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Dossier - La peinture monumentale en Occitanie du Moyen Âge à nos jours
Street Art

Projet Street Art du Pays Portes de Gascogne

The Street Art Project of the Pays Portes de Gascogne
Aurélie Bégou

Résumés

Le projet culturel du Pays Portes de Gascogne est structuré comme un véritable projet de développement local. C’est dans ce contexte que se sont structurés les Itinéraires Artistiques, démarche débutée en 2010 par le circuit Art et Environnement et poursuivie depuis par le projet Street Art.

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Texte intégral

Le 1er chantier collectif du Pays Portes de Gascogne : un projet culturel

1Le Pays Portes de Gascogne est un territoire situé à l’est du département du Gers en Occitanie. Avec 159 communes et 5 intercommunalités, il couvre un tiers du département du Gers, et est le territoire qui gagne le plus de population dans ce département. Sa situation géographique à la croisée de plusieurs aires urbaines – Toulouse Métropole, agglomération d’Agen, ville d’Auch – lui confère un caractère spécial d’accueil de nouvelles populations. C’est d’ailleurs sur cet enjeu qu’il s’est créé au début des années 2000. Le projet culturel a été le premier chantier collectif mené sur ce territoire caractérisé par une forte recomposition sociologique avec pour ambition principale de créer du lien entre les habitants. Après 20 ans d’existence, le projet culturel a été réaffirmé lors du renouvellement du projet de territoire et est devenu un des quatre piliers de développement de la stratégie générale du territoire. Il a été par la même occasion renouvelé pour la période 2021-20271.

2Une des particularités de ce territoire est sa forte implication citoyenne. En effet, le conseil de développement, composé d’élus et de citoyens du territoire, prend une place importante dans la vie démocratique du territoire. Ce conseil de développement est d’ailleurs à l’origine de la réflexion sur le tourisme culturel qui a permis de voir émerger le circuit Art et Environnement et qui, par la suite, a contribué à structurer les Itinéraires Artistiques du Pays Portes de Gascogne qui sont devenus un marqueur très fort du territoire.

3Le projet culturel du Pays Portes de Gascogne est structuré comme un véritable projet de développement local. Il s’appuie sur les ressources de son territoire : acteurs associatifs, habitants, équipements culturels… et se positionne comme source de compréhension du monde dans lequel il évolue. Il y a ainsi une forte orientation concernant le volet environnemental, une prise en compte des enjeux autour des mobilités, une sensibilité très forte à la jeunesse, et d’une manière générale une prise en compte des enjeux liés aux transitions, qu’elles soient écologiques, économiques, ou encore sociétales.

Un marqueur fort du Pays Portes de Gascogne : les Itinéraires Artistiques

  • 2 Pôle d’équilibre territorial et rural.

4C’est donc dans ce contexte que se sont structurés les Itinéraires Artistiques, démarche débutée en 2010 par le circuit Art et Environnement, à ses débuts appelé Land Art. Il a suscité chez les élus du PETR2 l’envie de poursuivre cette orientation du tourisme culturel. Une réflexion a été menée en lien avec un repérage d’actions qui avaient été accompagnées de manière isolée dans un premier temps, mais qui pouvaient faire l’objet d’un projet plus construit sur le modèle du premier circuit.

5Ainsi les rencontres artistiques sur les cultures urbaines de la commune de Saint-Clar, incluant des ateliers graffs, et la sollicitation de la commune de Lombez pour réaliser un projet Street Art ont constitué le terreau de réflexion pour l’émergence d’un deuxième circuit, cette fois-ci dédié au Street Art.

6Il est, comme le premier, construit sur un objectif de développement du tourisme culturel avec une forte entrée artistique. Chacune des œuvres est réalisée sous forme de résidence où la relation entre l’œuvre, l’artiste, et les habitants est centrale.

Un projet Street Art source de renouvellement des regards sur l’environnement patrimonial

7Ces projets Street Art participent au renouvellement du regard des habitants sur leur environnement quotidien, ils servent à révéler ce que l’on ne voit plus, ce que l’on peut parfois trouver sans intérêt. Ces œuvres offrent ce renouvellement parce qu’elles transforment notre regard sur l’espace public, ou sur un élément patrimonial en particulier.

8Certains projets peuvent même contribuer à des restaurations patrimoniales, c’est le cas du projet d’Adèle Renault à Sempesserre avec la « Perdrix Rouge » (fig. 1). Cette peinture murale s’insère dans un environnement patrimonial traditionnel gersois. Cependant le support de réception de l’œuvre n’était à la base qu’un mur en parpaings impactant négativement le paysage. Quoiqu’on puisse penser de l’œuvre réalisée, elle apporte une forme de restauration à un mur dont le caractère visuel avant l’exécution de la peinture était ressenti de manière négative par les habitants. Elle transforme le regard des visiteurs, tout en transmettant un message fort. En effet, cette réalisation s’insère dans le cadre du projet mondial Audubon Mural Project3, opération de sensibilisation à la protection des oiseaux. À Sempesserre, cette peinture murale résonne avec la politique de replantation de haies de la commune pour réintroduire la perdrix rouge.

Fig. 1

Fig. 1

Sempesserre, Perdrix Rouge, par Adèle Renault.

© Isabelle Souriment

9Les résidences ont également un rôle non négligeable, en lien avec ce pour quoi le territoire développe un projet culturel de territoire depuis si longtemps : créer du lien social. La culture est un véritable liant sur le territoire du Pays Portes de Gascogne.

10Ce projet s’adresse en premier lieu aux personnes qui habitent la commune et va venir bousculer leur vie quotidienne avec l’arrivée, bien que temporaire, d’un ou des nouveaux arrivants (le/la ou les artistes). Le projet artistique va être vecteur de rencontres, de convivialité, et de découvertes. Tout ceci étant lié autant à la personnalité de l’artiste, qu’à son univers qu’il va expliquer, ainsi qu’aux propositions que nous allons bâtir collectivement : cela peut-être des ateliers de pratique artistique, la diffusion d’un film en lien avec le sujet abordé, des balades commentées…

11Le projet artistique proposé par le collectif Super Brutes à Sarrant en 2021 illustre très bien ce que peut apporter un projet artistique pour la sensibilisation des habitants à leur patrimoine. La particularité de ce duo artistique est qu’il est composé de deux architectes illustratrices. Ce profil atypique a permis de donner du sens au dialogue entre une œuvre contemporaine et un village médiéval où plusieurs édifices sont classés ou inscrits au titre des monuments historiques (fig. 2). Leur expérience d’architecte a conduit à aborder la question des matières (ici peinture à la chaux) et des choix des couleurs, qui est une problématique souvent clivante entre les habitants et les services de l’architecture (fig. 3). Ce projet a donné des repères sur les normes architecturales à respecter, et le dialogue permanent nécessaire qui doit être développé entre architecture ancienne et contemporaine. L’éclairage sur le lien passé/présent/futur allait bien au-delà des questions architecturales et patrimoniales, puisque la résidence de plusieurs semaines a permis d’observer (via les balades commentées) et de débattre des mutations du monde agricole donc paysagères, mais aussi de la naissance de nouveaux quartiers à la place d’anciens hameaux qui se vidaient avant l’arrivée des nouvelles populations. Cette résidence a été une expérience macro en lien avec la problématique générale du Pays Portes de Gascogne : l’accueil des nouvelles populations et la nécessité de créer du lien entre les habitants, au-delà des différences de chacun.

Fig. 2

Fig. 2

Sarrant, Ensemble vivant, par Super Brutes.

© Isabelle Souriment

Fig. 3

Fig. 3

Sarrant, Ensemble vivant (détail), par Super Brutes.

© Isabelle Souriment

12Tout est réinventé à chacun des projets, même s’il existe une trame commune de travail basée sur la mise en place d’un comité de pilotage élargi, la concertation locale, et la prise de risque partagée.

Un projet au service des transitions : le développement du tourisme de proximité

13Ces projets permettent de développer le tourisme de proximité qui est aujourd’hui, au regard des différentes crises que nous avons connues et que nous continuons de traverser, un enjeu essentiel. C’est un tourisme de proximité à plusieurs étages, des habitants du territoire du Pays Portes de Gascogne, des habitants du reste du département du Gers, des visiteurs de la région Occitanie, puis bien sûr de contrées plus lointaines. Mais le cœur de cible peut être le tourisme de proximité, que nous pouvons relier aux enjeux de transitions environnementales.

14C’est aussi dans cet objectif que nous avons décidé de le connecter à un autre projet phare du Pays Portes de Gascogne lié à la mobilité douce. Ainsi toutes les œuvres du territoire sont reliées entre elles par des parcours réalisables à vélo, sur des routes secondaires moins fréquentées et ayant un attrait paysager et touristique. Comme les vallons du Gers peuvent éprouver la résistance physique des personnes même entraînées, nous avons développé un service de location de vélo à assistance électrique en partenariat avec les tiers-lieux et les offices de tourisme du territoire.

15Le projet de circuit Street Art revêt donc plusieurs enjeux, de décryptage et de sensibilisation patrimoniale, en passant par la création artistique, sans oublier la question des transitions environnementales.

Trois exemples

16Je me suis appuyée sur plusieurs exemples pour tenter d’exprimer au plus près les différents types d’enjeux liés à la programmation de création de ces peintures murales.

Sens Dessus Dessous, Thomas Deudé et Stéphane Castet, Tournecoupe 2018

17Le projet de Tournecoupe « Sens Dessus Dessous » réalisé en 2018 par les deux artistes Thomas Deudé et Stéphane Castet prend son origine sur la façade d’une ancienne poste sur laquelle de vieilles inscriptions sont encore visibles (fig. 4). L’ensemble du village est d’ailleurs doté de peintures murales publicitaires anciennes, presque effacées, témoins d’un passé pourtant récent mais aujourd’hui d’un autre monde. Ces traces ont beaucoup inspiré les artistes dans la manière d’investir le village. Cela a donné lieu à des discussions avec les plus anciens et permis également de réinterroger la fonction de ce village, de constater que dans un temps pas si lointain il y avait la présence de plusieurs anciens commerces, ce qui paraît aujourd’hui inimaginable à l’heure du tout voiture où les distances sont gommées. Ce projet conduit à s’interroger au-delà du simple aspect artistique, sur ce qui constitue le cœur de notre motivation dans la mise en œuvre de projets culturels de proximité.

Fig. 4

Fig. 4

Tournecoupe, Sens Dessus Dessous, par Thomas Deudé et Stéphane Castet.

© Isabelle Souriment

18Nous avons tout de même rencontré au démarrage de ce projet un problème d’identification de lieu et de légitimité d’action car l’église est classée au titre des monuments historiques et le village est quasiment entièrement sous la servitude du périmètre de protection des 500 mètres. Nous avons donc fait appel à l’Architecte des bâtiments de France du Gers, Clémentine Perez-Sappia, pour nous aider à identifier les murs qui pourraient être investis sans porter atteinte à la richesse et aux particularités patrimoniales. C’est donc son éclairage qui nous a fait démarrer à partir de cette ancienne poste, aujourd’hui transformée en logements sociaux, dont la commune est propriétaire. Les artistes ont très vite trouvé une trame et un lien entre toutes ces anciennes publicités encore visibles dans le village et les inscriptions anciennes de Postes Télégraphes. Le caractère participatif de la résidence a permis à une nouvelle habitante qui est écrivaine de se prendre au jeu du projet artistique. Elle a largement participé à l’animation des ateliers artistiques avec l’école et les artistes. Elle a fait le lien entre les mots, les lettres, et a ainsi contribué entièrement au projet (qui consiste à retrouver les lettres du nom de la commune disséminées sous forme de parcours dans tout le village). Cette rencontre a conduit à donner encore plus de profondeur au projet, dont la mémoire est désormais collective, partagée entre les habitants, et surtout par les élèves de l’école. Ces derniers ont placé, avec la complicité des artistes, des documents sous les œuvres dont ils sont les seuls à connaître le contenu. En quelque sorte ces élèves se retrouvent reliés à vie à ce projet, aux œuvres, et au dialogue entre le patrimoine, les anciennes inscriptions, et ces nouvelles empreintes artistiques.

19Ce village au fort caractère patrimonial était jusqu’à ce projet peu (ou pas assez) mis en avant d’un point de vue touristique. Ce projet artistique permet désormais de le valoriser, qui plus est, de manière originale et accessible à tous.

The Duck Face, Veks Van Hillik, Gimont, 2018

20« The Duck Face » de l’artiste Veks Van Hillik, est aussi implantée dans le périmètre d’un édifice classé au titre des monuments historiques (fig. 5). Elle trouve sa place sur une halle construite en 1970 dédiée à la vente de palmipèdes et de foie gras, et au moment de la conception de l’œuvre elle recevait également les Rencontres Aéronautiques de Gimont.

Fig. 5

Fig. 5

Gimont, The Duck Face, par Veks Van Hilik.

© Pays Portes de Gascogne

21Cette halle n’est pas facile à appréhender d’un point de vue architectural, elle ne répond pas, à première vue, aux codes habituels de la reconnaissance patrimoniale par le grand public. Là aussi le travail avec l’Architecte des bâtiments de France s’est révélé formateur. Son accompagnement a permis de décrypter l’architecture de cette halle, et de déconstruire nos propres regards avant même l’arrivée de l’œuvre. Il y a eu beaucoup d’allers retours entre l’artiste et les membres du comité de pilotage pour aboutir à la proposition actuelle.

22Malgré le fait qu’elle ait été lauréate de l’appel à projet Street Art 2018 du ministère de la Culture, c’est certainement l’œuvre qui a été la plus clivante du circuit (fig. 6). L’univers de l’artiste n’a pas toujours été compris. Pour tenter de faire appréhender l’œuvre, nous avons engagé un gros travail de médiation notamment en direction des scolaires. Ces différentes rencontres ont permis de tisser un lien très fort entre les jeunes de Gimont et l’artiste. Ils n’ont eu aucun problème d’approche de son univers et du Duck Face. La diffusion notamment du documentaire de Jérôme Thomas « Sky’s the limit, les peintres de l’extrême », avec un débat discussion à l’issue de la projection a conduit les publics à prendre conscience de l’inscription de ce projet dans une démarche de muralisme. Les personnes qui se sont déplacées sont ainsi véritablement entrées dans l’univers de l’artiste, et ont pris la mesure de l’inscription du Duck face dans un mouvement mondial celui du muralisme.

Fig. 6

Fig. 6

Gimont, The Duck Face (détail), par Veks Van Hilik.

© Isabelle Souriment

Portrait, Amandine Urruty, Pujaudra, 2020

23Nous avons reçu en 2020 l’artiste Amandine Urruty. Sa peinture murale s’inscrit cette fois-ci dans un contexte différent puisqu’elle est réalisée sur un bâtiment neuf, la mairie/médiathèque (fig. 7).

Fig. 7

Fig. 7

Pujaudran, Portrait, par Amandine Urruty

© Isabelle Souriment

24Là aussi de nombreuses rencontres ont été organisées avec les habitants. Tous les élèves de l’école ont échangé avec l’artiste. Le titre, Portrait, a été choisi par les élèves de l’école maternelle.

25Amandine Urruty était également programmée au Centre d’art contemporain départemental « Memento » à Auch. Ce qui a créé une circulation des publics, entre celui du centre d’art et les habitants de Pujaudran. Ces derniers étant peu tournés vers Auch, située à plus de 50 km, alors que Toulouse n’est qu’à 15 minutes, ce fut donc l’occasion qu’ils découvrent le centre d’art. Cette expérience permet de mesurer aussi ce qu’un projet peut générer, en dehors de l’aspect purement artistique.

26D’un point de vue méthodologique, nous avons développé la résidence comme toutes les autres : sous forme de rencontres, d’ateliers… La trame est commune, mais chaque projet s’organise en fonction de son écosystème local : présence d’associations, collectifs d’habitants, commerces… Enfin la prise en compte de l’environnement architectural et patrimonial local est systématique sur chacun des projets. Il faut créer des conditions de rencontres favorables entre l’artiste et son univers, et l’espace dans lequel sa future œuvre va s’implanter.

Street Art or not Street Art ?

27Chaque projet est unique dans sa configuration et dans sa construction.

28Les comités de pilotage varient en fonction des forces en présence localement ; mais également de la complexité des projets, tous ne font pas appel aux compétences de l’architecte des bâtiments de France par exemple.

29Le processus de réalisation de l’œuvre est aussi important que le volet de la création. Ce phénomène est éloigné du geste spontané que l’on retrouve habituellement dans les projets de Street Art comme les précédentes communications au colloque l’ont évoqué. Notre projet s’en éloigne un peu car il y a beaucoup de réflexions collectives en amont sur la définition du projet. On utilise d’ailleurs quasiment plus le mot Street Art pour définir notre circuit, car d’une part très peu d’artistes avec qui nous travaillons se revendiquent de cette esthétique, et d’autre part les univers artistiques présentés sont plus larges que la dénomination Street Art.

30Nous avons l’exemple de Jérôme Souillot qui a réalisé deux œuvres monumentales en 2020 à Castillon-Savès et à Ségoufielle (fig. 8). Ce sont ses premières réalisations durables dans l’espace public. Jérôme Souillot évolue dans le milieu de l’art contemporain, et a également un parcours de scénographe en danse contemporaine.

Fig. 8

Fig. 8

Ségoufielle, Je reste, par Jérôme Souillot.

© Isabelle Souriment

31Pour autant il s’agit tout de même d’interventions artistiques sur des murs ou dans l’espace public. Quand cela concerne les murs, j’ai bien compris avec ce colloque que les mots avaient leur importance et qu’il serait peut-être plus adapté nous concernant de parler de peintures murales.

Les choix artistiques en concertation locale

32Concernant le choix des artistes, nous procédons soit à un appel à projet, soit nous effectuons une sélection de plusieurs artistes que nous proposons au comité de pilotage. Ce dernier cas peut se retrouver par exemple si une communauté de communes nous demande d’intervenir sur plusieurs murs dans un temps resserré. Quelle que soit la méthode de sélection retenue, c’est toujours par le comité de pilotage que le choix se réalise. Le comité de pilotage réunit obligatoirement les élus propriétaires des murs, pour l’instant les interventions ont eu lieu uniquement sur des bâtiments publics. Il regroupe également les partenaires institutionnels, la conseillère arts plastiques et le conseiller territorial actions culturelles de la Drac Occitanie, l’architecte des bâtiments de France si besoin, le Fonds Régional d’Art Contemporain si besoin également. Si des structures scolaires sont présentes, des enseignants peuvent être sollicités. La composition du comité de pilotage varie en fonction des ressources locales motivées par le projet.

33Une de nos particularités est l’adaptation constante au contexte local. En aucun cas, le Pays Portes de Gascogne choisit seul, aucun artiste n’est imposé. Cependant nous avons pour mission d’assurer la direction artistique générale des Itinéraires Artistiques, les choix doivent donc s’inscrire en cohérence avec l’ensemble de l’opération.

34Le contenu du projet artistique doit se construire en lien et en cohérence entre les attentes du commanditaire, mais aussi avec l’univers de l’artiste, et l’environnement dans lequel l’œuvre va s’inscrire.

35Il faut être vigilant à ce que les mondes de chacun se rencontrent, tout en veillant à la liberté artistique, et en prenant en compte les attentes locales. Nous avons très souvent à gérer les craintes des élus qui surgissent au moment où il faut lancer le projet officiellement. Il y a un très fort désir artistique de leur part, mais ils ont également une forme d’épée de Damoclès au-dessus de la tête craignant le jugement de leurs administrés. Le Pays a alors un grand rôle à jouer pour rassurer, convaincre, quelque fois rappeler les enjeux du projet, la nécessaire liberté artistique, et que rien d’autre ne leur sera proposé qu’une représentation de l’univers de l’artiste qu’ils ont choisi et qu’ils connaissent. Ce sont quasiment des passages obligés dans la mise en œuvre de chacun des projets, cela se traduit quelquefois par des tensions, mais cela nous oblige à être constamment vigilants sur notre approche avec les habitants, et à être inventifs dans nos propositions de médiation. Nous sommes en quelque sorte en adaptation constante avec la « biodiversité humaine locale ».

36Nous partageons la prise de risque. Ces résidences peuvent parfois prendre les contours d’un pari difficile à relever, mais une fois réalisées, elles semblent la majeure partie du temps avoir trouvé leur place naturellement auprès des habitants.

Un projet mouvant, une réflexion permanente

37Pour chacune des œuvres créées, nous gardons des traces vidéo et/ou photographiques du projet. Elles constituent une mémoire pour la commune, mais aussi pour le territoire.

38Pour alimenter le rapport à l’œuvre, nous créons également des supports de médiation là aussi adaptés en fonction du contexte. Cela peut aller de la création d’une série de cartes postales à retrouver dans les différents commerces du village, à la création partagée entre l’artiste et les habitants sur un lieu dédié en dehors de l’œuvre.

39Une Z-Card regroupant l’ensemble des œuvres est mise à disposition des communes, des offices de tourisme… Elle permet d’être un support de médiation permanent. Des cartels sont également apposés auprès des œuvres, donnant des clés de compréhension de l’œuvre et présentant l’univers de l’artiste.

40Nous nous sommes posés beaucoup de questions pour nommer ces circuits. Le premier a muté de Land Art à Art et Environnement de façon assez naturelle. Pour le deuxième nous avons progressivement identifié que Street Art n’était pas forcément le plus adapté du fait de la diversité des artistes programmés. La réflexion que nous avons entamée lors de ce colloque permettra surement de faire évoluer et préciser notre dénomination de parcours !

41Concernant la conservation des œuvres, nous ne sommes pas allés très loin dans cette réflexion. Cela a sans doute à voir avec le fait que notre famille d’action est liée au développement local, et donc par la même peut-être plus portée sur le développement de projets ? C’est en tout cas une question dont nous allons devoir nous saisir plus profondément. Pour l’instant nous avons convenu avec les artistes du vieillissement naturel des œuvres. Concernant le possible recouvrement par des tags, nous avons abordé ces questions avec certains artistes, leur position est plutôt la non-intervention. Les peintures murales actuelles n’ont pas été recouvertes, sauf une peinture à Lombez sur un site éloigné du centre-ville, des graffs apparaissent plutôt à côté des œuvres pour montrer le passage de certain·e·s.

42Peut-être peuvent-ils être interprétés comme une forme d’appropriation de ces œuvres ?

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Notes

1 Projet culturel 2021-2027 du Pays Portes de Gascogne.

2 Pôle d’équilibre territorial et rural.

3 Pour plus d’informations sur ce projet, voir : https://murs-audubon.org/ ou https://www.audubon.org/amp.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1
Légende Sempesserre, Perdrix Rouge, par Adèle Renault.
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 575k
Titre Fig. 2
Légende Sarrant, Ensemble vivant, par Super Brutes.
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 482k
Titre Fig. 3
Légende Sarrant, Ensemble vivant (détail), par Super Brutes.
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 1,3M
Titre Fig. 4
Légende Tournecoupe, Sens Dessus Dessous, par Thomas Deudé et Stéphane Castet.
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 478k
Titre Fig. 5
Légende Gimont, The Duck Face, par Veks Van Hilik.
Crédits © Pays Portes de Gascogne
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 758k
Titre Fig. 6
Légende Gimont, The Duck Face (détail), par Veks Van Hilik.
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 281k
Titre Fig. 7
Légende Pujaudran, Portrait, par Amandine Urruty
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 602k
Titre Fig. 8
Légende Ségoufielle, Je reste, par Jérôme Souillot.
Crédits © Isabelle Souriment
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/docannexe/image/13973/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 644k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Aurélie Bégou, « Projet Street Art du Pays Portes de Gascogne »Patrimoines du Sud [En ligne], 18 | 2023, mis en ligne le 01 septembre 2023, consulté le 15 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pds/13973 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/pds.13973

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Auteur

Aurélie Bégou

Cheffe de projet culturel PETR Pays Portes de Gascogne

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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