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Thématique : art contemporain et institutions

Introduction : art contemporain et institutions

Jérôme Glicenstein
p. 5-8

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Texte intégral

  • 1 «   Artists’ coalition announces “strike” action against MoMA », Artforum, 23 mars 2021, en [htt (...)
  • 2 Le contenu complet des revendications de la coalition est accessible en ligne [https:// www.stri (...)

1Le 23 mars 2021, la revue Artforum publie sur son site l’annonce suivante : « Une nouvelle coalition comprenant des collectifs d’artistes, des militants et d’anciens employés du Musée d’art moderne de New York a annoncé aujourd’hui une série d’actions qui dureront dix semaines pour protester contre ce qu’ils considèrent comme “l’élitisme, la hiérarchie, l’inégalité, la précarité, la flexibilisation, la discrimination contre les Noirs et la misogynie de l’institution1. ». Le but est de « “démanteler” le musée afin que “quelque chose d’autre puisse émerger, quelque chose sous le contrôle des travailleurs, des communautés et des artistes plutôt que des milliardaires”. ». Parmi les participants à la coalition figurent des membres d’une douzaine de groupes, dont MoMA Divest, Forensic Architecture, Decolonize This Place, Comité Boricua En La Diáspora, Take Back the Bronx et Curators and Educators for Decolonization2.

2Cette annonce n’est pas exceptionnelle : depuis sa fondation en 1929, le MoMA a même connu un grand nombre de mouvements similaires. Dans les années 1940, des manifestations sont organisées par des artistes américains qui se considèrent comme insuffisamment représentés dans la programmation du musée. En 1968, d’autres artistes protestent contre l’exposition « Dada, Surrealism and their Heritage » vue comme une trahison et une récupération des avant-gardes. L’année suivante est le début de l’Art Workers’ Coalition, à la suite d’un conflit opposant l’artiste grec Takis à la direction du musée. Ce conflit anticipe sur la formation de groupes d’artistes noirs ou femmes qui protestent contre leur sous-représentation dans les collections ; ce qui aboutit, en juin 1970, à la « New York Artists Strike Against Racism, Sexism, Repression and War ». Les mouvements de protestation contre le MoMA et d’autres musées d’art moderne et contemporain se multiplient tout au long des années 1970, avec des échos réguliers dans d’autres villes et pays jusqu’à nos jours.

Création et/ou contestation des institutions académiques

  • 3 Jean Dubuffet, Asphyxiante culture, Paris, Minuit, 1968.
  • 4 Robert Smithson, «  Cultural Confinement  », Artforum, octobre 1972, p. 39.
  • 5 Parmi les nombreux écrits de Daniel Buren sur le sujet, voir en particulier Daniel Buren, «  Fon (...)

3La contestation des institutions artistiques est à la fois ancienne et nourrie de rancœurs multiples, qui ont parfois évolué au cours du temps, ce qui fait qu’il est parfois difficile de sortir d’une vision assez simpliste de la question. Les institutions ont souvent été vues, assez schématiquement, comme les relais d’un pouvoir qui enferme les artistes et leurs œuvres, tout en les faisant participer à un système qu’ils rejettent. C’est une opinion fameusement exprimée par Jean Dubuffet dans son pamphlet de 1968, Asphyxiante culture3, mais aussi, à la même époque, par des artistes plus jeunes, tels que Robert Smithson4 ou Daniel Buren5. Pour ces personnes, la relation des artistes aux institutions est nécessairement faite de compromissions, de récupération et d’instrumentalisations en tout genre.

  • 6 Sur le rôle joué par les premières académies dans l’autonomisation de la pratique artistique, vo (...)

4De telles prises de position, très tranchées, renvoient en creux à un idéal d’autonomie de la création, au nom d’une liberté d’expression qui est idéalement défendue par la puissance publique. Tout le problème est alors d’accepter que des procédures légales, défendues par des institutions, soient établies afin de protéger les artistes de l’emprise d’autres institutions jugées néfastes. Ce genre d’ambivalence est ancien ; il est même présent dès la fondation des premières académies, au 16e siècle. Celles-ci ont eu pour but d’autonomiser les artistes vis-à-vis de leurs commanditaires, tout en faisant reconnaître leurs pratiques, jusque-là considérées comme artisanales, au rang d’arts libéraux (ce qui revenait à leur accorder une légitimité intellectuelle6). C’est la réalisation progressive de cet objectif qui a conduit à concevoir les académies comme à la fois des institutions de formation, de construction de discours sur l’art et d’élaboration de normes. Jusqu’au 19e siècle, la plupart des artistes les considèrent comme le seul cadre susceptible de garantir la légitimité de leur pratique et de ce fait, même lorsqu’ils ne sont pas en accord avec leurs positions, ils se conforment à leurs attentes, s’attachant au circuit institutionnel qu’elles chapeautent. Après avoir été formés à l’École des Beaux-Arts, ils séjournent à l’Académie de France à Rome, exposent au Salon de Paris où ils reçoivent des prix et des médailles, sont parfois achetés par l’État pour le Musée des artistes vivants (tout en espérant que leurs œuvres se retrouvent ultérieurement au Louvre), puis ils cherchent à être élus à l’Institut et à devenir professeurs à l’École des Beaux-Arts.

  • 7 Ces idées se retrouvent chez différents conservateurs de musées progressistes, dès les années 19 (...)

5Ce système n’a jamais fait l’unanimité et il entre en crise au moment où les modèles hérités du passé commencent à être contestés, au nom d’une expression personnelle, qui n’aurait pas besoin d’être encadrée. L’exigence de conformité à des modèles réputés universels laisse alors la place à la valorisation de la spontanéité et de l’autonomie de création, sans autres références que celles que les artistes se donnent à eux-mêmes. Les musées ne sont plus vus comme des conservatoires de valeurs éternelles, mais comme des lieux d’enfermement et de décontextualisation morbide. Les écoles ne sont plus considérées comme des lieux d’émancipation, mais comme des instances de reproduction de modèles figés où toute imagination créatrice est proscrite. À la fin du 19e et au début du 20e siècle, une nouvelle phase débute ainsi, où les artistes cherchent des alternatives aux institutions académiques. Il est désormais entendu que dans le monde moderne il ne devrait plus y avoir d’enseignement normatif : l’artiste se doit de puiser son inspiration en lui-même, sans passer par des modèles standardisés. Des ateliers libres et des associations d’artistes indépendants se montent afin de protéger de telles démarches, au moment-même où la naissance du marché de l’art permet de faire la promotion de l’originalité et de la singularité du geste artistique. Le musée est, quant à lui, repensé comme un lieu en mouvement permanent : une « centrale électrique » ou un laboratoire de la création émergente7.

  • 8 Sur cette question précise, voir Nikolaï Taraboukine, Le Dernier tableau. Du chevalet à la machi (...)

6Pourtant, au moment où cette nouvelle phase d’autonomisation de la création peut sembler acquise, où de nouvelles institutions la garantissent et où triomphe l’idée d’un art pour l’art – d’un art pur qui ne se référerait qu’à lui-même – un certain nombre d’artistes choisissent de sortir de ce domaine protégé, afin de se mettre au service d’idéaux plus vastes. Le mouvement des avant-gardes historiques, des Futuristes aux Dadaïstes et aux Constructivistes, peut de fait se comprendre comme un renoncement volontaire à l’autonomie de l’art moderne, au nom d’un engagement réputé direct et authentique, qui participerait à l’avènement d’une société plus juste, où l’art ne serait pas réservé à quelques-uns, mais serait pratiqué par tous, réenchantant le quotidien. La question institutionnelle ne disparaît pas pour autant, puisqu’elle redéfinit le cadre de l’activité artistique, comme en témoigne exemplairement le passage du Constructivisme au Productivisme en URSS au cours des années 19208.

Néo-avant-gardes et critique institutionnelle

  • 9 Peter Bürger, Theory of the Avant-Garde (1974), trad. M. Shaw, Minneapolis, Minnesota University (...)
  • 10 Sur la « légende » de la critique institutionnelle, voir Nicolas Heimendinger, « Le grand récit d (...)

7La relation de la création artistique aux institutions, à partir de l’invention des académies, pourrait se résumer à une opposition simple. Pour les uns, la défense de l’autonomie des artistes conduit à réclamer la création d’institutions toujours plus nombreuses et toujours plus adaptées à l’évolution des pratiques. Pour les autres, la volonté d’ancrer la création au cœur de la cité s’accompagne d’un refus de tout art qui ne serait que « pour l’art », ce qui implique éventuellement d’abandonner le monde de l’art. Ceci étant dit, même dans ce deuxième cas, la question institutionnelle finit par réapparaître, ne serait-ce que de manière rétrospective, lorsque « la néo-avant-garde institutionnalise l’avant-garde comme art9 », pour reprendre les mots de Peter Bürger. La fascination néo-avant-gardiste pour la force de résistance des avant-gardes s’incarne alors exemplairement dans la notion de « critique institutionnelle », c’est-à-dire dans des situations où les artistes collaborent avec des institutions, tout en faisant mine de montrer qu’ils n’en sont pas dupes10.

  • 11 Paul Ardenne, La Création contemporaine entre structures et système, Rouen, éd. de l’école régio (...)

8Les pratiques qui sont alors mises en avant, qualifiées de « post-studio », n’existent qu’en relation à un contexte architectural, urbanistique, social, politique, économique, etc. Les artistes concernés refusent le postulat d’une neutralité des espaces d’exposition, tout autant que la dépendance envers le marché qu’impliquerait la production d’objets d’art au sens traditionnel. Ce refus de l’autoréférentialité (et de la marchandisation) de l’œuvre conduit alors à considérer l’activité artistique comme une sorte de production de gestes en réponse à des contextes précis. Tout le problème vient du fait que, comme ils n’ont pas d’objets à vendre, les artistes post-studio sont le plus souvent amenés à répondre à des demandes institutionnelles, dans le cadre d’expositions et de commandes publiques. Comme le remarque Paul Ardenne, dès le milieu des années 1990 : « L’in situ, en soi, réalise la collaboration parfaite entre l’artiste et l’institution : l’institution fournit cadre et production, l’artiste prend symboliquement possession du lieu et en use à sa guise11. ».

  • 12 James Putnam, Le Musée à l’œuvre. Le musée comme médium dans l’art contemporain, trad. C-M. Dieb (...)
  • 13 Lisa G. Corrin, «  Mining the Museum. Artists Look at Museums, Museums Look at Themselves », dans (...)

9C’est notamment ce qui le fait intervenir, sous forme de « carte blanche », au sein des musées, y compris des musées non artistiques ou d’art ancien. Le conservateur James Putnam explique ainsi qu’« il s’agit d’un système d’échange, les musées offrant à des artistes contemporains des alternatives stimulantes au “cube blanc” tandis que les artistes proposent aux musées un moyen de redonner vie à leurs collections et d’attirer de nouveaux publics12 ». Cela donne lieu à la série des « Artists’ Choices » au MoMA (depuis 1987), mais aussi aux célèbres présentations organisées par Joseph Kosuth au Brooklyn Museum en 1991 ou par Fred Wilson à la Maryland Historical Society en 1992. Ces interventions, même si elles apparaissent à l’époque comme profondément critiques, ne sont pas mal reçues par les musées. Au fond, si les artistes sont invités, c’est afin d’accomplir un travail que personne au cœur des institutions ne s’autorise. La commissaire d’exposition Lisa Corrin – qui a elle-même invité Fred Wilson et Hans Haacke à intervenir dans des musées – évoque à ce sujet l’apparition d’un nouveau genre, le « muséisme », sur lequel elle ironise, remarquant qu’il fera bientôt partie des mouvances dont parlent les ouvrages d’histoire de l’art destinés au grand public13.

  • 14 Paul Ardenne, op. cit., p. 57.
  • 15 Stefan Germer, «  Parmi les vautours. L’art contextuel dans son contexte  » (1995), trad. C. Jou (...)

10Peut-être aboutit-on aussi à ce moment-là à l’apparition (et à la promotion) de ce que Paul Ardenne a appelé « l’artiste d’institution » : quelqu’un qui est un « élément du personnel de l’institution14 ». L’historien de l’art Stefan Germer voit pour sa part dans la multiplication des démarches « contextualistes », « une réédition actualisée de l’ancien art de commande qui flattait les mécènes15 ». Selon lui, toutes les formes d’art in situ, site specific ou contextualistes, en cherchant à abandonner l’idée d’une autonomie de l’art, ont finalement eu pour conséquence de mettre l’artiste au service d’une cause sociale ou politique, mais aussi de le rendre dépendant de ses commanditaires institutionnels, pour lesquels il en est venu à représenter une nouvelle forme de prestataire de services. Le succès de la critique institutionnelle place en tout cas les artistes face à une sorte de double-bind: s’ils critiquent l’institution qui les invite, cela veut dire qu’ils font ce qu’on leur dit de faire, qu’ils lui obéissent et s’ils ne la critiquent pas, ils font preuve d’impuissance, acceptant tacitement son pouvoir.

  • 16 Michael Asher et Stephan Pascher, «  The museum as muse—Asher reflects  », dans Alexander Alberr (...)
  • 17 James Putnam, Le Musée à l’œuvre, op. cit., p. 19.

11Le meilleur exemple de ces contradictions a lieu lors de la participation de la plupart des artistes communément associés à la critique institutionnelle à l’exposition « The Museum as Muse » au MoMA en 1999. Cinq d’entre eux – Michael Asher, Daniel Buren, Mark Dion, Louise Lawler et Fred Wilson – y bénéficient d’une commande spécifique de la part du musée16. Michael Asher, qui y présente la liste complète des œuvres déclassées et revendues par le MoMA au cours de son histoire, s’attire les foudres de certains conservateurs17. Simultanément, il bénéficie d’une commande pour réaliser son intervention. Que faut-il en penser ? Comment ne pas voir que l’idéal d’autonomie de l’artiste ne pèse pas très lourd face aux réseaux institutionnels : les relations complexes entre critiques, musées, marché, collectionneurs et publics excèdent visiblement les simples enjeux artistiques et contribuent à mettre en doute toute critique. En somme, s’il y a bien une réussite de la critique institutionnelle, c’est d’avoir montré, par la négative, que la création artistique a bien du mal à se dégager de toute emprise institutionnelle.

Repenser la fonction sociale des institutions : le New Institutionalism

12Est-ce un hasard si l’essor de la critique institutionnelle accompagne un mouvement plus général de développement des institutions ? La création de centres d’art, de résidences d’artistes, de friches culturelles, de lieux indépendants, etc. peut ainsi être vue comme une
réponse aux critiques formulées vis-à-vis des institutions, en cherchant à satisfaire de nouvelles demandes et à accueillir des pratiques innovantes. Les nouveaux lieux encouragent de fait le développement des formes artistiques qui ne peuvent pas être intégrées dans les institutions traditionnelles : installations, art vidéo, performance, nouveaux médias…

  • 18 Claire Bishop, Radical Museology or What’s ‘Contemporary’ in Museums of Contemporary Art ?, Lond (...)

13Ces nouvelles institutions n’apparaissent pas dans l’ignorance des expériences de la critique institutionnelle et elles cherchent au contraire, à en tenir compte ; non pas en mettant les artistes au centre de leur programmation ou en cherchant à accueillir des interventions spécifiques aussi pertinentes que possible, mais en s’interrogeant sur le rôle qu’elles peuvent jouer au sein de la société. C’est dans ce contexte qu’apparaît l’idée de « nouvel institutionnalisme » (new institutionalism), à la fin des années 1990. Dans leur volonté de changer de point de vue, d’encourager les pratiques les plus hétérogènes, tout en étant en prise avec les transformations sociales, certaines de ces nouvelles institutions s’appuient sur des mouvances militantes, largement extérieures au monde de l’art. Elles cherchent ainsi à combler un manque de lieux dédiés aux réflexions sur les transformations écologiques, sur la mondialisation, sur le postcolonialisme, sur la place des femmes ou de telle ou telle minorité ethnique au sein de la société. Elles présentent aussi à l’occasion quelques œuvres d’art, sous la forme de commandes spécifiques – en suivant la leçon des formes contextuelles recommandées par la critique institutionnelle –, ce qui permet de suggérer que l’art contemporain peut être apte à réagir aux sujets d’actualité. Cela donne lieu à des présentations autour du passé colonial ou du franquisme au Museo Nacional Reina Sofia de Madrid ; autour de l’islamophobie et de la faillite de la social-démocratie au Van Abbemuseum d’Eindhoven ; autour de la Guerre des Balkans et de la fin du socialisme au Musée de Ljubljana, etc18.

  • 19 Chantal Mouffe, «  Institution as Sites of Agonistic Intervention  », dans Pascal Gielen, (sld), (...)
  • 20 Gerald Raunig, «  Flatness Rules. Instituent Practices and Institutions of the Common in a Flat (...)

14La réflexion du nouvel institutionnalisme sur les institutions en vient néanmoins à s’éloigner fortement de celle des partisans de la critique institutionnelle, conduisant davantage à une réflexion éthique. C’est dans cette perspective qu’il faut lire les propos de Chantal Mouffe, lorsqu’elle en appelle à la création de nouvelles institutions permettant d’incarner une forme de résistance face à la pensée dominante, « au moment où le monde de l’art est presque entièrement colonisé par les marchés ». Il s’agit, pour elle, de penser les institutions en tant que « sites d’opposition à l’hégémonie du marché néolibéral19 ». Ce genre de réflexion, commun à la plupart des partisans du new institutionalism, conduit à la dénonciation de la crise écologique, à des discussions sur les conséquences de la mondialisation, sur les migrants, sur l’intersectionnalité, etc. Certains, comme le philosophe
Gerald Raunig, expliquent aussi que la nouvelle institution doit être une institution du « commun » qui aura « la responsabilité d’enquêter sur ses implications coloniales et néocoloniales, afin de les déconstruire et d’essayer une pratique de décolonisation20 ».

  • 21 Claire Bishop, Radical Museology…, op. cit., p. 6.

15Dans de telles dynamiques, les artistes peuvent certes contribuer à faire émerger un problème, mais ils ne sont plus considérés comme le seul moteur permettant de conduire à des changements. De toute façon, le point de vue du nouvel institutionnalisme n’est pas de mettre en avant des individus, mais des groupes de travail, des collectifs ayant des intervenants hétérogènes et le fait d’aborder les enjeux au sein de discussions ouvertes avec les populations locales. Si le nouvel institutionnalisme met en avant des collectifs, c’est qu’il a le désir de « représenter les intérêts et histoires des groupes sociaux qui sont (ou ont été) marginalisés, mis de côté et opprimés21 ».

  • 22 Le groupe ruangrupa a été choisi pour organiser la 15e documenta (2022).
  • 23 Ade Darmawan [Ruangrupa], «  If you don’t need to, you don’t have to  », dans Biljana Ciric et S (...)

16Le groupe indonésien ruangrupa22 est emblématique de cette nouvelle dynamique. Dans un texte de 2012, l’un de ses membres, Ade Darmawan, évoque ce que devrait être une institution plus juste : « elle devrait avoir pour objectif de devenir un espace qui offre une plateforme continue pour des idées critiques et où des idées artistiques peuvent survivre et devenir durables, atteignant un public plus large et construisant des initiatives ou des communautés qui ont la même vision. L’espace devrait être apte à accueillir les expériences de personnes qui viennent d’origines sociales, économiques et culturelles variées et sont amenées à créer de nouveaux comportements et communautés23 ». Ce genre d’institution est à la fois un refuge, un lieu de rassemblement et de réflexion au sein de la Cité. Toute la difficulté évidemment est de savoir qui peut y être autorisé à s’exprimer au nom de telle ou telle cause, qui peut en être le porte-parole. Traditionnellement c’est un rôle qui a souvent été attribué aux artistes, mais ce n’est plus forcément d’actualité.

  • 24 Nina Möntmann, «  Art and its institutions  », dans Id. (sld), Art and its Institutions. Current (...)

17Que devient alors la question de l’autonomie de la création ? Peut-elle s’articuler à ces programmes de réinvention des institutions ? Les artistes doivent-ils être à leur service ou doivent-ils résister à des mots d’ordre qu’ils n’ont pas choisis ? De telles questions peuvent sembler dérisoires par rapport aux problèmes du monde et d’ailleurs le fait de soutenir l’existence d’institutions faisant la promotion de l’autonomie de l’art ou de l’autoréférentialité des œuvres a de quoi choquer certains. Nina Möntmann exprime, par exemple, l’idée selon laquelle ces institutions devraient abandonner leurs missions traditionnelles pour s’occuper de causes plus justes : « les fonds publics devraient être transférés aux groupes auto-organisés dédiés aux droits sociaux des travailleurs et des minorités et à la repolitisation des relations sociales24 ».

  • 25 [https://www.facebook.com/OccupyMuseums/] (page créée le 19 octobre 2011), consulté le 24 mars 2 (...)
  • 26 [https://www.facebook.com/LiberonsleLouvre/] (page créée le 25 février 2017), consulté le 24 mar (...)
  • 27 [https://decolonizethisplace.org/] consulté le 4 mai 2021.
  • 28 Nicolas Gomont, «  Les Sackler, l’embarrassant mécène du Louvre  », La Croix, 18 juillet 2019, e (...)
  • 29 Alex Greenberger, «  The Whitney Museum and Warren B. Kanders : a Timeline of the Controversy  » (...)
  • 30 Roxana Azimi, «  Total, BP, Sackler, des mécènes encombrants  », Le Monde, 14 juin 2019, en lign (...)

18Dans un autre registre, différents groupes en appellent à utiliser les institutions artistiques pour mettre en avant l’urgence écologique, les droits des femmes ou des minorités ou encore à décoloniser les arts (et en particulier les musées), ce qui doit conduire à une réécriture du canon et à plus de justice vis-à-vis des groupes qui ont été dominés jusqu’à présent. Les mouvements de ces dernières années, comme Occupy Museums25, Libérons le Louvre26 (créé sur le modèle de Liberate the Tate), Decolonize this Place27, Strike MoMA ou encore les campagnes contre l’implication dans le financement des institutions artistiques de la famille Sackler28, de Jeffrey Epstein, Warren B. Kanders29, Larry Fink ou Leon Black, des sociétés pétrolières Total ou BP30, forment ainsi une bonne illustration du « tournant éthique » qui prolonge l’idée de new institutionalism ces dernières années.

19Au bout du compte, indépendamment de leurs différences, la critique institutionnelle, comme le nouvel institutionnalisme et plus récemment le mouvement visant à décoloniser les arts, ont un objectif commun : promouvoir l’idée d’institutions qui soient plus justes. Bien entendu, ce qui est considéré comme plus juste varie considérablement d’un point de vue à l’autre : pour les uns, il s’agit de concevoir des institutions plus transparentes, qui ne cherchent à dissimuler aucun aspect de leurs activités ou de leur financement ; pour d’autres il s’agit d’institutions plus collégiales, suivant des principes de parité et où les communautés locales sont invitées à participer à la programmation ; pour d’autres encore, ce sont des lieux de réparation, de restitution, de réinvention de la société tout entière.

  • 31 Roxana Azimi, «  Au Magasin, centre d’art de Grenoble, les crises s’enchaînent  », Le Monde, 16  (...)

20Malheureusement, jusqu’à présent les autorités de tutelle et les financeurs des institutions artistiques acceptent rarement que celles-ci se contentent de diffuser des messages à caractère social ou politique, sans la moindre « sublimation artistique ». À Malmö, les responsables politiques locaux, pourtant issus du parti social-démocrate, ne comprennent pas le souhait de Charles Esche, directeur du centre d’art Rooseum, de transformer celui-ci en centre communautaire et choisissent de fermer l’institution en 2006. Plus récemment, le même genre de situation conduit à la mise à l’écart de Béatrice Josse de la direction du Magasin de Grenoble31. C’est un problème récurrent et il n’y a pas de raison de le voir résolu dans un futur proche.

Est-il possible de penser l’art hors de ses institutions ?

  • 32 Mary Douglas, Comment pensent les institutions (1986), trad. A. Abeillé, Paris, La Découverte, 2 (...)

21Le passage de l’âge académique à la modernité et le passage des avant-gardes à la critique institutionnelle ou au new institutionalism devrait faire réfléchir sur le sens de ce que peut être une institution artistique. L’anthropologue Mary Douglas le remarquait : « la grande réussite de la pensée institutionnelle est de rendre nos institutions complètement invisibles32 » et de fait la longue histoire des tentatives de réforme, des innovations, des contestations, des réactions critiques en tout genre face aux institutions met en valeur par contraste leur omniprésence. De ce point de vue, la croyance en une résistance des artistes peut sembler illusoire ; d’autant plus qu’elle tend à négliger des facteurs plus généraux qui conditionnent la création artistique et en permettent la diffusion et la réception. Il ne peut y avoir d’art sans institutions, car ce sont les institutions qui donnent sens à la notion d’art : certaines permettent à la création d’émerger (écoles d’art, résidences d’artistes, dispositifs d’aide à la création, etc.), d’autres lui permettent de se diffuser (revues d’art, lieux d’exposition, réseaux sociaux…), d’autres encore permettent aux artistes de gagner leur vie (marché de l’art, collections privées ou publiques, fondations, commande publique, etc.). Même si le fantasme de l’autonomie demeure profondément ancré dans l’imaginaire des artistes, il ne leur est pas possible de produire seuls leurs œuvres, de les exposer, de les valoriser et de les légitimer.

  • 33 Sur la théorie du champ, voir notamment les Actes de la recherche en sciences sociales n° 200, « (...)
  • 34 Pour une synthèse des différentes versions de la théorie institutionnelle, voir George Dickie, I (...)
  • 35 Howard S. Becker, Les Mondes de l’art (1982), trad. J. Bouniort, Paris, Flammarion, 1988.

22Les théories de l’art qui sont nourries de pensée marxiste, de conceptions pragmatistes ou issues de la philosophie analytique, le montrent pourtant clairement : les artistes, pas plus que les curateurs ou les groupes activistes, n’agissent de manière isolée. Qu’il s’agisse d’observer le champ des producteurs culturels (comme le fait la sociologie de Pierre Bourdieu33), les mécanismes de désignation et de valorisation (en suivant la théorie institutionnelle de George Dickie34) ou les interactions entre acteurs du monde de l’art (à l’instar de ce que propose Howard Becker35), le constat est toujours le même : pour qu’il y ait de l’art, il faut des institutions, des acteurs ou agents et des relations de coopération, de connivence ou de collusion qui sont à négocier et à renégocier en permanence. De ce fait, la mise en cause des institutions artistiques, qui peut sembler aller de soi, si l’on estime que l’art a de plus hautes aspirations, est nécessairement une chimère. La contestation des institutions issues de l’âge académique par les artistes de la modernité n’a pas conduit à leur disparition, pas plus que la critique institutionnelle ou le mouvement de décolonisation des musées ; tout au plus s’agit-il de les réorienter ou d’inventer de nouvelles institutions plus justes (qui seront sans doute remplacées ultérieurement par d’autres institutions encore plus justes).

23Au fond, ce qui est beaucoup plus frappant que la contestation des institutions, c’est leur résilience, leur omniprésence et leur développement sans fin. Au cours des dernières décennies, la création d’institutions s’est d’ailleurs faite à un rythme de plus en plus soutenu : biennales, résidences d’artistes, foires, FRAC, dispositifs d’aide à la création, centres d’art, fondations, etc. C’est parce que des artistes réalisent des installations ou des performances qu’on crée des centres d’art ou des festivals ; parce que les ateliers ne sont plus adaptés aux conditions contemporaines qu’on imagine des résidences ; parce que les catalogues où les textes critiques traditionnels sont décalés que les discussions se déplacent sur les réseaux sociaux.

24L’aspect le plus marquant de la multiplication des nouvelles institutions est peut-être la manière dont le phénomène s’étend en suivant deux directions. La première, que l’on pourrait qualifier d’extension géographique, concerne la diffusion des institutions d’art contemporain à l’échelle planétaire. Près d’une centaine de pays participent désormais à la Biennale de Venise et il n’y a pas de grande ville dans le monde qui n’accueille une biennale ou une foire d’art contemporain. Les musées, les centres d’art, les résidences d’artistes, les écoles se répandent tout autant, favorisant la circulation des idées, mais aussi sans doute une uniformisation des pratiques. La deuxième direction, concerne la spécialisation croissante pour ce qui est des domaines et formes d’institutions. Des résidences sont désormais consacrées aux curateurs ou aux critiques d’art ; il existe des musées pour l’art afro-américain, des biennales de design ou de photographie de reportage, des sites spécialisés dans l’art des femmes ou l’art écologiste, des collections de performance ou d’art vidéo, etc. Des événements artistiques émergent dans des contextes parfois très limités, mettant à profit les réseaux sociaux ; les artistes sont éventuellement mis à contribution dans les opérations de rénovation urbaine ; il leur arrive d’être accueillis dans des laboratoires de recherche, etc.

  • 36 [https://www.strikemoma.org/] op. cit.
  • 37 Andrea Fraser, «  From the critique of institutions to the institution of critique  », dans John (...)

25Est-il vraiment possible de se passer d’institutions ? Les auteurs du mouvement de protestation « Strike MoMA », évoqué au début de ce texte, reconnaissent eux-mêmes que contester les institutions est nécessairement ambivalent : « Nous vivons tous par nos contradictions. Travailler au MoMA et être dégoûté par le MoMA ? Être un artiste et détester le système artistique ? […] Opprimé mais contribuant également à l’oppression des autres ? Telle est la dystopie enchevêtrée de notre présent. Nous pouvons considérer les contradictions comme des obstacles et être consumés par la frustration, l’ambivalence et le désespoir, ou nous pouvons les reconnaître et en tenir compte36. ». Andrea Fraser ne dit pas autre chose : « l’institution est en nous et nous ne pouvons pas sortir de nous-mêmes37 ».

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Notes

1 «   Artists’ coalition announces “strike” action against MoMA », Artforum, 23 mars 2021, en [https://www.artforum.com/news/artists-coalition-announces-strike-action-against-moma-85349], consulté le 25 mars 2021.

2 Le contenu complet des revendications de la coalition est accessible en ligne [https:// www.strikemoma.org/ consulté le 25 mars 2021].

3 Jean Dubuffet, Asphyxiante culture, Paris, Minuit, 1968.

4 Robert Smithson, «  Cultural Confinement  », Artforum, octobre 1972, p. 39.

5 Parmi les nombreux écrits de Daniel Buren sur le sujet, voir en particulier Daniel Buren, «  Fonction de l’architecture  : notes sur le travail par rapport aux lieux où il s’inscrit, prises entre 1967 et 1975 et dont certaines sont spécialement récapitulées ici  » (1975), dans AA Bronson (sld), Museums by Artists, Toronto, Art Metropole, 1983, p. 69-74.

6 Sur le rôle joué par les premières académies dans l’autonomisation de la pratique artistique, voir Nikolaus Pevsner, Les Académies d’art (1940), trad. J.-J. Bretou, Paris, Gérard Monfort, 1999.

7 Ces idées se retrouvent chez différents conservateurs de musées progressistes, dès les années 1920  ; notamment chez Alexander Dorner, conservateur du musée régional de Hanovre. Voir Samuel Cauman, Das Lebende Museum. Erfahrungen eines Kunsthistorikers und Museumdirektors Alexander Dorner (1958), trad. A.F. Teschemacher), Hanovre, Hannover Fackelträger Verlag, 1960.

8 Sur cette question précise, voir Nikolaï Taraboukine, Le Dernier tableau. Du chevalet à la machine, pour une théorie de la peinture (1923), trad. M. Pétris et A. Nakov, Paris, Champ libre, 1972.

9 Peter Bürger, Theory of the Avant-Garde (1974), trad. M. Shaw, Minneapolis, Minnesota University Press, 1984, p. 58.

10 Sur la « légende » de la critique institutionnelle, voir Nicolas Heimendinger, « Le grand récit de la critique institutionnelle », Marges n° 22, 2016, p. 50-63.

11 Paul Ardenne, La Création contemporaine entre structures et système, Rouen, éd. de l’école régionale des Beaux-Arts, 1996, p. 52.

12 James Putnam, Le Musée à l’œuvre. Le musée comme médium dans l’art contemporain, trad. C-M. Diebold, Londres, Thames and Hudson, 2001, p. 31-32, p. 170.

13 Lisa G. Corrin, «  Mining the Museum. Artists Look at Museums, Museums Look at Themselves », dans Bettina Messias Carbonell (sld.), Museum Studies. An Anthology of Contexts, Londres, Blackwell, 2004, p. 387.

14 Paul Ardenne, op. cit., p. 57.

15 Stefan Germer, «  Parmi les vautours. L’art contextuel dans son contexte  » (1995), trad. C. Jouanlanne, dans Catherine Chevalier et Andreas Fohr (sld.), Une anthologie de la revue Texte zur Kunst de 1990 à 1998, Zürich/Dijon, JRP|Ringier/Les Presses du réel, 2010, p. 392.

16 Michael Asher et Stephan Pascher, «  The museum as muse—Asher reflects  », dans Alexander Alberro et Blake Stimson (sld), Institutional Critique. An Anthology of Artists’ Writings, Cambridge, MIT Press, 2009, p. 376.

17 James Putnam, Le Musée à l’œuvre, op. cit., p. 19.

18 Claire Bishop, Radical Museology or What’s ‘Contemporary’ in Museums of Contemporary Art ?, Londres, Koenig Books, 2013, p. 27.

19 Chantal Mouffe, «  Institution as Sites of Agonistic Intervention  », dans Pascal Gielen, (sld), Institutional Attitudes. Instituting Art in a Flat World, Amsterdam, Valiz, 2013, p. 70-72.

20 Gerald Raunig, «  Flatness Rules. Instituent Practices and Institutions of the Common in a Flat World  », dans ibid., p. 174.

21 Claire Bishop, Radical Museology…, op. cit., p. 6.

22 Le groupe ruangrupa a été choisi pour organiser la 15e documenta (2022).

23 Ade Darmawan [Ruangrupa], «  If you don’t need to, you don’t have to  », dans Biljana Ciric et Sally Lai (sld), Institution for the Future, Manchester, Chinese Art Centre, 2012, p. 91.

24 Nina Möntmann, «  Art and its institutions  », dans Id. (sld), Art and its Institutions. Current Conflicts, Critique and Collaborations, Londres, Black Dog publishing, 2006, p. 16.

25 [https://www.facebook.com/OccupyMuseums/] (page créée le 19 octobre 2011), consulté le 24 mars 2021.

26 [https://www.facebook.com/LiberonsleLouvre/] (page créée le 25 février 2017), consulté le 24 mars 2021.

27 [https://decolonizethisplace.org/] consulté le 4 mai 2021.

28 Nicolas Gomont, «  Les Sackler, l’embarrassant mécène du Louvre  », La Croix, 18 juillet 2019, en ligne [https://www.la-croix.com/Culture/Sackler-lembarrassant-mecene-ouvre-2019-07-18-1201036308] consulté le 24 mars 2021. Suite aux pressions de groupes activistes, la National Portrait Gallery et la Tate Gallery de Londres, le Metropolitan Museum et le Guggenheim de New York ont renoncé aux partenariats avec la famille Sackler.

29 Alex Greenberger, «  The Whitney Museum and Warren B. Kanders : a Timeline of the Controversy  », Artnews, 22 mars 2019, [https://www.artnews.com/art-news/news/whitney-museum-warren-kanders-controversy-timeline-12209/], consulté le 4 mai 2021.

30 Roxana Azimi, «  Total, BP, Sackler, des mécènes encombrants  », Le Monde, 14 juin 2019, en ligne [https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/06/14/total-sackler-bp-des-mecenes-ncombrants_5476314_4500055.html] consulté le 24 mars 2021.

31 Roxana Azimi, «  Au Magasin, centre d’art de Grenoble, les crises s’enchaînent  », Le Monde, 16 mars 2021, en ligne  : [https://www.lemonde.fr/culture/article/2021/03/16/au-magasin-centre-d-art-de-grenoble-les-crises-s-enchainent_6073282_3246.html]consulté le 18 mars 2021.

32 Mary Douglas, Comment pensent les institutions (1986), trad. A. Abeillé, Paris, La Découverte, 2004, p. 142.

33 Sur la théorie du champ, voir notamment les Actes de la recherche en sciences sociales n° 200, «  Théorie du champ  », décembre 2013.

34 Pour une synthèse des différentes versions de la théorie institutionnelle, voir George Dickie, Introduction to Aesthetics. An Analytic Approach, New York/Oxford, Oxford University Press, 1997.

35 Howard S. Becker, Les Mondes de l’art (1982), trad. J. Bouniort, Paris, Flammarion, 1988.

36 [https://www.strikemoma.org/] op. cit.

37 Andrea Fraser, «  From the critique of institutions to the institution of critique  », dans John C. Welchman (sld.), Institutional Critique and After, Zürich, JRP/Ringier, 2006, p. 131.

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Pour citer cet article

Référence papier

Jérôme Glicenstein, « Introduction : art contemporain et institutions »Marges, 33 | 2021, 5-8.

Référence électronique

Jérôme Glicenstein, « Introduction : art contemporain et institutions »Marges [En ligne], 33 | 2021, mis en ligne le 21 octobre 2021, consulté le 21 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/marges/2638 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/marges.2638

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Jérôme Glicenstein

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