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Les enluminures des Établissements de saint Louis de la bibliothèque de l’École de médecine de Montpellier : discours visuel et rénovation juridique

The illuminations of Établissements de Saint Louis of the École de médecine in Montpellier: Visual speech and judicial reform
Christiane Raynaud

Résumés

Parmi les trésors du Fonds Bouhier figure sous la cote H 395 les Établissements de saint Louis. Ce manuscrit réalisé à Paris est un des tout premiers exemplaires de cette compilation de droit civil composé par un juriste orléanais. Il est aussi un des plus illustrés avec huit vignettes. Des notes pour l’enlumineur en redoublent l’intérêt. Des compositions simples et claires autour d’un nombre réduit de personnages, des couleurs vives, des fonds or confèrent à ces petites images une élégance certaine. Elles constituent un discours visuel fort qui enrichit le texte et porte, non sans quelques réticences, avec la « grande » figure du roi un programme politique de rénovation de la Justice au service de la Paix.

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Texte intégral

  • 1 - RONSIN, 1971, p. 20-21, 97, 228.
  • 2 - La reliure est de toile noire, restaurée en 1976. L’état de conservation rend difficile entre aut (...)
  • 3 - Le droit civil est considéré comme un droit général. Il y a unité du droit, GIORDANENGO, 2000, n° (...)
  • 4 - L’auteur de la compilation serait un jurisconsulte orléanais. La maîtrise du droit et de la juris (...)
  • 5 - Les initiales sont filigranées.
  • 6 - Le manuscrit H 395 présente une lacune au livre I, le chapitre 74. Et au bas du verso fol. 16 le (...)
  • 7 - Considéré comme saint de son vivant les premières démarches en vue de sa canonisation sont entamé (...)
  • 8 - MONTESQUIEU, 1748 (1ère éd.), I, 28, chap. 39.
  • 9 - La définition de coutume est ambiguë jusqu’au XIIIe siècle, elle est synonyme d’une règle de droi (...)
  • 10 - Les dénominations adoptées par les historiens du droit pour décrire le manuscrit reflètent ce pas (...)
  • 11 - GIORDANENGO, 2000, p. 45-66.
  • 12 - Il n’a pas de table, de prologue. Seuls quelques chapitres sont numérotés au début de l’ouvrage, (...)
  • 13 - La première est pour les historiens du droit plutôt un règlement : elle concerne le prévôt de Par (...)
  • 14 - Livre I, chap.10 à 175 et Livre II chap. 1 à 38, à partir du folio 55 dans le manuscrit H 395 san (...)
  • 15 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 1. Le règlement est aussi un mandement destiné aux sénéchaux et aux baill (...)
  • 16 - Il en édite le prologue, Du CANGE, 1668, p. 643 et suivantes.
  • 17 - Le site de la Bibliothèque virtuelle des manuscrits médiévaux permet de se faire une idée de la t (...)
  • 18 - À l’époque moderne, trois peintures en pleine page ont été rajoutées : une avec les armes du Prés (...)

1La bibliothèque universitaire historique de Médecine de Montpellier comprend nombre de manuscrits exceptionnels dotés d’une illustration de très grande qualité. Il n’y a pas lieu de revenir sur la constitution de ce fonds ancien prestigieux. Parmi les trésors du Fonds Bouhier1 figurent un manuscrit des Établissements de saint Louis qui a peut-être un peu moins retenu l’attention des chercheurs. Conservé sous la côte H 395, il se présente comme un petit in quarto 180 x 130 mm sur vélin, de 77 folios2. Il manque le début mais à la fin figure la date du 19 juin 1273. Ce manuscrit, réalisé à Paris, est l’un des plus anciens de ce texte de droit civil3 dont l’original a été composé après le 8 novembre 12724. Il est un des tout premiers exemplaires copiés. Il en subsiste vingt-quatre de la fin du XIIIe siècle ou des premières années du XIVe siècle. Cinq qui dérivent d’une copie perdue sont enluminés. Le manuscrit H 395 est un des plus illustrés avec huit vignettes5. Le scribe et le peintre ne sont pas connus. Quatre folios portent des notes pour l’enlumineur, ce qui en redouble l’intérêt6. Les copistes de la fin du XIIIe siècle attribuèrent fictivement l’œuvre à Louis IX7 pour en renforcer l’autorité. Malgré les critiques de Montesquieu8, elle n’est pas sans mérite. Elle est caractéristique du souci contemporain d’harmoniser le droit savant et le droit coutumier9 en usage. Elle témoigne d’un moment décisif10 d’évolution du droit civil11. Dans cette perspective, le juriste d’Orléans qui compile les textes les remanie. Le volume12 comprend deux ordonnances de saint Louis13, la coutume de Touraine Anjou au livre I et le coutumier d’Orléans au livre II14. Le titre provient du premier texte que l’auteur a reproduit en tête de son recueil15. L’érudition des éditeurs successifs depuis Du Cange au XVIIe siècle16 a permis de retrouver ses références au droit romain et au droit canonique. S’y ajoutent des additions et des adaptations, des commentaires personnels. Sans destinataire connu, le choix de l’enluminer avec élégance comme le format17 et l’effort de simplification du texte sont à rapprocher de ce que l’on sait des bibliothèques de professionnel du droit (privé) constituées souvent d’un seul ouvrage, emblématique de leur culture, de leur pratique et de la place assignée au livre dans ce milieu. Mon propos est de m’attacher aux images dont la place est prévue, sinon dès la conception de l’œuvre du moins de l’exemplaire. Le discours visuel ne se comprend pas tout à fait sans le texte avec des compositions simples et claires autour d’un nombre réduit de personnages ; sa fonction joue un rôle particulier dans le succès de l’œuvre18.

La réalisation d’un programme qui reflète l’adaptation précoce de l’œuvre

  • 19 - Pour le contexte : JACOB, 1994.
  • 20 - Elle se présente sous forme d’une référence à une Décrétale et d’une étude de cas, à l’encre roug (...)

2Le programme iconographique19 ne semble pas avoir fait l’objet d’investigation systématique. La première fonction des images n’est pas de faciliter un usage référentiel de l’œuvre en scandant sa structure, mais de mettre en exergue certains thèmes. Les textes illustrés sont de longueurs et de natures différentes. Il peut s’agir de la rubrique en rouge (fol. 55) et d’une idée générale. Pour les études de cas, deux situations se présentent : le passage retenu est au début d’un développement à l’encre noire, après la rubrique en rouge qui donne le titre du chapitre (fol. 1, 5). Parfois le texte illustré est plus loin (fol. 30, 57, 66 verso). Enfin la dernière image (fol. 68 verso) n’illustre pas le texte mais une note rajoutée qui entretient avec lui une certaine analogie20. Le texte ne s’étend pas sur une page ni sur une colonne entière et comprend tout au plus quelques lignes, une phrase ou quelques mots parfois un seul. La proximité de l’image est recherchée. Insérée dans le texte, elle est accompagnée sur sa droite de quelques mots répartis parfois sur deux réglures, l’espace ne pouvant recevoir que deux à quatre lettres par ligne, pour respecter la largeur de la colonne.

  • 21 - Deux ont déjà été recensées. Elles ont pour point commun de concerner le roi : fol. 1 et 55.
  • 22 - Celle du fol. 5 manque aussi dans l’exemplaire appelé B par VIOLLET, 1881 t. I, p. 397-398, le Pa (...)
  • 23 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 1, n. 3.
  • 24 - Ibid. p. 159, n. 35.
  • 25 - Ibid., p. 330, n. 26 pour le ms. B.

3Le choix des textes, leur étendue et la présence de notes pour l’enlumineur, qui en principe auraient dû être effacées à l’achèvement de la copie, sont autant de jalons éclairant le projet éditorial. Le manuscrit en conserve quatre21, toutes en bas de page22, en noir et aux caractères d’un module inférieur au texte : folio 1 et doit avoir roi present seant et a desclarant usage et plusoirs plaintif devant luy23 ; fol. 30 ci doit avoir II. champions24 ; fol. 55 Ci doist estre roi et deux homs tant dune part et l’autre d’autre part et il done a chascun son droit25 ; fol. 66, « ci doit avoir .I. home tot droit en estant et i autre a genoil et tenoit ( ?) loisel pour la première image au folio 66 verso, col. 1 qui montre un personnage debout, tenant un oiseau, et devant lui un autre à genou (l’image corrige la note).

  • 26 - Chapitre XIX livre II, Ibid. p. 400, note 22.
  • 27 - Ibid. p. 343, n. 26.
  • 28 - Ibid. p. 409, n. 3.

4Un manuscrit B comprend six notes, trois communes avec le manuscrit de Montpellier et trois qui n’y figurent pas ou plus. Dui gentil home en estant qui s’entre-baisent26 une accolade correspond à l’image du fol. 66 verso col. 2. Les deux autres sont l’une pour le chapitre VIII, livre II Ci doit avoir I home pandu27 ce qui est bien le cas au fol. 57 et pour le chapitre XXI du livre II Ci doit avoir un roi en seant et une demoisele a genouz devant lui, au fol. 68 verso28. Le roi est assis, la demoiselle est debout et un troisième personnage est représenté. Les notes qui ont été effacées ou rognées lors de la reliure pourraient donc avoir un contenu différent, ou l’enlumineur pourrait avoir choisi de ne pas suivre tout à fait les indications.

5L’enlumineur disposait donc de notes proches de la page ou sur le même feuillet. Brèves, sans indication de couleurs, elles établissent l’existence d’un programme dont l’auteur peut être le rédacteur des Établissements. Il peut aussi être dû au libraire - le terme apparaît au même moment à Paris - qui fait réaliser le manuscrit, où dans un travail plus collectif à l’auteur, au libraire et au copiste. Comme les notes diffèrent parfois de l’image, elles semblent établir un souci d’individualisation du décor, qui en fait aussi la qualité. Le folio 66 verso montre qu’il y a sans doute aussi une évolution, lors de la copie du manuscrit, quant à la distribution des miniatures, en effet la première colonne comprend un espace vide (avec sept lignes de réglures) de la taille environ d’une image. Le texte surtout fourni d’autres éléments qui enrichissent l’illustration, sans en épuiser le contenu et en laissant place à la créativité de l’artiste. Ce dernier a pu avoir sous les yeux un modèle enluminé, sinon l’original du moins une copie intermédiaire, ou puiser dans un répertoire de motifs repris d’autres œuvres. Il utilise aussi un lexique iconographique qu’il partage avec son lecteur et une symbolique, culture commune.

  • 29 - AVRIL, 1995, p. 15 et 20, mais aussi BRANNER, 1977.
  • 30 - Ces caractéristiques se retrouvent dans d’autres livres de droit et pour nombre d’ouvrages contem (...)

6Le Livre I qui comprend 175 chapitres est moins illustré (fol. 1, 5, 30) que le livre II, 38 chapitres (fol. 55, 57, 66 verso a et b, fol. 68 verso). Le tout constitue un discours visuel d’une grande force malgré la petite taille relative des vignettes. Le manuscrit est représentatif du style gothique, qui apparaît à Paris, entre la fin du XIIe siècle et 1210, dans sa seconde mouture à partir du milieu du XIIIe siècle. Il est caractérisé par d’amples drapés se cassant en cascades successives, des compositions équilibrées, un traitement de la figure humaine monumental et harmonieux29. Le trait est vigoureux. La gamme chromatique est dominée par un bleu saturé et un rouge plus ou moins lumineux, souligné d’un fin liseré blanc (fol. 1, 55, 66 verso B, 68 verso) auxquels s’ajoutent quelques touches de vert, du gris. Le visage, les cheveux, les mains ne sont pas colorés. Les fonds sont or ou en couleur en accord avec le sujet de l’image. Chaque miniature est inscrite dans un cadre à écoinçons rouges (sauf fol. 30), roses pour le fol. 1, bleus pour les cinq dernières images et bichrome fol. 5 et 30. Divers empiétements l’animent (fol. 1, 5, 30, 66 verso, 68 verso). Le petit nombre de personnages, le dépouillement du décor et la sobriété de la composition30 contribuent à la clarté du discours qui sous une apparente simplicité est d’une richesse certaine et somme toute assez neuf.

Promouvoir la paix : délits et crimes n’apparaissent pas dans les images

  • 31 - JACOB, 2002, p. 207-234.
  • 32 - Dans l’œuvre législative de Louis IX, nombreux sont les textes qui visent à supprimer la violence (...)
  • 33 - Le siècle de saint Louis, Paris Hachette, 1970, p. 218.
  • 34 - Avec la diffusion de la procédure inquisitoire, qui prend le pas sur la procédure accusatoire, le (...)

7Les infractions ne sont pas représentées à la différence d’autres ouvrages de droit31 comme les manuscrits de Gratien, car l’objectif prioritaire reste le rétablissement de la paix et la réconciliation des parties. Dans le contexte de rénovation judiciaire et de rationalisation de la justice et des preuves entreprises par Louis IX32, il s’accompagne désormais de la volonté de réprimer, sur un mode public, l’ensemble de la délinquance criminelle pour remédier au trouble de l’ordre public. Deux ordonnances, en 1254 en matière civile et en 1258 en matière criminelle, instituent la preuve par enquête c’est-à-dire par témoins33. Elles tentent aussi d’interdire la preuve par bataille, gages de bataille ou duel judiciaire34 qui résiste dans les justices seigneuriales et même royales.

Une forme de duel judiciaire subsiste car il anticipe sur la réconciliation des parties

  • 35 - Il en est la garantie, BONGERT, 1949, p. 205 et 239. Il intervient faute de preuves, VIOLLET, 188 (...)
  • 36 - Ici chap. 11, la question sur le défaut.

8Il intervient toujours après la prestation d’un serment en justice35, en prouvant ou non sa véracité. Il tranche le débat sur le fond36, mais comprend une réserve. Il n’a pas lieu dans le domaine royal en raison de l’ordonnance de saint Louis. L’image (fig. 1) témoigne d’une phase de transition.

Fig. 1

Fig. 1

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 30, Duel judiciaire entre deux champions

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 37 - Contrat c’est-à-dire avec remise de la chose sur laquelle porte l’opération. Ici il n’y a pas men (...)
  • 38 - VIOLLET, 1881, t. 2, chap. XCV, p. 154 à 160. Du CANGE, 1668, chap. 89, p. 683.
  • 39 - Dieu aide le juste dans l’épreuve à faire prévaloir sa cause, abat ses ennemis et leur pardonne c (...)

9L’origine du problème évoqué est un contrat. Le texte ne dit pas s’il a été conclu devant le tribunal. S’il rappelle les paroles solennelles (fides facta), il ne le fait pas pour les gestes qui les ont accompagnés37. Un processus empreint de formalisme38 est décrit. Le duel est ordonné par la cour en première instance, jugement qui est suivi de la remise des gages faite au juge. Des garants sont fournis par les plaideurs pour garantir la comparution au jour fixé. Le duel est un recours après l’échec des démarches argumentaires, le texte montre le souci d’abord de l’éviter en tentant de concilier les parties jusqu’au jour du combat. À chaque étape, pour pouvoir l’arrêter, est prévue une amende, visant à faire réfléchir ceux qui souhaitent s’engager dans le duel, et des délais jusqu’à 40 jours, la bataille peut être remise plusieurs fois. Des paroles doivent être prononcées à des moments précis, formules simples et faciles à retenir. Le jour venu, en public, les duellistes devant des reliques et en se donnant la main prennent tour à tour la parole en s’en remettant à Dieu39 : le demandeur jure que la chose lui appartient puis à son encontre le défendeur jure qu’il est parjure. Les duellistes ou leurs champions se rendent alors dans le champ (espace clos où intervient le duel), trois bans sont proclamés interdisant aux spectateurs de prendre parti, d’intervenir d’une manière ou d’une autre. Le combat s’achève rapidement, dès que l’un des deux est au sol.

  • 40 - D’après la note, mais ce sont deux sergents d’après le texte.
  • 41 - À la fois le champ clos où intervient le combat et l’enjeu tel qu’il est décrit à la fin du texte (...)
  • 42 - Azon (1190-avant 1233), jurisconsulte bolonais formé à l’École de Bologne, enseigne à Montpellier (...)
  • 43 - On assiste à la formation d’un régime de responsabilité contractuelle pour retard dans l’exécutio (...)
  • 44 - THIREAU, 2002, p. 340-341.

10L’image représente le duel judiciaire entre les deux champions des contractants40, devant un cercle vert41. La lutte se fait à mains nues. Les prises utilisent les vêtements. Le vainqueur à gauche, pourtant plus petit, s’apprête à renverser son adversaire. Le vaincu attaque d’un coup de tête, en frappant par l’intérieur la cheville gauche de son adversaire, et de la main gauche agrippe à travers le tissu ses parties génitales, traduction de sa mauvaise foi. L’enlumineur porte une attention particulière sur les vêtements, elle confirme la distinction entre celui qui ne respecte pas ses obligations et a fait un faux serment (en gris) et celui qui l’emporte (en bleu). D’un point de vue juridique, cela renvoie dès le XIIe siècle à Azon et Accurse42 avec l’opposition entre le pacte nu, c’est-à-dire simple échange de consentements qui ne fait naître aucune action ni aucun droit, et les vêtements, qui habillent le pacte et le rendent efficace. À la suite des canonistes, qui font prévaloir sur le formalisme la morale, la justice et l’équité, les engagements doivent être tenus et respectés. Même quand il s’agit de simples promesses, les pactes doivent être observés (Pacta sunt servanda) et le seul consentement suffit à créer l’obligation43. Dans le droit laïc, les tendances consensuelles se renforcent44.

11Il est remarquable que le duel judiciaire n’intervienne qu’au septième garant, le vaincu ne doit pas perdre la vie, ne pas être mutilé, mais payer au vainqueur le prix du champ tel que prévu le jour de la vente, les conteors (avocats, procureurs) et à la justice 60 sous. Il s’agit de limiter les effets d’une défaite trop grave, tout ce qui peut compromettre les efforts de réconciliation entre les parties. Tout est fait pour permettre l’apaisement et ne pas susciter de nouveaux conflits ou contentieux.

La rigueur de la justice est nécessaire pour rétablir la paix

  • 45 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 327.
  • 46 - Dans la seconde moitié du XIIIe siècle, dans le contexte de la rénovation judiciaire entreprise p (...)
  • 47 - Recreance ne siet mie en chose jugiée, ne en murtre, ne en traïson, ne en rat [rapt], ne encis [c (...)
  • 48 - Peines de sang, VIOLLET, 1886, t. 4, p. 220.

12Le propos n’est pas contradictoire pour le rédacteur avec la volonté affichée d’efficacité dans la sanction pénale du crime, qui participe au rétablissement de la paix. Le chapitre 8, livre II45 traite de l’élargissement ou recreance qui désigne aussi bien la mise en liberté du prisonnier sous caution, cas particulièrement fréquent46, que la restitution d’un objet pris. Les deux sont interdits en matière criminelle47. La raison avancée est que si l’inculpé mis en liberté sous caution ne comparaît pas, la caution ne peut être atteinte d’aucune peine corporelle48. Il paie certes, faut-il encore qu’il soit solvable. Le crime risque donc d’être impuni. Il faut que la peine soit à la mesure du délit et donc prononcer sans retard une assignation en justice à un jour déterminé à la demande de la partie adverse ou d’office. L’exécution doit intervenir rapidement pour éviter de rajouter au dol de la famille et des amis de la famille.

13Pour illustrer le propos est retenue la pendaison (fig. 2).

Fig. 2

Fig. 2

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 57, Pendu

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 49 - MOREL, 2007. Pour la période suivante, VOYER, 2015. Mais aussi VIVAS et CHARAGEAT, 2016.
  • 50 - Le prévenu d’un crime qui s’évade est considéré comme coupable et pendu, si la justice parvient à (...)
  • 51 - CARBASSE, 2014, p. 299, 301. Des femmes sont pendues. La peine n’était pas appliquée pour le prem (...)
  • 52 - Dans une bibliographie abondante, Miscellanea Juslittera. Volume 7, 2019.
  • 53 - Une maladresse : une partie de l’arrière de la tête inclinée, position naturelle, touche la trave (...)
  • 54 - Témoignage de la diffusion précoce du linge de corps. Le sous-vêtement masculin de type caleçon a (...)
  • 55 - Le pied gauche, agrandi, relâché, est signe de la mort. Le corps et le sous-vêtement du cadavre s (...)
  • 56 - Le cas échéant il est privé de ses biens par la confiscation.
  • 57 - Le vert rappelle son origine et indirectement le lynchage possible par vengeance, qui menace l’or (...)
  • 58 - Une jeune fille peut venir demander la grâce du condamné pour l’épouser, GAUVARD, 2005, p. 66-78.

14Seule peine représentée dans le manuscrit49, mode d’exécution le plus courant pour les roturiers, elle est le supplice des voleurs et des homicides simples50. Les nobles, dont la peine est la décapitation, peuvent être pendus dans les cas très graves et dans les affaires politiques, peine déshonorante pour eux et leur famille. Pour être exemplaire, dissuasive, la peine sévère et inéluctable est donnée en spectacle, elle est infamante51. L’image n’évoque pas le crime qu’elle sanctionne, ni le point jugé déterminant de l’application de la peine. Elle ne montre pas l’ordonnateur du supplice, l’assistance, le bourreau52, le condamné montant à l’échelle, puis le moment où suspendu il trouve la mort. Le pendu est décédé, yeux fermés53. Mains liées derrière le dos, il est en partie dénudé54, sans chemise, jambes et pieds nus55 ; il est dépouillé de son identité, de son statut, exclu du corps social, humilié56. Le gibet est formé de deux montants et d’une traverse57. L’enlumineur met l’accent sur l’épaisseur du cordage, le nœud sur la traverse, ce n’est pas un hasard. Dans l’esprit du texte, ainsi se trouve écarté le risque de rupture. Il s’agit au dernier instant d’empêcher le condamné d’échapper au supplice. Le public, qui devait être là pour contrôler l’exclusion de la société, conserve en effet un rôle dans la mise à mort, il peut crier au miracle en pareil cas58 ou lorsque l’échelle se brise.

Prévenir les conflits : droit des familles et droit féodal

Succession

  • 59 - ELLUL, 2006, p. 156-157.
  • 60 - Les règles successorales visent à assurer la continuité des services dus par le fief, MARTIN, 198 (...)
  • 61 - Au XIIIe siècle, sous l’influence du droit romain on admet le partage du fief,
  • 62 - VIOLLET, 1881, t. 2, Livre I, chap. X, p. 19.
  • 63 - Suit une réserve Més se il avoit faict achas qui fussent de son fié et il les donnast à un étrang (...)
  • 64 - Si le père laisse plusieurs fiefs, chacun de ses fils en a un et si dans le patrimoine se trouven (...)
  • 65 - Du CANGE, 1668, chap. 8, p. 661 et VIOLLET, 1881, t. 2, Livre I, p. 19.
  • 66 - Le système est interdit par le roi en 1209.
  • 67 - Un manoir roturier aux champs. La coutume de Normandie, art. 337, cité par GODEFROY vol. 4, 1969, (...)
  • 68 - Chap. IX, VIOLLET, 1881, t. 2, p. 18-19 et chap. VII Du CANGE, 1668, p. 660.

15La prévention des contentieux par le droit (privé) garantit la paix sociale et celle des familles. Dans le droit des familles, ce qui relève des successions est d’une grande importance. Dans les pays de droits coutumiers, ces règles ne sont pas précisées avant le milieu du XIIIe siècle. Dans la coutume de Touraine Anjou, le droit d’aînesse (primogéniture et masculinité) n’est pas encore rigoureux pour les nobles59 et les roturiers ont entre eux des droits égaux. Dans les coutumes d’Anjou et en Orléanais60, pourtant proches, des variantes concernent les successions collatérales par exemple. Plus que la procédure - marche à suivre pour faire reconnaître son droit en justice - à bien des égards, il s’agit des moyens pour faire reconnaître son droit. Le premier chapitre de la coutume de Touraine Anjou (chap. 10 du livre I) décrit et éclaire un cas complexe sous le titre Du don de Gentilhomme à ses enfanz et comment eux doivent partir [partager], se li peres meurt sans assener eus. Le problème semble naître du fait que le père n’a pas eu le temps ou a négligé de consulter ses héritiers et de les faire intervenir : leur consentement n’a pas été sollicité61. La coutume62 rappelle que le père ne peut donner à ses enfants puînés que le tiers de son héritage, mais il peut donner ses acquêts à qui il veut63. Suit une série d’hypothèses : veuf il meurt sans avoir eu le temps de répartir ses biens et il ne dispose pas de plusieurs fiefs à partager entre ses fils, mais d’un seul64. La coutume prévoit que tous les meubles reviennent à l’aîné qui rembourse les dettes de son père et si les puînés réclament leur part, il leur remet le tiers de sa terre65. L’aîné a une part avantageuse : deux tiers du fief. Comme le fief est entérin c’est-à-dire entier, le « parage » est appliqué : le partage matériel effectué, l’aîné seul prête hommage et doit envers le seigneur tout le service du fief. Mais les puînés doivent aider leur aîné pécuniairement66. Intervient alors un autre paramètre : l’aîné est rioteux, il donne une part trop petite, le puîné la refuse, elle reste à l’aîné et le second partage l’autre terre en deux, l’aîné retient la part qui lui plaît, il a alors les deux parties et les hebergemens67. La complexité des dispositions est pour l’enlumineur un défi. Reste que la place de la vignette (fig. 3) par rapport au texte donne une indication essentielle. Elle est insérée dans les dernières lignes du chapitre précédent68 qui concerne la poursuite des faux témoignages, elles élargissent le propos après avoir rappelé l’interdiction des batailles. Le roi ajoute et volons que les autres choses soient tenues en nostre domaine si com il est devisé par desus et en tel maniere que nos I puissons et mestre et oster et amander, quant il nos plaira, se nos veon que bien soit, soit la possibilité d’intervenir dans le domaine pour d’autres affaires.

Fig. 3

Fig. 3

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 5, Partage successoral

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 69 - GARNIER, 1982, p. 174-177.

16Sur un fond or bruni, cinq personnes se partagent l’image : trois adultes à gauche et deux enfants à droite. L’aîné et les deux puînés sont seuls visibles en entier. Derrière l’aîné, le prévôt, coiffé d’un bonnet blanc, et à ses côtés, vêtu d’une couleur identique, un auxiliaire sont tous deux représentés visages de profil. Toute leur attention va à un des enfants assis sur le troisième barreau d’une échelle de bois qui en compte cinq, soit le milieu ; sa tunique rose foncé comme sa petite taille souligne son jeune âge. De profil, main droite, il accepte les conditions de partage des lots de son aîné dont il reconnaît la prééminence. Sa place sur l’échelle est une manière d’indiquer sa revendication, le partage par moitié, alors que l’aîné propose un tiers. Les pieds de l’enfant sur le deuxième barreau et la main de son frère au même niveau montrent la solution retenue. L’aîné seul, visage de trois-quarts face, accepte une décision inspirée par les représentants du roi69 qui sont intervenus, d’où leur situation par rapport à l’aîné (l’image se lit de l’arrière-plan vers l’avant plan) pour l’appuyer. La solution est conforme aux préconisations de la coutume de Touraine-Anjou. L’échelle est utilisée dans l’iconographie religieuse : échelle céleste, sainte, elle a donné son titre à l’œuvre de saint Jean Climaque, Les degrés pour monter au ciel. Les deux tiers supérieurs sont pour l’aîné non seulement la part la plus grande mais aussi la meilleure. La métaphore est bien choisie. Elle est le symbole d’un ordre voulu par Dieu à l’intérieur des familles comme dans la société féodale construite sur l’engagement vassalique et la concession de fief.

L’hommage

  • 70 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 398 Livre II, Chap. XIX et Du CANGE, 1668, chap. 18, p. 713.
  • 71 - Dès le milieu du XIIIe siècle, presque tous les hommages sont liges. Le vassal prête souvent plus (...)
  • 72 - La brièveté du texte se retrouve pour d’autres style-coutumier, sans doute en raison de l’existen (...)
  • 73 - DAILLANT, 2017, p. 198.
  • 74 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 396.
  • 75 - DAILLANT, 2017, p. 198-199 les énumère à propos d’un exemple de refus dans SAINT-MARTIN, 1786, p. (...)
  • 76 - Il crée des obligations réciproques et interdépendantes entre les deux parties.
  • 77 - Deux mots sont rayés en rouge en cel lois.
  • 78 - Ne sont évoqués ni le fief d’attribution, ni le fief de reprise.
  • 79 - Au XIIIe siècle, le vassal peut aliéner le fief à trois conditions, dont seule la première est dé (...)
  • 80 - Le baiser ne se pratique pas avec des non-nobles.

17Les Établissements de Saint Louis s’efforcent de décrire les réalités locales en matière de droit féodal, à partir des usages locaux, de la jurisprudence et des consultations juridiques. Au fol. 66 verso, l’hommage fait l’objet d’une page qui bénéficie de deux vignettes au chap. XIX70 du livre II, coutumier d’Orléans. Comment l’en doit requerre son seignor et d’entrer en sa foi, sans demeure et de faire obeïssance ligement71. Comme il est parfois difficile de contraindre à comparaître devant un juge un accusé ou des témoins, il l’est tout autant d’obtenir l’hommage d’un vassal, en raison des obligations qui en découlent. Les vassaux ne se décident que lorsqu’ils sont sous la menace d’une saisie ou de la commise du fief ou confronté à un autre prétendant. Le texte72 ne présente que l’ultime étape d’un long processus, où la bienveillance des moyens juridiques à l’égard du vassal désobéissant est révélatrice de la faiblesse et des insuffisances du cadre institutionnel et juridique73. Elle tient aussi à deux considérations : la sanction infligée, la commise du fief, est une confiscation définitive de la terre74, elle peut avoir pour conséquence - si elle est jugée infondée par la cour seigneuriale où le vassal est jugé par ses pairs - la perte de suzeraineté du seigneur au profit du seigneur supérieur, le vassal gardant son fief. Les termes et les délais sont donc nombreux avant d’en arriver à la commise75. Le manuscrit résume : celui qui doit tenir un fief d’un seigneur, doit en faire la requête dans les 40 jours. S’il ne le fait pas dans le temps imparti (défaut) le seigneur peut et doit saisir son fief. Le texte consacre ensuite une description longue à la cérémonie d’hommage qui formalise le contrat synallagmatique76 entre les deux hommes, les obligations et la fidélité, par des formules et des gestes à peu près semblables en Occident. Elle commence sans préciser si le vassal est debout ou à genoux par l’énoncé d’une première formule : sire, je vos requier come a mon seignor, que vos me metez en vostre foi et en vostre homage77 de tele chose asise en vostre fié. Le texte distingue ensuite trois possibilités78. Le fief a été acheté79, le vassal doit l’indiquer, préciser le nom du précédent feudataire qui doit être présent. Le vendeur se démet de sa foi et se dévest - l’inverse de l’investiture. Le fief a été reçu en escheoite, succession, héritage collatéral en particulier d’héritages ou de rentes non nobles ou de descendüe, c’est-à-dire de succession, héritage en ligne directe. À ce moment il joint les mains - le texte n’indique pas qu’elles sont placées entre les mains du seigneur - et déclare sire, je devien vostre hom et vos promet feauté et loiauté de ce jor en avent, envers touz homes qui puissent ne vivre ne morir, o tele redevance come li fiez la porte… Il n’y a pas serment de foi sur les Évangiles ou des reliques. Le seigneur répond et je vos recois et pran a home et vos en baise80 en nom de foi, sauf mon droit et l’autrui selonc l’usage d’orlenois. L’enlumineur retient deux temps fort qui font chacun l’objet d’une image séparée.

Fig. 4

Fig. 4

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 66, verso A, Demande d’hommage au seigneur

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 81 - À l’origine, il devait être tête nue.

18Sous une voûte trilobée (fig. 4), qui évoque sans doute le château, et sur un fond à trois nuances de rouge intervient la requête. La supériorité du seigneur se marque par sa position corps de face, visage de trois-quarts et son costume : tunique courte et gants à longues manchettes pour la chasse au vol, activité noble. L’oiseau (faucon ou autour), en partie hors cadre, n’est pas porté sur l’avant-bras mais sur le poing comme pour être lancé. Le seigneur est sans arme comme le requérant. Le vassal, en bonnet blanc81 et robe longue, a posé un genou à terre, joint les mains et, visage de profil tout à la solennité de l’instant, se reconnaît vassal du seigneur.

19La deuxième image (fig. 5) est consacrée à la réponse du seigneur.

Fig. 5

Fig. 5

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 66, verso B, Baiser de paix

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 82 - L’usage ne semble être mis par écrit que plus tard dans le Livre des droiz et commandemens d’offi (...)
  • 83 - Entre le seigneur et son dépendant, le contrat est sygnalamatique.
  • 84 - Elle donne lieu à de nouvelles difficultés avec l’aveu, la montrée et le dénombrement. Le fief es (...)

20Le décor n’est plus le même et les deux hommes ont changé de place : le seigneur est désormais à droite et le vassal à gauche pour signifier que la scène intervient dans la châtellenie ou la juridiction où se situe le fief82. Ils sont revêtus de la même tunique bleue83, le seigneur tête nue et légèrement plus grand a l’initiative. Il a relevé son homme et s’apprête à lui donner l’osculum pacis, le baiser de paix, à l’embrasser en mettant ses deux bras autour de son cou. La manche rouge de la chemise du nouveau vassal indique peut-être qu’il est revêtu du fief, l’investiture intervenant après l’hommage84.

La parole impérieuse du roi-juge85 et la procédure judiciaire

  • 85 - Titre repris de JACOB, 2020, l’ouvrage concerne la période précédente. Sur le roi-juge : JACOB, 2 (...)
  • 86 - Sur la conception médiévale du témoin, le témoignage dans la procédure médiévale et la pratique d (...)
  • 87 - Le prévôt, de petite naissance et pas très considéré, représente le roi dans une fraction de son (...)
  • 88 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 2-5. Héritage désigne : un immeuble, la possession perpétuelle opposée à (...)

21La présence d’un règlement et d’une ordonnance de Louis IX explique sans doute que le roi est figuré trois fois : au début du livre I puis dans le livre II, indice des progrès de sa justice. L’absence d’assistants judiciaires (les sergents du prévôt), de témoins86, de juges assesseurs est significative : plus que l’organisation de la justice, ce qui importe est le rôle assigné au roi fontaine de justice (expression tardive). Le premier texte est un règlement de procédure. Fol. 1 Ci commancent li establissement le roi de France les Kiex li prevos de Paris et cil dou roiaume tiegnent à leur plais et usent communement. La premiere rebriche dou premier cas si est : de l’office au prevost87. Le texte définit en termes larges son champ de compétence, les contrats (et les obligations) et les heritages88.

  • 89 - Dans d’autres exemplaires cil dou roiaume, VIOLLET, 1881, t. 2, p. 1.

22La vignette frontispice (fig. 6) ne montre pas l’auteur de la compilation, le jurisconsulte, elle représente Louis IX et illustre le règlement à l’intention du prévôt de Paris et d’Orléans89.

Fig. 6

Fig. 6

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 1, Le roi, le prévôt et les plaideurs

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 90 - Le demandeur peut répliquer et le défendeur dupliquer, tripliquer, quadrupliquer, BONGERT, 1949, (...)
  • 91 - CARBASSE, 2014, p. 164.
  • 92 - TRUNG, 2021, p. 7-22.
  • 93 - La figuration du prévôt dans les deux premières images se ressent de son statut.

23Elle ne décrit pas l’ouverture de la procédure : l’instance débute par une plainte adressée au juge par le demandeur et la semonce, faite par le juge, qui fixe un jour au défenseur pour venir plaider et lui donne le motif de l’ajournement. Elle est délivrée par des sergents ou si le défendeur est noble par ses pairs. Les sergents, recrutés par les prévôts, sont aussi chargés de l’exécution des jugements. Louis IX, dans l’article 17 de l’ordonnance de 1254, interdit aux prévôts d’en avoir un trop grand nombre. Ils ne figurent dans aucune image du manuscrit. Le bailli, qui est supérieur au prévôt, n’apparaît pas non plus, par souci d’être au plus près des plaideurs : la première instance est en effet privilégiée. Le texte précise après la première rubrique Li prevoz de Paris tendra ceste forme a ses plaiz. Dans la procédure, l’étape de la comparution est cruciale. Le demandeur expose les faits sans qu’une forme spéciale soit requise, le défendeur oppose ses dénégations (sans paroles sacramentelles), seule cette contradiction rend possible la poursuite du procès90. L’étape suivante est l’administration de la preuve par serment, témoignage ou duel judiciaire. La preuve une fois faite intervient le jugement, après délibération entre le juge et ses assesseurs, puis la sentence : le prononcé public de l’arrêt. Le moment retenu par l’enlumineur est celui où se trouvent fixés les éléments du procès, où commencent les débats judiciaires. Le roi auteur du règlement est figuré. Pourtant il ne s’agit pas d’un plaid de la porte, qui désigne l’exercice direct par le roi de la justice, au profit des sujets qui viennent le lui demander, ni de la justice retenue que le roi se réserve de rendre lui-même91. Le texte décrit une justice déléguée au prévôt. L’image montre l’autorité qui légitime l’exercice de la justice, car toute justice émane du roi, et qui l’exerce érigeant le déroulement de la procédure en modèle devant le prévôt. Sa présence constitue bien un commentaire de l’œuvre qui en libère les significations latentes92, sans l’assentiment de l’auteur Louis IX qui est décédé, ni celui de son successeur. Elle fait corps avec le texte et participe à ce qui est une création collaborative où la part respective du compilateur, de l’artiste et du scribe se laisse d’autant moins saisir qu’ils sont anonymes. Dans l’image s’instaure une relation triangulaire entre le roi, auteur de la procédure, le prévôt93 en charge de son application et les plaideurs. Debout à l’arrière-plan, il est coiffé d’un bonnet blanc et vêtu d’une robe à capuche rouge. La couleur, qui est celle de la robe du roi, du manteau d’un plaideur et de la tunique du second est peut-être la transcription visuelle de l’appartenance commune au domaine royal. Le roi assis est aussi grand que les plaideurs debout. Le prévôt les dépasse et partage la moitié gauche de l’image avec le roi. Visage de trois-quarts, il regarde les plaideurs. Le roi est assis sur un trône azur, jambe gauche croisée sur la droite dans une position caractéristique du juge (de paix) : il lui est ainsi impossible de s’engager dans une action violente. Il est drapé dans un manteau d’un bleu saturé qui se retrouve dans tout le manuscrit, orné d’un fin liseré blanc, comme la robe et la couronne. Cette dernière n’est pas fleuronnée ou fleurdelisée mais présente reposant sur le cercle trois boules, symbole de la perfection et, comme les lys, symbole trinitaire. Le roi, de profil, accorde la plus grande attention aux plaideurs. Affirmant son autorité, coude gauche bien écarté et main sur la cuisse droite, il pointe l’index vers le premier plaideur et s’adresse à lui pour lui donner la parole. L’enlumineur distingue les deux parties par un jeu d’alternance chromatique esthétique. Le plus près du roi, le demandeur, a une robe bleue et un manteau rouge, le second, le défendeur, une robe rouge et un manteau bleu comme le roi. Les deux sont de trois-quarts face, le premier incline la tête vers le roi, signe de soumission, et index pointé fait sa déposition, il accuse le défendeur, qui est derrière lui et dont la robe est soulignée à l’encolure d’un trait noir épais, péjoratif.

  • 94 - Fol. 50. sans prologue.
  • 95 - D’autres manuscrits indiquent après le prologue : Ci emprès commence De joutise et de droit et de (...)

24Au début du livre II94 Coutume d’Orléans, au fol. 55 la rubrique en rouge indique Ci commence li seconz livres des cas de haute joustise de droit et des commandemenz de droit. Premieremant en la devision de droit95. Suit le texte à côté de l’image (fig. 7) joutise est une volentez estable qui done à chascun son droit selonc droit escrit en ‘Institute, De justicia et jure’, ou commencement où il est especiaument traitié de ceste matière. La référence au droit romain mise en exergue est caractéristique de la tonalité du livre II. L’image illustre le procès en équité, principe fondamental caractéristique du nouveau droit, bien plus que dans le droit anglais, et son application, rendre à chacun son droit.

Fig. 7

Fig. 7

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 55, Le roi juge en équité

© BIU Montpellier / IRHT (CNRS)

  • 96 - La main de justice n’apparaît dans les regalia qu’au début du XIVe siècle (LEBIGRE, 1988, p. 28) (...)
  • 97 - Le vert porte ici l’espérance de la victime ou de sa famille, du justiciable et de la société dan (...)
  • 98 - Il peut aussi juger des causes de basse justice, ELLUL, 2006, p. 171.
  • 99 - GARNIER, 1982, p. 178 et 115.

25Malgré le risque d’insécurité juridique, l’équité pondère, corrige, elle est consubstantielle à l’office de juge. La scène se déroule sous une voûte et sur un fond or qui accroche la lumière. La justice est un devoir pour le roi et l’objet essentiel du serment du sacre96. Il est au centre, assis de face sur un trône vert entouré de deux plaideurs, symétrie parfaite. Il occupe le plus de surface et il est plus grand que le plaideur de droite debout. Il conserve le costume et la couronne précédents. De la main gauche, il tient une épée verte97, la haute justice ou plet de l’épée est la justice de sang jusqu’à la fin du XIIIe siècle. Elle est réservée aux seigneurs hauts justiciers98. Il porte sa main droite à hauteur de la poitrine, index pointé vers le haut. Le geste est caractéristique de l’état et de la fonction du roi, de son pouvoir de justice, en général. Il tourne la tête vers le personnage de profil, mains jointes qui a mis un genou à terre sur sa droite, situation dans l’image qui souligne une supériorité de valeur par rapport au personnage à sa gauche. Ce dernier debout et de la même taille que le suppliant, en robe bleue et manteau rouge comme lui, fait, bras plié, de la main gauche ouverte en sa direction, un geste de récusation où se mêle l’effroi99.

26Au fol. 68 verso (fig. 8) la parole d’une femme est évoquée.

Fig. 8

Fig. 8

Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 68 verso, Le roi, la noble dame et son seigneur

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  • 100 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 407, chap. XXI, mais aussi t. I, p. 74 et suivantes, points de comparaiso (...)
  • 101 - Un texte antérieur à la coutume d’Orléans qui s’en inspire.
  • 102 - Le texte n’évoque pas les différentes situations possibles : le juge seigneurial détenteur de la (...)
  • 103 - Protestacion est le mot en usage dans les cours d’Église et retenue est employé dans les cours la (...)
  • 104 - Suivent les formules qui doivent être prononcées devant le juge.
  • 105 - Elle en est sortie.
  • 106 - CARBASSE, 2000, p. 137.
  • 107 - Les justiciables accusés de meurtre, de trahison, de rapt ne relèvent pas des vavasseurs mais des (...)
  • 108 - La justice séculière accorde la séparation entre époux dans des cas où le droit canonique la refu (...)
  • 109 - Elle est peut-être veuve.
  • 110 - Pour le cas où le seigneur est son époux, il aurait pu utiliser en les dévoyant les dispositions (...)
  • 111 - Une fausse avoerie, c’est-à-dire se placer faussement sous la protection du seigneur (GODEFROY, v (...)
  • 112 - Dans la législation séculière, l’accusation criminelle est interdite à la femme sauf dans certain (...)
  • 113 - Le texte ne permet pas de savoir s’il y a eu procès et jugement avant le coup de force. Le jugeme (...)
  • 114 - Le texte n’évoque pas un cas royal. Les seigneurs justiciers ne peuvent connaître d’affaires qui (...)
  • 115 - ELLUL, 2006, p. 164.
  • 116 - Dans les relations entre les barons et leurs vassaux, les premiers revendiquent une autonomie jud (...)
  • 117 - BONGERT, 1973, p. 51-54.

27L’image s’inscrit dans le chapitre XXI qui traite de la haute justice et explore une voie de recours. L’objectif du texte est d’obtenir la comparution de l’accusé dans les cas de trahison, de meurtre ou de rapt100, ce qui est difficile car il risque une peine de sang. Selon l’Usage d’Orléans101, il doit répondre sans demeure ni jour de conseil et présenter sa défense102. Si la journée assignée passe sans qu’il ne vienne au procès, il est en défaut. Quand il est d’une autre justice, il doit faire une retenue appelée protestation103. Le texte pour indiquer les formules à employer en cette circonstance insère une référence à la Décrétale de Grégoire IX, Livre 3 De hiis quae vi metus ve causa fiunt, premier chapitre Perlatum, mais où il est escrit de la noble dame qui fist protestacion qu’ele istroit de religion, quant ele i entra par la force de son seignor et li valut104. L’ajout est à l’encre rouge et au plus près de l’image. Le cas sert d’exemple, il est en apparence simple. Il ne permet pas de savoir qui a déclenché l’action publique en justice, le recours : la noble dame,105 alors demandeur, ou suite à la diffamatio une poursuite ex officio. En raison de son statut, l’affaire est portée de toute façon devant ses pairs, justice horizontale106 faut-il encore qu’il soit en nombre suffisant107. Rien n’est dit sur le roi. Elle a été enfermée par force108 dans un couvent. Il y a contrainte mais les circonstances n’apparaissent pas : sous la menace, avec des coups, après avoir été enlevée ? L’auteur est son seigneur109. Les raisons de son intervention ne sont pas éclairées110 or elles déterminent sa légitimité à agir, ce que seul le procès au fond peut déterminer d’où l’importance de la formulation de demande de recours et la rigueur des formules employées par la dame se mes sires n’avoit tele jutise en celi leu elle se dit prête à se défendre où droiz memenra, si come je devrai et là où je devrai. Elle doit nommer son seigneur111. Le risque encouru par la dame sur ce point précis de droit, la compétence du juge, est réel. L’instance supérieure, qui n’est pas désignée, saisie, peut décider de la renvoyer vers son premier juge et là, elle peut être accusée de fausse déclaration112. La présence du roi, qui n’est pas mentionnée dans la coutume, par l’image associée au statut nobiliaire de la dame, fait aussi question113. L’affaire peut remonter au roi114, car il a de toute façon la possibilité d’intervenir à tout moment115 s’il a été saisi d’une plainte le premier, condition nécessaire pour ne pas faire concurrence au juge seigneurial, souverain dans son ressort116 ; il semble ici que ce soit le cas. La présence du seigneur est un effet de la prévention. Elle tient au fait que la prévention peut-être à charge de renvoi, c’est-à-dire que l’affaire doit être renvoyée devant le juge seigneurial compétent sous réserve que le renvoi ait été demandé dès le début de l’instance par le seigneur lui-même117. Ici la prévention est absolue, le roi ne se dessaisit pas. Le texte très bref, pour ne pas dire elliptique, est sur le plan juridique complexe.

  • 118 - KRYNEN, 2018, p. 263-273.
  • 119 - JACOB, 1994, p. 142-148, 484.
  • 120 - Id., p. 483
  • 121 - PINOTEAU, 2005, p. 21. À partir de Louis VII le décor du manteau du sacre, avec le soleil, la lun (...)
  • 122 - Il suit en ce sens les préconisations du droit canonique.
  • 123 - La position est celle du fuyard.
  • 124 - Son léger déhanchement est caractéristique de l’enluminure gothique parisienne.
  • 125 - Quelques éléments discrets pourraient dénoter. Sous le touret, une crépine verte est posée sur le (...)

28L’image n’est pas moins riche. Le roi-juge est mis en scène avec solennité et impose aux parties, un règlement présenté comme équitable118. Sur un fond or, il siège sous une voûte comme fig. 7, qui évoque les lieux préservés de l’audience, théâtre de la justice, sans les fastes du château seigneurial à la voûte gothique trilobée de la fig. 4. Ici le lien mystique présent dans tout jugement passe par une autre expression de l’élévation vers le ciel119. Le roi est revêtu d’un manteau rouge120 (bleu dans les précédentes vignettes), qui n’est pas celui du sacre121, il est celui de Dieu, juge de la fin des temps, d’un roi de justice, signe de la fonction supérieure de juger, pouvoir qui ne meurt pas avec lui, se transmet et que les juges royaux assument par représentation. Le trône sculpté semble pourvu de marches, signe de la prééminence du souverain. La couleur verte est associée en bonne part à la jeunesse, à l’espérance : le roi, assis sur un trône vert, juge en équité et prend en compte la parole d’une femme vulnérable122. La main gauche sur son genou droit, il signifie sa décision, index pointé vers la noble dame, tout en regardant le seigneur débouté. Ce dernier, visage tourné vers le roi, sourcils froncés mais corps orienté vers la droite123, redoutant la sanction, quitte les lieux. Le roi, loin de se dessaisir, a tranché sur le fond en faveur de la noble dame qui lui a soumis son cas (main gauche) et accepte le jugement (main droite)124. Coiffée d’un touret125, elle est revêtue d’une robe bleue, drapée dans un manteau rouge, pour des raisons d’alternance chromatique et aussi comme le roi, ce qui pourrait suggérer qu’elle est placée sous sa sauvegarde, comme le pied du souverain touchant son manteau.

Conclusion

29Les petites images du manuscrit H 395 accompagnent un moment important dans l’histoire du droit, une des premières étapes dans sa simplification, son harmonisation et la volonté de lui donner une plus large diffusion sous un format accessible, dans une perspective idéologique et politique. Elles sont contemporaines, dans le domaine royal, de la promotion de l’enquête en remplacement de la procédure accusatoire. Elles illustrent la volonté de Louis IX d’instaurer la paix, de lutter contre les guerres privées et les violences, en faisant interdire la bataille. Une des images des Établissements de saint Louis, représente pourtant un duel judiciaire atténué dans la forme, donnant la mesure des résistances à surmonter. Le programme iconographique revient sur les points clés de la réforme. Pour le roi, la paix n’est possible que si la justice est efficace. Elle est attendue d’une rigueur dont la pendaison, qui concerne surtout les roturiers, est le symbole. Le corps du supplicié et sa dissolution progressive, épouvantable se veulent exemplaires. Dans la réalité la plupart des conflits, le plus souvent mineurs, se règlent par des transactions privées. Par le biais des successions, le roi s’immisce dans le droit familial en concurrence avec l’Église. Quant au droit féodal, loin de le mettre en cause, il le renforce en affermissant la hiérarchie de ceux qui s’engagent. Suzerain, il joue de la solidité des liens féodaux et réussit à imposer sa haute justice. Surtout trois images sur huit mettent en scène le roi, source de justice. Au premier folio du manuscrit, la vignette s’attache à la procédure, utilisée de manière significative en première instance pour faire triompher le modèle dans le domaine royal et au-delà dans tout le royaume. Le prévôt est à côté du roi juge qui siège, en face le demandeur, le plaignant, puis le défenseur, l’accusé. La seconde image au début de la coutume d’Orléans, est centrale dans le manuscrit. Le roi, assis entre les plaideurs, juge en équité dans un cas concret. Il tient l’épée symbole de son pouvoir de justice et de son lien avec ses vassaux. La dernière vignette est remarquable. Le roi à l’image du Dieu de justice dont il a revêtu le manteau, juge en faveur d’une femme, noble par son statut et son courage contre son seigneur. Les petites images du manuscrit H 395 de l’École de médecine élégantes, colorées portent avec force une ambition politique qui ne manque pas de grandeur : une justice organisée avec une procédure efficace, exercée en stricte équité et un roi qui s’accomplit dans la défense des plus vulnérables, mission divine. Après avoir contribué à la diffusion du texte, qu’elles côtoient et qui a rendu en l’état du droit bien des services, elles l’ont préservé au fil des siècles tout autant que son attribution erronée à saint Louis. Fascinant après le Président Jean Bouhier, les lecteurs, elles font du manuscrit un des Trésors de la Bibliothèque universitaire historique de médecine, en toute simplicité, en quelque sorte avec discrétion.

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Notes

1 - RONSIN, 1971, p. 20-21, 97, 228.

2 - La reliure est de toile noire, restaurée en 1976. L’état de conservation rend difficile entre autres une étude des cahiers. Toute ma reconnaissance est acquise aux conservatrices de la Bibliothèque universitaire historique de médecine (BUHM) qui m’ont permis sa consultation, pour cette première approche.

3 - Le droit civil est considéré comme un droit général. Il y a unité du droit, GIORDANENGO, 2000, n° 7, p. 52.

4 - L’auteur de la compilation serait un jurisconsulte orléanais. La maîtrise du droit et de la jurisprudence lui permettait de prodiguer des conseils en ses matières. Le terme désignait les professeurs, les auteurs, les praticiens du droit, puis les penseurs à l’origine de la doctrine du droit. Juriste a une acception plus générale, VIOLLET, t. I., 1881, p. 2 ; sur leur rôle à l’époque moderne : KRYNEN, 2018, p. 87.

5 - Les initiales sont filigranées.

6 - Le manuscrit H 395 présente une lacune au livre I, le chapitre 74. Et au bas du verso fol. 16 le copiste a noté : je sui ames : je fui par amour dounés, le manuscrit est-il un cadeau apprécié (je suis ames) ? Donné au jurisconsulte ?

7 - Considéré comme saint de son vivant les premières démarches en vue de sa canonisation sont entamées à partir du 4 mars 1272, elles aboutissent le 11 août 1297 au terme d’un long procès par son annonce dans la bulle Gloria laus.

8 - MONTESQUIEU, 1748 (1ère éd.), I, 28, chap. 39.

9 - La définition de coutume est ambiguë jusqu’au XIIIe siècle, elle est synonyme d’une règle de droit particulière à un ressort territorial limité, étrangère aux compilations romaines et de droit canonique : ALLORANT et TANCHOUX, 2018-2019, p. 110 ; GILISSEN, 1982, fasc. 4 ; MAYALI, p. 441-444 ; GRINBERG, 2006, 206 p. Les praticiens du droit prennent l’initiative de fixer le droit coutumier en transcrivant la pratique qu’ils constatent dans des registres privés, les recueils appelés coutumiers, ALLORANT et TANCHOUX, p. 111. Ils se multiplient dans la deuxième moitié du XIIIe siècle, PERALBA, 2000, p. 130.

10 - Les dénominations adoptées par les historiens du droit pour décrire le manuscrit reflètent ce passage, il est qualifié le plus souvent de coutumier, parfois de style – coutumier, en raison de la place de la procédure. Les styles étant des traités de procédure rattachés à une juridiction souveraine, PERALBA, 2000, p. 140.

11 - GIORDANENGO, 2000, p. 45-66.

12 - Il n’a pas de table, de prologue. Seuls quelques chapitres sont numérotés au début de l’ouvrage, VIOLLET, 1881, t. 1, p. 399-400.

13 - La première est pour les historiens du droit plutôt un règlement : elle concerne le prévôt de Paris et d’Orléans. Comme la seconde contre les duels judiciaires, elle n’est pas présentée avec une date. Livre I, chapitre I à 9.

14 - Livre I, chap.10 à 175 et Livre II chap. 1 à 38, à partir du folio 55 dans le manuscrit H 395 sans prologue.

15 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 1. Le règlement est aussi un mandement destiné aux sénéchaux et aux baillis.

16 - Il en édite le prologue, Du CANGE, 1668, p. 643 et suivantes.

17 - Le site de la Bibliothèque virtuelle des manuscrits médiévaux permet de se faire une idée de la taille d’une vignette par rapport à la page : ex. Montpellier BUHM, H 395, f. 0001- vue 1.

18 - À l’époque moderne, trois peintures en pleine page ont été rajoutées : une avec les armes du Président du Parlement de Dijon Jean IV Bouhier (1673-1746) et la référence MSE77 du catalogue 3 de sa bibliothèque en 1721. La seconde représente Louis IX. Il se détache sur un paysage verdoyant avec un village et son clocher, le saint roi nimbé est en pied, en grand manteau héraldique aux armes, un sceptre dans la main gauche, tenant sur sa droite le haut d’un cartouche avec le titre L’establissement le Roy de France a lusage de cort et de baronnie. La troisième sur un fond de paysage paisible, montre un ange qui vient poser sur la terre bien brune un écu France moderne surmonté d’une couronne de lys, qu’il tient par une guige rouge.

19 - Pour le contexte : JACOB, 1994.

20 - Elle se présente sous forme d’une référence à une Décrétale et d’une étude de cas, à l’encre rouge, indice d’une attention particulière.

21 - Deux ont déjà été recensées. Elles ont pour point commun de concerner le roi : fol. 1 et 55.

22 - Celle du fol. 5 manque aussi dans l’exemplaire appelé B par VIOLLET, 1881 t. I, p. 397-398, le Paris, BnF, fr. 5278.

23 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 1, n. 3.

24 - Ibid. p. 159, n. 35.

25 - Ibid., p. 330, n. 26 pour le ms. B.

26 - Chapitre XIX livre II, Ibid. p. 400, note 22.

27 - Ibid. p. 343, n. 26.

28 - Ibid. p. 409, n. 3.

29 - AVRIL, 1995, p. 15 et 20, mais aussi BRANNER, 1977.

30 - Ces caractéristiques se retrouvent dans d’autres livres de droit et pour nombre d’ouvrages contemporains. Le faible nombre relatif d’images est en lien avec sa nature et sa fonction (JACOB, 1994, p. 165) sans exclure le rôle du coût, ce que l’acheteur est prêt à consacrer au livre.

31 - JACOB, 2002, p. 207-234.

32 - Dans l’œuvre législative de Louis IX, nombreux sont les textes qui visent à supprimer la violence et la guerre : Le siècle de saint Louis, 1970, p. 77. Malgré la lutte entreprise contre le règlement privé des litiges, transactions appelées paix privées, et le rachat de la peine auprès du juge, composition en justice, les règlements privés survivent.

33 - Le siècle de saint Louis, Paris Hachette, 1970, p. 218.

34 - Avec la diffusion de la procédure inquisitoire, qui prend le pas sur la procédure accusatoire, les anciens modes de preuve reculent. L’ordalie unilatérale lors de l’instruction préparatoire, épreuves du fer rouge et de l’eau bouillante, tombe en désuétude comme le serment purgatoire devant les juridictions laïques. Voir BONGERT, 1949, p. 210 ; BARTHÉLEMY, 2002, p. 1020-1022. 

35 - Il en est la garantie, BONGERT, 1949, p. 205 et 239. Il intervient faute de preuves, VIOLLET, 1886, t. 4, p. 58.

36 - Ici chap. 11, la question sur le défaut.

37 - Contrat c’est-à-dire avec remise de la chose sur laquelle porte l’opération. Ici il n’y a pas mention de forme rituelle, des convenientiae, déclaration à haute voix de la volonté sans formes déterminées, un engagement réciproque à caractère consensuel. THIREAU, 2002, p. 340-341 et OURLIAC, 1979, p. 243-252.

38 - VIOLLET, 1881, t. 2, chap. XCV, p. 154 à 160. Du CANGE, 1668, chap. 89, p. 683.

39 - Dieu aide le juste dans l’épreuve à faire prévaloir sa cause, abat ses ennemis et leur pardonne comme dans l’Ancien Testament.

40 - D’après la note, mais ce sont deux sergents d’après le texte.

41 - À la fois le champ clos où intervient le combat et l’enjeu tel qu’il est décrit à la fin du texte. La disparition des écoinçons pour le cadre et le fond assombri dénotent une réprobation à l’endroit de la scène représentée.

42 - Azon (1190-avant 1233), jurisconsulte bolonais formé à l’École de Bologne, enseigne à Montpellier puis Bologne. Il est l’auteur d’une glose sur le Digeste et le Code. Accurse (1182-1260), élève du précédent, professeur de droit à Florence, compose la Grande glose, compilation des meilleurs commentaires de ses prédécesseurs, qui connaît un grand succès.

43 - On assiste à la formation d’un régime de responsabilité contractuelle pour retard dans l’exécution et d’un régime de remèdes à l’inexécution : voir DAILLANT, 2017 p. 63 et suivantes.

44 - THIREAU, 2002, p. 340-341.

45 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 327.

46 - Dans la seconde moitié du XIIIe siècle, dans le contexte de la rénovation judiciaire entreprise par saint Louis, la justice royale entreprend la lutte contre le règlement privé des litiges et le rachat des peines : CARBASSE, 2014, p. 121, 194.

47 - Recreance ne siet mie en chose jugiée, ne en murtre, ne en traïson, ne en rat [rapt], ne encis [crime qui consiste à frapper une femme enceinte au point d’entraîner sa mort ou celle de son enfant ou des deux], ne en agait de chemin, ne en roberie, ne en larrecin, ne en omicide, ne en trive enfrainte, ne en arson, selonc l’usage de la cort laie, VIOLLET, 1881, t. 2, p. 343-344 et Du CANGE, chap. VII, p. 706.

48 - Peines de sang, VIOLLET, 1886, t. 4, p. 220.

49 - MOREL, 2007. Pour la période suivante, VOYER, 2015. Mais aussi VIVAS et CHARAGEAT, 2016.

50 - Le prévenu d’un crime qui s’évade est considéré comme coupable et pendu, si la justice parvient à le reprendre (Livre I, chap. 35 et 88, VIOLLET, 1881, t. 1, p. 251).

51 - CARBASSE, 2014, p. 299, 301. Des femmes sont pendues. La peine n’était pas appliquée pour le premier vol, pour un vol peu important ou lorsque le voleur était mineur, ou bénéficiait de circonstances atténuantes, en raison de la restitution des objets volés, de la pauvreté de l’accusé, de l’attitude bienveillante de la victime.

52 - Dans une bibliographie abondante, Miscellanea Juslittera. Volume 7, 2019.

53 - Une maladresse : une partie de l’arrière de la tête inclinée, position naturelle, touche la traverse, contre laquelle elle paraît coincée en l’absence de nœud coulissant autour du cou.

54 - Témoignage de la diffusion précoce du linge de corps. Le sous-vêtement masculin de type caleçon apparaît aux XIVe et XVe siècle, sous la dénomination de draps linges, draps a homme, draps linges a homme, draps vestours, PIPONNIER, 1986, p. 242.

55 - Le pied gauche, agrandi, relâché, est signe de la mort. Le corps et le sous-vêtement du cadavre sont ombrés de gris pour souligner les volumes et peut-être la décomposition déjà à l’œuvre. Le contraste fort entre les couleurs vives et le corps sans couleur, accentué par l’arrière-plan assombri, décrit la manière dont le crime est contenu : le pendu est retranché du commun des hommes et du monde profane, vision d’épouvante.

56 - Le cas échéant il est privé de ses biens par la confiscation.

57 - Le vert rappelle son origine et indirectement le lynchage possible par vengeance, qui menace l’ordre judiciaire et aggrave le trouble public.

58 - Une jeune fille peut venir demander la grâce du condamné pour l’épouser, GAUVARD, 2005, p. 66-78.

59 - ELLUL, 2006, p. 156-157.

60 - Les règles successorales visent à assurer la continuité des services dus par le fief, MARTIN, 1981, p. 40-49.

61 - Au XIIIe siècle, sous l’influence du droit romain on admet le partage du fief,

62 - VIOLLET, 1881, t. 2, Livre I, chap. X, p. 19.

63 - Suit une réserve Més se il avoit faict achas qui fussent de son fié et il les donnast à un étrange [un autre enfant], li ainés, les auroit pour les deniers payant que li peres y auroit mis.

64 - Si le père laisse plusieurs fiefs, chacun de ses fils en a un et si dans le patrimoine se trouvent d’autres biens, ils sont partagés entre tous.

65 - Du CANGE, 1668, chap. 8, p. 661 et VIOLLET, 1881, t. 2, Livre I, p. 19.

66 - Le système est interdit par le roi en 1209.

67 - Un manoir roturier aux champs. La coutume de Normandie, art. 337, cité par GODEFROY vol. 4, 1969, p 454, permet de mieux comprendre la situation.

68 - Chap. IX, VIOLLET, 1881, t. 2, p. 18-19 et chap. VII Du CANGE, 1668, p. 660.

69 - GARNIER, 1982, p. 174-177.

70 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 398 Livre II, Chap. XIX et Du CANGE, 1668, chap. 18, p. 713.

71 - Dès le milieu du XIIIe siècle, presque tous les hommages sont liges. Le vassal prête souvent plusieurs hommages liges concurrents.

72 - La brièveté du texte se retrouve pour d’autres style-coutumier, sans doute en raison de l’existence des Livres des fiefs, des Constitutions ou coutumes des fiefs incluses dans le Corpus juris Civilis.

73 - DAILLANT, 2017, p. 198.

74 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 396.

75 - DAILLANT, 2017, p. 198-199 les énumère à propos d’un exemple de refus dans SAINT-MARTIN, 1786, p. 316-318. Le délai écoulé, commence une procédure de saisie-exécution, souvent interrompue par des violences.

76 - Il crée des obligations réciproques et interdépendantes entre les deux parties.

77 - Deux mots sont rayés en rouge en cel lois.

78 - Ne sont évoqués ni le fief d’attribution, ni le fief de reprise.

79 - Au XIIIe siècle, le vassal peut aliéner le fief à trois conditions, dont seule la première est décrite par le texte. Les deux autres sont : le versement d’une taxe de mutation et la possibilité pour le seigneur de procéder à un retrait féodal, c’est-à-dire de se substituer à l’acheteur, à qui il rembourse le prix. Il récupère alors les droits sur le fief.

80 - Le baiser ne se pratique pas avec des non-nobles.

81 - À l’origine, il devait être tête nue.

82 - L’usage ne semble être mis par écrit que plus tard dans le Livre des droiz et commandemens d’office de justice (1424-1455).

83 - Entre le seigneur et son dépendant, le contrat est sygnalamatique.

84 - Elle donne lieu à de nouvelles difficultés avec l’aveu, la montrée et le dénombrement. Le fief est la cause juridique de l’engagement vassalique.

85 - Titre repris de JACOB, 2020, l’ouvrage concerne la période précédente. Sur le roi-juge : JACOB, 2014, p. 186-198, 217-237.

86 - Sur la conception médiévale du témoin, le témoignage dans la procédure médiévale et la pratique de la preuve testimoniale : Mausen, 2006, p. 17-33.

87 - Le prévôt, de petite naissance et pas très considéré, représente le roi dans une fraction de son domaine. Au XIVe siècle (seulement) il dispose d’un pouvoir étendu pour représenter la juridiction royale au civil comme au criminel.

88 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 2-5. Héritage désigne : un immeuble, la possession perpétuelle opposée à la viagère, une succession héréditaire, GODEFROY, vol. 4, 1669, p. 463.

89 - Dans d’autres exemplaires cil dou roiaume, VIOLLET, 1881, t. 2, p. 1.

90 - Le demandeur peut répliquer et le défendeur dupliquer, tripliquer, quadrupliquer, BONGERT, 1949, p. 193.

91 - CARBASSE, 2014, p. 164.

92 - TRUNG, 2021, p. 7-22.

93 - La figuration du prévôt dans les deux premières images se ressent de son statut.

94 - Fol. 50. sans prologue.

95 - D’autres manuscrits indiquent après le prologue : Ci emprès commence De joutise et de droit et de commandemens de droit, et de l’office de chevalerie et de prendre malfeitor en present fait et de l’usage dou Chatelet d’Orliens en cort de baronnie et de punir malfeitors. Por ce veuil de joutise presentement parler : est une volentez estable qui done à chascun son droit. Et li comandement de droit si sunt tel : honestement vivre, nule persone ne doit despire, si doit doner à chascun son droit, selonc droit escrit en Institute, De justitia et jure, ou commencement où il est especiaument traitéi de ceste matière (VIOLLET, 1881, t. 2, p. 330-331 ; voir KRYNEN, 2018, p. 263-268.

96 - La main de justice n’apparaît dans les regalia qu’au début du XIVe siècle (LEBIGRE, 1988, p. 28) au moment où les juristes répètent à l’envi que toute justice émane du roi.

97 - Le vert porte ici l’espérance de la victime ou de sa famille, du justiciable et de la société dans la bonne justice. Le roi doit faire régner la justice et la paix. Il se sert de son armée pour faire reconnaître sa justice et de ses pouvoirs de juge pour étendre les frontières du royaume, BONGERT, 1973, p. 135.

98 - Il peut aussi juger des causes de basse justice, ELLUL, 2006, p. 171.

99 - GARNIER, 1982, p. 178 et 115.

100 - VIOLLET, 1881, t. 2, p. 407, chap. XXI, mais aussi t. I, p. 74 et suivantes, points de comparaison t. 1, chap. 171 et t. II, chap. 33 Du CANGE, 1668, p. 714, chap. XX.

101 - Un texte antérieur à la coutume d’Orléans qui s’en inspire.

102 - Le texte n’évoque pas les différentes situations possibles : le juge seigneurial détenteur de la haute justice peut se saisir du cas, la victime ou ceux qui peuvent agir en son nom peuvent déposer plainte. Le juge qui néglige d’y donner suite, considéré comme négligent, peut se voir dessaisi par un seigneur placé plus haut dans la hiérarchie, un bailli.

103 - Protestacion est le mot en usage dans les cours d’Église et retenue est employé dans les cours laïques. La retenue est une formule assez vague - volontairement - par laquelle un plaideur se réserve la faculté de changer ses moyens d’attaque ou de défense ou mêle ses conclusions. L’exemple donné en appui n’est donc pas tout à fait bien choisi, VIOLLET, 1881, t. 1, p. 259 et 260.

104 - Suivent les formules qui doivent être prononcées devant le juge.

105 - Elle en est sortie.

106 - CARBASSE, 2000, p. 137.

107 - Les justiciables accusés de meurtre, de trahison, de rapt ne relèvent pas des vavasseurs mais des barons. VIOLLET, 1881, t. 2, p. 409 n. 3.

108 - La justice séculière accorde la séparation entre époux dans des cas où le droit canonique la refuse, comme les excès et les sévices, d’où peut-être la démarche de la noble dame. En droit canonique une fois engagée dans l’état religieux par une profession publique (ce qui n’est pas le cas ici) la femme n’est plus libre d’y renoncer, METZ, 1985, p. 89.

109 - Elle est peut-être veuve.

110 - Pour le cas où le seigneur est son époux, il aurait pu utiliser en les dévoyant les dispositions du droit canonique. La séparation volontaire est tenue pour un péché, sauf cas d’entrée en religion d’un des deux époux, Extra 3, 32, 15.

111 - Une fausse avoerie, c’est-à-dire se placer faussement sous la protection du seigneur (GODEFROY, vol. 1, p. 535) peut lui porter préjudice ou si son seigneur n’a pas telle justice en sa terre.

112 - Dans la législation séculière, l’accusation criminelle est interdite à la femme sauf dans certains cas prévus par la loi, quand elle ne tend pas à obtenir la répression du coupable mais une compensation, METZ, 1985, p. 105-107.

113 - Le texte ne permet pas de savoir s’il y a eu procès et jugement avant le coup de force. Le jugement formulé, deux cas d’appel sont possibles : l’appel pour faux jugement, ce qui n’est pas mis en avant, ou l’appel pour défaut de droit, appel au suzerain de ce que le seigneur a refusé de juger le procès.

114 - Le texte n’évoque pas un cas royal. Les seigneurs justiciers ne peuvent connaître d’affaires qui touchent au roi. Ici la prévention pourrait s’appliquer si l’affaire était considérée comme une infraction à la sauvegarde royale ou un bris d’asseurement, une désobéissance, ce n’est pas le cas.

115 - ELLUL, 2006, p. 164.

116 - Dans les relations entre les barons et leurs vassaux, les premiers revendiquent une autonomie judiciaire, sans intervention du roi, revendication battue en brèche par Louis IX.

117 - BONGERT, 1973, p. 51-54.

118 - KRYNEN, 2018, p. 263-273.

119 - JACOB, 1994, p. 142-148, 484.

120 - Id., p. 483

121 - PINOTEAU, 2005, p. 21. À partir de Louis VII le décor du manteau du sacre, avec le soleil, la lune et les étoiles, change pour un semé de fleurs de lis.

122 - Il suit en ce sens les préconisations du droit canonique.

123 - La position est celle du fuyard.

124 - Son léger déhanchement est caractéristique de l’enluminure gothique parisienne.

125 - Quelques éléments discrets pourraient dénoter. Sous le touret, une crépine verte est posée sur les cheveux de la dame, le réticulé est péjoratif. Prise en mauvaise part, la couleur verte stigmatise entre autres la femme adultère (avoutrie substantif féminin, GODEFROY, vol. 1 p. 540). Les pieds du roi semblent croisés, là où les personnages sages et vertueux ont les pieds posés presque parallèles les talons un peu rapprochés et les pointes des pieds un peu écartées. Cela tient à sa position de trois-quarts face. Le seigneur impliqué est certes au centre mais relégué au second plan plus grand que la dame, à peine plus grand que le roi assis. Le texte ne dit pas que la noble dame est adultère, délit au milieu du XIIIe siècle, que les tribunaux sanctionnent par des amendes inférieures au taux coutumier de 60 s. Voir CARBASSE p. 359-362 et VERDON, Rives nord-méditerranéennes, 31, 2008, p. 57-72.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 30, Duel judiciaire entre deux champions
Crédits © BIU Montpellier / IRHT (CNRS)
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Titre Fig. 2
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 57, Pendu
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Titre Fig. 3
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 5, Partage successoral
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Titre Fig. 4
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 66, verso A, Demande d’hommage au seigneur
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Titre Fig. 5
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 66, verso B, Baiser de paix
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Titre Fig. 6
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 1, Le roi, le prévôt et les plaideurs
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Titre Fig. 7
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 55, Le roi juge en équité
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Titre Fig. 8
Légende Montpellier (Hérault), Université de Montpellier, Bibliothèque universitaire historique de médecine, Établissements de Saint Louis, Paris, 1273, ms H 395 fol. 68 verso, Le roi, la noble dame et son seigneur
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Pour citer cet article

Référence électronique

Christiane Raynaud, « Les enluminures des Établissements de saint Louis de la bibliothèque de l’École de médecine de Montpellier : discours visuel et rénovation juridique »Patrimoines du Sud [En ligne], 15 | 2022, mis en ligne le 01 mars 2022, consulté le 21 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/8284 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/pds.8284

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Auteur

Christiane Raynaud

Professeur émérite, membre associée UMR TELEMME, Aix-Marseille Université

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