Camouflages – Musées et artistes contemporains
Résumés
Cet article cherche à analyser et à problématiser l’invitation et la complicité entre Pedro Cabrita Reis (Lisbonne, 1956), un des artistes portugais les plus reconus de la contemporanéité, et deux musées portugais, le Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian, à Lisbonne, et le Musée National d’Art Contemporain de la Fondation de Serralves, à Porto. Les invitations, qui ont eu lieu dans le cadre du 50e anniversaire et du 20e anniversaire des deux institutions, révèlent les utilisations institutionnelles et commémoratives de l’art contemporain.
Plan
Haut de pageTexte intégral
Introduction
- 1 Museums of the World 2019, Berlin/Boston, De Gruyter Saur, 2019.
- 2 « Musées », dans Unesco [https://fr.unesco.org/themes/mus%C3%A9es], consulté le 23 septembre 202 (...)
1À l’époque contemporaine, la création de musées et de centres d’art a entraîné un essor des commandes de projets artistiques et suscité un regain d’intérêt pour ce mode de production parmi les circuits institutionnels de l’art. Selon les données publiées par De Gruyter, il existait en 2019 55 000 musées dans 203 pays1. L’Unesco, sur son site Internet, indique pour sa part que le nombre de musées est passé de 22 000 en 1975 à 95 000 à ce jour et souligne la fonction essentielle de ces institutions dans l’économie de la culture : « Les musées peuvent jouer un rôle de premier plan dans le soutien à l’économie créative locale et régionale. Ils sont également des acteurs de plus en plus présents dans la société, proposant des plateformes de débats et d’échange, s’intéressant aux problèmes complexes de la société et encourageant la participation de la société civile2. ». Si les critères différents de collecte des données peuvent expliquer les divergences constatées, la comptabilisation des musées d’art est elle-même problématique. Le nombre d’institutions consacrées à l’art contemporain, en raison de la difficulté inhérente à la stricte définition de celui-ci, est tout aussi ardu à évaluer. Quoi qu’il en soit, la multiplication de ces institutions est flagrante, ainsi que celle des expositions d’art contemporain – en tant qu’instrument de gestion des publics – dans les institutions consacrées à l’art du passé.
- 3 La rhétorique et la méthodologie des industries culturelles et créatives intègrent les arts et l (...)
2L’élargissement de la pratique artistique, des politiques culturelles et des espaces muséologiques, sensible dès le milieu des années 1990, a en outre été marqué par une communication globale sans précédent et par l’émergence d’une culture numérique qui a influencé la façon de produire, de distribuer et de consommer l’art et la culture, termes spécifiques au contexte de l’économie de la culture et au domaine des industries culturelles et créatives où ces institutions opèrent3.
- 4 Le nombre indiqué se borne à signaler les lieux les plus visibles et à souligner cette phase d’e (...)
3Le Portugal a connu à partir des années 1990 un renforcement progressif des actions culturelles au niveau des autorités locales et régionales, lorsqu’une quantité de collections publiques et privées ont été installées dans des musées : ce phénomène dérive de la dissémination sur le territoire portugais de centres artistiques et de structures monographiques associées à des artistes ou à des collectionneurs. Le paysage institutionnel de l’art moderne et contemporain du pays a changé de façon significative au cours de la dernière décennie du 20e siècle et de la première décennie du 21e siècle, avec de multiples développements qui se prolongent encore de nos jours. Au total, 27 institutions ont ouvert leurs portes au public entre 1993 et 2019 : des structures muséologiques et des centres d’exposition à l’échelle nationale, notamment associés à des institutions bancaires et à de grandes entreprises ; des espaces culturels dédiés à de grandes collections privées, en partie avec l’appui de l’État et des municipalités ; des musées et des centres d’art et de culture municipaux ou avec une participation municipale, dont certains ont été financés par l’État4.
- 5 Où l’extra-institutionnel est entendu comme processus de transition entre un domaine non-institu (...)
4En parallèle, il conviendrait aussi de mentionner l’émergence d’espaces gérés par des artistes et des collectifs d’artistes auxquels ont été accolées diverses étiquettes comme alternatifs, périphériques, parallèles, anti-institutionnels et extra-institutionnels5. Ces lieux manifestent une préférence pour les projets de nature sociale et les pratiques s’efforçant d’affronter les politiques de rénovation urbaine et la spéculation immobilière ainsi que la tyrannie des édifices emblématiques des grandes institutions.
- 6 Ce mouvement au Portugal a fait l’objet d’expositions et d’études, notamment : Fátima Lambert, L (...)
- 7 Nina Möntmann, « New Institutionalism revisited », dans Jerlyn Marie Jareunpoon-Philips et al. ( (...)
5Le champ sémantique du non-institutionnel vise à appréhender une dynamique culturelle et politique de caractère transitoire, un mouvement critique qui complète, défie ou cherche à intégrer le panorama officiel6, lui aussi marqué par des cycles de consommation chaque fois plus courts adaptés à la prédilection pour des pratiques éphémères et d’itinérance, ainsi que pour l’organisation de diverses manifestations comme les festivals, les jeux, les discussions et les débats, les séjours d’artistes, les cours et les ateliers de création. Ces événements, qui rivalisant avec l’exposition collective et l’exposition rétrospective ou anthologique, participent d’un nouvel institutionnalisme défini par l’historienne Nina Möntmann comme une quête « d’approches interdisciplinaires de programmes particuliers centrés sur la culture pop, le discours théorique ou l’activisme » ainsi que d’« un programme totalement expérimental fondé sur des séminaires7 ».
- 8 Claire Doherty, « The institution is dead! Long live the institution! Contemporary Art and New I (...)
6La productrice Claire Doherty, fort critique vis-à-vis de la rhétorique sous-jacente à cette tendance, affirmait à cet égard : « Au sein des organisations, il est déjà possible d’identifier des programmations et des commissariats [qui] se distinguent des modèles conventionnels de la galerie ou du centre d’art par une approche interdisciplinaire qui utilise souvent des facettes permettant à des projets et événements particuliers de se développer à travers différentes formes et durées, en se déplaçant dans les espaces de leurs bâtiments, en ligne et hors site, quand et là où cela convient. ». L’auteure s’interroge plus loin : « Comment répondre à la pratique artistique sans dicter les réponses des visiteurs, et comment créer un programme permettant une diversité d’événements, d’expositions et de projets sans privilégier le social sur le visuel8 ? ».
7Des programmes dérivés des pratiques du nouvel institutionnalisme ont été proposés au sein du panorama portugais précédemment décrit : organisation de résidences artistiques et de recherche, projets accompagnés de débats avec les artistes, production de grandes installations artistiques et de films à caractère processuel et expérimental. Nous assistons à une convergence progressive des modes de programmation et de commande des grandes institutions et des lieux non-institutionnels, que seules séparent la capacité budgétaire et la politique de communication.
8Cet article aborde deux institutions portugaises de matrice conservatrice où ce rapprochement est perceptible : la Fondation Calouste Gulbenkian avec le Musée et le Centre d’Art Moderne à Lisbonne et la Fondation de Serralves avec le Musée National d’Art Contemporain de Serralves à Porto. Ces deux institutions détentrices d’un rôle de référence au Portugal feront l’objet d’une brève présentation qui permettra d’introduire des aspects sommaires de leur programmation, de la gestion de leurs collections et de leur impact sur le milieu portugais.
9Toutes deux ont voulu se rénover à des moments particuliers de leur histoire. Si la stratégie qu’elles ont utilisée, soutenue par l’idée d’un projet d’auteur conçu par Pedro Cabrita Reis (Lisbonne, 1956), s’éloigne des pratiques de nature sociale, collaborative et participative, ainsi que de la mobilisation des publics du nouvel institutionnalisme, il n’en est pas moins vrai que l’on y décèle une volonté de défier le modèle dominant de l’exposition.
L’effet Gulbenkian
10Cette fondation privée créée en 1953, d’utilité publique, était appelée à jouer un rôle crucial dans le renouveau des expositions et de la culture artistique au Portugal, ainsi que dans le soutien aux artistes et créateurs contemporains. Si l’inauguration du musée de la Fondation à Lisbonne en 1969 a constitué une étape décisive dans la transformation des dispositifs et du discours de l’exposition, la programmation culturelle n’a pas tardé à s’orienter vers la communauté artistique portugaise. Mentionnons à cet égard les trois grandes Expositions d’Arts Plastiques organisées en 1957, 1961 et 1986, dont l’impact a été considérable ; elles ont en effet consacré des artistes modernes au moyen de prix et encouragé les artistes portugais contemporains à accompagner les développements artistiques de leur temps.
11Des programmes de formation ont aussi été mis en œuvre et suivis par des dizaines d’artistes. Aujourd’hui, la Fondation Calouste Gulbenkian continue à en proposer régulièrement, entre autres pour soutenir la création dans des domaines allant du cinéma, de la danse et du théâtre à l’édition et à la diffusion internationale des œuvres portugaises.
- 9 À partir de 2016, la Fondation Calouste Gulbenkian a opté pour une politique intégrée du Musée C (...)
- 10 Centro de Arte Moderna José de Azeredo Perdigão. Roteiro da Colecção, Lisbonne, Fundação Caloust (...)
12Au niveau de sa politique de programmation, l’institution a opté pour une double démarche, promouvant d’une part une culture de tradition des beaux-arts et introduisant d’autre part de nouveaux langages. Dans ce cadre, le Centre d’Art Moderne fondé le 20 juillet 1983, auquel a été donné en 1993 le nom du premier président de la Fondation, José de Azeredo Perdigão, a été d’une importance particulière9. Dans les années 1980, le Portugal a assisté à la création de ce qui devait s’imposer comme la première institution consacrée à l’art moderne et contemporain depuis la création du Musée National d’Art Contemporain à Lisbonne en 1911. La collection du Centre d’Art Moderne, constituée depuis 1956, compte plus de 10 000 œuvres et réunit les œuvres des artistes les plus représentatifs du 20e siècle portugais jusqu’à nos jours ainsi que d’auteurs internationaux, notamment un important noyau d’art britannique10.
13Jusqu’à ces dernières années, la collection d’art portugais des 20e et 21e siècles du Centre d’Art Moderne, la plus importante du pays, faisait l’objet d’une exposition permanente renouvelée périodiquement. En parallèle, d’importantes rétrospectives autour de noms reconnus de l’art portugais ont été organisées au cours des dernières décennies, de même que des expositions contemporaines, dont « 7 Artistes au 10e mois ». L’utilisation d’un espace spécifique pour les projets contemporains, nommé « Espace – Projet », a été déterminante pour la promotion d’artistes émergents.
14Mais ce qui a sans doute le plus influencé des générations d’artistes, c’est le programme de soutiens attribués par la Fondation Calouste Gulbenkian dès 1957, dont l’exposition organisée lors du cinquantenaire de la fondation, « 50 ans d’Art portugais », a révélé la portée : cette initiative s’est en effet distinguée par l’exhaustivité et l’impact des bourses décernées à une quantité de peintres et de sculpteurs. L’actualisation des artistes, leur internationalisation, le contact avec une formation spécialisée en France et en Angleterre, la possibilité de participer à des expositions dans ces pays européens et d’autres, ont ouvert des perspectives inédites aux artistes portugais.
- 11 50 Anos de Arte Portuguesa, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 2007), Lis (...)
- 12 Raquel Henriques da Silva, « Apresentação », dans Anos 70 Atravessar Fronteiras, catalogue d’exp (...)
15La recherche documentaire et artistique ainsi que la connaissance approfondie de l’activité de la Fondation Calouste Gulbenkian et de sa contribution à l’histoire de l’art au Portugal se sont développées dans le cadre du cinquantenaire et de l’exposition susmentionnés11 et en 2009 à l’occasion d’une exposition intitulée « Les Années 70 – Traverser les Frontières ». La première exposition a révélé l’influence que la Fondation a exercé sur la pratique artistique portugaise de la seconde moitié du 20e siècle. Dans le contexte du soutien institutionnel, les artistes devaient présenter des projets, des documents de réflexion et des références théoriques qui ont inauguré une manière différente de faire face à la création artistique. Au lieu de la simple proposition d’objets à créer, les artistes étaient encouragés à développer leurs projets et la dimension théorique de leur travail. La valorisation de cette dimension était absolument inédite au Portugal. La deuxième exposition a révélé le support spécifique de la Fondation aux artistes qui ont travaillé à partir des années 1970. L’historienne Raquel Henriques da Silva souligne comment l’institution a su accompagner et appuyer « le crescendo des énergies, des dynamiques et des remises en cause sur la scène artistique portugaise, qui entraîna dans les années 1970 une extraordinaire diversification interne, avec des niveaux élevés d’expérimentation12 ».
- 13 Lígia Afonso, Dias de Saída. O SNI e a Bienal de São Paulo na génese da internacionalização cont (...)
16Il convient également de noter que la Fondation avait un rôle décisif dans la représentation portugaise à la Biennale Internationale d’Art de São Paulo entre les années 1960 et 1996, soit en tant qu’entité de conseil, soit avec des responsabilités d’organisation et de sélection d’artistes13.
- 14 Sur les aspects liés à la notion d’institution comme origine, constitution et établissement d’un (...)
17Ces événements représentatifs de l’orientation des programmes de la Fondation, évoqués sans souci d’exhaustivité historique, permettent d’affirmer que l’effet Gulbenkian se fait sentir sur les artistes et sur la pratique artistique. Son rôle institutionnel se révèle dans l’autorité sous-jacente au soutien à des générations d’artistes, qui contribue à la mise en place d’un lieu commun. Son pouvoir institutionnel, remplaçant l’État, se traduit par la définition d’une communauté d’artistes et d’une histoire de l’art contemporain au Portugal14.
Pedro Cabrita Reis, Fundação, 2006. Vues de l’installation au Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian.

© Cabrita studio / João Ferrand.
Pedro Cabrita Reis, Fundação, 2006. Vues de l’installation au Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian.

© Cabrita studio / João Ferrand.
Pedro Cabrita Reis, Fundação, 2006. Vues de l’installation au Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian.

© Cabrita studio / João Ferrand.
L’effet Serralves
- 15 Circa 1968, catalogue d’exposition (Porto, Museu de Arte Contemporânea de Serralves, 1999), Port (...)
- 16 Leonor de Oliveira, Museu de Arte Contemporânea de Serralves : Os Antecedentes, 1974-1989. Lisbo (...)
18Le Musée d’Art Contemporain de Serralves était en préparation depuis les années 1970, le premier document programmatique datant de 1980. L’activité initiale de la fondation a vu le jour dans la Maison de Serralves, habitation convertie en espace d’exposition en attendant la création du Musée d’Art Contemporain sis dans le bâtiment conçu par l’architecte Álvaro Siza. Le musée avait pour mission de collectionner et de divulguer l’art des années 1960 et au-delà, et son exposition inaugurale, « Circa 196815 », définissait ce cadre chronologique16.
19Sa programmation, qui n’a pas tardé à privilégier la présence d’artistes internationaux et l’accueil d’expositions conçues par d’autres institutions, s’est agrémentée d’une production d’activités destinées notamment aux artistes portugais contemporains : dans ce domaine, Serralves a esquissé un mouvement opposé à celui de la Fondation Calouste Gulbenkian en accordant sa préférence à l’exposition d’étrangers dans ses installations, tandis que Gulbenkian explorait plus volontiers l’internationalisation d’artistes portugais et la diffusion de l’art portugais dans d’autres pays.
- 17 Eduarda Neves, « Duas ou três coisas que sei sobre ele. O museu de arte contemporânea de Serralv (...)
20Bien qu’il possède une importante collection d’artistes portugais et internationaux, le musée a fonctionné exclusivement comme lieu d’expositions temporaires et opté pour une stratégie consistant à montrer sa collection en maintenant un compromis entre le permanent et le temporaire dans des espaces extérieurs à la fondation, surtout municipaux. La collection est en itinérance permanente. Cette stratégie, qui résulte d’accords avec les mairies portugaises, apporte à la fondation un retour sur investissement important ; d’autre part, le cachet de Serralves apposé à une exposition est perçu par les municipalités comme facteur de prestige. L’uniformisation de l’activité culturelle au niveau national et la recherche de l’affirmation d’une marque (la marque Serralves) sont les expressions de l’économie de la culture du 21e siècle et du fonctionnement entrepreneurial auquel les institutions culturelles se sont converties. Eduarda Neves, chercheuse en art contemporain, a écrit : « Quel que soit le musée où nous nous trouvons – et Serralves participe à ce dispositif –, les connexions entre les programmes d’exposition et le marché, les présentations de collections semblant fonctionner davantage comme bourses d’échange et la sponsorisation de l’art contemporain non occidental par de grandes entreprises qui investissent globalement reflètent la façon dont le musée s’inscrit dans le sillage de projets économiques au service du tourisme, de l’économie globale et de ce que l’on désigne comme prospérité économique17 ».
- 18 Ces aspects font partie de la définition de l’institution en tant que productiond’un « complexe (...)
21Les données présentées permettent d’affirmer que l’effet Serralves s’exerce moins sur les artistes et plus sur les conditions de médiation de l’art et sur les autres institutions culturelles. Son rôle institutionnel se révèle dans la propagation d’un business model fondé sur des stratégies de marketing qui façonnent l’activité de nombreux centres d’art à l’échelle nationale18.
L’effet Pedro Cabrita Reis
22Malgré les différences signalées entre les deux institutions, toutes deux ont invité cet artiste. La Fondation Calouste Gulbenkian l’a fait à l’occasion des commémorations de son 50e anniversaire en 2006. Son intervention, symptomatiquement intitulée « Fondation », a occupé tout l’espace du CAM, soit près de 1 590 m2. L’exposition avait un commissaire, le photographe et directeur de l’institution Jorge Molder, ainsi qu’un catalogue, fruit de la collaboration entre ce dernier et l’artiste. Quant à la Fondation Serralves, elle a invité Cabrita Reis dans le cadre des commémorations du 20e anniversaire du musée en 2019. Il a présenté une installation invasive intitulée « A Roving Gaze ». Au Musée de Serralves, l’exposition a été conçue par l’artiste de concert avec Marta Almeida, conservatrice et aujourd’hui vice-directrice du musée. La conception éditoriale du catalogue a elle aussi été placée sous la responsabilité de
l’artiste.
23Dans les deux cas, nous avons affaire à une présence écrasante de Pedro Cabrita Reis en matière de conception des installations et de diffusion de celle-ci par le biais des catalogues des expositions. Bien qu’on identifie un commissaire dans le premier cas, la proposition a été intégralement élaborée par l’artiste, ce qui révèle son penchant pour un modèle d’exposition sans commissaire, ou pour la figure de l’artiste-commissaire.
- 19 Ses œuvres font partie des collections du Kunst Museum Winterthur, du Museu de Serralves, de la (...)
24Membre de la génération artistique qui a émergé en Europe dans les années 1980, Pedro Cabrita Reis est l’un des artistes portugais les plus reconnus de la contemporanéité. Depuis les dernières décennies du 21e siècle, il collabore avec les plus grands musées du
Portugal et plusieurs institutions internationales19.
25Ses premiers travaux orientés par une quête des lieux d’origine – soit la maison, soit l’eau ainsi que les dispositifs de son transport et de sa distribution, réservoirs et canaux – explorent les sources de lumière et de clarté. Les titres de ses œuvres, empreints d’une dimension poétique, font allusion à des moments de la journée, à des circonstances et des situations de sa biographie, sans cependant les expliciter. La métaphore est au centre de son travail.
26Son vocabulaire s’approche de plus en plus de l’univers de la construction, de la fabrication et il abandonne peu à peu les matériaux artistiques pour utiliser des matériaux industriels de construction, des éléments de l’architecture érudite ou vernaculaire. Ses objets révèlent des affinités avec les escaliers, les couloirs, les corps architecturaux vides, les murs incomplets, les chambres abandonnées, les lieux de silence. Le dialogue entre le temps comme construction culturelle et la construction comme murmure du temps qui s’écoule est au cœur de son œuvre. L’artiste restera fidèle à cet univers dans les projets institutionnels qu’il concevra.
- 20 50 Anos de Arte Portuguesa, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 2007), Lis (...)
- 21 Jorge Molder, « Fundação », dans Pedro Cabrita Reis Fundação, catalogue d’exposition (Lisbonne, (...)
27Pedro Cabrita Reis a obtenu une bourse de la Fondation en 1983. Les compte rendus produits par l’artiste manifestent l’importance de la bourse qui lui a permis d’explorer des situations et des installations et de réfléchir sur le rôle qu’elles ont joué dans son travail20. À la Fondation, sa création s’est fondée sur des critères historiques et sur sa relation avec l’institution depuis le début de sa carrière21, relation dont témoignent par excellence l’exposition « Contre la clarté » au Centre d’Art Moderne (en 1994) et la commande du « Monument à Azeredo Perdigão » (inauguré en 1997), en hommage à celui qui fut le Président du Conseil d’Administration de la Fondation Calouste Gulbenkian pendant 37 ans. Sur ce monument, l’artiste proposait déjà l’idée d’une construction en cours, d’un édifice inachevé, sur lequel figurait l’inscription suivante : « Pour une idée en construction permanente, l’idée d’une maison en construction pour toujours. ». Une idée ensuite reprise lors de l’intervention pour le cinquantenaire.
28Fort de sa relation avec le lieu et de l’histoire récente, Cabrita Reis a habité l’espace d’exposition pendant trois mois, accomplissant une routine de travail qui l’a transformé en immense atelier accessible au public, lequel a pu assister au déroulement des travaux avant l’inauguration.
29Cabrita Reis a trouvé une formule ingénieuse pour répondre à la commande : il a utilisé des matériaux issus de montages antérieurs – bois, pierres, verres, structures métalliques – faisant partie des stocks de la Fondation. Ainsi, il a utilisé la mémoire matérielle du lieu, fait référence à l’activité culturelle et d’exposition de la Fondation Calouste Gulbenkian, incorporé l’histoire du passé dans la célébration du présent, reconstruit et refondé la fondation.
- 22 Dieter Schwarz, « Pedro Cabrita Reis : Fundação », dans Pedro Cabrita Reis Fundação, catalogue d (...)
- 23 Dieter Schwarz, op. cit., p. 19.
30L’idée se renforce par l’acte de travailler/refonder en temps réel et en direct. Cabrita Reis a également été fidèle à son processus de travail et aux multiples évocations des ambiances de chantier et des modes de construction. Le texte du catalogue souligne la reconfiguration de l’espace d’exposition : « Cabrita Reis ne s’est pas borné à occuper le rez-de-chaussée avec les éléments de son œuvre, il l’a avant tout libéré de tout ce qui, dans sa structure d’origine, avait été occulté au cours du temps – murs cloisonnés, obstruction de fenêtres, revêtement de la paroi latérale et autres installations qui avaient servi pour le montage d’expositions22. ». Plus loin, le texte souligne la dimension autobiographique du projet : « Nous imaginons cette œuvre comme une autobiographie de l’artiste qui, lors d’une occasion spéciale, a construit dans la ville avec laquelle il partage sa biographie artistique23. ». Cette situation, ici pressentie, atteindrait par la suite une expression limpide dans le projet pour Serralves.
- 24 Alexandre Pomar, « CAM 2007 – re-fundação? », dans Blog de Alexandre Pomar. Pintura, Fotografia, (...)
31La critique a dénigré la proposition de la Fondation Calouste Gulbenkian. Alexandre Pomar (1947), critique connu pour son indépendance et pour l’attention qu’il porte aux circuits d’art et au positionnement des institutions, l’a considérée comme une « apparente imitation du programme des installations de la Turbine Hall à la Tate Modern24 ». Ce qui a motivé ce commentaire – et d’autres de même teneur – a été le fait que toute la collection d’art moderne montrée dans ce lieu avait été retirée.
- 25 Ni le Musée National d’Art Contemporain – Museu do Chiado (à Lisbonne), ni le Musée National d’A (...)
32L’absence d’un lieu où l’art portugais du 20e siècle puisse être vu en permanence, ce handicap de la muséologie portugaise, affecte par voie de conséquence l’histoire de l’art dans ce pays25. L’abandon de ce dessein de la part de la Fondation ne peut être dissocié du choix d’un artiste contemporain pour intervenir dans un espace auparavant occupé par des œuvres de l’art portugais moderne.
- 26 « A “Fundação” em obras. Pedro Cabrita Reis constrói instalação em público », Expresso, 5 août 2 (...)
33Le journal Expresso, un hebdomadaire portugais réputé, estimait que ce choix mettait à nu « le manque d’une exposition de première ampleur au début des commémorations du cinquantenaire de la Fondation Gulbenkian26 ».
- 27 [http://www.artecapital.net/exposicao-58-pedro-cabrita-reis-fundacao], consulté le 30 septembre (...)
34D’autres critiques en ont en revanche proposé une lecture élogieuse : considérant « l’Artiste et la Fondation Calouste Gulbenkian comme entités autoréférentielles dans le panorama artistique portugais », ils justifiaient « l’invitation à l’artiste, qui pouvait se prévaloir d’une légitimité unique pour assumer une telle mission27 ».
35La critique a soit commenté l’installation artistique et ce qu’elle signifiait dans l’œuvre de l’artiste, soit situé son exposition/intervention dans un cadre institutionnel. Cette dernière option implique de questionner l’intervention du point de vue du programme muséologique, de la mission de la Fondation Calouste Gulbenkian et du rôle qu’elle joue dans le domaine de la médiation de l’art portugais moderne et contemporain.
- 28 Philippe Vergne, dans Cabrita A Roving Gaze, catalogue d’exposition (Porto, Museu Nacional de Ar (...)
- 29 Philippe Vergne, op. cit., p. 8.
36L’installation pour la Fondation Serralves, produite treize ans plus tard, a elle aussi été justifiée par la relation historique de l’artiste avec l’institution. Dans la préface du catalogue, le directeur du musée Philippe Vergne affirme qu’elle est « une séquelle conçue par Cabrita pour un projet initié il y a vingt ans, quand il a présenté une exposition individuelle au musée d’Art Contemporain de Serralves récemment inauguré28 ». Il souligne en outre l’importance de ce geste, qui intervient « sur l’exposition en tant que moyen, format, œuvre : une œuvre sous forme d’exposition qui réfute le modèle commémoratif de la rétrospective et ses conventions29 ». Cette référence est ambiguë, car l’artiste n’a pas été invité pour présenter une rétrospective mais un projet qui finit par coïncider avec la célébration du 20e anniversaire du musée et avec la célébration du 20e anniversaire de sa relation avec la Fondation. Une fois que le musée de Serralves a refusé le modèle de l’exposition permanente d’une collection, préférant fonctionner comme un centre d’expositions, l’artiste saurait explorer cette condition institutionnelle et son projet acquiert, malgré lui, un caractère commémoratif.
Pedro Cabrita Reis, A Roving Gaze, 2019. Vues de l’installation au Musée de Serralves.

© Cabrita studio / João Ferrand.
Pedro Cabrita Reis, A Roving Gaze, 2019. Vues de l’installation au Musée de Serralves.

© Cabrita studio / João Ferrand.
Pedro Cabrita Reis, A Roving Gaze, 2019. Vues de l’installation au Musée de Serralves.

© Cabrita studio / João Ferrand.
- 30 Nuno Crespo, « Entrevista Pedro Cabrita Reis : “os artistas estão condenados a olhar de forma in (...)
37L’artiste a conçu une série de cent panneaux en MDF reposant sur une structure en aluminium, avec une illumination artificielle. Chaque panneau surgit comme un assemblage dont le montage apparemment chaotique recèle en fait une organisation bien agencée pouvant évoquer un tableau. On y reconnaît les matériaux les plus disparates : papiers, métaux, bois, éléments textiles, plastiques, photographies, dessins, manuscrits, documents imprimés, objets les plus divers, fragments peints, tout ce qui s’accumule au cours d’une vie et d’un parcours artistique. Le circuit est comme un labyrinthe. Les panneaux occupent la majeure partie de l’espace d’exposition du musée et requièrent une déambulation et un regard inquiet, consacré par le titre de l’installation. L’auteur est celui qui indique le chemin : « Nous parcourons le monde et nous observons, et tout ce qui se présente sur ce chemin est un constat plus ou moins éloquent d’une reconnaissance à laquelle est parfois alloué un degré de surprise et de nouveauté. Celles-ci sont des éléments inespérés qui nous montrent la possibilité infinie de la curiosité du regard30. ».
- 31 « Cabrita A Roving Gaze – Um olhar inquieto » [https://www.serralves.pt/en/ciclo-serralves/1910- (...)
38Refusant la création d’objets comme point d’arrivée d’un processus vertical, l’artiste a opté pour une proposition horizontale où les objets, les matériaux et les interventions écrites ou peintes surgissent sur un plan identique. Les processus de création, ancrés dans le contexte familier, dans les relations d’amitié, dans l’ambiance de l’atelier, sont ici stimulés par l’ironie et par la critique sociale et culturelle. C’est une installation monumentale difficile à appréhender en raison de la multiplicité des associations qui s’établissent entre les panneaux. Elle reproduit les carnets privés de l’artiste, comme si chaque panneau était une page d’annotations. L’installation, ignorant délibérément la spatialité de la succession de salles, instaure un nouveau circuit à l’intérieur du musée. Voici du reste comment l’institution a présenté le projet : « L’exposition traduit de façon exemplaire la relation entre la pratique artistique de Cabrita Reis et sa réflexion sur la fonction des musées à travers la création d’une œuvre unique à grande échelle », orientée par « un fort penchant autobiographique qui parcourt tout l’espace de l’exposition sans aucune préoccupation d’ordre chronologique31. ».
- 32 Sérgio C. Andrade, « Cabrita Reis regressa a Serralves com a instalação total », Público, 20 nov (...)
- 33 Nuno Crespo, « Cabrita numa dimensão caótica, poética e existencial », Público, 29 novembre 2019 (...)
- 34 Le journal de référence Público, qui comprend une forte information culturelle et artistique app (...)
39Les commentaires sur l’installation ont souligné son contenu autoréférentiel et autobiographique en recourant à une terminologie grandiose : « installation totale, exposition-installation qui fait l’histoire de sa vie32 » ; « dimension poétique, chaotique et existentielle33 ». Une partie de ce qui a été écrit sur l’exposition suppose un caractère de chronique institutionnelle plutôt que de critique34.
Camouflages
- 35 Pedro Cabrita Reis, « Museu » catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 1992), L (...)
40En 1991, Pedro Cabrita Reis écrivait : « Le musée est un vertige qui se nourrit d’une intention : la mémoire. Quelle étrange attraction mène à l’acte de rassembler dans une maison des images de ce que nous croyons être notre essence ? Quelle fascination permet de nous forger une certaine nature de nous-mêmes pour que ceux qui viendront ensuite en aient mémoire ? [Musée] Il se veut un travail sur le désir de rassembler, de sauvegarder et de préserver les œuvres que certains d’entre nous ont faites, font ou feront35. ». Un énoncé qu’il matérialise en 2006 et en 2019.
41Dans la proposition pour Gulbenkian, l’artiste a revisité le parcours de la fondation par l’emploi de matériaux résultants de l’activité culturelle développée, récupérant aussi son rapport passé avec le musée. À Serralves, l’artiste revisite son parcours, qui se confond – en raison des circonstances susmentionnées – avec le parcours du musée lui-même. Pour l’artiste, il a été l’occasion de consolider et de confirmer Serralves comme centre d’expositions temporaires et d’examiner sa carrière après quelques décennies. La notion d’édification est de nouveau convoquée, mais cette fois, il ne s’agit pas tout simplement d’un recours au vocabulaire de la construction, base de son langage, ni d’un agencement du lieu de l’exposition, mais d’une construction de son identité même. Le travail sur l’archéologie institutionnelle et la mémoire personnelle atteint un dernier stade, celui de la redéfinition de l’identité de l’artiste qui, à partir de ce moment, annonce l’abrègement son nom de Pedro Cabrita Reis en Cabrita. Il ébauche un geste théâtral qui profite de la scène institutionnelle.
- 36 Pour un aperçu, consulter : Alexander Alberro et Blake Stimson, Institutional critique. An Antho (...)
42Dans les deux cas, le musée a utilisé l’artiste, son prestige, sa présence dans la sphère publique, son passé et sa relation avec l’institution dans une intention commémorative. De son côté, l’artiste
a utilisé le musée pour servir sa réflexion autobiographique. Le résultat est un musée camouflé en artiste et un artiste camouflé en musée. Cette instrumentalisation évoque à la fois la catégorie « d’artiste du régime » au service des politiques de représentation institutionnelle et la version contemporaine de la commande de célébration. Pourrons-nous considérer qu’il existe de la provocation et de l’ironie au geste de Cabrita Reis comme une forme de critique institutionnelle ? La réponse réside dans le caractère provocateur de la question et ne peut être que négative. La participation des artistes dans le cadre des institutions évoque toujours la critique institutionnelle36, cependant, dans les deux cas, il n’y a pas d’intention critique, mais l’identification complète de l’artiste avec l’institution. Celle-ci est sa demeure, son visage. Il ne s’agit pas simplement d’institutionnaliser la critique, mais d’incarner, au sein de l’art, l’institution.
- 37 Elisabeth Mansfield, Art History and its Institutions: Foundations of a Discipline, Londres et N (...)
43Elisabeth Mansfield affirme que « les institutions véhiculent le mythe car elles assurent la stabilité, l’histoire et l’identité communautaire37 ». Comme si l’artiste incarnait les fonctions de l’institution, combinant dans son geste histoire et mythologie, créant une mémoire et une histoire pour les deux institutions, une identité qui se confond avec son identité.
Notes
1 Museums of the World 2019, Berlin/Boston, De Gruyter Saur, 2019.
2 « Musées », dans Unesco [https://fr.unesco.org/themes/mus%C3%A9es], consulté le 23 septembre 2020.
3 La rhétorique et la méthodologie des industries culturelles et créatives intègrent les arts et les institutions artistiques au secteur culturel en tant que producteurs de « biens et services non reproductibles destinés à être “consommés” sur place (un concert, une foire d’art, une exposition) », The Economy of Culture in Europe, Study prepared for the European Commission (Directorate-General for Education and Culture), Kea European Affairs, 2006, p. 2.
4 Le nombre indiqué se borne à signaler les lieux les plus visibles et à souligner cette phase d’expansion institutionnelle au Portugal. Cependant, certains échecs ont eu lieu, en particulier avec des collections impliquées dans des processus juridiques et avec des institutions dont les accords officiels n’ont pas été renouvelés. Ce panorama est donc caractérisé par une fragilité et une discontinuité, ainsi que la relation de l’art avec le domaine et financier.
5 Où l’extra-institutionnel est entendu comme processus de transition entre un domaine non-institutionnel et sa légitimation institutionnelle. Voir Lauren Rosati, Mary Ann Staniszewski, Alternative Histories: New York Art Spaces, 1960 to 2010. Cambridge, Massachussetts, The MIT Press, 2012. La dynamique, les contradictions et les dérives de l’art, de la critique et de l’institution, accompagnées du projet Transform (2005-2008), ont abouti à un livre qu’il convient de mentionner dans ce contexte : Gerald Raunig, Gene Ray (sld), Art and Contemporary Critical Practice. Reinventing Institutional Critique, Londres, MayFlyBooks, 2009.
6 Ce mouvement au Portugal a fait l’objet d’expositions et d’études, notamment : Fátima Lambert, Laura Castro, + de 20 grupos e episódios no Porto do séc. XX, catalogue d’exposition (Porto, Galeria do Palácio, 2001), Porto, Câmara Municipal do Porto, 2001 ; Sandra Vieira Jürgens, Instalações Provisórias : Independência, autonomia, alternativa e informalidade, Artistas e Exposições em Portugal no século XX, Lisbonne, Documenta, 2016.
7 Nina Möntmann, « New Institutionalism revisited », dans Jerlyn Marie Jareunpoon-Philips et al. (sld) Giant Step Reflections & Essays on Institutional Critique, Bari, vessel art projects, 2012/13, p. 106.
8 Claire Doherty, « The institution is dead! Long live the institution! Contemporary Art and New Institutionalism », Engage Journal, n° 15, 2004, p. 1-68.
9 À partir de 2016, la Fondation Calouste Gulbenkian a opté pour une politique intégrée du Musée Calouste Gulbenkian et du Centre d’Art Moderne, visant à divulguer la communication d’un musée avec deux collections : la Collection du Fondateur et la Collection Moderne. Le Centre d’Art Moderne est actuellement fermé au public, sa réouverture ainsi que la définition de nouvelles lignes de programmation étant prévues pour 2021 ou 2022.
10 Centro de Arte Moderna José de Azeredo Perdigão. Roteiro da Colecção, Lisbonne, Fundação Calouste Gulbenkian, 2004.
11 50 Anos de Arte Portuguesa, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 2007), Lisbonne, Fundação Calouste Gulbenkian, 2007.
12 Raquel Henriques da Silva, « Apresentação », dans Anos 70 Atravessar Fronteiras, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 2009), Lisbonne, Fundação Calouste Gulbenkian, 2009, p. 11.
13 Lígia Afonso, Dias de Saída. O SNI e a Bienal de São Paulo na génese da internacionalização contemporânea da arte portuguesa (1951-1973), thèse de doctorat, Universidade Nova de Lisboa, 2018.
14 Sur les aspects liés à la notion d’institution comme origine, constitution et établissement d’un nouvel ordre, voir Raymond Williams, A Vocabulary for Culture and Society, Londres, Fontana Press, 1983, p. 168-169.
15 Circa 1968, catalogue d’exposition (Porto, Museu de Arte Contemporânea de Serralves, 1999), Porto, Fundação de Serralves, 1999.
16 Leonor de Oliveira, Museu de Arte Contemporânea de Serralves : Os Antecedentes, 1974-1989. Lisbonne, INCM, 2013.
17 Eduarda Neves, « Duas ou três coisas que sei sobre ele. O museu de arte contemporânea de Serralves », RE.VIS.TA. arte/reflexão/crítica, n° 5, juillet, 2018, p. 34.
18 Ces aspects font partie de la définition de l’institution en tant que productiond’un « complexe de positions, de rôles, de normes et de valeurs propres à des types particuliers de structures sociales et organisant des modèles d’activité humaine relativement stables […] dans le maintien de structures sociétales viables dans un environnement donné ». Jonathan Turner, The Institutional Order, New York, Longman, 1997, p. 6.
19 Ses œuvres font partie des collections du Kunst Museum Winterthur, du Museu de Serralves, de la Galleria Civica d’Arte Moderna e Contemporanea, du Museu Calouste Gulbenkian, du CGACde Saint-Jacques de Compostelle, du Frac Bourgogne, du Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur, de la Kunsthalle de Berne, du Middelheimmuseum d’Anvers, du SMAK de Gand.
20 50 Anos de Arte Portuguesa, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 2007), Lisbonne, Fundação Calouste Gulbenkian, 2007, p. 146-147.
21 Jorge Molder, « Fundação », dans Pedro Cabrita Reis Fundação, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna – Fundação Calouste Gulbenkian, 2006), Lisbonne, Calouste Gulbenkian, 2006, p. 8.
22 Dieter Schwarz, « Pedro Cabrita Reis : Fundação », dans Pedro Cabrita Reis Fundação, catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna – Fundação Calouste Gulbenkian, 2006), Lisbonne, Calouste Gulbenkian, 2006, p. 15.
23 Dieter Schwarz, op. cit., p. 19.
24 Alexandre Pomar, « CAM 2007 – re-fundação? », dans Blog de Alexandre Pomar. Pintura, Fotografia, crítica, política cultural, etc., [https://alexandrepomar.typepad.com/alexandre_pomar/2007/04/29_abril.html], consulté le 30 s
25 Ni le Musée National d’Art Contemporain – Museu do Chiado (à Lisbonne), ni le Musée National d’Art Contemporain de Serralves (à Porto) n’exposent en permanence des panoramas cohérents de l’art portugais du 20e siècle. D’autres collections privées, présentées dans leurs espaces avec le soutien des mairies, ont tenté de combler cette lacune sans pour autant s’assumer en tant qu’institutions chargées de cette mission. Au cours de la dernière décennie, nombre de tentatives gouvernementales ont eu pour finalité de montrer une importante collection d’art moderne et contemporain portugais, formée depuis 1976 par l’État, qui est restée en partie en dépôt à la Fondation Serralves. Une fraction de la collection a été montrée à Lisbonne dans le cadre d’une exposition temporaire au Museu do Chiado en 2015. La polémique suscitée par la gestion de cette collection n’a pas permis de pallier l’absence d’une exposition permanente d’art du 20e siècle au Portugal.
26 « A “Fundação” em obras. Pedro Cabrita Reis constrói instalação em público », Expresso, 5 août 2007.
27 [http://www.artecapital.net/exposicao-58-pedro-cabrita-reis-fundacao], consulté le 30 septembre 2020.
28 Philippe Vergne, dans Cabrita A Roving Gaze, catalogue d’exposition (Porto, Museu Nacional de Arte Contemporânea de Serralves, 2019-2020), Porto, Fundação de Serralves, 2019, p. 8-9. L’auteur se réfère à l’exposition de l’artiste intitulée « Da Luz e do Espaço », présentée en 1999 au musée.
29 Philippe Vergne, op. cit., p. 8.
30 Nuno Crespo, « Entrevista Pedro Cabrita Reis : “os artistas estão condenados a olhar de forma inquieta” », Público, 29 novembre 2019.
31 « Cabrita A Roving Gaze – Um olhar inquieto » [https://www.serralves.pt/en/ciclo-serralves/1910-cabrita-reis---a-roving-gaze/], consulté le 15 septembre 2020.
32 Sérgio C. Andrade, « Cabrita Reis regressa a Serralves com a instalação total », Público, 20 novembre, 2019.
33 Nuno Crespo, « Cabrita numa dimensão caótica, poética e existencial », Público, 29 novembre 2019.
34 Le journal de référence Público, qui comprend une forte information culturelle et artistique appartient à une entreprise qui est l’un des grands sponsors du musée, son « mécène institutionnel ». Pendant les visites de l’exposition avec des étudiants et des conversations avec des membres du personnel on ressentit un certain malaise en raison de l’occupation presque totale du musée par un artiste entendu comme un porte-parole institutionnel, ce qui correspond à une sorte de réception critique interne qui méritait être développé dans un autre contexte.
35 Pedro Cabrita Reis, « Museu » catalogue d’exposition (Lisbonne, Centro de Arte Moderna, 1992), Lisbonne, Fundação Calouste Gulbenkian, 1992.
36 Pour un aperçu, consulter : Alexander Alberro et Blake Stimson, Institutional critique. An Anthology of Artist’s Writings, Cambridge, MA, The MIT Press, 2009.
37 Elisabeth Mansfield, Art History and its Institutions: Foundations of a Discipline, Londres et New York, Routledge, 2002, p. 2.
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Titre | Pedro Cabrita Reis, Fundação, 2006. Vues de l’installation au Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian. |
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Titre | Pedro Cabrita Reis, Fundação, 2006. Vues de l’installation au Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian. |
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Titre | Pedro Cabrita Reis, Fundação, 2006. Vues de l’installation au Centre d’Art Moderne de la Fondation Calouste Gulbenkian. |
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Titre | Pedro Cabrita Reis, A Roving Gaze, 2019. Vues de l’installation au Musée de Serralves. |
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Titre | Pedro Cabrita Reis, A Roving Gaze, 2019. Vues de l’installation au Musée de Serralves. |
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Titre | Pedro Cabrita Reis, A Roving Gaze, 2019. Vues de l’installation au Musée de Serralves. |
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Pour citer cet article
Référence papier
Laura Castro, « Camouflages – Musées et artistes contemporains », Marges, 33 | 2021, 43-58.
Référence électronique
Laura Castro, « Camouflages – Musées et artistes contemporains », Marges [En ligne], 33 | 2021, mis en ligne le 02 janvier 2024, consulté le 23 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/marges/2659 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/marges.2659
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