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Un domaine d’Henri Ier de Montmorency au temps d’Olivier de Serres : la Grange des Prés, à Pézenas

The estate of Henri 1st de Montmorency, at the time of Olivier de Serres: La Grange des Prés, Pézenas
Alix Audurier Cros

Résumés

Devenu gouverneur du Languedoc, de Provence, du Dauphiné et de Guyenne en 1567, Henri Ier duc de Montmorency, seigneur de Damville, amiral et connétable de France (1524-1614), administra et contrôla durant 51 ans, de 1563 à 1614, les affaires du Languedoc dans ses limites de l’époque, au nom des rois de France qui se succédèrent. Comme son père Anne de Montmorency, il eut à faire face aux premières guerres de Religion qui opposèrent de manière souvent très violente catholiques et protestants. Il mena avec de grandes difficultés sa charge à partir de Pézenas, capitale des États du Languedoc. Imprégné des nouvelles idées et adhérant au protestantisme familial par conviction, il s’intéressa à l’architecture, à l’agronomie et à l’hydraulique. Il s’attacha à mettre en pratique les conseils d’Olivier de Serres, dans l’aménagement d’un grand domaine, situé sur les bords de l’Hérault, la Grange des Prés. Il acheta celui-ci en 1587 et y fit construire une nouvelle résidence prestigieuse. D’une surface de près de 150 ha, ce domaine comportait un « enclos » de 10 ha qu’il renforça par une enceinte afin de protéger un château à tourelles et d’importants communs desservis par trois grandes cours. Il fit aménager également des jardins d’agrément ornés de grottes et de fontaines, un vivier et un système hydraulique remarquables. Les travaux commencés en 1587 furent poursuivis jusqu’en 1611, soit quatre ans avant son décès. Contemporain d’Olivier de Serres (1539-1619), le duc de Montmorency s’inspira de son Traité d’agriculture et mesnage des Champs (1600) pour l’aménagement de ses terres. Il fut enfin, un admirateur du médecin et botaniste Pierre Richer de Belleval créateur, en 1593, du premier jardin botanique de France, le Jardin des Plantes de Montpellier. Monument historique depuis 2015, le domaine de la Grange des Prés demeure un des fleurons du patrimoine d’Occitanie et de l’héritage spirituel d’Olivier de Serres (1532-1619) dont on célèbre en 2019, le quatrième centenaire de sa mort.

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Texte intégral

Introduction et problématique

  • 1 - Le terme d’agronomie n’apparaît que plus tard au XVIIIe siècle.
  • 2 - Ce travail a été entrepris dans le cadre du cycle de conférences du Domaine du Pradel, organisé p (...)

1Dans le contexte de l’évolution des idées de la Renaissance, au XVIe siècle, quelques belles demeures et domaines agricoles témoignent, en Languedoc, d’une compréhension certaine des progrès scientifiques et techniques observés en agronomie1, dans cette partie du royaume de France. Nous avons essayé de les revisiter dans cet esprit2. Un exemple a été retenu plus particulièrement : la Grange des Prés, à Pézenas, créé par Henri Ier de Montmorency (1524-1614). Cependant des domaines tels que Saint-Privat, dans le Gard, Le Bocaud, Lavérune ou Marsillargues, dans l’Hérault ne peuvent être écartés de cette approche. Ils furent également influencés par les idées nouvelles d’aménagement d’initiateurs protestants.

2Le Théâtre d’Agriculture et Mesnage des champs, publié en 1600, tel que défini par Olivier de Serres, dans son célèbre ouvrage, expose près de cinquante ans d’expériences agricoles personnelles, réalisées sur le terrain dans son domaine du Pradel (1548-1600) (fig. 1).

Fig. 1

Fig. 1

Mirabel (Ardèche), buste d’Olivier de Serres

© A. Audurier Cros

3Les terres arables ont été rassemblées peu à peu par le jeune pasteur protestant, à partir de 1548, sur la commune de Mirabel, près de Villeneuve-de-Berg, paroisse où il est né. Les relations entre Henri Ier de Montmorency et le jeune agronome nous ont paru intéressantes à analyser, car elles sont peu connues.

4Les expériences d’Olivier de Serres (1539-1519) sont accompagnées d’un travail critique associé, on le sait par ses écrits, à un état des connaissances du moment, une recherche dans les traités agricoles les plus anciens et l’observation in situ. Elles sont l’objet d’admiration bien avant la publication du Théâtre. Les traces et les témoignages des échanges de ceux qui ont visité le Pradel, sont cependant assez nombreux pour s’interroger. Ils révèlent des influences issues de contacts directs, puis plus tard de la lecture de son traité. Elles sont essentiellement sensibles par leurs impacts sur les aménagements et les équipements des domaines, que nous avons pu étudier. Quels en furent les principaux relais ? Les sources qui nous intéressent sont rares. Les archives d’Olivier de Serres, sont détruites, en 1628, et sa bibliothèque dispersée par les troupes royales, sur ordre du duc de Ventadour. Le Pradel est dévasté et Daniel de Serres, qui a hérité du domaine de son père, ne peut s’y opposer.

5Durant une période-clé (1530-1630) où alternent troubles religieux, massacres et pillages, d’une part, et courtes périodes de paix, d’autre part, peut-on établir quelques médiations ou transferts de connaissances qui furent significatifs à cette époque ? Familles du Languedoc et personnalités érudites se retrouvent-elles dans l’humanisme visionnaire, prôné par les recommandations de ce pasteur agronome au Pradel ? Peut-on saisir les relations entre celui-ci, Henri Ier et quelques propriétaires du sud du Languedoc ?

6La personnalité d’Henry Ier, duc de Montmorency et gouverneur du Languedoc et du Vivarais, semble d’une certaine manière entrer dans cette problématique du lien possible. Le rôle politique qu’il joua lui-même, placé au cœur du pouvoir, au sein des luttes fratricides entre catholiques et protestants, est complexe mais d’une grande importance. Il régna sur une région profondément divisée, durant les 51 ans de sa gouvernance (1563-1614). La Grange des Prés acquise à la fin du XVIsiècle à Pézenas, capitale des États, devient sa résidence méridionale dans le royaume de France. Dans quelle mesure le domaine qu’il aménage alors est-il un témoignage des idées nouvelles et des principes d’Olivier de Serres ?

  • 3 - Jean de Serres (1540-1598), pasteur calviniste et historiographe du roi Henri IV. Formé à Lausann (...)

7Les relations qu’Henri Ier établit durant son gouvernorat avec quelques personnalités, parmi les plus remarquables de son temps, Olivier de Serres, son frère Jean de Serres3, Pierre Richer de Belleval, toutes soucieuses de paix et de concorde, ont certainement imprégné ses idées. Il est chargé de faire régner l’ordre mais aussi d’apaiser les querelles. On sait qu’il contribue à soutenir Henri de Navarre, devenu roi de France, en 1594, sous le nom d’Henri IV, notamment dans la préparation de l’Édit de Nantes, signé le 30 avril 1598. Cet édit de tolérance met fin à une première et longue période de persécutions religieuses contre les protestants et leur accorde la liberté de culte et des droits civils.

8Il soutient le roi dans sa politique de retour au calme et de redressement économique du royaume, après cet acte majeur. L’objectif principal est d’inciter les hobereaux de province à déposer les armes et à retourner sur leurs terres, afin de promouvoir un nouveau développement agricole et lutter contre les famines. Il s’agit de revenir au château, de reprendre les exploitations négligées ou abandonnées lors des conflits.

9Les principes d’Olivier de Serres forment ainsi un cadre essentiel à ce retour à la terre :

  • amender les sols, diversifier les cultures et les assolements, irriguer ou drainer en adaptant les plantes au milieu ; adopter de nouvelles semences et racines ;

  • créer ou moderniser des installations hydrauliques utiles afin de développer les industries (moulins, mégisseries, tanneries, papeteries, le long des rivières) ;

  • développer les manufactures en s’appuyant sur la culture du mûrier et l’élevage des vers à soie ;

  • drainer les marais et assainir les sols pour ainsi augmenter les surfaces de terres arables.

10Ces transformations se déroulent progressivement avec le concours notamment d’ingénieurs des Pays-Bas et des Flandres dans de nombreuses provinces et particulièrement en Languedoc et en Guyenne qui se trouvent être sous la compétence du duc de Montmorency à cette époque.

11Le Traité d’agriculture…, qui est divisé en Livres (ou chapitres), apparaît très clair en ce sens. Il est largement diffusé aux élites, sur l’ordre du roi dans tout le royaume, après sa parution. Des pasteurs ou des coreligionnaires, voire des personnages importants, tel Théodore de Bèze ou son frère Jean de Serres, diffusent ses idées et connaissent ses expériences. Certains sont venus le rencontrer sur ses terres vivaroises, au cours du dernier tiers du XVIsiècle pour s’imprégner de ses expériences agricoles, notamment le mathématicien Jacques Besson dont nous reparlerons plus loin. Elles restent cependant encore limitées à un cercle restreint.

12Olivier de Serres était également un admirateur de Pierre Richer de Belleval et nous avons essayé de montrer dans un tableau de synthèse les chronologies et correspondances qui nous semblaient utiles pour comprendre les positions respectives des personnalités de cette époque passionnante.

13On constate que les périodes significatives sont précisément celles de la publication des ouvrages majeurs que furent notamment :

14On ne peut omettre enfin la parution de l’Édit royal autorisant la création du Jardin des Plantes de Montpellier en 1593, signé par Henri IV, roi de France depuis 1589 et soutien essentiel du projet.

15La diffusion des idées permises par les progrès de l’imprimerie constitue un fait socio-culturel majeur durant cette période troublée. Elle s’effectue surtout au profit des élites intellectuelles, des érudits et des grands du royaume. Elle contribue également à enrichir les connaissances en architecture, hydraulique et agriculture au sein d’une nouvelle bourgeoisie associant la double villégiature à la ruralité. Celle-ci avait du mal à accéder à la noblesse comme l’a montré Arlette Jouanna dans ses ouvrages sur le XVIsiècle.

I. Les personnalités en présence

1.1. Les gouverneurs du Languedoc : la dynastie des Montmorency

16Il semble difficile de ne pas évoquer, dès le début de cet article, le rôle majeur de la dynastie des Montmorency dans la gouvernance de cette province et l’impact de son implication dans la diffusion des idées de la Réforme au XVIe siècle et début du XVIIe siècle auprès des notables du Languedoc. Ainsi leur domaine privé piscénois peut-il être apprécié aussi comme un pôle de rayonnement et de manifeste des idées nouvelles.

Anne de Montmorency (1493-1567)

  • 4 - Il est le filleul de la reine Anne de Bretagne et en cela membre de la Cour de France.
  • 5 - Il est situé dans l’actuel département de l’Aisne (Hauts-de-France).
  • 6 - La France à l’époque des guerres de religion. Carte. Atlas historique. Éd. Stock.

17L’histoire de la présence des Montmorency en Languedoc est liée à la position exceptionnelle d’Anne de Montmorency auprès de François Ier avec lequel il a été élevé au château d’Amboise4. Devenue très puissante grâce à son père Guillaume, général des finances du roi Charles VIII, la maison des Montmorency est à cette époque une des premières du royaume par son prestige et sa richesse. Anne de Montmorency, connétable et pair de France, est nommé gouverneur du Languedoc par le roi après le traité de Madrid (1526) qui met fin à la guerre entre François Ier et Charles Quint. Pour le remercier, le roi le comble, notamment en lui attribuant le château de la Fère-en-Tardenois5 et une charge stratégique entre Espagne et Italie, celle des États du Languedoc. Pézenas devient alors la ville où les États se réunissent en session pour administrer l’immense province et son rayonnement va grandissant. Le choix de la ville de Pézenas n’est pas anodin. Elle est la première ville à se mobiliser pour réunir une contribution à la rançon et ainsi participer à la libération de François Ier, prisonnier à Pavie en compagnie de son vassal. Elle en est récompensée par l’acquisition d’une position importante dans la stratégie du roi en Languedoc. Très puissant et protégé à la Cour, Anne de Montmorency jouit de plusieurs centaines de fiefs. Il est élevé en 1536, au rang de Connétable et chef suprême des armées. Son pouvoir s’étend sur l’ensemble du Midi, de l’Atlantique aux limites orientales de la Provence6. C’est ainsi qu’il occupe le château médiéval dominant la ville de Pézenas, siège de la résidence attribuée au gouverneur et introduit sa famille en Languedoc. Il est un protecteur des Arts et un mécène remarquable soutenant de nombreux artistes protestants qu’il sauve souvent du bourreau, en intercédant en leur faveur. Il est notamment un grand admirateur de Bernard Palissy. Il meurt tué au combat le 20 octobre 1567, à Coutras en Gironde.

18Son fils Henri, l’assiste dans ses tâches à partir de 1563. Né de l’union d’Anne de Montmorency et de Madeleine de Savoie, il hérite des terres et des charges de son père, notamment du gouvernorat des États du Languedoc. Sa sœur Catherine fut pour lui le lien entre les terres vivaroises et le Bas-Languedoc en épousant le comte de la Voulte.

Henri Ier, duc de Montmorency (1534-1614)

19Seigneur de Damville, amiral et connétable de France, Henri 1er est gouverneur du Languedoc, de Provence, du Dauphiné et de Guyenne de 1567 à 1614.

  • 7 - TIÉVANT, p. 120.

20L’influence des idées de la Renaissance est sensible très tôt dans le Midi de la France. S’y ajoutent, à partir de 1530, celles de la Réforme en progression constante sur les anciennes terres de l’hérésie combattue en son temps par les papes et le clergé catholique le plus radical. L’ambiguïté des positions politiques d’Henri Ier, lui permet de ménager ses arrières. Claude Tiévant7, dans son ouvrage, s’attache à montrer le rôle du gouverneur dans la constitution politique du Languedoc au temps d’Henri Ier. « En pays d’états, le gouverneur est le premier commissaire du roi lors de la session des États, ouvrant et clôturant les séances, faisant connaître les vœux financiers du roi. […] En fait, la monarchie, en faisant résider le gouverneur dans sa province, lui a permis d’ajouter à un pouvoir déjà important, une assise territoriale donnant un caractère quasi patrimonial à sa charge ». L’auteur souligne que ce rôle débute avec la nomination d’Anne de Montmorency et se poursuit en s’amplifiant avec son successeur.

  • 8 - Noël Albert, riche négociant de Viviers, administrateur des biens de l’évêché et consul de la vil (...)
  • 9 - Le capitaine Baron (1576), Just de Tournon (1588) et Anne de Levis, duc de Ventadour (1594) afin (...)

21Henri Ier fut qualifié un moment de « vice-roi », compte tenu de sa longévité comme gouverneur de la Province du Languedoc, de l’étendue de son pouvoir sur l’ensemble du Midi et de son habileté de stratège, jouant sur de nombreux registres ou théâtres politiques, entre catholiques et protestants. En effet, après avoir été nommé gouverneur, il se place du côté des catholiques et s’éloigne de ses frères restés protestants. En Vivarais, il intervient à Viviers et à Villeneuve-de-Berg après la reprise des hostilités liées à l’exécution du rebelle protestant Noël Albert8. Henri Ier est constamment en action et envoie sans cesse les troupes nécessaires au maintien de l’ordre. Cependant, après l’horreur du massacre de la Saint Barthélémy, le 24 août 1572 et les responsabilités évidentes du parti ultra-catholique dans ce drame, il rejoint les protestants, position difficile à tenir pour lui en Languedoc. Il revient ensuite vers son roi en 1576, contre la promesse d’un marquisat en Italie. On note qu’il favorise le retour à la paix en nommant des hommes à lui9 dans les cantons de Viviers et de Villeneuve-de-Berg, mais les troubles ressurgissent régulièrement, plus rudes notamment entre 1574 et 1589, après le traité de Nemours. Neuf ans plus tard, Henri Ier est l’un des acteurs de la préparation de l’Édit de Nantes qui permet à une paix relative de revenir dans le royaume et particulièrement en Languedoc. Elle est néanmoins plus difficile à établir en Vivarais, car des troubles subsistent entre catholiques et protestants, notamment à Villeneuve-de-Berg et Mirabel, lieux de vie familiers d’Olivier de Serres et de sa famille.

  • 10 - MOULIN, p. 23-24.

22On observe que la période allant de 1587 à 1614 est celle de l’aménagement du domaine de la Grange des Prés et du parc de chasse de Caux. On ne peut éviter de s’interroger sur les contacts que ces deux personnalités ont pu avoir, compte tenu qu’Olivier de Serres s’attache souvent à apaiser les esprits. Il est nécessaire de rappeler également le rôle essentiel de Jean de Serres (1540-1598). Les frères sont tous deux animés d’une vie de foi et leurs œuvres sont imprégnées de culture religieuse. Chacun d’eux s’implique dans l’action politique au service du bien public, à la recherche de la paix et de la prospérité. Jean de Serres, qui est plus connu et respecté que son frère à l’époque, le démontre par son comportement à Nîmes. L’analyse d’une lettre10 inédite conduite par Charles Dardier, citée lors du colloque sur Olivier de Serres, en 2009 est très intéressante à ce sujet. Modérateurs, leur influence fut importante sur place auprès des deux communautés et face aux troupes royales.

  • 11 - Henri Ier de Montmorency, duc de Montmorency, le chancelier Pompone de Bellièvre, chancelier de F (...)

23Il ne subsiste que de rares éléments concernant les lectures et la composition de la bibliothèque d’Henri Ier. Cependant, on sait qu’il reçut personnellement un exemplaire du Théâtre d’Agriculture dans sa première édition11.

24Il a parcouru les provinces pour y faire régner l’ordre et s’imprégner des échanges les plus novateurs, lors de ses rencontres à la Cour ou dans l’intimité du roi, d’une part, lors de ses déplacements dans les territoires redevenus momentanément en paix tels que les Cévennes, le Gard et le Vivarais, d’autre part. Henri Ier effectue plusieurs gestes politiques : en 1573, le pasteur Olivier de Serres joue un rôle de médiateur entre les factions catholiques et protestantes. Il reçoit leurs délégations au Pradel. Il ne peut être ce modérateur sans l’aval du gouverneur et sa médiation est renouvelée en 1587 pour des raisons similaires. Le duc de Montmorency nomme ensuite le capitaine Baron, puis Just Louis de Tournon comme lieutenant-gouverneur du Vivarais, pour le seconder. Enfin, en 1594, il remplace celui-ci par un proche, Anne de Levis, duc de Ventadour, avec l’accord du roi. Il avait eu l’honneur de recevoir à Pézenas, dans le château fort de la ville, Catherine de Médicis en voyage dans le Languedoc en 1579. Mais, il n’avait pas encore réalisé alors l’aménagement d’une nouvelle résidence plus grande et plus commode ; ce qu’il fera dix ans plus tard, avec l’acquisition des terres de la Grange des Prés.

Henri II de Montmorency (1595-1632)

25À la mort d’Henri Ier en 1614, la charge et ses biens sont transmis à son fils, Henri II de Montmorency. Confirmé comme gouverneur des États du Languedoc par le roi Louis XIII, il réside alors, comme son père, à la Grange des Prés, lorsqu’il n’est pas sur les mers et au combat. Le cardinal de Richelieu le soupçonne de s’éloigner de la cause du roi et de prendre le parti des rebelles protestants. Il vient le rencontrer à Pézenas, en 1629, pour le convaincre de clarifier sa position. Après une courte période d’entente, Henri II intrigue à nouveau contre le cardinal et se retrouve accusé de complot. Ayant pris le parti de Gaston d’Orléans, frère du roi, qui soulève des troupes contre Richelieu, il paie cher ce ralliement. Louis XIII ne peut que faire arrêter les comploteurs, sur le conseil de son ministre. Gaston d’Orléans ne pouvant être exécuté sans affaiblir le roi, seul Henri II est condamné à mort pour crime de lèse-majesté, complot et rébellion puis décapité sur la place du Capitole de Toulouse, le 30 octobre 1632. Henri II fut considéré comme un homme intransigeant durant son gouvernorat, ce que nous ne pouvons pas développer ici. Cependant, il est nécessaire de rappeler que ce sont ses troupes qui saccagèrent le domaine d’Olivier de Serres en 1628, neuf ans après la mort de celui-ci. Ce qui a eu des conséquences irrémédiables pour la compréhension des travaux du maître du Pradel et du « père de l’agriculture française ». La connaissance, notamment des écrits préparatoires aux diverses éditions de son Théâtre d’Agriculture entre 1600 et son décès en 1619, a été ainsi perdue.

1.2. Les hommes et les savoirs

26On peut mieux cerner les liens qu’Henri Ier de Montmorency a pu tisser avec certaines personnalités de son temps. Nous avons pu apprécier que pour des raisons politiques et stratégiques, il s’appuie sur Olivier de Serres en Vivarais. Une meilleure connaissance de l’homme l’amène à échanger avec lui des expériences qu’il mettra à profit plus tard.

Olivier de Serres (1539-1619)

27Olivier de Serres est considéré aujourd’hui comme le fondateur d’une science moderne de l’agriculture qui prendra plus tard le nom d’agronomie. Pasteur de la religion réformée, il a été animé toute sa vie non seulement par un souci certain de développer des pratiques agricoles mieux adaptées au terrain et au climat mais aussi par une vision globale de la nature, gérée et valorisée dans une approche d’un domaine agricole que l’on qualifierait d’intégrée aujourd’hui : de l’aménagement des terres à la composition des bâtiments indispensables à son développement harmonieux (résidence du maitre, communs et dépendances diverses), il énonce de nouveaux principes.

  • 12 - ROBERT (de), p. 59-69.

28Il adopte la Réforme dès son plus jeune âge et exprime dans ses écrits en français, des références constantes, indispensables à ses yeux, aux fondements du message biblique et à l’intégration d’un certain progrès. Philippe de Robert, dans sa communication, rappelle12 que, dans son Théâtre d’Agriculture, Olivier de Serres évoque des passages de la Bible lorsqu’il rédige les parties de son traité. Analysant ces références, il retient ainsi « trois aspects principaux » (de l’enseignement du Livre) : la Bible comme témoin d’une civilisation rurale, comme recueil de sagesse universelle, comme message de salut ».

  • 13 - Jean de Serres avait été emprisonné par les ligueurs et avait dû payer une importante rançon pour (...)
  • 14 - On comptait en 2001 près de 25 rééditions en France.
  • 15 - Olivier de Serres publie séparément, en 1599 La cueillette de la soy et La Seconde richesse du mû (...)

29Olivier de Serres qui se rend plusieurs fois à Paris pour y plaider la cause de son frère mort et ruiné13, rencontre aussi imprimeurs et graveurs afin de pouvoir publier son œuvre. Le traité révolutionnaire est constamment réédité tout au long du XVIIsiècle14. Il en fait paraître plusieurs éditions entre 1600 et 1605, notamment en le complétant. La Renaissance est un moment de l’histoire centré sur les progrès de l’agriculture et des industries qui en découlent (magnaneries, caves viticoles, manufactures de laine et soie, moulins, etc.). La diffusion de nouvelles pratiques dans les domaines de la céréaliculture et de la viticulture, du jardinage, de l’apiculture et de la sériciculture15, particulièrement, entraîna le Languedoc dans une dynamique de développement remarquable, notamment autour de la ville de Pézenas et dans les vallées de l’Hérault et du Gard cévenol, où les mûriers gagnent du terrain, où la céréaliculture et l’arboriculture s’améliorent.

30Cet ouvrage magistral est nourri de la lecture des grands traités d’agriculture tels que ceux de Columelle, le De agricultura, grâce à la traduction parue en français de Claude Cotereau, en 1551, de Pierre de Crescent et de l’italien Gallo de Brescia. Cependant, c’est le Praedium rusticum ou la Maison rustique de Charles Estienne, parue en 1564 grâce à la traduction de son gendre Jean Liebault, qui sert notamment de base critique pour Olivier de Serres. En effet celui-ci déplore que cet ouvrage ne soit pas construit sur une expérimentation réelle et qu’il comporte de nombreuses erreurs.

31Les conseils dispensés dans le Théâtre sont fondés également sur l’expérience acquise dès qu’il peut procéder aux premiers travaux sur son domaine du Pradel, acheté en 1548, avant de s’y installer, avec sa famille à partir de 1578. Il l’augmente rapidement de terres nouvelles et de moulins, assortis de droits d’eau. En 1571, il bénéficie de tous les droits juridiques associés à l’acquisition de la seigneurie du Pradel qui le font ainsi entrer dans la noblesse locale (fig. 2). Il renforce ainsi son pouvoir tant à Villeneuve-de-Berg, son lieu de naissance, qu’à Mirabel.

Fig. 2

Fig. 2

Mirabel (Ardèche), maison d’Olivier de Serres

© A. Audurier Cros

32Olivier de Serres s’intéresse également à l’œuvre de Pierre Richer de Belleval, médecin et botaniste particulièrement encouragé et protégé par les gouverneurs du Languedoc et par Henri IV et Sully. Soucieux d’améliorer les productions agricoles et les rendements, il est en contact avec l’université de Montpellier qui est à l’époque un creuset considérable de savoirs et dont le rayonnement s’étend à toute l’Europe. Il réalise le jardin médicinal au Pradel en s’inspirant de ses travaux, car il le cite à ce sujet, dans son traité.

  • 16 - SERRES, 2001, p. 100. ….» parce que voulant trancher du grand, mange à sa salle, à l’appétit de s (...)

33Il est curieux également de constater qu’il évoque dans son Livre Premier la grande figure d’Anne de Montmorency : « Le dire de Messire Anne de Montmorency connétable de France est remarquable que le gentil-homme ayant atteint jusqu’à 500 livres de revenus ne sçait plus ce que c’est de faire bonne chère... »16. Il analyse ainsi en quelque sorte ses problèmes domestiques. Il prodigue quelques conseils généraux à propos de l’amélioration de la disposition des pièces d’un château en lui conseillant ainsi, indirectement, de créer un espace intermédiaire entre la salle à manger d’apparat et l’office des domestiques afin de préserver ses intérêts et de mieux manger tous les jours à sa convenance. La disposition du château de la Grange des Prés tiendra compte de ces conseils.

34Il est probable qu’à partir de 1563, Olivier de Serres a rencontré Anne de Montmorency en compagnie de son fils Henri Ier, au Pradel. Pendant qu’il aménageait son domaine, il recevait de nombreux visiteurs.

  • 17 - VIDAL, 2017.

35À l’automne 1600, il reçut au Pradel Monsieur de Bordeaux, surintendant des jardins royaux, qui venait lui apporter une lettre de la main du roi et lui faire une commande royale de 20 000 plans de mûriers, pour les jardins des Tuileries17. Il devint ensuite un correspondant régulier de Claude Mollet, jardinier du Roy, et son œuvre fut respectée par la communauté des jardiniers des domaines de la Cour.

Pierre Richer de Belleval (v. 1560-1632)

  • 18 - Pierre Richer de Belleval (v. 1560-1664) naît à Chalons en Champagne dans une famille picarde (...)

36Le duc de Montmorency est également un admirateur fervent de Pierre Richer de Belleval18, (v. 1560-1632), médecin et botaniste, créateur du Jardin des Plantes de Montpellier.

37François Michaud, dans un article récent, évoque le rôle majeur de ce protestant éclairé attaché à conduire une œuvre semée d’embûches, la création du Jardin des Plantes de Montpellier, premier jardin botanique du royaume et troisième d’Europe, durant l’année 1593.

38Pierre Richer de Belleval est l’un des petits-fils de Jean de Belleval, seigneur de Morival, originaire du Ponthieu. La faculté de Médecine de Montpellier, célèbre dans toute l’Europe médiévale pour les enseignements qui y sont dispensés, se place à la Renaissance au carrefour des savoirs européens, juifs et arabes, grâce aux professeurs venus d’Italie, d’Espagne, du Maghreb, voire des limites de la Méditerranée orientale. Il s’inscrit à la faculté de Médecine de Montpellier en 1584, lieu où le célèbre médecin et chirurgien, Guillaume Rondelet (1507-1566), avait dispensé ses cours. Il devient docteur en médecine en 1596, soit un an après avoir dessiné le Jardin des Plantes (1595). Le site choisi se place aux portes nord de la ville en face de la Tour des Pins et de l’îlot formé par la nouvelle cathédrale de Montpellier, dans l’ensemble conventuel des Bénédictins créé au XIVsiècle (1364-1373).

39En 1593, Henri IV signe deux lettres patentes fondant « l’Hortus montpeliensis », projet qui doit être associé à une nouvelle régence de la faculté de médecine et à la création d’un jardin, à l’imitation des jardins botaniques italiens de Padoue, Pise et Bologne. Il était le premier créé en France. Mais il fallut attendre encore deux années pour que les États du Languedoc enregistrent le projet (1595). L’enseignement de la médecine et la formation des apothicaires justifient pleinement la création d’un jardin de « simples » qui devient bientôt l’un des plus riches jardins botaniques d’Europe. La ville de Montpellier est de plus en plus gagnée par les idées de la Réforme. De nombreux médecins et magistrats adhèrent au protestantisme, suivis par une grande partie de la population. Malgré la répression des catholiques et des départs vers Genève au milieu du XVIe siècle, la ville devient un fief protestant puissant et les conflits s’exacerbent. La riposte catholique est menée en avril 1562 par le vicomte de Joyeuse aux ordres du gouverneur Anne de Montmorency. Les troubles sont un peu apaisés par la signature de la paix d’Amboise, qui garantit la liberté des deux cultes. En 1563, Henri Ier sert de relais à son père jusqu’à la mort de celui-ci en 1567. Cependant, l’insécurité et les désordres créés par les guerres de Religion posent de sérieux problèmes à Pierre Richer de Belleval qui commence son projet modestement sur le revers nord des remparts de la ville en attendant de pouvoir disposer des terrains nécessaires à son développement, en direction du nord-est à partir de 1594-1595. En 1622, il verra cependant le Jardin des Plantes saccagé lors du siège de Montpellier par les troupes de Richelieu. À l’âge de 60 ans, il s’oblige à tout restaurer, avant de mourir en 1632. Il est important de rappeler qu’Olivier de Serres conçut le jardin médicinal du Pradel selon ses principes, comme le souligne Martine Gorrichon dans son article. Il est le protégé d’Henri Ier de Montmorency et du duc Anne de Ventadour ainsi qu’elle le rappelle. En effet, Pierre Richer de Belleval qui s’est établi à Pézenas, rencontre, à la Grange des Prés, le gouverneur des États pour lui exposer son projet. Le duc de Montmorency est, semble-t-il, un intermédiaire des plus efficaces auprès du roi, séduit par les idées de Pierre Richer de Belleval. Il impressionne également Olivier de Serres car il répond à ses idées en agriculture ; en effet, il tient compte à la fois du contexte dans lequel les plantes étaient amenées à se développer dans la nature, mais aussi de leurs expositions selon la course du soleil et l’abri au vent. Il n’est pas ici de notre propos de développer une comparaison entre les démarches de ces esprits éclairés. Les auteurs cités en référence en témoignent par leurs écrits.

Jacques Besson, mathématicien, ingénieur et apothicaire huguenot (v. 1530-1572)

40Cet autre personnage ne peut pas être oublié dans cette évocation bien qu’il soit très peu connu aujourd’hui.

  • 19 - RÉGNIER-ROUX.

41La vie de Jacques Besson, mathématicien aux multiples facettes, est assez mal cernée. Né vers 1530, « dauphinois français » annonce-t-il, en se présentant lui-même, il apparaît en Suisse avec des écrits sur la gestion de l’eau et les pompes mécaniques pour des commandes de fontaines publiques. Puis, il publie des études concernant des machines et instruments destinés à la distillation des plantes médicinales. On le retrouve ensuite à Genève, bourgeois de la ville, professeur de mathématiques et fervent protestant, en 1561. Il y rencontre alors Olivier de Serres venu en Suisse chercher un pasteur pour le village de Villeneuve-de-Berg, qui l’attire en France en mars 1562. Il le loge au Pradel et le nourrit avec sa famille, durant deux années (1562-1564). Les deux hommes collaborent mais se séparent bientôt à cause, principalement, d’une mésentente entretenue par des paroissiens qui supportent mal son enseignement et sa rigueur morale excessive. Il est probable que ces deux passionnés d’aménagement ont échangé leurs savoirs en hydraulique et en agronomie durant leur cohabitation. Jacques Besson publie ensuite plusieurs ouvrages qui ont un certain renom. Il collabore avec Jacques Androuet du Cerceau, lors de son installation en Bourgogne, à Montargis en 1568, à la publication d’une de ses œuvres majeures19. Il s’intéresse comme tous les érudits de son temps aux planches gravées sur cuivre pour les illustrations de ses écrits. Architecte et graveur remarquable, Jacques Androuet du Cerceau réalise également alors les planches, réunies dans un ouvrage exceptionnel, dédié au roi, intitulé les « Plus excellents bâtiments de France ». Il y révèle par ses dessins la beauté des châteaux royaux les plus prestigieux de l’époque. Il est resté célèbre pour l’avoir réalisé entre 1568-1572.

42Jacques Besson a-t-il influencé les idées d’Olivier de Serres dans le domaine de l’hydraulique ? Il est difficile de l’apprécier encore aujourd’hui, mais c’est fort probable. Ces connaissances réunies nourrissent-elles des expérimentations sur le terrain au Pradel, puis dans les différents domaines du Languedoc durant les décennies suivantes ? Quelques exemples tendent à le prouver compte tenu de l’importance des dispositifs hydrauliques dans l’aménagement des terres à irriguer et des jardins à arroser. Le Livre VII, ou Septièsme lieu, du Théâtre d’Agriculture, « De l’eau et du bois », fait le point sur la question des systèmes hydrauliques et de tous les plaisirs et utilités de l’eau.

43Le rapprochement des systèmes hydrauliques de Joviac et du Pradel, en Ardèche, fut pour nous une voie intéressante à analyser aux fins de comparaison avec les exemples en Bas-Languedoc (Saint-Privat, dans le Gard, Bocaud et Lavérune dans l’Hérault). Leurs principes ont été appliqués à la Grange des Prés, entre 1587 et 1611. Françoise Conac indique que le projet d’aménagement hydraulique des jardins du château de Joviac, propriété de Jacques Ier d’Hilaire, gouverneur de Rochemaure, est conduit dès la fin du XVIe et le début du XVIIe siècle. Ceci le place à la même époque que l’aménagement de celui de la Grange des Prés que nous étudierons plus loin.

  • 20 - CONAC, p. 61.

« Autour du château le domaine comprenait des jardins en terrasses, des vergers d’arbres fruitiers, des plantations de mûriers pour nourrir les vers à soie de la magnanerie, une olivette et des prairies irriguées. Pour les établir, Jacques d’Hilaire s’était inspiré des enseignements de son illustre voisin, contemporain et religionnaire, l’agronome Olivier de Serres, dont l’influence sur lui a été très profonde et indéniable »20.

44Si, comme l’auteur le souligne plus loin, Olivier de Serres préconise moins la réalisation de jardins d’agrément et de prestige que celle de jardins répondant aux objectifs « d’utilité et de profit », il est vrai que la recherche d’une certaine ostentation dans la composition des jardins « à l’italienne » ou dits « de plaisir ou de propreté » permettait de répondre aux exigences des gens de Cour, amenés à fréquenter leurs hôtes en province et à valoriser la puissance et la fortune de leurs propriétaires, à leur retour en Ile-de-France ou en Touraine.

45Grands domaines agricoles à la pointe de l’innovation en agronomie et demeures de plaisance marient ainsi sur un même site les connaissances et les divertissements du moment. Il faut rappeler ici que nous sommes en terres huguenotes et que ces deux grands propriétaires « appartenant à la petite noblesse récente », selon Françoise Conac, ne peuvent s’ignorer puisqu’ils vivent à quelques vingt kilomètres l’un de l’autre et participent, du moins au début, à la nouvelle et très active minorité religieuse protestante de l’Ardèche. Ils ne peuvent selon elle que s’être rencontrés, à si peu de distance, et peut être confrontés, lors de la conversion de Jacques d’Hilaire au catholicisme.

II. Le contexte culturel et les transformations sociétales entre 1550 et 1650

  • 21 - Francesco Petrarca dit Pétrarque (1304-1374), poète et ecclésiastique, est l’auteur de nombreuses (...)

46Dès le XIVsiècle, l’émergence d’une pensée humaniste invite les élites européennes à s’imprégner de la Nature avec les poètes Pétrarque21 et Boccace. La cour des papes d’Avignon accueille le premier. Aux deux siècles suivants, l’Homme est placé en quelque sorte au centre de l’Univers, par les érudits et savants à partir de la redécouverte des textes antiques, de recherches techniques plus poussées et de l’éveil à la pensée scientifique en Europe.

47Certes, au XVIe siècle, le chevalier ou l’honnête-homme est toujours soumis à Dieu mais il découvre qu’il peut progresser par les savoirs acquis, l’observation de la nature ou l’expérimentation. Ainsi cette ouverture au monde lui permet d’essayer de transformer sa vision de la Création, de mieux comprendre la nature et d’agir sur son environnement. La Renaissance est donc une période de profonde réflexion et de progrès autour des sciences et des techniques d’une part, de la diffusion d’un humanisme éclairé, fondé sur une revendication de liberté, d’autre part. Les idées transmises à la Cour de France, depuis l’Italie, par les artistes et les érudits, sont encore enrichies par les écrits des poètes de la Pléiade, les Essais de Montaigne et les textes de la Réforme apportés notamment d’Allemagne et de Suisse. Ces derniers impliquent, pour les adeptes du protestantisme que leur liberté de conscience et de culte soit préservée. Ce qui n’est pas du goût des Ligues et des fidèles à Rome. Il faut souligner que, dans les provinces les plus touchées par la progression des idées de Calvin et de Luther, la diffusion des savoirs, élaborés ou recueillis, s’appuie sur des personnalités huguenotes remarquables, telles que celles de Théodore de Bez, Jean de Serres, Jacques Besson, Jacques Androuet du Cerceau, Bernard Palissy, notamment, comme nous l’avons vu.

48Ce mouvement intellectuel et moral majeur, est centré essentiellement sur une nouvelle compréhension du monde sensible, une philosophie et une posture critique, associant une certaine liberté de pensée compatible avec les progrès de l’observation scientifique, l’enseignement de la Bible et l’apport des auteurs antiques gréco-romains ou arabes. Les progrès sont rendus accessibles non seulement par les bienfaits de la diffusion des livres, mais aussi par l’adoption du français, comme langue officielle du droit et de l’administration, devenu un substitut du latin et des langues régionales, par l’ordonnance royale de Villers-Cotterêts édictée par François Ier, en août 1539.

2.1. Le domaine agricole et ses terres. La villa en son jardin. Le parc de chasse.

49Le « domaine agricole, la villa et le jardin » deviennent des lieux de liberté et de délectation, propices au développement de la philosophie, d’une nouvelle éthique et d’un regard curieux sur la terre nourricière. Les esprits éclairés se retrouvent ainsi dans les campagnes, loin des intrigues et des épidémies, voire des menaces de la ville. Le Décaméron avait ouvert une voie en ce sens. Au XVIe siècle, en Languedoc, l’influence de ce vaste mouvement est sensible tant au niveau des formes de la culture des élites que de celles imprégnées par les idées de la Réforme. Cependant, naissent bientôt des oppositions religieuses très violentes freinant, par leurs désordres, un certain esprit d’entreprise et des innovations, tant en agriculture, que dans les industries qui leur sont liées. Un retard certain est pris ainsi du point de vue économique et culturel dans ce vaste territoire, à cause de ces troubles récurrents.

50Les nombreux domaines et châteaux régionaux portent le témoignage de ces évolutions. Les traces de compositions architecturales et paysagères remarquables, de systèmes hydrauliques innovants au profit des productions agricoles diverses et complémentaires, assurant des revenus confortables, sont les signes d’une modernité revendiquée. Dans le domaine industriel, les stratégies souvent concertées entre des familles héraultaises et ardéchoises conduisent à l’adoption de procédés techniques et de structures adaptées aux objectifs poursuivis, sous l’influence de ces précurseurs.

  • 22 - Olivier de Serres évoque Saint-Privat dans son Septiesme lieu (ou Livre VII) : le Pont du Gard (...)
  • 23 - L’aile nord du château de Marsillargues fut construite vers 1560, adossée à l’antique maison f (...)

51Nous ne connaissons que très mal, faute d’archives suffisantes, le contenu de sources documentaires et le profil des conseillers de quelques grandes familles (Montmorency, Conti, Bocaud, Nogaret ou Faret) en Bas-Languedoc ; en revanche, nous pouvons essayer de mieux cerner, grâce aux récits de témoins, comment les idées d’Olivier de Serres sont appliquées, notamment par les nobles protestants, qui sont ses contemporains et souvent ses disciples. Les vestiges historiques et les traces archéologiques laissent assez de témoignages explicites pour évaluer la pénétration des idées nouvelles au sein de l’évolution de leurs projets. Les châteaux et domaines de Saint-Privat à Vers22 dans le Gard, de Marsillargues23 ou de Lavérune, dans l’Hérault, en sont des exemples significatifs. Nous les présenterons succinctement car, dans le cadre de cet article, nous nous centrons essentiellement sur le cas de la Grange des Prés, au temps des Montmorency. Il nous a semblé important cependant de les comparer. Il est utile de rappeler au préalable certaines définitions.

  • 24 - Historien britannique (Universités de Dublin et Reading), fondateur de la revue Garden History.

52La « Villa » en Italie, la « Bastide » en Provence, la « Campagne » en Languedoc qualifient un ensemble composé d’un domaine agricole de taille conséquente avec ferme et communs d’une part, d’une demeure-résidence construite selon les codes prônés à l’origine par des architectes et artistes italiens (Leon Battista Alberti, Michelozzo ou Giorgio Vasari), d’autre part. Dans son sens restrictif, la villa est la maison du propriétaire et de sa famille. Les communs et les bâtiments indispensables à l’exploitation s’ordonnent en fonction de sa position propre. Leurs sources d’inspiration sont essentiellement les poètes et auteurs latins tels que Cicéron, Columelle, Varron et Pline le Jeune. Les règles de la composition de la nouvelle demeure s’inscrivent au XVIsiècle dans le choix du site, la pente et l’orientation, la domination et la qualité des terres, le clos et l’abri dans la tradition antique tel que le rappelle Christopher Thacker24. Olivier de Serres analyse le sujet et l’oriente vers la meilleure adaptation au terrain et aux besoins du maître d’ouvrage.

  • 25 - Cité par Michel Baridon, p. 34. La « première nature », celle de la nature sauvage ; la « seconde (...)

53Le « Jardin » devient une autre partie de la demeure aristocratique en prolongeant celle-ci par des terrasses et des salons de verdure, dont l’architecture végétale et les décors sculptés ou peints satisfont aux mêmes critères de luxe et de volupté que la maison du maître. Porté par les descriptions des jardins antiques, le jardin, lieu clos et protégé, redevient à l’instar de la redécouverte de l’Otium romain, un lieu de réconfort et de retour sur soi, de jouissance et de paix. Terrasses ouvertes sur le grand paysage, jets d’eau et fontaines, grottes et nymphées, topiaires et bosquets ombreux, parterres d’entrelacs ponctués de statues de dieux et de déesses, mettent en scène une autre nature recomposée par l’esprit. Une « troisième nature », selon la proposition de Bonfadio, au XVIe siècle25 Il est intéressant, par ailleurs, de rapprocher le découpage du traité de Varron en Livres « I, II, III... » de celui adopté par Olivier de Serres pour son Théâtre.

  • 26 - RIBOUILLAULT, p. 15.

54Cependant « le bois », inspiré du bosco italien, accompagne et prolonge le jardin. Il forme un écrin plus imposant encore dans l’ensemble. Denis Ribouillault, dans un ouvrage récent26, rappelle que « Philosopher au jardin, c’était non seulement reconnaître le lien essentiel qui unissait l’homme, la nature et le cosmos, mais aussi les liens entre les individus eux-mêmes ». Le jardin devient, plus encore que la maison, un cadre de vie et une mise en scène de soi, dans une nature contrôlée et réinventée.

55Le « parc de chasse » devient également un espace incontournable du domaine. La chasse, à la fois sport viril et entraînement à la guerre, joua aussi un rôle important dans l’organisation de l’espace des grands domaines du Midi : le parc de chasse, inspiré des formes les plus anciennes du loisir aristocratique depuis l’Antiquité, permet de faire partager aux invités les ressources d’un gibier soigneusement entretenu, les plaisirs de la performance et force ripailles à table. Chasse et sociabilité sont les principales activités de cette société privilégiée. Débat d’idées, échanges de connaissances et mises à l’épreuve diverses, agitent à la belle saison, familles et invités lors de leurs séjours à la campagne. Une même préoccupation semble animer les maîtres des lieux : prospérer, jouir des biens de la terre, explorer des voies nouvelles, loin des dogmes convenus et de l’obscurantisme d’un certain clergé.

56Les interrogations, formulées en étudiant la Grange des Prés et en la comparant avec des domaines contemporains de sa création, ont permis de saisir l’influence de ce large mouvement des idées en Languedoc, marqué par un dynamisme des élites et un souci de modernisation des pratiques.

2.2. Le château et le domaine de Saint-Privat (Vers-Pont-du-Gard)

57Le cas des seigneurs Faret-Fournès, nobles protestants installés à Saint-Privat, témoigne de l’influence d’Olivier de Serres, qui est déterminante dans la mise en place d’un projet de mutation et de modernisation d’un grand domaine agricole et industriel, à la fin XVIe siècle.

  • 27 - Le château de Saint-Privat est un monument historique, inscrit à l’ISMH en 1965, classé depuis le (...)
  • 28 - BASCOUL, p. 163.
  • 29 - BABELON, p. 558-559.
  • 30 - « Porte Michel Ange », dressée vers 1600. Cf. AUDURIER CROS, 1992.

58Situé à deux kilomètres en amont du Pont du Gard, sur la rive droite du cours du Gardon d’Anduze, le château de Saint-Privat dresse encore aujourd’hui sa silhouette massive27. Avec ses tours médiévales crénelées et ses majestueux corps de logis construits vers 1580, il domine les longues terrasses des jardins et leurs contreforts, au-dessus des escarpements creusés par la rivière. L’historien Louis Bascoul rappelle dans son ouvrage28 que « le nouveau seigneur de Saint Privat ne tarda pas à être pris par la maladie de son temps : être et paraître ». Le domaine subit avec la famille Faret, sous le règne d’Henri III, une première phase de transformations avec forêts, moulins à blé et prés irrigués. Le château, rénové et agrandi, est doté d’un corps de logis avec fenêtres à croisées et galeries à portiques. Les voûtes en berceau des escaliers sont ornées de rares pointes de diamants. Seul le château de la Tour d’Aigues, en Provence en présente de semblables29. Pour accéder au « jardin des fleurs », puis aux premières terrasses, une porte monumentale est construite avec ornements à bossages majestueux30 ; elle existe toujours.

59Guillaume II Faret, en fait un des domaines agricoles les plus avancés à la fin du XVIe siècle : cycles de céréales et complantations, vignoble, plantations de milliers de mûriers...

  • 31 - La famille Faret occupa le château de Saint-Privat de 1451 à 1865.Cf. AUDURIER CROS, 1992.

60Près de 30 000 mûriers occupent les plaines de Rémoulins et de Saint-Privat, selon les frères Platter. Seigneur apprécié, Guillaume II de Faret reçoit la cour des Valois puis celle des Bourbon, selon Louis Bascoul. Contemporain de Joviac et de la Grange des Prés, le domaine de Saint-Privat est jugé digne des princes et des rois, puisque les Valois ne négligent pas d’y prendre logis dans une famille protestante modérée31. Y logent ainsi successivement Henri III, la reine Margot et sa suite, Henri IV, Louis XIII et Richelieu, lors de la signature de la Paix d’Alais (1629).

  • 32 - Thomas Platter (1574-1628), dit le Jeune, botaniste et médecin suisse, né et mort à Bâle, auteur (...)

61Soutenu par la construction d’un réseau hydraulique remarquable, à partir de sources karstiques et de prélèvements sur le Gardon, le domaine agricole prospère rapidement. Il répond aux critères du « bon mesnage » : nouvelles plantations d’oliviers, de fruitiers à noyaux, de plantes fourragères. Les jardins potagers et d’agrément, notamment font l’admiration des visiteurs. Thomas Platter se rend à Saint-Privat au cours de son long voyage en France, commencé en 1595. Il découvre ainsi les aménagements du domaine dans la plaine du Gardon près de Remoulins et les cite dans son journal32.

  • 33 - « Portique : Colonnade ouverte vers l’extérieur formant une galerie couverte. Les portiques de (...)
  • 34 - BASCOUL, p. 202.
  • 35 - Fonds Faret, archives de Saint-Privat. AD Gard.

62Quelques mois après la mort de Louis XIII, les jardins prennent encore plus d’ampleur et un bail d’engagement de Jean Pledeu, jardinier au diocèse de Meaux, signé le 1er octobre 1644, vient préciser les tâches saisonnières définies par Henri de Faret, propriétaire à l’époque, pour les jardins de Saint-Privat. Le jardinier engagé avait pour mission « d’entretenir le jardin, le garnir de toutes formes d’hortolisses ; ensemble tiendra toutes les allées, nettes et bien ratissées ; parterres et bois en compartiment, comme tondra les dit parterres et cyprès, bois alaternes et buis, travaillera en bon père de famille l’allée qui est au bout du jardin en palissade et entretiendra le portique33, ensemble les orangers et les fleurs, comme fraises et asperges »34. Les archives conservées permettent également de signaler des cultures de choux, blettes, endives, pois et fèves...35

  • 36 - Mémoires de Madame Dunoyer qui visita le domaine. La machine de Marly fut achevée en 1688. Une ma (...)

63Une machine hydraulique, fit dire, vers 1685, à une visiteuse pleine d’admiration que « cette machine sur laquelle on a pris modèle de celle de Marly... »36 était en tout point remarquable. On apprend par un autre document cité par Louis Bascoul que Charles de Faret, propriétaire à cette époque, donne « le droit de se servir de la machine qui sert à l’élévation des eaux pour être conduites aux blanchissages des toiles et de la soie ». Elle fonctionnait déjà depuis des années et apportait l’eau nécessaire à l’alimentation du grand bassin situé sur la terrasse et à l’aqueduc qui le desservait encore. Les usages de l’eau sont ainsi bien conformes aux recommandations d’Olivier de Serres dans la mesure où ils sont destinés autant à l’agriculture, au jardinage qu’à des usages industriels et artisanaux. Le développement d’une filière de la soie avec la grande magnanerie est poursuivie au XVIIsiècle et participe de fait à l’enrichissement du domaine. Il en est de même de l’activité des moulins du Gardon, au pied du château. Certes, des témoignages supplémentaires, recueillis dans des correspondances ou des documents divers, manquent pour saisir la prégnance des idées d’Olivier de Serres sur ces gentilhommes entreprenants que furent les Faret. Mais on se doit d’évoquer son influence, à travers les réalisations. Les archives du château ont été malheureusement en grande partie dispersées dans la seconde moitié du XXsiècle, lors de ventes.

2.3. Le château et le domaine de Bocaud, Jacou (Hérault)

  • 37 - BURLATS-BRUN, Pierre. Mémoire sur Jacou. AC Montpellier. 4° 199-204.
  • 38 - AD Hérault, B 21 f° 95.
  • 39 - Cf. LEENHART.

64Un autre exemple significatif est celui de la famille Bocaud, à Jacou. Issu d’une famille puissante, depuis le XIVe siècle, Rolin (ou Raulin) Bocaud est, comme ses ascendants, seigneur de Teyran, Clapiers, Jacou et autres places, mais aussi procureur général de la Cour des Aides de Montpellier dès 1477. Il achète alors un domaine avec une métairie et des terres en mai 1476 à Jacou et solde l’achat devant maître Claude Lefort, le 8 décembre 1477, auprès de Hugues Lasser37, son ancien propriétaire. Pierre de Bocaud, l’arrière-petit-fils de Rolin, est nommé procureur général en 1586, du temps du gouvernorat d’Henri Ier de Montmorency. Il gagne les faveurs du roi Henri IV, en 159338. Élevé au rang de premier président de la Cour des Aides de Montpellier, par le roi, en 1603, en remerciement de sa fidélité, il occupe cette charge jusqu’en 1629. En tant que protestant et fidèle vassal, il subit de grandes pertes dans ses possessions lors de graves troubles religieux. La reconstruction en 1618 de sa résidence d’été en une belle demeure bourgeoise, qu’il est d’usage d’appeler « château », dans le village, assortie d’une grotte ornée et de jardins en terrasses, reste liée à un projet d’embellissement et à l’agrandissement de bâtiments agricoles. Le duc de Montmorency devait tenir compte de la position d’un personnage tel que lui, progressiste et estimé du roi Henri IV. Pierre de Bocaud apparaît ainsi comme un habile politique et un homme éclairé, soucieux de mettre en valeur les idées du temps dans le champ de l’agronomie et de l’hydraulique. Les terres, jardins et le parc de son château en témoignent. Cependant, il se convertit à la foi catholique sous Louis XIII en 1625 et gagne la confiance du cardinal de Richelieu, qui lui rend visite dans sa maison du Sixtain Ste Foi à Montpellier, puis dans son domaine à Jacou39.

  • 40 - AUDURIER CROS, 1999, 2003.

65Le système des jardins en terrasses exposés au nord, l’aménagement hydraulique avec prise sur le ruisseau du Salaison et l’embellissement des bosquets par la construction d’une remarquable grotte ornée de rocailles, de style assez tardif, soulignent encore le raffinement de sa composition d’époque Renaissance40. Les terres inscrites aux compoix de Jacou et Teyran sont travaillées dans un souci de modernité.

66Parmi les autres domaines aménagés entre le milieu du XVIe et le milieu du XVIIe siècle, dont les propriétaires se sont largement inspirés des idées d’Olivier de Serres, on peut citer également, les châteaux de Marsillargues, de Lastours et Lavérune.

67À travers ces quelques exemples, nous avons voulu montrer que l’influence des idées de cette période foisonnante a été sensible en Languedoc comme elle l’a été en Vivarais, notamment autour du Teil (Joviac) et de Villeneuve-de-Berg. Les réseaux d’influence autour des prestigieux personnages que furent les ducs de Montmorency, dans l’exercice de leur charge de gouverneurs des États du Languedoc, fluctuèrent en fonction de l’état des troubles religieux et politiques, d’une part et des protections accordées par les différents souverains, d’autre part. Le rayonnement de ce que l’on peut qualifier de première révolution agronomique, permise par les travaux d’Olivier de Serres et leur diffusion dans le royaume, est ainsi rendu sensible dans les mutations observables au sein de l’aménagement des grands domaines appartenant à la noblesse protestante de l’époque. Le duc de Montmorency, par la durée de son action et l’opiniâtreté mise à conduire la réalisation de son grand projet piscénois, se place aussi dans le cœur du mouvement. Après avoir essayé de cerner au mieux le contexte de l’époque, nous allons analyser le cas de la Grange des Prés, dans la troisième partie de ce travail.

III. L’exemple de la Grange des Prés, à Pézenas (période 1587-1630).

68Contemporain d’Olivier de Serres (1539-1619), Henri Ier de Montmorency s’est imprégné, comme nous l’avons vu, des idées du temps et des principes du maître du Pradel. Il les applique dans l’aménagement de son domaine de la Grange des Prés. On ne sait qu’assez peu de choses au sujet de son château aujourd’hui disparu ; il n’en est pas de même des communs, des jardins, des terres et des moulins, d’une part, de son parc de chasse, situé entre Pézenas et Caux, d’autre part. Ceux-ci existent toujours et sont mieux documentés.

69L’ensemble du domaine de la Grange des Prés s’étend au XVIe siècle sur le long versant d’une colline calcaire, surmontée d’une planèze de basalte, créée par une coulée volcanique ancienne, sur des couches argilo-calcaires. Il se termine par des terrasses fluviatiles inclinées vers l’Hérault et bien exposées à l’est et au midi. Son site est assez proche de celui du village de Mirabel en Ardèche, dominé lui aussi par une planèze. Cette coulée se trouve au-dessus des terres du Pradel, mais ses dénivelés sont plus spectaculaires qu’à Pézenas.

70Le schéma général, (fig. 3) qui permet de prendre en considération les différentes structures conservées, en restitue l’ampleur sur le cadastre napoléonien.

Fig. 3

Fig. 3

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, domaine foncier, cadastre napoléonien, 1827, AC Pézenas

© Artopos / DRAC 2015

71On y distingue le cours du fleuve Hérault qui descend vers le sud et les moulins sur ses rives, la route royale à l’ouest et les différents fossés dans les terres. Situé légèrement au-dessus de la plaine basse inondable sur la rive droite de l’Hérault, le vaste domaine de la Grange des Prés marque le paysage encore aujourd’hui à l’écart des premières constructions urbaines, au nord-est de la ville de Pézenas. Il est desservi, par la route de Béziers à Montpellier, que longe un haut mur historique, régulièrement entretenu depuis des siècles et construit dans un appareil fait de grossiers moellons de basalte et de calcaire. Il entoure le domaine depuis le XVIe siècle sur près de 3 km et des tours rondes le flanquent encore, bien que certaines soient en ruine. La route royale, nommée sur les plans anciens « route de Pézenas à Lézignan », fut longtemps le seul moyen d’accéder au clos de la Grange. Elle contournait le parc sur deux côtés jusqu’à sa rectification par l’État au début du XXe siècle (fig. 4).

Fig. 4

Fig. 4

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, évolution du périmètre de l’enclos, AD 34, C 7929. Pézenas

© Artopos/DRAC, 2015

  • 41 - AC Pézenas. Layète 2, Liasse 1, charte 1.
  • 42 - Il s’agit des fouilles préventives de l’INRAP liées au chantier de l’Autoroute A75 dit « la Mérid (...)

72En 1586, les États du Languedoc votent une somme assez considérable, de 6 000 livres, pour qu’Henri Ier de Montmorency puisse acquérir une propriété digne de son rang, une maison des champs, assortie de terres agricoles fertiles. Son choix se porte sur une métairie, appartenant au chapitre de Lodève, dans l’espace de laquelle existe une chapelle d’époque médiévale qui fait l’objet d’un pèlerinage annuel le 5 août pour honorer Notre Dame des Prés (ou Prez). Il acquiert ce bien en 1587. L’un des premiers documents connus, attestant de l’existence de la Grange des Prés et souvent cité par les historiens de Pézenas, n’est plus aujourd’hui consultable car il est considéré comme perdu. Il s’agit d’un manuscrit médiéval appelé « copie de l’achat de la Grange des Prés par le chapitre de Lodève »41. Les fouilles archéologiques42 qui ont été menées aux alentours du domaine ont permis de découvrir des établissements gallo-romains importants, concentrés entre les communes d’Aumes, Montagnac, Lézignan et Pézenas, voire plus au nord sur les importantes routes antiques en direction d’Aspiran et de Saint-Jean de Bébian. Ces routes nord-sud très anciennes croisaient la Voie Domitienne à quelques lieues du franchissement de l’Hérault, en direction de collines méridionales et de la mer.

  • 43 - AC Pézenas. Inventaire F. Resseguier, publié par J. Berthelé, archiviste en 1907.
  • 44 - Sétérée : mesure agraire ancienne équivalent à la surface que l’on pouvait ensemencer avec un sét (...)
  • 45 - AC Pézenas. Layète 2, Liasse 1, Charte 4.

73Vers 1260, les Consuls de Pézenas se plaignent au Sénéchal de Carcassonne que le chapitre de Lodève ne s’acquitte pas des tailles dues. Bertrand Guiraud, l’aumônier général est obligé de s’exécuter en 126443. La contenance totale des possessions du chapitre de Lodève y est indiquée à hauteur de 159 sétérées44 soit une cinquantaine d’ha environ, au milieu du XIIIsiècle. Des conflits naissent à nouveau en 1294 entre les consuls de Pézenas et le chapitre au sujet de bornages, de droits d’usages et de jouissance des moulins et des terres. Les oppositions portent sur le droit de pâture (usage des devois) sur un « certain rivage, pré, riveiral et terre herme, située près de la rivière d’Hérault, ainsi qu’ils s’étendent depuis le chemin qui va du gué de la dite rivière, vers les moulins dudit chapitre »45. Au XIVe siècle, des querelles violentes reprennent à propos de la propriété du domaine et de la chapelle située dans le territoire revendiqué par les religieux. Un nouveau bornage est engagé et les droits de chacun reconnus, grâce à la médiation de Guillaume de Roquefeuil, seigneur de Verzols. Des droits de bans, de devois et de coupes de bois sont alors accordés ou confirmés aux chanoines. Les habitants préservent cependant leurs droits de passage et d’accès au fleuve. Ces sources manuscrites, conservées aux archives de Pézenas, permettent d’avoir ainsi un descriptif des lieux avant l’intervention d’Henri Ier de Montmorency : « Le lieu appelé les Claux, dans lequel sont construites la maison et l’église de Notre Dame des Prez, lequel est renfermé par des chemins publics et par le rec d’Arnet. Le jardin de ladite maison, avec le champ attenant, qui confrontent d’une part, avec le chemin qui va de Pézenas à Lésignan d’autre part, avec le chemin qui va de St Christol aux moulins [...]. De plus le rivage des moulins, avec les appartenances, ainsi qu’il sera limité par les bodules ou termes, qui seront désignés par ledit Roquefeuil. […] Il est de plus convenu que le chemin par lequel les habitants de Pézenas ont la faculté et l’usage de passer pour aller à la rivière d’Hérault, au-dessous des moulins, pour y puiser de l’eau, faire boire leurs bestiaux ou passer le gué, sera toujours ouvert pour la commodité desdits habitants, sans aucun empêchement de la part du chapitre ».

  • 46 - Ceci à l’exception de quelques chemins de desserte modifiés par le tracé de l’autoroute et du com (...)

74Les plaines basses de l’Hérault ont toujours été inondables entre Aumes et Pézenas et le fleuve conserve un cours sauvage et tumultueux. Des digues dont les merlons subsistent, régulièrement entretenus, enferment encore les terres par segments, pour éviter les impacts les plus ravageurs. Sillonnées de canaux de drainage, les parcelles au sud de la Grange des Prés ont été aménagées pour gérer la ressource et leur paysage a assez peu changé, si l’on analyse les plans successifs46. Les principes de gestion des ressources en eau prônées par Olivier de Serres ont été appliqués avec soin par Henri Ier de Montmorency et le réseau hydraulique construit en est une illustration remarquable. En effet les sources captées et la nappe abondante du fleuve permettent de disposer d’une eau constante. Le nom des « Prés » ou « Prez », selon l’orthographe usitée, est en cela significatif. Olivier de Serres n’indique-t-il pas en outre que la bonne position d’un domaine doit être définie à partir de deux proximités souhaitées : une route et un cours d’eau ? Le surplomb, la pente et l’exposition favorable notamment confirment l’usage de ses principes.

75Situés en contrebas de l’enclos de la Grange des Prés, les moulins étaient construits sur les deux rives de l’Hérault. En fait, quatre moulins occupaient les berges et généraient des aménagements hydrauliques importants mais ils étaient souvent endommagés par les crues.

  • Les moulins de la Grange et de Conas au pouvoir du chapitre de Lodève, sur la rive droite.

  • Les moulins de Aumes et de Murles sur la rive gauche (moulins du domaine royal puis de familles nobles). Leur activité était centrée essentiellement sur les céréales (moulins à farine). Tous les moulins devinrent ensuite propriétés des Montmorency aux XVIe et XVIIe siècles.

3.1. Le domaine de la Grange des Prés et sa composition

76Les transformations du domaine et les aménagements à l’époque de la Renaissance marquent profondément le paysage général, comme le montrent les relevés et les plans que nous avons élaborés. Le domaine de la Grange des Prés commence à être transformé par Henri Ier selon un programme qui est achevé environ quatre ans avant sa mort, en 1614. En effet, les principaux travaux sont réalisés sous sa conduite entre 1587 et 1611. Le plan des constructions que nous avons élaboré (fig. 5) pour rendre compte de l’évolution dans la conception et la réalisation du bâti permet d’en distinguer les différentes phases, tant à la fin du XVIsiècle que durant le premier quart du XVIIsiècle.

Fig. 5

Fig. 5

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, principales époques de construction du bâti, fin XVIe-début XVIIsiècle, AD 34, C7929

© Artopos/DRAC, 2015

77Les plantations et des embellissements se sont poursuivis quelques années encore (1614-1632) sous l’action de son fils, nouveau gouverneur des États, Henri II, 3e duc de Montmorency. Les illustrations de cette partie, permettent de se rendre compte de l’importance des aménagements de cet espace à la fin du XVIIIsiècle. L’analyse des lieux à travers les plans d’archives conservés sur place par la famille actuelle ou aux archives communales de Pézenas montre que les espaces et les constructions ont assez peu changé depuis la mort du dernier Montmorency en place. Ceci à l’exception de l’abandon notamment du château après la mort du Prince de Conti, qui succéda à Henri II comme gouverneur. L’ancien portail et ses deux tours qui était encore visible au début du XVIIIsiècle disparurent ensuite.

78Les idées qui ont présidé aux choix des stratégies d’implantation (exposition, inondabilité maîtrisée, emplacement de la gourgue) et des types d’équipements retenus (aqueducs, canaux de drainage, vivier) présentent ainsi des similitudes troublantes avec les recommandations d’Olivier de Serres. Certes, une première période de travaux est engagée avant la parution du Théâtre d’agriculture (1600) mais nous avons vu précédemment qu’Henri Ier avait eu des contacts avec le maître du Pradel.

Le château (aujourd’hui disparu)

79Henri Ier de Montmorency fait donc construire une nouvelle résidence, à partir de 1595, un château imposant, doté de cours et de communs considérables. Le projet fut confié à Jean Thomas, architecte lorrain réputé, venu s’installer à Pézenas sans que l’on sache précisément comment il a été contacté ni à quelle date. L’ensemble est organisé autour d’une cour intérieure avec puits à laquelle on accède par un porche orné des armes des Montmorency et, selon les témoignages de l’époque, d’un cadran solaire. Le château d’Henri Ier comporte un grand escalier extérieur, une chapelle, des galeries à arcades et des tourelles surmontant deux étages du logis, selon les ordonnancements voulus par les principes en usage dans l’architecture de l’époque. Un escalier intérieur dessert l’aile ouest et permet d’accéder aux étages. Les deux dessins de l’ingénieur du roi La Blottière, en 1738 (fig. 6 et 7), expriment assez bien la complexité des fonctions avant transformations (projet des casernes).

Fig. 6

Fig. 6

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, coupe du château et des communs (partie nord) par l’ingénieur du roi La Blottière, 1738, AD34, C07929

© AD Hérault

Fig. 7

Fig. 7

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, plan des bâtiments du château et des communs par l’ingénieur du roi La Blottière, 1738, AD34, C07929

© AD Hérault

80Des écuries situées au sud-ouest du château dans la seconde cour séparent les grands communs des jardins. Elles sont l’objet d’un réaménagement en 1607. Un four à pain est placé dans une des tours d’angle, d’après les témoins. Les logements de la domesticité et des gardes du connétable sont répartis dans les grands communs à côté des écuries, proches des différentes dépendances (greniers, caves et remises). Un éloignement relatif était recommandé par Olivier de Serres pour les activités domestiques et agricoles, comme nous l’avons vu au sujet d’Anne de Montmorency. Les passages couverts existent toujours (fig. 8).

Fig. 8

Fig. 8

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, bâtiment des communs et porche donnant sur les jardins

© A. Audurier Cros

81Les principaux bâtiments sont distribués autour de trois grandes cours assurant des fonctions différentes ; la plus grande reliée aux plus petites par des porches. L’enceinte murale, « le clos », achevée en 1601 pour cerner l’ensemble du domaine, des jardins et du parc, est flanquée de tours de guet.

  • 47 - Projet des Casernes. Plans et relevés établis par l’ingénieur de La Blottière et enregistrés chez (...)

82Le château, dont il ne reste que les dessins et plans établis au XVIIIe siècle par l’ingénieur du roi La Blottière47, était déjà très dégradé. Il n’est plus visible aujourd’hui. Seul un corps de logis remanié au milieu du XIXe siècle et doté d’une chapelle en garderait trace, car il est une liaison entre les communs et les anciennes fondations du vieux château disparu. Les structures des réseaux hydrauliques de desserte souterraine qui partent notamment de la « noria » ou « puits à roue » sont encore dans le sous-sol mais n’ont pas pu être tous explorés (puits, voûtes, galeries et partiteurs). Le puits du château qui se trouvait au centre de la cour d’honneur a été conservé jusqu’à nos jours et se trouve être au bord du parterre de buis actuel, situé entre la chapelle et le château neuf, (construit au milieu du XIXe siècle). Cependant le plan de La Blottière en rend compte clairement en montrant le tracé des canalisations souterraines partant d’une noria, au dessin octogonal, et allant vers le puits du château (fig. 9).

Fig. 9

Fig. 9

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, plan de la noria et des réseaux d’eau, par l’ingénieur du roi La Blottière, 1738, AD34. C07929

© AD Hérault

Les jardins dans l’enclos de la Grange des Prés

83Henri Ier aménage des jardins intérieurs sur une partie clôturée de la Grange des Prés dont la superficie est aujourd’hui d’environ 10 ha. Des bosquets de chênes et de pins dominent des prairies, situées en contrebas, au voisinage d’un grand bassin, dans la partie sud de l’enclos. Au-delà, cette longue réserve d’eau, le vivier, est reliée à la gourgue, située à l’extérieur de l’enceinte comme nous l’avons déjà vu plus haut. Une conduite et un déversoir assurent une transition en direction des terres basses (fig. 10).

Fig. 10

Fig. 10

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, système hydraulique. Cadastre napoléonien (extrait), AC Pézenas

© Artopos/DRAC, 2015

84Des cultures fruitières et potagères s’étendent progressivement aux limites des jardins d’agrément. Compartimentées, elles sont protégées par des haies ou des murets, pour les soustraire aux animaux qui paissent dans la partie plus éloignée du parc, au nord. Le reste des terres hors les murs au-dessus de la zone inondable, à l’ouest, est occupé par des cultures en sec (céréales, vignes, olivettes). Les prés irrigués et les cultures maraîchères ou fruitières de plein champ, occupent les terrasses d’alluvions du fleuve (fig. 11). Le modèle suit en cela les recommandations du Théâtre d’agriculture avec une complémentarité des terroirs.

Fig. 11

Fig. 11

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, vue aérienne IGN générale du terroir actuel, plan des réseaux de drainage et d’irrigation

© Artopos/DRAC, 2015

85Certes nous ne pouvons que comparer les plans terriers postérieurs et les vestiges ou traces des formes d’occupations anciennes, visibles sur le terrain. Celles-ci semblent correspondre à cette première mise en valeur dont furent témoins les frères Platter qui visitent la région à la fin du XVIsiècle. Thomas Platter le jeune, exprime son admiration au sujet de ce grand domaine piscénois, dans le récit de son périple dans le midi.

  • 48 - BRACKENOFFER. In BELLAUD-DESSALLES, p. 375.

86Le récit plus tardif d’un autre voyageur, Élie Brackenoffer48, nous permet d’avoir une idée des jardins de la Grange des Prés, sous la gouvernance des princes de Conti, vers 1640 : « Le jardin est beau. Il a beaucoup d’allées de cèdres (sic), de buis et de lauriers, un suave parfum s’en dégage : les allées sont larges propres et bien tenues. Les arbres sont hauts et donnent beaucoup d’ombre, mais ce qu’il y a de plus joli à voir dans ce jardin, ce sont les termes qui représentent toutes sortes de figures, des statues, des pyramides, des colonnes carrées ou rondes dont quelques-unes reposent sur des boules... ». Certes, la visite est effectuée près de 30 ans après mais la description évoque un jardin à maturité.

  • 49 - PONTOPPIDAN.

87Les cèdres évoqués ici posent la question de leur existence en Languedoc à cette époque, car ils auraient été ainsi plantés très prématurément dans ce domaine par rapport à la date de leur introduction au Jardin des Plantes de Paris (1734). Mais on sait que Pierre Belon, qui visite l’Orient de 1547 à 1550, se rend au Liban et rapporte des cônes de cèdres en France. Leurs graines sont plantées et germent, mais leurs plants ne résistent pas aux voleurs et disparaissent, si l’on se réfère à ses Mémoires. En Angleterre, les premiers cèdres sont introduits et se développent vers 1630, grâce au docteur Edward Pocock, chapelain de l’ambassade britannique de Constantinople49.

  • 50 - Le Songe de Poliphile, œuvre attribuée au moine Francesco Colonna (1433-1527), renferme de nombre (...)
  • 51 - PONCET, p. 87.

88La description d’Élie Brackenoffer fait aussi penser au Songe de Poliphile50 et aux nombreux décors qui ont inspiré le mouvement maniériste en Europe. En effet, les jardins d’agrément de la Grange sont dessinés et plantés à partir de 1595. Ils sont ornés de grottes et de fontaines, célébrés dans les chroniques comme particulièrement somptueux et conformes à l’esprit du temps. Aménagés à l’imitation des jardins de Rueil ou de Fontainebleau, ils rappellent, selon Pierre Poncet, les grands décors de Palissy et les planches des ouvrages de Jacques Androuet du Cerceau. Les orangers, très nombreux, y sont célèbres, ainsi que les jets d’eau et les parterres de buis. Pierre Poncet ajoute dans son ouvrage : « Le connétable fit bâtir un beau château, de magnifiques appartements, grandes cours, jardin, parterres, grottes, orangeries, palissades de grenadiers, lauriers, cyprès, pins et arbres rares, qui rendaient le château très agréable. Il y avait aussi des viviers, un barralet de marbre, des fontaines, des puits et une robine où s’arrêtait le poisson amené par les inondations de l’Hérault51 ».

89Des arbres alignés ponctuent les chemins de desserte et la longue « allée du Prince », appelée ainsi plus tard, quand le domaine fut occupé par le prince de Conti au milieu du XVIIsiècle.

Les terres agricoles et les systèmes de drainages

  • 52 - La Grange fut vendue comme bien national à la Révolution puis revendue en 1803 alors qu’elle comp (...)

90Des terres arables sont encore acquises en grand nombre après 1587 et mises également en valeur de différentes manières. Les mûriers y sont introduits et la complantation développée sur les parcelles. La polyculture dominante (vignes, olivettes et champs) domine et dominera jusqu’après la Révolution52 complétant les aires d’élevage sur prairies irriguées. Un grand paysage se construit peu à peu sur la rive droite du fleuve. Il ne sera modifié radicalement qu’avec la monoculture de la vigne au XIXsiècle.

91Le plan général composé à partir de la photographie aérienne dresse l’état actuel des réseaux, rigoles et digues (fig. 11). L’autoroute A75 (en gris) est certes venue modifier les liaisons internes des terres, mais a préservé l’essentiel des parcelles cultivées entre son tracé et le fleuve.

Les systèmes hydrauliques

92Enfin, l’une des questions posées lors du lancement de cette recherche, concernait, dans l’aménagement de l’espace du domaine de la Grange des Prés, l’origine des dispositifs hydrauliques imbriqués pour l’approvisionnement en eau des terres et des bâtiments : captages de sources, puits et norias, rigoles aériennes et souterraines, « gourgue » et bassins à poissons, barrages et digues sur les terres basses de l’Hérault. Toutes ces structures, bien qu’en grande partie dégradées, ont été conservées pour la plupart d’entre elles sur le domaine actuel. Sillonnées de canaux de drainage, les terres au sud de la Grange des Prés, présentaient un paysage qui avait assez peu changé jusqu’au moment du choix du tracé de l’autoroute A75. Ceci à l’exception de quelques chemins de desserte.

93Le système hydraulique ancien permettait des échanges de flux entre l’enclos de la Grange et le fleuve Hérault. Lors des crues, les eaux submergeaient régulièrement les champs et alimentaient la réserve (la gourgue) et le grand vivier intérieur, à l’époque du duc (fig. 12).

Fig. 12

Fig. 12

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, vivier et parc de la Grange des Prés

© Artopos/DRAC, 2015

94Lorsque les eaux se retiraient, les bassins conservaient les poissons et ceux-ci pouvaient être alors élevés ou pêchés, selon les principes rappelés par Olivier de Serres. Malheureusement les travaux autoroutiers ont en partie fait disparaître la gourgue, même si son exutoire a été conservé par un passage sous la chaussée en direction du fleuve. Elle est en partie comblée. Nous avons découvert le même principe avec les viviers d’époque Renaissance, des châteaux de Lavérune et de Marsillargues, alimentés respectivement par les inondations de la Mosson et les crues du Vidourle. Le Salaison à Jacou n’était pas moins tumultueux mais les activités piscicoles du domaine de Bocaud n’y étaient pas organisées à proximité du château et du parc, selon les archives. Ce qui ne veut pas dire qu’un bassin à poissons n’ait pas existé. À Saint-Privat, l’abaissement de la rive droite du Gardon, en amont du château, laissait la place en limite de la plaine alluviale, à des activités piscicoles.

95En cas de sécheresse, les prises d’eau sur le fleuve alimentaient à Pézenas les canaux d’irrigation des deux rives et on distribuait des tranches d’eau réglementées par des droits d’irrigation. Cependant Henri Ier fit construire son propre aqueduc sur la rive droite du fleuve. Des travaux d’entretien furent entrepris également à intervalles réguliers pour assurer le bon captage des nappes, la conduite des eaux des sources depuis les coteaux de Lézignan. L’ensemble des eaux était acheminé par des rigoles encore visibles par endroits aujourd’hui.

96Le drainage des sols et l’évacuation des surplus d’eau vers le fleuve complétaient l’ensemble et formaient un des systèmes de fossés des plus maîtrisés. Le Cinquiesme lieu (chapitre XIII) du traité d’Olivier de Serres est consacré à la gestion des étangs, des viviers et à l’aménagement des eaux. On ne peut pas ne pas penser à cette référence en étudiant l’organisation du système hydraulique de la Grange des Prés, qui rappelle celui de Joviac :

  • 53 - Nous avons adopté une formulation plus commode du texte réédité. Extrait p. 415. Le Théâtre d’agr (...)

« Pour la première main de l’étang est besoin faire un grand fossé, large et profond, de long en long du lieu destiné en estang, de bas en haut, d’un bout à l’autre, coupant les eaux des côtés par tranchées, comme en plume, vidant les eaux dans le grand fossé, au bout duquel en la chaussée, sera la bonde pour écouler l’étang au besoin »53.

  • 54 - BN, Ms fran. 6641, fー169. In BELLAUD-DESSALES, p. 50.

97Dans un courrier découvert, à la Bibliothèque Nationale54, au début du XXe siècle par le généalogiste que Mme Bellaud Dessalles avait requis, il est indiqué l’emplacement d’un ancien aqueduc relié à une noria (ou puits à roue) qui fut aménagé au bord du fleuve Hérault au début du XVIIe siècle, alors qu’Henri Ier de Montmorency était propriétaire de la Grange de Notre Dame des Prés et se trouvait à la guerre. Dans une lettre, datée du 19 septembre 1611, que lui adresse son gendre, le duc de Ventadour, administrateur de la Grange, il est précisé que des travaux hydrauliques importants sont en cours : « Au surplus, monsieur, je suis de retour ici depuis deux jours et hier j’ai pu visiter votre belle grange et jardin que j’ai trouvés en bon état. Grauton (le maçon NDLR) a déjà fait faire la tour et poser la roue pour mener l’eau de la rivière Hérault jusque dans votre jardin et accélère tant qu’il peut la construction de la muraille dans laquelle les bourneaux seront enchâssés. Si vous vouliez dépenser mille écus de plus, il m’a dit qu’il bâtirait des arcades depuis ladite rivière jusqu’au jardin et par ce moyen l’eau se porterait plus facilement partout où vous le désireriez et l’œuvre serait plus belle et beaucoup plus durable et assurée ». 0n ne sait pas si ce dernier choix a été effectivement retenu, mais l’aqueduc a été construit durant l’année 1611. Ces indications sont précieuses pour la définition des traces des aménagements hydrauliques anciens dans le parc à l’intérieur de l’enclos et au-delà dans les terres, en direction de l’Hérault. Nos recherches ont permis de découvrir les restes de cet aqueduc (fig. 10) et d’en rendre compte, la noria citée ayant disparu près du fleuve.

Le parc de chasse d’Henri Ier de Montmorency, à Caux

98Henri Ier de Montmorency acquiert bientôt des terres et une petite métairie, entre Pézenas et Caux, pour pouvoir organiser les plaisirs de la chasse et bénéficier d’une base foncière nouvelle pour un grand parc. L’achat a lieu en juillet 1589 ; ceci à quelques lieues du domaine de la Grange des Prés. Ainsi trouve-t-on encore aujourd’hui, les vestiges du parc dit « Parc du duc de Montmorency » au nord de Pézenas, à mi-chemin entre les deux communes. Il semble être l’un des derniers parcs de chasse du Languedoc encore visibles (fig. 13).

Fig. 13

Fig. 13

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, parc de chasse, état actuel vue aérienne, cliché IGN

Dessin © Artopos/DRAC, 2015

  • 55 - L’ÉPINE. NB, l’auteur porte le même prénom que son ancêtre.

99Diverses terres du parc figurent dans des contrats datant de 1441 sur les communes de Pézenas et de Caux et en 1521, elles apparaissent cernées de « bodules » (bornes) sur un compoix. Dans son article consacré au parc de chasse de Montmorency, Jean-François L’Épine55 précise que l’acquisition des terres mises aux enchères par la famille de Contour, couverte de dettes, est faite par un avocat de Pézenas, Henri de Monsualeur, au profit du duc de Montmorency, le 10 juillet 1589, pour la somme de 8 000 livres. Ce dernier procède ensuite à divers achats de parcelles supplémentaires pour agrandir encore l’ensemble qu’il veut aménager. La superficie atteint ainsi 135 ha. Elle est aujourd’hui la même qu’à la fin du XVIe siècle. Henri de Montmorency fait entourer d’un mur de 3,50 m de haut et d’un périmètre global de 5 km, ces terres peu fertiles et de faibles revenus, occupées par quelques oliviers, champs maigres, vignes, hermes ou garrigues. À partir de la petite métairie, il construit vers 1595 un joli pavillon de chasse fortifié (fig. 14). Une cheminée monumentale occupe toujours la grande salle basse destinée aux banquets et l’architecture générale de la construction a très peu changé au cours des siècles.

Fig. 14

Fig. 14

Pézenas (Hérault), Grange des Prés, ancien parc du duc de Montmorency, pavillon de chasse, façade est

© A. Audurier Cros

  • 56 - Éd. Sladkine, p. 421.

100Le parc lui permet d’entretenir et de chasser le grand gibier en toute liberté. Il est doté de portes d’accès monumentales. La mode des parcs de chasse prestigieux fut introduite au XIVe siècle avec l’aménagement du parc de Hesdin dans le nord de la France. Les plaisirs aristocratiques de la chasse dans de vastes enclos se multiplièrent à la Renaissance. Olivier de Serres consacre dans son Traité, un long texte intitulé Le Parc « pour dresser un espace pour les grosses bêtes sauvages »56. Il évoque des parcs de tailles différentes en fonction des types de gibiers souhaités, de la taille des bêtes et de la position sociale du propriétaire. Il recommande notamment de planter des chênes et des « haillers touffus » pour la nourriture des animaux (glands, baies sauvages, etc.) mais aussi de conserver des pâtures en place et des abris afin de compléter en hiver les apports de fourrages. Il se préoccupe également de l’eau nécessaire à l’alimentation du gibier : « Les bêtes ne peuvent vivre sans boire ». Il conseille donc d’aménager des rigoles, des bassins et des fontaines pour les abreuver. Ces bêtes sauvages sont pour lui essentiellement des cerfs, biches ou sangliers.

101Henri Ier de Montmorency va donc s’inspirer de ces bons conseils, car il aménage dans cet enclos un réseau d’irrigation. Il fait creuser également, à partir de diverses sources et du ruisseau du Rieutor qui traverse le territoire, des réserves d’eau, d’autant plus indispensables que la région bénéficie d’un climat méditerranéen aux étés chauds et secs. En 1602, il est indiqué « qu’un coral est construit par un fontainier de Caux avec 2 500 cannes de « canons de terre » pour faire venir l’eau d’une fontaine de Caux et ainsi alimenter « celle de Monseigneur dans son parc ». C’est l’aqueduc toujours visible aujourd’hui.

  • 57 - Les oiseaux de haut vol désignent principalement les rapaces : faucons, gerfauts, émerillons. Cf. (...)

102Il y fait planter des bosquets et introduire des « biches, daims, chevreuils, cerfs, sangliers, loups », mais aussi des oiseaux « de haut vol »57. Henri Ier assortit également la clôture de quatorze tours de guet pour la surveillance du gibier et son observation par les invités depuis les belvédères imposants qu’elles constituent (ex : tour dite « du Maréchal », « tour Loubatières », etc.). Aujourd’hui, certaines sont restaurées, d’autres à l’état de ruine. Elles permettent également de découvrir les horizons languedociens et d’admirer le paysage. On sait par les chroniques du temps que « monseigneur le duc s’y plaisait » et venait souvent.

103Le parc de chasse des Montmorency accueillait en son temps, des gens de cour, invités à chasser par le propriétaire afin de les honorer. Henri II de Montmorency en fait grand usage aussi. Louis XIII vient sur place en 1622. Plus tard, Louis XIV, y passe pour chasser en 1659.

  • 58 - La propriété appartient à la famille de L’Épine, héritière d’un des plus célèbres facteurs d’orgu (...)

104Clos de murs, le parc apparaît aujourd’hui58 en friche, ses structures sont en assez mauvais état et son vaste espace couvert de chênes verts, de pins et de lauriers. Une tour qui flanquait l’enceinte au XVIsiècle a été restaurée par la famille l’Épine, propriétaire des lieux qui en assure la surveillance.

Conclusion générale

105Les importants aménagements voulus par Henri Ier, duc de Montmorency, dans l’une de ses principales résidences du royaume, ont été inspirés, par les conseils prodigués par Olivier de Serres dans son Théâtre d’Agriculture et mesnage des champs. Nous avons essayé de le montrer en cernant ce sujet mal connu. Bien que de nombreux documents précis manquent encore pour en confirmer de manière incontestable les influences, il est clair que les formes d’implantation retenues, les dispositifs ingénieux, les tracés cohérents et les orientations générales de leurs développements sont en de très nombreux points, conformes aux idées d’Olivier de Serres et liés aux autres influences dont a pu bénéficier ce grand vassal du roi de France. Homme de cour, gouverneur puissant mais également personnage partagé entre ses convictions profondes et son devoir, il côtoie savants et érudits comme nous l’avons vu en étudiant ses proches et ses contemporains.

106Les conflits religieux qui l’obligèrent à lutter en Languedoc contre une véritable guerre civile ébranlèrent ses convictions et il n’est pas interdit de penser que son domaine de la Grange des Prés fut pour lui un lieu de ressourcement en famille, un manifeste des idées nouvelles et un lieu de repos à l’abri des confits les plus difficiles.

  • 59 - Liberté de conscience accordée aux protestants notamment par la Déclaration des droits de l’homme (...)

107L’œuvre d’aménagement de la Grange des Prés lui permit ainsi peut être de pratiquer un humanisme tempéré que ses fonctions militaires et administratives au service du roi ne lui permettaient pas toujours de manifester. La force devant rester à la loi pour le roi, voire à son bon plaisir. Catholiques et protestants, parmi les plus irréductibles rallumèrent régulièrement les hostilités. Ainsi le déroulement des guerres de religion est un sanglant témoignage des terribles excès mais aussi des sacrifices qu’il fallut concéder, pour arriver progressivement au respect de la liberté de penser dans le royaume de France59. La publication de l’Édit de Nantes par le roi Henri IV, le 23 septembre 1595 semble lui avoir laissé ensuite quelques libertés pour entreprendre son œuvre de bâtisseur à Pézenas. Ses absences sont néanmoins attestées par ses correspondances. On sait que le Vivarais ne lui laissa pas de longs répits.

  • 60 - JOUANNA et MOUSNIER.

108L’assassinat d’Henri IV marqua une importante rupture politique dans le royaume et fut, selon Arlette Joanna, un crime impardonnable pour les protestants et les humanistes60.

109En 1618, les hostilités reprirent en Languedoc sous le gouvernorat de son fils Henri II de Montmorency, dont on connaît la fin tragique. Le château de la Grange des Prés dont les bases étaient solidement construites et le domaine agricole rendu prospère par des formes de gestion judicieuses, connut ensuite des périodes fastes jusqu’en 1666 et la mort du prince de Conti. Placé dans la mouvance des grands domaines du Languedoc du XVIe et du début du XVIIe siècle, le domaine de la Grange des Prés, témoigne ainsi de la splendeur de l’architecture et de l’art des jardins à la Renaissance, d’une part mais aussi de l’influence des idées du Maître du Pradel qui contribuèrent à élaborer les fondements d’une première modernité.

  • 61 - Extrait de l’introduction qu’il a rédigée dans le cadre de la réimpression de l’édition du Traité(...)

110Nous achevons cette évocation en citant André Caudéron, membre de l’Académie des Sciences, Secrétaire perpétuel de l’Académie d’Agriculture61, en 1991 :

« Le théâtre d’agriculture et menasge des champs est unanimement considéré comme un témoignage d’une qualité exceptionnelle sur la façon dont on concevait l’économie rurale et sur l’état de celle-ci dans la France méditerranéenne et les régions voisines au seizième siècle. L’ouvrage a été bien accueilli. L’auteur que ses contemporains avaient reconnu et traité comme une haute personnalité, a pourtant subi de multiples disgrâces après sa mort en 1619 : la destruction en 1628, sur ordre royal, du domaine exemplaire qu’il avait créé au Pradel – aménagements, plantations, bâtiments ; le silence qui, à la révocation de l’Édit de Nantes (1685), s’abat pour près d’un siècle, sur l’œuvre d’un protestant notoire ; la réserve de milieux scientifiques au rationalisme triomphant, dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècle, vis à vis des travaux agronomiques d’un esprit foisonnant, observateur et inventeur heureux, gestionnaire prospère et même écrivain à la verve poétique. Prestigieuse, l’image d’Olivier de Serres demeure lointaine ».

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Bibliographie

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Notes

1 - Le terme d’agronomie n’apparaît que plus tard au XVIIIe siècle.

2 - Ce travail a été entrepris dans le cadre du cycle de conférences du Domaine du Pradel, organisé pour le 4e centenaire de la mort d’Olivier de Serres (1619-2019), à Mirabel (Ardèche).

3 - Jean de Serres (1540-1598), pasteur calviniste et historiographe du roi Henri IV. Formé à Lausanne, il est fortement imprégné par les idées et l’enseignement de Théodore de Bèze (1519-1605).

4 - Il est le filleul de la reine Anne de Bretagne et en cela membre de la Cour de France.

5 - Il est situé dans l’actuel département de l’Aisne (Hauts-de-France).

6 - La France à l’époque des guerres de religion. Carte. Atlas historique. Éd. Stock.

7 - TIÉVANT, p. 120.

8 - Noël Albert, riche négociant de Viviers, administrateur des biens de l’évêché et consul de la ville qui, lors des guerres de Religion, devient chef du parti huguenot et saccage la cathédrale. C’est aussi lui qui fait bâtir la somptueuse façade de la Maison des Chevaliers à Viviers. Il est condamné à mort par le Parlement de Toulouse, en 1568.

9 - Le capitaine Baron (1576), Just de Tournon (1588) et Anne de Levis, duc de Ventadour (1594) afin qu’ils le relaient en Vivarais, sous son autorité. On note que Catherine de Montmorency, sœur de Henri Ier, était la fille d’Anne de Montmorency et de Madeleine de Savoie. Dame d’honneur de la reine Catherine de Médicis de 1547 à 1553 ; elle épousa à Fontainebleau le 25 Juin 1553, Gilbert III de Lévis Ventadour, duc de Ventadour, comte de la Voulte, pair de France. Leur fille Marguerite épouse ensuite Anne de Levis, duc de Ventadour en 1593. Un an après cette alliance, il est homme de confiance d’Henri I. Cf. COMTE, Roland.

10 - MOULIN, p. 23-24.

11 - Henri Ier de Montmorency, duc de Montmorency, le chancelier Pompone de Bellièvre, chancelier de France depuis 1599, Philippe de Mornay, seigneur du Plessis-Marly, dit Duplessis-Mornay, le sieur de Candolle, calviniste provençal, exilé à Genève, reçurent un exemplaire du Théâtre d’Agriculture dans sa première édition..." (source : Archives du Pradel communiquées par Benoit Vidal, responsable du site historique).

12 - ROBERT (de), p. 59-69.

13 - Jean de Serres avait été emprisonné par les ligueurs et avait dû payer une importante rançon pour sa libération ; à sa mort, ses enfants avaient un urgent besoin que le roi leur rende justice par un remboursement de la somme due. Jean de Serres était l’historiographe officiel du roi. Olivier alla plaider sa cause auprès d’Henri IV. Le roi lui accorda à Paris près de 10 000 écus pour ce dédommagement. VIDAL, 2016.

14 - On comptait en 2001 près de 25 rééditions en France.

15 - Olivier de Serres publie séparément, en 1599 La cueillette de la soy et La Seconde richesse du mûrier en 1603.

16 - SERRES, 2001, p. 100. ….» parce que voulant trancher du grand, mange à sa salle, à l’appétit de son cuisinier, où auparavant prenant ses repas à sa cuisine, se faisoit servir à sa fantasie. Pour donques compenser ces choses, nostre mesnager aura une anti-cuisine, qui lui servira de sallette ou mangeoir ordinaire, au travers de laquelle de nécessité conviendra passer allant à la cuisine : par ce moyen estant noblement servi en son vivre, sans se mesler avec la lie de ses domestiques, tiendra en office tous les siens : lesquels se rendront plus obéissans et mieux morigénés par telle proximité, qu’estans plus reculés de sa présence », (Le Théâtre, Livre I).

17 - VIDAL, 2017.

18 - Pierre Richer de Belleval (v. 1560-1664) naît à Chalons en Champagne dans une famille picarde anoblie en 1514. Dès 1593, le roi Henri IV, séduit par son projet, lui confie la création du Jardin des Plantes de Montpellier, à l’imitation de celui de Padoue. Il aménage ainsi le premier jardin botanique royal. Sa première réalisation est saccagée par le siège de 1622, lors des guerres de Religion. Il reconstitue le jardin en l’enrichissant. Parallèlement, il publie un catalogue de plantes Onomatologia in hirti montispeti et commence la première Flore du Languedoc en faisant préparer plus de 500 gravures sur cuivre. Mais il ne peut achever son œuvre et meurt en 1664, ruiné et épuisé.

19 - RÉGNIER-ROUX.

20 - CONAC, p. 61.

21 - Francesco Petrarca dit Pétrarque (1304-1374), poète et ecclésiastique, est l’auteur de nombreuses lettres décrivant son aspiration à un refuge tranquille et solitaire, près de la Fontaine de Vaucluse. La nature fut pour lui une source inépuisable d’aspiration à la beauté, dans ce qu’il qualifiait de « retraite heureuse ». (Voir : L’ascension du Mont Ventoux. Lettre à Dionigi da Borgo San Sepolcro. Extrait de Lettres familières (Familiarum Rerum Libr, IV, 1). Paris : Arthème Fayard. N° 333. 2001.

22 - Olivier de Serres évoque Saint-Privat dans son Septiesme lieu (ou Livre VII) : le Pont du Gard et « Saint Privat en Languedoc, rare lieu par nature et par artifice, digne séjour de son seigneur ». Il est possible qu’il y soit allé. Nous avons étudié ce domaine et ses jardins en vue de leur classement au titre des monuments historiques. Cf. AUDURIER CROS, 1992.

23 - L’aile nord du château de Marsillargues fut construite vers 1560, adossée à l’antique maison forte de Guillaume de Nogaret. Sa riche modénature est ornée des plus beaux décors d’époque Renaissance du Bas-Languedoc, accompagnés des symboles royaux (Salamandre de François Ier et monogramme de Diane de Poitiers). Le réseau hydraulique et les jardins, dont il ne reste presque rien, figurent sur le plan conservé au château. Son ampleur le place dans la continuité du propos. Cf. SOURNIA et VAYSSETTES.

24 - Historien britannique (Universités de Dublin et Reading), fondateur de la revue Garden History.

25 - Cité par Michel Baridon, p. 34. La « première nature », celle de la nature sauvage ; la « seconde nature », celle née de l’agriculture, la « troisième nature », associant la nature et l’art dans la composition du Jardin, vers l’esthétique.

26 - RIBOUILLAULT, p. 15.

27 - Le château de Saint-Privat est un monument historique, inscrit à l’ISMH en 1965, classé depuis le 17 février 1995. Site classé au titre de la loi du 2 Mai 1930 et au titre de l’UNESCO (1986) dans le périmètre du Site du Pont du Gard.

28 - BASCOUL, p. 163.

29 - BABELON, p. 558-559.

30 - « Porte Michel Ange », dressée vers 1600. Cf. AUDURIER CROS, 1992.

31 - La famille Faret occupa le château de Saint-Privat de 1451 à 1865.Cf. AUDURIER CROS, 1992.

32 - Thomas Platter (1574-1628), dit le Jeune, botaniste et médecin suisse, né et mort à Bâle, auteur d’un journal de voyage célèbre. Il avait fait ses études de médecine à l’université de Montpellier. Il rédige son journal de voyage entre 1604 et 1605.

33 - « Portique : Colonnade ouverte vers l’extérieur formant une galerie couverte. Les portiques des jardins étaient fort appréciés. On élevait ainsi des portiques de verdure soit en disposant des arbres à l’emplacement des colonnes et en conduisant leurs branches, afin que le feuillage, soigneusement tondu, fasse le couvert de la galerie et les détails de l’architecture, soit en construisant en charpenterie et treillage le portique afin de le couvrir de plantes grimpantes. ». Cf. CONAN et BROSSARD.

34 - BASCOUL, p. 202.

35 - Fonds Faret, archives de Saint-Privat. AD Gard.

36 - Mémoires de Madame Dunoyer qui visita le domaine. La machine de Marly fut achevée en 1688. Une machine hydraulique existait bien avant la visite citée, car elle est attestée au temps de Pierre II Faret. (Mémoires de Mme Dunoyer. Citées par BASCOUL, 1911).

37 - BURLATS-BRUN, Pierre. Mémoire sur Jacou. AC Montpellier. 4° 199-204.

38 - AD Hérault, B 21 f° 95.

39 - Cf. LEENHART.

40 - AUDURIER CROS, 1999, 2003.

41 - AC Pézenas. Layète 2, Liasse 1, charte 1.

42 - Il s’agit des fouilles préventives de l’INRAP liées au chantier de l’Autoroute A75 dit « la Méridienne » : Secteur Boujan-sur-Libron-Pézenas-Clermont l’Hérault. Les résultats les plus importants furent obtenus essentiellement au nord et au sud du site étudié. En effet, l’absence constatée de vestiges au niveau inférieur des terres de la Grange, aurait pu être liée à une exploitation de sables ou à des effets d’inondations récurrentes. Cf. www.inrap.fr . Nîmes. Cependant, à notre connaissance, aucune fouille archéologique n’a été réalisée à l’intérieur de l’enclos historique du domaine des Prés.

43 - AC Pézenas. Inventaire F. Resseguier, publié par J. Berthelé, archiviste en 1907.

44 - Sétérée : mesure agraire ancienne équivalent à la surface que l’on pouvait ensemencer avec un sétier de blé. Valeur variable selon les régions sous l’Ancien Régime. (159 sétérées = environ 50 ha).

45 - AC Pézenas. Layète 2, Liasse 1, Charte 4.

46 - Ceci à l’exception de quelques chemins de desserte modifiés par le tracé de l’autoroute et du comblement consécutif de la gourgue de la Grange des Prés. Les termes de Gour, Gourgue, renvoient soit à des lieux liés à l’érosion naturelle des fonds de rivière ou de grottes (gour), soit à des formes d’aménagement hydrauliques (gourgue). Une gourgue est, en Cévennes, une réserve d’eau généralement aménagée à l’émergence d’une source, servant à l’irrigation d’abreuvoir aux troupeaux. Ces termes ont été souvent employés en Languedoc (Cévennes, Vivarais), au XVIe et XVIIsiècle. Le terme gourgue figure sur les plans anciens de la Grange des Prés.

47 - Projet des Casernes. Plans et relevés établis par l’ingénieur de La Blottière et enregistrés chez le notaire Poutingon. Dessin en géométral des communs et du vieux château ; Documents des États. Réf. C7929-1. Pézenas : casernes, château de la Grange des Prés. 1738-1740 AD Hérault. Cf. AUDURIER CROS et BABAUD. « Géométral » se dit d’un dessin qui représente un objet en plan, coupe, élévation avec ses dimensions relatives exactes, sans égard à la perspective (Dictionnaire Larousse. 1996)

48 - BRACKENOFFER. In BELLAUD-DESSALLES, p. 375.

49 - PONTOPPIDAN.

50 - Le Songe de Poliphile, œuvre attribuée au moine Francesco Colonna (1433-1527), renferme de nombreuses descriptions de jardins et de paysages fantastiques associés à des palais, destinés à ponctuer le parcours initiatique, plein d’obstacles du jeune Poliphile, à la recherche de son amour, Polia. Cette quête initiatique, dont le message symbolique demeure en grande partie hermétique, eut un grand succès auprès des humanistes de la Renaissance. Publié à Venise en 1499, il fut traduit en français en 1546. Le texte fut illustré de nombreuses gravures. Réédition et texte commenté. Imprimerie Nationale. Paris. 1994.

51 - PONCET, p. 87.

52 - La Grange fut vendue comme bien national à la Révolution puis revendue en 1803 alors qu’elle comptait 59 ha, 11 a et 90 ca. (vente de novembre 1803, Joseph Puech/Joseph Mathebiau (6 frimaire An XII de la République). AC Pézenas.

53 - Nous avons adopté une formulation plus commode du texte réédité. Extrait p. 415. Le Théâtre d’agriculture. Éd. Slatkine. Genève. 1991.

54 - BN, Ms fran. 6641, fー169. In BELLAUD-DESSALES, p. 50.

55 - L’ÉPINE. NB, l’auteur porte le même prénom que son ancêtre.

56 - Éd. Sladkine, p. 421.

57 - Les oiseaux de haut vol désignent principalement les rapaces : faucons, gerfauts, émerillons. Cf. Ferdinand-Charles-Philippe d’Esterno. Du vol des oiseaux. Paris, Librairie Nouvelle, 1865 ; In Wiktionary.org

58 - La propriété appartient à la famille de L’Épine, héritière d’un des plus célèbres facteurs d’orgues du Midi, Jean François L’Épine (1732-1817).

59 - Liberté de conscience accordée aux protestants notamment par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août 1789) et la liberté de culte par la Constitution de 1791.

60 - JOUANNA et MOUSNIER.

61 - Extrait de l’introduction qu’il a rédigée dans le cadre de la réimpression de l’édition du Traité de 1605, chez Slatkine, à Genève. Ouvrage publié sous les auspices du Comité Olivier de Serres en 1991.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1
Légende Mirabel (Ardèche), buste d’Olivier de Serres
Crédits © A. Audurier Cros
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Titre Fig. 2
Légende Mirabel (Ardèche), maison d’Olivier de Serres
Crédits © A. Audurier Cros
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Titre Fig. 3
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, domaine foncier, cadastre napoléonien, 1827, AC Pézenas
Crédits © Artopos / DRAC 2015
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Titre Fig. 4
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, évolution du périmètre de l’enclos, AD 34, C 7929. Pézenas
Crédits © Artopos/DRAC, 2015
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Titre Fig. 5
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, principales époques de construction du bâti, fin XVIe-début XVIIsiècle, AD 34, C7929
Crédits © Artopos/DRAC, 2015
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Titre Fig. 6
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, coupe du château et des communs (partie nord) par l’ingénieur du roi La Blottière, 1738, AD34, C07929
Crédits © AD Hérault
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Titre Fig. 7
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, plan des bâtiments du château et des communs par l’ingénieur du roi La Blottière, 1738, AD34, C07929
Crédits © AD Hérault
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Titre Fig. 8
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, bâtiment des communs et porche donnant sur les jardins
Crédits © A. Audurier Cros
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Titre Fig. 9
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, plan de la noria et des réseaux d’eau, par l’ingénieur du roi La Blottière, 1738, AD34. C07929
Crédits © AD Hérault
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/3969/img-9.jpg
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Titre Fig. 10
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, système hydraulique. Cadastre napoléonien (extrait), AC Pézenas
Crédits © Artopos/DRAC, 2015
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Titre Fig. 11
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, vue aérienne IGN générale du terroir actuel, plan des réseaux de drainage et d’irrigation
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Titre Fig. 12
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, vivier et parc de la Grange des Prés
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Titre Fig. 13
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, parc de chasse, état actuel vue aérienne, cliché IGN
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Titre Fig. 14
Légende Pézenas (Hérault), Grange des Prés, ancien parc du duc de Montmorency, pavillon de chasse, façade est
Crédits © A. Audurier Cros
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Pour citer cet article

Référence électronique

Alix Audurier Cros, « Un domaine d’Henri Ier de Montmorency au temps d’Olivier de Serres : la Grange des Prés, à Pézenas »Patrimoines du Sud [En ligne], 11 | 2020, mis en ligne le 10 mars 2020, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/3969 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/pds.3969

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Auteur

Alix Audurier Cros

Docteur en géographie, professeur émérite en architecture, université Montpellier III. Laboratoire ART Dev UMR 5281 CNRS

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