et ce sont d’importants indices du niveau de démocratie atteint. Le rôle du KMT dans l’établissement de ces fondements est indéniable, mais d’importants progrès ont également été accomplis sous l’administration de Chen Shui-bian. Toutefois, des problèmes persistent : celui de la propriété n’est toujours pas résolu, et la partialité continue à être préoccupante, en particulier dans les médias à tendance bleue en période électorale. En outre, la qualité du travail journalistique est un motif d’inquiétude. Le déclin sensible de la déférence envers l’autorité, encouragé par la progression de la liberté de parole, le pluralisme et la concurrence, pose de nombreux problèmes. Taiwan fait face à un dilemme : le gouvernement peut-il légiférer sur la qualité, et par là risquer d’être critiqué pour entraves aux libertés qui furent si longues et si difficiles à obtenir ? Ou la régulation peut-elle ne dépendre que du marché et du consommateur – de son droit de ne pas acheter tel ou tel journal ou de changer de chaîne de télévision ?

42L’épidémie du SRAS (Syndrome respiratoire aigu sévère) en 2003 fut particulièrement révélatrice, et le débat sur la ligne de démarcation entre le droit du public à savoir et le sensationnalisme perdura longtemps après que l’Organisation mondiale de la santé eut retiré Taiwan de la liste des zones infectées. Un sondage révéla que 65 % des 1 093 personnes interrogées pensaient que les reportages ayant trait au SRAS étaient « trop sensationnels ». 30 % les décrivaient par ailleurs comme superflus et insupportablement répétitifs. Il semble que les informations précises étaient difficiles à obtenir, et que seule comptait la vitesse de diffusion des reportages sur les chaînes d’information continue35. Les spécialistes du secteur affirment que des règles de base telles que la vérification des faits et des sources, ne furent pas observées. Tous les médias tentent actuellement de tirer des leçons de la crise du SRAS. Ces problèmes ne sont pas pour autant spécifiques à Taiwan ; les Britanniques et les Américains furent l’objet de critiques similaires quant à leur couverture de la guerre contre l’Irak en 2003. Peu de reporters sur la ligne de front possédaient une expertise militaire, et le gouvernement britannique et la BBC se trouvent mêlés à une querelle explosive à propos de la fiabilité des sources. L’expérience de Taiwan pendant l’épidémie du SRAS démontre qu’après tout ses médias répondent tout simplement aux défis d’une société démocratique. C’est là un apprentissage difficile pour tous.

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Notes

1 Ce sont les auteurs qui soulignent.
2 Freedom House, par exemple, utilise la situation des médias comme indicateurs dans l’évaluation du niveau de démocratie d’un pays. Voir « Freedom in the world », http://216.119.117.183/research/freeworld/2001/table1.htm
3 Voir Gary D. Rawnsley et Ming-Yeh T. Rawnsley, Critical Security, Democratisation and Television in Taiwan, Londres, Ashgate, 2000.
4 L’alliance bleue fait référence au Kuomintang, au Parti du peuple (Qinmindang) et aux vestiges du Nouveau Parti (Xindang).
5 Voir Frank Muyard, « Taiwan, naissance d’une nation ? », Perspectives chinoises, n° 82, mars-avril 2004, pp. 33-48.
6 Sur la consolidation, voir G. O’Donnell, p. C. Schmitter, et L. Whitehead (éds.), Transitions from Authoritarian Rule, 4 vol., Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1986 ; Samuel Huntington, The Third Wave: Democratisation in the Late Twentieth Century, Norman, University of Oklahoma Press, 1991 ; L. Diamond, M. F. Plattner, Y. H. Chu, H. M. Tien (éds.), Consolidating the Third Wave Democracies: regional Challenges, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1997. Taiwan n’a pas encore passé le « test du double tournant » de la consolidation, caractérisé par le fait que le parti au pouvoir (le PDP) subit une défaite électorale. Voir Huntington, The Third Wave, pp. 266-267.
7 Voir le Xinwen yewu shouce (Manuel pour les métiers de l’information), Taichung, Bureau de l’information de la province de Taiwan, 1983, p. 17.
8 Votée en avril 1952, amendée en 1958 et en 1973, finalement abrogée le 25 janvier 1999.
9 La Loi sur les Publications et d’autres textes imposaient des restrictions à la création de nouveaux journaux, aux nombre de pages, aux conditions d’impression et de distribution. Ces mesures ont gelé jusqu’en 1987 le nombre de titres autorisés à 31.
10 Patricia Batto, « Taiwan : les conséquences de la démocratisation sur la presse quotidienne », Perspectives chinoises, n° 80, novembre-décembre 2003, p. 65.
11 Bruce J. Jacobs, « Taiwan’s Press: Political Communications Link and Research Resource », China Quarterly, vol. 68, n° 4, 1976, pp. 778-788. Le Taiwan Times est toutefois devenu plus conservateur après son rachat en 1982 par la famille Wang à Kaohsiung.
12 Sur l’importance des médias illégaux sur le développement politique de Taiwan, voir G. D. Rawnsley, « The Media and Popular Protest in Taiwan », Historical Journal of Film, Radio and Television, vol. 20, n° 4, 2000, pp. 565-580.
13 Avec un taux de pénétration du câble de 82 %, Taiwan est le marché de télévision payante le plus saturé au monde, devant les Etats-Unis et le Japon. Alkman Granitsas, « Digital to the Rescue », Far Eastern Economic Review, 17 octobre 2002, pp. 46-48. Les opérateurs du câble à Taiwan produisent habituellement quatre séries de chiffres quant au nombre de leurs abonnés : aux opérateurs du canal, ils fournissent un chiffre bas afin de payer le moins cher possible ; au GIO, ils fournissent un chiffre « moyen » afin que leur pénétration n’excède pas les limites légales ; aux annonceurs, ils fournissent un chiffre élevé afin d’obtenir le plus possible de revenus publicitaires ; les chiffres qui sont les leurs demeurent secrets. C’est pourquoi le taux de pénétration présenté ici est différent de celui du tableau 2 (les sources utilisées ne sont pas les mêmes).
14 Dépendant du Yuan exécutif, le Government Information Office (GIO) « a pour mission de clarifier la politique nationale, de rendre publics les arrêtés gouvernementaux et les réalisations de l’administration, de faire paraître les informations importantes sur le sol taiwanais et à l’étranger, d’employer utilement les médias de masse, de développer activement l’information outre-mer et les projets culturels, et de renforcer la communication culturelle avec la Chine continentale. Le GIO offre ainsi une large variété de services d’information aux médias et aux personnes à Taiwan et à l’étranger », Republic of China Yearbook, 1996, Taipei, GIO, 1996.
15 Cité dans Batto, « Taiwan : les conséquences de la démocratisation sur la presse quotidienne », op. cit., p. 71.
16 Ibid.
17 Avant que le PDP ne fût formé et légalisé, les dangwai (c’est-à-dire les « hors-parti ») publiaient de nombreuses revues souterraines ou dissidentes qui étaient un moyen d’organisation, de recrutement et de mobilisation pour l’opposition. Voir Rawnsley, « The Media and Popular Protest in Taiwan », op. cit.
18 Voir Ming-Yeh T. Rawnsley, « Communications of Identity in Taiwan: from the February 28th Incident to the Formosa Television Corporation », in Gary D. Rawnsley et Ming-Yeh T. Rawnsley (éds), Political communications in Greater China, Londres, Routledge Curzon, 2003, pp. 147-166.
19 Taipei Times, édition en ligne, 2 juin 2000.
20 41,1 % dans China Television Company (CTV), 97 % dans la Broadcasting Corporation of China (BCC), et 7 millions de parts dans Taiwan Television Company (TTV).
21 Voir Lee Ming-tsung, « Media outlets more blue than blue », Taipei Times, 6 avril 2004, p. 8.
22 Ibid.
23 Des vues similaires sont exprimées dans le Taipei Times, édition en ligne, « Editorial : in response to our critics », 12 janvier 2004.
24 Zhonghua minguo guanggao nianjian 2001-2002 (Advertising Yearbook of Taiwan, the ROC, 2001-2002), p. 97.
25 Ibid, pp. 328-332.
26 Taipei Times, édition en ligne, 3 mars 2003.
27 Les journaux à Taiwan fournissent parfois des chiffres contradictoires. D’après d’autres données, Apple Daily affiche une circulation de 400 000 à la fin de 2003. Voir Batto, « Taiwan : les conséquences de la démocratisation sur la presse quotidienne », op. cit., p. 76.
28 Taipei Times, édition en ligne, 5 juin 2000.
29 Ibid.
30 Souligné par les auteurs.
31 « New group takes aim at “vulgar” TV », Taipei Times, édition en ligne, 12 octobre 2003.
32 Souligné par les auteurs.
33 Le Taiwan Daily n’est pas le seul média contrôlé par l’Etat menacé par le marché. En fait, tous les anciens médias dits « publics », possédés ou financés par l’Etat, le gouvernement ou l’armée, connaissent d’immenses difficultés financières depuis 1987. Par exemple, les deux titres publiés par le KMT, le Zhonghua ribao (China Daily News) et le Zhongyang ribao (Central Daily News).
34 Depuis la légalisation de la télévision câblée en 1993, l’audience des chaînes hertziennes nationales a beaucoup décliné. En 1994, 73 % des spectateurs préféraient regarder les télévisions nationales, TTV, CTV et CTS ; sept ans plus tard, en 2001, ces chaînes ne comptaient plus que 42 % d’audience. Voir Chen Bing-hong, Jiegou meiti (Deconstruction du système médiatique), Taipei, Yeh-yeh Book Gallery, 2003, pp. 78-80.
35 Il y a actuellement plus de dix chaînes d’information continue locales à Taiwan, pour 23 millions d’habitants, alors qu’il n’y a que deux chaînes de ce genre aux Etats-Unis (CNN et Fox News) et trois en Grande-Bretagne (BBC News 24, ITV News Channel et Sky News).
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Table des illustrations

Titre Qui contrôle les chaînes de télévision hertziennes ?
Légende Sources : Wang Zhen-huan, « Guangbo dianshi meiti de Kongzhi quan » (Le contrôle des médias de radiodiffusion et de la télévision), in Zheng Rui-cheng et al. (éds), Jiegou guangdian meiti : jianli guangdian xin zhixu (Déconstruction des médias de radio- et télédiffusion : établir un nouvel ordre pour la radio- et télédiffusion), Taipei, Cheng Society, 1993, pp. 77-128 ; Ming-Yeh T. Rawnsley, Public Service Television in Taiwan, thèse non publiée, Université de Leeds, 1998 ; Chen Bing-hong, Jiegou meiti (Déconstruction du système médiatique), Taipie, Yeh-yeh Book Gallery, 2003, pp. 289-290.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/perspectiveschinoises/docannexe/image/683/img-1.jpg
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Titre Le marché de la télévision câblée en décembre 2002
Légende Sources : Chen Bing-hong, Jiegou meiti, op. cit. pp. 291-292.NB : * En prenant pour base que 5,5 millions de foyers sont abonnés à la télévision câblée dans l’île.** Dans ces régions, certains opérateurs utilisent des noms différents pour obtenir leur licence. Deux opérateurs, ou plus, peuvent appartenir en réalité au même consortium.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/perspectiveschinoises/docannexe/image/683/img-2.jpg
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Pour citer cet article

Référence électronique

Gary D. Rawnsley et Ming-Yeh T. Rawnsley, « La réforme du secteur des médias. D’importants progrès ont été accomplis sous l’administration de Chen Shui-bian »Perspectives chinoises [En ligne], 85 | septembre-octobre 2004, mis en ligne le 01 septembre 2007, consulté le 25 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/perspectiveschinoises/683

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