Navigation – Plan du site

AccueilNuméros36État de la rechercheComptes rendusOuvrages collectifsTranslatio. Traduire et adapter l...

État de la recherche
Comptes rendus
Ouvrages collectifs

Translatio. Traduire et adapter les Anciens

Marylène Possamaï-Pérez
Référence(s) :

Translatio. Traduire et adapter les Anciens, études réunies par Corinne Bonnet et Florence Bouchet, Paris Classiques Garnier, 2013, 332 p.

Texte intégral

1 À travers la diversité des approches (multiséculaires et multigénériques), ce recueil aborde en profondeur nombre des problèmes posés par l’opération de traduction : que traduire (qu’est-ce qui est digne d’être traduit ?), comment traduire (ad verbum ou ad sensum ? C’est le problème de la fidélité à l’original), pour qui et pourquoi traduire (le traducteur fait-il œuvre de vulgarisation ou d’élitisme) ? Le traducteur est-il un interprète ou un auteur à part entière ?

2 Les contributions sont réparties en trois grands axes : le premier, « Penser la traduction », réunit les articles de Bruno Rochette (qui envisage le dilemme « traduire ou ne pas traduire » successivement du point de vue des traducteurs grecs de l’Ancien Testament, de Cicéron et de saint Jérôme), Pierre-Emmanuel Dauzat (qui étudie la valeur fondatrice du contresens initial dans son article « L’ombre portée de la traduction »), Olivier Guerrier (qui analyse les enjeux et mutations de la relation entre auteur et public aux xvie et xviie siècles), Marine Molins (qui s’appuie sur l’exemple de Charles Fontaine pour montrer que la traduction de textes antiques est au xvie siècle source d’inspiration autant que matière à réflexion) et Jean-Noël Pascal (qui s’intéresse aux traductions des Bucoliques et des Géorgiques qui, entre 1770 et 1820, « naturalisent » Virgile en vers français) : ces articles posent les questions de l’identité, de la singularité, de la vérité d’un texte. Dans l’Antiquité, que ce soit pour les traductions du grec au latin ou pour le dialogue difficile entre hellénisme et judaïsme, puis entre judaïsme et christianisme, l’enjeu crucial est le respect de la vérité. La Renaissance réintroduit l’alternative entre lettre et sens, en particulier lorsque l’on passe d’une langue flexionnelle comme le grec ou le latin à une langue analytique comme le français. Le xviiie siècle débat sur le choix de la prose ou du vers pour « naturaliser » les poètes anciens, ce qui mène en définitive à l’autonomie du texte traduit.

3 Le deuxième axe, « L’Antique comme enjeu de transferts culturels », rassemble les contributions d’Alexandra Dardenay (qui étudie les aspects de la translatio de l’art grec à Rome, tour à tour interpretatio, imitatio, adaptatio, et aemulatio), Daniel W. Lacroix (qui revient sur la traduction des textes latins en prose norroise au Moyen Âge), Francine Mora (qui se penche sur les différentes versions manuscrites du Roman d’Enéas, du xiie au xive siècle), Anne-Hélène Klinger-Dollé (qui examine quelques traductions de Platon, en latin et en français, à la Renaissance, en montrant qu’elles révèlent une philosophie de l’amour en même temps qu’elles sont fictions poétiques), et Luigi-Alberto Sanchi (qui montre comment Guillaume Budé conduit la translatio studiorum jusqu’à son De transitu). Ces contributions montrent que, de l’imitation à l’appropriation, de l’émulation à l’adaptation, la traduction répond à un horizon d’attente ou à des visées politiques.

4 Enfin, le troisième axe, « Moderniser l’Antique : innover dans la tradition », est développé dans les articles de Violaine Giacomotto-Charra (qui retrace l’histoire du topos plinien de « la clémence de la terre » à la Renaissance), Laure Lévêque (qui étudie l’utilisation politique de la pensée antique entre 1780 et 1850), Cédric Chauvin (qui aborde la traduction de l’Odyssée par Philippe Jaccottet) et Jean-Yves Laurichesse (qui analyse quant à lui la version de la bataille de Pharsale par Claude Simon). Ces articles démontrent comment la traduction peut devenir le socle de l’innovation. Ainsi à la Renaissance, l’Histoire naturelle de Pline fournit une alternative à la Physique d’Aristote ; ce sont les modèles politiques de l’Antiquité qui intéressent le xviiie siècle. Au xxe siècle, les mythes antiques revisités innervent le théâtre de l’entre-deux guerres. De ces études nombreuses et variées se dégage la conclusion que « l’Antiquité ne peut nous parvenir que diffractée et plurielle ».

5 Une bibliographie générale en fin de volume permet de prolonger et élargir les perspectives. L’index (titre d’œuvres, noms de personnes, lieux) fournit au lecteur de multiples entrées pour circuler dans l’ouvrage.

6 Il s’agit donc ici d’un ouvrage du plus grand intérêt, qui fait le point sur la transmission des œuvres antiques, du Moyen Âge à nos jours, tout en renouvelant et en enrichissant la réflexion sur les conceptions et le travail de traduction à travers les siècles.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Marylène Possamaï-Pérez, « Translatio. Traduire et adapter les Anciens »Perspectives médiévales [En ligne], 36 | 2015, mis en ligne le 01 janvier 2015, consulté le 20 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/peme/9171 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/peme.9171

Haut de page

Auteur

Marylène Possamaï-Pérez

Université Lyon II

Articles du même auteur

Haut de page

Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search