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Les possessions d’Athéna

The possessions of Athena
Ioanna Patera
p. 139-154

Résumés

L’ensemble des possessions d’Athéna Polias, comprenant objets précieux et monnaies ainsi que terrains et bâtiments, constitue une fortune exceptionnelle au ve s. av. J.-C. En reprenant les aléas de la fortune de la déesse au cours du temps, cet article s’attache à interroger le statut de ces biens que révèlent leur dénomination et l’utilisation qu’en font les magistrats de la cité responsables de leur gestion.

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Texte intégral

1Les dieux sont propriétaires de différents biens, ceux que les cités et les particuliers leur consacrent ou qu’ils leur attribuent dans le but d’entretenir avec eux la meilleure relation possible. Parmi les catégories de richesses, celle des hiera chrêmata qui appartiennent aux dieux, comprennent des biens à la fois meubles et immeubles. Ils sont clairement distingués des biens publics, les dêmosia. Les possessions d’Athéna, la déesse la plus riche d’Athènes, constituent un cas privilégié qui permet de poser une série de questions concernant la gestion de ces biens et, par conséquent, leur statut. Il ne s’agit pas ici de soulever toutes les problématiques que suscite la documentation ni de reprendre la bibliographie dans son ensemble, mais de revenir sur les biens désignés comme hiera afin de préciser davantage cette catégorie et les éléments qu’elle comprend.

  • 1 Chankowski, 2011, p. 143.

2L’importance économique des sanctuaires est manifeste, car ils fonctionnent à la fois comme réserves de richesses sous forme d’objets précieux, de monnaies et de terrains exploitables, et comme redistributeurs, notamment par l’achat de matières premières et la conclusion de contrats de construction. Si la cité gère le cadre juridique des constructions, les sanctuaires engagent des artisans, lèvent des taxes, servent de banques et louent des terrains1.

  • 2 IG I3 454-460 (447/6-438/7).
  • 3 Stanier, 1953, p. 73.
  • 4 IG I3 436-451. Kallet-Marx, 1989, p. 260 ; Samons, 2000, p. 33, 41-42 et 76, pour les sources conce (...)

3Comment fonctionne dès lors un sanctuaire comme celui d’Athéna sur l’Acropole d’Athènes ? Les inventaires sont de précieux indicateurs des réserves, mais ils sont sélectifs quant aux objets inventoriés. Ils ne permettent donc pas de dresser une liste de tous les biens appartenant à la déesse à un moment donné. Les comptes des magistrats qui en sont responsables soulèvent la question de l’intervention de l’État dans le fonctionnement du sanctuaire. Dans quelle mesure puise-t-on dans la caisse publique pour que les choses se passent au mieux avec les hommes et les dieux, selon la formule consacrée ? Ainsi, la statue chryséléphantine d’Athéna conçue par Phidias a été financée par la caisse de la déesse2. Mais qu’en est-il de la construction du Parthénon d’Ictinos et de Callicratès, qui a coûté à peu près cinq cents talents3 ? La caisse principale pour ses travaux est celle des trésoriers d’Athéna, mais les hellénotames de la Ligue délienne contribuent également pour compléter les fonds nécessaires4.

  • 5 Connor, 1988, p. 164-166 ; Blok, 2010 ; Migeotte, 2014, p. 22. Voir Samons, 2000, p. 29, pour la de (...)
  • 6 Démosthène, Contre Timocrate, (24), 9. Selon Migeotte, 2014, p. 22, les hosia sont ici des fonds «  (...)

4Bien que les caisses sacrée et publique soient clairement différenciées, une autre catégorie de biens, les hosia, obscurcit cette distinction. À Athènes, à partir de la seconde moitié du ve s., on distingue entre les biens hiera d’une part et les hosia d’autre part. Ces derniers sont soit des biens qui appartiennent aux dieux mais dont les hommes peuvent disposer librement, soit des biens qui sont utilisés pour les dieux alors qu’ils font partie des trésors publics5. Ainsi, l’accusation de Démosthène contre Timocrate, porte-t-elle sur sa proposition de loi permettant de priver d’une part les dieux de leurs trésors (hiera chrêmata) et, d’autre part, la cité de ses fonds (hosia)6. Sans pouvoir ici traiter le sujet de manière exhaustive, en examinant de plus près les ressources et la destination du trésor de la déesse, aussi bien son trésor monétaire que ses biens meubles et immeubles, on peut cerner de manière un peu plus précise ces différentes catégories.

1. Le trésor d’Athéna

  • 7 Selon Blamire, 2001, p. 100, le montant de 9700 talents résulterait de la combinaison du trésor d’A (...)
  • 8 Thucydide, II, 13, 3-5. Cf. Éphore, FGrHist 70 F 196 et Diodore de Sicile, XII, 40, 2. Selon Meritt (...)

5Le discours prononcé par Périclès en 431, au début de la guerre du Péloponnèse, est l’informateur le plus précis concernant le trésor d’Athéna. Il énumère tous les biens dont les Athéniens pourraient éventuellement disposer en cas de nécessité pour financer leurs campagnes militaires. Il y avait en moyenne une rentrée annuelle de six cents talents provenant du tribut des alliés. Il y avait en outre, disponibles sur l’Acropole, six mille talents d’argent monnayé. Thucydide précise que le montant maximum avait été de neuf mille sept cents talents, d’où l’on avait prélevé les dépenses pour la construction des Propylées et d’autres bâtiments, ainsi que pour les opérations militaires de Potidée en 4327. À ces fonds, Périclès ajoutait l’or et l’argent non monnayé des dédicaces aussi bien publiques que privées, les ustensiles sacrés (hiera) utilisés lors des processions et des jeux, et le butin fait sur les Perses, l’ensemble ne valant pas moins de cinq cents talents. Tout cela sans compter les trésors disponibles dans les autres sanctuaires. Si jamais leurs ressources venaient à se tarir, Périclès préconisait d’utiliser même le revêtement d’or de la statue de la déesse, pas moins de quarante talents d’or pur. Il précise toutefois que, si les Athéniens utilisaient ces biens, ils devraient intégralement les restituer8.

  • 9 Aristote, Constitution des Athéniens, 4, 2 et 8, 1 respectivement.
  • 10 IG I3 52 A 18-20. Pour le trésor des autres dieux, voir Ferguson, 1932, p. 165 et Meiggs, Lewis, 19 (...)

6Périclès ne dit rien des procédures à suivre, mais les biens gardés sur l’Acropole sont administrés par divers groupes de magistrats. Sous Dracon, les trésoriers sont élus, alors qu’après la législation de Solon (594/3), ils sont tirés au sort parmi les pentakosiomedimnoi9. Le décret de Callias fait référence quant à lui à un groupe de trésoriers qui gère les biens des autres dieux10.

  • 11 Ferguson, 1932, p. 104-109 ; Samons, 2000, p. 262. Ils apparaîtront à nouveau comme deux groupes sé (...)
  • 12 Aristote, Const., 30, 2. Voir Samons, 2000, p. 71 et 279 ; Migeotte, 2014, p. 431. Ils disparaissen (...)
  • 13 Aristote, Const., 47, 1.
  • 14 Ibid., 48, 3 et 54, 2.

7Dans la constitution des Quatre-cents de 411, les dix trésoriers de l’argent sacré de la déesse et des autres dieux sont nommés pour un an et élus parmi les bouleutes, sans indemnité. Ils fusionnent en un seul groupe dès 40611. Vingt hellénotames gèrent les fonds publics (hosia)12. Sous les Cinq-cents, dès 410, les trésoriers d’Athéna, au nombre de dix, reçoivent en présence du Conseil la statue d’Athéna, les Nikai, les autres objets précieux (kosmos) et l’argent (chrêmata)13. Dix auditeurs (logistai) révisent les comptes assistés par dix substituts (sunêgoroi)14.

  • 15 Migeotte, 2014, p. 79 et p. 486-489, pour les prêts à la cité sur les fonds sacrés de l’Acropole.

8Les groupes de magistrats assignés à la garde des différentes caisses montrent que les fonds public et ceux des dieux sont entièrement distincts, bien que le rapport entre ces trésors reste pour nous difficile à appréhender. Nous pouvons suivre de manière plus ou moins précise les aléas du trésor gardé sur l’Acropole sur la base des comptes des trésoriers d’Athéna rédigés dans la seconde moitié du ve s. Ils mentionnent principalement les prêts consentis à la cité et les dépenses militaires, sans préciser l’état des finances de la déesse15. Une autre question qui se pose par rapport au trésor d’Athéna est celle du rapport entre les biens meubles et l’argent monnayé.

2. Biens meubles et argent monnayé

9Les inventaires des trésoriers d’Athéna, allant de 434/3 à 300, énumèrent quantité d’objets transmis par un groupe de magistrats au suivant selon la procédure de la paradosis, à la fin des Petites Panathénées. La plupart consistent en dédicaces. Cependant, les listes en sont abrégées et il nous manque souvent aussi bien le nom du dédicant que la raison de la dédicace. Sont également inventoriés les autres objets précieux, notamment ceux de la déesse, et l’argent. Les divers objets sont répartis entre le Parthénon, l’Érechthéion, la Chalcothèque et la Stoa d’Artémis Brauronia. On y dénombre des phiales, des hydries, des instruments de musique, des thumiatêria, des trônes et tabourets, des bijoux tels des bagues, bracelets et colliers.

  • 16 Pour les incertitudes concernant la nomenclature des bâtiments, voir Harris, 1995, p. 2-8.
  • 17 IG II2 120 (353/2), 26-33.

10Les objets du Parthénon sont inventoriés dans les quatre pièces du bâtiment, le proneos, l’hécatompédon, le parthénon et l’opisthodome16. Quelle que soit l’identification exacte de ces pièces, les inventaires établissent une topographie des richesses qu’elles contiennent. Le proneos contenait principalement des vases d’or et d’argent. Ce n’est qu’avec la fonte d’objets vers la fin de la guerre du Péloponnèse que s’arrêtent les inventaires pour cette pièce. L’opisthodome servait de réserve avec des phiales d’or et d’argent non décorées pesant cent drachmes chacune, des objets d’or et d’argent, des petits bijoux, ainsi que le nécessaire pour battre monnaie avec un marteau, une enclume et des matrices. La pièce du parthénon contenait des objets plus variés, notamment des meubles, des vases métalliques, des couronnes dorées, des armes, des bijoux et des pierres précieuses, des instruments servant au sacrifice, des instruments de musique, des vêtements, des statues et des monnaies d’or et d’argent. L’hécatompédon abritait la statue chryséléphantine d’Athéna, comptée parmi les biens de la déesse. Il y avait encore des couronnes dorées, des monnaies, du matériel pour battre monnaie et pour la tester, des bijoux et des vêtements, des armes et des instruments de musique. L’Érechthéion contenait des armes, les bijoux et les ornements de la statue d’Athéna Polias (une chouette en or et une phiale, l’égide et une couronne), des vases et des couronnes. Il y a encore les objets en bronze de la Chalcothèque, recensés pour un contrôle (exetasmos) en 353/217.

11Les objets inventoriés portent souvent une étiquette et sont rangés dans des boîtes ou des paniers. Ils sont identifiés selon divers critères dont le matériau, l’état de conservation, la décoration, le poids et, pour les inscriptions les plus récentes, le nom du dédicant et de la divinité destinataire qui n’est pas toujours Athéna.

  • 18 IG I3 259-290. Contrairement à l’opinion commune considérant que l’ensemble du tribut des alliés a (...)
  • 19 Thucydide, III, 50, 1-2 ; les Athéniens ont divisé trois mille lots de terrains dont trois cents po (...)
  • 20 Selon Démosthène, Contre Macartatos, (43), 71, l’amende pour l’arrachage est de cent drachmes par o (...)

12À côté des objets, il y a le fonds monétaire d’Athéna. Sa composition illustre les ressources du trésor de la déesse. Il est en effet constitué à partir de dons, de l’aparchê qui représente le soixantième du tribut des alliés18, de revenus immobiliers, notamment de terres confisquées comme celles de Lesbos19, de dîmes de butin comprenant des hommes et des biens, de biens confisqués et aussi d’amendes, notamment celles infligées pour l’arrachage des oliviers sur le territoire athénien20.

  • 21 D’autres ressources destinées au financement des cultes proviennent des taxes cultuelles, voir Mige (...)
  • 22 Bogaert, 1968, p. 91.
  • 23 Pour les sources et la pratique de la parakatathêkê, voir ibid., p. 281-288. En effet, ce sont les (...)

13Ce trésor monétaire est en premier lieu destiné à l’entretien du sanctuaire21. L’État pouvait néanmoins emprunter des sommes avec un taux d’intérêt de 1,2 %22. Les prêts consentis par les magistrats en charge de gérer les richesses des grands sanctuaires athéniens se résument en effet à ceux accordés à l’État et il ne semble pas qu’ils aient prêté à d’autres cités ou à des particuliers, bien que ces derniers eussent pour habitude de déposer leur argent à l’Hécatompédon pour qu’il soit gardé23.

  • 24 IG I3 383 (429/8).
  • 25 IG II2 1443 (344/3), 12 : εἰς τὰ στρατιωτικά.
  • 26 Kosmetatou, 2001, p. 29-30.

14Les trésoriers des autres dieux gèrent également un fonds monétaire24. Les propriétés de chaque divinité restent clairement identifiables. En 344/3, ils gèrent aussi une somme d’argent non frappé qui constitue un fonds pour des opérations militaires25. Il y a de l’or non frappé et en pépites, des vases précieux, des monnaies attiques d’argent et étrangères en électrum, déposés à un endroit non déterminé26.

  • 27 IG I3 314-316.
  • 28 Philochore, FGrHist 328 F 141 (Hellanicos, FGrHist 323a F 26 ; Schol. Aristophane, Grenouilles, 720 (...)

15Pour emprunter aux trésors des dieux, les Athéniens ont parfois dû fondre des objets et battre monnaie. La première fonte d’objets d’Athéna apparaît dans les inventaires de 409/8-407/6 et 403/2, avec la liste des objets transmis aux hellénotames à cet effet27. En 407/6, selon Philochore, les Nikai sont fondues pour battre monnaie28. Il est donc clair que les trésors d’Athéna, ses hiera, pouvaient être utilisés à des fins militaires moyennant une procédure mise en œuvre par les magistrats. Ils passent donc au statut de hosia, bien que la terminologie ne soit pas employée dans notre documentation.

  • 29 IG I3 99, 8-12.
  • 30 Harris, 1995, p. 29, pour les sources.

16Comme le préconisait Périclès dans son discours, l’argent emprunté à Athéna et les objets de l’Acropole utilisés pour financer la guerre devaient être remboursés ; des dispositions semblent avoir été prises en ce sens dès 410/929. Le trésor est en partie remboursé par des dédicaces privées, en partie par des fonds publics. De nouvelles hydries en argent apparaissent dès 403/2 et d’autres encore en 401/030.

  • 31 Démosthène, Contre Androtion, (22), 74.
  • 32 IG II2 457 (307/6) ; Plutarque, Mor. 841 d ; Mor. 852 b ; Pausanias, I, 29, 16.
  • 33 IG II2 333 (335/4), 14-33. IG II2 1493 (334/3), 7-20, mentionne plusieurs dépôts d’or provenant du (...)

17D’autres fontes du trésor suivront au ive s., notamment à l’initiative d’Androtion, dont l’opération est mieux connue par le biais des accusations portées par Démosthène31. Mais Androtion a fondu les vieilles offrandes pour en faire de nouvelles et non pour utiliser les fonds pour d’autres types d’opérations. Plus tard, en 334/3 et 331/0, Lycurgue va remplacer les objets qui avaient été fondus dans les dernières années de la guerre du Péloponnèse. Selon le décret honorifique de Stratoclès, repris dans les Vies des dix orateurs du Pseudo-Plutarque, en tant que trésorier des revenus publics (τῆς κοινῆς προσόδου ταμίας), Lycurgue a déposé beaucoup d’argent sur l’Acropole et il a embelli la cité par ses constructions ; il a aussi fait faire le kosmos de la déesse, les Nikai, les pompeia et les parures d’or de cent canéphores32. Bien que nous n’ayons pas à notre disposition les inventaires de cette période, une loi de Lycurgue ordonne la confection d’une série d’objets et d’ornements qui seront dédiés à Athéna et aux autres dieux de l’Attique, précisant la provenance des fonds pour l’opération33.

  • 34 Ferguson, 1932, p. 124-126. Papazarkadas, 2011, p. 30, considère que la réforme pourrait dater de 3 (...)
  • 35 IG II2 1470-1472 ; 1474-1476 ; 1478 ; 1479A ; 1492 ; voir Lewis, 1988, p. 302.
  • 36 Migeotte, 2014, p. 492, dénombre environ six cents phiales, donc une dizaine de talents (IG II2 155 (...)
  • 37 Faraguna, 1992, 290-322, pour les mines du Laurion ; Burke, 2010, p. 395.
  • 38 Pausanias, I, 25, 7. Plus tard, Sylla a emporté quarante livres d’or et six cents d’argent (Appien, (...)

18Les sommes collectées par Lycurgue proviendraient du transfert des fonds des autres dieux sur l’Acropole, gérés désormais par les trésoriers d’Athéna34. Leurs inventaires établis après 321 reprennent ainsi des hydries, des phiales et des pinakes d’Artémis Brauronia, d’Asclépios, de Zeus et d’autres divinités35. Ces revenus sont complétés par les dons de particuliers, les phiales de cent drachmes dédiées par des métèques à Athéna et aux autres dieux à la suite de leur acquittement en justice36, les revenus des mines du Laurion et ceux du Pirée, la vente des terrains publics abandonnés et non cultivés, la location des propriétés des dieux37. Le trésor de l’Acropole a ainsi été restitué et probablement enrichi. Ce n’est que bien plus tard que nous perdons la trace de ce trésor, avec le vol de Lacharès qui a dérobé au début du IIIe s. les boucliers d’or et la parure de la statue d’Athéna38.

3. Les terres sacrées

  • 39 Notamment Xénophon, Revenus, 4, 19-20 : μισθοῦνται γοῦν καὶ τεμένη [καὶ ἱερὰ] καὶ οἰκίας καὶ τέλη ὠ (...)
  • 40 Aristote, Const., 47, 3-4. Pour des exceptions de ces contrats de dix ans, voir Papazarkadas, 2011, (...)
  • 41 Migeotte, 2014, p. 469. Nous savons par exemple que le loyer d’une maison sacrée a servi à financer (...)

19La pratique de louer des terrains sacrés est bien connue pour l’Attique39. Les contrats se font sur dix ans et les paiements sont versés à la neuvième prytanie40. Le basileus établit une liste des loyers pour les terrains des sanctuaires inscrite sur un tableau blanc et participe à leur collecte. Les sommes ainsi rassemblées sont affectées au financement des fêtes et des concours, à la rémunération des agents cultuels et des esclaves sacrés, à l’entretien des lieux de culte et aux nouvelles constructions41.

  • 42 Isocrate, Aréopag. (7), 29 ; cf. Harpocration, s.v. ἀπὸ μισθωμάτων.
  • 43 IG II3 447 (Rhodes, Osborne, 2003, no. 81 A, ca 335), 5-7 avec IG II2 334 (ibid., no. 81 B). Lewis, (...)
  • 44 IG II3 447, 13-20.
  • 45 IG II3 447, 16.
  • 46 IG II2 334, 16-26. L’achat est fait par les hiéropes avec les magistrats chargés de l’achat des bœu (...)
  • 47 Selon Rosivach, 1994, p. 71, la somme suffirait pour l’achat de quarante-et-un bovins, alors que Rh (...)

20Selon Isocrate, les revenus des locations sont utilisés pour financer les fêtes et les sacrifices ancestraux42. Ce cas de figure est connu pour les revenus attribués aux Petites Panathénées. Une loi datée d’environ 335 préconise d’utiliser les revenus des locations des terrains de Nea pour financer le sacrifice le plus beau en l’honneur d’Athéna lors des Petites Panathénées43. L’opération doit être supervisée par le Conseil44. L’administration des locations revient aux hiéropes et leur revenu est estimé à deux talents45. Le décret qui suit mentionne le loyer finalement perçu qui s’élève à quarante et une mines (4 100 drachmes) destinées à l’achat des vaches pour le sacrifice offert à Athéna Polias sur le grand autel ; l’une parmi les plus belles est sacrifiée à Athéna Niké46. La somme serait suffisante pour l’achat de quarante à soixante bovins47. Le terrain, qui n’est pas expressément qualifié de sacré, est loué au plus offrant après avoir été divisé en deux.

  • 48 Walbank, 1983a, p. 101 ; Biraschi, 2004, p. 429.
  • 49 Walbank, 1983b, p. 207-213 ; Faraguna, 1992, p. 348-350, pour le vocabulaire ; Migeotte, 2014, p. 4 (...)
  • 50 Osborne, 1985, p. 56 ; Osborne, 1988, p. 304. Nous savons par Démosthène, Contre Macartatos, (43), (...)

21Plusieurs autres locations de domaines et de bâtiments appartenant à Athéna Polias et à d’autres dieux sont attestées durant les années de réorganisation des finances par Lycurgue entre 338 et 326. Les contrats sont stéréotypés, regroupant les terrains par propriétaire, brièvement décrits avec leur localisation, le nom du locataire, le montant du loyer annuel et les noms des garants48. On y mentionne des oikoi, temenê, eschatiai, kêpoi, chôria et telmata. Des terrains de culture, jardins et maisons sont loués, appartenant pour la plupart à Athéna Polias, Artémis Agrotera et Brauronia, Zeus Olumpios, Héraclès de Kynosarges et de Marathon, et Apollon49. Ainsi, nous avons à Athènes des locations de propriétés pour tous les grands cultes administrés par la cité, attirant principalement des locataires aisés50.

  • 51 IG I3 418 (ca 430) ; selon Élien, Varia Historia, VI, 1, une partie de la plaine Lélantine (des tem (...)
  • 52 Aristote, Const., 47, 4 ; Walbank, 1983b, p. 221.
  • 53 Osborne, 1985, p. 56-59 ; Osborne, 1988, p. 284. En effet, les dèmes ont pour ressources des taxes (...)
  • 54 IG II2 1672 (329/8), 242-247.

22Athéna possède encore des terrains en Eubée et à Égine51. Les terrains sacrés semblent être gérés de la même façon que les terrains publics, selon la procédure décrite par Aristote52. Vers la fin du ive s., on prélève une taxe de 1 % pour Athéna sur les locations de propriétés par des dèmes ou par des corps religieux53. Ce sont d’ailleurs toujours les magistrats athéniens, dont le basileus, qui mettent en location certains terrains appartenant aux déesses d’Éleusis54.

  • 55 Migeotte, 2014, p. 483.

23S’il est vrai que les dieux grecs ne sont pas de gros propriétaires fonciers et que ce n’est pas grâce aux revenus de ses domaines qu’Athéna a pu accumuler son immense fortune au milieu du ve s., il est clair que les Athéniens ont utilisé les terrains des dieux pour approvisionner la caisse sacrée auprès de laquelle ils pouvaient par la suite emprunter55.

  • 56 Aristote, Const., 60, 1. Shear, 2003, p. 98 ; Pritchard, 2012, p. 25-26, pour une estimation du pri (...)
  • 57 Aristote, Const., 60, 2 ; Lysias, Sur l’olivier sacré, (7), 2.
  • 58 Euripide, Troyennes, 801-803.
  • 59 Selon Rhodes, 1981, p. 673, il s’agissait d’une collecte sous forme de taxe ; voir Shear, 2003, p.  (...)
  • 60 Aristote, Const., 60, 3.
  • 61 IG I3 370, 66-68.
  • 62 Aristote, Const., 60, 1. Selon Develin, 1984, p. 133, ils remplissent ces fonctions lors des Grande (...)
  • 63 Lysias, Aréopag., (7), 25. À ce moment, la peine de mort encourue pour le non-respect des oliviers (...)

24Un autre type de revenu d’Athéna provient de la culture des oliviers sacrés, les moriai. Leur huile sacrée, qui constitue le prix des vainqueurs aux jeux des Panathénées56, est prélevée sur la production des fermiers qui prennent soin de ces oliviers sur leur terrain57. Ces arbres, rejetons du premier olivier offert aux Athéniens et planté par la déesse sur l’Acropole58, étaient au départ concentrés à l’Académie mais ils avaient fini par s’étendre, au temps de la guerre du Péloponnèse, dans toute l’Attique. Selon Aristote, dans les temps plus anciens, l’huile était collectée par des entrepreneurs qui achetaient le droit d’en tirer profit59. De son temps, elle était collectée par l’archonte éponyme qui la remettait aux trésoriers d’Athéna. Ces derniers l’entreposaient jusqu’au moment de la célébration quadriennale des Panathénées et la transmettaient alors aux athlothètes60, qui sont, dans les années 415/4, les administrateurs principaux de la fête61. Aristote précise qu’ils administrent la procession, les concours musicaux et athlétiques, la course de chevaux, qu’ils sont responsables de la confection du peplos, des estrades (ikria) en bois pour les spectateurs, des amphores pour les prix dont ils partagent la responsabilité avec le Conseil, et qu’ils présentent l’huile aux vainqueurs62. D’après Lysias, les oliviers étaient placés sous la surveillance de l’Aréopage qui envoyait des contrôleurs pour une inspection annuelle et procédait par ailleurs à une inspection mensuelle, sans que l’archonte y soit impliqué63.

  • 64 Papazarkadas, 2011, p. 275, avec à l’appui Démosthène, Contre Macartatos, (43), 71.
  • 65 Aristote, Const., 60, 2 avec les remarques de Papazarkadas, 2011, p. 269-272. Le stelechos est la p (...)
  • 66 Papazarkadas, 2011, p. 266.

25La quantité d’huile collectée, un cotyle et demi à partir de chaque arbre, a fait penser à une sorte de taxe collectée pour Athéna64 bien que cela ne soit pas explicitement précisé par Aristote. En outre, la quantité d’huile nécessaire pour les prix explique pourquoi l’État collecte l’huile des propriétés (ek tou ktêmatos), et non pas spécialement des oliviers sacrés (ek tôn stelechôn)65. Il est certain que la présence des moriai sur un terrain privé implique une attention particulière. Le terrain peut être cultivé ou loué66, mais les arbres et leurs fruits restent la propriété de la déesse, gérée par les magistrats de la cité.

4. Dépenses du trésor d’Athéna

  • 67 Aristote, Politique, 7, 1330 a 8-16.

26La célébration des fêtes mobilise les ressources à la fois de l’État athénien et celles des dieux. Dans l’État idéal d’Aristote, un quart des terrains servirait à couvrir les dépenses cultuelles, qui sont en fait celles de la cité67.

  • 68 Démosthène, Philippique I, (4), 35-37.
  • 69 Pritchard, 2012, p. 57.
  • 70 Pour une description de la fête et de ses origines présumées, voir Parker, 2005, p. 253-269.
  • 71 Davison, 1958, p. 26.

27Démosthène dénonçait en 352/1 le fait que les célébrations des Dionysies en ville et des Grandes Panathénées coûtaient plus qu’une bataille navale68. Il est certain que ce jugement n’est pas exact69, mais les sommes destinées aux fêtes sont en effet importantes. Les Grandes Panathénées célébrées tous les quatre ans, la fête durant laquelle on apporte à la déesse son peplos nouvellement tissé, est la plus spectaculaire70. Le programme dans son ensemble comprend des concours athlétiques, équestres et musicaux pour des individus et pour des chœurs, des courses aux torches pour les équipes des tribus. Des milliers de citoyens et non-citoyens participent à la procession apportant le peplos et une hécatombe à Athéna71.

  • 72 Pritchard, 2012, p. 24.
  • 73 IG I3 370, 67-68.
  • 74 IG I3 375, 5-8. Pritchard, 2012, p. 26 ; Migeotte, 2014, p. 551. Selon Rosivach, 1994, p. 117, cett (...)
  • 75 Il est d’ailleurs possible que toutes les sommes mentionnées soient à attribuer aux Grandes Panathé (...)
  • 76 IG I3 375, 3.
  • 77 IG I3 36 (424/3), 4-8. Selon Samons, 2000, p. 32, n. 29, il s’agit d’un cas extraordinaire. Les kol (...)
  • 78 IG I3 71 (425/4), 55-57, décret de Thoudippos. Le décret de Kleinias passé en 424 établit les peine (...)
  • 79 Pritchard, 2009, p. 14 ; 2012, p. 30.
  • 80 Pritchard, 2012, p. 26-27 ; Migeotte, 2014, p. 552.

28Les dépenses afférentes aux Panathénées sont supportées par le trésor d’Athéna, des fonds publics, des particuliers aisés et des fermiers72. Mais le calcul des montants nécessaires pour couvrir les dépenses des Grandes et des Petites Panathénées montre des sommes énormes. Ainsi les trésoriers d’Athéna prélèvent en 415/4 neuf talents dans la caisse d’Athéna destinés aux athlothètes des Petites Panathénées73 ; cinq ans plus tard, en 410/09, ils attribuent cinq talents et mille drachmes aux athlothètes pour les Grandes Panathénées et versent cinq mille cent quatorze drachmes aux hiéropes pour préparer l’hécatombe74. Il nous est impossible d’expliquer la différence entre les sommes destinées aux Petites et aux Grandes Panathénées, ou de savoir s’il y a d’autres ressources qui ne sont pas comptabilisées75. Ce qui est certain, c’est qu’à cette époque, les trésoriers d’Athéna gèrent une partie des revenus annuels (ἐπετείον) du Peuple76. C’est encore sur le trésor public qu’on prélève le salaire de la prêtresse d’Athéna Niké, payé par les kolakrêtai qui sont des magistrats chargés des perceptions financières, bien que la déesse possédât ses fonds propres77. Les cités alliées et les colonies contribuent également aux Grandes Panathénées en envoyant aux Athéniens un bovin et une panoplie et en participant à la procession78. Au ive s., selon Pritchard, le coût total des Grandes Panathénées dépasse les vingt-cinq talents79 ; les fonds publics en couvrent douze, cinq proviennent du marché de l’huile et sept de liturgies. La moitié est donc assurée par des propriétaires fonciers qui fournissent l’huile pour les prix et par des liturgies, l’autre moitié est fournie par l’État80.

  • 81 IG II2 1496, 68-151.
  • 82 IG II2 1496, 98-101 et 129 respectivement.
  • 83 Rosivach, 1994, p. 69-70. Les comptes concerneraient les fêtes additionnelles (epithetoi), qui sera (...)

29Un autre type de revenus est connu par les comptes du dermatikon, qui reprennent les sommes collectées par la vente des peaux d’animaux sacrifiés lors des fêtes importantes entre 334/3 et 331/081. Les fêtes sont classées par ordre chronologique, avec les magistrats qui remettent l’argent aux trésoriers d’Athéna et le montant en question. Les comptes de 333/2 indiquent deux sources de revenus pour les Panathénées, celle des hiéropes et celle de l’hécatombe, alors que seuls les hiéropes apparaissent l’année suivante82. Bien que le nombre d’animaux sacrifiés aux Panathénées soit perdu, sept-cent-vingt-quatre animaux sont sacrifiés dans l’année83.

  • 84 Samons, 2000, p. 162. Le deuxième décret de Callias (IG I3 52 B 12-15) délimite plus strictement le (...)

30Si le trésor public contribue au financement des fêtes d’Athéna, inversement, le trésor d’Athéna a longtemps servi de source de prêts pour les Athéniens. Ces emprunts avec intérêt ont perduré durant la guerre du Péloponnèse, comme l’annonçait Périclès en énumérant les biens des dieux qui pourraient être utilisés. C’est le trésor d’Athéna qui finance, entre les années 440 et en 428/7, les expéditions militaires et les programmes de construction. Les Athéniens semblent préférer puiser dans le trésor sacré plutôt que dans la caisse publique84.

  • 85 Samons, 2000, p. 173.
  • 86 Ibid., p. 212.
  • 87 IG I3 369.
  • 88 Samons, 2000, p. 23.

31Mais l’accumulation des fonds sacrés et leur utilisation à des fins publiques s’arrêtent au ve s. Dans les années 430, on commence en effet à utiliser aux mêmes fins les fonds des hellénotames et le dêmosion, qui ne nécessitent pas de prêts. Selon Samons, le trésor des hellénotames a toujours fourni des fonds durant la guerre du Péloponnèse. Vers 423/2, les caisses sacrées sont appauvries et la dette des Athéniens envers les dieux s’élève à sept mille talents85. Avec la paix de 422/1, ils ont pu rembourser les dieux à taux réduit. Mais c’est le trésor des hellénotames qui devient la source financière principale d’Athènes, enrichi par les ressources de la Ligue de Délos86. Il est utilisé à des fins militaires sans générer de taxes. C’est notamment avec ce fonds qu’a été financée l’expédition en Sicile. C’est aussi vers ce moment qu’a été publiée l’inscription des Logistai détaillant les comptes des magistrats concernant des prêts à l’État consentis par Athéna, les autres dieux, Athéna Niké et Hermès entre 426/5 et 423/2, avec un appendice remontant à 433/287. En 415, les hellénotames prennent aussi en charge le dêmosion, confondant ainsi les ressources publiques et celles de la Ligue de Délos. Le trésor sacré n’est plus qu’une source complémentaire, ce qui n’a changé qu’à la fin de la guerre du Péloponnèse, quand toutes les autres caisses étaient taries88.

  • 89 Ibid., p. 246.

32Ce changement dans le financement des opérations militaires a été expliqué de diverses façons. Il y a d’une part l’aspect pratique, puisque les ressources des hellénotames et de la caisse publique évacuent la question des intérêts et par la même occasion celle de l’accroissement de la dette envers les dieux. Il y a d’autre part un autre point évoqué : selon Samons, l’appauvrissement des dieux aurait pu paraître impie aux Athéniens, ou alors générer une perte de confiance dans la capacité de la déesse à protéger la cité au moyen de l’accumulation de ses trésors89.

5. Le statut des différentes caisses

  • 90 Walbank, 1983b, p. 229.
  • 91 Harris, 1990-91, p. 77, les attribue à des raisons de piété plutôt que de comptabilité ; Lewis, 198 (...)

33Ces appréciations soulèvent la question du statut des biens des dieux et leur rapport aux caisses publiques. La question se pose déjà avec les locations de terrains sacrés par la cité. Il s’agit de savoir à quel point l’État contrôle les propriétés des dieux et, question annexe, si le but des documents inventoriant les propriétés des différents dieux est de générer de nouveaux revenus pour la cité ou bien de simplifier les affaires pour les agents cultuels90. Si nous savions de façon systématique à quoi ont servi les sommes des locations des propriétés des dieux, nous pourrions ébaucher une réponse, fût-elle hypothétique. N’ayant pas d’éléments de réponse, on peut poser plus généralement la question de la sacralité des trésors d’Athéna et des autres dieux. Le fait d’établir les inventaires eux-mêmes a été expliqué par des raisons administratives, idéologiques et démocratiques, ou religieuses91.

  • 92 Caisse d’Athéna : Giovannini, 1990, p. 132 et 135, qui considère l’inaliénabilité comme un principe (...)
  • 93 Linders, 1975, p. 9.

34Le décret de Callias montre que l’argent versé dans les caisses d’Athéna devient hieron. Si ce terme signifie qu’il appartient désormais à la déesse, la pratique des emprunts montre qu’il ne s’agit pas d’une qualité constante qui rendrait ce qui a été consacré inaliénable, qu’il s’agisse de l’argent des caisses des dieux, des terrains sacrés ou des moriai92. Les emprunts rendent ce principe très relatif. Si, comme le remarquait Tullia Linders, les trésors des dieux n’ont jamais été considérés comme des biens de l’État93, les hiera pouvaient être utilisés pour financer les affaires urgentes de la cité.

  • 94 Samons, 2000, p. 283 et 325-329.
  • 95 Ibid., p. 284.
  • 96 Ibid., p. 285.

35En effet, comme le note Samons, la catégorie de propriété de l’État est peu pertinente dans cette discussion, car elle induit une séparation complète des caisses sacrée et publique qui ne peut rendre compte de l’utilisation des biens sacrés par l’État94. Il est vrai que les trésors des dieux sont gérés par le Peuple et que le sens pratique l’emporte manifestement là où les fonds sacrés sont utilisés pour la guerre et où les temples servent de banques. On ne peut cependant suivre Samons lorsqu’il attribue ces faits à la particularité de la religion grecque, qui se différencierait de la religion judéo-chrétienne par ses racines mycéniennes, ni lorsqu’il fait appel au partage sacrificiel hésiodique pour évoquer un parallèle de l’utilisation des biens des dieux par les hommes95. Le sens pratique est certes là. Les biens des dieux qui sont empruntés sont rendus avec intérêt et assurent la croissance de leur trésor. Ce sont les visées impérialistes athéniennes qui ont appauvri la déesse et sa cité et, au ive s., la relation des Athéniens au trésor sacré s’en trouve modifiée. Bien que les trésoriers gèrent encore le trésor, les richesses d’Athéna ne seront jamais reconstituées. À sa place, prolifèrent les caisses non sacrées, celle du dêmos ou les fonds stratiotiques et théoriques96.

  • 97 Wade-Gery, Merritt, 1957, p. 197.
  • 98 Giovannini, 1990, p. 131, 136 ; Samons, 1993, p. 135.
  • 99 Linders, 1975, p. 7-11, trace l’historiographie de l’idée de la sécularisation des ressources sacré (...)
  • 100 Davies, 2001, p. 126.

36Que se passe-t-il concernant le statut de cet argent de l’Acropole en 431 : est-il déposé chez Athéna mais au service de l’État97 ou bien la déesse en est-elle seule propriétaire98 ? Peut-on parler d’une sécularisation des ressources cultuelles99 ? L’argent est gardé, thésaurisé et, sauf exception, non prêté pour accroître les ressources. Celles-ci sont augmentées par l’addition de l’argent des autres dieux, comme le préconise le décret de Callias. Leur utilisation suppose un prêt d’Athéna et un remboursement à petit intérêt100.

  • 101 Migeotte, 2006, p. 235-236.
  • 102 Harrison, 1968, p. 235. Ainsi, Osborne, 1988, traite les terrains sacrés comme des propriétés publi (...)
  • 103 Connor, 1988, p. 176-177, considère les deux domaines comme intrinsèquement associés ; plus récemme (...)

37La marge de manœuvre des magistrats concernant les biens sacrés en fait les administrateurs principaux des fortunes divines101. Ils appliquent aux biens des dieux les mêmes procédures qui valent pour les caisses publiques. Faut-il cependant considérer les biens publics et les biens sacrés comme une seule entité, comme le faisait par exemple Harrison en considérant l’aspect légal des propriétés sacrées102 ? La question a longtemps été posée sous la forme d’une dichotomie hieron et hosion103.

  • 104 Rousset, 2013, p. 121.
  • 105 Papazarkadas, 2011, p. 11. Ainsi déjà Walbank, 1991, p. 150.
  • 106 Walbank, 1991, p. 150, considère que les terrains non privés appartenaient à un corps public, soit (...)
  • 107 Rousset, 2013, p. 124.
  • 108 Horster, 2004, p. 92-138, concernant l’interdiction d’accès ou d’utilisation à des degrés divers.
  • 109 IG I3 78 (ca 422), 54-58 ; Thucydide, II, 17, 1.

38Prenons le cas des terrains. Notons en premier lieu que les terrains ne sont jamais qualifiés de hosia104. Un critère, selon Papazarkadas, pour établir le statut d’un terrain, serait la destination de son loyer105. Nous avons vu, cependant, que mis à part des cas spécifiques comme le loyer de Nea affecté au sacrifice des Panathénées, ce genre de précision est généralement absent de la documentation. On a pensé par ailleurs que la distinction des temenê hiera et des dêmosia n’était pas observée par les Athéniens, du moins au ive s.106 Leur appartenance est pourtant clairement énoncée, comme l’est celle des divers fonds. C’est la facilité avec laquelle les trésoriers prennent les fonds de la caisse sacrée et les y remettent qui incite à considérer la destination des fonds comme une donnée variable. Ainsi, comme le remarque Denis Rousset, la propriété consacrée aux dieux n’appartient pas à une personne morale qui serait distincte, au point de vue légal, de la cité107. Il existe par ailleurs divers degrés de sacralité, mesurables dans les interdictions qui frappent certains terrains sacrés108. Même les terrains réputés intouchables peuvent néanmoins être utilisés, tel le Pelargikon sous l’Acropole remis en usage avec la crise de 431109.

  • 110 Récemment, Blok, 2014, p. 16.
  • 111 Rudhardt, 1992, p. 35 ; Jay-Robert, 2009, p. 131 ; Blok, 2014, p. 17-20, et n. 16 pour la bibliogra (...)
  • 112 Blok, 2014, p. 26.
  • 113 Comme le suggère Harpocration, s.v. hosion.
  • 114 Blok, 2014, p. 28.
  • 115 Ibid., p. 33, considère une sorte de contrat qui associe hommes et dieux dans la société ancienne.

39Hiera a plusieurs sens ; chez les modernes a prévalu celui d’« affaires des dieux », ou qui leur appartiennent, les choses qui manifestent le pouvoir des dieux parce qu’elles ont été consacrées par les hommes : temples, sacrifices et offrandes110. Par extension, le terme évoque le processus de la consécration. Par opposition, hosia se réfère aux actions ou aux possessions humaines qui sont en accord avec l’hosiê, les normes de conduite humaine qui sont acceptables par les dieux, ayant des affinités à la fois avec ce qui est décent et juste et avec ce qui est pieux111. Il ne s’agit aucunement de ce qui est profane ou désacralisé112. Quant aux fonds qualifiés de hosia, ils ne font pas à proprement parler partie des caisses publiques113. Il s’agit de fonds destinés à être utilisés de façon hosiê, en somme pour les dieux, c’est-à-dire pour les fêtes et les sacrifices, ou l’entretien de sanctuaires. Au IVe s., l’argent hosion appartient au dêmos et sert à financer des actions diverses, parmi lesquelles le financement des fêtes avec les fonds théoriques114. Ainsi la juxtaposition des deux termes hiera et hosia n’implique pas une opposition entre les deux sphères ; elle résume plutôt les relations d’échange et d’obligation entre hommes et dieux115.

  • 116 Chankowski, 2005, p. 69.

40Les biens des dieux, précisément identifiés, ne sont pas confondus avec les biens publics et les différentes caisses restent distinctes. Les procédures des magistrats s’appliquent néanmoins dans les deux domaines116. L’examen de l’ensemble des possessions d’Athéna, permet de cerner de manière un peu plus précise ce jeu des administrateurs qui permettait de changer le statut des biens, monnayés ou pas, afin de les utiliser à des fins particulières. Si les caisses, sacrée et publique, apparaissent comme distinctes, elles sont comptabilisées dans les biens à disposition de la cité. La dichotomie est claire pour ce qui est du vocabulaire. Quant à la pratique, il n’existe aucun principe d’inaliénabilité protégeant indéfiniment les richesses d’Athéna, aucun principe selon lequel les revenus de chacune des caisses athéniennes seraient alloués à un type d’opérations précis.

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Notes

1 Chankowski, 2011, p. 143.

2 IG I3 454-460 (447/6-438/7).

3 Stanier, 1953, p. 73.

4 IG I3 436-451. Kallet-Marx, 1989, p. 260 ; Samons, 2000, p. 33, 41-42 et 76, pour les sources concernant ce fonds. Kallet-Marx, 1989, p. 252, n. 1, fournit la bibliographie qui considère un financement assuré par le tribut des alliés. Parmi d’autres contributeurs, on trouve les teichopoioi, les xenodikai et les trieropoioi.

5 Connor, 1988, p. 164-166 ; Blok, 2010 ; Migeotte, 2014, p. 22. Voir Samons, 2000, p. 29, pour la dernière définition.

6 Démosthène, Contre Timocrate, (24), 9. Selon Migeotte, 2014, p. 22, les hosia sont ici des fonds « dont la cité pouvait disposer à des fins diverses en conformité avec les rites et la volonté divine » ; voir aussi Blok, 2014, p. 29. Lorsque hosios se réfère à des objets, il signifie selon Rudhardt, 1992, p. 36, ce que « l’on possède d’une manière légitime et dont on peut disposer librement dans les limites de la justice et de l’honnêteté ».

7 Selon Blamire, 2001, p. 100, le montant de 9700 talents résulterait de la combinaison du trésor d’Athéna avec celui de la Ligue délienne ; contra Giovannini, 1990, p. 142-144, qui considère que parmi l’argent impérial, seule l’aparchê appartient à Athéna.

8 Thucydide, II, 13, 3-5. Cf. Éphore, FGrHist 70 F 196 et Diodore de Sicile, XII, 40, 2. Selon Meritt, 1982, p. 119-121, les deux décrets de Callias qui mentionnent la restauration des fonds aux dieux (IG I3 52 A 2-3 : ἀποδõναι τοῖς θεοῖς [τ]ὰ χρέματα τὰ ὀφελόμενα ; B 20-23), constituent un commentaire du rapport de Périclès aux Athéniens. Le premier est daté traditionnellement de 434/3. Samons, 2000, p. 132 et 126, considère une date juste avant la guerre du Péloponnèse en 432/1, et 422/1 pour le deuxième. Récemment, Mattingly, 2010, p. 105 a proposé la date de 422/1 pour les deux décrets qui auraient été passés la même année.

9 Aristote, Constitution des Athéniens, 4, 2 et 8, 1 respectivement.

10 IG I3 52 A 18-20. Pour le trésor des autres dieux, voir Ferguson, 1932, p. 165 et Meiggs, Lewis, 1969, p. 158-159. Linders, 1975, p. 16, a montré qu’il n’y a pas eu de transfert complet de leurs fonds sur l’Acropole. Elle est suivie par Samons, 2000, p. 52, selon qui le dépôt de l’argent impérial dans les fonds de l’Acropole pour le paiement de la dette aux autres dieux a mené à la création d’un nouveau fonds auquel les Athéniens pouvaient emprunter avec intérêt. Dès 460, les Athéniens pouvaient emprunter l’argent des deux déesses. IG I3 6 C 32-36, le décret de l’Éleusinion, stipule déjà que l’argent sacré (hieron) des deux déesses peut être utilisé par les Athéniens, comme celui d’Athéna. Les lignes suivantes (36-38) précisent que cet argent est gardé sur l’Acropole et administré par les hiéropes.

11 Ferguson, 1932, p. 104-109 ; Samons, 2000, p. 262. Ils apparaîtront à nouveau comme deux groupes séparés vers 386/5, à nouveau fusionnés vers 346/5.

12 Aristote, Const., 30, 2. Voir Samons, 2000, p. 71 et 279 ; Migeotte, 2014, p. 431. Ils disparaissent avec la défaite d’Athènes en 404, en même temps que la caisse fédérale. Pour les fonds hosia, voir Migeotte, 2014, p. 22, n. 8, qui distingue ceux que certains dèmes destinaient au ve s. au financement de fêtes (voir en particulier Blok, 2010, p. 89), de ceux qui, au ive s., constituent des fonds publics.

13 Aristote, Const., 47, 1.

14 Ibid., 48, 3 et 54, 2.

15 Migeotte, 2014, p. 79 et p. 486-489, pour les prêts à la cité sur les fonds sacrés de l’Acropole.

16 Pour les incertitudes concernant la nomenclature des bâtiments, voir Harris, 1995, p. 2-8.

17 IG II2 120 (353/2), 26-33.

18 IG I3 259-290. Contrairement à l’opinion commune considérant que l’ensemble du tribut des alliés a été mis sous la garde d’Athéna (Ferguson, 1932, p. 154), Samons, 2000, p. 73, considère qu’il a fait partie d’une caisse distincte gérée par les hellénotames, liquidée lors du paiement des dettes aux dieux décrite par le décret de Callias. Le trésor fédéral est transféré à Athènes en 454/3. Entre ce moment et la fin de la guerre du Péloponnèse, la déesse y aurait gagné plus de quatre cents talents ; voir Migeotte, 2014, p. 536.

19 Thucydide, III, 50, 1-2 ; les Athéniens ont divisé trois mille lots de terrains dont trois cents pour les dieux. Les Lesbiens devaient payer deux mines pour travailler la terre de chaque lot.

20 Selon Démosthène, Contre Macartatos, (43), 71, l’amende pour l’arrachage est de cent drachmes par olivier destinées au trésor public, dont le dixième revient à la déesse.

21 D’autres ressources destinées au financement des cultes proviennent des taxes cultuelles, voir Migeotte, 2014, p. 515. Selon Démosthène, Contre Timocrate, (24), 97, les taxes (ἐκ τῶν τελῶν) servent à financer les affaires publiques, dont les assemblées, les sacrifices, le Conseil et les cavaliers.

22 Bogaert, 1968, p. 91.

23 Pour les sources et la pratique de la parakatathêkê, voir ibid., p. 281-288. En effet, ce sont les dèmes qui prêtent aux particuliers, dès le ve s. ; voir Chankowski, 2005, p. 77-78.

24 IG I3 383 (429/8).

25 IG II2 1443 (344/3), 12 : εἰς τὰ στρατιωτικά.

26 Kosmetatou, 2001, p. 29-30.

27 IG I3 314-316.

28 Philochore, FGrHist 328 F 141 (Hellanicos, FGrHist 323a F 26 ; Schol. Aristophane, Grenouilles, 720). Selon Thompson, 1970, p. 2, huit statues auraient été fondues.

29 IG I3 99, 8-12.

30 Harris, 1995, p. 29, pour les sources.

31 Démosthène, Contre Androtion, (22), 74.

32 IG II2 457 (307/6) ; Plutarque, Mor. 841 d ; Mor. 852 b ; Pausanias, I, 29, 16.

33 IG II2 333 (335/4), 14-33. IG II2 1493 (334/3), 7-20, mentionne plusieurs dépôts d’or provenant du trésorier des stratiôtika, destinés aux Nikai, aux pompeia et au kosmos des canéphores.

34 Ferguson, 1932, p. 124-126. Papazarkadas, 2011, p. 30, considère que la réforme pourrait dater de 344/3 ou du début de 343/2, planifiée pour faciliter la célébration des Grandes Panathénées de 342/1.

35 IG II2 1470-1472 ; 1474-1476 ; 1478 ; 1479A ; 1492 ; voir Lewis, 1988, p. 302.

36 Migeotte, 2014, p. 492, dénombre environ six cents phiales, donc une dizaine de talents (IG II2 1553-1578).

37 Faraguna, 1992, 290-322, pour les mines du Laurion ; Burke, 2010, p. 395.

38 Pausanias, I, 25, 7. Plus tard, Sylla a emporté quarante livres d’or et six cents d’argent (Appien, Mithrid., 39).

39 Notamment Xénophon, Revenus, 4, 19-20 : μισθοῦνται γοῦν καὶ τεμένη [καὶ ἱερὰ] καὶ οἰκίας καὶ τέλη ὠνοῦνται παρὰ τῆς πόλεως. Il ne précise cependant pas la destination des fonds collectés.

40 Aristote, Const., 47, 3-4. Pour des exceptions de ces contrats de dix ans, voir Papazarkadas, 2011, p. 59.

41 Migeotte, 2014, p. 469. Nous savons par exemple que le loyer d’une maison sacrée a servi à financer les travaux des Propylées : IG I3 462, 24 ; 463, 74 ; 466, 146. Voir Papazarkadas, 2011, p. 18, et n. 10 pour le ive s.

42 Isocrate, Aréopag. (7), 29 ; cf. Harpocration, s.v. ἀπὸ μισθωμάτων.

43 IG II3 447 (Rhodes, Osborne, 2003, no. 81 A, ca 335), 5-7 avec IG II2 334 (ibid., no. 81 B). Lewis, 1959, p. 243. Nea est localisée à Oropos : Robert, 1960, p. 194-195 ; Behrend, 1970, p. 63-67, no. 13 ; Brulé, 2007, p. 234 et n. 11 pour les diverses propositions d’identification de Nea. Selon Papazarkadas, 2011, p. 22, 227, le terrain appartient à Athéna ; contra : Rousset, 2013, p. 114 et 120.

44 IG II3 447, 13-20.

45 IG II3 447, 16.

46 IG II2 334, 16-26. L’achat est fait par les hiéropes avec les magistrats chargés de l’achat des bœufs, les boônai. Pour le groupe des boônai, voir Rosivach, 1994, p. 108-112. Nous ne savons pas si ces nouveaux revenus servent à financer les sacrifices traditionnels ou bien des sacrifices additionnels, comme le pense Rosivach, 1994, p. 71 et 117 ; Rhodes, Osborne, 2003, p. 402-403, laissent la question ouverte.

47 Selon Rosivach, 1994, p. 71, la somme suffirait pour l’achat de quarante-et-un bovins, alors que Rhodes, Osborne, 2003, p. 401, estiment le nombre de bovins pour la même somme à cinquante, et Brulé, 2007, p. 245, à soixante. Rosivach estime par ailleurs à cent-quarante-neuf le nombre minimum d’animaux sacrifiés aux Petites Panathénées entre 334/3 et 331/0, les années du dermatikon où l’on inscrit les revenus de la vente des peaux des animaux sacrifiés (IG II2 1496). Il y compte ceux de l’hécatombe, les quarante-et-un de Nea et encore huit ou neuf donnés comme prix.

48 Walbank, 1983a, p. 101 ; Biraschi, 2004, p. 429.

49 Walbank, 1983b, p. 207-213 ; Faraguna, 1992, p. 348-350, pour le vocabulaire ; Migeotte, 2014, p. 470. Voir IG II2 1590 et 1591 (Walbank, 1991, L 6, 343/2) ; 1592 (Walbank, 1991, L 14). Pour les louages, voir encore Walbank 1991, L9-L12 (SEG 35, 124 ; IG II2 2495 ; SEG 33, 170 et 171), rapportant un montant annuel de neuf talents et demi. Selon Papazarkadas, 2011, p. 94, les revenus des locations des terrains sacrés ne représentent pas plus de 1,5-2 % du revenu total de la cité.

50 Osborne, 1985, p. 56 ; Osborne, 1988, p. 304. Nous savons par Démosthène, Contre Macartatos, (43), 58, que la sanction contre ceux qui ne pouvaient payer leur loyer à Athéna, aux autres dieux et aux héros éponymes, consistait en la perte des droits civiques et ce jusqu’au recouvrement.

51 IG I3 418 (ca 430) ; selon Élien, Varia Historia, VI, 1, une partie de la plaine Lélantine (des temenê) était consacrée à la déesse et des terrains étaient mis en location. Horos trouvé à Égine : IG IV 29.

52 Aristote, Const., 47, 4 ; Walbank, 1983b, p. 221.

53 Osborne, 1985, p. 56-59 ; Osborne, 1988, p. 284. En effet, les dèmes ont pour ressources des taxes et des liturgies, les locations, et les intérêts sur les prêts. Voir Papazarkadas, 2011, p. 135-147, avec les remarques sur les dépenses des dèmes pour les cultes.

54 IG II2 1672 (329/8), 242-247.

55 Migeotte, 2014, p. 483.

56 Aristote, Const., 60, 1. Shear, 2003, p. 98 ; Pritchard, 2012, p. 25-26, pour une estimation du prix de cette contribution qui s’élèverait à cinq talents et 2725 drachmes.

57 Aristote, Const., 60, 2 ; Lysias, Sur l’olivier sacré, (7), 2.

58 Euripide, Troyennes, 801-803.

59 Selon Rhodes, 1981, p. 673, il s’agissait d’une collecte sous forme de taxe ; voir Shear, 2003, p. 100.

60 Aristote, Const., 60, 3.

61 IG I3 370, 66-68.

62 Aristote, Const., 60, 1. Selon Develin, 1984, p. 133, ils remplissent ces fonctions lors des Grandes Panathénées, puisque la plupart des événements mentionnés appartiennent à cette fête. Pritchard, 2012, p. 27, estime à 3150 drachmes le prix de 2100 amphores.

63 Lysias, Aréopag., (7), 25. À ce moment, la peine de mort encourue pour le non-respect des oliviers se change en exil et confiscation de la propriété. Un autre changement survient dans les années 380, avec l’inscription des listes des prix, voir Shear, 2003, p. 88-89, à propos de IG II2 2311.

64 Papazarkadas, 2011, p. 275, avec à l’appui Démosthène, Contre Macartatos, (43), 71.

65 Aristote, Const., 60, 2 avec les remarques de Papazarkadas, 2011, p. 269-272. Le stelechos est la plante ; voir Rhodes, 1981, p. 673. Il est possible, comme le propose Foxhall, 2007, p. 120-121, que les moriai aient été entourées de clôtures afin d’être reconnues et protégées.

66 Papazarkadas, 2011, p. 266.

67 Aristote, Politique, 7, 1330 a 8-16.

68 Démosthène, Philippique I, (4), 35-37.

69 Pritchard, 2012, p. 57.

70 Pour une description de la fête et de ses origines présumées, voir Parker, 2005, p. 253-269.

71 Davison, 1958, p. 26.

72 Pritchard, 2012, p. 24.

73 IG I3 370, 67-68.

74 IG I3 375, 5-8. Pritchard, 2012, p. 26 ; Migeotte, 2014, p. 551. Selon Rosivach, 1994, p. 117, cette somme n’a été versée qu’une seule fois, car les autres années l’hécatombe serait financée par le trésor public.

75 Il est d’ailleurs possible que toutes les sommes mentionnées soient à attribuer aux Grandes Panathénées ; voir la discussion et les raisons invoquées par Pritchard, 2012, p. 26.

76 IG I3 375, 3.

77 IG I3 36 (424/3), 4-8. Selon Samons, 2000, p. 32, n. 29, il s’agit d’un cas extraordinaire. Les kolakrêtai contribuent par ailleurs au financement de la statue d’Athéna Promachos en 450 (IG I3 435, 56, 79).

78 IG I3 71 (425/4), 55-57, décret de Thoudippos. Le décret de Kleinias passé en 424 établit les peines contre ceux qui n’apporteraient pas l’animal – une vache – et l’armure : IG I3 34, 40-43. Pour ces envois de contributions aux Grandes Panathénées, voir Brulé, 2007, p. 249-252.

79 Pritchard, 2009, p. 14 ; 2012, p. 30.

80 Pritchard, 2012, p. 26-27 ; Migeotte, 2014, p. 552.

81 IG II2 1496, 68-151.

82 IG II2 1496, 98-101 et 129 respectivement.

83 Rosivach, 1994, p. 69-70. Les comptes concerneraient les fêtes additionnelles (epithetoi), qui seraient celles du code de Nicomaque (p. 54-55).

84 Samons, 2000, p. 162. Le deuxième décret de Callias (IG I3 52 B 12-15) délimite plus strictement les dépenses faites sur le trésor d’Athéna. Il est clairement stipulé que ces fonds ne seront ni utilisés ni prêtés.

85 Samons, 2000, p. 173.

86 Ibid., p. 212.

87 IG I3 369.

88 Samons, 2000, p. 23.

89 Ibid., p. 246.

90 Walbank, 1983b, p. 229.

91 Harris, 1990-91, p. 77, les attribue à des raisons de piété plutôt que de comptabilité ; Lewis, 1986, p. 72, évoque des raisons financières. Selon Papazarkadas, 2011, p. 70-71, la consultation des inscriptions rapportant les locations aurait été peu pratique, d’où il conclut que ces documents ont une importance religieuse.

92 Caisse d’Athéna : Giovannini, 1990, p. 132 et 135, qui considère l’inaliénabilité comme un principe absolu ; terrains : Isager, Skydsgaard, 1995, p. 186 ; Horster, 2004, p. 86 ; moriai : Papazarkadas, 2011, p. 269-272. Contra : Rousset, 2013, p. 116, qui considère les arbres comme une propriété publique, et p. 123-124 pour les terrains.

93 Linders, 1975, p. 9.

94 Samons, 2000, p. 283 et 325-329.

95 Ibid., p. 284.

96 Ibid., p. 285.

97 Wade-Gery, Merritt, 1957, p. 197.

98 Giovannini, 1990, p. 131, 136 ; Samons, 1993, p. 135.

99 Linders, 1975, p. 7-11, trace l’historiographie de l’idée de la sécularisation des ressources sacrées qu’elle nie sur la base de la relation de dépendance des hommes vis-à-vis des dieux. L’utilisation des biens des dieux est ici considérée comme un véritable emprunt.

100 Davies, 2001, p. 126.

101 Migeotte, 2006, p. 235-236.

102 Harrison, 1968, p. 235. Ainsi, Osborne, 1988, traite les terrains sacrés comme des propriétés publiques ; Horster, 2004, p. 13-15, considère en revanche que les délimitations des possessions sacrées sont bien réelles, malgré les locations, les négligences et leur utilisation.

103 Connor, 1988, p. 176-177, considère les deux domaines comme intrinsèquement associés ; plus récemment Scullion, 2005, p. 112-114, retrace l’origine de cette dichotomie.

104 Rousset, 2013, p. 121.

105 Papazarkadas, 2011, p. 11. Ainsi déjà Walbank, 1991, p. 150.

106 Walbank, 1991, p. 150, considère que les terrains non privés appartenaient à un corps public, soit à l’État, soit aux cultes de l’État, ou à d’autres organisations politiques ou religieuses.

107 Rousset, 2013, p. 124.

108 Horster, 2004, p. 92-138, concernant l’interdiction d’accès ou d’utilisation à des degrés divers.

109 IG I3 78 (ca 422), 54-58 ; Thucydide, II, 17, 1.

110 Récemment, Blok, 2014, p. 16.

111 Rudhardt, 1992, p. 35 ; Jay-Robert, 2009, p. 131 ; Blok, 2014, p. 17-20, et n. 16 pour la bibliographie sur le sujet.

112 Blok, 2014, p. 26.

113 Comme le suggère Harpocration, s.v. hosion.

114 Blok, 2014, p. 28.

115 Ibid., p. 33, considère une sorte de contrat qui associe hommes et dieux dans la société ancienne.

116 Chankowski, 2005, p. 69.

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Pour citer cet article

Référence papier

Ioanna Patera, « Les possessions d’Athéna »Pallas, 100 | 2016, 139-154.

Référence électronique

Ioanna Patera, « Les possessions d’Athéna »Pallas [En ligne], 100 | 2016, mis en ligne le 15 avril 2016, consulté le 24 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pallas/2873 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/pallas.2873

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Auteur

Ioanna Patera

Chercheure associée ANHIMA UMR 8210
ioanna.patera@gmail.com

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Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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