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Droit et Violence dans la littérature du Moyen Âge

Stéphane Marcotte
Édité par Philippe Haugeard et Muriel Ott
Référence(s) :

Droit et Violence dans la littérature du Moyen Âge, Philippe Haugeard et Muriel Ott (éd.), Paris, Classiques Garnier, « Esprit des lois, esprit des lettres 2 », 2013, 280 p.

Texte intégral

1Philippe Haugeard introduit (p. 7-18) les quatorze contributions de ce volume – pourvu comme il se doit d’une copieuse bibliographie (p. 253-266) et de deux index, des noms (p. 267-269) et des notions (p. 271-275) – par des considérations girardiennes sur la violence qui placent le propos dans une perspective non seulement littéraire mais aussi anthropologique. L’éditeur situe ensuite la thématique retenue dans le cadre plus particulier du Moyen Âge, indiquant dès l’abord la difficulté de comprendre ses enjeux dans une mentalité qui nous est devenue si étrange, dans laquelle la violence est « plutôt une valeur » (p. 9), voire un droit (comme le suggère plus loin Sarah Baudelle-Michels, p. 198), et où la participation divine au rétablissement de la justice se traduit par des formes aujourd’hui répudiées de procès (ordalie, jugement de Dieu, duel). C’est donc à cette étrangèreté du droit médiéval, marqué au surplus par la relativité et la pluralité, que ces articles nous introduisent, enrichissant ainsi sensiblement notre compréhension même de la littérature, ce qui ne fournit pas la moins bonne raison de s’atteler à leur lecture.

2La première partie (« Penser le droit, le pouvoir et la force ») est ouverte par un très bel article de Florence Goyet (« Le procès dans la Chanson de Roland, homologue de la démarche épique », p. 21-38) qui part d’une observation, à mon humble avis fort intelligente, que nous lisons les épopées (la première nôtre en particulier) comme des visions du monde construites et non en construction ; l’épopée, en effet, est toujours un texte de crise (lato sensu) destiné à résoudre un problème que nous lisons comme résolu dans l’ordre des valeurs aujourd’hui admis (celui par exemple du refus de la vengeance privée, récusée in fine dans l’œuvre turoldienne), alors que l’œuvre n’est précisément que la recherche d’une solution, une croisée des chemins. Dans la Chanson de Roland, ce moment de crise est réglé par un procès, et plus précisément par le combat judiciaire qui le tranche. Suit une analyse, courte, mais dense et dénuée d’artifice, de la rhétorique judiciaire déployée par les deux camps, celui d’un Ganelon partisan d’une guerre menée avec des objectifs précis et limitée dans le temps, mais aussi celui du droit à la vengeance de l’insulté ; celui d’un Roland partisan de la guerre à outrance, mais aussi celui du déni de la vengeance qui n’est pas au service du roi. La polyphonie dans le texte empêche la simplicité de la lecture, en affrontant la position héroïque de Roland à la position vassalique d’Olivier, la position féodale de Ganelon à la position régalienne de Thierry, sans les dénaturer. La seconde contribution de cette section, d’Éléonore Andrieu (« “Si le destraing par mi le cors” : droit et violence dans l’essart. Le Chevalier au Lion de Chrétien de Troyes », p. 39-51), met l’épisode de Calogrenant, placé au début du Chevalier au Lion (roman qui, selon É. A., « évoque, à travers l’animalité, les composantes essentielles de la domination et la dialectique droit/violence qui les structure : justitia et misericordia », p. 39), en relation avec la réflexion menée par les théoriciens de la réforme grégorienne sur « l’ordre social et les différentes composantes de la domination » (p. 40). Cette rencontre de Calogrenant et du gardien de taureaux fait apparaître chez ce dernier une conception « préhistorique » de la potestas, fondée sur la force coercitive, qui s’oppose à la vision grégorienne de la domination, portée par Calogrenant, « chevalier courtois, saturé de savoirs cléricaux » (p. 49), fondée sur la mansuétude. Mais le texte, loin de répudier la première, la spiritualise et en valorise l’antériorité qui « l’inscrit au cœur de l’ordre du monde », pour en faire « un principe nécessaire au gouvernement des hommes » (p. 50). Le tiers article de cette section, dû à Christopher Lucken (« “La raison du plus fort”. Le témoignage de la fable [Le Loup et l’AgneauLe Chien et la Brebis] », p. 53-71), part des considérations d’Aristote sur la violence et le langage, dont il examine la relation dans deux fables inspirées du corpus phédrien (I, 2, I, 17 et I, 18) couramment citées au Moyen Âge et dont l’article étudie plusieurs variantes ou suites, dont celle donnée par Nicole Bozon dans ses Contes moralisés (n° 55). L’article s’achève sur une réflexion sur le rôle même de la fable ésopique dans la revendication du droit (p. 68-71) qui, sans doute, excède largement vers l’amont la période retenue pour ce volume, mais qui situe le propos de l’auteur dans une perspective générale qui ne me paraît pas déplacée.

3La seconde partie (« Pratique judiciaire et motif littéraire ») est introduite par une contribution de Claude Roussel (« Le duel judiciaire dans les chansons de geste tardives », p. 75-89) qui s’attache au motif littéraire du duel judiciaire ou gage de bataille, à une époque où celui-ci était progressivement exclu de la pratique judiciaire réelle, dans une dizaine de chansons de geste où il figure, dans ces textes qui décrivent un monde « incertain, chaotique, aux repères brouillés », avec une constante fonction narrative et morale, celle de rétablir « pour un temps une hiérarchie acceptable des valeurs » (p. 88). Cette étude est, pour l’essentiel, une utile et instructive typologie du motif (fréquence, importance, lieux, circonstances, organisation, rituel, déroulement, narration), qui permet de comprendre que celui-ci est, dans les textes tardifs, individualisé (l’innocent affronté au coupable) et non plus situé sur le plan social des relations entre le roi et ses vassaux. Jérôme Devard poursuit avec un intéressant article sur le bannissement (« “Qui bon i vont, mal en revenent” (sic) ». La pratique du bannissement épique aux xiie-xiiie siècles : triomphe de la violence et échec du droit », p. 91-104). La première partie de l’article esquisse une typologie des « exclusions », bannissement proprement dit ou pèlerinage obligatoire, limité ou non dans le temps, assorti de peines complémentaires (confiscation des biens, qui équivaut à la proscriptio du droit romain), prononcé dans un cadre proprement judiciaire ou résultat d’un compromis « diplomatique ». La seconde partie de l’article traite du retour des bannis, cas général dans les chansons de geste, où le banni revient pour (faire) restaurer le bon droit, lorsque le bannissement est estimé injuste. Précisons que le sujet est abordé à partir des chansons de gestes, mais aussi du Roman de Renart, leur avatar burlesque, très sollicité, et que dans tous les cas ces textes présentent des fictions de droit qui ne se proposent pas d’autre but qu’une réflexion sur la justice du roi. La conclusion de l’article est stimulante, qui rappelle que le bannissement est la peine divine par excellence, mais aussi une « matrice de violence » (p. 104), peine qui échoue à rétablir l’ordre rompu, depuis celui d’Adam et Ève (de l’Eden), puis celui de Caïn. Nous devons à Sophie Albert (« Droit et violence dans l’humiliation publique du chevalier. xiie-xiiie siècles », p. 105-119) le deuxième article de cette section qui s’intéresse aux nombreuses scènes d’humiliation publique infligées à des chevaliers dans la littérature, romanesque ou épique, du Moyen Âge. L’auteur situe d’abord l’humiliation dans l’ensemble des procédures juridiques de réparation en usage au Moyen Âge, dont elle suit la progressive christianisation et qu’elle relie d’abord à l’harmiscara, mentionnée dès le ixe siècle dans les capitulaires carolingiens, par laquelle est exposé à la dérision publique celui dont le déshonneur subi doit compenser un déshonneur causé (p. 106). Après quelques observations sur Raoul de Cambrai ou Amadas et Ydoine, l’auteur concentre son attention sur quatre textes, Aiol (qui met en scène un chevalier guère mieux accoutré que Don Quichotte), Tristan (de Béroul), le Roman de Meliadus et le Roman de Guiron qui exaltent tous quatre la noblesse de la condition chevaleresque, contre l’opinion hésitante de la plebs et la justice défaillante du roi. Le troisième article, bien agréable aussi par sa clarté et lisible même par ceux qui n’ont pas toute la matière arthurienne en mémoire, dû à Patrick Moran (« Châtiment divin et délivrance différée dans le Cycle Vulgate. Autour du personnage de Symeu », p. 121-134), creuse la question du droit et de la violence à partir du personnage de Symeu (mais il s’intéresse également au personnage de Chanaan, meurtrier de ses douze frères), neveu de Joseph d’Arimathie, qui, dans l’Estoire del saint Graal, se trouve condamné, par la justice divine, à rester enfermé dans une tombe ardente où il se consume jusqu’à sa délivrance par Galaad pour avoir voulu tuer son cousin Pierre. Symeu est un second couteau, mais sa délivrance, remise et empêchée avant l’arrivée du Bon chevalier, le fait « durer », du premier épisode du Cycle jusqu’à l’avant-dernier, en sorte qu’il se manifeste, si l’on peut dire, à plusieurs reprises entre temps. L’auteur s’intéresse à la façon dont les différentes étapes du Cycle (Estoire, Lancelot, Queste), selon leur visée propre et non sans contradiction apparente entre elles, traitent du sort de ce personnage et argumentent sur le motif du châtiment. À Nicolas Lombart est due la quatrième contribution de la section (« L’emprisonnement, un supplice paradoxal. Lisibilité et illisibilité de la violence carcérale dans Le Prisonnier desconforté du château de Loches [xve siècle] », p. 135-152), très intéressante encore, qui part du paradoxe de la peine d’emprisonnement, réclusion qui soustrait aux regards le condamné (même lorsqu’elle se purge dans les aimables fillettes de Louis XI que l’on peut admirer au château de Loches), en un temps où le châtiment est avant tout démonstratif et exemplaire (la prison n’étant guère, avant la fin du xiiie s., que préventive ou coercitive et rarement pénale). Son corpus est l’un des fleurons de la « poésie carcérale » par laquelle les prisonniers tentent, selon l’auteur, de construire l’événement, et la publicité, dont les prive l’obscurité de leur peine. Le texte retenu, qui figure dans le titre de la communication, est un célèbre poème anonyme de 2366 vers (en huitains octosyllabiques) daté de 1488, dont N. L. fait l’étude minutieuse, tout à la fois stylistique et littéraire. S’il débouche sur une vision paulinienne de la « tribulation », qui lui donne une évidente hauteur spirituelle, l’intensité de sa révolte intérieure contre une violence carcérale évidée de son sens et sans autre terme défini que l’arbitraire royal, en fait un jalon important dans l’histoire de la poésie subjective. On lira cet article à la lumière des observations fournies par B.-M. Tock (v. infra, p. 316) sur la valeur purgatoire du châtiment ignominieux, parfois souhaité pour cette raison par les condamnés eux-mêmes.

4La troisième section du volume s’intitule « Démesure de la violence et limites du droit ». Elle est inaugurée par Dorothea Kullmann (« Droit et violence dans le roman de Jaufré », p. 155-168) qui réfléchit à partir d’un roman arthurien de quelque 11000 vers, fortement marqué par les romans de Chrétien de Troyes et par Le Bel Inconnu, assez énigmatique quant à ses intentions, écrit en langue d’oc, daté des xiie-xiiie siècles (en gros entre 1170 et 1270) et localisable avec probabilité dans le grand espace catalan-baléares. L’auteur tente d’abord de définir les divers tons du texte (parodie, satire, critique sociale), avant de se concentrer sur l’une de ses particularités, savoir l’expression inhabituelle de la violence qui s’y rencontre. Elle offre (et nous lui en savons grand gré) un résumé d’une intrigue marquée par des péripéties où l’auteur ne s’embarrasse pas de vraisemblance mais qui, selon D. K., ressemblent à une « collection de cas juridiques » (p. 161), qu’elle a eu l’excellente idée de confronter à un recueil coutumier, les Usatges de Barcelona, découvrant ainsi que certaines situations du Jaufré s’y trouvent bel et bien traitées, à cette différence près que dans celui-ci la justice n’est pas rendue par le roi, mais par le chevalier, tandis que les Usatges réservent le droit de punir au souverain ; l’explication est simple : le Jaufré parle d’un monde passé, où les normes introduites par les Usatges ne s’appliquaient pas encore. Lydie Louison poursuit (« Crimes et châtiments dans le “bas pays” de Cristal et Clarie », p. 169-184) avec une réflexion sur la violence et le droit dans un roman non arthurien qui ne met en scène aucun procès. L’auteur décrit d’abord les diverses formes de violences qui émaillent le récit, et qui concernent aussi bien les humains, hommes et femmes, que la nature ; les animaux en particuliers s’y montrent redoutables et le héros éponyme, Cristal, justicier d’abord irréprochable et clément, en vient à son tour à commettre les actes qu’il redressait. Aussi l’auteur conclut-elle que ce roman sans procès, c’est-à-dire sans instance énonciatrice d’une vérité de droit, « ne propose ni vérité, ni solution politique au règne du mal » mais « cautionne finalement la raison du plus fort » (p. 184). Troisième dans cette série, l’article de Sarah Baudelle-Michels (« Le vol et le droit dans la prose bourguignonne de Renaut de Montauban », p. 185-199) s’intéresse au vol et à son traitement juridique dans la mise en prose, attribuée à David Aubert et datée de 1462, du cycle de Renaut de Montauban. L’article commence par une intéressante typologie sémasiologique à partir des termes larrecin (usage d’enchantements), roberie (usage de la violence) et brigandage (acte de guerre). Elle évoque ensuite le regard porté dans la diégèse sur ces actes et note que la prose se montre notablement moins conciliante que le vers à l’égard des forfaits du gentleman enchanteur-cambrioleur Maugis, jamais qualifié dans cette version tardive de bon ou noble larron, comme dans les versions du xiiie siècle. Sont enfin évoqués les châtiments réservés aux voleurs qui, dans ce texte, échappent à peu près tous aux conséquences judiciaires de leurs actes, en particulier les quatre Aymonides : « Dans ce texte touffu et tardif, où s’enchevêtrent forcément des voix hétérogènes et de multiples strates discursives, s’enchaînent ainsi, sans solution définitive, toutes les contradictions d’une fiction médiévale qui laisse transparaître, selon les épisodes, différents états du droit, mais aussi des idéologies contradictoires » (p. 198) ; ces idéologies qui s’affrontent, et entre lesquelles le texte ne prend pas parti, sont celle de la société à la fois plus profondément chrétienne et de plus en plus marquée par la circulation des personnes et des biens et celle de la vieille noblesse des chansons de geste pour laquelle la force des armes prime sur le droit.

5La quatrième et dernière partie de l’ouvrage est consacrée à des considérations historiques (« Le témoignage de l’histoire ») ; elle n’est ni inutile ni mal venue, bien au contraire, car ses trois articles sont passionnants, mais elle n’est pas annoncée dans le titre et oriente le volume vers une fin différente de son début, et c’est un bien pur historien, Benoît-Michel Tock, qui ouvre cette section par un article purement historique (« “Crimina universo mundo execrabilia” ». Droit et violence en Flandre en 1127-1128 », p. 203-218) consacré à l’assassinat du comte de Flandre, Charles le Bon, en l’église Saint-Donatien de Bruges, et aux désordres qui s’en suivirent. L’article s’interroge sur la place du droit dans le déchaînement de violence consécutif à ce meurtre, en se fondant sur deux textes, l’un est de Galbert de Bruges, le De multro, traditione et occisione gloriosi Karoli comitis Flandriarum, l’autre de Gautier de Thérouanne, la Vita Karoli comitis Flandriae, rédigés peu après les événements. Je ne puis résumer le contenu de cette contribution, mais, en tant que grammairien, j’attire l’attention sur les paragraphes consacrés au « champ lexical du droit et de la justice » (p. 207-208) ; très utiles aussi, pour les non-spécialistes que nous sommes, les remarques sur la pluralité des droits en cette période du Moyen Âge, marquée par la concurrence des droits civil et ecclésiastique, sans parler des droits locaux encore en vigueur. L’auteur tire de cet examen la conclusion que cette multiplicité de droits, partiellement superposables, a finalement joué son rôle, non sans confusion mais non sans une souplesse que nous serions enclin à envier. Bernard Ribémont donne la deuxième contribution de cette section (« Réglementation de la violence en contexte urbain [xiie-xvie siècle]. L’exemple de Cambrai et du Cambrésis », p. 219-238), et porte un regard minutieux sur un large pan de l’histoire du Cambrésis, qu’il étudie à travers un vaste corpus de textes de nature juridique, qui vont des chartes aux Gesta épiscopaux. L’article expose de façon très claire la situation de la ville et de son droit criminel, en des temps marqués par de constantes dissensions entre le seigneur-évêque (qui tient son autorité de l’empereur) et la population, depuis sa constitution en commune au tout début du xiie siècle jusqu’à l’homologation de son droit coutumier en 1574. En 1227 elle est dotée d’une forme de constitution municipale, la Lex Godefridi, qui établit un modus vivendi entre le prélat et ses sujets, au terme de troubles incessants ; ce texte est examiné assez en détail, ainsi que divers recueils de cas et d’observations diverses qui le complètent, dus à Siméon de Hennin, Jean de Barbaise et Charles de Hertaing. Malgré la référence à Raoul de Cambrai, in fine, l’ensemble est indiscutablement un travail d’historien. La section, et le recueil, se termine par un article de Florence Tanniou intitulé « “Esgart de court”, “espee forbie”. Droit et violence dans les Mémoires de Philippe de Novare » (p. 239-252). L’œuvre de Novare étudiée ici, écrite pour défendre la maison Ibelin contre l’empereur Frédéric II, a une visée ouvertement apologétique qui partage sans excès de nuances le droit et le tort entre la partie qu’il défend et celle qu’il attaque, tout en ne minimisant pas les violences exercées par les deux camps. Son propos n’est donc pas tant d’exonérer l’un des exactions et autres forfaits qu’il attribuerait à l’autre que de légitimer ceux de la maisnie des seigneurs de Beyrouth. Ce qui rend l’étude proposée par F. T. particulièrement intéressante est que Philippe est non seulement un mémorialiste mais un grand juriste, qui fonde sur le droit positif ses griefs, droit respecté par ses suzerains, bafoué par le camp impérial, accusé en particulier de constante traîtrise et de manque à la parole donnée. Mais l’auteur fait ressortir une situation plus complexe qu’il n’y paraît, puisque les droits invoqués par les deux camps ne sont pas les mêmes : droit de l’empire allemand pour Frédéric, écrit et savant, droit de Chypre et de Jérusalem, oral et coutumier, lequel sort finalement vainqueur de ce conflit, non sans un apport de mauvaise foi de la part de son champion.

6Je voudrais pour finir insister sur la qualité de ces contributions, qui passent en revue bon nombre des aspects du droit pénal au Moyen Âge, en particulier des châtiments destinés à réprimer et punir la violence (bannissement, emprisonnement, humiliation), tels qu’ils apparaissent dans les textes littéraires avec toutes les déformations que ceux-ci font subir aux realia. On pourra s’étonner qu’il ne soit guère question de la question, si ce n’est, sauf erreur, dans l’article de B. Ribémont (p. 236), qui la montre d’usage limité, et que le mot, ni ses équivalents, ne figure pas dans l’index (p. 271-275). Plus que tout, ces réflexions font apparaître l’importance de la question du droit dans une société qui ne dispose pas encore de sérieux moyens de police, et qui ne peut que s’en tenir à des principes juridiques pour sauvegarder sa cohésion. Beaucoup des textes évoqués mettent d’ailleurs en cause la justice royale et sa capacité à assurer une telle mission, sa légitimité pour le faire, en quoi ils sont porteurs d’interrogations qui ne cessent de parcourir les sociétés d’occident.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Stéphane Marcotte, « Droit et Violence dans la littérature du Moyen Âge »Perspectives médiévales [En ligne], 36 | 2015, mis en ligne le 01 janvier 2015, consulté le 08 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/peme/8188 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/peme.8188

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Auteur

Stéphane Marcotte

Université Paris IV-Sorbonne

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