Du recours à la dendrochronologie dans les études de l’Inventaire général du patrimoine culturel
Résumés
Dix années de dendrochronologie dans l’ancienne région Midi‑Pyrénées ont largement démontré tout l’intérêt d’analyses intégrées aux enquêtes de l’inventaire général, à la condition qu’en soient respectés les protocoles. La possibilité de disposer de datations précises des bois modifie les méthodes et les problématiques de recherche de l’historien, mais l’enrichissement d’une banque de données régionale publique de dendrochronologie devrait tout autant intéresser les climatologues.
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1Que l’on ne se méprenne pas : il ne s’agit pas de revendiquer pour « l’Inventaire général » une spécificité scientifique, voire de l’ériger en « discipline ». L’Inventaire général du patrimoine culturel a néanmoins des spécificités : des normes nationales définies par le ministère de la culture et de la communication, un système documentaire dont la pérennité est prouvée par plus de 50 ans d’existence, une organisation territoriale régionale (à l’origine en tant que service déconcentré de l’État et depuis 2006 compétence obligatoire des régions) dans laquelle s’inscrivent naturellement les programmes de travail.
La mise en place d’un programme pluriannuel
- 1 Voir par exemple : LEROUX, laure. « Du monument à son histoire : aperçu méthodologique des études c (...)
2Le programme de dendrochronologie lancé en 2004 dans l’ancienne Région Midi‑Pyrénées a été élaboré dans une période de remise en cause ou tout au moins de scepticisme de la part des historiens de l’art vis-à-vis d’une méthode de datation dont les résultats obtenus par des laboratoires différents étaient parfois contradictoires1 sans que le commanditaire soit en mesure de juger de leur fiabilité.
3La vérification ne pouvant être faite que par des dendrochronologues, on a inclus dans le cahier des charges le rendu obligatoire :
-
d’un mémoire donnant, pour chaque édifice ou objet, le plan d’échantillonnage et sa justification, la description de l’emplacement et des caractéristiques de chacun des échantillons, les résultats bruts de chaque analyse, l’interprétation proposée et la justification de la sécurité des résultats pour chaque échantillon et pour l’ensemble ;
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des mesures en fichiers structurés selon le format d’échange défini par le laboratoire de chrono-environnement de Besançon (UMR 6249 CNRS-UFC).
- 2 Dans un délai de deux ans après la fin de la mission afin de réserver aux auteurs la primeur de l’u (...)
4Mémoires et fichiers de données sont la propriété de la Région, et la commande prévoit leur publication, effectivement réalisée par leur mise en ligne sur le site internet de la Région dédié au patrimoine. Les données brutes sont ainsi accessibles à tous les laboratoires de dendrochronologie2 et leur analyse vérifiable.
5Leur indexation dans le système documentaire de l’Inventaire général fournit le cadre de leur gestion, facilitant en particulier d’éventuelles reprises d’analyse d’échantillons non datés, tout en permettant la confrontation permanente des résultats de la dendrochronologie avec les avancées de la connaissance des œuvres.
- 3 Un bilan en a été dressé en 2008 : BÉA, Adeline ; GIRARCLOS, Olivier ; SCELLÈS, Maurice et alii. « (...)
6Le programme des premières années3 avait pour objectif prioritaire de constituer la courbe de référence la plus complète possible pour le chêne, la principale essence mise en œuvre dans les constructions du Quercy, où les études réalisées sur l’architecture civile médiévale de cahors fournissaient une première série d’édifices pouvant faire l’objet de prélèvements. L’une des conditions était, et est encore, que l’édifice ait fait l’objet d’une étude aussi complète que possible, ou au moins assez avancée pour que le dendrochronologue dispose d’une documentation suffisante à la préparation de sa campagne de prélèvement, et que les résultats puissent être confrontés à ceux de l’analyse archéologique. Des entorses ont été faites à cette règle quand l’occasion se présentait de collecter des échantillons susceptibles de compléter la courbe, l’édifice faisant cependant toujours l’objet d’une notice d’inventaire, réduite dans ce cas à une fiche minimale.
7Les campagnes s’inscrivent ainsi le plus souvent dans le cadre d’enquêtes topographiques (saint-Antonin dans le Tarn-et-Garonne, Sorèze et Labruguière dans le Tarn) ou thématiques (l’architecture civile médiévale dans le lot et l’Aveyron, les granges du canton de Bretenoux dans le lot, la construction en terre en Pays Midi‑Quercy dans le Tarn‑et‑Garonne), ou dans le cadre d’études permanentes comme celles menées sur les centres anciens de Cahors et de Lectoure. elles peuvent aussi accompagner des opérations ponctuelles, justifiées par l’intérêt particulier d’un groupe d’édifices pour des programmes de recherche à l’échelle de la région (les maisons médiévales de Cordes‑sur‑Ciel dans le Tarn), ou des études monographiques comme celle du château de Fiches (Verniolle dans l’Ariège) où l’analyse archéologique de l’édifice ne permettait pas de préciser la datation d’un plafond au décor peint exceptionnel. seules deux campagnes de dendrochronologie ont répondu à des demandes extérieures, l’une à la Tour des Lautrec de l’ancienne abbaye de Vielmur-sur-Agout (Tarn), en réponse à une demande des archéologues de la société Hadès intervenue après un diagnostic patrimonial réalisé par le service, l’autre au Palais de la Berbie à Albi (Tarn) à la demande du service régional de l’archéologie (DRAC) ; la difficulté peut être alors de récupérer copie des rapports et d’assurer la mise à jour du dossier d’inventaire.
8Le choix des édifices à prélever requiert une formation progressive des chercheurs afin d’assurer la faisabilité de l’opération. Une façade à pan-de-bois n’est pas toujours le meilleur sujet pour le dendrochronologue, et les prélèvements depuis l’extérieur sont souvent difficilement réalisables en raison de la hauteur, des contraintes liées à l’occupation de l’espace public par une nacelle ou un échafaudage, des hourdis qui limitent l’accès aux angles des pièces de bois ; les carottages (fig.1) seront principalement réalisés dans les solives du rez-de-chaussée, ou depuis l’intérieur et ou à la faveur de travaux.
9Les échantillons doivent être en nombre suffisant (au moins cinq bois et cinquante cernes) afin de pouvoir établir des chronologies moyennes pour chaque phase de la construction. Une pièce de bois unique comportant un minimum de cinquante cernes pourra certes être datée, mais ne fournira qu’une indication à interpréter : la date d’abattage, entre 1243 et 1280, obtenue pour le linteau de la porte d’une maison de Saint‑Affrique (Aveyron) est retenue parce que les assises dans lesquelles il s’insère semblent en place et que les caractères constructifs de la maison sont ceux du XIIIe siècle (fig.2).
Fig. 2
Saint-Affrique (Aveyron), maison 30 rue du Théron ; élévation sur la rue
Relevé R. Chabbert, L.-E. Friquart, F. Galés, S. Gerber, L. Krispin, S. Servant © Inventaire général Région Occitanie
10Les poutres peintes sont a priori exclues de l’échantillonnage, sauf à présenter une zone adaptée et dépourvue de décor ou à être accessibles depuis le dessus, et à la condition que les vibrations de la tarière ne mettent pas en péril la couche picturale. Les pièces fortement équarries, et c’est le plus souvent le cas des poutres moulurées, sont rarement retenues pour n’avoir que du bois de cœur qui fera connaître la période de croissance de l’arbre mais pas la date de sa coupe. le chercheur doit apprendre à reconnaître l’aubier et les flaches susceptibles de conserver de l’écorce, à identifier progressivement les essences ou au moins leurs groupes principaux, et à noter les mortaises orphelines ou toute autre marque de remploi sur les bois eux-mêmes en plus de l’observation des éventuelles traces de reprise autour des empochements dans les murs.
11Le cahier des charges de la commande prévoit que la fiabilité des résultats soit qualifiée, mais si le dendrochonologue a une obligation de moyens il n’a pas d’obligation de résultats quant à la datation. Les trois échecs, auxquels il faut ajouter les propositions de datation de faible fiabilité (de classe c), sont pris en compte comme tels, apportant par ailleurs nombre d’informations sur les essences, les conditions de la récolte des bois, leur mise en œuvre…
12À Sorèze et Labruguière, en raison d’une zone climatique particulière, les analyses ont abouti à des chronologies relatives avant d’être calées, dans un second temps, sur une chronologie absolue.
Bilan des années 2004-20144
- 4 Le bilan a été établi à partir des études d’inventaire réalisées par les chercheurs du service conn (...)
13Ce sont quelque quatre-vingt-dix édifices qui ont fait l’objet d’analyses de dendrochronologie au cours des trois campagnes de deux ou trois ans organisées depuis 2004 (fig.3).
Fig. 3
Carte des sites ayant fait l’objet d’analyses de dendrochronologie entre 2004 et 2014
M. Scellès © Inventaire général Région Occitanie
14D’abord centré sur cahors, le programme a été rapidement étendu au sud du Tarn, avec les études alors en cours de Sorèze et Labruguière touchant au piémont septentrional de la Montagne Noire, et ponctuellement à Cordes-sur-Ciel, Graulhet, Montauban, Figeac et Calmont (Aveyron). Les campagnes suivantes sont restées de fait dans des aires géographiques contiguës, avec principalement le lot et le nord de l’Aveyron et, ponctuellement, le Tarn‑et‑Garonne et l’Albigeois, Vielmur‑sur‑Agout dans le sud du Tarn, Saint-Affrique et Brousse le château dans le sud de l’Aveyron… Lectoure, dans le Gers, où neuf édifices étudiés par le service du patrimoine de la Ville ont été datés, demeure pour le moment un site isolé et le plus à l’ouest.
- 5 Nous laissons de côté les quelques cas peu significatifs où ont été rencontrés du peuplier, de l’or (...)
15Malgré l’extension progressive de la zone, les bois d’œuvre analysés sont quasi-exclusivement du chêne, parfois mélangé à du châtaignier5. La courbe cumulée de référence du chêne couvre désormais les années 1031 à 1794, et 1809 à 1893, avec des disparités selon les départements et les zones climatiques. Celle du châtaignier, obtenue sur deux sites de cahors seulement, est limitée aux années 1450‑1548.
16Du pin n’a été rencontré que dans la charpente, restée non datée, de la cathédrale de Montauban, et seuls quatre sites ont livré du sapin, avec une datation de la première moitié du XVIIe siècle obtenue dans un immeuble de la place Nationale à Montauban. La faible représentation des résineux est évidemment due à l’aire géographique concernée par les analyses, que l’on a voulu élargir en saisissant les occasions offertes par les deux édifices montalbanais. Montauban, Toulouse ou encore Mirepoix en Ariège font, on le sait, un large emploi des résineux, mais les programmes d’inventaire qui y sont menés répondent jusqu’à présent à des problématiques ne nécessitant pas les études archéologiques qui pourraient justifier le recours à la dendrochronologie.
- 6 BÉA, A. et alii. Op. cit., 2008, p. 181.
17Depuis le bilan de 20086, aucun édifice antérieur au XIIIe siècle n’est venu s’ajouter au corpus daté par dendrochronologie. Dans le cadre des programmes actuels, seul cahors conserve suffisamment de bâtiments du XIIe siècle, voire du XIe siècle, pour que l’on puisse espérer des avancées dans ce domaine, mais cela dépendra des chantiers où pourra intervenir le service du patrimoine de la Ville.
- 7 BÉA, A. et alii. Op. cit., 2008, p. 180, 185.
18Nous constations en 20087 que le vieillissement d’une trentaine d’années qui avait été proposé pour des édifices habituellement attribués au début du XIVe siècle était confirmé par la dendrochronologie. Nous disposons désormais de vingt-trois datations pour le XIIIe siècle, dont quatre seulement pour la première moitié du siècle, et de trois datations au début du XIVe siècle. Dans la zone prise en compte, la sélection des édifices peut être considérée comme aléatoire puisqu’elle n’est pas raisonnée mais dépend presqu’exclusivement des conditions d’accès aux bâtiments ; elle est cependant encore trop peu nombreuse pour avoir une valeur autre qu’indicative. La seconde moitié du XIIIe siècle apparaît bien comme la période de construction la plus active, dont on s’attendrait cependant à trouver plus nettement l’amorce au cours des décennies précédentes, en particulier en milieu urbain. Au vu des données recueillies, l’arrêt serait brutal et surviendrait dès le début du XIVe siècle, vingt à trente ans avant les ravages de la peste noire et de la guerre de cent Ans. Les quatre datations tardives obtenues à Lectoure : 1292‑1300, 1289‑1327, 1311 et 1330, sont peut-être dues au hasard des sélections, mais elles pourraient aussi signaler un contexte particulier, celui de la ville elle-même ou plus largement celui du Lectourois. La découverte la plus originale a été due à l’identification d’une cloison en pan de bois datée des années 1265‑1270 à Saint‑Antonin‑Noble‑Val ; les éclisses soigneusement taillées sont séparées par des cales engagées dans les rainures des poteaux et la porte est couverte d’un linteau délardé en arc segmentaire.
19La reconstruction de l’après-guerre de cent Ans n’apparaît pas avant 1434, et encore s’agit‑il, à Capdenac (Lot), du réaménagement d’une maison du XIIIe siècle. Or nous savons par les textes que le repeuplement du Quercy est amorcé dès les années 1420 : le retard enregistré par la dendrochronologie tient probablement à une sélection qui a privilégié les maisons de bourg, et pour les élévations en pan de bois des formes suffisamment caractérisées. Le programme d’étude de l’architecture rurale des XVe‑XVIIe siècles qui pourrait être retenu dans le lot permettrait sans doute d’infirmer, ou de confirmer, ce qui semble être une distorsion, et de situer la réflexion dans la longue durée. la trentaine de dates obtenues pour le XVe siècle, dont quatre seulement pour la première moitié, est néanmoins significative d’une période de réparations, de modernisations et reconstructions nombreuses, qui se prolonge dans les premières décennies du XVIe siècle (avec dix‑neuf résultats quand la seconde moitié du siècle n’en compte que sept), manifestation de l’enrichissement au cours des décennies précédentes et de la reprise démographique.
Fig. 5
Calmont (Aveyron). Maison, détail de la cheminée du premier étage
© Inventaire général Région Occitanie
Fig. 6
Calmont (Aveyron). Maison ; extrémités moulurées des solives de l’encorbellement du premier étage
© Inventaire général Région Occitanie
- 8 Appellation, empruntée à l’anglais, d’un type de charpente à arbalétriers courbes.
20Les deux maisons de Calmont en Aveyron (fig.4-6), datées des années 1440, maintiennent des modénatures gothiques et des structures de pan de bois que l’on était tenté de dater du XIVe siècle, tandis que les formes de la cheminée conservée sont bien celles que l’on attend pour le XVe siècle. L’étude des maisons de Sorèze avait déjà montré la persistance des modénatures du siècle précédent sur les extrémités des Solives jusqu’à la fin du XVe siècle, tandis que les structures à grille et petites croix de Saint-André n’étaient pas antérieures au début du XVIe siècle. Le corpus du XVe siècle s’est accru de deux granges à cruks8, l’une de 1465 et l’autre comprenant des fermes courbes de 1487‑1503 (fig.7), exemples d’un type de construction jusqu’alors inconnu en France pour cette période alors que l’Angleterre en conserve du XIVe siècle. La date de 1536 a été proposée pour une troisième grange à cruks, mais sous réserve.
Fig. 7
Cours (Lot), grange à cruks. Schéma de répartition des bois datés par dendrochronologie
É. Cassan, © Département du Lot / Inventaire général Région Occitanie
- 9 Calviac, le Theil (non daté) ; Cours, Saint-Michel (1487-1503, 1713, 1730) ; Floirac, La Martinie s (...)
21Ce sont en tout sept granges du lot9 qui ont été retenues pour servir de premiers points de repère, dont une grange-étable « en superposition » qui a été datée du XVIe siècle mais qui a probablement été entièrement remontée au XVIIe siècle voire plus tard. Le programme s’intéressait plus particulièrement aux charpentes à crucks dont l’exemplaire le plus récent a été daté de 1739.
22Les XVIIe-XIXe siècles ont été les parents pauvres des trois programmes successifs. Les datations ont été obtenues dans le cadre de programmes diachroniques (les maisons à pan de bois de Sorèze et Labruguière, les granges du lot) ou d’études ponctuelles pour six d’entre elles. À Rodez, il s’agissait de dire si l’hôpital général fondé en 1676 par une ordonnance royale avait conservé des charpentes d’origine en dépit des importantes campagnes de travaux des années 1870, ce qui a été prouvé pour deux de ses pavillons dont les bois ont été collectés en 1684‑1687. Le bâtiment le plus récent est un modeste logis de ferme, à Lapenche en Tarn‑et‑Garonne, inclus dans une étude des constructions en terre en Pays Midi-Quercy (fig.8). La dendrochronologie a permis de vérifier que la date de 1791 inscrite sur le linteau de la porte était bien celle de la construction et d’une timide introduction de l’adobe, et que la cloison à hourdis de terre ne résultait pas d’un réaménagement.
S. Ruefly © P.E.T.R. Midi-Quercy / Inventaire général Région Occitanie
23Le bilan de dix années de dendrochronologie ne se limite pas aux seuls résultats obtenus, dont nous venons de donner un aperçu très sommaire et volontairement limité aux datations. Pour la plus grande partie du corpus qui constitue le champ de l’Inventaire général, la dendrochronologie apporte des datations à l’année près quand les arguments constructifs et stylistiques autorisent au mieux une précision au quart de siècle. Le recours aux sciences exactes devrait progressivement modifier profondément les méthodes de travail en libérant les chercheurs de l’obsession de datation qui est souvent la leur, au profit d’une plus grande attention à la diffusion et la pérennité des formes. Cela suppose d’associer plus systématiquement des analyses de dendrochronologie aux programmes de travail.
Perspectives
24Outre l’objectif de la datation, atteint ou non, le travail du dendrochronologue comprend nombre d’observations qui vont de l’identification des essences à celle des milieux de croissance des arbres, de la collecte des bois à leur mise en œuvre. les sections des bois, les modes de débitage, les traces d’outils, les marques d’assemblage qui contribuent à l’établissement du plan d’échantillonnage sont autant d’informations sur les savoir‑faire et leurs évolutions ; les durées de stockage avant mise en œuvre, les marques de flottage ou la détermination de la saison d’abattage des arbres nous parlent de l’économie du bois… le modeste logis rural de Lapenche révèle ainsi une collecte de proximité opportuniste associée à des bois de remploi, dont il faudrait pouvoir apprécier la représentativité.
25Les quelques éléments de synthèse proposés en 2008 (des coupes faites en dehors de l’automne et de l’hiver qui apparaissent au XVIe siècle, par exemple) devront être repris lorsque l’on disposera de séries suffisamment nombreuses, dans le temps et dans l’espace, pour commencer à avoir une valeur statistique.
26Au vu des résultats obtenus, l’important travail déjà réalisé sur la thématique de la maison médiévale mérite d’être poursuivi, à la faveur de recensements départementaux et surtout d’études monographiques d’édifices‑clefs d’une part, et d’études de sites d’autre part ; il conviendrait sans doute d’y adjoindre des analyses des charpentes des édifices religieux (des églises paroissiales propriétés communales en particulier), en fait très mal connues.
27Nos connaissances sur l’architecture rurale, encore trop souvent envisagée du seul point de vue typologique, gagneraient à être renouvelées par des analyses à même de préciser la chronologie des bâtiments et de leurs évolutions. Le recours à la datation par dendrochronologie est d’autant plus nécessaire que les sources sont rares et que les formes perdurent.
28Si la réalisation d’un corpus d’édifices de référence bien datés restera longtemps encore un objectif majeur, elle ne doit pas empêcher le recours à des datations systématiques de séries ou d’ensemble dans le cadre d’enquêtes thématiques ou topographiques. En milieu urbain, lorsqu’existe un service chargé de l’étude du patrimoine, des problématiques d’ensemble sont probablement à construire et des modalités particulières à mettre en œuvre, en procédant, par exemple, à la constitution d’une banque d’échantillons prélevés lors des chantiers de rénovation et dûment documentés, dans l’attente d’un traitement par le dendrochronologue.
29Pour le mobilier religieux ou civil, qu’il faudrait pouvoir intégrer aux prochaines campagnes, les prélèvements de bois devront être effectués en parfaite relation avec les ateliers de restauration et pour les objets protégés au titre des Monuments historiques avec les conservateurs des Antiquités et Objets d’Art en charge de la maîtrise d’ouvrage.
30Ce sont donc des programmes inscrits dans la longue durée qu’il faut pouvoir mettre en place, à l’échelle désormais des treize départements de la Région Occitanie. L’extension des aires prises en compte par les campagnes de dendrochronologie devrait permettre de mieux rendre compte de la diversité des territoires, dans leurs composantes géographiques et historiques, et d’en apprécier mieux les spécificités et les variations au cours des grandes phases de l’histoire régionale et nationale.
31Si dans le cadre de l’Inventaire général, les données archivées concernent en priorité l’histoire du patrimoine culturel, l’enrichissement d’une base de données publique de dendrochronologie sera aussi une contribution non négligeable à une meilleure connaissance de l’évolution du climat et de l’environnement naturel dans notre région.
Notes
1 Voir par exemple : LEROUX, laure. « Du monument à son histoire : aperçu méthodologique des études castrales en France », dans Annales de Janua, Actes des journées d’étude, n° 1, Enjeux de l’historiographie et de la datation des sources, § 21-22.
2 Dans un délai de deux ans après la fin de la mission afin de réserver aux auteurs la primeur de l’utilisation scientifique de leurs études. Les données brutes sont également versées dans la base de données de la Digital collaboratory for cultural Dendrochronology (DCCD).
3 Un bilan en a été dressé en 2008 : BÉA, Adeline ; GIRARCLOS, Olivier ; SCELLÈS, Maurice et alii. « Dendrochronologie en Midi-Pyrénées : bilan du programme 2004-2008 », dans Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. LXVIII (2008), p. 171-203.
4 Le bilan a été établi à partir des études d’inventaire réalisées par les chercheurs du service connaissance du patrimoine de la Région, et des services du patrimoine du P.E.T.R. de Midi‑Quercy (Alexia Aleyrangues, sandrine Ruefly, carole stadnicki), de Rodez agglomération (Diane Joy), du C.A.U.E. du Tarn (Adeline Béa, Sonia servant), de la Ville de Lectoure (Gaëlle Prost), du Département du lot (Julien Hadjadj, Élodie Cassan), avec leur collaboration et celles d’Anne-laure Napoléone et Pierre Garrigou Grand‑champ.
5 Nous laissons de côté les quelques cas peu significatifs où ont été rencontrés du peuplier, de l’orme ou du sapin restés non datés.
6 BÉA, A. et alii. Op. cit., 2008, p. 181.
7 BÉA, A. et alii. Op. cit., 2008, p. 180, 185.
8 Appellation, empruntée à l’anglais, d’un type de charpente à arbalétriers courbes.
9 Calviac, le Theil (non daté) ; Cours, Saint-Michel (1487-1503, 1713, 1730) ; Floirac, La Martinie sud (1465) ; Lacam-d’Ourcet, Courbou (1525, 1544-1579) ; saint-Médard, le Rouergoux, 2 granges (1536, 1719) ; Salviac, Roquebrune (1739, après 1784).
Haut de pageTable des illustrations
Titre | Fig. 1 |
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Légende | Une « carotte » prélevée à la tarière |
Crédits | P. Poitou © Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 48k |
Titre | Fig. 2 |
Légende | Saint-Affrique (Aveyron), maison 30 rue du Théron ; élévation sur la rue |
Crédits | Relevé R. Chabbert, L.-E. Friquart, F. Galés, S. Gerber, L. Krispin, S. Servant © Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 112k |
Titre | Fig. 3 |
Légende | Carte des sites ayant fait l’objet d’analyses de dendrochronologie entre 2004 et 2014 |
Crédits | M. Scellès © Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 284k |
Titre | Fig. 4 |
Légende | Calmont (Aveyron). Maison à élévation en pan de bois |
Crédits | © Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 184k |
Titre | Fig. 5 |
Légende | Calmont (Aveyron). Maison, détail de la cheminée du premier étage |
Crédits | © Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 96k |
Titre | Fig. 6 |
Légende | Calmont (Aveyron). Maison ; extrémités moulurées des solives de l’encorbellement du premier étage |
Crédits | © Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 112k |
Titre | Fig. 7 |
Légende | Cours (Lot), grange à cruks. Schéma de répartition des bois datés par dendrochronologie |
Crédits | É. Cassan, © Département du Lot / Inventaire général Région Occitanie |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 404k |
Titre | Fig. 8 |
Crédits | Lapenche (Tarn-et-Garonne). Logis daté 1791 |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/2520/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 356k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Maurice Scellès, « Du recours à la dendrochronologie dans les études de l’Inventaire général du patrimoine culturel », Patrimoines du Sud [En ligne], 5 | 2017, mis en ligne le 01 mars 2017, consulté le 14 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/2520 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/pds.2520
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