Navigation – Plan du site

AccueilNuméros741. L'échelle d'analyse en linguis...Micro- et macro-syntaxe : sur deu...

1. L'échelle d'analyse en linguistique anglaise (suite)
2

Micro- et macro-syntaxe : sur deux principes de catégorisation cognitive en langue orale spontanée

Cognitive serialization principles in spontaneous speech: Macro- and Macrogrammar
Alexander Haselow
Traduction de La rédaction de Modèles linguistiques
p. 29-50

Résumés

Cet article oppose deux façons d’approcher la grammaire, celle de la « micro-grammaire » et celle de la « macro-grammaire ». La micro-grammaire renvoie à des principes combinatoires fondés sur la hiérarchisation, l’insertion et les relations de dépendance morphosyntaxiques. La macro-grammaire renvoie à des principes combinatoires fondés sur des activités cognitives de prévoyance (par ex. l’économie du temps opératif) et renvoie à des fonctions qui ont trait au système de communication en général, comme la structuration discursive et l’interaction entre locuteur et allocutaire. La macrosyntaxe est au service de la structuration du langage, c’est-à-dire qu’elle rend compte de la structure au-delà d’une unité morphosyntaxique cohérente

Haut de page

Texte intégral

1. Introduction

  • 1 A. – tu peux penser que ce n’était pas la meilleure façon de passer trois semaines. B.– et bien non (...)

1Bon nombre d’occurrences linguistiques particulières qu’on relève dans les productions orales spontanées ont été jusqu’ici négligées ou traitées marginalement dans les approches fonctionnelles du langage. En effet, sur le plan grammatical, elles ne font pas partie du système sémantique central ; elles n’entrent pas non plus dans le champ de la morphosyntaxe. Ces occurrences jouent néanmoins un rôle important dans la structuration des rapports interactifs et dans la production du discours en temps réel. Elles font donc partie du système linguistique, ce qu’illustre l’exemple [1]1 pour l’anglais :

2Les segments en italiques (de la ligne 290 à la ligne 294) ne sont visiblement pas intégrés, ils n’entretiennent aucune relation morpho-syntaxique avec les constituants des propositions. Toutefois, dans l’effection du discours, ils remplissent diverses fonctions cognitives ; par exemple, dans le propos d’un locuteur donné, ils signalent une mise en attente (yeah / ouais), ou ils indiquent de quelle manière est envisagée par ledit locuteur la liaison entre deux fragments de phrase (p. ex. sous l’angle de la concession avec but / mais). De tels exemples n’ont rien d’exceptionnel, que ce soit en anglais ou dans toute autre langue. Voici un exemple en allemand :

  • 2 Alors c’est aussi terrible tu sais avec ces (.) pantalons baggy et puis ces donc ce style asocial d (...)

3Les exemples [1] et [2]2 font apparaître que la « sérialisation » ne correspond pas toujours à la hiérarchisation et à l’enchâssement, contrairement à ce que donnent à entendre les grammaires traditionnelles, dont le champ d’application est la phrase bien structurée. Le présent article a pour but de montrer que la capacité du locuteur à sérier ou à combiner toutes sortes de segments de langage dans des structures contenantes est fondée sur deux types de savoir : d’une part, la connaissance des relations de dépendance morphosyntaxique et des modes d’enchâssement, ce qui est appelé ici « micro-grammaire » ; d’autre part, la connaissance du mode d’assemblage des diverses sortes d’unités porteuses d’information aux différents niveaux du système de communication (interpersonnel, pragmatique, structural), le tout formant ce qu’on nommera « macrogrammaire ». La microgrammaire et la macrogrammaire forment un cadre intégrant qui permet d’analyser les segments de discours spontané du point de vue de leur structuration, c’est-à-dire dans la perspective du locuteur engagé dans un acte de langage et qui, incapable de maîtriser le début et la fin dudit acte, construit son discours dans la linéarité de la parole. La présente recherche s’inscrit dans la suite de On-line Syntax (Auer 2009) et de Emergent Grammar (Hopper 1987, 1998, 2011), qui se proposent d’étudier les structures linguistiques dans l’émergence et la linéarité de la parole.

4Plan de l’article : après des remarques générales sur l’organisation binaire de la grammaire (section 2) et le rappel de quelques principes à propos des structures linguistiques (section 3) seront discutés la notion de « grammaire » (section 4) ainsi que les deux domaines de la grammaire, à savoir la micro-grammaire (section 5) et la macro-grammaire (section 6). Conclusion dans la section 7.

2. Organisation binaire de la grammaire

5Les éléments « non intégrés » du point de vue syntaxique résistent à l’analyse dans le cadre structuraliste traditionnel ou dans un cadre fonctionnaliste fondé sur l’existence d’unités bien formées telles que les propositions et les phrases. La raison en est que ces éléments n’entrent pas dans des rapports de dépendance binaire avec les autres constituants. Cette difficulté apparaît à l’évidence dans les appellations utilisées pour les désigner, comme par exemple « marqueurs pragmatiques » ou dans l’existence supposée de classes d’adverbiaux tels que disjoints ou conjoints. Ce sont là autant de « tiroirs » qui les excluent du champ de la grammaire et qui leur attribuent un rôle subalterne.

6Certes, des approches plus récentes dans la tradition fonctionnaliste rendent compte de ces éléments « non intégrés ». C’est le cas de Functional Grammar de Dik (1997) qui distingue les constituants « propositionnels » (clausal) et « extra-propositionnels » (extra-clausal, ou ECCs). C’est aussi le cas de Discourse Grammar de Kaltenböck et Heine & Kuteva (2011) qui, eux, distinguent la « Grammaire de Phrase » canonique et la « Grammaire Thétique ». Cette dernière s’applique en situation discursive, c’est-à-dire qu’elle concerne l’organisation textuelle et l’attitude du sujet parlant. Elle comprend des unités telles que les propositions en forme de commentaires, les ajouts, ou encore les interjections – unités dont la caractéristique est d’être mobiles et de n’être pas soumises aux règles de la grammaire de phrase canonique (Cf. Kaltenböck et al. : 853). On peut également en rendre compte dans le cadre de la macro-syntaxe (Cf. Berendonner 1990, Blanche-Benveniste 2003), qui s’intéresse aux phénomènes structuraux échappant à la « rection », en d’autres termes, qui n’entrent pas dans des relations de dépendance gouvernées par le verbe et ne sont pas concernés par les mécanismes d’enchâssement.

7Si ces deux approches fournissent de précieux outils pour l’examen des structures discursives, elles adoptent néanmoins le point de vue de l’analyste plutôt que celui du sujet parlant, tendant ainsi à réduire les structures à des produits finis, à des énoncés écrits offerts à l’analyse. Mais si l’on adopte le point de vue du locuteur qui, en tout état de cause, est toujours à l’origine des énoncés (Hopper 2011 : 23), on ouvre des perspectives donnant lieu à des questionnements relatifs à la structure linguistique et aux mécanismes cognitifs. Ces nouvelles perspectives n’ont pas encore été l’objet de recherches suffisamment poussées. Une des questions, à ce jour sans réponse, concerne la motivation cognitive qui gouverne la position des éléments « extra-propositionnels ». Certains de ces éléments ont tendance à occuper dans une conversation des places spécifiques, p. ex. à l’initiale d’un énoncé (well / bon, oh) ou en finale, p. ex. ajouts en forme de question (les tags), ajouts en général. D’autres peuvent occuper dans l’énoncé des places plus variables, sans être pour autant aléatoires, comme par exemple des marqueurs discursifs tels que anyway ou, en français, alors et donc, qui peuvent être en position initiale ou finale (Degand 2014, Haselow 2015). De plus, il doit sans doute être possible de découvrir des constantes dans l’emploi d’éléments apparemment « flottants », non soumis à des règles, ce qui est le cas des commentaires (angl. I think, I guess / fr. il me semble, j’imagine), ou de certains marqueurs pragmatiques (angl. you know, actually / fr. voyez-vous, en fait) dont on dit couramment qu’ils peuvent intervenir en toute position au sein d’une unité structurale (cf. Aijmer 1986). Du point de vue d’une grammaire qui prenne en compte la dimension temporelle et les mécanismes cognitifs, le positionnement des éléments extra-propositionnels ne relève pas d’une syntaxe de niveau supérieur, mais sont vraisemblablement le fait de règles cognitives de production rendant compte de l’ordre dans lequel se manifestent les mécanismes sous-jacents à la construction des énoncés.

8Dans l’identification de ces éléments, la distinction entre « propositionnel » (clausal) et « non propositionnel » (extra-clausal), ainsi que les distinctions entre « Grammaire de Phrase » et « Grammaire Thétique », ou encore « micro-grammaire » et « macro-grammaire », coïncident avec d’autres domaines de recherche qui mettent en avant l’idée que le comportement cognitif humain est binaire. Il s’agit par exemple de la neurolinguistique et des travaux sur la localisation des fonctions du langage dans le cerveau. C’est entre autres le cas du modèle de fonctionnement binaire chez Van Lancker Sidtis (2004, 2009). Ce modèle distingue, d’une part le langage par formules (formulaic language) comprenant les interjections, les commentaires, les morphèmes discursifs, les « explétifs », le tout fonctionnant de manière organiciste en association avec l’hémisphère droit ; d’autre part, ce que Van Lancker Sidtis appelle le “novel language”, dont le fonctionnement analytique met essentiellement à contribution l’hémisphère droit. Les travaux récents sur la latéralisation vont dans le même sens : si le langage repose sur l’activité des deux hémisphères, il apparaît que l’hémisphère gauche est plutôt consacré à la structuration des phrases (Brady et al. 2006) ; en revanche, l’orientation de l’hémisphère droit est davantage pragmatique, visant d’une part à l’élaboration d’un modèle de cohésion pour l’édification d’une macro-structure discursive (Hough 1990 ; Robertson et al. 2000 ; Sherratt & Bryan 2012), d’autre part à la production de discours cohérents et, dans la communication, à la prise en compte des aspects pragmatiques et sociaux (orientation vers le destinataire) (Shields 1991 ; Cutica et al. 2006). Les principales corrélations entre la structure linguistique et le fonctionnement du cerveau sont l’objet d’une discussion dans Heine et al. (2015). Ci-dessous, la discussion des principes de base de la micro- et de la macro-grammaire tourne autour de l’idée que la compétence linguistique n’est pas monolithique, qu’elle est au contraire fondée sur une organisation binaire.

3. Hypothèses de départ

9Du point de vue de la relation locuteur-allocutaire, la structure du langage n’est pas un produit fini s’offrant tel quel à l’analyse, c’est une construction temporelle dépendant de la visée du locuteur. Les distinctions bien établies que recouvrent les termes ou expressions tels que droite et gauche, dislocation à droite ou à gauche, périphérie, etc. confinent notre compréhension de la structure linguistique au cadre étroit d’une entité bornée que locuteurs et allocutaires sont censés parcourir simultanément dans tous les sens ; au contraire, les analyses fondées sur les mécanismes cognitifs donnent à entendre que la production du discours est une structure ouverte soumise aux fluctuations de la relation interpersonnelle (Hale 2006). En attestent deux phénomènes bien connus : (i) les reconfigurations syntaxiques spontanées et (ii) l’expansion d’unités qui, en un point x donné, semblaient avoir atteint le point de complétude. Pour ce qui est du premier phénomène, les co-énonciateurs sont en mesure de revoir et de reconfigurer la trajectoire syntaxique d’un énoncé en cours, ce qui donne par exemple des structures pivotantes du genre, en anglais, I met him at a party I met him (je l’ai rencontré dans une soirée [que] je l’ai rencontré) où l’on observe la répétition d’un fragment de l’énoncé qui, du coup, change de statut après effacement rétrospectif (Auer 2009 : 10–11). Dans le même ordre d’idées, on relève des configurations syntaxiques où des unités mono-propositionnelles sont transformées en unités bi-propositionnelles, comme par exemple, en anglais, des constructions avec such a (Hopper 2011). Pour ce qui est du second phénomène mentionné ci-dessus, les co-énonciateurs sont susceptibles de développer une unité structurale qui, en un point donné, semblait complète, en une construction plus large et plus complexe (Schegloff 1996 ; Auer 1996, 2009 ; Couper-Kuhlen & Ono 2007). Les derniers auteurs mentionnés montrent que la complétude syntaxique n’est jamais prédéterminée, qu’elle peut être remise en cause à tout instant pour des besoins spécifiques de communication, comme par exemple lorsqu’un locuteur poursuit son intervention, faute d’une reprise par son interlocuteur.

10Parmi d’autres caractéristiques de la langue orale, ces phénomènes indiquent que les locuteurs créent la structure au coup par coup, selon les besoins du moment, dans le flux continu du discours. La flexibilité des structures linguistiques est une propriété inhérente aux systèmes de communication : chaque co-énonciateur doit s’adapter sur-le-champ aux nécessités de la communication (les « contingences locales »), tout en poursuivant l’échange, avec ce que cela entraîne en termes de réaction aux choix de son interlocuteur. Néanmoins, malgré le caractère forcément aléatoire du parcours discursif, la trajectoire de ce dernier n’est pas totalement imprévisible. On peut toujours, dans une certaine mesure, prédire ce que va être la suite du propos, pour autant que locuteur et allocutaire sont capables de prévoir comment poursuivre l’échange, non pas en termes d’organisation grammaticale, mais dans la visée de ce qui va être possible et de ce qui est impossible. La projection est un élément cognitif puissant dans la réalisation immédiate d’une structure d’échange ; elle fait émerger les éléments requis pour l’achèvement d’un propos en cours, par ex. les déterminants appellent des syntagmes nominaux ; elle permet aussi de prévoir le terme de l’échange (Auer 2005, 2015). La projection repose sur la capacité des co-énonciateurs à identifier les choix grammaticaux possibles au cours d’un échange et cela jusqu’à épuisement du nombre des choix. Il convient d’observer que la projection fonctionne aux différents niveaux du système – syntaxique, prosodique (schèmes intonatifs) et pragmatique.

11Une grammaire qui se propose de rendre compte de la nature des structures « non intégrées » que produit peu ou prou tout discours, où les unités « propositionnelles » (clausales) enchâssées alternent avec les unités « non-propositionnelles » (extra-clausales) et non-enchâssées – une telle grammaire doit être fondée sur les principales données cognitives qui président à la construction du langage, à savoir : le caractère ouvert des structures, la prévision d’emploi des éléments structuraux et les procédures cognitives que les locuteurs doivent mettre en œuvre lors d’un échange verbal, comme par exemple l’orientation vers le destinataire, et cela en raison du besoin de synchronisation maximale entre les co-énonciateurs.

4. Conception de la « grammaire »

12La « grammaire » est conçue ici comme un système de connaissances permettant à des locuteurs d’engager des rapports interlocutifs avec des allocutaires et de produire ainsi du texte, c’est-à-dire un fragment de discours informé de sens dans un but spécifique et dans un cadre contextuel donné. Ce système de connaissances inclut la capacité à produire et à manipuler (revoir, interrompre, reconfigurer) des suites d’unités linguistiques porteuses de divers types de sens (matériel et formel, Blakemore 1987). Les unités linguistiques que les locuteurs sont à même de produire et de manipuler sont de formes variables, allant du simple lexème au syntagme étendu (Hopper 2011), des « constructions » dans le sens de Goldberg (1995) et de Croft (2001). Comme ces unités ne correspondent pas toujours à des « propositions » (“clauses”), l’unité d’analyse choisie ici est l’« unité conversationnelle » (“unit of talk”), à savoir un fragment de discours doté d’un contour intonationnel cohérent et censé représenter une unité structurale. Quant à la grammaire, elle est conçue comme une construction qui se développe dans le temps et qui comprend la sérialisation des unités émergeant au fur et à mesure des décisions prises par les co-énonciateurs. Dans ce sens, la grammaire est à la fois un système de connaissances, un savoir-faire (comment utiliser et combiner les unités conventionnelles) et une activité (cf. Heine et al. 2013 : 158), ce qui revient à dire que la description grammaticale est fondée sur un système de connaissances et sur une activité, plus que sur la structure d’un produit fini.

5. La micro-grammaire : une sérialisation fondée sur des rapports de dépendance

13La micro-grammaire résulte du mécanisme cognitif de base consistant à sérialiser, ou concaténer les unités linguistiques en unités plus larges. Elle comprend les moyens qu’utilisent les co-énonciateurs pour structurer une unité conversationnelle. Ils reposent sur (i) la hiérarchisation interne, (ii) l’enchâssement, (iii) le classement en constituants et (iv) les relations de dépendance morpho-syntaxique. Ces divers moyens renvoient à deux traits fondamentaux : la binarité et l’asymétrie. Une unité microgrammaticale est donc une unité dont chaque élément est impliqué dans une relation hiérarchique particulière avec au moins un autre élément qui lui est, soit sub-ordonné, soit super-ordonné. Les unités grammaticales prototypiques sont les phrases et les propositions (clauses), au sein desquelles s’établissent des hiérarchies et des enchâssements, si bien que l’ensemble forme un tout intégré du point de vue morphosyntaxique. Les principaux constituants en microgrammaire sont les morphèmes (libres ou liés), les lexèmes, sans oublier les règles qui établissent leurs possibilités combinatoires. La microgrammaire est organiciste, chaque élément y participe à la genèse du contenu propositionnel. Cette forme d’analyse exclut les « fragments », à savoir les expressions figées comprenant plusieurs lexèmes non segmentables en constituants isolés, des expressions formant des touts traités comme tels, en bloc, p. ex. en anglais the thing is…… if you know what I mean ou no matter how/what.

14Du point de vue cognitif, les relations au sein de la microgrammaire ne sont pas totalement libres et indéfiniment récursives, elles sont tributaires des capacités mémorielles. Dans ces conditions, en microgrammaire, la concaténation ou sérialisation est soumise à deux restrictions : (i) restriction en termes de longueur (ii) restriction relative à la complexité de l’unité microgrammaticale concernée. La première restriction est liée au fait que la somme d’informations pouvant être mises en œuvre à un moment donné est forcément limitée (cf. Miller 1956 ; Cowan 2001) ; la longueur d’une unité microgrammaticale est donc fonction des capacités mémorielles de l’allocutaire. Ce principe a fait l’objet d’une discussion dans Chafe (1994 : 108-119). Selon Chafe, une unité intonative, à savoir un fragment de parole, quelle qu’en soit la structure, un fragment porté par un seul groupe de souffle ne doit pas exprimer plus d’une idée. La raison en est que, dans l’instant de conscience vive, la mémoire ne peut effectivement retenir plus d’une idée nouvelle, quelle que soit la nature de celle-ci (un référent quelconque, un état, un événement). C’est le principe de Givón (1984 : 258-263) : « une idée par proposition (clause) ». Selon ce principe, l’« idée » en question (nom, verbe, adjectif ou syntagme adverbial) est porteuse d’une information nouvelle, alors que les autres unités sont chargées de rappeler l’information connue ou présupposée – en un mot accessible, dans la mesure où elle a déjà été exprimée.

15La complexité linguistique est à l’aune des arcanes cognitifs qui président à l’édification du langage. On peut avoir une idée de cette complexité quand on considère par exemple la distance qui sépare deux mots syntaxiquement associés. C’est ce que d’aucuns ont appelé la distance de dépendance (dependency distance, ou DD, Liu 2008 ; Jiang & Liu 2015). Les locuteurs sont censés chercher à limiter cette distance afin de réduire le plus possible la charge cognitive. Entre cryptage (locuteur) et décryptage (allocutaire), plus la distance est longue, plus pesante risque d’être la charge mémorielle. En effet, la mémoire active ne peut être délestée d’un mot en relation syntaxique que lorque ce mot a trouvé la liaison avec son partenaire (Gibson 1998 ; Gibson & Perlmutter 1998). Conformément à ces vues, l’encodage et le décodage d’une chaîne parlée ne doivent pas s’inscrire en dehors du cadre d’une distance de dépendance moyenne, et cela pour éviter le surnombre des unités dont devra se charger la mémoire. Cette approche est fondée sur les résultats de plusieurs travaux de recherche réalisés sur des langues appartenant à des typologies différentes, comme l’anglais, le japonais, le chinois et l’allemand (Hiranuma 1999 ; Gibson 2000 ; Liu 2008 ; Gildea & Temperley 2010 ; Jiang & Liu 2015). Les résultats obtenus font apparaître que la distance est de 1 à 3 mots, le seuil étant inférieur à 3. Dans la plupart des langues, plus de la moitié des relations de dépendance se font entre des mots adjacents. L’hypothèse selon laquelle les co-énonciateurs préfèrent l’ordre linéaire et que grammaire et cognition agissent de concert, est aussi l’hypothèse de nombreuses théories du langage fondées sur le rôle de la mémoire, p. ex. Hawkin (1994), Early Immediate Constituents and Minimize Domain (2004) ou Gibson (2000), Dependency Locality Theory. La figure 1 ci-dessous propose l’analyse d’une phrase-échantillon ; les flèches vont de l’élément dominant à l’élément dépendant :

Figure 1 : distances de dépendance au sein d’une phrase échantillon

16Tous les lexèmes de l’énoncé She is terribly nice to Dick (« elle est extrêmement gentille avec Dick ») entrent dans un jeu de relations de dépendance les uns avec les autres. Dans chacun des « binômes », un des deux éléments domine l’autre et nous suivons l’usage de Liu & Jiang (2015) en utilisant des chiffres pour identifier la position des éléments dans l’unité syntaxique que représente cet énoncé. Nous relevons ainsi cinq relations de dépendance ; pour quatre d’entre elles la DD est de 1, pour la cinquième elle est de 2. Nous reprenons ici le système de calcul de Liu & Jiang afin de définir la distance de dépendance (DD) absolue. Soit Wx le terme dominant d’un binôme, qu’on appellera « tête », et Wy le terme dominé. C’est la différence entre Wx et Wy qui permet de définir la distance de dépendance (DD) absolue. Il apparaît que deux mots adjacents ont une DD égale à 1. Lorsque Wx est plus petit que Wy, la DD se calcule négativement, la « tête » précédant en l’occurrence le terme dominé. Sur la base de ce calcul, la DD moyenne de cet énoncé est 1.2, ce qui signifie que les mots en relation de dépendance tendent à être adjacents.

17La micro-grammaire étant définie par l’existence de relations de dépendance morpho-syntaxiques au sein d’une unité structurale donnée, la distance de dépendance, ou DD, est un des principaux mécanismes cognitifs qui régit la micro-grammaire. Des phénomènes comme la distance de dépendance sont un reflet du caractère organiciste de cette grammaire, dans la mesure où, non seulement les co-énonciateurs réactualisent les règles en vigueur mais, de plus, ils adaptent l’énoncé en cours de production aux exigences cognitives : la nécessité de ne pas augmenter les distances de dépendance réduit les possibilités grammaticales et impose les choix syntaxiques, par exemple une préférence pour le positionnement des unités lourdes en fin d’énoncé et le branchement des structures à droite (Auer 2009 : 2).

18Les limites de la micro-grammaire se définissent par rapport à la présence ou à l’absence de relations de dépendance. Là où cessent les relations de dépendance morpho-syntaxiques, on n’a plus affaire à une unité micro-grammaticale. Reprenons l’exemple (1), reproduit ci-dessous en (1’), les unités grammaticales identifiables sont les suivantes (surlignées en italiques) :

19La cohésion de l’unité grammaticale peut être interrompue par des éléments macro-grammaticaux, comme à la ligne 294, où le locuteur doit prendre en charge d’autres tâches dans le cadre de la communication, par exemple l’organisation du discours (well, anyway), la recherche d’une poursuite de l’échange (uh) ou encore le maintien du contact interpersonnel, alias relation phatique, autant de tâches qui viennent contrecarrer la production d’une proposition exprimée en termes de microgrammaire. À telle enseigne que, du point de vue analytique, une unité microgrammaticale peut fort bien apparaître comme scindée en plusieurs parties. Toutefois, cette dernière remarque n’est acceptable que dans une perspective analytique, elle ne l’est sûrement pas pour le locuteur ou pour son allocutaire. Pour les deux protagonistes de la conversation, les éléments macrosyntaxiques, à savoir ceux qui n’entrent pas dans les relations de dépendance morphosyntaxique, sont tout aussi pertinents qu’une unité microgrammaticale pour l’expression et la compréhension de l’information. Et la chaîne parlée dans laquelle ils prennent place repose sur une activité cognitive non négligeable qui produit au bout du compte le sens terminal recherché. Les éléments macrosyntaxiques contribuent à l’interprétation de l’énoncé et, bien que n’apportant aucune contribution au contenu du message à proprement parler, ils en facilitent la saisie par l’allocutaire. Des exemples comme (1’) et (2) montrent à quel point la frontière entre microgrammaire et macrogrammaire est poreuse ; ils indiquent clairement que les mécanismes de sérialisation propres à la microgrammaire alternent avec les procédés macrogrammaticaux dans la production des énoncés.

6. En macrogrammaire, sérialisation fondée sur la dynamique temporelle des opérations cognitives

20La plupart des analyses grammaticales concernent la structure interne d’unités closes telles que les phrases ou les propositions, l’accent étant mis sur les différences structurelles. En revanche, la macro-grammaire prend en considération les relations externes, à savoir le réseau de relations entre les unités d’information microgrammaticales et les autres éléments d’information impliqués dans la production d’un échange. La macro-grammaire a pour objectif l’analyse des relations fonctionnelles hors du cadre micro-grammatical. Sa démarche est fondée sur une catégorisation des unités sous analyse impliquant :

  1. la visée constructive,

  2. l’effection des énoncés,

  3. la cohésion textuelle, et

  4. l’imbrication contextuelle.

21Les éléments de macro-grammaire n’entrent pas dans des rela-tions de dépendance morpho-syntaxique – ils sont donc autonomes de ce point de vue – et ils n’apportent rien au contenu propositionnel. Ils peuvent cependant intervenir dans le calcul des valeurs de vérité. C’est ainsi qu’ils modifient la certitude épistémique, par exemple à l’aide d’un adverbe conclusif comme perhaps (« peut-être ») ou une clause-commentaire comme I guess (« je suppose »). Non intégrés du point de vue de la micro-grammaire, ils s’intègrent dans l’échange où ils apparaissent, dans la mesure où ils contribuent à la structuration du discours et à l’interprétation pragmatique. Une bonne partie de ces éléments ne peuvent être utilisés seuls ; ils requièrent une « unité d’accueil » dans laquelle ils participent à l’organisation interne : ils la segmentent, par exemple avec des uh/uhm ou des insertions parenthétiques du type what, yeah ou you know (« quoi, c’est sûr, tu sais ») ; ils introduisent une remarque discussive (ex. il me semble, pour exprimer une opinion), bref ils font partie de l’acte illocutionnaire. L’inclusion prosodique des éléments macro-grammaticaux s’inscrit dans un continuum qui va de l’intégration complète au contour intonatif, jusqu’à la mise en retrait que manifestent une pause, une montée de l’accent ou une réalisation intonative spécifique (voir Dehé & Wichmann, 2010).

22En macro-grammaire, les blocs syntagmatiques sont des éléments qui peuvent être soit :

  1. des formes lexicales conventionnelles (p. ex. des marqueurs discursifs),

  2. des tranches ou « fragments » réutilisables (Thompson 2002 : 141 – 142) p. ex. what I mean is, the other thing is, « ce que je veux dire c’est, par ailleurs », c’est-à-dire des unités de « construction » au sens de la Grammaire de Construction (Goldberg 1995 ; Croft 2001) – des fragments de discours enregistrés de manière plus moins schématique et non analysables, mais constituant des unités de sémantique formelle,

  3. des unités de création spontanée, parfaitement bien formées, mais sans lien morpho-syntaxique avec ce qui précède, ce qui ne les empêche pas de contribuer à la valeur illocutoire de l’énoncé et de servir à l’élaboration du discours en créant un mouvement d’attente (ex. Today’s program uh should we discuss more details, « le programme du jour euh on discute encore les détails ? ») ; ou en introduisant un ajout (cf. la ligne 291 dans l’exemple [1]) ; on notera que ces fragments ne doivent pas forcément avoir une structure micro-grammaticale.

23Dans la mesure où les éléments macro-grammaticaux n’entrent pas dans un réseau de dépendance morpho-syntaxique, qu’ils échappent donc à la juridiction micro-grammaticale, ils devraient théoriquement occuper n’importe quelle position dans un échange en langue orale spontanée. C’est bien le cas, du moins partiellement, pour certains de ces éléments, par exemple pour les marqueurs de mise en attente (uh, uhm), pour les marqueurs discursifs comme actually (Aijmer 1986), ou les commentaires (I think). Mais ce n’est pas le cas pour de nombreux autres éléments. Certains sont utilisés de préférence en position initiale ; il en est ainsi des marqueurs discursifs well et now en anglais. D’autres apparaissent exclusivement en tête d’énoncé, comme les interjections, les expressions phatiques telles que mhm ou okay. D’autres sont utilisés de préférence ou exclusivement en position finale, comme les « tags » (isn’t it ?, « n’est-ce pas »), ou les signes d’extension indéterminée (and stuff, or so, cf. « et tutti quanti », à la fin d’une énumération), ou les marqueurs de conclusion (then, though, cf. « et voilà »), ou encore toute autre expression conclusive, quelle qu’en soit la structure. Une des principales tâches de la macro-grammaire est de décrire les principes qui régissent le positionnement des divers éléments, ainsi que les mécanismes cognitifs qui les sous-tendent. L’idée défendue ici est que ce positionnement n’est pas aléatoire, qu’il est au contraire fortement lié à des exigences temporelles. En outre, les éléments flottants tendent à changer de sens et de portée en fonction précisément des contraintes temporelles.

24Le positionnement des unités macro-grammaticales ne peut être décrit au moyen d’abstraites règles formelles dans la tradition structuraliste. Il convient donc de chercher ailleurs. Compte tenu des principes énoncés en i – iv, il est plus que probable que l’explication est à chercher du côté des structures cognitives. Si, comme on peut l’observer, les éléments qui partagent la même position ont les mêmes fonctions, on peut raisonnablement supposer qu’ils sont tributaires des mêmes opérations cognitives. Au début d’un échange verbal, les locuteurs sont confrontés à un certain nombre de tâches à accomplir, à savoir : prise du tour de parole, insertion d’un message dans la continuité de la conversation, comment renvoyer au passé de l’échange, comment maintenir le contact avec l’allocutaire (Beeching & Detges 2014 ; Deppermann 2013). Il est clair que ces tâches diffèrent en fonction des étapes dans le déroulement de la conversation, l’étape initiale, la médiane et la finale. Le tableau ci-dessous donne une idée générale des diverses tâches que vont devoir accomplir les co-énonciateurs aux différentes étapes de l’échange.

Tableau 1 : dynamique temporelle des tâches cognitives au cours de l’échange

25Le tableau 1 est l’illustration de la dynamique temporelle qui sous-tend l’effection de l’échange entre deux co-énonciateurs. On constate que cette effection peut se mesurer en « phases » temporelles dont l’importance est capitale. On peut en déduire que la macro-grammaire est intimement liée à la structure temporelle des tâches cognitives dont l’ordre n’a rien d’aléatoire. Un exemple : l’insertion d’une “question tag”, donc l’appel à une réaction de l’allocutaire, présuppose l’existence d’un argument auquel celui-ci peut réagir et implique logiquement, par voie de conséquence, une projection sur la phase finale de l’échange. La question-tag est en quelque sorte le « passeur » entre ce qui a été dit et ce que l’on envisage de dire dans l’échange. La correspondence entre les phases temporelles et les tâches ne coïncide pas forcément, car, étant libres, les co-énonciateurs peuvent choisir d’autres tâches. Par exemple, au lieu d’être exprimée au début de l’énoncé, la référence à l’avant de l’échange peut être différée et trouver son expression à la fin de l’énoncé, au moyen d’adverbes de liaison ou de « particules conclusives », comme par exemple en anglais then ou though, afin de signaler une mise en contraste (Haselow 2013 ; Lenker 2010: 198-200). Nous ferons remarquer ici que, comme les tâches qu’illustre le Tableau 1 relèvent de la routine, les locuteurs les ont mémorisées, sachant non seulement comment, mais quand les réaliser.

26En définitive, le placement des éléments macro-grammaticaux est subordonné à l’instant où ils sont requis dans le processus de production de l’échange verbal. Ces éléments ne constituent pas forcément une unité micro-grammaticale, mais ils font partie intégrante de l’unité macro-grammaticale où leur position est assignée, et ils participent à sa force illocutoire. Les unités macro-grammaticales ont des fonctions spécifiques en rapport avec le système de communication et associées à l’interprétation du message. Dans les exemples [1]’ et [3], les unités macro-grammaticales apparaissent en italiques :

27Les unités macro-grammaticales au début de l’échange ont tendance à profiler celui-ci et à lui fournir un point d’ancrage ; p. ex. and signale un nouveau thème de discussion, ou bien il annonce une idée dans le prolongement de la précédente ; but marque une transition introduisant une restriction ou une correction ; I think ouvre le champ d’une opinion. Les éléments médians servent à maintenir le contact avec l’allocutaire et présupposent un univers partagé (you know), ils expriment la continuité (and) ou la reprise de ce qui avait été préalablement annoncé (I think). Quant aux éléments terminaux, ils introduisent une ultime remarque, comme par exemple so à la ligne 151, pour suggérer la conclusion qui s’impose à la suite de ce qui a été dit, mais une conclusion qui est laissée dans l’implicite.

28Les frontières de la macro-grammaire sont déterminées par la force illocutoire ; les éléments qui ne participent pas à cette force illocutoire, mais qui possèdent leur propre force illocutoire, forment une nouvelle unité macro-grammaticale. Dans ces conditions, toutes les unités qui contribuent à l’expression d’une visée discursive spécifique sont considérées comme faisant partie de la même unité grammaticale.

7. Conclusion

29L’hypothèse que nous avons formulée dans le présent article est qu’il existe deux domaines de la grammaire, chaque domaine possédant ses propres procédés de catégorisation. En micro-grammaire, la catégorisation, ou sérialisation, est déterminée par les relations hiérarchiques internes qui sont elles-mêmes soumises à des contraintes cognitives. L’idée qu’il existe un domaine grammatical nommé macro-grammaire repose sur l’hypothèse que la catégorisation n’est pas exclusivement automatique et non affranchie au contexte, qu’elle ne dépend pas de règles abstraites spécifiques prenant en compte la hiérarchisation, la composition interne et l’enchâssement, comme en micro-grammaire, mais au contraire qu’elle est fondée sur les tâches cognitives que doivent accomplir les co-énonciateurs au fur et à mesure que se déroule l’échange verbal. Les éléments micro-grammaticaux, qui interviennent à différents niveaux du système général de la communication, par exemple dans la relation interlocutive, ou l’organisation textuelle, ne sont interprétables que par référence à l’unité dont ils sont partie intégrante, que si on ne leur reconnaît aucune force illocutoire spécifique, qu’ils ne participent pas à une autre activité conversationnelle. Au contraire, ils participent pleinement à la force illocutoire de l’unité où ils sont intégrés. Nous avons avancé l’idée que la concaténation des unités macro-grammaticales est conditionnée par les tâches que doit remplir le locuteur dans l’instant, au fur et à mesure que se construit l’échange. Les instants en cause peuvent être conçus comme des « champs », à savoir des espaces de communication qui rendent possible et pertinente la production de l’échange, sans pour autant la rendre obligatoire. Les champs en question ne sont pas des espaces fixés a priori selon un plan syntaxique, mais des lieux optionnels disponibles dans l’émergence d’un besoin cognitif précis. Selon cette vision des choses en termes d’« émergence » au sens où l’entend Hopper (1987, 1998), la structure du langage ne résulte pas de la configuration de catégories pré-fixées, elle est soumise à des « exi-gences de communication » (Hopper 1998 : 157).

30Fondées sur des mécanismes de catégorisation différents, la micro-grammaire et la macro-grammaire constituent cependant deux domaines séparés par une frontière perméable et non infranchissable. En d’autres termes, il y a interaction entre les deux domaines, les éléments de l’un servant à l’autre au sein d’une même unité de discours. Ce qui signifie que, du point de vue cognitif, la catégorisation s’effectue en parallèle plutôt que de façon modulaire. La perméabilité de la frontière entre les deux domaines est également observable sur le plan prosodique. Les éléments macro-grammaticaux intégrés à un énoncé ne s’en distinguent généralement pas du point de vue prosodique, y étant assimilés à divers degrés (Dehé & Wichmann, 2010). Par ailleurs, un certain nombre d’études montrent que les éléments identifiés comme macro-grammaticaux faisaient à une certaine époque partie de la micro-grammaire. Il serait donc plus pertinent de situer ensemble micro- et macro-grammaire sur un seul et même continuum.

31Dans la mesure où les éléments macro-grammaticaux ne peuvent être décrits à partir d’un modèle de concaténation a priori, la seule manière d’en aborder l’analyse dans une suite hors contexte, est d’adopter un point de vue probabiliste quant à la position qu’ils pourront occuper, et de s’en remettre aux critères d’acceptabilité des co-énonciateurs. Les régularités temporelles (sérielles) observées constituent ainsi des indices quant aux positions possibles. La compréhension des probabilités d’échéance temporelle implique celle des fonctions au sein d’une unité conversationnelle, ce qui suppose de surcroît la compréhension des tâches cognitives, les « phases cognitives », que doit accomplir successivement tout locuteur. Les recherches devront être poursuivies si l’on veut comprendre le pas à pas de la concaténation, en particulier en ce qui concerne la « phase médiane ».

Haut de page

Bibliographie

aijermer, K. (1986), “Why is Actually so Popular in Spoken English?”, dans Tottie, G. et Bäcklund, I. (éds.), English in Speech and Writing: A symposium, Almqvist & Wiksell, 119-127, Stockholm.

auer, P. (1996), “On the Prosody and Syntax of Turn-continuations”, dans Couper-Kuhlen, E. & Selting, M. (éds.), Prosody in Conversation. Interactional studies, Cambridge University Press, Cambridge, 57-100.

auer, P. (2005), “Projection in Interaction and Projection in Grammar”, Text 25 (1), 7-36.

auer, P. (2009), “On-line Syntax. Thoughts on the Temporality of Spoken Language”, Language Sciences 31(1), 1-13.

Beeching, K. et Detges, U. (2014), “Introduction”, dans Beeching, K. et Detges, U. (éds.), Discourse Functions at the Right and Left Periphery: Crosslinguistic Investigations of Language Use and Language Change, Brill, Leiden, 1-23.

Berendonner, A. (1990), « Pour une macro-syntaxe », Travaux de Linguistique 21, 25-36.

Blakemore, D. (1987), Semantic Constraints on Relevance, Blackwell, Oxford.

Blanche-Benveniste, C. (2003), « Le recouvrement de la syntaxe et de la macro-syntaxe », dans Scarano, A. (éd.), Macro-syntaxe et pragmatique. L’analyse linguistique de l’oral. Bulzoni, Firenze, pp. 53-75.

Brady, M., Armstrong, L. et Mackenzie, C. (2006), “An Examination over Time of Language and Discourse Production Abilities Following Right Hemisphere Brain Damage”, Journal of Neurolinguistics 19 (4), 291-310.

Brinton, L. (2008), The Comment Clause in English: Syntactic Origins and Pragmatic Development, Cambridge University Press, Cambridge.

Chafe, W. (1994), Discourse, Consciousness, and Time. The Flow and Displacement of Conscious Experience in Speaking and Writing, University of Chicago Press, Chicago.

Couper-Kuhlen, E. et ONO, T. (2007), ”Increments in Cross-Linguistic Perspective: Introductory remarks,” Special issue of Pragmatics 17 (4), 505–512.

Cowan, N. (2001), “The Magical Number 4 in Short-term Memory: A Reconsideration of Mentalstorage capacity,” Behavioural and Brain Sciences 24, 87-114.

Croft, W., 2001. Radical Construction Grammar: Syntactic Theory in Typological Perspective, Oxford University Press, Oxford.

Cutica, I., Bucciarelli, M. et Bara, B. G. (2006), “Neuropragmatics: Extralinguistic Pragmatic Ability is Better Preserved in Left-hemisphere-damaged Patients than in Right Hemisphere-damaged Patients,” Brain and Language 98 (1), 12-25.

Degand, L. (2014), “’So very fast then’: Discourse Markers at Left and Right Periphery in Spoken French”, dans Beeching, K. et Detges, U. (éds.), Discourse Functions at the Left and Right Periphery: Crosslinguistic Investigations of Language Use and Language Change, Leiden, Brill, 151-187.

Dehé, N. et Wichmann, A. (2010), “The Multifunctionality of Epistemic Parentheticals in Discourse: Prosodic Cues to the Semantic-pragmatic boundary,”,Functions of Language 17(1), 1-28.

Deppermann, A. (2013), “Turn-design at Turn-beginnings: Multimodal Resources to Deal with Tasks of Turn-construction in German,” Journal of Pragmatics 46 (1), pp. 91-121.

Dik, S. C. (1997), The Theory of Functional Grammar, Part 2, Mouton de Gruyter, Paris.

Gibson, E. (2000), “The Dependency Locality Theory: A Distance-based Theory of Linguistic Complexity," dans Miyashita, Y., Marantz, A. et O’Neill, W. (éds.), Image, Language, Brain, MIT, Press, Cambridge, MA, 95-126.

Gildea, D. et Temperley, D. (2010), “Do Grammars Minimize Dependency Length?” Cognitive Science 34, 286-310.

Givon, T. (1984), Syntax: A Functional-typological Introduction, vol. 1. John Benjamins, Amsterdam.

Goldberg, A. (1995), Constructions: A Construction Grammar Approach to Argument Structure, University of Chicago Press, Chicago.

Hale, J. (2006), “Uncertainty about the rest of the Sentence,” Cognitive Science 30, 643-672.

Haselow, A. (2013), “Arguing for a Wide Conception of Grammar: The Case of Final Particles in Spoken Discourse,” Folia Linguistica 47 (2), 375-424.

Haselow, A. (2015), “Left vs. Right Periphery in Grammaticalization: the Case of Anyway, dans Smith, A., Trousdale, G. et Waltereit, R. (éds.), New directions in grammaticalization research, Benjamins, Amsterdam, 157-186.

Hawkins, J. (1994), A Performance Theory of Order and Constituency, Cambridge University Press, Cambridge.

Hawkins, J. (2004), Efficiency and complexity in grammars, Oxford University Press. Oxford.

Heine, B., Kuteva, T., Kaltenbök, G. et Long, H. (2015), “On some Correlations Between Grammar and Brain Lateralization,” Oxford Handbooks Online, Oxford University Press, Oxford.

Hiranuma, S. (1999), “Syntactic Difficulty in English and Japanese: a Textual study,” UCL Working Papers in Linguistics 11, 309-322.

Hopper, P. J. (1987), Emergent Grammar, Berkeley Linguistics Society 13, pp. 139–157.

Hopper, P. J. (1998), “Emergent Grammar", dans Tomasello, M. (éd.), The New Psychology of Language, Laurence Erlbaum Associates, Mahwah, NJ, 155–175.

Hopper, P. J. (2011), “Emergent Grammar and Temporality in Iinteractional Linguistics," dans Auer, P. et Pfänder, S. (éds.), Constructions: Emerging and Emergent, De Gruyter Mouton, Berlin, 22-44.

Hough, M. (1990), “Narrative Comprehension in Adults with Right and Left Hemisphere Brain Damage: Theme organization,” Brain and Language 38, 253–277. International Corpus of English – Great Britain, Release 2, 2006, Survey of English Usage, University College London, London. (CD Rom).

Jiang, J. et Liu, H. (2015), “The Effects of Sentence Length on Dependency Distance, Dependency Direction and the Implications – Based on a Parallel English-Chinese Dependency Treebank,“ Language Sciences 50, 93-104.

Kaltenböck, G., Heine, B. et Kuteva, T. (2011), “On Thetical Grammar,” Studies in Language 35, 852-897.

Lenker, U. (2010), Argument and Rhetoric. Adverbial Connectors in the History of English, De Gruyter Mouton, Berlin.

Liu, H. (2008), “Dependency Distance as a Metric of Language Comprehension Difficulty”, Journal of Cognitive Sciences 9(2), 159-191.

Miller, G.A. (1956), “The Magical Number Seven, Plus or Minus Two: Some Limits on our Capacity for Processing Information,” Psychological Review 63, 81-97.

Robertson, D. A., Gernsbacher, M.A., Guidotti, S.J, Robertson, R.R.W., Irwin, W., Mock, B. J. et al. (2000), “Functional Neuroanatomy of the Cognitive Process of Mapping during Discourse Comprehension,” Psychological Sciences 11(3), 255-260.

Schegloff, E. A. (1996), “Turn Organization: One Intersection of Grammar and Interaction,” dans Ochs, E., Schegloff, E. A. et Thompson, S. A. (éds.), Interaction and Grammar, Cambridge University Press, Cambridge, 52-133.

Sherratt, S. et Bryan, K. (2012), “Discourse Production after Right Brain Damage: Gaining a Comprehensive Picture using a Multi-level Processing Model,” Journal of Neurolinguistics 25, 213-239.

Shields, J. (1991), “Semantic-pragmatic Disorder: A Right Hemisphere Syndrome?” British Journal of Disorders of Communication 26, 383-392.

Thompson, S. A. (2002), “Object Complements and Conversation: Towards a Realistic Account,” Studies in Language 26, 125-164.

Traugott, E. C. (2015), “Investigating Periphery from a Functionalist Perspective,” Linguistics Vanguard 1 (journal en ligne).

van lancker sidtis, D. (2004), “When Novel Sentences Spoken or Heard for the First time in the History of the Universe are not Enough: Toward a Dual-process Model of Language,” International Journal of Language and Communication Disorders 39, 1-44.

van lancker sidtis, D. (2009), “Formulaic and Novel Language in a Dual Process Model of Language Competence: Evidence from Surveys, Speech Samples, and Schemata,” dans Corrogan, R., Moravcsik, E. A., Ouali, H., Wheatley, K. M. (éds.), Formulaic Language, Volume 2, “Acquisition, Loss, Psychological Reality, and Functional Explanations,” John Benjamins. Amsterdam, 445–470.

Haut de page

Notes

1 A. – tu peux penser que ce n’était pas la meilleure façon de passer trois semaines. B.– et bien non, pas vraiment /mais euh, il y avait des lieux ouai plus intéressants, tu sais comme la Côte d’Azur. A. – ouai / ouai / et ben ok d’accord passe nous tu sais un coup de fil quand tu euh auras l’info, tu sais.

2 Alors c’est aussi terrible tu sais avec ces (.) pantalons baggy et puis ces donc ce style asocial donc oui.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Alexander Haselow, « Micro- et macro-syntaxe : sur deux principes de catégorisation cognitive en langue orale spontanée »Modèles linguistiques, 74 | 2016, 29-50.

Référence électronique

Alexander Haselow, « Micro- et macro-syntaxe : sur deux principes de catégorisation cognitive en langue orale spontanée »Modèles linguistiques [En ligne], 74 | 2016, document 2, mis en ligne le 02 août 2017, consulté le 19 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ml/1895 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ml.1895

Haut de page

Auteur

Alexander Haselow

Maître de conferences à l'Institut für Anglistik-Amerikanistik, Universität Rostock

alexander.haselow@uni-rostock.de

Haut de page

Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search