Quatre siècles d’artisanat verrier forestier en Languedoc méditerranéen : l’atelier du mas de Baumes Ferrières-les-Verreries, Hérault, XIVe-XVIIIe s
Résumés
Cette monographie concerne l’un des sites verriers étudiés dans le cadre d’une recherche doctorale en archéologie menée entre 2007 et 2014. Implanté sur le causse de l’Hortus (Hérault), le Mas de Baumes (commune de Ferrières‑les‑Verreries) est présent dans les textes depuis le milieu du XIIIe siècle. Vaste domaine foncier trop éloigné de la ville pour permettre une exploitation directe, c’est par le biais des industries du feu, et tout particulièrement celle de l’artisanat verrier, que les divers propriétaires du domaine vont valoriser leur capital forestier. Durant plus de quatre siècles, jusqu’à la période révolutionnaire, un important pôle verrier, aux mains d’une oligarchie d’artisans issus de la petite noblesse, se développe et veille à alterner les centres de production afin de ne pas épuiser les ressources ligneuses de ce secteur des garrigues nord‑montpelliéraines.
Entrées d’index
Mots-clés :
artisanat, verre, archéologie, XIVe siècle, XVe siècle, XVIe siècle, XVIIe siècle, XVIIIe siècleKeywords:
craftsmanship, glass, archaeology, 14th century, 15th century, 16th century, 17th century, 18th centuryPlan
Haut de pageTexte intégral
- 1 COMMANDRÉ, Isabelle. L’artisanat du verre en Bas-Languedoc du XVIe au XVIIIe s. Thèse de doctorat e (...)
1L’artisanat verrier forestier connaît un développement particulièrement important dans la région bas-languedocienne qui bénéficie d’une tradition profondément ancrée et florissante depuis les XIIe‑XIIIe siècles jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Pour autant, les modes et structures de production sont encore peu documentés et l’historiographie en livre généralement l’image d’un modeste réseau d’officines diffusant des objets de consommation courante. Fondée sur la complémentarité des sources écrites, archéologiques et archéométriques, une thèse de doctorat, soutenue en 2014, a plus particulièrement privilégié l’analyse de ces fabriques1.
Fig. 1

Localisation des principaux établissements verriers médiévaux et modernes établis sur et autour du causse de l’Hortus (XIIe-XVIIIe s.)
© I. Commandré 2015
- 2 Il s’agit des communes de Ferrières-les-Verreries au nord, de Rouet à l’ouest et de Claret, Lauret (...)
- 3 Un taxon correspond à une entité d’êtres vivants regroupés ensemble, qui possèdent des caractères c (...)
2Parmi les espaces étudiés, celui du Causse de l’Hortus a fait l’objet d’une attention spécifique. En effet, il est actuellement reconnu comme le plus ancien et l’un des plus importants pôles de la production verrière de la région, actif depuis le milieu du XIIIe siècle au moins, avec plusieurs établissements reconnus par les textes et par l’archéologie (fig.1). Ce plateau calcaire de plus de 65 km que se partagent plusieurs territoires communaux2 est implanté au cœur des garrigues nord‑montpelliéraines, à une vingtaine de kilomètres de la ville. Avec une altitude moyenne de 300 m, il forme un vaste domaine forestier d’environ 3000 hectares, peuplé d’une chênaie mixte, riche en taxons méditerranéens3.
- 4 RIOLS, A. (Dir.). Rapport de sondages archéologiques au Mas de Baumes (commune de Ferrières- les-Ve (...)
3Aux périodes médiévale et moderne, cet espace fait l’objet d’une propriété fluctuante et mixte, aux mains de grands seigneurs laïcs et/ou ecclésiaux. Tous cependant centrent principalement l’exploitation de leurs bois autour de l’artisanat verrier qui s’ancre progressivement dans le maillage de grands mas, traditionnellement tournés vers l’agro‑pastoralisme. Parmi les nombreuses officines qui jalonnent l’Hortus, celle du mas de Baumes, implantée en bordure septentrionale du plateau, constitue l’un des plus considérables pôles d’activité. Aussi ce site bénéficie‑t‑il d’une importante documentation historique multiséculaire alors que les données archéologiques et matérielles demeurent encore ténues. Ces dernières ont été successivement constituées par deux campagnes de sondages réalisées pour l’une en 1993 sous la direction d’A. Riols et pour l’autre en 1994 sous la direction de F. Raynaud4. L’ensemble de ces données rassemblant plusieurs disciplines a permis, dans le cadre d’une thèse de doctorat soutenue en 2014, d’en dresser une monographie.
4Le mas de Baumes constitue actuellement un domaine de 200 hectares. Entièrement dévolu à l’agriculture et l’élevage durant le XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, la métairie est ensuite laissée à l’abandon par ses derniers occupants dans les années 1960. Ce n’est qu’au début des années 1990 que le SIVOM (syndicat intercommunal à vocation multiple) de l’Hortus en fait l’acquisition, en vue de restaurer progressivement les espaces bâtis et de les revaloriser par le biais d’une nouvelle activité économique et de la mise en place d’un sentier à vocation patrimoniale : le chemin des verriers. Les restaurations d’une partie des bâtiments sont achevées en 2005 et accueillent désormais un complexe hôtelier de luxe.
Chronologie générale d’occupation
- 5 Voir SAINT-QUIRIN, A. De. Les Verriers du Languedoc, 1290-1790. Montpellier, réédition de 1985, p. (...)
- 6 ROUQUETTE VILEMAGNE, 1914. Cart. Mag., tome III, n° DCCCLXIII, p. 531 : Reconnaissance faite au Roi (...)
5Le « mansio de Balma » est présent dans les textes bien avant que ne s’y trouve associée une quelconque activité artisanale. Mentionné en 1247 comme propriété de l’évêché de Maguelone, il est donné en fief à Pierre de Balmes qui en fait serment d’hommage au Prévôt5. Dès cette époque, le domaine est fragmenté : intégré pour une part dans le domaine royal et d’autre part comme une possession de l’évêque de Maguelone6. Les premiers indices indirects d’une activité verrière se font jour durant la première moitié du XIVe siècle lorsqu’ apparaissent dans les actes les noms des grandes familles d’artisans connus par ailleurs.
L’activité verrière à l’époque médiévale : divers propriétaires et divers artisans (1340 - 1er quart du XVIe siècle)
- 7 AD Hérault. 99 EDT 7. Extrait de compoix sur feuille libre et isolée. « Fiefs du Seigneurs de Ferri (...)
6En 1303, un certain Bernard Vergile, dont la profession n’est pas précisée, reconnait détenir le mas de Baumes du seigneur de Ferrières7. Ce nom, associé à celui d’une grande famille de verriers - les Virgile -, ne suffit pas à confirmer à lui seul la présence d’une activité verrière, même s’il semble toutefois le suggérer.
- 8 AD Hérault. 99 eDT 7. extrait de reconnaissances seigneuriales et de compoix concernant le mas de F (...)
- 9 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 279-280 : le représentant de l’évêque de Maguelone établit, avec le sergent (...)
- 10 LAMBERT, N. La verrerie médiévale forestière de la Seube, Claret (Hérault). Archéologie en Languedo (...)
7Ce n’est qu’en 1340, lorsque Guilhem Adhémar, damoiseau de Claret, s’installe à son tour en ces lieux que la présence d’une officine est cette fois avérée8. La délimitation de la seigneurie de Rouet, établie le 23 juin 1355, atteste en effet tout à fait explicitement de la présence d’un établissement verrier au mas de Baumes puisque quatre verriers, parmi lesquels le même Guilhem Adhémar, y exercent9. Aucune précision ne peut être apportée quant à la localisation précise, au mode de fonctionnement ou encore à la durée de cette première organisation artisanale, dont la mise en place semble être étroitement liée à la verrerie de la Seube, sinon faire suite à son abandon10.
- 11 AD Gard. 2 e 23/2, f°114 r°. 31 décembre 1426, association et affairement entre noble Jean Falcon V (...)
- 12 PÉZIÈRES, A. Histoire de la commune de Ferrières, Canton de Claret, département de l’Hérault. Nîmes (...)
- 13 FERRAS, inédit, p. 17.
8En 1426, les frères Jean et Michel Falcon sont présents dans ce domaine qu’ils reconnaissent tenir, là encore, de l’évêque de Maguelone. Ils officialisent l’organisation de leur travail et la communauté de vie par le biais d’une association permanente, ou affrayrament perpetuo mettant en commun tous leurs biens meubles et immeubles présents et futurs11. Doit‑on y voir le signe d’un accroissement de l’activité au sein de la fabrique tenue par les Adhémar ou, à l’inverse, celui de l’émergence une nouvelle fabrique faisant suite au délaissement des lieux par les premiers verriers ? Rien ne permet de le préciser. Après une décennie d’activité, la fratrie cède les droits qu’elle détient sur Baumes et le mas de Fournel à Bernard de Noalhac. L’acte de cession est passé le 17 janvier 1436 dans le mas de Balmes, à savoir sur une place publique ou avait été construit le four de la verrerie12. L’abandon momentané de l’activité verrière et le démontage des structures de production semblent donc bien effectifs durant la deuxième moitié du XVe siècle13.
- 14 AD Gard. 2 e 64/420, f°58 v°. Le 29 septembre 1494, contrat d’apprentissage de Claude de Barjac qui (...)
- 15 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 280-281. En 1515 et 1522, Jean et Jacques d’Azémar travaillent à la verrerie (...)
9Les signes tangibles d’une reprise, à nouveau sous la conduite de la famille d’Azémar, sont perceptibles dans le tournant du XVIe siècle comme l’indique le contrat d’apprentissage de Claude Barjac passé le 29 septembre 149414. Les recherches menées par Saint‑Quirin avaient permis à l’historien d’établir que la fabrique est active au moins jusqu’à la fin du premier quart du XVIe siècle15.
- 16 AD Gard. 86 J 204. Titres reconnaissances et lods du Mas de Baumes (1308-1693). FERRAS, inédit, p. (...)
- 17 PÉZIÈRES, 1896, p. 88 (d’après des documents d’archives municipales) et SAINT QUIRIN, 1985, p. 17-1 (...)
- 18 AD Hérault. 99 EDT 7. Vente, procès, jugement et déclaration concernant la seigneurie de Ferrières (...)
10Jusqu’à cette époque, le mas de Baumes se compose d’au moins trois corps de bâtiments dont les possessions foncières relèvent de plusieurs propriétaires, parmi lesquels le chapitre de Maguelone et quelques grandes familles locales comme les Noalhac ou les Michel16. À partir des années 1570, une nouvelle ère s’engage. François de Roquefeuil, seigneur de Viols et de Londres, bénéficie de la vente des biens de l’Église de la seconde moitié du XVIe siècle et se porte progressivement acquéreur de la totalité de la seigneurie du Rouet qui inclut le domaine de Baumes17. Non sans heurts et procès, les Roquefeuil achèvent le rassemblement de ces terres en 165718. De cet important remembrement foncier découlent de profondes mutations dans l’organisation de la production verrière. Dès lors, c’est la famille de Laroque, issue du proche mas de Couloubrines, qui assure durablement le contrôle du secteur, parfois aidée ou momentanément relayée par d’autres artisans.
Période Moderne : la mainmise des de Laroque sur un vaste domaine unifié (1570‑1700)
Première phase
- 19 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 281 : noble Bastien de la Roque, verrier de Pompignan (sans réf.). Aucune in (...)
- 20 AD Hérault. 1 Mi 360 R 45. en 1570, Mathieu de la Roque achète à Jean Noalhac, habitant de Pompigna (...)
- 21 AD Gard. 2 e 63/106, f°127 v°. le 10 octobre 1574, Debte de Noble Françoys de la Roque du mas de Ba (...)
- 22 PÉZIÈRES, 1896, p. 88-89 (d’après les archives de Notre-Dame-de-Londres, documentation non retrouvé (...)
- 23 AD Hérault. 1 Mi 360 R 24. Libre de Ferrières commancé le 27e de décembre 1594 faict de l’autorité (...)
11Plusieurs membres semblent déjà exercer leur art sur le proche territoire de Pompignan comme en atteste la présence de Bastien de Laroque mentionné par Saint‑Quirin dès 153919. L’installation au Mas de Baumes semble effective en 1570, lorsque Mathieu de Laroque, habitant de Pompignan, y achète une maison et un jardin20. Le verrier ne semble pas mener seul son activité puisque le 10 octobre 1574, son fils noble François de Laroque, également habitant du mas, contracte une dette auprès d’un marchand de verre de Sayrac21. Cette première phase semble effective jusqu’au 30 septembre 1582, date à laquelle Mathieu de Laroque décède et ses héritiers se défont de leurs biens détenus en ces lieux au profit de François de Roquefeuil22. Le compoix de Ferrières, dressé en 1594, ne signale logiquement aucune activité verrière : ces infrastructures, considérées comme biens nobles, ne sont en effet pas astreints à la taille. Mais il permet toutefois de confirmer que les de Laroque ne figurent plus parmi les propriétaires du mas de Baumes23.
- 24 Les deux sites sont distants de 25 kilomètres. Plusieurs actes notariés montrent effectivement la p (...)
12Les fils de Mathieu de Laroque, François et Bastien, quittent le secteur et vont ouvrir un nouvel établissement plus proche du littoral et de l’agglomération de Montpellier. Ils s’établissent dans les bois du Mas d’Agrès sur le territoire de La Boissière et fondent également la verrerie de l’Arboussas à Argelliers (Hérault)24. Cette période de chômage du centre de Baumes semble compensée dans la région par l’activité d’autres centres comme celui de Couloubrines, puis de Cazenove.
Deuxième phase
- 25 Envisagée ici dans le sens d’atelier, de lieu d’élaboration.
- 26 AD Hérault. G 2252. Feuillet intitulé Mémoire sur la dégradation faite aux bois. Acte du 23 septemb (...)
- 27 Bail à ferme d'un bien foncier, d'une exploitation rurale, moyennant une prestation périodique en n (...)
- 28 Louis de Laroque s’installe à son tour avec sa famille le 23 février 1660 en qualité de simple empl (...)
- 29 AD Gard. 2 E 56/327, f°300. Le 28 juin 1666, noble Antoine de la Roque, maître de la verrerie de Ba (...)
- 30 AD Gard. 2 E 56/120, f°21 v°. Acte du 13 février 1676.
- 31 AD Hérault. 2 E 77/7, f° 159 v°. Acte du 7 août 1676.
- 32 AD Hérault. 2 E 77/31, f°237 r°. Acte du 25 janvier 1676, endettement à hauteur de 171 livres.
- 33 AD Gard. 2 E 56/116, f°194 v°. Inventaire des biens laissés par Antoine de Laroque (décédé).
- 34 AD Hérault. 99 EDT 3. État de la capitation de Ferrière en 1701. Jean de Laroque du Villaret est ta (...)
- 35 AD Hérault. 2 E 77/10, f°215 r°. Mariage du 21 juin 1688 ; AD Hérault. 2 E 62/149, f°221 v°. Compte (...)
13La présence d’une officine25 semble à nouveau apparaître vers le milieu du XVIIe siècle et sera, à partir de là, plus ou moins continue pendant plus de 40 ans. en 1657, le vicomte de Roquefeuil arrente à Antoine de Laroque, maître verrier de Couloubrines, le domaine de Baumes et ses bois & aussi la jasse pour y faire veyrière26. L’amodiation27 suggère la mise en place de nouvelles infrastructures ; toujours dans la même propriété mais probablement dans un lieu bien distinct du précédent atelier. Dans les années qui suivent, l’établissement semble prendre une certaine importance : d’autres verriers comme son frère Louis de Laroque ou encore Clovis de Castelvieil viennent y travailler28. en 1666, le maître des lieux engage un procureur espicial et général pour gérer ses affaires courantes, notamment les prêts qu’il accorde à divers particuliers29. en 1676, Antoine de Laroque s’associe à Jean de Laroque, sieur du Villaret, pour une durée de six années30. L’acte précise que les deux hommes travailleront la premiere année de leur société a lad(ite) mestherie de Baumes, pour parachever larrentement que led(it) Sieur Anthoine de la Roque a passé avec madame la viscomtesse de Londres et les autres années de leur société aux lieux qui trouveront les plus commodes pour le faire. De fait, ils semblent également avoir investi dans le même temps les métairies de Villaret (Commune du Rouet, Hérault) et des Claparèdes (commune de Montoulieu, Hérault). Durant cette même année 1676, les deux hommes residans à la verrerye de Baumes et du Villars font l’acquisition d’une coupe dans le bois de Montguilhem, proche du mas des Claparèdes pour luzage de leur verrerie pour le temps & terme de troys annes31. En parallèle, Jean de Laroque et sa mère demeurant à present à leur metterie de Villaret (…) ou ilz ont faict dressé une verrière s’endettent auprès d’un habitant de Saint‑Bauzille‑de‑Putois après l’achat d’importantes denrées alimentaires pour leur nourriture, et entretien de leur familhe et ouvriers de ladite verrerie32. Chacun de ces actes mentionne bien la présence d’une seule fabrique et semble ainsi suggérer un fonctionnement en alternance pour ces trois établissements que dirige une seule et même équipe. Trois ans plus tard, le décès d’Antoine de Laroque met fin à cette société comme en atteste l’inventaire de ses biens communs de l’atelier, dressé le 7 novembre 167933. Après la disparition de son associé, Jean de Laroque continue à faire tourner l’établissement de Baumes, avec plusieurs collaborateurs parmi lesquels ses deux frères et peut‑être en alternance avec sa propre verrerie du Villaret, jusqu’en 170034. Il apparaît dans de nombreux actes, désormais qualifié comme « maitre de la verrerie de Baumes »35.
- 36 PÉZIÈRES, 1896, p. 84.
14Cette deuxième moitié du XVIIe siècle, où les feux semblent pratiquement ne s’éteindre qu’entre chaque campagne, constitue l’apogée à la fois économique et foncière du site. Ce dernier semble dépasser le stade du simple mas et se voit désormais désigné comme « hameau » ou « village de baumes »36.
La direction provisoire des De Girard (1707-1746)
- 37 AD Hérault. 1 Mi 360 R7 (pièce n° 107). Plainte de Noble Pierre de Girard gentilshomme verrier h(ab (...)
- 38 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 200, d’après un mémoire qu’il date de 1707, retrouvé dans les papiers de Jea (...)
- 39 AD Hérault. 3 HDT B 491. Les renouvellements du bail, passés en 1723 et 1734 précisent que la verre (...)
- 40 AD Hérault. 3 HDT B 491. Bail afferme du 14 janvier 1723 pour le temps et terme de six années. La m (...)
15Si l’activité s’interrompt sans doute momentanément lorsque la carrière de Jean de Laroque du Villaret prend fin à la fin de l’été 1700, la reprise paraît cependant rapide et, pour un temps, le domaine passe sous la direction de la famille de Girard. D’origine gardoise, ses membres sont présents sur le causse et travaillent à cette époque dans divers établissements depuis près d’un demi‑siècle37. Vers 1707, Antoine de Girard de Sérignac loue déjà une partie du mas de Baumes et se consacre à la fabrication du verre38. À cette époque, pas moins de sept gentilshommes travaillent ensemble dans l’officine. Avec cette nouvelle génération d’artisans, les lieux changent de configuration et la zone de production change sans doute à nouveau de place : la verrerie est installée à proximité du logis principal39. Si les activités artisanales et agro-pastorales ne cessent de fonctionner simultanément, elles deviennent en revanche bien distinctes, chacune étant gérée par un tenancier qui dispose d’une partie des bâtiments. Un nouveau bail passé en 1723 pour une durée de six ans établit clairement cette scission géographique et humaine des activités du mas de Baumes40.
- 41 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 200.
- 42 AD Hérault. 3 HDT B 491. Bail afferme du 14 janvier 1723 qui stipule que ledit sieur de Girard doit (...)
- 43 AD Hérault. C 2758. Ces établissements (…) ne doivent être mis en usage que pour la consommation de (...)
- 44 AD Hérault. C 2760. Mémoire des verreries établies dans le Bas Languedoc.
- 45 AD Hérault. C 12059. Le Sr De Bernage (…) Intendant de Justice, Police & Finances dans la Provence (...)
- 46 Des lettres de suppliques sont envoyées à l’Intendant et les représentants du syndic des verriers s (...)
- 47 AD Hérault. C 2760. Nous, pour faciliter aux maîtres des verreries de Rouet, Casanove et Baumes le (...)
- 48 AD Hérault. 3 HDT B 491. Renouvellement du bail afferme de 1723 le 1er août 1729 pour six ans et à (...)
- 49 À partir des extraits de compte de la caisse de secours du corps des verriers qui étaient déposés a (...)
16Ce premier quart du XVIIIe siècle marque un tournant décisif quant à l’apport que constituent les textes. Les écrits de 1707 et de 1723 renseignent pour la première fois la nature des productions réalisées en ces lieux. en 1707, elles consistent en bouteilles, verres, flasquettes, cornues ou vaisseaux servant pour l’eau forte41. L’acte de 1723 fait montre d’une rente versée en argent et en nature : chaque année, le verrier sera tenu de fournir trois quintaux de bouteille d’Angleterre42. Dès lors, c’est probablement ces contenants en verre noir qui deviennent le produit manufacturé privilégié. L’officine semble fonctionner sans problème particulier lorsque, pour pallier la déforestation massive du Royaume, paraît le premier Arrêt du Conseil du Roy le 9 août 1723 qui interdit l’établissement de nouvelles forges et verreries sans l’obtention préalable de lettres patentes43. Les effets s’en font ressentir assez rapidement et les enquêtes et inventaires des bouches à feu, menées par les États de Languedoc dans les mois qui suivent, pointent l’Hortus comme un espace potentiellement exploitable pour alimenter en combustible la ville de Montpellier44. Par arrêt du Conseil du Roy du 7 août 1725, les trois établissements verriers que compte encore le secteur sont sommés de migrer en direction de l’arrière-pays languedocien, sur les montagnes de l’Aigoual et de l’Espérou45. La riposte des gentilshommes verriers, organisés en réseau dense et solidaire en Languedoc, ne tarde pas et se fait sur plusieurs fronts46. En sa qualité de syndic des verriers du Bas‑Languedoc, Antoine de Girard prend largement fait et cause pour assurer la pérennité de son établissement comme celle des autres. À l’issue de ces revendications, l’Intendant de Bernage leur accorde un délai correspondant au temps d’une campagne et au‑delà duquel ils devront honorer les nouvelles règlementations en déplaçant leur activité47. Dans les faits, ce premier coup de semonce de l’administration ne connait, à court terme, aucune application et le mas de Baumes poursuit donc son industrie. Elle se fait sous la conduite de François de Girard qui parvient même à renouveler l’arrentement du domaine en 1729, puis en 173548. Durant cette dernière année, pas moins de sept verriers s’y activent, aidés de six domestiques49.
Le retour de la famille de Laroque (1740-1790)
- 50 AD Hérault. 2 E 81/23. Testament de François de Girard, le 2 décembre 1738.
- 51 FERRAS, inédit, p. 40 (sans réf.).
- 52 AD Hérault. 2 E 81/23, f° 234 v°. Acte du 4 août 1741 par lequel Antoine de Girard du Lac, Louis de (...)
- 53 Elle comprend des mules, des chevaux, des outils ainsi que toutes sortes de matières de sa préparat (...)
17Avec le décès de François de Girard50, le milieu du XVIIIe siècle est marqué par le retour de la famille de Laroque dans la métairie. Louis et Pierre, également héritiers de Couloubrines, y travaillent tout d’abord en qualité de simples employés en 174051. Le 4 741, une association de cinq gentilshommes lie désormais les deux familles qui prennent conjointement la direction de l’officine52. Cette nouvelle période donne lieu au rachat des fonds qui livre à nouveau un état relativement complet de la verrerie et des bois mis à disposition53. La valeur des fonds de l’établissement est estimée à 4856 livres, somme que les acquéreurs s’engagent à payer dans les cinq années qui suivent.
Un déplacement contraint…
- 54 AD Hérault. C 2763.
- 55 AD Hérault. C 2764. Supplique du sieur de Laroque, maître de la verrerie de Baumes, et le sieur De (...)
- 56 AD Hérault. C 2765. Requête par laquelle les propriétaires des verreries de Baumes et de Ricome dem (...)
- 57 De nombreuses transactions effectuées par la suite témoignent en effet de l’existence d’une haute f (...)
18L’atelier de Baumes continue ainsi à fonctionner jusqu’à ce que, près de vingt ans après les premières promulgations, l’administration languedocienne mette en place de nouvelles mesures qui, cette fois, devront être appliquées. La sévère inflation du prix du bois conduit en effet les autorités de la Province à envisager d’autres combustibles et réduire drastiquement le nombre de bouches à feu. À cet effet, les enquêteurs J. Pitot et P. souche organisent une visite des abords de l’Hortus les 20 et 21 avril 1744. Ils sont reçus, guidés et logés par les verriers qui leur montrent l’étendue des réserves forestières que compte encore le secteur, aux fins de modérer sans doute l’impact de leur activité sur l’environnement qui les entoure54. Mais de leur visite et de leur nuit au mas de Baumes, les deux procurateurs des eaux et Forêts concluront surtout que led(it) causse n’etant eloigné de la ville de Montpellier que de quatre, cinq et six lieuës, il est possible d’en transporter le bois jusqu’à la ville par bât, puis charrette. Ordonnance est donc faite, de détruire les verreries du Causse, dont celle du mas de Baumes, et d’en déplacer définitivement les installations dans l’arrière‑pays. Cette fois, les nombreuses suppliques du « Sieur De La Roque et compagnie, maître de la verrerie de Baumes », pas plus que celles des habitants de Ferrières, Saint‑Martin-de-Londres et Pompignan, ne trouveront d’écho favorable55. Ils se voient donc contraints de quitter les lieux à l’automne 1745 pour s’établir, après de nombreuses tergiversations autour de plusieurs implantations possibles, au Mas de Prats (commune de Saint‑André‑de‑Buèges, Hérault), à quelques trente kilomètres de là, sur les premiers contreforts du Massif Central. Les compagnies de Baumes et de Ricome joignent momentanément leurs effectifs pour remettre en fonction l’atelier, délaissé alors depuis une trentaine d’années56. Pour autant, les massifs forestiers de la région de l’Hortus ne semblent pas plus exploités suite au déplacement des officines57.
…Mais provisoire
- 58 FERRAS, inédit, p. 46.
- 59 AD Gard. 100 J 32.
- 60 AD Hérault. 3 HDT 510.
19Il aura fallu moins d’une vingtaine d’années pour que le Mas de Baumes obtienne, et pour la dernière fois, les autorisations nécessaires au rétablissement de sa verrerie. L’interdiction formelle qui s’étendait à l’ensemble du Causse se voit donc partiellement levée par l’entremise de son principal propriétaire, le marquis de Roquefeuil. Ce dernier, après avoir remis en état les lieux, adresse une requête à l’Intendance en 1761 et justifie cette nouvelle installation par l’importante quantité de chênes blancs fort gros et fort vieux et dépérissant journellement que compte son domaine58. Des lettres patentes du 3 mars 1762 lui octroient formellement le droit pour l’affouage d’une verrerie (…) seule voye praticable pour leur consommation (les bois)59. Quelques semaines plus tard, c’est à Jérôme de Laroque que le marquis vend ses bois et cède, à titre gratuit, l’ancien logement d’Antoine de Girard à la métairie de Baumes60. Autre avantage non négligeable et témoignant bien de la volonté de rétablir cet artisanat profitable à l’équilibre économique du secteur, le gentilhomme obtient du propriétaire le droit de prélever, là encore gratuitement, du sable des mines et de la terre grasse dans ses terres.
- 61 AD Hérault. 3 HDT B 491. Le domaine reste ensuite dans la famille de Laroque jusqu’en 1860 d’après (...)
- 62 AD Hérault. C 2739. Enquête de 1788 sur la situation des forges et fourneaux dans la Province de La (...)
- 63 AD Gard. C 1917. Lettre de M. d’Aguze, subdélégué du Vigan, datée du 21 juin 1788, à l’Intendant à (...)
- 64 Durant la période révolutionnaire, les verriers font l’objet d’une attention toute particulière de (...)
20En 1767, après la mort du seigneur de Roquefeuil, cet immense domaine est partiellement démembré et soumis à la vente. Jérôme de Laroque acquiert pour 24 000 livres le mas de Baumes, comprenant l’ensemble de ses constructions ainsi que 200 hectares de terre, où il exerce toujours avec ses trois fils61. Outre la verrerie, le gentilhomme se retrouve également à la tête d’un important cheptel ovin. Les campagnes de production semblent ensuite se maintenir pendant une dizaine d’années sans incidence notable62. En 1788, Jérôme de Laroque et son fils aîné, probablement très conscients du statut déclinant de leur profession, s’essayent à un projet de verrerie industrielle fonctionnant au charbon de terre à Sète qui, malgré un accueil apparemment favorable des autorités locales, ne verra jamais le jour63. Ils maintiennent leur activité au domaine de Baumes jusqu’en 1790, date à laquelle les feux de la verrerie, qui est désormais la dernière du Causse de l’Hortus, s’éteignent définitivement64.
21La documentation textuelle met donc en lumière une longue et dense histoire pour ce site, étroitement lié aux autres établissements du secteur. Le caractère complexe que livre ce type de source ne trouve en revanche que peu d’écho dans les apports de l’archéologie.
Organisation générale du site et de l’atelier : l’apport de l’archéologie
- 65 Ce découpage reprend strictement celui qui avait été très logiquement proposé par les précédentes é (...)
22Le hameau du mas de Baumes compte actuellement une dizaine de constructions qui se répartissent sur près de 1000 m2. Ces unités s’organisent selon trois ensembles (groupe I, II et III), bien distincts les uns des autres à la fois par des orientations propres et la présence de chemins bordés de murets. Tous convergent cependant vers un secteur central qui ne présente actuellement aucun vestige particulier visible65. Les données historiques font état d’une remarquable permanence des formes matérielles de cette occupation et du caractère triparti du Mas de Baumes (fig.2).
Fig. 2

Ferrières-les Verreries (34), plan général du Mas de Baumes et localisation des fouilles (1993-1994)
© I. Commandré 2015
23Le premier et principal groupe forme la partie orientale du domaine. Il est composé de quatre corps de bâtiments (n° 1-2-3-4a et b) orientés nord-ouest/sud-est, agencés en équerre et formant un important ensemble architectural d’environ 350 m2. Il est bordé d’une cour fermée à l’ouest et d’une terrasse, ou enclos, à l’est. Le groupe II, implanté en bordure nord‑ouest du site, comprend trois édifices (n° 5-6-7), globalement orientés nord-sud ou bien est‑ouest. Ils occupent une emprise cumulée de près de 300 m2. Enfin, le groupe III est localisable dans la partie la plus méridionale du mas. Avec une superficie bâtie d’environ 200 m2, il est caractérisé par la présence d’une construction centrale (n° 8), orientée nord-est/sud-ouest, à laquelle ont été accolées deux petites annexes (n° 9 et 10) ainsi qu’un enclos.
Les constructions périphériques
- 66 Aucune étude de bâti n’a pu être conduite en amont des restaurations et les lectures architecturale (...)
24L’officine tardive mise en évidence au sein du Groupe I ne représente qu’une modeste partie de ce groupe architectural principal du mas de Baumes (Voir plan général du Mas). Celui‑ci compte en effet au moins un corps de logis central à trois niveaux d’élévation (n° 2) à partir duquel prennent appui quatre autres constructions plus modestes, érigées sur un à deux niveaux (n° 1-3-4a et b). La halle verrière étant directement en butée contre le bâtiment n° 1 qui en constitue la fermeture septentrionale, il paraît logique d’associer ces deux espaces, tout du moins durant le fonctionnement de l’atelier. L’accès d’au moins deux des trois pièces du rez‑de‑chaussée est en effet totalement conditionné par un passage préalable dans l’aire de travail. elles peuvent donc avoir été employées, le temps des campagnes, au stockage de certaines matières premières ou bien des pièces manufacturées en attente d’être transportées vers les lieux de revente. L’habitation principale, a priori de facture moderne66, est également très proche de l’atelier. Elle représente la forme d’architecture la plus élaborée du domaine de Baumes (fig.3).
Fig. 3

Ferrières-les Verreries ; vue générale, depuis le sud, des bâtiments principaux de la métairie de Baumes Groupe I. L’arbre occupe l’emplacement de l’atelier
© A. Riols/ODAC 1993
- 67 Le bâtiment n° 2 contenait notamment un imposant four à pain dont la présence est avérée dans les t (...)
25Les trois autres dépendances, si elles ont pu participer du bon fonctionnement de la fabrique en assurant le logement de domestiques ou le stockage de certaines denrées, pourraient par ailleurs avoir été réservées aux activités domestiques et agricoles qui constituent l’autre versant économique des lieux67.
26D’une manière plus générale, le repérage des unités les plus anciennes du site s’avère, au gré de modifications multiséculaires et des récentes restaurations, relativement délicat. Leur agencement montre en revanche une remarquable fossilisation du morcellement médiéval de la propriété. Le cadastre napoléonien, dressé dans le secteur en 1835, reprend en effet peu ou prou les trois ensembles actuellement visibles, dont la distinction se fait encore plus nette (fig.4).
Fig. 4

Ferrières-les Verreries ; extrait du Cadastre napoléonien du mas de Baumes (1832)
© Archives départementales de l’Hérault, 3 P 3527, section C1
- 68 Le compoix de Ferrières, établi en 1594, est à ce titre tout remarquablement révélateur : bien que (...)
27Pourtant rassemblés durant l’Ancien Régime sous l’autorité et la propriété commune du Seigneur de Roquefeuil, ces trois groupes vont conserver une certaine autonomie dans leur usage, dépendant le plus souvent de divers tenanciers, et parfois même garder une dénomination héritée des derniers siècles de l’époque médiévale68. Si les données archéologiques n’ont pu mettre en évidence la présence d’une activité verrière que pour deux des trois groupes, les témoignages historiques confirment sans ambiguïté la présence de verreries dans chacun de ces espaces au cours de la longue occupation du site.
Les espaces de production verrière
- 69 D’après les clichés, ce décapage a été effectué sur une profondeur de l’ordre de 0,05 à 0,20 m, les (...)
- 70 Au total, neuf tranchées, d’une largeur moyenne de 0,80 m ont été mises en place aux abords immédia (...)
- 71 RAYNAUD, 1994, p. 7. Remblai d’une épaisseur variable de 0,10 à 0,65 m d’épaisseur découvert dans l (...)
28Les résultats présentés ici constituent la synthèse et la mise en perspective des précédents travaux menés par A. Riols et F. Raynaud. La première campagne de 1993 avait plus spécifiquement vocation à dresser un état des lieux sanitaire général du bâti et vérifier, sur la base d’une documentation historique abondante et déjà bien analysée, la localisation des vestiges de l’officine la plus tardive69. En juillet 1994, la fouille de sauvetage dirigée par F. Raynaud a consisté en une surveillance visant à accompagner les nombreux creusements de tranchées nécessaires à l’installation des réseaux en eau et électricité70. Cette dernière opération, marquée par des explorations plus aléatoires, a révélé la présence d’une seconde aire de production. En bordure orientale du groupe III, un épais remblai comportait de nombreux déchets de verre ainsi que des fragments de creusets pris dans une matrice cendreuse71. Il était associé à un mobilier céramique rattachable à la période des XIVe‑XVe siècles. Le caractère désorganisé de ces artefacts a amené l’équipe de fouille à interpréter ce niveau comme une simple zone d’épandage de déchets d’une officine médiévale qui devait se trouver à proximité immédiate. Les principaux témoignages de l’activité verrières demeurent donc les vestiges découverts en 1993 dans la cour occidentale du bâtiment principal (groupe I). Son décapage a, en effet, révélé la présence de deux structures de chauffe, sans nul doute à mettre en lien avec les dernières occupations artisanales du site, durant le XVIIIe siècle.
La halle
- 72 Portes ou fenêtres (RIOLS, 1993, document non paginé). La documentation photographique semble indiq (...)
- 73 Soit une aire d’environ 150 m2.
29Les vestiges de la halle n’ont été que partiellement dégagés et l’entrée principale n’a probablement pas été reconnue. L’infrastructure artisanale s’inscrit dans une architecture qui la précède largement, aussi en adopte‑t‑elle naturellement l’orientation nord‑est / sud-ouest. Elle est bornée au nord par le bâtiment n° 1, dont la façade méridionale devait servir à fermer l’atelier. À l’ouest, les vestiges semblent également ceinturés par le mur occidental de l’actuelle aire ouverte. La présence de nombreux remaniements encore visibles dans sa maçonnerie lui confère, pour ses états antérieurs, une autre dévolution que celle de la simple clôture72. Enfin, la fouille a permis de localiser les murs sud et est qui prennent directement appui sur les maçonneries anciennes pour former, au final, une halle quadrangulaire de 13 m de long pour 11,50 m de large73. Ces structures, qui affleurent pour la plupart à la surface de la cour, ne sont conservées que sur une seule assise, ce qui limite considérablement les observations possibles (fig.5).
- 74 Un seuil, de 1,90 m de large, a été dégagé dans le mur est. L’organisation des vestiges, et notamme (...)
- 75 Durant sa seule dernière période d’activité, la verrerie connait une activité continue pendant près (...)
30Les matériaux locaux semblent amplement prédominer dans la construction avec l’emploi de blocs de calcaire froid d’un module petit à moyen, simplement dressés en double parement et liés par un mortier de chaux. Les murs ont une épaisseur moyenne de 0,65 à 0,70 m ; ils comportent au moins une ouverture supplémentaire, et probablement deux74. La présence d’un si grand nombre de points de passage de module variable peut certes s’expliquer par une évolution des espaces de circulation durant la période de fonctionnement de cette halle75.
Fig. 5

Ferrières-les Verreries (34), plan général des vestiges de la verrerie retrouvés lors de la fouille de 1993 – Groupe I
© I. Commandré 2015
- 76 Les travaux réalisés en 1745 font état d’une officine très ajourée, équipée de trois portes, un gra (...)
- 77 FERAS, inédit (sans réf.) : Il y a deux arceaux dont les piliers qui le supportent seront raccommod (...)
31Mais elle pourrait par ailleurs trouver sens par des fonctionnalités différentes : transport du bois pour l’alimentation du four en bois, zone de transport pour les pièces à recuire ou encore circulation entre l’espace de production et d’autres zones domestiques du mas76. Concernant les parties hautes de la bâtisse, la présence récurrente de tuiles courbes dans le petit niveau de destruction indique la présence d’une couverture en terre cuite, portée par deux arcs diaphragmes d’après le compte-rendu des réparations effectuées en 174577.
- 78 RIOLS, 1993, document non paginé.
- 79 RAYNAUD, 1994, p. 8.
32Eu égard aux faibles niveaux d’exploration des quelques niveaux conservés, l’exploitation des données stratigraphiques reste limitée. À l’aplomb de l’ouverture méridionale du mur ouest, les restes d’un pavage de sol sont encore en place. Il est formé de dalles de calcaire froid local relativement calibrées, mais agencées sans ordre particulier. Ce niveau de circulation aménagé paraît avoir été mis en place sur l’ensemble de la halle, comme le confirme un petit sondage pratiqué dans l’angle nord‑ouest de la pièce78. Une différence altimétrique de 0,45 m semble toutefois indiquer que l’espace interne de travail était probablement organisé sur deux niveaux, de part et d’autre du four principal. Les investigations complémentaires, menées par F. Raynaud sur les élévations de cette partie du mas, ont permis d’associer le dallage de la halle des verriers avec celui des bâtiments n° 1 et 279. L’ensemble participe donc des dernières phases de travaux et de réaménagements du domaine, que l’on rapprocherait volontiers des textes relatant les réaménagements du site dans les années 1745, puis 1760. Aucun mobilier ou élément stratigraphique remarquable n’a semble-t-il été retrouvé en lien avec ces niveaux d’occupation.
Les structures de chauffe
33Le faible niveau d’enfouissement des structures de chauffe devait très probablement rendre visible certaines parties, notamment le foyer du four de fusion caractéristique par sa forme ronde, avant le décapage. Ce dernier a permis de cerner la présence de deux fours pour lesquels aucune donnée matérielle ne permet d’établir de stricte contemporanéité.
Le four de fusion
34Ce premier ouvrage est localisable dans la partie septentrionale de la halle et n’est conservé lui aussi que sur une seule assise, dépassant rarement 0,10 m de hauteur, qui permet tout juste d’en approcher la morphologie générale. Il présente une forme bipartite, orientée nord‑sud, composée d’un élément central et circulaire de 5 m de diamètre, prolongé dans sa partie méridionale par un massif trapézoïdal, formant une sorte d’aile associée à la fournaise. L’arrêt de la fouille au niveau de l’apparition de ces vestiges ne permet pas de déterminer la profondeur d’enfouissement ni de déterminer si la structure était semi-enterrée. La mise en œuvre peut cependant en être abordée. Elle fait état d’un aménagement élaboré à partir de blocs de calcaire froid de divers modules présentant de nettes traces de rubéfaction. À l’interface entre le parement externe du four et le dallage du sol, des petites dalles de calcaire ont été posées sur chant sans doute en vue de protéger les parties basses du four. L’ensemble pourrait participer d’une seule et même campagne d’édification (fig.6).
Fig. 6

Ferrières-les Verreries (34), vue générale, depuis le nord, du four de fusion en cours de dégagement - Niveau d’arrêt de la fouille
© A. Riols/ODAC 1993
- 80 Il fait 2 m de côté dans sa partie la plus étroite qui est reliée au four et 4 m dans sa partie la (...)
35La construction circulaire peut être interprétée comme l’aire de chauffe et de travail du verre. L’épaisse couronne de maçonnerie qui entoure le foyer fait en moyenne 1,10 m de large. Elle délimite ainsi une ampoule parfaitement circulaire de 2,60 m de diamètre. Une seule ouverture d’environ 1 m de large, destinée à la fois à l’alimentation en bois et à l’évacuation des cendres, est aménagée au sud‑ouest. L’accès au foyer semble conditionné par un couloir d’alimentation d’à peu près 1,50 m de long, qui s’élargit vers le reste de la pièce. Au nord, le mur de soutènement aboutit directement à la porte méridionale du mur ouest de la halle aux fins sans doute de faciliter les opérations d’enfournement du combustible. Au sud, ce passage est délimité par l’imposant massif trapézoïdal qui forme la deuxième partie de four80. En l’état de la documentation, il reste délicat d’interpréter ce dernier ouvrage qui n’a été que partiellement dégagé. Très clairement en lien avec la partie circulaire contre lequel il prend appui, il semble aboutir vers un espace, peut-être une petite pièce, de 4,50 m de large pour 5 m de long dont la fonction reste indéterminée.
- 81 Plusieurs éléments ont un module quadrangulaire de 0,10 x 0,15 m.
- 82 Il fait plus de 0,10 m d’épaisseur mais son diamètre n’a pas pu être évalué.
36Faute de vestiges, aucune observation directe ne peut être établie pour les parties hautes de cette première structure de chauffe. L’aire du foyer indique toutefois une sole qui devait sans doute être circulaire et faire un minimum 2,50 m de diamètre. Par ailleurs, la présence de nombreux éléments de remplois dans les murs alentour porte à croire qu’une partie de cette maçonnerie était faite de briques réfractaires calibrées81. Ils témoignent en outre de l’usage de creusets circulaires d’une très importante contenance. Au moins un de ces contenants se trouve encore pris dans la maçonnerie du mur de la cour82.
- 83 FOY, D. ; VALLAURI, L. Roquefeuille, une verrerie provençale aux XVIIe et XVIIIe siècles, In Actes (...)
- 84 CHAPTAL, 1807, p. 274-275. L’encyclopédie méthodique, dans sa description des verreries languedocie (...)
37De par ses dimensions massives et son caractère central, cette première structure de chauffe peut être interprétée comme un four de fusion. Elle présente par ailleurs de très nettes similitudes avec celui de l’atelier provençal de Roquefeuille, un peu plus précocement daté dans le XVIIIe siècle83. Si son identification ne pose pas réellement difficulté, son mode de fonctionnement reste en revanche moins bien compris. Lors de la fouille, l’aile qui prolonge l’espace de chauffe n’avait fait l’objet d’aucune interprétation, faute d’éléments tangibles pour en proposer un schéma d’organisation. La description que livre P. A. Chaptal sur les derniers fours à bois des verreries languedociennes à des époques contemporaines de cet atelier en livre peut‑être quelques éléments de réponse. Le célèbre chimiste fait état d’un espace de recuisson de pièces, situé en partie sommitale du four circulaire, mais parfois prolongé sur le côté par des arches à recuire84. Ce type d’espace permettrait donc tout à la fois une baisse progressive de la température des pièces ainsi que le stockage de l’importante quantité de bouteilles produites quotidiennement et en série à cette époque tardive. La qualité des vestiges, ainsi que l’analyse qui n’en est proposée ici qu’a posteriori, incitent toutefois à garder mesure quant à ces quelques pistes de réflexion.
Un four de recuit ?
- 85 Le relevé en plan dressé par les fouilleurs semble indiquer des traces de reprise dans sa structura (...)
38Une deuxième structure de chauffe a été sommairement dégagée en bordure méridionale de la fouille. Comme pour le reste des vestiges, elle n’a fait l’objet que d’une conservation très partielle et ses élévations n’excèdent pas le premier niveau d’assise. Durant la campagne de fouille, aucune description n’en a été réalisée, mais l’établissement d’un relevé en plan ainsi que la documentation photographique aimablement mise à notre disposition permettent d’en proposer les principales caractéristiques. Cette structure se présente sous la forme d’une simple maçonnerie quadrangulaire de 5 m de côté, orientée tout comme la halle, nord‑est / sud‑ouest. Elle se situe d’ailleurs dans le prolongement immédiat de ce bâtiment qui englobe seulement le four de fusion et l’arrêt de la fouille ne permet pas d’établir si l’édifice se trouvait dans une seconde pièce ou bien en aire ouverte. Le four paraît bâti à partir de moellons de calcaire froid, d’un calibre légèrement inférieur à ceux de l’ouvrage principal. Une étroite ouverture de 0,50 m de large, aménagée sur sa face ouest, permet l’accès à la zone foyère. Cette dernière observe une forme générale allongée en fer à cheval et fait 2 m de long pour 1 m de large dans sa partie la plus développée85.
- 86 FOY, VALLAURI, 1991, fig.4 p. 148 : fours n° 2-3 et 4.
- 87 Ce type de four ne peut en effet en aucun cas être situé à l’extérieur de l’aire de travail des ver (...)
39Malgré l’indigence des données relatives à ce deuxième espace de chauffe, il a été perçu par l’équipe de fouille comme étant un four de recuit. Sa morphologie générale rejoint en effet bon nombre d’exemples bien documentés86. Si cette hypothèse paraît effectivement la plus probante, elle sous-tend alors la présence d’une autre pièce accolée à la halle telle que précédemment reconnue à partir des données de terrain87. Il importe également de souligner à nouveau que rien ne permet actuellement de lier les deux structures de chauffe, aussi est-il envisageable que ce four de recuit soit rattachable à une précédente phase d’activité de l’atelier.
Les derniers niveaux de fonctionnement de l’atelier
- 88 RAYNAUD, 1994, p. 6 : tranchée n° 6.
40Le décapage effectué en 1993 n’a pas permis d’atteindre les derniers niveaux de fonctionnement de l’atelier. Il est toutefois probable que les très importantes opérations de dérasement, puis de déblaiement de la cour à l’issue de l’occupation verrière ont définitivement oblitéré l’ensemble de ces données sédimentaires. Reste que la partie septentrionale de l’atelier où les verriers circulaient quelque 0,50 m plus bas a piégé encore quelques informations comme en témoigne le petit sondage pratiqué dans l’angle nord‑ouest de la pièce. L’exploration a révélé la présence d’un important remblai d’abandon comprenant à la fois les matériaux de construction de la bâtisse ainsi que de très nombreux déchets de production en verre. Par ailleurs, les tranchées pratiquées en 1994 dans la terrasse orientale de cette partie du mas ont révélé la présence d’un important dépôt cendreux témoignant d’une zone de rejet des résidus de combustion88.
Les productions de l’atelier du Mas de Baumes
- 89 Un autre lot de matériel, appelé « cache des verriers » a été découvert dans le courant du XIXe siè (...)
- 90 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 200.
- 91 AD Hérault. 3 HDT B 491. Bail afferme du mas de Baumes du 14 janvier 1723.
41Lors du décapage de 1993, aucun mobilier n’a été récolté dans le petit niveau de terre végétale qui recouvrait les vestiges. Quelques déchets de fabrication ont malgré tout été piégés dans les niveaux d’abandon testés en bordure septentrionale. Ils montrent une production de verre principalement centrée sur la réalisation de récipients de stockage des liquides89. Ici encore, le recours aux données textuelles s’avère plus probant ; la documentation du début du XVIIIe siècle rapporte, pour la seule verrerie de Baumes, la fabrication de bouteilles, verres, flasquettes, cornues ou vaisseaux servant pour l’eau forte90, ce que confirme assez largement le mobilier de la cachette des verriers découvert fortuitement et qui contenait principalement des topettes (fig.7). Le renouvellement du bail de 1723 précise également la mise en œuvre de bouteilles d’Angleterre91.
Fig. 7

Un exemple des productions tardives (2e moitié XVIIIe s.) du Mas de Baumes et de Couloubrines : les topettes
© C. Durand/CNRS-UMR 7299, Aix-en-Provence, 2013
- 92 Au total, 19 échantillons ont été testés avec B. Gratuze au centre Ernest-Babelon (IRAMAT/CEB, UMR (...)
42Aucun mobilier n’ayant été conservé à l’issu des découvertes archéologiques, les analyses physico‑chimiques ont été pratiquées à partir du mobilier de la prospection réalisées en 2011‑2012 autour de l’atelier fouillé et d’un prélèvement effectué sur les verres de la cachette des verriers (fig.8)92. Elles ont révélé des compositions sodiques tout à fait traditionnelles, probablement basées sur l’usage de matières siliceuses et d’une soude végétale - le salicor - d’origine locale (fig.9).
Fig. 8

Ferrières-les Verreries. Composition des verres du site de Lallemand déterminée par LA-ICP-MS, principaux oxydes en % massique (Na2O à Fe2O3), autres oxydes (Cu O à Pb O) en parties par million (ppm)
Fig. 9

Ferrières-les Verreries (34). Diagramme Na2O/ K2 + MgO/ CaO. Pour les échantillons testés, on observe la très nette composition sodique méditerranéenne, à fondant produit à partir de cendres de plantes halophytes littorales (salicor)
43Malgré leur caractère tardif, les recettes employées par les derniers verriers du Mas de Baumes ne montrent donc encore aucun recours à la soude industrielle qui commence pourtant à se développer à cette époque comme en témoignent d’autres ateliers à peu près contemporains, tels que le petit centre des Natges (Saint‑Maurice‑Navacelles, Hérault). Par ailleurs, l’usage extrêmement réduit des colorants et adjuvants (cobalt et manganèse) donne au verre une teinte naturelle légèrement vert‑bleuté.
Conclusion
- 93 Le charbonnage est recensé dans le secteur depuis la période médiévale (VERNET et alii 2002, p. 424 (...)
44Avec 450 ans d’occupation discontinue comprise entre les années 1340 et 1790, le mas de Baumes constitue à ce jour le plus long témoignage de l’activité verrière du Languedoc. Il figure parmi les toutes premières zones d’installation et sera le dernier centre forestier du littoral languedocien à fermer ses portes. Au total, le site cumule à lui seul plus de 200 ans de production avérée par les textes, soit environ 7 générations de verriers, avec des séquences d’abandon de moins en moins marquées. De fait, les phases d’activité plus ou moins continues s’allongent jusqu’à atteindre des périodes comprises entre 30 et 40 ans pour les XVIIe et XVIIIe siècles où les lieux sont alors considérés dans les écrits comme un véritable village d’artisans. Vaste domaine forestier aux réserves qui pouvaient paraître comme presque inépuisables, ce secteur où domine largement l’agro-pastoralisme constituait un cadre idéal à la pérennité d’une telle activité que les gentilshommes comme les propriétaires fonciers successifs ont su mettre à profit. Hormis quelques témoignages de charbonnage93, chaufournage et bûcheronnage pour lequel un tri des essences est organisé, les verriers resteront le principal débiteur des bois dans le territoire jusqu’à leur départ définitif. Mais l’exceptionnelle durée de ce centre n’en fait pas le seul élément remarquable. L’activité verrière rattachée à la métairie semble en effet se caractériser par des phénomènes de déplacements dont l’échelle semble s’élargir avec le temps. Dès lors, le mas de Baumes ne doit pas être envisagé comme un simple établissement, mais comme une entité primitive autour de laquelle gravite une multitude de sites dans un rayon plus ou moins vaste. L’image qu’en fournit pour l’heure l’archéologie semble donc très vraisemblablement restrictive par rapport à la lecture qu’en suggèrent les textes.
- 94 Il s’agit notamment des sites de la seube, Plat Fournel, la Taillade, la Buissade, Bacayrole, sueil (...)
45Les ateliers médiévaux, auxquels les vestiges ténus retrouvés dans le groupe III peuvent sans doute être assimilés, œuvrent au sein du domaine encadrant la métairie. La production, aux mains de diverses familles d’artisans, s’organise sur un petit territoire. Elle prend la forme de multiples officines autonomes de taille variable, s’activant successivement et pour lesquelles les réoccupations semblent plutôt rares, sinon inexistantes94. L’atelier médiéval doit donc se concevoir à l’échelle du Causse, avec une histoire complexe qui rend difficile la localisation précise du « mas de Baumes » évoqué dans les écrits. La verrerie ne se réduit pas à un groupe de bâtiment, mais plutôt à un terroir.
- 95 La verrerie de Baumes fonctionne en alternance au moins avec les centres du château de Rouet, de Vi (...)
46À ce premier modèle succède une organisation moderne de plus grande ampleur encore, dont les prémices s’annoncent à partir de la deuxième moitié du XVIe siècle. La mainmise progressive de la famille de Laroque sur le secteur entraine en effet un changement d’échelle et une toute autre structuration de l’activité. Les implantations de fabriques outrepassent dès lors largement le périmètre du Causse pour progressivement couvrir une vaste zone, de l’ordre de la micro‑région circonscrite par les villes de Montpellier et de Ganges95. Afin de limiter l’épuisement des ressources forestières et maintenir un renouvellement permanent des structures de production, les verriers disséminent un maillage plus organisé d’ateliers dont ils alternent les périodes d’usage. Par le biais des associations qu’ils contractent, ils s’assurent ainsi d’une activité continue, propre à pérenniser et densifier par ailleurs leurs réseaux d’échanges. Les sites, implantés plus durablement, font alors l’objet de réoccupations cycliques. Les vestiges de l’atelier fouillé dans les bâtiments principaux du mas, dont les traces de remaniements sont perceptibles malgré l’indigence des données, se font largement l’écho de cette organisation moderne. Ils témoignent également de la structuration particulière du four principal, avec l’adjonction probable d’un four de recuit qui annonce les prémices d’un important changement dans des modes de production.
Notes
1 COMMANDRÉ, Isabelle. L’artisanat du verre en Bas-Languedoc du XVIe au XVIIIe s. Thèse de doctorat en archéologie menée sous la direction de D. Foy, Aix-Marseille Université, 3 volumes, 2014.
2 Il s’agit des communes de Ferrières-les-Verreries au nord, de Rouet à l’ouest et de Claret, Lauret et Valflaunès à l’est.
3 Un taxon correspond à une entité d’êtres vivants regroupés ensemble, qui possèdent des caractères communs du fait de leur parenté. La taxonomie permet l’élaboration des règles de la classification.
4 RIOLS, A. (Dir.). Rapport de sondages archéologiques au Mas de Baumes (commune de Ferrières- les-Verreries, 34). Rapport de fouille de sauvetage dactylographié, déposé au S.R.A. Languedoc- Roussillon, juillet 1993, document non paginé de trois pages ; et RAYNAUD, F. ; RINALDI, R. (col.). D.F.S. de sauvetage : Domaine de Baumes (Ferrières-les-Verreries). Rapport de fouille de sauvetage AFAN dactylographié, déposé au S.R.A. Languedoc-Roussillon, 1994, 13 p.
Ces fouilles ont été menées en amont des travaux de réhabilitation du mas qui ont donné lieu à de profondes modifications du bâti comme de la topographie générale des lieux. Par la documentation iconographique et planimétrique qu’elles constituent des vestiges ou élévations désormais disparus, ces recherches forment donc une base de documentation de première importance. Elles ont été complétées par une étude historique portant sur l’ensemble du territoire : FERRAS, Catherine. Les verreries forestières du Causse de l’Hortus. Mémoire dactylographié du service Patrimoine Office Départemental d’Action Culturelle (O.D.A.C.), déposé dans les archives du Conseil général de l’Hérault, 58 pages, s.d.
5 Voir SAINT-QUIRIN, A. De. Les Verriers du Languedoc, 1290-1790. Montpellier, réédition de 1985, p. 279, d’après un acte daté du 12 des calendes de mars 1247 contenu dans le cartulaire de la Prévôté (AD Hérault. G 1787). La réédition rassemble les trois articles publiés dans le Bulletin de la société Languedocienne de Géographie en 1904, 1905 et 1906.
6 ROUQUETTE VILEMAGNE, 1914. Cart. Mag., tome III, n° DCCCLXIII, p. 531 : Reconnaissance faite au Roi dans la Baylie de sauve le 1er aout 1293 qui détaille les possessions régaliennes, parmi lesquelles figure mansum (…) vocatum de Balmis, in parrochia de Ferreriis. A. Pézières livre dans son ouvrage sur la commune de Ferrières une transcription complète de cet acte (PÉZIÈRES, 1896, p. 84 d’après la version manuscrite du cartulaire, tome 6, f°330). L’année 1293 marque un changement de suzeraineté sur la baronnie de sauve suite à l’échange effectué entre l’évêque de Maguelone et le Roi de France, ce dernier rétrocédant ladite Baronnie en échange du Montpelliérais. La délimitation de la Baylie de sauve le 21 janvier 1294, mentionne pourtant qu’une partie du mas reste dans le domaine royal : excepto manso Petri Mathei de Balmis qui erat domini Regis (ROUQUETTE VILEMAGNE, 1914 : Cart. Mag, tome III, p. 630, acte n° CMLXXXII).
7 AD Hérault. 99 EDT 7. Extrait de compoix sur feuille libre et isolée. « Fiefs du Seigneurs de Ferrières possédés par Monsieur de Rouet dans la paroisse de Ferrières : Premièrement le Mas de Balmes recognu au seig(neu)r de Ferrières par Bernard Vergile et Ramonde sa femme en lan 1303, avec toutes ses deppandances, lequel mas est scitué a Balmes et confronte avec la maison de Pierre Mathieu, (…). Nott. Recue par Jean Capelis nore. de Sauve et le cahier cotté B au Sr. de Ferrieres ».
8 AD Hérault. 99 eDT 7. extrait de reconnaissances seigneuriales et de compoix concernant le mas de Fournels, rattachés au domaine de Baumes, F°1 v° : En lan 1340 Guillaumes Azemar recogneus au Seig(neu)r de Ferrières une maison dans la paroisse dud(it) Ferrières et au mas des Fournels et confront comme vale chemin qui est au-devant de la porte de lad(ite) maison jusques à une croix ex(timer) ou IX sols 10 d.
9 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 279-280 : le représentant de l’évêque de Maguelone établit, avec le sergent royal, une délimitation de la juridiction de Rouet. Des panonceaux sont alors installés dans les lieux les plus emblématiques, parmi lesquels figure la maison de Guilhem Adhemarii, verrier du mas de Baumes qui sert de lieu pour la ratification de l’accord : acta fuerunt hoc in manso predicto de Balmis et horum furerunt testes a proximo paragrafo citra, Guillermus Adhemarii, veyrerius, Johannes Adzemarii, Arnudus Olerii, Guilhermus de Balmis, veyrerii (acte probablement intégré dans le cartulaire de la Prévôté : AD Hérault. G 1787, non consulté).
10 LAMBERT, N. La verrerie médiévale forestière de la Seube, Claret (Hérault). Archéologie en Languedoc, 1982-1983, n° 5, p. 232. Pour D. Foy, les sites de la Seube et du mas de Baumes pourraient même faire partie d’un seul et même ensemble (Voir également FOY, D. Le verre Médiéval et son artisanat en France méditerranéenne, Paris, 1988, p. 117-118).
11 AD Gard. 2 e 23/2, f°114 r°. 31 décembre 1426, association et affairement entre noble Jean Falcon Veyrier du lieu de Balmes, paroisse de st-Jean de Ferrière d’une part et noble Michel Falcon, son frère d’autre part. L’inféodation du mas est confirmée par un acte du 13 mars 1434 contracté entre les deux frères, et Pierre Ricard, prévôt de Maguelone (AD Hérault. 1 Mi 360 R22, vol. 38).
12 PÉZIÈRES, A. Histoire de la commune de Ferrières, Canton de Claret, département de l’Hérault. Nîmes, 1896. p. 85-86, retranscription réalisée d’après les documents d’archives alors conservés en mairie, mais désormais disparus (l’acte, qui n’a pas été retrouvé devait être associé à la côte AD Hérault. 99 EDT 7). Ces informations sont intégralement reprises par Saint-Quirin (SAINT-QUIRIN, 1985, p. 280).
13 FERRAS, inédit, p. 17.
14 AD Gard. 2 e 64/420, f°58 v°. Le 29 septembre 1494, contrat d’apprentissage de Claude de Barjac qui se loue pour trois ans chez noble Estienne Adhémar de Saint-Jean-de-Ferrières aux fins deprendre affaire vitrerarii.
15 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 280-281. En 1515 et 1522, Jean et Jacques d’Azémar travaillent à la verrerie de Baumes. Ils habitent encore le mas de Vallières en 1527 (sans réf.). N. Lambert évoque même un document de 1548 qui atteste du fonctionnement de la verrerie à cette époque, (LAMBERT, 1983, p. 230, note n° 79, sans réf.).
16 AD Gard. 86 J 204. Titres reconnaissances et lods du Mas de Baumes (1308-1693). FERRAS, inédit, p. 17. Le chapitre de Maguelone était seigneur de Rouet au moins depuis le début du XIIIe siècle.
17 PÉZIÈRES, 1896, p. 88 (d’après des documents d’archives municipales) et SAINT QUIRIN, 1985, p. 17-18, sans réf. Le Chapitre, privé de revenus au moment des guerres de religion doit se défaire de nombre de ses terres afin de rétablir ses finances. La vente de Baumes est associée à celle des domaines de Lauret et de Gabriac ; elle est effectuée pour un montant de 21 500 livres. Ces terres consistent en forets, bois et cazals, de nul revenu par suite de leur esterilité.
18 AD Hérault. 99 EDT 7. Vente, procès, jugement et déclaration concernant la seigneurie de Ferrières (1540-1707) et AD Gard. 86 J 204. Procès de Roquefeuil, sr du Rouet.
19 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 281 : noble Bastien de la Roque, verrier de Pompignan (sans réf.). Aucune indication ne permet d’établir de lien entre cet artisan et le suivant.
20 AD Hérault. 1 Mi 360 R 45. en 1570, Mathieu de la Roque achète à Jean Noalhac, habitant de Pompignan la moitié d’une maison et d’un jardin au mas de Baumes. La mention que fait Saint-Quirin d’un certain noble Bastien de la Roque, verrier de Pompignan dès 1539, ne permet pas d’établir de lien entre les deux artisans (SAINT-QUIRIN, 1985, p. 281).
21 AD Gard. 2 e 63/106, f°127 v°. le 10 octobre 1574, Debte de Noble Françoys de la Roque du mas de Baumes, paroisse de Feyrières contre Louis Hermeley, marchand de veyres de Sayrac pour 10 livres.
22 PÉZIÈRES, 1896, p. 88-89 (d’après les archives de Notre-Dame-de-Londres, documentation non retrouvée). Le 30 septembre 1582, Les héritiers de Mathieu de Laroque, noble François et Bastien de Laroque, frères et écuyers du lieu de la Boissière, vendent à François de Roquefeuil tout ce qu’ils tiennent de leur père, au mas de Baumes, commune de Ferrières (Mas d’Agrès à La Boissière).
23 AD Hérault. 1 Mi 360 R 24. Libre de Ferrières commancé le 27e de décembre 1594 faict de l’autorité de la cour souveraine des aydes à Montpellier et par comission d’icelle : f°1 r° à 2 v° pour le mas de baumes.
24 Les deux sites sont distants de 25 kilomètres. Plusieurs actes notariés montrent effectivement la présence des deux frères au Mas d’Agrès dès 1581, puis quelques années plus tard à Argelliers (site de l’Arboussas). AD Hérault. 2 E 4/84 f°17 v°. Achat d’une terre sur le terroir de la Boissière par François et Bastian de Laroque, frères et verriers le 28 octobre 1581. AD Hérault. 2 E 4/85 f°266 v°. Arrentement pour Noble François de la Roque, gentilhomme verrier au mas d’Agret, le 20 août 1584. AD Hérault. 2 E 4/72, f°390 r°. Vente d’une paire de bœufs par Noble Pierre de la Roque d’Argelliers le 27 octobre 1584. AD Hérault. 2 E 4/85, f°347 r°. Dette contractée auprès de François de Laroque gentilhomme verrier du mas d’Agre, le 9 octobre 1584.
25 Envisagée ici dans le sens d’atelier, de lieu d’élaboration.
26 AD Hérault. G 2252. Feuillet intitulé Mémoire sur la dégradation faite aux bois. Acte du 23 septembre 1657 qui conclut l’accord pour 6 ans moyenant 600 livres chasque année. Voir également SAINT-QUIRIN, 1985, p. 285.
27 Bail à ferme d'un bien foncier, d'une exploitation rurale, moyennant une prestation périodique en nature ou en argent.
28 Louis de Laroque s’installe à son tour avec sa famille le 23 février 1660 en qualité de simple employé pour le temps et terme dune annee (AD Gard. 2 E 64/188, f°108 r°). Saint-Quirin évoque un autre acte, daté du 23 septembre de la même année, dressé entre le seigneur de Roquefeuil et Louis de Laroque (SAINT-QUIRIN, 1985, p. 281). AD Gard. 2 E 56/110. Acte de 1664 qui mentionne la présence d’au moins sept gentilshommes travaillant à la verrerie de Baumes. AD Gard. 2 E 34/64, f°159 r°. Le 25 septembre 1667, Dette à l’encontre de Clovis de Castelviel gentilhomme verrier demeurant a p(rese)nt a la verrerye du mas de Baumes. Voir également AD Gard. 2 E 36/462, f°294 r°. Testament de Clovis de Castelvieil, le 2 novembre 1667.
29 AD Gard. 2 E 56/327, f°300. Le 28 juin 1666, noble Antoine de la Roque, maître de la verrerie de Baumes proclame André Deveze pour son procureur. Concernant les dettes que divers particuliers contractent auprès d’Antoine et Pierre de Laroque : AD Gard. 2 E 64/188, f°113 r° (oblige du 12 mars 1660), AD Hérault. 2 E 4/171, f°492 r° (acte du 25 octobre 1672), AD Hérault. 2 E 81/12, f°233 v° (obligation du 6 octobre 1698).
30 AD Gard. 2 E 56/120, f°21 v°. Acte du 13 février 1676.
31 AD Hérault. 2 E 77/7, f° 159 v°. Acte du 7 août 1676.
32 AD Hérault. 2 E 77/31, f°237 r°. Acte du 25 janvier 1676, endettement à hauteur de 171 livres.
33 AD Gard. 2 E 56/116, f°194 v°. Inventaire des biens laissés par Antoine de Laroque (décédé).
34 AD Hérault. 99 EDT 3. État de la capitation de Ferrière en 1701. Jean de Laroque du Villaret est taxé de 40 livres, mais il est précisé qu’ il ne réside plus dans la paroisse depuis le moys d’aoust 1700.
35 AD Hérault. 2 E 77/10, f°215 r°. Mariage du 21 juin 1688 ; AD Hérault. 2 E 62/149, f°221 v°. Compte-rendu du syndic des gentilshommes verriers du 22 juillet 1689 ; AD Hérault. 2 E 77/56, f°63 v°. Ratification d’obligation du 7 août 1698 ; AD Hérault. 2 E 77/56, f°222 v°. Mariage du 15 septembre 1699 : ce dernier acte précise que l’acte est passé dans la métairie de Baumes où ledit Sieur du Villaret fait et exerce l’art de verrerie depuis plus de douze ans ; AD Hérault. 2 E 77/69, f°147 v°. Mariage du sieur de Couloubrines et de Marianne de la Croix du 3 juillet 1700. Dans son ouvrage sur la commune de Ferrières, A. Pézières confirme aussi la présence permanente de la famille de Laroque au mas de Baumes par le biais des registres d’état civil et des abjurations à partir de l’année 1685 au moins (PÉZIÈRES, 1896, p. 75 et 101).
36 PÉZIÈRES, 1896, p. 84.
37 AD Hérault. 1 Mi 360 R7 (pièce n° 107). Plainte de Noble Pierre de Girard gentilshomme verrier h(abit)ant du Mas de Montels paroisse du lieu de Carnas, travailhant à lad(ite) verrière de Cazenove, déposée le 13 septembre 1655.
38 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 200, d’après un mémoire qu’il date de 1707, retrouvé dans les papiers de Jean d’Azémar, seigneur du Colombier.
39 AD Hérault. 3 HDT B 491. Les renouvellements du bail, passés en 1723 et 1734 précisent que la verrerie est à proximité de la maison dite de done Jeanne.
40 AD Hérault. 3 HDT B 491. Bail afferme du 14 janvier 1723 pour le temps et terme de six années. La métairie est désormais partagée entre le fermier Jean Reboul et le sieur de Girard qui disposent chacun de plusieurs bâtiments. Restent en commun le four à pain et les poules. Outre l’habitation et l’espace de travail, les gentilshommes disposent de petits jardins et de quelques terres pour assumer les cultures vivrières de leurs familles et celles qui fourniront le fourrage des chevaux et des mules.
41 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 200.
42 AD Hérault. 3 HDT B 491. Bail afferme du 14 janvier 1723 qui stipule que ledit sieur de Girard doit s’acquitter annuellement de la somme de 175 livres et de trois quintaux de bouteilles d’Angleterre. Les quittances de 1725, 1727 et 1728 qui suivent cet accord précisent que dans les faits, l’artisan livre de 3 à 6 quintaux de bouteilles, en compensation du loyer variable qu’il fournit en argent.
43 AD Hérault. C 2758. Ces établissements (…) ne doivent être mis en usage que pour la consommation des bois qui ne sont pas à portée des rivières navigables et des villes et qui, par leur situation, ne peuvent servir ni aux constructions ni au chauffage (…).
44 AD Hérault. C 2760. Mémoire des verreries établies dans le Bas Languedoc.
45 AD Hérault. C 12059. Le Sr De Bernage (…) Intendant de Justice, Police & Finances dans la Provence de Languedoc (…) a trouvé qu’il seroit à propos de transferer les Verreries cy-après, sçavoir, les trois verreries établies sur la petite Montagne ou Causse appellée de Cazenove, dont l’une est au château de Roüet, Paroisse de St Etienne de Gabriac, Diocèse de Montpellier, éloignée d’environ trois lieuës de la Ville de Montpellier ; la Seconde à la Metairie appellée de Cazenove, dans la paroisse de Claret, Diocèse de Nismes, à la même distance de ladite Ville ; la troisième à la Métairie appellée Baume, dans la paroisse de Ferrières, Diocèse d’Alais.
46 Des lettres de suppliques sont envoyées à l’Intendant et les représentants du syndic des verriers se déplacent jusqu’à Paris pour demander audience au Roi, faisant valoir l’impact économique de l’activité verrière sur la région. D’autre part, les artisans s’assurent des appuis locaux et arguent du renouvellement des baux d’arrentement des bois comme d’engagements pris à l’avance auprès de marchands liquoristes afin d’obtenir un délai (AD Hérault C 2760).
47 AD Hérault. C 2760. Nous, pour faciliter aux maîtres des verreries de Rouet, Casanove et Baumes le moyen de consommer les bois qu’ils ont achettez à la Marquise De la Fare et du Sr marquis de Londres, leur permettons, sous le bon plaisir du Roy, d’y continuer leur travail jusqu’au 24 juin 1727 qui est le temps de la campagne prochaine. AD Gard. 1 e 2897. Même acte collationné devant notaire le 16 août 1726.
48 AD Hérault. 3 HDT B 491. Renouvellement du bail afferme de 1723 le 1er août 1729 pour six ans et à raison de 200 livres et huit parts de verres ou bouteilles, outre les trois quintaux de bouteilles d’Angleterre. Un nouvel accord est ensuite passé en 1735.
49 À partir des extraits de compte de la caisse de secours du corps des verriers qui étaient déposés aux archives municipales de Ferrières, Saint-Quirin avait établi qu’en 1725, six gentilshommes travaillaient à Baumes, secondés d’au moins quatre domestiques. Pour l’année 1737, il comptait sept gentilshommes et six domestiques (SAINT-QUIRIN, 1985, p. 282 d’après une documentation désormais disparue).
50 AD Hérault. 2 E 81/23. Testament de François de Girard, le 2 décembre 1738.
51 FERRAS, inédit, p. 40 (sans réf.).
52 AD Hérault. 2 E 81/23, f° 234 v°. Acte du 4 août 1741 par lequel Antoine de Girard du Lac, Louis de Laroque sr de Couloubrines, Louis de Girard et Charles d’Aspères sr de Brouzet s’associent à Fulcrand Michel de Girard, maître de la verrerie de Baumes. La valeur des fonds de l’établissement est estimée à 4856 livres.
53 Elle comprend des mules, des chevaux, des outils ainsi que toutes sortes de matières de sa préparation par led. sieur de Girard pour la prochain campagne. Par ce recouvrement, la nouvelle compagnie a également accès au reste de la coupe forestière qui avait été allouée par la Marquise de Londres, veuve du seigneur de Roquefeuil.
54 AD Hérault. C 2763.
55 AD Hérault. C 2764. Supplique du sieur de Laroque, maître de la verrerie de Baumes, et le sieur De Vallongues et Cie, maîtres de la verrerie de Ricome à l’intendant Le Nain, où ils exposent qu'on peut, sans crainte de manquer de bois de chauffage, les laisser exploiter leurs usines dans les lieux où elles sont établies (août 1745). A. Pézières évoque également les délibérations communales du 6 février 1746 qui confirment que la communauté s’oppose fermement à la fermeture et destruction des ateliers de Baumes et de Ricome (PÉZIÈRES, 1896, p. 106). AD Hérault. C 12059. Requête des habitants des lieux de Londres, st-Martin, de Ferrières et de Pompignan rapportée aux États le 28 mai 1746.
56 AD Hérault. C 2765. Requête par laquelle les propriétaires des verreries de Baumes et de Ricome demandent l’autorisation de fixer leur établissement à la métairie des Prats (1746). Une lettre du subdélégué de Montpellier adressée à l’Intendant le 8 février 1747 stipule bien que les deux verreries de Baumes et Ricome ont été supprimées et les deux compagnies qui le fesoint travailler se sont réunis et ont formé la verrerie du Prat, et par conséquent au lieu de 2 feux qu’il y avoit anciennement, on voit qu’il n’y en a qu’un seul, ce qui diminue de moitié la consommation du bois. AD Hérault. C 5679. Ordonnance de J. Le Nain, Intendant du Languedoc et J.L. d’Anceau, grand Maître des eaux et forêts (1747). Voir également RIOLS 1991a, p. 114.
57 De nombreuses transactions effectuées par la suite témoignent en effet de l’existence d’une haute futaie bien établie et les plans d’approvisionnement de la ville de Montpellier par le biais de ces réserves n’ont toujours pas dépassé l’état de projet en 1776. AD Hérault. C 2949. Projet d’approvisionnement de la ville de Montpellier en bois de chauffe et de charbon (Mémoire imprimé, daté du 3 décembre 1776 et signé de Faure, Lieutenant-Général) le cosse de Pompignan est rempli de gros arbres de toutes espèces, qui périssent sur pied faute de débouchés (…) la seule verrerie de Baume située à l’une de ses extrémités, consomme chaque année trente mille quintaux de chêne blanc ; encore n’exploite-telle que ce qui est le plus à sa bienséance et dans son arrondissement.
58 FERRAS, inédit, p. 46.
59 AD Gard. 100 J 32.
60 AD Hérault. 3 HDT 510.
61 AD Hérault. 3 HDT B 491. Le domaine reste ensuite dans la famille de Laroque jusqu’en 1860 d’après PÉZIÈRES, 1896, p. 84. Données reprises dans SAINT-QUIRIN, 1985, p. 283.
62 AD Hérault. C 2739. Enquête de 1788 sur la situation des forges et fourneaux dans la Province de Languedoc. Acte n° 47 : Lettre du subdélégué du Vigan, datée du 5 août 1788, qui mentionne la présence d’une verrerie au lieu de Baumes, paroisse de Ferrières, exploitée par le Sieur de la Roque et Sieur Jerome de la Roque, son fils ayné (…) une autre verrerie située dans le ruisseau de Trevezel, sur la Montagne de l’Espérou, dans la paroisse de Notre Dame du Bonheur, exploitée par le Sieur de la Roque cadet. Voir également AD Hérault. C 2766.
63 AD Gard. C 1917. Lettre de M. d’Aguze, subdélégué du Vigan, datée du 21 juin 1788, à l’Intendant à propos d’un mémoire de M. de la Roque, en permission d’établir à Cette une verrerie royale. Voir également AD Hérault. C 2766. Lettres de M. de La Millière et de l'intendant (mai/juin 1788).
64 Durant la période révolutionnaire, les verriers font l’objet d’une attention toute particulière de la part du Comité de surveillance du nouveau département de l’Hérault. en 1792, les de Laroque de Baumes ont quitté les lieux et sont inscrits sur la liste des émigrants soupçonnés d’aide aux contre-révolutionnaires (AD Hérault. 1 Q 723). Un inventaire des biens qu’ils ont délaissé est dressé le 4 juillet 1792 et fait état d’un incendie, probablement volontaire (AD Hérault. 1 Q 476).
65 Ce découpage reprend strictement celui qui avait été très logiquement proposé par les précédentes équipes de fouilles. Afin de faciliter la compréhension globale du site et des diverses analyses qui en ont été faites, les édifices ont ensuite été individualisés par un numéro (voir plan général du mas de Baumes).
66 Aucune étude de bâti n’a pu être conduite en amont des restaurations et les lectures architecturales sont désormais largement limitées.
67 Le bâtiment n° 2 contenait notamment un imposant four à pain dont la présence est avérée dans les textes dès la fin du XVIe siècle.
68 Le compoix de Ferrières, établi en 1594, est à ce titre tout remarquablement révélateur : bien que récemment acquises par la famille Roquefeuil, les trois parties du mas sont successivement décrites et présentent déjà la même organisation générale de leurs bâtiments avec, pour le groupe I une maison, partie a deux estages et crosades (fenêtres à croisées), contient jasse, four et possieu (porcherie), casal (...) et parrans (enclos). Le groupe II, dont la bâtisse principale est dite maison Michel comporte également déjà deux étages et trouve associée à jasse, possieu, celestre, jardins secants, pallier et four. Et enfin le groupe III contient un petit membre de maison à deux estages (…) et une jasse (AD Hérault. 1 Mi 360 R 24 : f°1 r° à 2 v°).
69 D’après les clichés, ce décapage a été effectué sur une profondeur de l’ordre de 0,05 à 0,20 m, les vestiges affleurant pour partie à la surface (RIOLS, 1993).
70 Au total, neuf tranchées, d’une largeur moyenne de 0,80 m ont été mises en place aux abords immédiats des constructions (RAYNAUD, 1994, p. 6).
71 RAYNAUD, 1994, p. 7. Remblai d’une épaisseur variable de 0,10 à 0,65 m d’épaisseur découvert dans la tranchée n° 1.
72 Portes ou fenêtres (RIOLS, 1993, document non paginé). La documentation photographique semble indiquer la présence de deux portes, espacées l’une de l’autre de moins de trois mètres, encore visibles par des arrêts très nets de la maçonnerie sur près de 2 m de hauteur.
73 Soit une aire d’environ 150 m2.
74 Un seuil, de 1,90 m de large, a été dégagé dans le mur est. L’organisation des vestiges, et notamment l’agencement des fours ainsi que l’absence partielle du tracé du mur sud, laisse supposer la présence d’une autre porte en partie méridionale.
75 Durant sa seule dernière période d’activité, la verrerie connait une activité continue pendant près de trente ans.
76 Les travaux réalisés en 1745 font état d’une officine très ajourée, équipée de trois portes, un grand portail, quatre fenêtres et trois embrasures(…) pour donner du jour. AD Hérault. 3 HDT B 516 et 517.
77 FERAS, inédit (sans réf.) : Il y a deux arceaux dont les piliers qui le supportent seront raccommodés.
78 RIOLS, 1993, document non paginé.
79 RAYNAUD, 1994, p. 8.
80 Il fait 2 m de côté dans sa partie la plus étroite qui est reliée au four et 4 m dans sa partie la plus large, pour 3 m de long.
81 Plusieurs éléments ont un module quadrangulaire de 0,10 x 0,15 m.
82 Il fait plus de 0,10 m d’épaisseur mais son diamètre n’a pas pu être évalué.
83 FOY, D. ; VALLAURI, L. Roquefeuille, une verrerie provençale aux XVIIe et XVIIIe siècles, In Actes des 4e rencontres de l’A.F.A.V., Rouen 24-25 novembre 1989. Ateliers de verriers de l’Antiquité à la période pré-industrielle. Cahors, 1991, p. 141-142 et fig.4 p. 148.
84 CHAPTAL, 1807, p. 274-275. L’encyclopédie méthodique, dans sa description des verreries languedociennes indique également : le pavé de cette tour (four) se prolonge en une espèce d’étude disposée en plan incliné, qui s’éloigne du four d’environ dix à douze pieds (soit environ 3 m), (DIDEROT, D’ALEMBERT, 1791, t. VIII, p. 453).
85 Le relevé en plan dressé par les fouilleurs semble indiquer des traces de reprise dans sa structuration interne.
86 FOY, VALLAURI, 1991, fig.4 p. 148 : fours n° 2-3 et 4.
87 Ce type de four ne peut en effet en aucun cas être situé à l’extérieur de l’aire de travail des verriers. à l’issue de leur soufflage, les pièces nécessitent en effet un transport rapide et sans trop d’écart de température vers l’espace de recuisson. Si l’ouvrage s’avérait être implanté à l’extérieur, alors il ne peut s’agir que d’un four à fritte, destiné à la préparation des matières premières.
88 RAYNAUD, 1994, p. 6 : tranchée n° 6.
89 Un autre lot de matériel, appelé « cache des verriers » a été découvert dans le courant du XIXe siècle non loin du mas, dans une petite cavité karstique obstruée (SAINT-QUIRIN, 1985, p. 18-19). Interprété comme le mobilier produit lors de la dernière campagne de Baumes, il contenait essentiellement des petites bouteilles étroites à col long, également appelées « topettes » ainsi que des bouteilles et Dame-Jeanne.
90 SAINT-QUIRIN, 1985, p. 200.
91 AD Hérault. 3 HDT B 491. Bail afferme du mas de Baumes du 14 janvier 1723.
92 Au total, 19 échantillons ont été testés avec B. Gratuze au centre Ernest-Babelon (IRAMAT/CEB, UMR 5060, CNRS/Université d’Orléans). La méthode employée est la spectrométrie de masse, couplée à un plasma inductif avec prélèvement par ablation laser (LA-ICP-MS), qui permet actuellement l’analyse quantitative la plus complète possible sur la composition du verre. Du reste, ce procédé permet de ne pas endommager les artefacts soumis à l’analyse.
93 Le charbonnage est recensé dans le secteur depuis la période médiévale (VERNET et alii 2002, p. 424). Il semble récurrent à partir de la deuxième moitié du XVIIe siècle au moins dans les textes (AD Hérault. G 2252. Mémoire sur la dégradation faite aux bois qui contient plusieurs arrentement de bois pour des charbonniers).
94 Il s’agit notamment des sites de la seube, Plat Fournel, la Taillade, la Buissade, Bacayrole, sueilhessud (commune de Cazeveille), Mascla, Villassèque, Juoilhes/sueilhes-nord. Pour le XVIe siècle, il s’agit des officines du saut du Loup, La Quisse 1, la Quisse 2 et le bois de Pous/escabasses.
95 La verrerie de Baumes fonctionne en alternance au moins avec les centres du château de Rouet, de Villaret, de Montguilhem, des Claparèdes, de Cazenove, de Ricome, de Bressonnarie/Mas de verdier, de Couloubrines, de Lamalou et probablement les petits sites plus temporaires d’Iscary et de Cayzergues.
Haut de pageTable des illustrations
![]() |
|
---|---|
Titre | Fig. 1 |
Légende | Localisation des principaux établissements verriers médiévaux et modernes établis sur et autour du causse de l’Hortus (XIIe-XVIIIe s.) |
Crédits | © I. Commandré 2015 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 2,6M |
![]() |
|
Titre | Fig. 2 |
Légende | Ferrières-les Verreries (34), plan général du Mas de Baumes et localisation des fouilles (1993-1994) |
Crédits | © I. Commandré 2015 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 300k |
![]() |
|
Titre | Fig. 3 |
Légende | Ferrières-les Verreries ; vue générale, depuis le sud, des bâtiments principaux de la métairie de Baumes Groupe I. L’arbre occupe l’emplacement de l’atelier |
Crédits | © A. Riols/ODAC 1993 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,6M |
![]() |
|
Titre | Fig. 4 |
Légende | Ferrières-les Verreries ; extrait du Cadastre napoléonien du mas de Baumes (1832) |
Crédits | © Archives départementales de l’Hérault, 3 P 3527, section C1 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 328k |
![]() |
|
Titre | Fig. 5 |
Légende | Ferrières-les Verreries (34), plan général des vestiges de la verrerie retrouvés lors de la fouille de 1993 – Groupe I |
Crédits | © I. Commandré 2015 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 228k |
![]() |
|
Titre | Fig. 6 |
Légende | Ferrières-les Verreries (34), vue générale, depuis le nord, du four de fusion en cours de dégagement - Niveau d’arrêt de la fouille |
Crédits | © A. Riols/ODAC 1993 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,3M |
![]() |
|
Titre | Fig. 7 |
Légende | Un exemple des productions tardives (2e moitié XVIIIe s.) du Mas de Baumes et de Couloubrines : les topettes |
Crédits | © C. Durand/CNRS-UMR 7299, Aix-en-Provence, 2013 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 336k |
![]() |
|
Titre | Fig. 8 |
Légende | Ferrières-les Verreries. Composition des verres du site de Lallemand déterminée par LA-ICP-MS, principaux oxydes en % massique (Na2O à Fe2O3), autres oxydes (Cu O à Pb O) en parties par million (ppm) |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 144k |
![]() |
|
Titre | Fig. 9 |
Légende | Ferrières-les Verreries (34). Diagramme Na2O/ K2 + MgO/ CaO. Pour les échantillons testés, on observe la très nette composition sodique méditerranéenne, à fondant produit à partir de cendres de plantes halophytes littorales (salicor) |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/991/img-9.jpg |
Fichier | image/jpeg, 109k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Isabelle Commandré, Alain Riols et Bernard Gratuze, « Quatre siècles d’artisanat verrier forestier en Languedoc méditerranéen : l’atelier du mas de Baumes Ferrières-les-Verreries, Hérault, XIVe-XVIIIe s », Patrimoines du Sud [En ligne], 3 | 2016, mis en ligne le 01 février 2016, consulté le 27 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/991 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/pds.991
Haut de pageDroits d’auteur
Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Haut de page