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Texte intégral

1C’est la deuxième fois que la revue Marges consacre un numéro à la question de l’exposition. Dans Marges 05, il s’agissait surtout d’observer l’intérêt de plus en plus grand pour cette question de la part de la scène de l’art contemporain ; qu’il s’agisse du phénomène de la multiplication des biennales, de celui des expositions « hors les murs », des expositions d’art non occidental (en Occident ou hors d’Occident), voire de la politique de développement de l’art contemporain pratiquée par telle ou telle structure institutionnelle (la ville de Turin, à la veille des Jeux Olympiques d’hiver de 2006, par exemple). Ce numéro offre un point de vue assez différent sur les mêmes questions, à un moment où il est de plus en plus banal de traiter des expositions indépendamment des œuvres qu’elles contiennent.

2De fait, quelques années ont passé et la réflexion sur l’exposition est désormais à l’ordre du jour de la plupart des institutions spécialisées en art contemporain. Le point de départ de ce numéro se trouve là : dans le constat que la question de l’exposition, autrefois directement reliée à la création artistique – en une sorte d’adaptation contextuelle de projets plus larges et considérés comme « premiers » – a eu tendance ces dernières années à s’autonomiser, au point où la figure du commissaire / curateur attire sans doute autant de vocations, sinon plus, que celle de l’artiste chez les nouveaux entrants du monde de l’art. Quoi qu’il en soit, on l’aura compris, en dépit d’un titre tel que « Exposition sans artiste(s) », il ne s’agit pas tant de dire que l’exposition peut se passer d’artistes que de remarquer que la relation traditionnelle entre artistes et institutions – relation qui voulait que le travail des premiers légitime les activités des secondes – est peut-être en train de s’inverser.

3De ce point de vue, la première partie du numéro prolonge et approfondit certaines thématiques déjà présentes, quoique de manière latente, dans Marges 05, en traitant d’interrogations relativement récentes quant au rôle grandissant des commissaires et des institutions dans la création de la valeur artistique. L’article de Delphine Dori consacré à la relation entre art contemporain et Art Brut permet d’aborder assez frontalement cette question avec l’évocation d’une idée forte du moment : le fait de considérer que les commissaires « font et défont » à volonté la scène de l’art, indépendamment des œuvres et des artistes. Il est ici intéressant de comparer cet article à la fois avec le texte de Maxence Alcalde consacré à l’exposition des « cultures exotiques » (dans Marges 05) et avec un article de Marc Lenot, à propos de Miroslav Tichy, qui en est encore plus proche, à bien des égards, et qui avait été publié dans le dernier numéro de Marges.

4Le texte suivant aborde une autre question d’actualité : la tendance récente – repérée notamment dans les principaux centres d’art français – à confier à des artistes une partie de la programmation et notamment l’organisation d’expositions thématiques. Le cas étudié par Claire Moeder – l’exposition « The Third Mind », organisée par Ugo Rondinone au Site de création contemporaine du Palais de Tokyo en 2007 – est d’ailleurs souvent considéré comme exemplaire de cette tendance.

5Avec le texte d’Aurélie Champion, c’est d’un autre phénomène du moment qu’il est question : la présentation événementielle et thématique des collections permanentes au sein des musées d’art moderne et contemporain (ce qui est parfois qualifié d’« expocollections » – pour reprendre un néologisme forgé à l’occasion de « elles@centrepompidou »). Pourtant, ainsi qu’elle le montre, ce genre de présentation n’est pas propre à notre époque, puisqu’on en trouve des exemples depuis une vingtaine d’années. Ce qui est plus récent en revanche, c’est la systématisation de ce genre de procédé et l’idée selon laquelle il ne serait plus possible, de s’en tenir à une collection « permanente » qui serait présentée de manière immuable.

6La deuxième partie du numéro s’interroge plutôt sur les à-côtés ou périphéries de l’exposition – sur la manière dont la question de l’exposition fait également sens à ses marges. Colette Leinman y traite notamment des catalogues d’art contemporain de certains musées – prolongements de leur activité d’exposition – en ce qu’ils peuvent aussi être vus comme des « instruments de savoir et de pouvoir » ; d’autant plus que bien souvent, ils sont les seuls éléments à subsister après la fin de l’événement auquel ils se rapportent. Il ne s’agit pas tant de remarquer que lorsqu’on parle d’une exposition – surtout si on ne l’a pas vue – on l’assimile à son catalogue, mais plutôt de constater l’importance prise par les rédacteurs et commanditaires d’un catalogue dans le point de vue produit sur un ensemble d’œuvres.

7Géraldine Miquelot s’interroge, quant à elle, sur les expositions organisées par les fonds régionaux, municipaux ou départementaux d’art contemporain – notamment en milieu scolaire – ; considérant qu’il y a là un certain nombre de formes de présentation qui échappent à l’image commune que l’on se fait de l’exposition. De fait, les manifestations auxquelles elle fait référence se situent dans une situation largement indécidable : pas encore de l’ordre de l’exposition (au sens de l’institution d’art contemporain) et plus vraiment non plus de l’ordre de l’objet d’enseignement (au sens de l’institution scolaire).

8Le dernier article du dossier, que l’on doit à Claire Lahuerta, aborde la question de la scénographie d’exposition, vue sous un angle « plasticien ». Il s’agit, en quelque sorte, de montrer que cette pratique, souvent considérée comme subordonnée au commissariat d’exposition, recèle ses propres qualités créatives et sa force d’invention plastique.

9Un texte en varia complète ce dossier ; il est dû à Jean-Baptiste Mognetti et traite de l’influence de la pensée d’Albert Camus sur l’artiste allemand des années 1970, Blinky Palermo à travers le prisme de l’enseignement que ce dernier avait reçu de Joseph Beuys.

10Le numéro ne serait pas complet sans quelques comptes rendus et une intervention d’artiste. Cette fois-ci, nous avons choisi de publier un portfolio de Nathalie Lecroc ; reproduction d’un Carnet de trèfles réalisé lors d’une résidence à l’Abbatiale Saint-Philibert de Grand-Lieu.

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Pour citer cet article

Référence papier

Jérôme Glicenstein, « Éditorial »Marges, 12 | 2011, 5-7.

Référence électronique

Jérôme Glicenstein, « Éditorial »Marges [En ligne], 12 | 2011, mis en ligne le 15 avril 2011, consulté le 25 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/marges/391 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/marges.391

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Auteur

Jérôme Glicenstein

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