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Rennes-le-Château, entre mystifications et réalités

Rennes-le-Château, between mystifications and realities
Gil Galasso

Résumés

Le mystère de Rennes-le-Château constitue depuis des années un repoussoir pour un historien. Il n’a pas survécu à la vague de falsificateurs des années 1960, suivie par une arrivée massive de sectes, médiums en tous genres, qui ont plongé cette histoire dans un maelstrom ésotérique inextricable. Pourtant, il y a bien un sujet qui mérite d’être traité, celui d’un abbé qui, à la fin du XIXe siècle, sans en avoir les moyens, se lance dans des constructions étonnantes dans un village qui ne compte que quelques habitants. Depuis, des chercheurs passionnés suivent une trace hypothétique, celle d’un secret ou d’un trésor. Ils ne sont pas universitaires et les interprétations hasardeuses qu’ils proposent sont aujourd’hui dénoncées par quelques historiens qui ne font plus l’effort de chercher des éléments concordants à ce qu’ils avancent, malgré des sources avérées. En cette année 2024, nous essayons de faire un état des lieux de la recherche sur ce qui est devenu un mythe.

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Texte intégral

Introduction

  • 1 MATHIEU, 2011.
  • 2 ROUSSE-LACORDAIRE, 2015.

1En ce début du vingt-et-unième siècle, le mystère dit de « Rennes-le-Château » semble définitivement délaissé par les historiens. Ce sujet constitue en effet un véritable repoussoir pour des recherches sérieuses, tant il est tombé dans les méandres de la mystification et de l’ésotérisme. Les quelques universitaires qui se sont penchés sur cette affaire ont aussitôt été rebutés par le microcosme castelrennais, que beaucoup surnomment « l’asile à toit ouvert1 » tant il est assimilé aux illuminés qui mêlent à cette énigme des délires audois de toutes sortes, comme ceux associés au pic Bugarach tant commenté, qui serait le dernier abri pour l’humanité2, situé près du lieu de notre recherche.

  • 3 ROSSINI, 2023.

2À la lecture du livre La pseudo-histoire décodée : l’exemple de Rennes-le-Château, nous remarquons que l’auteur, qui se présente comme historien, considère qu’il n’y a plus de différence entre recherche sérieuse et délire ésotérique dans ce village3.

« L’Atlantide, les mégalithes, les druides, la mythologie chrétienne, les cathares, les Templiers, les sociétés secrètes ou encore les visites d’extraterrestres représentent quelques-uns des thèmes inépuisables de la pseudo-histoire. Un mythe contemporain les réunit tous : l’histoire du trésor de Rennes-le-Château. Soumis à d’étranges métamorphoses, il est devenu un trésor symbolique enveloppé de mystères religieux. Sans cesse, de nouvelles hypothèses surgissent, poussent, s’entrelacent et s’hybrident, formant une forêt presque impénétrable de noms, de dates et de lieux. »

  • 4 LE GOFF, 1988.

3Pourtant, il existe dans le cercle des chercheurs de Rennes-le-Château quelques travaux sérieux, quoiqu’essentiellement réalisés par des historiens amateurs. La recherche non-universitaire n’aurait-elle pas le droit de cité dans la marche de l’histoire ? Avant la tendance à l’hyperspécialisation de l’université, des professeurs renommés ne l’écartaient pas4 et savaient s’appuyer sur des travaux amateurs lorsque cela s’avérait nécessaire.

4Il nous faut définir le terme chercheur dans ce contexte précis. Le chercheur, qui se définit ainsi sans rapport avec l’université, est souvent un historien amateur, passionné par son sujet, parfois équipé d’un détecteur de métaux, avec une bonne connaissance en topographie, et qui collectionne les ouvrages sur l’affaire. Nous le nommerons en utilisant ce qualificatif dans cet article.

  • 5 THUILLIER, 2000.

5L’historien Guy Thuillier5 examine la difficulté de définir un historien « non professionnel » et tente de proposer un classement en trois groupes : dans le premier figure les enseignants et les conservateurs d’archives ou de musée qui travaillent pour le plaisir, en dehors de tout intérêt de carrière (ce qui serait, selon lui, fréquent en province). On retrouve dans le second groupe les retraités – ingénieurs, médecins, administrateurs ou notaires – pourvus de savoir technique, d’une expérience de vie et de temps libre et qui font des recherches pour satisfaire leur passion de l’histoire, généralement dans un domaine qu’ils connaissent bien. Ils savent réunir des matériaux intéressants mais leur interprétation n’est pas toujours judicieuse, souvent due à la forte proximité avec le sujet traité. Le troisième groupe réunit les religieux, les directeurs d’hôpital, les syndicalistes, etc. qui travaillent sur l’histoire de leur congrégation, de leur hôpital, de leur paroisse, de leur syndicat par plaisir, mais souvent le souci du passé est mêlé à d’autres préoccupations, ce qui peut entrainer des travaux qui manquent d’impartialité.

6Les sources que nous avons étudiées sont souvent présentées par ces historiens amateurs. C’est par respect pour ces travaux que nous avons décidé d’écrire cet article.

  • 6 Pierre Plantard (1920-2000), dessinateur de métier, est surtout connu pour avoir longtemps tenté de (...)
  • 7 Philippe de Cherisey (1923-1985) est un comédien, écrivain et humoriste radiophonique. Il est connu (...)

7En nous efforçant d’éliminer tout élément qui aurait pu être manipulé par les nombreux mystificateurs aujourd’hui identifiés, en particulier Pierre Plantard6 et Philippe de Cherisey7, nous allons tenter de réaliser une synthèse des études menées au cours des cinquante dernières années.

  • 8 Ancienne région située au sud de Limoux, dans l’Aude.
  • 9 SèDE DE, 1967.

8En effet, à partir de 1967, une publication va attirer dans le Razès8 une foule de chercheurs hétéroclites. L’Or de Rennes par Gérard de Sède9 présente, sous forme romancée, une supercherie que Pierre Plantard a patiemment élaborée, à partir de documents authentiques, un peu comme Dan Brown le fera plus tard dans son Da Vinci Code. Nous proposons donc, à partir de cette année-là, d’écarter toutes les pièces manipulées (ou créées) en les considérant comme des fausses.

9Cependant, certaines pièces existaient avant cette grande mystification et nous allons nous concentrer sur celles-ci. De plus, d’autres pièces ont été en possession du duo mentionné sans qu’ils en comprennent l’essence, et nous les conservons également.

10La question d’origine est liée à l’énigme des gains de l’abbé : comment un curé de campagne de la fin du XIXe siècle affecté dans un village pauvre avec une église menaçant ruine, a-t-il pu faire rénover son église à grands frais, acheter un domaine correspondant à la moitié de la surface du village, faire construire une villa de style néo-gothique, d’autres édifices et jardins, dont une tour et une orangerie ? Comment a-t-il pu fréquemment recevoir de nombreux invités et mener un grand train de vie, pour finalement mourir dans le dénuement ?

  • 10 BANON, 2011.

11Plutôt que nous concentrer sur le village de Rennes-le-Château, nous préférons parler de mystère du Razès. En effet, il existe plusieurs théories qui s’écartent du village en question. Lors de nos recherches, nous avons pu identifier deux communautés qui s’opposent, parfois de manière très virulente, pour répondre à cette question originelle. Nous pourrions les définir par le groupe des « concordistes » contre celui des « négationnistes » par analogie avec les travaux de David Banon10.

Les concordistes

12Le groupe des concordistes vise à maintenir une concordance entre les découvertes de l’abbé Saunière ou d’autres abbés locaux, ses constructions et rénovations, et la découverte d’un fabuleux trésor ou d’un grand secret. Afin d’expliquer les incohérences qui ne sont pourtant jamais complètement élucidées de manière satisfaisante, certains mettent en place une méthode de révision permanente de la chronologie des événements. Nous ne nous attacherons ici qu’aux hypothèses les plus débattues.

13Les propositions des concordistes changent constamment et de nombreuses hypothèses sont avancées sans toujours être étayées par des sources fiables. Certaines pistes sont numéraires, avec l’affirmation que l’abbé Saunière ou un groupe d’abbés ont découvert un trésor.

  • 11 CéSARéE, 2015.

14Dès les années 1960, on cherche le trésor des Wisigoths du roi Alaric II, qui aurait été dissimulé dans le Razès pour éviter le siège des armées franques de Carcassonne en 508, et qui aurait inclus une partie du trésor du sac de Rome (410)11. Cependant, la découverte du trésor de Guarraza, qui a eu lieu près de Tolède entre 1858 et 1861, semble être liée géographiquement à un ou plusieurs endroits choisis par les derniers Wisigoths pour conserver leur trésor à proximité plutôt que dans une marche proche du territoire franc.

  • 12 BESSE, 1660.
  • 13 Louis Fedié est un notable audois de la fin du XIXe siècle, originaire de Couiza, village voisin de (...)
  • 14 FEDIé, 1880.

15L’évêché de Carcassonne aurait connu une cache, située près de Rennes-le-Château (Redae) dès le VIe siècle12, utilisée dans les périodes troubles. L’évêque Sergius se serait retiré dans le village pour fuir l’arrivée des troupes wisigothes dirigées par le roi Leovigild (530-586). Plus tard, selon Louis Fedié13, ce même roi en aurait fait une place forte14.

16En outre, le trésor des templiers est mentionné car une propriété de cet ordre se situerait à proximité de Rennes-le-Château (le Bezu), qui abriterait le trésor de Jérusalem, caché lors de la révolte de l’an 66, qui aurait été découvert sous le mont du Temple (lieu qui est maintenant la position de la mosquée Al-Aqsa) par quelques chevaliers qui prennent le nom de l’endroit en 1099.

  • 15 MAS-LATRIE, 1856.
  • 16 VERDON, 2019, p. 123-134.

17Cependant, suite à la chute de Saint-Jean-d’Acre, les templiers ont quitté la ville pour Chypre15 avec leurs biens et reliques. Le grand maître de l’ordre du Temple, Robert de Sablé, acquiert l’île appartenant alors à Richard Cœur de Lion pour un montant de 2 500 marcs d’argent. Les Templiers revendent ensuite l’île à Guy de Lusignan qui devient roi de Chypre. Lorsque l’ordre est dissous, les biens de ses membres sont transférés aux hospitaliers de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem16, à moins que quelques reliquats ne soient dissimulés dans des commanderies françaises. Certains templiers sont chassés de France et trouvent refuge en Écosse grâce à l’aide de William de Lamberton, évêque de St Andrew, qui leur accorde sa protection en 1311.

18De plus, une confusion existe entre les ruines du château de Blanchefort, situées à proximité de Rennes-le-Château, et Bertrand de Blanquefort, l’un des grands maîtres du temple (1156). Ce sont deux familles distinctes.

  • 17 DAFFOS, 2005.
  • 18 BAIGENT, LEIGH, LINCOLN, 1982.
  • 19 BROWN, 2003.

19Dans les années 1980, la piste s’écarte de Rennes-le-Château pour se situer plutôt dans la campagne de Rennes-les-Bains. De plus en plus, on parle d’un secret d’église qui aurait été gardé par un groupe de prêtres, y compris l’abbé Saunière17. Selon certains, il aurait reçu des fonds pour ne pas le dévoiler ou, selon d’autres, pour participer à son codage lors de la rénovation de son église et de son domaine. Il y a des références à la tombe de Marie Madeleine ou de Jésus, et des livres populaires voient le jour, comme L’Énigme sacrée18 ou le Da Vinci code19, créant davantage de confusion dans la région.

Les négationnistes

  • 20 BEDU, 1990.
  • 21 ROSSINI, 2023.

20Le groupe des négationnistes apparaît quant à lui dans les années 1980. Jean-Jacques Bedu jette un pavé dans la mare avec son essai : Autopsie d’un mythe20 qui vise à expliquer la fortune soudaine de l’abbé Saunière par le simple trafic de messes. D’autres auteurs adhèrent à cette tendance et s’efforcent de démystifier l’affaire, tel que David Rossoni21, dont l’ouvrage rejette les hypothèses avancées par les chercheurs, mais ne parvient pas à conclure de façon logique et satisfaisante. Nous allons tenter d’expliquer pourquoi dans cet article.

21Nous nous attacherons à ne traiter que les faits qui apparaissent les plus pertinents dans le cadre de la problématique choisie, c’est-à-dire ceux qui pourraient accompagner notre question de départ. Pour cela, nous présenterons des pièces datant d’avant l’arrivée de l’abbé Saunière et d’autres antérieures aux années 1950.

Première partie. Sources écrites, sources orales et premiers chercheurs (1940-1960)

  • 22 BUCHHOLTZER, 2008.

22Assez peu de détails sont connus sur Bérenger Saunière, ce qui est logique. Durant la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, un prêtre de village ne jouit guère d’un grand intérêt. Il n’est donc pas surprenant que les sources relatant ses activités soient plutôt rares. Les carnets de correspondances et les relevés comptables de l’abbé sont conservés dans les archives départementales de l’Aude, couvrant les années où Saunière résidait à Rennes-le-Château de 1896 à 191722.

  • 23 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 217 : testament de Bérenger Saunière.
  • 24 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 218.

23Une autre source pour tenter d’appréhender la personnalité complexe du curé est le « fond Corbu-Captier » : un ensemble de documents, dont des fragments des carnets intimes du prêtre, détenus aujourd’hui par deux habitants de Rennes-le-Château, Antoine Captier, et Claire Corbu, qui ont connu son ancienne servante, Marie Dénarnaud (1868-1953). Entrée au service de l’abbé en 1891, elle fut aussi sa confidente. En avril 191223, Saunière la fait sa légataire universelle (richesses et biens immobiliers). Cependant, dès 1918, elle se trouve démunie, ce qui semble paradoxal lorsqu’on imagine la richesse que l’abbé a acquise. En 1942, elle fait la connaissance de Noël Corbu, un industriel originaire de Perpignan, et conclut un contrat de viager avec lui en 1946. Elle a alors 78 ans. Pendant les 12 ans de liens étroits avec la famille Corbu, elle livre quelques confidences sur la vie et la fortune de l’abbé24. Elle décède à 85 ans.

24Parmi tous les chercheurs de l’avant-guerre (c’est-à-dire avant l’arrivée des mystificateurs), nous nous attacherons à deux personnalités qui semblent faire autorité dans la communauté castelrennaise car leurs écrits sont repris dans de nombreux livres traitant de l’affaire. Ce qui reste essentiellement de Saunière et de ses contemporains se limite aux récits des résidents du village au début du XXe siècle. Certains ont été recueillis par ces deux chercheurs sérieux, qui ont ensuite laissé des travaux écrits et vocaux.

  • 25 DESCADEILLAS, MOLS, 1968.
  • 26 VALLET Michel, Rennes-le-Château. Entretien avec M. René Descadeillas. Carcassonne (1973) URL : htt (...)
  • 27 DESCADEILLAS, 1974.

25René Descadeillas (1909-1986)25 est journaliste, correspondant pour le journal La Dépêche puis bibliothécaire pour la ville de Carcassonne (1949) et enfin conservateur du musée des beaux-arts de la ville en 1964. Il entame ses investigations peu de temps après le début de l’affaire, dans les années 1930, en interviewant la population locale. Bien que certaines personnes aient connu l’abbé Saunière, la plupart n’ont pu témoigner que sur la base des histoires rapportées par leurs parents ou connaissances26. Après les maçons et anciens enfants de chœur, il recueille des témoignages liés à la servante du curé et à ses proches, prétendument témoins de ses découvertes (puisqu’elle accompagnait l’abbé partout). Il propose une version qui, à ce jour, n’a pas été contestée27 : une piste numéraire associée à un trafic de messe. Il écrit : « La région fut toujours pauvre, malgré une légende de trésors enfouis qui défia les siècles ». Il recueille notamment le témoignage d’une famille possédant une boucherie à Quillan, qui affirme avoir été payée par l’abbé Saunière en bijoux très anciens, estimés « wisigothiques ».

  • 28 VALLET Michel, Rennes-le-Château, M. l’abbé M.R. Mazières, « Souvenirs divers », 13 juillet 2019, U (...)
  • 29 VALLET Michel, Rennes-le-Château, M. l’abbé M.R. Mazières, "Souvenirs divers", 14 juillet 2019, URL (...)
  • 30 VALLET Michel, Rennes-le-Château, M. l’abbé M.R. Mazières, « Souvenirs divers », 14 juillet 2019, U (...)

26L’abbé René Mazières (1909-1988) est un prêtre du Razès ordonné en 1935, aumônier à Pezens (Aude), vicaire à Quillan (Aude) puis curé de Villeséquelande (Aude). Il s’intéresse à l’histoire de l’abbé Saunière en même temps que René Descadeillas et recueille lui aussi des témoignages auprès de la population. Il est interviewé en 1979 et son témoignage est publié en ligne en 2019282930. On constate que la méthode de l’entretien semi-directif est utilisée. Il nous semble judicieux de nous intéresser particulièrement aux études menées par un homme d’église familier de cet environnement religieux audois.

27Ainsi, nous proposons en premier lieu d’établir une chronologie probable de la vie de Bérenger Saunière en utilisant ces documents écrits et témoignages.

Seconde partie. Principaux repères de la vie de Bérenger Saunière (1879-1917)

  • 31 Un franc-or vaudrait aujourd’hui entre 4 et 5 euros, son salaire mensuel équivaudrait à 166 euros a (...)

28François-Bérenger Saunière (11 avril 1852-22 janvier 1917) est ordonné prêtre le 7 juin 1879. Il est d’abord vicaire à Alet (Aude) du 16 juillet 1879 à 1882. Entre juin 1882 et 1885, il occupe la charge de prêtre dans le petit village du Clat avant de devenir enseignant au séminaire de Narbonne. Le 1er juin 1885, à 33 ans, il est désigné comme prêtre dans le petit village de Rennes-le-Château, qui compte environ 300 habitants. L’accès au village est difficile car il faut gravir un chemin de trois kilomètres pour atteindre le sommet de la colline. Son église dédiée à Sainte Marie-Madeleine est dans un grand état de délabrement. Il est rémunéré 37 francs-or par mois31. Il rencontre l’abbé Boudet, curé du village de Rennes-les-Bains situé en contrebas de Rennes-le-Château, qui officie à cet endroit depuis 19 ans.

Rénovations et découvertes

  • 32 ANDRIEU, 2019.

29En novembre 1886, Saunière décide de rénover l’église à la fois à l’intérieur et à l’extérieur en suivant les recommandations de l’architecte diocésain Guiraud Cals32. Les premières modifications impliquant la restauration du sol de l’église sont mentionnées dans un document daté du 5 juin 1887. En juillet 1887, Mme Marie Cavailhé, une riche bienfaitrice d’obédience monarchiste, fait don d’un autel neuf d’une valeur de 700 francs. Les travaux sont réalisés par un entrepreneur-cafetier de Luc-sur-Aude : élie Bot.

  • 33 Le pilier et sa cavité sont visibles au musée de Rennes-le-Château.
  • 34 Traditionnellement, on déposait des reliques ou autres objets précieux dans des cavités cachées dan (...)
  • 35 Le carillonneur est le grand-père de l’Antoine Captier actuel, il racontait en famille que c’était (...)

30Trois événements sont rapportés par des témoins oculaires pendant la rénovation. Lors du déplacement du maître autel, les ouvriers remarquent un creux dans le pilier wisigothique le soutenant33. Saunière y aurait trouvé des tubes de bois34 contenant des documents. Quelques jours plus tard, au moment de dégager complètement les piliers de l’autel, Saunière découvre une cavité contre un mur, dans laquelle il extrait un récipient contenant des pièces d’or et des bijoux, selon les témoignages des ouvriers présents. Le prêtre minimise la découverte en leur expliquant qu’il s’agit de médailles sans valeur. Peu après, la chaire qui date du XVIIe siècle est également restaurée. Le carillonneur Antoine Captier35 déclare avoir trouvé une petite fiole en verre contenant un document dans une colonne en bois et l’avoir remise à l’abbé Saunière.

  • 36 Témoignage recueilli par l’abbé Mazières.

31En septembre 1891, les ouvriers descellent les pavés du sol de l’église pour poser un carrelage. Ils découvrent une dalle dans le sol. Le lendemain36, dimanche 20 septembre, l’abbé fait appel à Alphonse Rousset, un enfant de 10 ans, ainsi qu’à d’autres enfants de cœur. Il sollicite leur aide pour déplacer cette dalle qui se trouve en face de l’autel de l’église, elle sera baptisée « dalle des chevaliers ». Les enfants remarquent des marches d’escalier sous la dalle. L’abbé Saunière leur demande de garder le silence. La dalle retirée est ensuite placée face au ciel dans le jardin du domaine et y reste plusieurs années, elle est actuellement exposée au musée du village. Malgré sa détérioration, il est démontré qu’elle remonte à l’époque carolingienne.

Découverte probable d’une crypte sous l’église

  • 37 Extrait du registre paroissial de l’église (an 1705). « Dame Anne Delsol, âgée d’environ septante-c (...)

32Il est probable que Saunière découvre alors une crypte sous l’église, comme il en existait dans la majeure partie des églises carolingiennes, dans lesquelles étaient placés des tombeaux. L’existence d’une pièce souterraine est attestée par le registre paroissial des baptêmes, mariages et mortuaires des années 1694 à 1726 (fond Corbu-Captier)37, mais la crypte supposée est-elle le tombeau des seigneurs cité dans l’extrait ? Les chercheurs sont divisés sur la question, certains pensent qu’il se trouve ailleurs et communique avec la crypte par un souterrain.

  • 38 SAUSSEZ, 2022.
  • 39 Petite chapelle secondaire s’ouvrant sur l’abside.
  • 40 Directions régionales des affaires culturelles (ministère de la Culture).

33Jacques Cholet est l’un des rares chercheurs à avoir reçu la permission de mener des fouilles dans l’église de Rennes-le-Château entre 1959 et 1965. Son rapport est détenu par un huissier de Limoux, maître André Gastou, qui a été un témoin oculaire desdites fouilles38. Cholet décarrelle toute l’église, remarque un escalier sous la chaire « qui se dirige vers le cimetière » et trouve un arc de décharge situé au bas du mur dans l’absidiole39 située contre la sacristie, suggérant une possible pièce souterraine. Enfin, sous le plancher de la sacristie, Cholet découvre l’ouverture d’un escalier se dirigeant vers le sud. Ce sera la dernière fouille autorisée, la DRAC40 écartant systématiquement toute demande postérieure, tant les dossiers sont nombreux et plus ou moins sérieux.

  • 41 Professeur de religions du Moyen-Orient, d’archéologie et de droit islamique et directeur de l’Inst (...)
  • 42 Archéologue, Université de Macerata, département d’archéologie et d’histoire Antique, Italie.
  • 43 Professeur de géographie et d’anthropologie à l’UW-Eau Claire. Consultant en technologie des radars (...)
  • 44 SAUSSEZ, 2022, p. 66.

34Cependant, en 2002, une autorisation partielle est accordée à une équipe d’archéologues composée de Robert Eisenman41, Andrea Barattolo42, Harry Jol43, Marinella Nagri représentant l’éditeur Tuvia Fogel, et d’un opérateur géoradar : Ryan Du Chaine. En septembre 200344, leur rapport est présenté lors du colloque annuel de la Wisconsin Geographical Society. Ils démontrent qu’il y a effectivement une structure intérieure dans le sol de l’église, ce qui implique probablement une crypte funéraire. Cependant, la DRAC décide de ne pas se saisir du dossier présenté par Barattolo à la suite de ces recherches.

  • 45 Collectif, Arkeos, Mesures radar de subsurface dans une église du sud-ouest de la France, rapport, (...)

35À partir des données issues de ces travaux, le chercheur Paul Saussez demande une expertise par une société spécialisée belge : la présence d’une cavité située trois mètres sous le chœur de l’église est confirmée45.

  • 46 Sur l’emplacement des locaux techniques de l’actuelle mairie de Rennes.
  • 47 Un litre est une décoration funéraire sous la forme d’une bande noire portant le blason du noble dé (...)

36Aujourd’hui, la présence d’une crypte sous l’église de Rennes-le-Château n’est plus contestée, tout simplement parce que le bâtiment était à l’origine la chapelle castrale des seigneurs de Rennes et non l’église qui était située à un autre endroit46. Sa fonction était entre autres de recevoir les corps des seigneurs défunts. La seule présence d’un litre47, visible encore aujourd’hui à l’extérieur de l’église, le prouve.

Des dépenses importantes et un curé contesté

  • 48 Les Cercles Catholiques sont des cellules de propagande royalistes dont le but est le rétablissemen (...)
  • 49 GIORDANENGO, LEVILLAIN 1983, p. 168-170.
  • 50 FAVATIER, 1901.
  • 51 C’est la somme indiquée dans les carnets de Saunière (fond Captier-Corbu).

37L’abbé Saunière est suspendu par le ministère français des cultes pour avoir prononcé des sermons hostiles aux républicains depuis sa chaire lors des élections d’octobre 1885. Entre le 1er décembre 1885 et le mois de juillet 1886, il reprend l’enseignement au séminaire de Narbonne. Cependant, comme il n’est pas remplacé, les villageois demandent son retour. Saunière est réintégré par le préfet de l’Aude avec l’appui de son évêque Mgr. Billard mais sa prise de position politique est remarquée par le Cercle Catholique de Narbonne48 pro-royaliste49, qui compte parmi ses membres son frère Alfred Saunière50. À cette époque, l’abbé reçoit un don de 1 000 francs-or51 de la veuve du Comte de Chambord (prétendant au trône en cas de victoire des royalistes aux élections de 1885). Or, lors du procès intenté par son évêque, il présente des comptes gonflant cette somme à hauteur de 3 000 francs. Pourquoi cette falsification par l’abbé lui-même ? Certains avancent que ces fausses écritures lui permettent de dissimuler une source de revenus occulte.

38En 1890, la servante de l’abbé Saunière, Marie Dénarnaud, déménage avec sa famille au presbytère de Rennes-le-Château et vit avec lui.

  • 52 Musée Régional de la Narbonne Antique (MuRéNA).

39Le 21 juin 1891 a lieu la bénédiction de la statue de Notre-Dame de Lourdes à l’extérieur de l’église, commémorant la première communion des 24 enfants de la paroisse. Un prêche est effectué par le Révérend Père Ferrafiat, missionnaire diocésain, de la famille de Saint Vincent de Paul, qui réside à Notre-Dame de Marceille (église située à Limoux). Comme des témoins locaux l’attestent, la statue repose sur un pilier très ancien qui était auparavant le socle de l’autel, qui porte les inscriptions Mission 1891 et Pénitence ! Pénitence ! Cet élément du haut Moyen-Âge, au décor sculpté, est un vestige indiquant l’ancienneté de l’église. Un pilier similaire à celui-ci est exposé au musée de Narbonne52.

40En juillet 1891, Saunière crée un carnet de messes (fond Corbu-Captier) qui contient les demandes de messes qu’il s’engage à célébrer. En septembre 1893, il rédige une note "arrêté là" qui est interprétée par les chercheurs comme la fin de la célébration réelle des messes et qui marque le commencement d’un trafic de messes non honorées qui persistera pendant sept ans, jusqu’en janvier 1898.

41Saunière écrit dans un de ses carnets personnels (fond Corbu-Captier) :

  • 21 septembre 1891 : « Excavé une tombe, lettre de Granes - découverte d’un tombeau, le soir pluie »

  • 29 septembre 1891 : « Vu curé de Névian - chez Gélis - Chez Carrière - vu Cros et Secret »

42Nous précisons que le dénommé Gélis est un prêtre et Cros le vicaire général de Carcassonne. Certains pensent que Cros serait venu accompagné de son secrétaire particulier, d’où l’utilisation du diminutif secret.

  • 53 Procès-verbal de délibération du conseil municipal (29 mars 1891).

43Au début de l’année 1891, Saunière demande à la mairie l’autorisation de clôturer la place devant l’église, située dans le domaine public « afin d’y élever des monuments religieux mais non couverts, tels que missions ou croix et d’établir un parterre ». Le conseil municipal donne son accord sous la condition « …que toutes les portes qui ferment les entrées soient pourvues de clefs, … et que la place soit ouverte les dimanches et jours fériés, jours de fête… du lever au coucher du soleil53 ». Fin 1891, Saunière en profite pour faire aménager une pièce « secrète » dissimulée derrière une bibliothèque dans la sacristie. Elle est construite sur quelques mètres à l’extérieur de l’église et permet de se situer juste au-dessus de l’escalier qui sera retrouvé plus tard par Cholet.

44À partir de 1893, certains habitants témoignent avoir vu le prêtre et sa servante, la nuit, se rendre dans le cimetière et manipuler des tombes. Saunière entreprend des travaux qui ne sont pas conformes aux instructions de la mairie. Malgré sa promesse de ne rien construire de couvert dans le jardin devant l’église, il demande à l’entrepreneur de creuser un trou important à proximité de l’entrée du cimetière. Il explique qu’il souhaite mettre en place une citerne souterraine pour collecter l’eau de pluie. La démarche est surprenante car Rennes-le-Château dispose d’un puits à proximité qui fournit toujours de l’eau. Ensuite, il ordonne la construction d’une petite maison en pierre au-dessus du puits, ce qui suscite l’indignation du conseil municipal.

  • 54 « Nous avons l’honneur de vous prévenir qu’à l’accord du Conseil Municipal de Rennes-le-Château à l (...)

45Pendant l’année 1895, des conflits avec la population locale se produisent, entraînant des plaintes formulées à la mairie par des habitants à partir du mois de mars. Selon eux, le prêtre et sa servante ont effectué des fouilles nocturnes dans le cimetière. Le 14 juillet 1895, un fait jette définitivement le trouble sur les activités du prêtre. Un incendie se déclare dans le village et les pompiers sollicitent l’accès à la citerne mais Saunière refuse catégoriquement. Le maire (Pierre Sauzède) doit intervenir afin que les pompiers puissent forcer la porte de la maisonnette. Saunière dépose une plainte auprès de la gendarmerie pour « violation de domicile ». Le 10 mars, lors d’une réunion des résidents, une plainte supplémentaire est présentée au maire pour dénoncer les agissements de Saunière dans le cimetière54.

46En novembre 1896, l’abbé charge la célèbre fabrique Giscard de Toulouse (maison fondée en 1855) de décorer son église avec des statues de saints, un chemin de croix (pour 600 francs), des fonts baptismaux avec des statues de Jean baptisant Jésus, un bas-relief de Jésus prononçant le Sermon sur la Montagne placé au-dessus du confessionnal et une figure de diable soutenant un bénitier surmonté d’anges faisant le signe de croix, portant les inscriptions BS et « Par Ce Signe Tu Le Vaincras ».

  • 55 Il existe des controverses sur la position du diable et le geste qu’il semble effectuer de la main (...)

47Tous ces objets ont été choisis par Saunière dans le catalogue de la société Giscard à l’exception de quelques-uns qui sont des demandes particulières : le diable soutenant le bénitier55, les anges qui le surmontent et la statuaire destinée à réaliser une composition décorant une grande fresque. Ni l’édition de 1896 du catalogue Giscard, ni les catalogues ultérieurs ne comprennent ces pièces uniques. Seule la tête du diable ressemble à celle d’une statue du catalogue (le dragon vaincu par Saint-Michel). Nous reviendrons sur le sujet de la décoration de l’église plus tard dans cet article.

48Le montant total de la facture Giscard s’élève à 2 500 francs, versé par Saunière par tranches annuelles de 500 francs à partir de fin décembre 1897.

49Cette même année, les communes voisines de Rennes et les Bains-de-Rennes, sont renommées respectivement Rennes-le-Château et Rennes-les-Bains.

50À partir de 1897, de nouveaux vitraux sont commandés pour l’église, pour un coût de 1 350 francs, et installés en trois temps – avril 1897, avril 1899 et janvier 1900.

51Le prêtre Antoine Gélis de Coustaussa, originaire du village voisin de Rennes-le-Château, est assassiné le 1er novembre 1897. Il semble que la relation entre Boudet, curé de Rennes-le-Château, et Saunière s’arrête à ce moment-là, sans qu’on sache s’il y a ou non un lien de cause à effet direct. D’autres témoins préfèrent penser que le mode de vie de Saunière était choquant pour les autres prêtres de la région et que certains ont décidé de prendre leurs distances avec lui.

  • 56 NADINE-JOSETTE, CHARON, 1987. p. 35-51.

52Selon les livres de comptes de Saunière, la réalisation de la décoration de l’église aurait coûté environ 16 200 francs-or, soit une somme quatre fois supérieure à celle nécessaire pour la décoration d’une seule église, selon certains chercheurs56.

53Suite aux rénovations et décorations, l’église est de nouveau consacrée par son évêque, Monseigneur Billard, le jour de la Pentecôte 1897.

  • 57 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 139 (exemple de facture « La Samaritaine Paris » produite par Claire Corbu (...)

54Au-delà des travaux de restauration de l’église, Saunière achète également des vêtements pour sa servante Marie à partir du catalogue de la Samaritaine à Paris, pour des sommes considérables qui sont hors de prix par rapport au train de vie de la population locale57.

55Entre 1898 et 1905, Saunière engage la construction d’un grand domaine, incluant l’acquisition de plusieurs parcelles communales. Ce domaine comprend une villa de style néo-gothique nommée Bethania, une tour nommée Magdala (qu’il utilisait comme bibliothèque personnelle) reliée à une orangerie par un belvédère ainsi qu’un jardin avec bassin et une cage pour singes – le tout au nom de sa servante Marie Dénarnaud.

L’abbé sanctionné

  • 58 AZENS, 2016.

56La rénovation par Saunière de son église et ses plans de construction ostentatoires58 au sein d’un petit village perché ne passent pas inaperçus et suscitent des réactions hostiles. Plusieurs plaintes sont transmises à l’évêché de Carcassonne, qui avait déjà informé Saunière d’une suspicion de trafic de messes et lui envoie alors deux avertissements écrits en mai 1901, réitérés en juin 1903 et en août 1904.

57En 1902, Mgr. Paul-Félix Beuvain de Beauséjour est désigné comme évêque de Carcassonne et supprime la complaisance dont Saunière bénéficiait de la part de son ancien évêque. En janvier 1909, il prend la décision de déplacer Saunière vers le village de Coustouge. Saunière refuse cette nomination et démissionne le 28 janvier 1909, devenant ainsi prêtre libre. Le 27 mai 1910, Mgr. Beauséjour déclenche une enquête ecclésiastique et établit un acte d’accusation officiel mentionnant trois motifs : la désobéissance à l’évêque, le trafic de messes et les dépenses injustifiées et exagérées auxquelles semblent avoir été consacrées les redevances des messes non dites. Pour répondre à ces accusations, Saunière est tenu d’assister à un procès ecclésiastique.

58Saunière ne se présente pas à la première audience du 16 juillet 1910 ni à la date reportée du 23 juillet où il est condamné par contumace : il encourt un mois de suspension et est condamné à restituer l’argent qu’il a obtenu du supposé trafic de messes. Il ne se présente pas non plus à la deuxième audience du 23 août mais parvient à y assister à la date reportée du 5 novembre 1910. Il est alors condamné « à se retirer dans une maison de retraite sacerdotale ou dans un monastère de son choix pour y entreprendre des exercices spirituels d’une durée de dix jours, pour trafic de messes et pour avoir accepté plus d’argent que ce pour quoi il pouvait dire des messes ». Il effectue sa pénitence au monastère de Prouille.

  • 59 Publié dans La Semaine religieuse de Carcassonne du 3 février 1911 et dans La Croix du 9 février 19 (...)

59Le 17 décembre 1910, Saunière demande vainement à la Sacrée Congrégation du Concile de Rome de le réintégrer comme curé de Rennes-le-Château. La congrégation transmet cette demande à l’évêché de Carcassonne qui adresse en 1911 un avertissement strict à Saunière, lui interdisant de donner les sacrements59.

60Dans une lettre datée du 18 février 1911, l’évêché demande à Saunière de produire ses livres de comptes au plus tard le 2 mars. Une commission d’enquête est créée pour examiner en détail les activités financières de Saunière. Le 13 mars 1911, Saunière présente 61 factures relatives à la rénovation de son église et à la construction de son domaine, qui s’élèvent au total à 36 250 francs.

  • 60 Sur 24 ans de ministère à Rennes-le-Château, Saunière déclare avoir dépensé 193 000 francs or et av (...)
  • 61 HUGUET, 2003.

61Le 25 mars 1911, Saunière adresse à l’évêché une lettre d’explication expliquant l’origine de ses finances60 depuis qu’il est devenu curé de Rennes-le-Château, ainsi que la liste des donateurs, pour un montant total de 193 150 francs61 (montant exagéré). Dans une correspondance datant du 14 juillet 1911, Saunière présente un état des dépenses nécessaires à la rénovation de son église et à la construction de son domaine, estimant un coût total de 193 050 francs (toujours exagéré), en précisant que la Villa Béthania avait coûté 90 000 francs et que la Tour Magdala avait coûté 40 000 francs. Le prêtre, en falsifiant ses comptes, prouve ainsi, malgré lui, qu’il reçoit des sommes d’argent d’une autre source.

62Le 4 octobre, la commission d’enquête déclare que Saunière n’a dépensé que quelque 36 000 francs sur les 193 150 francs qu’il prétend avoir dépensés. Elle note également que Saunière a refusé de coopérer à l’enquête. Il est nécessaire d’organiser une audience supplémentaire où Saunière devra présenter ses comptes pour inspection par l’évêché.

63Le 21 novembre 1911, Saunière ne se présente pas à la troisième audience et est condamné par contumace à trois mois de sursis le 5 décembre 1911. Bien que la suspension de Saunière soit temporaire, sa réintégration dépend de la décision ecclésiastique selon laquelle il doit « entreprendre la restitution entre les mains du propriétaire légitime et selon le droit canonique des biens détournés par lui », ce que le prêtre ne peut pas accomplir.

64Après le procès ecclésiastique, Saunière vit le reste de sa vie dans la pauvreté, vendant des médailles religieuses et des chapelets aux soldats blessés stationnés à Campagne-les-Bains (Aude) pendant les conflits de la Première Guerre mondiale. Saunière vend également des messes et les sommes gagnées sont utilisées pour son appel au Vatican sur lequel travaille son avocat, l’abbé Jean-Eugène Huguet, docteur en droit canonique. En mai 1914, Saunière envisage de construire une maison d’été mais abandonne le projet car il ne peut pas se permettre de dépenser les 2 500 francs requis.

  • 62 Par exemple, le boulanger Camredon réclame avec insistance deux factures impayées pour le pain livr (...)
  • 63 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 282.
  • 64 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 153 (par exemple 1 081 francs lui sont réclamés par le trésor public en 19 (...)
  • 65 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 77 (note du percepteur réclamant à Marie le loyer impayé de 1919).

65Saunière meurt le 22 janvier 1917. L’abbé Jean Rivière lève sa suspension au moment de son décès (in articulo mortis). Marie Dénarnaud est laissée seule et sans ressources62 car elle ne parvient pas à récupérer les titres bons au porteur qui sont dispersés dans les huit ou dix banques dans lesquelles l’abbé a un compte, dont certaines sont situées à l’étranger. Des témoignages d’échanges entre la servante du prêtre et Paul Lambrigot63, un antiquaire renommé de Carcassonne qui se procure discrètement des objets anciens, sont conservés dans le fond Corbu-Captier. Malgré cela, elle rencontre des difficultés importantes pour payer ses impôts fonciers64 et le loyer du presbytère qui appartient à la mairie65. Elle est obligée d’hypothéquer le terrain.

  • 66 Lettre de l’abbé Grassaud à Marie Dénarnaud (fond Corbu Captier) : « …Demandez 200 000 francs sauf (...)

66Le 10 mai 1918, l’abbé Grassaud conseille Marie Dénarnaud sur le prix de vente du domaine, qu’il évalue à 200 000 francs66. Cependant, malgré l’intérêt de certains acheteurs, le domaine ne trouvera pas d’acquéreur pendant plusieurs années, Marie n’allant pas jusqu’au terme de plusieurs promesses de vente.

Interprétations de la vie de l’abbé Saunière

67Ainsi, en fonction des groupes de pensée mentionnés précédemment, il existe plusieurs interprétations possibles de la vie de Saunière. Le trafic de messes et la découverte d’un petit trésor dans la crypte de l’église de Rennes-le-Château sont admis par tous. Le véritable sujet de la discorde porte essentiellement sur le rapport entre les sommes reçues par le trafic de messes et les sommes dépensées par Saunière. Selon les négationnistes, le trafic était si important qu’il a couvert les frais de Saunière tout au long des travaux de l’église puis du domaine. Selon René Descadeillas, il obtient 24 973 francs en 1897 (dont la valeur actuelle est 112 378 euros) et 75 569 francs en 1899 où le trafic est au sommet (valeur actuelle 340 060 euros), ce qui représente des sommes importantes à l’époque.

  • 67 BUCHHOLTZER, 2008.

68On tente alors d’expliquer la paupérisation de la fin de vie de Saunière par le procès intenté par l’évêché qui l’empêche de continuer à s’enrichir via le trafic de messes67.

  • 68 DAFFOS, 2009.

69Les concordistes ne nient pas le trafic de messe mais le minimisent ou le justifient68. Certains estiment que les frais de Saunière n’auraient pas pu être couverts en totalité par ce trafic et considèrent qu’il a uniquement assuré une vie meilleure à l’abbé. D’autres affirment que le trafic a été organisé par un ensemble d’abbés pour permettre la réalisation des travaux de l’église de Saunière afin qu’elle participe au codage d’un mystère religieux qu’ils ne pouvaient pas révéler au grand jour. D’autres enfin pensent que le trafic de messe devait permettre de subvenir aux besoins d’une congrégation de prêtres pour leurs vieux jours (la villa Bethania étant construite dans le projet de devenir une maison de retraite pour curés).

70Ce groupe de pensée explique les difficultés financières de Saunière à la fin de sa vie par son impossibilité physique à se rendre à l’étranger pour récupérer ses avoirs bancaires.

  • 69 PLANDE, 1938. p. 303-304.

71Après le décès de l’abbé, la rumeur d’un trésor se diffuse dans la région. Un premier texte est publié en 1936 par un médecin de Carcassonne69 qui, lors d’un séjour à Rennes-le-Château, s’étonne du contraste entre le village miséreux et le faste du domaine de l’abbé Saunière. Il y rapporte la rumeur paysanne de la découverte d’un trésor par le curé.

72Les années 1960 voient l’arrivée de nombreux chercheurs dont certains, sans tenter de comprendre l’affaire, recherchent une hypothétique cache au trésor en creusant le sol rocheux à l’aide d’explosifs puissants, de manière plus ou moins aléatoire. Ceci produit plusieurs effets, particulièrement l’interdit de fouilles par arrêté municipal (du 28 juillet 1965) pour la ville de Rennes-le-Château, une première du genre.

Troisième partie. Sources physiques et débats entre chercheurs

Le Bulletin de la Société d’études scientifiques de l’Aude, 1906

  • 70 Collectif, Bulletin de la Société d’études scientifiques de l’Aude, tome XVII, Bonnafous-Thomas (éd (...)

73L’un des documents les plus étudiés dans l’affaire du Razès est un article du bulletin annuel de la SESA70 daté de 1906. Il est donc contemporain de l’abbé Saunière et nous semble incontestable car il a été publié par une organisation à dimension scientifique. Cet article, écrit et signé par un entrepreneur d’Espéraza nommé élie Tisseyre, relate la visite des membres de la société à Rennes-le-Château.

74Le rapport décrit l’église de Rennes-le-Château comme exceptionnelle et ornée de peintures « fraîches et riantes » (l’abbé Saunière n’est pas mentionné). Ensuite, un membre observe une dalle qui sert de marche d’escalier à l’extérieur, qui daterait du Ve siècle. C’est la dalle des chevaliers mise à jour en 1891. Plus tard, le groupe décrit un socle ancien qui supporte une vierge, c’est le pilier médiéval de l’autel remployé comme support de la Vierge lors de la mission 1891. Dans le cimetière, le groupe aperçoit une dalle située dans un coin. Ils indiquent que ses dimensions sont de 1,30 mètre par 0,65 mètre et précisent qu’elle est gravée de manière rudimentaire. Dans la page suivante du rapport, un dessin est censé décrire cette même dalle (fig. 1).

Fig. 1

Fig. 1

Présentation de la stèle de la marquise de Blanchefort, Bulletin de la SESA 1906.

© BnF, Gallica

75Cependant, il apparaît évident que le dessin ne correspond pas à l’explication du groupe des membres de la SESA. En effet, les dimensions évoquées dans le bulletin devraient correspondent à un long rectangle, c’est-à-dire une dalle destinée à être placée au sol au-dessus d’un cercueil, mais le dessin représente une stèle pentagonale (plaque de pierre funéraire dressée verticalement). De plus, lorsqu’on examine les inscriptions (qui ne sont pas gravées de manière superficielle), on s’étonne d’autant d’incohérences et de maladresses de la part du sculpteur. L’épitaphe, correctement sculptée, devrait indiquer : CI GIT NOBLE MARIE DE NEGRE DABLES DAME DHAUPOUL DE BLANCHEFORT AGEE DE SOIXANTE SEPT ANS DECEDEE LE XVII JANVIER MDCCLXXXI REQUIESCAT IN PACE. Plusieurs études font apparaître que les lettres présentées en miniature forment le mot « épée ». D’autres incohérences forment le mot « mort » (M décalé, O dans un chiffrement romain fictif, R à la place du B dans le mot d’ABLES, T à la place d’un I dans « CT GIT » au lieu de « CI GIT »).

76Les concordistes voient aussitôt le lien avec une autre pièce de l’énigme nommée « Grand parchemin » car le mot Mortepe est la clef de déchiffrement du carré de Vigenère que nous verrons plus loin. Il est étrange qu’aucune recherche sérieuse n’ait été engagée sur cette « épée morte », le choix du mot clef nous semble crucial et devrait donner des indices sur la résolution de l’énigme.

  • 71 DESCADEILLAS, 1960. p. 337-348.

77Il est révélé que la stèle appartient à une noble nommée la marquise Marie de Negres d’Ables d’Hautpoul de Blanchefort, née en 1714 et décédée le 17 janvier 1781 à l’âge de 67 ans71, épouse de François d’Hautpoul, marquis de Blanchefort, qui était le dernier seigneur de Rennes. C’est le prêtre Antoine Bigou (né le 18 avril 1719 à Sournia, Pyrénées Orientales), curé de Rennes-le-Château de 1774 à 1790, qui met en terre la Marquise. Il est l’un des descendants de Jean Bigou, également originaire de Sournia, nommé recteur de la paroisse de Rennes en 1636.

78Pendant la Révolution française, les prêtres qui ne soutiennent pas la jeune république sont condamnés à deux ans de prison et à la perte de leur pension par un décret du 29 novembre 1791. Selon diverses sources, Antoine Bigou choisit de fuir en Espagne, soit à Sabadell, soit à Collioure, qui étaient alors sous le contrôle de l’Espagne, et ne retournera jamais à Rennes-le-Château. Il est possible que Saunière ait découvert des documents, peut-être des valeurs, dissimulées par Antoine Bigou avant sa fuite, un siècle auparavant. François-Pierre Cauneille, le curé voisin de la commune des Bains-de-Rennes depuis 1780, s’exile également et rejoint son évêque à Sabadell.

79Les négationnistes rejettent cette pièce, minimisant le sérieux de la SESA, en arguant du fait que les graveurs de stèles et de dalles du XVIIIe siècle manquaient parfois d’aisance en orthographe, une grande partie de la population ne sachant ni lire ni écrire. Ils produisent des photos de stèles et de dalles de la même époque comportant des anomalies similaires et des fautes d’orthographes grossières.

  • 72 VALLET, 2002, p. 8.

80La dalle de la tombe de la marquise de Blanchefort a-t-elle existé ? Dans le rapport d’un ingénieur du nom de Cros, contemporain de Saunière, est présenté le schéma d’une dalle72 qui serait la véritable pierre tombale de la marquise de Blanchefort et les mesures correspondent à celles relevées par la SESA. Des récits de villageois rapportent que Saunière l’aurait burinée pour effacer des inscriptions gravées dans la pierre. Nous avons toutefois décidé d’écarter ces documents de notre étude car il est possible qu’ils aient été manipulés par l’équipe de Plantard-De Cherisey. En effet, le rapport de Cros évoque entre autres des évènements s’étant déroulés au cours des années 1958 et 1959, qui ne peuvent donc pas être décrits par Ernest Cros, décédé à Paris en 1946.

Le livre de l’abbé Boudet

  • 73 BOUDET 1886.

81Le mystère du Razès est également lié à un livre écrit par un prêtre plus âgé que Saunière et qui est arrivé dans la région bien avant lui, en 1866 : l’abbé Boudet, qui a été curé de la paroisse de Rennes-les-Bains pendant 42 ans, une commune à proximité de Rennes-le-Château. Cet ouvrage, considéré par certains spécialistes comme un livre codé, est intitulé La vraie langue celtique et le Cromleck de Rennes-les-Bains73 (fig. 2). Il est publié en 1886, l’année où Saunière est nommé à Rennes-le-Château. Le livre propose un sujet à priori incohérent, qui voudrait que l’anglais moderne soit la base de toutes les langues anciennes, théorie très étonnante pour un prêtre considéré comme un érudit, titulaire d’une licence d’anglais et membre de la Société des Arts et Sciences de Carcassonne (1888). La communauté des chercheurs s’intéresse au livre de l’abbé Boudet parce qu’ils pensent qu’il contient des explications pour trouver un trésor ou un secret.

Fig. 2

Fig. 2

La Vraie Langue celtique, d’Henri Boudet, frontispice et carte du Cromleck.

© Collection personnelle Gil Galasso

82Boudet repose dans le cimetière d’Axat. Sur sa tombe est scellé un petit livre de pierre, contenant une gravure en grec, « I.X.O.I.Σ », qui pourrait être comprise, lue à l’envers comme un nombre : 310XI. Or, le livre contient 310 pages.

  • 74 Qui consiste à donner un autre sens aux mots prononcés, par des sonorités qui rappellent un autre m (...)

83À la page 11, Boudet nous explique que la clef est la langue sanscrite, comprendre peut-être la langue « sans écrit », dite aussi « langue des oiseaux74 ». Puis, que les langues parlées en France, Irlande et Écosse pourront nous aider à la comprendre. Enfin, dans le second chapitre, il nous parle de « blé », peut-être une allégorie de l’or, et évoque une ancienne mesure de longueur, l’aune (1,18 m) supprimée en 1840. Il n’est pas impossible que la clef du codage soit contenue dans la note de bas de page, qui ne représente aucun intérêt apparent : (1) The advocate, 5 sept. 1885, journal de Melbourne, Australie.

  • 75 « On ne se souvient point des choses qui ont précédé, on ne se souviendra point des choses qui sero (...)

84D’autres chercheurs, interprètent « I.X.O.I.Σ » comme une référence à la Bible : E.C.C.I.11 pour « Ecclésiaste Chap. 1 verset 1175 ».

  • 76 Monument mégalithique formé de menhirs placés en cercle, un des plus connus étant celui de Stonehen (...)
  • 77 Ce menhir est situé près du hameau des Pontils, au nord de Rennes-les-Bains.

85L’autre énigme liée à ce livre, dont l’auteur est très familier avec la région, est qu’il comporte une carte présentant un cromleck76 chimérique ainsi que des menhirs qui n’existent pas dans la nature et des croix gravées représentées en rouge. Il est encore plus surprenant que le seul menhir situé à proximité de la ville de Rennes-les-Bains, le menhir de Peyrolles, n’est pas présent sur la carte77. En fait, si on calque une véritable carte d’état-major de 1880 sous la carte « Boudet » (les chercheurs travaillent avec des documents de l’époque des prêtres), on s’aperçoit qu’il est représenté d’une manière inhabituelle par un point placé à la suite du titre de la carte.

  • 78 Les repères d’imprimerie permettent de caler les couleurs lors d’une édition. Ils sont ensuite syst (...)

86Les incohérences sont multiples : la carte ne comporte pas d’échelle et certaines proportions ne correspondent pas à celles d’une carte d’état-major de l’époque. En outre, des informations topographiques manquent ou sont erronées, certains noms ne correspondent pas aux vrais lieux et certaines altitudes sont fausses. Une tête de démon est dessinée en bas de la carte. Enfin, des repères d’imprimerie ont été conservés lors de l’édition78.

  • 79 SICARD, 1928, p. 370-373.

87Le livre n’est pas bien accueilli par les communautés scientifiques locales de la fin du XIXe siècle79. Beaucoup considèrent qu’il y a trop d’erreurs pour un auteur érudit spécialiste de son univers direct.

88Les concordistes recherchent une corrélation entre le livre et la carte, présumés codés, et la décoration de l’église de Rennes-le-Château. Ils affirment que cette dernière a été codée pour reprendre les éléments du livre et de la carte de Boudet. En effet, les soi-disant commanditaires (une congrégation ou un ensemble de prêtres) auraient déploré la complexité du codage du livre et auraient alors pensé à contrôler la rénovation de l’église de Rennes-le-Château pour faire passer un message. Dans le livre, les chercheurs trouvent également de nombreux liens avec une phrase codée provenant d’un document appelé le Grand parchemin, qui sera étudié ultérieurement dans cet article.

89Beaucoup de théories sont proposées par divers chercheurs. Nous n’en évoquerons que trois dans cet article.

90Le chercheur Jacques Mazières propose une théorie intéressante qui voudrait que les repères d’imprimerie présents sur la carte soient nécessaires à modifier son échelle80 (fig. 3). Il propose d’utiliser le calque d’une carte d’état-major, qu’il place sur la carte Boudet en modifiant son échelle afin que le repère d’imprimerie supérieur soit calé sur le village de Peyrolles et le repère inférieur sur celui de Saint-Louis. Une des croix rouges représentée par Boudet sur sa carte se retrouve alors projetée sur la carte d’état-major et désigne une zone proche du confluent entre la Blanque la Sals.

Fig. 3

Fig. 3
  • 81 Les flèches blanches indiquent le calage d’une carte d’état-major agrandie sur les repères d’imprim (...)

Étude de Jacques Mazières sur la carte Boudet81.

© Gil Galasso

  • 82 JUDE, 2017.

91D’autres chercheurs pensent que la carte « Boudet » doit être superposée au tableau de Nicolas Poussin (fig. 4) grâce à un calque (voir chapitre Le Grand Parchemin)82.

Fig. 4

Fig. 4
  • 83 Les flèches blanches indiquent le calage d’un calque de la carte « Boudet » sur le genou d’un des b (...)

Étude de Paul Jude sur un rapport entre la carte « Boudet » et le tableau de Poussin « les bergers d’Arcadie83.

© Gil Galasso

92Le chercheur Raoul84 tente de prouver des liens entre Poussin et Boudet en affirmant qu’en tournant la carte à 180 degrés, apparaît alors, au niveau de la signature, un pied sur un rocher identique à celui d’un des bergers de la scène des bergers d’Arcadie.

93D’autres chercheurs pensent qu’il faut utiliser des outils mathématiques, ou géométriques et affirment que la clé de déchiffrage de la Vraie Langue Celtique se trouve dans son frontispice, en utilisant la date de 1886 entourée de flèches de directions.

94Les négationnistes considèrent que le livre n’est pas sérieux, ce qui en fait un échec littéraire. Initialement édité à 500 exemplaires, 98 unités sont vendues tandis que le reliquat est offert aux communautés scientifiques, aux bibliothèques et à quelques notables. Aujourd’hui, le livre original est quasiment introuvable et se revend une petite fortune. Il a fait l’objet de republications. Quant aux théories des chercheurs, les négationnistes les rejettent comme des visions de l’esprit faites de coïncidences hasardeuses.

Les documents tirés des évangiles, véritables faux « parchemins »

  • 85 SèDE DE, 1967.
  • 86 ADLER, 2008.

95Une troisième pièce nous intéresse, qui est probablement antérieure à la vague de falsifications qui a commencé dans les années 1960. Il s’agit d’un ensemble de deux documents codés à partir d’un codex biblique appelé codex Bezae. Ces documents sont appelés à tort petit et Grand parchemin. Ils sont de facture récente et ne sont pas des parchemins. Les originaux n’ont jamais été exposés au public et leur origine demeure un mystère. Ils apparaissent au grand public dans un livre de Gérard de Sède85 sans que leur origine soit authentifiée. Selon les concordistes, les documents proviennent de sociétés secrètes86 ou du prêtre codeur de l’ensemble de l’énigme qui, au début du XXe siècle, aurait laissé des documents à son évêché. Les négationnistes affirment que ce sont des faux.

96Ces documents sont cruciaux dans l’affaire car leur authenticité démontrerait la présence d’un secret dans le Razès, tandis que le contraire indiquerait que le dossier Rennes-le-Château est vide de sens.

Le « Petit parchemin »

  • 87 CHAUMEIL, 1993.

97Même si plusieurs propositions existent, le Petit parchemin semble ne pas avoir été décodé de manière certaine au moment où nous écrivons ces lignes (fig. 5). L’équipe Plantard-De Cherisey a falsifié le message en surélevant certaines lettres pour obtenir l’évocation d’un supposé prieuré de Sion associé à une descendance mérovingienne. Après une rupture relationnelle entre Pierre Plantard et Philippe de Cherisey, ce dernier a admis avoir commis cette falsification87. Le document contient d’autres inscriptions suspectes, telles qu’une signature évoquant le soi-disant prieuré. En 2011, le chercheur Franck Daffos présente une théorie intéressante sur un but de ce document, qui serait d’indiquer le nom du musée où se trouve le bon tableau de Teniers le Jeune nécessaire à décoder l’énigme présentée dans le Grand Parchemin (Musée du Prado à Madrid).

Fig. 5

Fig. 5

Document communément nommé « le Petit parchemin ».

© Droits réservés

  • 88 CABROL, LECLERCQ, 1910.
  • 89 VIGOUROUX, 1891.

98La question qui peut se poser est la suivante : De Cherisey a-t-il falsifié un document codé ? Ou a-t-il construit sa falsification sur un document non-codé ? Lorsqu’il est interrogé sur sa falsification, il répond de façon ambigüe qui peut laisser penser qu’il n’a pas cherché le document d’origine mais plutôt que quelqu’un le lui aurait transmis déjà codé. Il déclare : « Les parchemins ont été fabriqués par moi, j’ai pris le texte oncial à la Bibliothèque nationale sur l’œuvre de dom Cabrol, L’Archéologie Chrétienne88 ». Or nous savons aujourd’hui que le texte d’origine du Petit parchemin provient du Codex Bezae89, recopié dans un dictionnaire de la Bible. De Cherisey ne connaît donc pas l’origine du document qu’il dit avoir copié.

Le « Grand parchemin »

  • 90 WORDSWORTH, J. WHITE Henry, 1889–1954.

99C’est à la lecture du second document que l’on comprend le mensonge et l’incompétence de De Cherisey. Ce document, appelé « le Grand parchemin » (fig. 6), a été construit à partir de la Vulgate90, conservée à Oxford. Le niveau de complexité du codage élimine toute possibilité de déclaration de propriété par un amateur non latiniste.

Fig. 6

Fig. 6

Document communément nommé « le Grand parchemin ».

© Droits réservés

100Le document est lui aussi tiré d’un épisode des évangiles. Comme le Petit parchemin, des éléments ont sans doute été ajoutés au Grand parchemin par Plantard et De Cherisey comme une référence au prieuré de Sion, que nous avons écarté plus tôt car elle est une pure invention.

  • 91 « JESU.MEDELA.VULNERUM+SPES.UNA.POENITENTIUM.PER.MAGDALA●NÆ.LACRYMAS+PECCATA.NOSTRA.DILUAS » qui pe (...)

101La dernière phrase est directement liée à la décoration de l’église de Rennes-le-Château. Au bas du document, on retrouve la même inscription que celle inscrite sous l’autel de l’église91.

102La question suivante est donc posée par plusieurs chercheurs : les « parchemins » ont-ils été écrits en se basant sur la décoration de l’église rénovée de Rennes-le-Château (c’est-à-dire après 1897) ou l’église a-t-elle été décorée en fonction de l’énigme suggérée sur les parchemins ? La première hypothèse suggère que le codage remonte au début du vingtième siècle. Dans la seconde hypothèse, Saunière devient l’exécuteur d’une demande et reçoit des fonds pour réaliser des travaux spécifiques.

  • 92 CHAUMEIL, 1993. Par exemple : « pommes bleues » serait une explication surréaliste à partir du poèm (...)

103Nous avons choisi de ne pas nous concentrer sur l’explication fournie par Gérard de Sède car Philippe de Cherisey, dans son témoignage à Jean-Luc Chaumiel, ne parvient pas à fournir une explication satisfaisante sur le codage qu’il aurait lui-même créé92.

Le décodage complexe du Grand parchemin

104Le texte du Grand parchemin est basé sur le chapitre 12 de l’évangile de Jean (semblable à la scène du vitrail situé derrière l’autel de l’église de Rennes-le-Château). Il est divisé en deux parties par la locution « Ad Genesareth » qui fait référence au village de Magdala situé près du lac de Genesareth. Des chercheurs ont pris soin de comparer le texte du parchemin au texte d’origine. Il apparait que de nombreuses lettres ont été ajoutées au texte, d’autres ont été modifiées ou décalées et que des mots sont inversés. On peut donc envisager que le Grand parchemin est crypté.

105En isolant les lettres intruses des deux parties du Grand parchemin, on obtient deux ensembles de soixante-quatre lettres, qui correspond au nombre de cases présentes sur un échiquier.

  • 93 VIGENèRE, 1586.

106Pour obtenir un résultat, il faut que les lettres soient décodées au préalable au moyen d’une méthode dite « du carré de Vigenère », méthode complexe de chiffrement par substitution poly-alphabétique créée par Blaise de Vigenère au XVIe siècle93 (fig. 7). Cette méthode utilise un tableau rectangulaire de lettres composé de plusieurs alphabets décalés.

Fig. 7

Fig. 7

Blaise de Vigenère, Traicté des chiffres ou Secrètes manières d’escrire (1586), grille de codage.

© BnF, Gallica

107Il est indispensable d’utiliser un mot-clé, de déterminer la longueur de la clé et de diviser le message en sections correspondantes à la longueur de la clé. En l’occurrence, c’est le mot-clé Mortépée qui doit être utilisé et il s’agit, pour trouver cette clé, d’isoler chaque lettre intruse placée sur la fameuse stèle de la marquise de Blanchefort que nous avons étudié précédemment.

  • 94 LAQUIèRE, 1880, p. 82-102.

108Mais si nous obtenons soixante-quatre nouvelles lettres en suivant ce processus, il nous faut alors envisager une seconde méthode de décodage en les plaçant sur un échiquier. Cette méthode, utilisée à partir du XIXe siècle et proposée par le mathématicien Euler (1707-1783)94, est liée au problème du déplacement du cavalier.

109La problématique est de savoir s’il est possible pour cette pièce du jeu de se déplacer sur un plateau d’échecs sans jamais repasser sur une case déjà visitée. Le cavalier se déplace en forme de L, avec deux cases dans une direction et une case perpendiculaire à la première direction. Le défi consiste à trouver une voie qui couvre chaque case du plateau. Euler résout ce problème en 1759 (fig. 8).

Fig. 8

Fig. 8

Résolution du problème d’Euler, sens des sauts du cavalier.

© Wikipedia, travail personnel, utilisation libre de droits

110Après ce double décodage extrêmement complexe, on obtient cette phrase énigmatique :

« BERGEREPASDETENTATIONQUEPOUSSINTENERSGARDENTLACLEFPA
XDCLXXXIPARLACROIXETCECHEVALDEDIEUJACHEVECEDAEMONDE
GARDIENAMIDIPOMMESBLEUES »

  • 95 Il existe un site internet pour coder soi-même un message en utilisant les deux méthodes : le progr (...)

111Lorsqu’on effectue une césure des mots, on obtient : « Bergère, pas de tentation, que Poussin Teniers gardent la clef, PAX DCLXXXI (681) par la Croix et ce cheval de Dieu, j’achève ce daemon de gardien à midi pommes bleues »95.

  • 96 Plusieurs sociétés secrètes sont évoquées par certains auteurs : l’Ordre de la Rose Croix, le Hiéro (...)

112Il existe plusieurs hypothèses pour expliquer ce mystère. La première hypothèse, basée sur la pensée négationniste, affirme que cette phrase est une imposture visant à cacher un mystère qui n’existe pas, créée par le duo Plantard/de Cherisey dans les années 1950. Les concordistes, quant à eux, estiment que cette phrase est la clé de l’énigme de Rennes-le-Château. Certains pensent qu’elle a été codée par des prêtres érudits, tandis que d’autres considèrent qu’elle a été créée par une société secrète96.

  • 97 HéRICART DE THURY, DAFFOS, 2011.

113Le chercheur Franck Daffos propose une hypothèse sérieuse évoquant la vie d’un prêtre lazariste nommé Jean Jourde (1852-1930) qui était un étudiant de Fulcran Vigouroux au séminaire de Saint-Sulpice97. Il pourrait être le codeur recherché.

114Il est probable que le Grand parchemin soit lié à l’inclusion de la stèle de la marquise de Blanchefort dans le Bulletin de la SESA en 1906 car il contient la clé de déchiffrement et que toutes les pièces aient été créés par le même auteur.

État de la recherche sur la compréhension de la phrase codée issue du Grand parchemin

115Au moment où nous écrivons ces lignes, cette phrase énigmatique n’est pas déchiffrée intégralement. De nombreuses propositions plus ou moins sérieuses existent, sous forme de livres ou de vidéos, associées à des théories plus ou moins farfelues. Nous présentons ici une synthèse des théories qui semblent les plus abouties.

116Une première explication propose une lecture de la phrase sous forme d’entonnoir, c’est-à-dire que chaque strophe rapprocherait d’avantage le lecteur du lieu à découvrir.

117La première strophe « Bergère, pas de tentation, que Poussin Teniers gardent la clef » ferait référence à deux tableaux, produits par deux maitres de la peinture du XVIIe siècle : Nicolas Poussin et David Teniers le Jeune.

  • 98 POUSSIN Nicolas, Les Bergers d’Arcadie, 1630-1640, huile sur toile, 85 × 121 cm, Musée du Louvre, s (...)
  • 99 César-François Cassini, (1714-1784), géodésien, cartographe et astronome français, répond dans les (...)
  • 100 CHERUEL, 1862.
  • 101 Extrait : « ... Luy et moy nous avons projetté de certaines choses dont je pourray vous entretenir (...)

118Le premier tableau est identifié comme étant Les Bergers d’Arcadie (fig. 9) de Nicolas Poussin98. Certains reconnaissent au fond de la toile un paysage des environs de Rennes-le-Château, d’autres y voient une carte basée sur des repères antérieurs aux premières cartes dites Cassini99 ou à la carte « Boudet ». Un document précieux100 est trouvé dans la cassette de Nicolas Fouquet, surintendant des finances de Louis XIV, lors de sa saisie à Saint-Mandé, en septembre 1661. Il s’agit d’une correspondance expédiée par son frère Louis, prêtre basé à Rome et proche de Poussin, datée du 17 avril 1656, qui explique l’importance de posséder ce tableau codé101.

Fig. 9

Fig. 9

Nicolas Poussin, Les Bergers d’Arcadie, 1640

© Musée du Louvre

  • 102 LINCOLN Henri, « The BBC2 Chronicle about Rennes-le-Château », 31 mars 1972 (dir. Paul Johnstone), (...)

119Près du hameau des Pontils, à proximité de Rennes-les-Bains, existait une tombe (fig. 10) ressemblant à l’identique à celle peinte dans le tableau de Poussin, avec un paysage rappelant ce hameau. Plusieurs ouvrages ainsi qu’un reportage de la BBC anglaise102 soulignent cette particularité. Bien qu’elle ne fût érigée qu’au XXe siècle, plusieurs chercheurs peu informés, qui pensaient que la tombe était celle peinte au XVIIe siècle, n’ont pas hésité à la visiter sur son terrain privé, obligeant le propriétaire excédé à la démanteler en 1988.

Fig. 10

Fig. 10

Rennes-les-Bains (Aude), La tombe des Pontils en 1972.

© British Broadcasting Corporation

  • 103 L’épitaphe présent sur la stèle de Jean Vié, décédé le 31 août 1872, indique : « 1er 7bre » comme s (...)

120Certains concordistes pensent que cette tombe a été commandée par un prêtre ou un ensemble de prêtres codeurs de l’énigme pour faire correspondre le tableau de Poussin (XVIIe siècle) à la phrase codée. Ces prêtres auraient ainsi influencé plusieurs familles dans le deuil sur le choix d’une sépulture ou d’une gravure, notamment en participant financièrement aux frais des funérailles. Un débat existe d’ailleurs à propos de la tombe du prêtre Jean Vié, prédécesseur d’Henri Boudet à la cure de Rennes-les-Bains concernant les inscriptions étonnantes portées sur son épitaphe103.

121Les négationnistes critiquent cette théorie d’un tableau peint par Nicolas Poussin car il vivait à Rome, ne s’est jamais rendu dans le Razès et ne peignait pas en extérieur. Les concordistes, quant à eux, évoquent le peintre audois et architecte français Jean-Pierre Rivals (Labastide-d’Anjou, Aude, 1625-Toulouse 1706). Élève d’A. Frédeau à Toulouse, il poursuit et termine sa formation à Rome - où il a pu rencontrer Poussin - puis revient à Toulouse en tant que peintre et ingénieur de la ville. Il aurait pu peindre le fond du tableau qui aurait alors été complété par Poussin, cette méthode étant courante au XVIIe siècle. Il semble qu’un lien direct existe entre le tableau et la décoration de l’église de Rennes-le-Château. Dans la station 14 du chemin de croix intitulée « Jésus mis au tombeau », un personnage est identique à l’un des bergers peint par Poussin.

  • 104 David Teniers II, dit le Jeune, (1610-1690), est un peintre, graveur, dessinateur, peintre miniatur (...)

122L’identification du second tableau suggéré par la phrase ne fait pas l’unanimité dans le cercle des chercheurs. La majorité estime qu’il doit s’agir d’une des œuvres de David Téniers le jeune104. Ce maître flamand a souvent peint des « Tentations de Saint-Antoine ». Pour s’accorder avec la phrase, il faut donc chercher un tableau qui ne soit pas une tentation.

  • 105 TENIERS David le jeune, Saint Antoine et Saint-Paul dans le désert, 1660, huile sur toile, 63,5 x 9 (...)
  • 106 TENIERS David le jeune, Saint Antoine et les sept péchés capitaux, 1670, huile sur panneau, 49 x 65 (...)

123Deux tableaux sont particulièrement désignés dans les nombreuses études proposées : Saint-Antoine et Saint-Paul dans le désert105 et Saint Antoine et les sept péchés capitaux106 (fig. 11 et 12). De nombreux arguments sont en faveur de l’un ou de l’autre de ces tableaux mais, s’agissant d’interprétations plus ou moins argumentées, nous décidons de ne pas les présenter ici. Elles visent souvent à faire correspondre le paysage du fond du tableau avec des éléments naturels de la région et des allégories proposées par le message délivré par le tableau.

Fig. 11

Fig. 11

David Teniers le Jeune, Saint Antoine et Saint Paul dans le désert, 1660.

© Musée Ashmolean, Oxford, Royaume Uni

Fig. 12

Fig. 12

David Teniers le Jeune, Saint Antoine et les sept péchés capitaux, 1670.

© Musée du Prado, Madrid, Espagne

124La suite de la phrase : « PAX DCLXXXI » n’a pas été décryptée, à notre sens, de manière suffisamment convaincante pour constituer une interprétation incontestable. Certains évoquent une croix (pax) gravée sur un rocher à une altitude de 681 mètres. Il convient de noter que Rennes-le-Château et les collines environnantes se situent à environ 400 m d’altitude, puis l’altitude croit en direction du mont Bugarach, au sud, qui culmine à 1 230 mètres. De nombreux chercheurs parcourent donc la montagne pour rechercher des croix gravées sur des pierres, sans doute par l’abbé Boudet pour corroborer sa théorie de Cromleck imaginaire.

  • 107 Collectif « Retrouvez les chefs d’œuvres de Delacroix à la chapelle des Saints-Anges de Saint-Sulpi (...)

125La suite de la phrase « Par la Croix et ce cheval de Dieu » pourrait établir un lien entre l’énigme et l’église Saint-Sulpice de Paris car il existe, près de l’entrée de cet édifice, une chapelle dite « chapelle des anges107 » dans laquelle sont exposées trois fresques, œuvres du peintre Delacroix – le combat de Jacob et de l’ange, Héliodore chassé du temple et Saint-Michel terrassant le Dragon – qui pourraient correspondre avec tout ou partie de la phrase codée.

  • 108 ROUGé, 2009.

126Certains affirment que cette indication de lieu invite le chercheur à se référer au fameux « méridien de Saint-Sulpice » dessiné dans la même église par Jean-Baptiste Languet de Gergy, curé de la paroisse de 1714 à 1748. En effet, ce méridien108, si on le poursuit plus au sud, nous projette à proximité du village de Rennes-les-Bains. Le chapiteau de pilier de type saint-sulpicien peint sur la fresque de l’église de Rennes-le-Château pourrait être une référence à ce méridien.

  • 109 JUDE, 2017.

127La fin de la phrase est particulièrement énigmatique : « j’achève ce daemon de gardien » fait référence pour beaucoup au fameux diable du bénitier placé à l’entrée de l’église de Rennes-le-Château. Sa position particulière semble indiquer une information qui prête à de nombreuses interprétations, il a été baptisé Asmodée, gardien des trésors par la communauté des chercheurs mais aucune mention de la sorte n’existe du temps de Saunière. Un chercheur propose une association avec la déesse Daemonia109, déesse des sources, en référence à une théorie qui voudrait que la cavité recherchée ait été creusée par une source salée (la rivière Sals qui coule à Rennes-les-Bains est nommée ainsi car elle est salée).

128Les « pommes bleues » demeurent un mystère à ce jour non élucidé. Trop d’interprétations nous empêchent de présenter une théorie, telles qu’une lumière qui éclairerait un endroit précis à la mi-journée au travers d’un verre bleuté, des pommes de cèdre bleu ou encore des éléments de blason de communes situées dans la région (Antugnac ou Espéraza).

129Il ressort de notre recherche que les premières pièces évoquées dans le codage sont issues du XVIIe siècle. Nous verrons en conclusion qu’il est possible qu’un trésor provienne de cette époque et ait déjà fait l’objet d’un codage, peut-être au travers de tableaux commandés par les personnes ayant connaissance de la cache. Il est alors possible que ces éléments aient été repris par un ou plusieurs prêtres sulpiciens au XIXe siècle pour compléter ce codage (Delacroix a peint ses œuvres autour de l’année 1854).

La décoration de l’église de Rennes-le-Château

130Des débats sans fins opposent les concordistes et les négationnistes concernant certains éléments de l’église décorée par Saunière. Nous ne décrirons ici que quelques-uns des objets et des théories associés en écartant le chemin de croix, qui est issu d’un moulage commun à plusieurs églises, même si certains pensent que c’est par le coloriage des plâtres qu’on est renvoyé au mystère.

La forme du Diable du bénitier et sa position

131La statue du diable (fig. 13) étonne par plusieurs éléments. Tout d’abord, la position de la main gauche semble évoquer un cercle ou un « O » et renverrait à la source du cercle, lieu proche du village de Rennes-les-Bains. D’autres expliquent que le Diable était censé tenir une fourche, d’où la position de la main, mais cet outil n’aurait pas pu trouver sa place dans l’église parce qu’il aurait gêné l’entrée et la fourche n’est pas mentionnée dans la facture établie par la société Giscard.

Fig. 13

Fig. 13

Rennes-le-Château (Aude), église Marie-Madeleine ; sculpture du diable soutenant le bénitier.

Jcb-caz-11 © Wikipédia

132Sur l’aile gauche du diable sont visibles des inscriptions qui n’ont pas été déchiffrées à ce jour.

133La posture du Diable est commentée car il semble assis sur un siège invisible. Or, à quelques mètres de la source précédemment évoquée, un rocher creusé en forme de siège porte le nom de « fauteuil du Diable ».

134Si le diable est communément appelé Asmodée, le gardien des trésors, cette référence n’apparait jamais du temps de Saunière.

Le bénitier

135Au-dessus du bénitier sont représentés quatre anges qui, chacun, évoquent une partie du signe de croix.

136Au niveau du bénitier, une phrase interpelle le visiteur : « Par ce signe tu le vaincras », qui pourrait facilement être interprétée par le chrétien qui se signe à l’entrée de l’église : par le signe de croix tu vaincras le démon en toi. Mais la locution latine prise comme référence est précisément « In hoc signo vinces » qui se traduit « par ce signe tu vaincras ». Certains chercheurs évoquent alors la possibilité qu’on doive vaincre le gardien du trésor, c’est-à-dire le Diable, en traçant une croix sur une carte et en utilisant des éléments naturels particuliers reliés entre eux.

137Enfin, deux lettres sont inscrites sous cette phrase, un B et un S. Certains évoquent les initiales de Bérenger Saunière, qui aurait fait preuve d’une certaine mégalomanie en se représentant lui-même dans une église qui ne lui appartient pas. D’autres évoquent une zone, près de Rennes-les-Bains, de confluence entre deux rivières, la Blanque et la Sals.

La fresque

  • 110 Évangile selon Saint-Mathieu, chapitre 5, versets 3 à 11.

138En ce qui concerne la grande fresque située contre le mur du fond de l’église (fig. 14), elle a également fait l’objet d’une commande spéciale effectuée par Saunière au statuaire Giscard. La scène représente un passage de la Bible : Jésus, au mont des Béatitudes110. Toutefois, lorsqu’on examine l’œuvre de près, plusieurs détails étonnent.

Fig. 14

Fig. 14

Rennes-le-Château (Aude), église Marie-Madeleine ; la fresque

Hawobo © Wikipédia

139Si la plupart des personnages portent des habits du premier siècle de style sulpicien, l’un d’eux arbore une tenue qui semble issue du XVIIe ou XVIIIe siècle. Un sac contenant des pains est représenté en bas de la colline ; il est volontairement percé. Les flancs de la colline sont jonchés de fleurs. Le chapiteau d’un pilier de temple ou d’église est représenté couché sur la droite. Chacun de ces éléments, entre autres, a fait l’objet de nombreux articles car aucun ne correspond au texte biblique d’origine.

140Les négationnistes contestent toute théorie de codage de l’église. Ils mentionnent des visites de prêtres au XXe siècle ayant passé du temps à examiner chaque pièce de la décoration sans y découvrir d’anomalie contrastant avec le dogme de l’église.

Le meurtre du prêtre Gélis

  • 111 Inventaire du juge d’instruction : « sous un tabernacle 4 000 francs, sous un rochet 2 000 francs, (...)
  • 112 Collectif (archives départementales de l’Hérault), L’affaire Gélis. L’intégralité de l’enquête, Equ (...)

141Le rapport d’un juge d’instruction sur l’assassinat de l’abbé Gélis de Coustaussa est le dernier document que nous décidons de mentionner. En 1857, Antoine Gélis (1827-1897) est nommé prêtre de Coustaussa, un village à environ deux kilomètres de Rennes-le-Château. Le 1er novembre 1897, à l’âge de 70 ans, il est découvert assassiné sur le sol de la cuisine de son presbytère, vêtu et portant son chapeau de curé. Dès que le corps est découvert, le maire fait fermer les portes du presbytère et sollicite la présence de la gendarmerie. Son ou ses meurtriers ne seront jamais retrouvés. Dès le 2 novembre 1897, une enquête est ouverte par un juge d’instruction de Limoux. Le rapport est publié en 1975 par les avocats Julien Coudy et Maurice Nogué, sous forme synthétique dans le journal le Midi libre du 3 octobre 1975111, puis il est publié intégralement en deux volumes112. Des témoignages concordent pour décrire la personnalité méfiante de l’abbé, qui n’accordait pas sa confiance. Le maire ajoute : « personne ne l’aimait ».

142Le 1er novembre, la gendarmerie constate que la tête a été fracassée par des coups à l’arrière du crâne. Le système d’alarme créé par l’abbé sous forme de clochettes tendues a été désactivé de l’intérieur et deux verres ont été retrouvés sur la table, suggérant que l’abbé connaissait son assassin. Les gendarmes remarquent que la victime a délibérément été placée en position de gisant : allongée sur le dos, les bras croisés sur la poitrine. Ils sont surpris que l’assassin ait pris autant de précautions pour le placer dans cette position, afin peut-être de lui offrir un dernier sacrement.

143La chambre de Gélis est fouillée et la gendarmerie y découvre un carnet contenant un codage permettant de retrouver de nombreuses caches d’argent à l’intérieur et à l’extérieur du presbytère. En tout, 13 000 francs-or sont découverts, soit environ 120 000 euros actuels. Nous sommes donc en présence d’un second curé riche, qui a imaginé un codage pour cacher une fortune acquise de façon inconnue. Le juge est informé par le prêtre de Trèbes, situé au nord de Coustaussa, que l’abbé Gélis lui confiait chaque année une somme de 1 000 francs or à placer en obligations du chemin de fer.

144Alors que Gélis a quatre héritiers putatifs (neveux et nièces), son légataire universel désigné est Maurice Malot, un autre abbé.

145Gélis a-t-il été éliminé par une congrégation dont il faisait partie ? S’agit-il d’un crime crapuleux ? L’enquête n’est aujourd’hui toujours pas résolue.

Quelques interprétations sérieuses

146Quelques pistes intéressantes sont avancées sur l’origine du trésor, s’il existe, sans nous prononcer sur des pistes antérieures au XVIIe siècle qui, à ce jour, nous semblent trop hasardeuses par manque de sources. Une seule preuve de ce trésor prétendument découvert par l’abbé a été présentée. Il s’agit d’un calice en vermeil (argent recouvert d’or) offert par Saunière à son ami l’abbé Grassaud (1859-1946) de Saint-Paul de Fenouillet et qui a été exposé publiquement. La famille Chanoine l’a possédé dans les années 1970.

147La provenance de ce calice est débattue entre l’abbé Mazières et René Descadeillas. Pour le premier, la coupe date du milieu du XVIIIe siècle et aurait été offerte à l’abbé Saunière par les chevaliers de Malte. Pour le second en revanche, le calice date du XVIIe siècle et aurait fait partie du supposé trésor trouvé. D’autres témoignages évoquent des bijoux « anciens » portés par Marie Dénarnaud et des membres de sa famille, supposément aperçus par la population.

Le butin de Serrallonga ?

  • 113 COULON, 2012, p. 15-29.
  • 114 MATHOREZ, 1932. p. 27-51.
  • 115 Les Pyrénées-Orientales se trouvent rattachés à la France après le traité de Pyrénées (1659).

148Au début du XVIIe siècle, un bandit nommé Joan Sala I Ferrer, également connu sous le nom de Serrallonga113, règne en Catalogne. Il se réfugie fréquemment dans la ville de Nyer, où le seigneur Thomas de Banyuls est à la tête d’une petite armée de brigands appelée les « Nyerros »114 ou « bandoleros », des bandits de grands chemins qui détroussent les voyageurs. Après avoir commis leurs méfaits, les criminels se cachent de l’autre côté de la frontière, sur les terres du Seigneur du Vivier (le département actuel des Pyrénées-Orientales n’était pas en Catalogne mais en France à l’époque115). Serralonga meurt à 40 ans, en 1634. Or il se trouve que le Baron Blaise d’Hautpoul se marie en 1640 avec une fille du Seigneur du Vivier et que l’abbé Bigou est originaire d’un village très proche du Vivier. On peut donc imaginer que le butin ait été caché à un endroit connu du baron et du prêtre et que son descendant initié laisse des traces au moment de quitter définitivement son église pour fuir la terreur révolutionnaire.

Le trésor des évêques d’Alet ?

149Il est envisageable que la campagne de Rennes-le-Château ou ses environs aient servi de cache pour différents évêques d’Alet. Les recherches de Michel Vallet effectuées à partir des documents du fond « Corbu-Captier » et d’entretiens suggèrent que le secret de l’abbé Saunière a été éventé dans les années 1937-1939 par sa filleule Josette Barthe. À la fin de sa vie, elle montre à plusieurs chercheurs des photos de bijoux de facture ancienne116 ainsi que des documents d’expertise des mêmes pièces par un quincaillier toulousain connu nommé Antonin Schwab117. Elle explique qu’ils provenaient de la cache trouvée par son grand-oncle et que le quincaillier venait régulièrement acheter ces objets à Saunière.

  • 118 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 279.
  • 119 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 279 : l’ensemble fut payé 23 millions de francs en 1940.

150Lors de ses vacances au domaine pendant son adolescence, Josette Barthe aurait trouvé dans la bibliothèque du prêtre des documents liés à l’époque révolutionnaire témoignant de la protection du trésor de l’évêché d’Alet. Selon Michel Vallet, elle aurait également découvert quarante-six pièces d’or d’époque romaine118 de type quadrige qui auraient ensuite été vendues par l’intermédiaire d’un prêtre au musée d’archéologie de Saint-Germain-en-Laye119.

  • 120 DOINEL, 1907, p. 219-235.
  • 121 ARMAND, 1891, p. 264.
  • 122 Collectif, Académie des arts et sciences (Carcassonne), Mémoires de la Société des arts et des scie (...)

151Un rapport d’un commissaire de la jeune république révèle que l’inventaire de Mgr. Charles de la Cropte de Chantérac (1724-1793) est particulièrement modeste120 car il ne détient aucun objet ou meuble de valeur. En effet, au moment de l’inventaire, il avait déjà quitté le pays pour fuir la révolution avec l’abbé Bigou et l’abbé Cauneille121. Il est donc légitime de se poser des questions sur la disparition de ces biens d’église, calices et meubles de l’évêché qui n’ont pas été mentionnés dans l’inventaire révolutionnaire mais qui existaient bien122. Le chercheur Michel Azins affirme avoir retrouvé la trace des personnes mandatées pour cacher le trésor ecclésiastique, c’est-à-dire les neveux de l’évêque, Jean Hyppolite Henri Michel de la Cropte et Louis Charles Hyppolite Édouard de la Cropte de Chantérac. Ceux-ci sont aussitôt après happés par le tourbillon révolutionnaire, le premier rejoignant l’armée de Condé et le second s’exilant à Malte.

  • 123 CHARPENTIER, 1901, p. 138-180.

152Pour étayer cette hypothèse, certains mentionnent la présence surprenante, dans la bibliothèque de Saunière, d’ouvrages de grande valeur datant du XVIIIe siècle, présentant sur le contre-plat l’ex-libris de l’abbé. Or il est attesté que la bibliothèque de l’évêque contenait plusieurs milliers de livres123 avant la Révolution. Le chercheur Michel Vallet précise que les livres présentaient des signes d’humidité indiquant de mauvaises conditions de conservation pendant des années.

  • 124 MENSIOR, 2017, p. 238.

153Selon une étude menée par le chercheur Patrick Mensior124, Saunière détenait un fauteuil d’époque Louis XIII qui aurait appartenu à l’évêque d’Alet. Mensior compare ce fauteuil à la description détaillée d’un meuble très similaire, propriété de l’évêque, décrit dans un acte notarié du 25 octobre 1670.

Un trésor provenant d’une cache située dans la campagne de Rennes-le-Château ?

  • 125 LORET Jean, La muze historique, ou Recueil des lettres en vers contenant les nouvelles du temps : é (...)
  • 126 DAFFOS, 2007.
  • 127 Ibid. LORET Jean (extrait) : « …Mais j’ai scu, par d’autres billets, Que ce fut au Comté d’Alets, E (...)

154Le chercheur Robert Thiers a élaboré une théorie à partir d’une source provenant du gazetier Jean Loret125 évoquant le conflit d’un évêque d’Alet nommé Nicolas Pavillon (1597-1677) avec le baron Blaise d’Hautpoul126, seigneur de Rennes, à propos du partage d’un trésor trouvé127. Ce dernier refuse que les hommes de l’évêque « traversent ses terres sans autorisation ». Les chercheurs lisent en filigrane le refus que les hommes de l’évêque accèdent à une zone, propriété du baron, qui correspond à une cache au trésor.

  • 128 SAINT-MARC (de), CHASSAGNE (de la), 2010.

155Cette affaire est étroitement liée à François Fouquet (1611-1673), prélat français, disciple de Saint-Vincent de Paul. En 1656, il est nommé coadjuteur de Claude de Rebé, archevêque de Narbonne, avec promesse de succession. Au moment de la mort de ce dernier en 1659, il prend la présidence des États de Languedoc. Son frère, Nicolas Fouquet, surintendant de Louis XIV, rencontre Nicolas Pavillon à Toulouse en 1659 en présence de François128. Cette entrevue concernait le découpage du diocèse d’Alet, N. Pavillon désirant séparer Alet et son diocèse de celui de Limoux.

156Le chercheur Franck Daffos soutient la théorie selon laquelle François Fouquet, archevêque de Narbonne jusqu’en 1673, aurait supervisé l’excavation du trésor. Cette circonstance expliquerait en partie le procès intenté par le roi Louis XIV à l’encontre de Nicolas Fouquet à propos de son immense fortune, dont l’origine est inconnue (l’enquête menée en lien avec le procès n’a pas conduit à la conclusion d’irrégularités ou de détournement de fonds). Il convient de préciser que Franck Daffos ne fournit pas de détails sur l’origine du supposé trésor.

Conclusion

157Que pouvons-nous conclure de cette recherche ?

158Saunière était un abbé à la personnalité complexe. Il semble que des fonds aient été détournés par le biais d’un trafic de messe. Il est envisagé qu’un trésor ait été découvert. Ces deux sources pécuniaires ont été partiellement investies pour rénover et embellir une église, acheter des terrains communaux, construire des jardins et une villa destinée à accueillir des prêtres à la retraite (Saunière n’a jamais habité la villa Béthanie, préférant vivre dans une petite chambre au presbytère tandis que la villa était réservée à ses nombreux invités) et jouir d’un mode de vie luxueux et dépensier qui ne correspond pas à la posture habituelle d’un abbé.

159L’abbé Saunière était-il un escroc en soutane ? A-t-il été opportuniste, s’assurant un confort de vie auquel aucun prêtre de l’époque n’avait droit ? Bien que sa foi catholique ne semble pas réfutée, a-t-il refusé de vivre dans le vœu de pauvreté que le dogme ecclésiastique imposait ? Dans ce cas, pourquoi n’a-t-il pas, de façon raisonnable, épargné pour s’assurer une fin de vie confortable au lieu de la paupérisation dont il a souffert ?

160Plusieurs hypothèses sont évoquées.

161En premier lieu, cette énigme insoluble pourrait être une vaste mystification organisée dans les années soixante et aucun trésor n’aurait jamais existé autour de Rennes-le-Château. Dans ce cas, quelle signification peut-on donner aux pièces antérieures à l’époque de Saunière, qui ont été attestées comme authentiques ? Le trafic de messes peut-il à lui seul justifier les nombreuses dépenses de l’abbé ? C’est ce qu’affirment les négationnistes.

  • 129 ROUQUETTE, 1996.

162Secondement, un trésor extraordinaire aurait été découvert par Saunière de façon fortuite. Cela peut-il expliquer l’extravagance dont il a fait preuve, ce train de vie luxueux si surprenant pour un prêtre ? Comment expliquer la pauvreté de sa fin de vie ? Pourquoi la source se serait-elle soudainement tarie pendant la Première Guerre mondiale ? Le conflit a t’il empêché Saunière de retirer ses fonds à l’étranger à partir de 1914 ? Un effondrement de terrain l’a-t-il soudainement empêché d’accéder à la cache contenant son trésor129 (la région est connue pour avoir une activité sismique élevée) ?

  • 130 Certains chercheurs évoquent même la possibilité que Saunière n’était pas informé complètement du c (...)

163Une troisième hypothèse suppose qu’un groupe de prêtres liés à l’église Saint-Sulpice de Paris, ou bien une congrégation secrète, détiendraient un secret d’église dont ils auraient laissé des traces protéiformes afin qu’il soit un jour découvert par des pairs. Cette théorie suggère que Saunière, arrivé tardivement130 dans ce cercle d’ecclésiastiques « initiés », aurait reçu de l’argent sous différentes formes dont celle d’un trafic de messes orchestré par le groupe lui-même. Il aurait été missionné pour rénover et décorer son église et construire un domaine selon des instructions précises afin de poursuivre le codage transmis post mortem. Cependant, un aléa aurait pu survenir qui aurait empêché l’accomplissement de sa tâche - peut-être le meurtre de l’abbé Gélis ou une dispute avec son évêché ou avec l’abbé Boudet ? - laissant Saunière soudainement sans ressources. Dans cette conjecture, le trafic de messes est considéré comme un moyen de garantir un confort de vie mais il ne couvre pas les frais de construction et se termine au moment du procès.

  • 131 CORBU, CAPTIER 2018, p. 289.

164Un extrait du carnet de notes du prêtre soutient cette hypothèse. Le 30 mars 1903, il est mentionné qu’il reçoit la visite du révérent père Cerceau et de l’abbé Pierre Sire, curé de Luc-sur-Aude. Il décrit la visite comme une « inspection » des travaux, comme s’il devait rendre des comptes131. On peut raisonnablement penser que, dès ses premières découvertes, Saunière informe la congrégation qui l’a missionné afin qu’il soit aidé dans la compréhension des documents découverts.

165Le mystère de Rennes-le-Château est sans aucun doute un élément important du patrimoine historique et touristique de notre région Occitanie. Nous souhaitons terminer cet article en émettant le souhait qu’il soit repris sous un angle différent.

166Cela pourrait être le point de vue de l’histoire médiévale, afin d’estimer les pistes sérieuses d’un trésor antérieur au XVIIe siècle.

167Cela pourrait être le point de vue de l’histoire médiévale, afin d’estimer les pistes sérieuses d’un trésor antérieur au XVIIe siècle, ou aussi l’éclairage de l’histoire de l’art, pour explorer les pistes évoquées par les chercheurs sur les toiles et les peintres peut être liés à cette énigme.

168Nous mettrons volontiers à disposition de ces explorateurs les sources recueillies par nos soins.

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Notes

1 MATHIEU, 2011.

2 ROUSSE-LACORDAIRE, 2015.

3 ROSSINI, 2023.

4 LE GOFF, 1988.

5 THUILLIER, 2000.

6 Pierre Plantard (1920-2000), dessinateur de métier, est surtout connu pour avoir longtemps tenté de démontrer sa descendance d’une supposée lignée royale mérovingienne implantée à Rennes-le-Château grâce à la création de faux documents et la complicité de journalistes. Il déclare être le dirigeant du Prieuré de Sion, organisation fictive. Il est démasqué lors de l’enquête sur la mort de Roger-Patrice Pelat (1989).

7 Philippe de Cherisey (1923-1985) est un comédien, écrivain et humoriste radiophonique. Il est connu pour avoir participé à la mystification de l’affaire de Rennes-le-Château avec Pierre Plantard, au début des années 1960, avant de couper les liens avec ce dernier.

8 Ancienne région située au sud de Limoux, dans l’Aude.

9 SèDE DE, 1967.

10 BANON, 2011.

11 CéSARéE, 2015.

12 BESSE, 1660.

13 Louis Fedié est un notable audois de la fin du XIXe siècle, originaire de Couiza, village voisin de Rennes-le-Château. Il est donc contemporain de l’abbé Saunière. Il est licencié en lettres, latiniste et conseiller général de l’Aude, ainsi que membre de la SESA du même département. Il est un ami proche de l’abbé Boudet.

14 FEDIé, 1880.

15 MAS-LATRIE, 1856.

16 VERDON, 2019, p. 123-134.

17 DAFFOS, 2005.

18 BAIGENT, LEIGH, LINCOLN, 1982.

19 BROWN, 2003.

20 BEDU, 1990.

21 ROSSINI, 2023.

22 BUCHHOLTZER, 2008.

23 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 217 : testament de Bérenger Saunière.

24 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 218.

25 DESCADEILLAS, MOLS, 1968.

26 VALLET Michel, Rennes-le-Château. Entretien avec M. René Descadeillas. Carcassonne (1973) URL : https://www.youtube.com/watch ?v =c9qNfpw7o0U, consulté le 10 mars 2024.

27 DESCADEILLAS, 1974.

28 VALLET Michel, Rennes-le-Château, M. l’abbé M.R. Mazières, « Souvenirs divers », 13 juillet 2019, URL : https://www.youtube.com/watch ?v =S9lYqd4W6pI, consulté le 16 février 2024.

29 VALLET Michel, Rennes-le-Château, M. l’abbé M.R. Mazières, "Souvenirs divers", 14 juillet 2019, URL : https://www.youtube.com/watch ?v =HlBhF-IIWcI&t =0s, consulté le 16 février 2024.

30 VALLET Michel, Rennes-le-Château, M. l’abbé M.R. Mazières, « Souvenirs divers », 14 juillet 2019, URL : https://www.youtube.com/watch ?v =g6KTETw87kM&t =476s, consulté le 16 février 2024.

31 Un franc-or vaudrait aujourd’hui entre 4 et 5 euros, son salaire mensuel équivaudrait à 166 euros actuels environ.

32 ANDRIEU, 2019.

33 Le pilier et sa cavité sont visibles au musée de Rennes-le-Château.

34 Traditionnellement, on déposait des reliques ou autres objets précieux dans des cavités cachées dans les églises médiévales.

35 Le carillonneur est le grand-père de l’Antoine Captier actuel, il racontait en famille que c’était grâce à lui que Saunière avait trouvé un trésor.

36 Témoignage recueilli par l’abbé Mazières.

37 Extrait du registre paroissial de l’église (an 1705). « Dame Anne Delsol, âgée d’environ septante-cinq ans, veuve de messire Marc Antoine Dupuy, seigneur de Pauligne… a été inhumée les trente un dudit mois dans l’église de ce lieux au tombeau des seigneurs qui est auprès du balustre, en présence du dit Maître Michel, curé de Sant-Just et de maître Antoine Delmas curé des Bains »… Sont également inhumés dans la chapelle funéraire en l’an mille sept cent vingt-quatre : « Noble messire Henri du Vernet, lieutenant-colonel de cavalerie… enterré dans l’église du lieu au tombeau des seigneurs » Ces passages sont signés Vernat Curé.

38 SAUSSEZ, 2022.

39 Petite chapelle secondaire s’ouvrant sur l’abside.

40 Directions régionales des affaires culturelles (ministère de la Culture).

41 Professeur de religions du Moyen-Orient, d’archéologie et de droit islamique et directeur de l’Institute for the Study of Judaeo-Christian Origins à l’université d’État de Californie à Long Beach, USA.

42 Archéologue, Université de Macerata, département d’archéologie et d’histoire Antique, Italie.

43 Professeur de géographie et d’anthropologie à l’UW-Eau Claire. Consultant en technologie des radars à pénétration profonde.

44 SAUSSEZ, 2022, p. 66.

45 Collectif, Arkeos, Mesures radar de subsurface dans une église du sud-ouest de la France, rapport, 31 mai 2005.

46 Sur l’emplacement des locaux techniques de l’actuelle mairie de Rennes.

47 Un litre est une décoration funéraire sous la forme d’une bande noire portant le blason du noble décédé.

48 Les Cercles Catholiques sont des cellules de propagande royalistes dont le but est le rétablissement de la royauté en France.

49 GIORDANENGO, LEVILLAIN 1983, p. 168-170.

50 FAVATIER, 1901.

51 C’est la somme indiquée dans les carnets de Saunière (fond Captier-Corbu).

52 Musée Régional de la Narbonne Antique (MuRéNA).

53 Procès-verbal de délibération du conseil municipal (29 mars 1891).

54 « Nous avons l’honneur de vous prévenir qu’à l’accord du Conseil Municipal de Rennes-le-Château à la réunion qui a eu lieu le dimanche 10 mars à 1 heure de l’après-midi dans la salle de la Mairie, nous électeurs protestons qu’à leur décision le dit travail que l’on donne droit au Curé de continuer n’est d’aucune utilité et que nous joignons pour appui à la première plainte, notre désir d’être libres et maîtres de soigner chacun les tombes de nos devanciers qui y reposent et que M. le Curé n’ait pas le droit qu’après que nous avons fait des embellissements ou placé des croix ou des couronnes, que tout soit remué, levé et changé dans un coin. »

55 Il existe des controverses sur la position du diable et le geste qu’il semble effectuer de la main gauche, à savoir une représentation d’un cercle. Certains y voient un signe, d’autres imaginent que la statue avait été conçue pour tenir une fourche.

56 NADINE-JOSETTE, CHARON, 1987. p. 35-51.

57 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 139 (exemple de facture « La Samaritaine Paris » produite par Claire Corbu et Antoine Captier).

58 AZENS, 2016.

59 Publié dans La Semaine religieuse de Carcassonne du 3 février 1911 et dans La Croix du 9 février 1911. URL : https://0-gallica-bnf-fr.catalogue.libraries.london.ac.uk/ark :/12148/bpt6k257913s, consulté le 13 mars 2024.

60 Sur 24 ans de ministère à Rennes-le-Château, Saunière déclare avoir dépensé 193 000 francs or et avoir eu, pour la même période, 193 150 francs de revenus de diverses sources, dont 82 000 francs de dons mais ces explications ne sont pas acceptées au niveau comptable.

61 HUGUET, 2003.

62 Par exemple, le boulanger Camredon réclame avec insistance deux factures impayées pour le pain livré à l’abbé Saunière en 1916 (168,5 francs) et en 1917 (125 francs) – fond Corbu-Captier.

63 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 282.

64 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 153 (par exemple 1 081 francs lui sont réclamés par le trésor public en 1936).

65 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 77 (note du percepteur réclamant à Marie le loyer impayé de 1919).

66 Lettre de l’abbé Grassaud à Marie Dénarnaud (fond Corbu Captier) : « …Demandez 200 000 francs sauf à descendre plus tard à 190 000 francs si c’est nécessaire… »

67 BUCHHOLTZER, 2008.

68 DAFFOS, 2009.

69 PLANDE, 1938. p. 303-304.

70 Collectif, Bulletin de la Société d’études scientifiques de l’Aude, tome XVII, Bonnafous-Thomas (éd.), Carcassonne, 1906. URL : http://catalogue.bnf.fr/ark :/12148/cb327238873, consulté le 10 janvier 2024.

71 DESCADEILLAS, 1960. p. 337-348.

72 VALLET, 2002, p. 8.

73 BOUDET 1886.

74 Qui consiste à donner un autre sens aux mots prononcés, par des sonorités qui rappellent un autre mot, par des jeux de mots ou par le recours à la symbolique des lettres. Par exemple, certains chercheurs considèrent que le mot « chick » réfère au peintre Poussin (traduction de « poussin » en anglais).

75 « On ne se souvient point des choses qui ont précédé, on ne se souviendra point des choses qui seront à l’avenir, et ceux qui viendront n’en auront aucun souvenir. »

76 Monument mégalithique formé de menhirs placés en cercle, un des plus connus étant celui de Stonehenge au Royaume Uni.

77 Ce menhir est situé près du hameau des Pontils, au nord de Rennes-les-Bains.

78 Les repères d’imprimerie permettent de caler les couleurs lors d’une édition. Ils sont ensuite systématiquement retirés. Selon certains chercheurs, les repères d’imprimerie auraient été laissés pour donner une indication au lecteur.

79 SICARD, 1928, p. 370-373.

80 https://www.youtube.com/watch ?v =5fFe7awR9sk, visionné le 10 mars 2024.

81 Les flèches blanches indiquent le calage d’une carte d’état-major agrandie sur les repères d’imprimerie, et la position révélée d’une des croix rouges.

82 JUDE, 2017.

83 Les flèches blanches indiquent le calage d’un calque de la carte « Boudet » sur le genou d’un des bergers représentés et l’indication de lieu qu’il semble désigner (Montferrand, petit hameau situé près de Rennes-les-Bains). Un autre berger semble indiquer un petit ruisseau décrit dans le livre de Boudet. Le bâton du même berger alors indique une colline qui ne comporte pas d’altitude.

84 ESPALION Thierry, blog personnel, URL : rennes-chateau.onlc.fr, consulté le 1er avril 2024.

85 SèDE DE, 1967.

86 ADLER, 2008.

87 CHAUMEIL, 1993.

88 CABROL, LECLERCQ, 1910.

89 VIGOUROUX, 1891.

90 WORDSWORTH, J. WHITE Henry, 1889–1954.

91 « JESU.MEDELA.VULNERUM+SPES.UNA.POENITENTIUM.PER.MAGDALA●NÆ.LACRYMAS+PECCATA.NOSTRA.DILUAS » qui peut se traduire par « Jésus, remède des blessures, unique espoir du pénitent, par les larmes de Madeleine, efface nos péchés ».

92 CHAUMEIL, 1993. Par exemple : « pommes bleues » serait une explication surréaliste à partir du poème de Paul Éluard « la terre est bleue comme une orange ». En fait, toute son explication est confuse.

93 VIGENèRE, 1586.

94 LAQUIèRE, 1880, p. 82-102.

95 Il existe un site internet pour coder soi-même un message en utilisant les deux méthodes : le programme Abulafia http://www.renneslechateau.it/abulafia/ ?LANGUAGE =FR, consulté le 18 février 2024.

96 Plusieurs sociétés secrètes sont évoquées par certains auteurs : l’Ordre de la Rose Croix, le Hiéron du Val d’Or ou encore les Francs-Maçons.

97 HéRICART DE THURY, DAFFOS, 2011.

98 POUSSIN Nicolas, Les Bergers d’Arcadie, 1630-1640, huile sur toile, 85 × 121 cm, Musée du Louvre, salle 825, Paris.

99 César-François Cassini, (1714-1784), géodésien, cartographe et astronome français, répond dans les années 1671-1673, à une ordonnance de Louis XIV envers l’Académie afin de « dresser une carte de toute la France avec la plus grande exactitude possible ».

100 CHERUEL, 1862.

101 Extrait : « ... Luy et moy nous avons projetté de certaines choses dont je pourray vous entretenir à fond dans peu, qui vous donneront par Monsieur Poussin des avantages que les roys auroient grande peine à tirer de luy, et qu’après luy peut-estre personne au monde ne retrouvera jamais dans les siècles à venir... Ce sont choses si fort à rechercher que quoy que ce soit sur la terre maintenant ne peut avoir meilleure fortune, ni peut-estre égale… »

102 LINCOLN Henri, « The BBC2 Chronicle about Rennes-le-Château », 31 mars 1972 (dir. Paul Johnstone), BBC, Londres. URL : https://www.youtube.com/watch ?v =x976Z_5jv7Y, consulté le 10 février 2024.

103 L’épitaphe présent sur la stèle de Jean Vié, décédé le 31 août 1872, indique : « 1er 7bre » comme si le décès était survenu le 1er septembre 1872. Les sceptiques affirment que de nombreuses tombes possédaient ce type de graphie visant à réduire le nombre de caractères. Les concordistes affirment qu’il s’agit d’une indication codée pour que le chercheur retienne le nombre 17.

104 David Teniers II, dit le Jeune, (1610-1690), est un peintre, graveur, dessinateur, peintre miniaturiste et copiste flamand.

105 TENIERS David le jeune, Saint Antoine et Saint-Paul dans le désert, 1660, huile sur toile, 63,5 x 97,5 cm, anciennement Ashmolean Museum, Oxford. Œuvre aujourd’hui disparue.

106 TENIERS David le jeune, Saint Antoine et les sept péchés capitaux, 1670, huile sur panneau, 49 x 65 cm, musée du Prado, Madrid. Ce tableau est révélé au public en juillet 2011 par les chercheurs Franck Daffos et Didier Héricart de Thury.

107 Collectif « Retrouvez les chefs d’œuvres de Delacroix à la chapelle des Saints-Anges de Saint-Sulpice », Ville de Paris, URL : https://www.paris.fr/pages/retrouvez-les-splendeurs-de-delacroix-a-la-chapelle-des-saints-anges-de-saint-sulpice-4241, consulté le 19 février 2024.

108 ROUGé, 2009.

109 JUDE, 2017.

110 Évangile selon Saint-Mathieu, chapitre 5, versets 3 à 11.

111 Inventaire du juge d’instruction : « sous un tabernacle 4 000 francs, sous un rochet 2 000 francs, dans le chambranle de la cheminée de la chambre 1 000 francs, dans le prie-Dieu 1 000 francs, dans les livres de la bibliothèque diverses sommes, plusieurs napoléons dans des tuyaux de poêle, en tout 11 400 francs or retrouvés ».

112 Collectif (archives départementales de l’Hérault), L’affaire Gélis. L’intégralité de l’enquête, Equinoxis (éd.), Espéraza, 2020.

113 COULON, 2012, p. 15-29.

114 MATHOREZ, 1932. p. 27-51.

115 Les Pyrénées-Orientales se trouvent rattachés à la France après le traité de Pyrénées (1659).

116 BRUNEL Philippe, Interview de Madame Barthe, août 2017 https://youtu.be/BV5lsaouMVs ?si =Tf-91DBrXiTaKYVz, consulté le 10 mai 2024.

117 GARNIER, 2024.

118 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 279.

119 CORBU, CAPTIER, 2018, p. 279 : l’ensemble fut payé 23 millions de francs en 1940.

120 DOINEL, 1907, p. 219-235.

121 ARMAND, 1891, p. 264.

122 Collectif, Académie des arts et sciences (Carcassonne), Mémoires de la Société des arts et des sciences de Carcassonne, L. Pomiés (éd.), Carcassonne, 1901. URL : http://catalogue.bnf.fr/ark :/12148/cb344108392, consulté le 15 février 2024.

123 CHARPENTIER, 1901, p. 138-180.

124 MENSIOR, 2017, p. 238.

125 LORET Jean, La muze historique, ou Recueil des lettres en vers contenant les nouvelles du temps : écrites à Son Altesse Mademoizelle de Longueville, depuis duchesse de Nemours (1650-1665), tome 3, P. Jannet (éd.), Paris.

126 DAFFOS, 2007.

127 Ibid. LORET Jean (extrait) : « …Mais j’ai scu, par d’autres billets, Que ce fut au Comté d’Alets, Et non celui de Toloze, Qu’arriva la susdite choze ; Et l’Evesque, dit-on, du lieu, Que l’on tient très zélé vers Dieu A prouz, touchant cette affaire, Encontre le Propriétaire Du champ où tomba l’or susdit… »

128 SAINT-MARC (de), CHASSAGNE (de la), 2010.

129 ROUQUETTE, 1996.

130 Certains chercheurs évoquent même la possibilité que Saunière n’était pas informé complètement du codage, à cause d’un manque de confiance de la congrégation de prêtres à son égard.

131 CORBU, CAPTIER 2018, p. 289.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1
Légende Présentation de la stèle de la marquise de Blanchefort, Bulletin de la SESA 1906.
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Titre Fig. 2
Légende La Vraie Langue celtique, d’Henri Boudet, frontispice et carte du Cromleck.
Crédits © Collection personnelle Gil Galasso
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Titre Fig. 3
Légende Étude de Jacques Mazières sur la carte Boudet81.
Crédits © Gil Galasso
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Titre Fig. 4
Légende Étude de Paul Jude sur un rapport entre la carte « Boudet » et le tableau de Poussin « les bergers d’Arcadie83.
Crédits © Gil Galasso
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Titre Fig. 5
Légende Document communément nommé « le Petit parchemin ».
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Titre Fig. 6
Légende Document communément nommé « le Grand parchemin ».
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Titre Fig. 7
Légende Blaise de Vigenère, Traicté des chiffres ou Secrètes manières d’escrire (1586), grille de codage.
Crédits © BnF, Gallica
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Titre Fig. 8
Légende Résolution du problème d’Euler, sens des sauts du cavalier.
Crédits © Wikipedia, travail personnel, utilisation libre de droits
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Titre Fig. 9
Légende Nicolas Poussin, Les Bergers d’Arcadie, 1640
Crédits © Musée du Louvre
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Titre Fig. 10
Légende Rennes-les-Bains (Aude), La tombe des Pontils en 1972.
Crédits © British Broadcasting Corporation
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Titre Fig. 11
Légende David Teniers le Jeune, Saint Antoine et Saint Paul dans le désert, 1660.
Crédits © Musée Ashmolean, Oxford, Royaume Uni
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Titre Fig. 12
Légende David Teniers le Jeune, Saint Antoine et les sept péchés capitaux, 1670.
Crédits © Musée du Prado, Madrid, Espagne
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Titre Fig. 13
Légende Rennes-le-Château (Aude), église Marie-Madeleine ; sculpture du diable soutenant le bénitier.
Crédits Jcb-caz-11 © Wikipédia
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Titre Fig. 14
Légende Rennes-le-Château (Aude), église Marie-Madeleine ; la fresque
Crédits Hawobo © Wikipédia
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Pour citer cet article

Référence électronique

Gil Galasso, « Rennes-le-Château, entre mystifications et réalités »Patrimoines du Sud [En ligne], 20 | 2024, mis en ligne le 01 octobre 2024, consulté le 10 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/16592 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12dtr

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Auteur

Gil Galasso

Docteur en histoire contemporaine, Université Bordeaux Montaigne

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Droits d’auteur

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