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Thématique : Archives

Éparpiller l’archive, thématiser l’archive : deux études de cas photographiques

Scattering the Archive, Thematizing the Archive: Two Photographic Case Studies
Roberta Agnese
p. 103-119

Résumés

Dans le vaste panorama des pratiques artistiques contemporaines qui s’appuient sur un travail d’archive, cet article se focalise sur le cas spécifique de la photographie. Les deux œuvres étudiées, Evidence de Sultan et Mandel et l’Archiv Peter Piller, opèrent de manière complémentaire d’une part à éparpiller et de l’autre à thématiser les images photographiques d’archive, pour dévoiler l’ambiguïté de la photographie, comme étant à la fois document et objet esthétique, tout en réfléchissant à la complexité de notre culture visuelle contemporaine.

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Texte intégral

  • 1 Allan Sekula, « Le corps et l’archive », Écrits sur la photographie : 1974-1986, Paris, École natio (...)
  • 2 L’archive aurait le pouvoir « de réduire la nature à son essence géométrique », ibid. Cela veut dir (...)
  • 3 « Dans quelle mesure la photographie est utile pour légitimer et normaliser les relations de pouvoi (...)
  • 4 La réflexion de Sekula prend pour point de départ l’archive photographique de Leslie Shedden, photo (...)

1Dans un texte de 1986 qui thématise le rapport entre la photographie, le corps et l’archive, le photographe et théoricien américain Allan Sekula affirme qu’«  en termes de structure, l’archive est à la fois une entité paradigmatique abstraite et une institution concrète1 » capable d’établir des rapports d’équivalence et d’interchangeabilité entre les images, même photographiques2, et cela «  malgré le caractère circonstanciel de tout ce qui est photographiable ». Cette idée d’une «  équivalence visuelle abstraite entre les images » photographiques, établie par l’institution archivistique elle-même, était déjà présente dans un autre texte du théoricien de 1983, «  Reading an Archive. ­Photography between Labour and Capital ». Dans celui-ci, Sekula, pour répondre à une série de questions sur la valeur politique des images photographiques et leur rapport avec la «  vie économique3 » se demande explicitement ce qu’est une archive photographique et quel pouvoir elle exerce4, en portant ainsi au jour toute la difficulté et l’ambiguïté qu’il y a à saisir théoriquement un tel objet.

  • 5 ibid., p. 444.

2«  Le modèle de l’archive, de l’ensemble quantitatif des images, est très puissant au sein du discours photographique. Ce modèle exerce une influence importante sur le caractère de vérité […] dont on fait l’expérience en regardant les photographies et cela surtout aujourd’hui, dans un moment où les livres photographiques et les expositions sont élaborés à partir d’archives comme jamais auparavant. On pourrait même affirmer que les ambitions et les procédures archivistiques sont intrinsèques à la pratique photographique5 ».

  • 6 Rosalind Krauss, « Les espaces discursifs de la photographie », dans Le photographique. Pour une th (...)
  • 7 Michel Foucault, L’Archéologie du savoir, Paris, Gallimard, 1969, p. 171-172.
  • 8 « Enfin ce qu’on appelle “pratique discursive” peut maintenant être précisé. […] c’est un ensemble (...)
  • 9 Rosalind Krauss, op. cit., p. 74.
  • 10 Peter Galassi, Before Photography, New York, The Museum of Modern Art, 1981, p. 12. Cité par Krauss (...)
  • 11 Allan Sekula, Reading an Archive, op. cit., p. 444.
  • 12 Sekula, ibid., p. 445. Je traduis.
  • 13 ibid.

3Dans les mêmes années, Rosalind Krauss s’intéresse elle-aussi à la dimension archivistique du médium et présente un propos semblable dans son essai «  Les espaces discursifs de la photographie6 ». Dans ce texte, Krauss affirme que la dimension muséale dans laquelle la photographie a fait son apparition au début des années 1970 et qui la caractérise désormais en tant que pratique artistique n’est en réalité qu’un calque peu réussi de la conception moderniste de l’œuvre d’art, alors que la dimension propre à la photographie, qui échappe à toute normalisation disciplinaire relevant de l’histoire de l’art, serait non pas l’espace de l’exposition mais justement celle de l’archive. Et cela, affirme Krauss, non seulement dans le sens d’un document stocké dans un lieu physique mais surtout dans le sens de la célèbre définition que Michel Foucault donne de l’archive comme «  l’ensemble des conditions selon lesquelles s’exerce une pratique, selon lesquelles cette pratique donne lieu à des énoncés partiellement ou totalement nouveaux, selon lesquelles enfin elle peut être modifiée7 ». En tant qu’«  abstraction paradigmatique », l’archive serait donc le milieu propre à la photographie, à la fois comme condition historique de sa naissance et comme condition formelle de son développement  : une véritable pratique discursive8 ou plutôt cet «  ensemble des pratiques, des institutions, et des relations dont relevait au départ la photographie du 19e siècle9 ». Voire une pratique qui, avant d’être normalisée en tant qu’«  enfant légitime de la tradition picturale occidentale10 », appartenait à un espace discursif autre par rapport au discours esthétique propre à l’art. Mais, en tant qu’institution concrète, l’archive photographique constitue, pour continuer à utiliser les termes de Sekula, un «  territoire d’images11 » ambigu. Ambiguë, l’archive photographique l’est parce que, comme l’affirme le photographe et théoricien anglais, elle est contradictoire et loin d’être neutre  : les images qui en font partie sont atomisées et en même temps homogénéisées et l’archive résulte donc structurée selon un ordre, qui est imposé par une autorité et qui en même temps la légitime. L’archive photographique est ambiguë aussi à cause de sa manière de véhiculer le sens  : véritable boîte à outils, elle suspend à la fois signification et usage des images conservées. «  Dans l’archive – affirme Sekula – la signification existe en un état qui est à la fois résiduel et potentiel. La suggestion des usages du passé coexiste avec une plénitude de possibilités12 » et cela parce que «  malgré la puissante impression de réalité […] les photographies en elles-mêmes sont toujours des expressions fragmentaires et incomplètes13 ».

4Le rapport de la photographie à l’archive est donc autant essentiel que problématique  : Sekula et Krauss arrivent au fond à formuler un même constat, en relevant une contradiction propre à toute photographie, qui est toujours à la fois document ou enregistrement et potentiellement objet esthétique, œuvre d’art.

  • 14 Hal Foster, « An Archival Impulse », October n° 110, automne, 2004.
  • 15 « Peut-être que toutes les archives se développent ainsi, à travers des mutations de connexion et d (...)
  • 16 « Finalement, ce travail est archivistique parce qu’il fait appel non seulement à des archives info (...)

5Plus récemment, Hal Foster14, dans son célèbre texte de 2004 sur l’impulsion d’archive dans l’art contemporain, met en lumière le fait que l’art qui s’approprie les archives a le mérite de révéler (disclose) que les archives, toutes les archives, se développent et fonctionnent à travers des changements, de mutations d’équilibre et de rapports, par le biais de «  connections et déconnections15 ». Foster observe ainsi que les œuvres d’art qui naissent d’après une telle démarche sont archivistiques non seulement parce qu’elles puisent leur matériaux dans des archives existantes, mais aussi parce que ces œuvres créent elles-mêmes des archives nouvelles. L’archive, abstraite et concrète à la fois, pour reprendre les termes de Sekula, est alors la source de l’œuvre mais elle fait œuvre elle aussi. C’est donc un double mouvement qui caractérise la démarche archivistique dans l’art  : comme le dit Foster, une œuvre peut être définie comme archivistique, dans la mesure où elle pointe explicitement la nature de tout matériel d’archive comme étant en même temps trouvé et construit, factuel et fictif16. Les pratiques photographiques qui s’appuient sur l’archive comme paradigme ou modèle, à reproduire ou à dépasser, travaillent justement sur cette limite, entre une concrétion et une dilution de sens  : elles questionnent en même temps la valeur et l’importance de la sédimentation, «  de l’ensemble quantitatif », aussi bien que l’ambivalence de la photographie comme document et comme expression artistique. C’est ainsi que le trait d’interchangeabilité entre les images, systématisées et réduites à des rapports d’équivalence, peut être transformé en instrument de création, utilisé en tant qu’outil qui brouille l’ordre de l’archive. Le passage, jamais définitif, parmi les différents statuts de l’image photographique s’effectue d’une part par le biais de changements d’usages et de contextes, de connexions et déconnexions, d’opérations qui permettent des lectures nouvelles du contenu de l’image. D’autre part, c’est l’image photographique elle-même qui rend possible ce changement, justement au vu de son contenu, qui n’est qu’une représentation toujours cadrée, incomplète et fragmentaire du réel et qui recèle une réserve presque inépuisable de significations potentielles. En ce sens, le lien entre photographie et archive s’avère être étroit, les deux étant caractérisées par une incomplétude constitutive, par des potentialités de sens toujours à explorer.

6Dans le cadre d’une réflexion sur archives et art contemporain, il me paraît intéressant de faire émerger une modalité spécifique de mise en question de l’archive à travers l’image photographique, en réfléchissant sur ce mouvement double qui va des images vers l’archive à laquelle elles donnent forme et existence et vice-versa, de l’archive – décomposée ou reconstituée par les artistes – aux images qu’elle contient. Dans le vaste panorama des pratiques photographiques qui s’appuient sur un travail d’archive, je me concentrerai sur deux exemples, très différents au premier abord et relativement éloignés dans le temps mais qui opèrent de manière complémentaire  : le premier travaille à éparpiller les documents des archives préexistantes, tout en décontextualisant les images photographiques et le second à thématiser des groupes d’images éparses, en les re-contextualisant et en instituant une archive «  autre ». Les deux travaux sont respectivement Evidence de Larry Sultan et Mike Mandel et l’Archiv Peter Piller de l’artiste allemand éponyme. Ce qui permet d’associer ces deux travaux est la procédure, similaire sous certains aspects, qu’ils mettent en place pour poser le même défi à la clôture sémantique et fonctionnelle de l’archive. Ils révèlent ainsi le potentiel subversif des pratiques artistiques envers l’ordre et l’autorité, réelle ou présupposée, de l’archive sur le mode d’une ironie non dérisoire mais critique  ; ils utilisent donc cette ironie comme un instrument qui leur permet d’éloigner la démarche archivistique en art de l’autorité qui lui provient de la dimension mémorielle, pour sonder plutôt la dimension visuelle du présent.

Décontextualiser les images, éparpiller l’archive

  • 17 Notamment les travaux Billboards et Oranges on fire, ainsi que Replaced et How to Read Music in One (...)
  • 18 Larry Sultan, Mike Mandel, Sandra Phillips, Evidence, New York, D.A.P., 2003.
  • 19 Voir Eva Respini, Robert Heinecken : Object Matter, MoMA, New York, 2014. Voir également Pierre Bou (...)
  • 20 Entre 1963 et 1978, Ed Ruscha a publié à peu près 17 livres photographiques sur ses fameuses séries (...)

7Evidence est un travail de 1977 qui a pris la forme d’un livre et d’une exposition présentée au Musée d’art moderne de San Francisco (SFMOMA). Les deux auteurs, Larry Sultan et Mike Mandel, étaient à l’époque deux jeunes photographes qui avaient déjà derrière eux un fructueux parcours de collaboration17. Comme le remarque ­Sandra Phillips dans son essai qui accompagne la réédition ­d’Evidence en 200318, la rencontre et la collaboration de Sultan et Mandel témoignent d’un changement de regard sur la photographie qui à l’époque était en train de se produire et dont les deux photographes étaient, eux-aussi, des protagonistes. Dans les années 1960-1970, le panorama artistique californien était des plus stimulants  : c’est la période et le lieu de leur formation et de leurs premiers travaux. D’un côté, Robert Heinecken, fonde en 1964 le département de photographie à UCLA, où il a enseigné jusqu’en 1991. Artiste se définissant comme «  para-photographe », «  en deçà » et «  au delà » du médium, Heinecken était pionnier dans l’usage des images trouvées et décontextualisées à partir de magazines, journaux, télévisions, afin d’interroger la dimension culturelle de toute production visuelle, jusqu’à la plus populaire. L’influence de ses travaux, de ses incursions dans différents médiums et supports, de ses photocollages et ré-assemblage d’images a été énorme sur la production photographique américaine – sur Sultan et Mandel en particulier – et également fondamentale pour inaugurer un changement de regard sur la photographie comme pratique non seulement artistique mais aussi sociale19. De l’autre côté, Ansel Adams et Edward Weston, fondateurs du groupe f/64 ou Minor White, travaillaient et vivaient aussi dans la région  : ces trois représentants d’une photographie «  pure » combinaient une impeccable perfection technique avec de fortes tendances artistiques qui, loin des canons pictorialistes, étaient obtenues seulement en utilisant et en s’adaptant aux moyens, outils et contraintes propres au médium. Mais d’autres personnalités font également partie du panorama qui inspirait les deux auteurs d’Evidence, comme Lee ­Friedlander, Ed Ruscha20, John Baldessarri, Ralph Gibson ou l’anthropologue et photographe John Collier, parmi d’autres.

  • 21 Les photographes exposés étaient Robert Adams, Lewis Baltz, Joe Deal, Frank Gohlke, Nicholas Nixon, (...)

8C’est d’ailleurs dans les mêmes années, en 1973, que John ­Szarkowski présente au MoMA la légendaire exposition «  From the Picture Press », avec des photographies de presse exposées sans légende et privées de leur valeur informative. En 1975, la George Eastman House de Rochester présente les «  New Topographics  : Photographs of a Man Altered Landscape », véritable tournant dans la photographie documentaire de paysage21. Enfin, c’est toujours dans la même période, notamment en 1976, que Richard Prince commence à travailler en s’appropriant, lui aussi à sa manière, les images de presse. La période est donc sans doute cruciale pour la photographie  : Sultan et ­Mandel travaillent en plein milieu d’un véritable conflit culturel, entre une vision moderniste du médium, liée à la beauté des formes, à la ­perfection technique des impressions en noir et blanc et à la recherche d’un style fine art – même si elle est extrêmement novatrice – et d’une vision de la photographie qui s’affirme davantage comme une manière de voir et de comprendre le monde contemporain, que comme un instrument culturel à part entière et une expression fondamentale de la culture visuelle contemporaine.

  • 22 Charlotte Cotton, « Two guys from Van Nuys », dans Thomas Zander (sld), Larry Sultan and Mike Mande (...)
  • 23 Charlotte Cotton, ibid., p. 19.
  • 24 Shane Lavalette, A Telephone Conversation With Mike Mandel, http://www.lavalette.com/a-telephone-co (...)
  • 25 ibid.

9Dans ce panorama caractérisé par une nouvelle attention au médium et à ses expressions les plus variées et novatrices, mais aussi les plus simples, ordinaires et vernaculaires, qui allaient des images de presse aux paysages urbains à la beauté banale des nouveaux topographes, les deux jeunes photographes se retrouvent au bon endroit au bon moment. Ils sont capables d’opérer ce que l’historienne de la photographie Charlotte Cotton appelle une «  fusion originelle22 » de toutes ces pulsions qui agitent la photographie à l’époque et à opérer donc au croisement entre art et photographie, tout en renouvelant le langage photographique. Entre 1973 et 1975, Sultan et Mandel commencent à travailler aux projets Replaced et How to Read Music in One Evening, qui ouvriront la voie à Evidence, en lui assurant une sorte d’arrière-plan conceptuel. Ces deux travaux explorent de manière embryonnaire les conséquences que les «  changements de contexte » peuvent avoir sur «  la relation visuelle23 » entre les images  ; le premier en décontextualisant les images tirées de journaux à sujet médical, le second en décontextualisant les images tirées de magazines féminins. Les deux livres, entre ready-made, photocollages et montages, n’ont pas toutefois la force subversive qu’aura Evidence quelques années plus tard et qui lui sera assurée justement par le fait de travailler avec des images d’archives. Mike Mandel raconte dans un entretien en 200824 que si ces deux projets ont été utiles pour découvrir et dévoiler que les images photographiques, laissées libres de «  fluctuer », peuvent changer de statut et résonner avec d’autres sens, le monde des archives des entreprises et des institutions américaines a offert aux deux photographes des possibilités encore inexplorées, ainsi qu’une réserve d’images sans précédent. Avec le projet de recenser ces images cachées et oubliées dans ces archives, Sultan et Mandel obtiennent en 1975 un important financement de la part du gouvernement américain, le «  NEA artists’ fellowship », véritable sésame vis-à-vis de ces institutions, auxquelles ils se présentaient comme deux artistes travaillant sur une exposition prévue au SFMOMA à propos de «  la meilleure photographie industrielle documentaire25 ».

Larry Sultan et Mike Mandel, Untitled, image tirée de la série Evidence, 1977. Courtesy The Estate of Larry Sultan and Mike Mandel

Larry Sultan et Mike Mandel, Untitled, image tirée de la série Evidence, 1977. Courtesy The Estate of Larry Sultan and Mike Mandel.

  • 26 L’exposition présentait en plus une image supplémentaire, réalisée par les deux photographes et cac (...)
  • 27 Shane Lavalette, op. cit.

10C’est ainsi que les deux photographes ont pu, pendant deux ans, rentrer dans ces archives normalement inaccessibles – aéronautique, départements de police et des pompiers, entreprises d’énergie, ­laboratoires chimiques, etc. – et visionner deux millions d’images, pour ensuite en choisir et collecter 500, avant de sélectionner les 59 qui constituent Evidence, l’exposition aussi bien que le livre d’artiste26. Les deux photographes se sont donc confrontés à une énorme masse de négatifs et de photographies documentaires, réalisées dans le but de documenter des scènes de crime, essais scientifiques ou encore phases de travail industriel. La question qui guide leur démarche est la suivante  : dans quelle mesure les images peuvent-elles acquérir un autre sens lorsqu’elles sont regardées pour elles-mêmes  ? Et comment ce sens change-t-il encore en connexion avec d’autres images  ? Les photographies choisies ont la caractéristique de ne pas être trop spectaculaires ou trop immédiatement lisibles  : elles résonnent avec leur origine documentaire tout en étant à la fois mystérieuses et étranges. «  Je pense que la force du projet est dans le fait que les images sont des documents. Elles sont ce qu’elles sont par elles-mêmes, nous ne sommes pas les auteurs de ces images. Mais, de l’autre côté, elles sont devenues malléables parce que nous les avons portées en-dehors de leur contexte. Elles ont acquis une signification nouvelle, liée à la forme du livre et à la séquence. Et ces images paraissent ironiques ou elles nous étonnent parce qu’elles devraient être une chose alors qu’ici elles en signifient une autre27 ».

11Les 59 photographies qui composent Evidence sont donc présentées dans un livre d’artiste – qui est l’œuvre véritable – rigoureusement sans légende  : les images parlent leur propre langage, à travers un code visuel qui s’élabore au fur et à mesure que la séquence prend son propre rythme. Les pages ne sont pas numérotées, les images flottent. Le noir et blanc, les gestes, les correspondances iconiques, les formes sont les éléments qui tiennent les images ensemble. La seule information qui est donnée en ouverture du livre est la liste, sur trois pages, des sites archivistiques visités.

  • 28 ibid.
  • 29 Sandra Phillips, « A History of the Evidence », dans Mike Mandel, Larry Sultan, Sandra Phillips, op (...)

12Que voyons-nous dans ces images, que regardons-nous  ? La question ne cesse pas de se poser pendant la vision des photographies  : il est manifeste que chaque photographie est le résultat d’un shooting programmé, où quelque chose s’expose et se donne à voir et qui demande qu’on se prononce sur sa signification, on croit reconnaître quelque chose mais sans certitude. L’ensemble est hanté par le doute, provoqué par les images qui gardent leur nature de document et de preuve, et qui paraissent à la fois évidentes et opaques. Ce n’est pas un hasard, que la présence de panneaux, d’écrans, d’éléments translucides ou transparents soit si importante dans la série  : cela semble une manière de décrire la photographie, de la montrer ­pendant qu’elle se fait. «  Nous savions que nous étions en train de faire quelque chose d’unique et qu’en faisant cela nous pouvions contribuer au débat autour d’une possible définition de la nature de la photographie28 ». Et encore, les deux photographes s’expriment ainsi à l’occasion de l’exposition au SFMOMA  : «  Par définition, ces objets trouvés sont des enregistrements et par leur implication, ils sont des artefacts culturels29 ». Sultan et Mandel explorent, en anticipant des tendances qui auront beaucoup de succès par la suite, les possibilités qu’une démarche archivistique peut offrir à la photographie, ils compulsent les archives et décontextualisent les photographies qui en font partie, en construisant une narration visuelle énigmatique qui témoigne de l’excédent de sens à la fois de l’archive et de l’image photographique. Evidence  : évidence, mais aussi preuve. À travers ces images, qui ne sont que la preuve de l’existence d’un sens qui nous excède et nous échappe, Sultan et Mandel poussent et étendent la notion de pratique documentaire, montrent la photographie dans sa relation au document et à l’œuvre d’art. Ils dispersent l’archive, en éparpillant ses images, pour créer ainsi ce que Sultan appelait «  une architecture de la mémoire » capable de questionner les stratifications de sens aussi bien que leurs réagencements possibles  : ces images sont au fond la preuve de la non-évidence de l’archive.

Recontextualiser les images, thématiser l’archive

13Evidence se confrontait donc à la décontextualisation des images d’archive, en délestant les photographies de leur charge représentative ou dénotative. Avec le plus récent Archiv Peter Piller, ma deuxième étude de cas, on est face au mouvement non pas contraire mais bien complémentaire de recontextualisation de photographies dans une archive thématique. L’artiste allemand Peter Piller construit son archive depuis 1998, en faisant de son travail de responsable de la communication d’une agence de médias d’Hambourg la source de son œuvre. Depuis 1997, il a donc observé, analysé et archivé au quotidien 150 journaux régionaux, dans lesquels il a commencé à puiser ses matériaux. Si le point de départ de son travail est constitué par cette attention à une catégorie particulière d’images de presse, son archive s’est ensuite enrichie d’images provenant d’autres sources, telles qu’Internet ou encore des fonds d’images appartenant à des entreprises en faillite, comme des assurances ou bien des agences immobilières, dont il rachetait les fonds d’images, de négatifs. Piller a jusqu’à présent accumulé plus de 7000 images, toutes codifiées et stockées dans son archive. Tout comme pour Evidence, le livre constitue le véhicule principal de présentation de l’œuvre – même si le projet est presque entièrement visible sur Internet et très souvent présenté lors d’expositions. Les livres de Piller constituent une espèce d’anti-atlas warburgien, où l’on parcourt les sections dans des fascicules à l’allure sérieuse, page après page, planche après planche. Sauf que Piller y collecte non pas de bouleversantes formes de pathos, mais ces formes infimes, ces gestes, aussi absurdes que ridicules, qui font le quotidien de nos vies. L’approche est avant tout ironique  : pour décrire comment son archive a vu le jour, il raconte que, pendant son travail à l’agence de presse, il est devenu conscient qu’il y avait un genre d’images qui n’était pas rentré dans le domaine de l’art, mais qui le méritait  : les images des «  terrains vagues » ou des «  terrains à bâtir » (Bauerwartungsflächen).

  • 30 Peter Piller, « Vorzüge der Absichtslosigkeit », colloque Visuelles Gedächtnis, Zentrum für Fotog (...)

« Il s’agit là d’une pratique étrange, puisqu’un photographe était amené à prendre une photo d’un terrain vague où le bâtiment n’avait pas encore été bâti et qui était donc invisible. J’ai trouvé que dans ces prises de vues apparemment non intentionnelles il y avait quelque chose auquel j’étais confronté aussi pendant mon travail de photographe30 ».

  • 31 Maren Lübbke-Tidow, « What remains of the image. A juxtaposition of disparate elements », dans Thom (...)
  • 32 Maren Lübbke-Tidow, op. cit., p. 36.
  • 33 Le Centre de la photographie de Genève a consacré, en 2014-2015, une exposition à la militaria de l (...)
  • 34 C’est le cas par exemple de la figure du journaliste « embarqué ». Voir, parmi d’autres ouvrages, l (...)

14C’est ainsi que Piller a recueilli ces images et organisé la première section thématique de son archive sous le titre «  Pour l’instant, il n’y a rien à voir », qui constitue le noyau de son travail. Certaines des sections thématiques portent les noms suivants  : «  toucher les autos », «  regarder dans les trous », «  pointer des plaines », «  montrer l’argent ». Or, dans toutes ces photographies, il n’y a effectivement rien à voir  ; il s’agit d’images qu’on ne regarde pas normalement, même quand elles remplissent leur fonction d’information, d’illustration dans les pages des journaux. Le titre de la première section, «  Pour l’instant, il n’y a rien à voir », devient alors programmatique et comme dans le cas des terrains vagues, la photo est bien là mais elle ne montre rien. Ces images ne sont pourtant pas vides  : l’Archiv Peter Piller est une photothèque du rien qui trouve son sens dans la sérialité, dans la thématisation, dans l’institution et la classification de l’archive, née du geste de l’artiste. Une archive qui fait œuvre mais qui est, en même temps, une archive au sens propre du terme, censée garder la mémoire de ce qui était destiné à être oublié, à ne pas être vu. Images quelconques sans aucune valeur artistique ou esthétique, gestes et situations anodins, images marginales, dont personne ne se souvient et destinées à disparaître. Construire une archive à la fois excentrique et ordinaire, voici le défi et la provocation ironique de Piller. Mais son archive dépasse largement le but de la conservation  : s’il n’y a aucune raison apparente de conserver de telles images, leur insignifiance et leur banalité concourent toutefois à la constitution d’une puissante étude typologique sur l’image ainsi que d’une étude de nos propres représentations médiatiques. La tentative de Piller est de découvrir «  ce qui reste d’une image31 » photographique, de sa fonction dénotative et démonstrative d’une part et représentative de l’autre, une fois prise pour elle-même et décontextualisée. «  Enregistrer quelque chose qui est réel puisque il a été vu une fois, enregistrer quelque chose qui a un base réelle mais qui se libère des attributs usuels. C’est ça ce qui reste d’une image32 ». À la dimension sociale, qui était le sujet premier de ces sections, s’ajoute à partir des années 2000 la dimension médiatico-politique des images de presse, comme témoigne en particulier la section Nachkriegsordung (Ordre post-guerre), réalisée en 2003, à l’éclatement de la guerre en Irak33. Nachkriegsordung se compose de 35 images qui reproduisent 35 fois le même sujet, tirées de 35 journaux allemands, extraites de leur contexte d’origine et collées «  avec beaucoup de précision » sur de feuilles de papier. Les images sont en effet accompagnées d’une indication de «  latitude » et de «  longitude »  : la référence est à la stratégie médiatique que les États-Unis déploient à l’occasion de cette guerre  ; expressions comme «  guerre propres » ou «  frappes chirurgicales » trouvent ainsi une ironique correspondance iconique sur la feuille de papier. Les 35 reproductions de la même image se veulent une répétition critique de la médiatisation dont la Troisième guerre du Golfe a été l’objet, où des nouvelles «  règles » pour les médias et la presse on été introduites34.

  • 35 Walter Benjamin, « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique », dans Œuvres, Paris, (...)
  • 36 http://www.peterpiller.de

15Si l’on veut retracer les filiations de l’œuvre de Piller, on s’aperçoit qu’elles pourraient être les mêmes que celles d’Evidence  : l’Archiv Peter Piller s’enracine elle aussi dans ce changement de point de vue sur la photographie qui a son commencement dans les années 1970, aussi bien que dans ces pratiques qui agissent sur et avec les images de presse, pour en questionner le statut en terme d’originalité, d’authenticité, de copie, d’une même image en tant que reproductible et du réel en tant que reproduction35. À coté de la dimension culturelle de valorisation et diffusion des images, qu’un travail de décontextualisation et d’éparpillement comme Evidence montre, l’œuvre de Piller révèle aussi le poids social et la valeur politique propre aux images produites et diffusées dans le domaine de l’information. L’invisible dont parle Piller pour son travail, n’est pas alors ce qui doit être révélé mais plutôt ce qui doit être construit, en termes d’agencement de sens, d’images et de discours. Et «  que l’on n’aille rien chercher derrière les phénomènes  : ils sont eux-mêmes toute la doctrine36 », comme le dit la citation goethéenne qui introduit la version web de son archive et qui invite à ne rien regarder d’autre que cette surface photographique dans laquelle les phénomènes se montrent et s’épuisent. Sur cette même surface photographique, Piller livre sa réflexion sur le statut de l’image photographique et plus particulièrement de l’image photographique de presse. Il suffit de prendre comme exemple, outre les «  terrains à bâtir », des sections telles que «  Flèches »  ; «  Regarder dans les trous »  ; «  Montrer l’argent »  ; «  Pointer des plaines ». L’image photographique indique son sujet, le pointe du doigt (comme chez Walker Evans), le dénote, le construit  : l’image photographique est elle-même un «  terrain à bâtir ».

Bauerwartung
Peter Piller, Bauerwartung (Construction Expected), 2000-2006, série de 8 impressions pigmentées, formats divers, édition de 6 + 2 Aps.

© Peter Piller, VG Bild Bonn 2017, courtesy Capitain Petzel, Berlin.

Conclusion

  • 37 Joerg Bader, « Imagine there is a war and no one is watching », dans Thomas Seelig (sld), op. cit., (...)

16Ces deux travaux pointent vers la nature de l’archive et de ses documents, dans ce cas photographiques, avec une démarche complémentaire. Ces œuvres s’enracinent dans ce contexte dans lequel la photographie s’est imposée comme instrument d’investigation et de compréhension du monde, comme produit culturel à analyser, comme outil politique à décrypter et déployer. D’une part, Evidence s’interroge sur le sens que des images, réalisées avec le but de ­documenter des pratiques et de constituer des archives, peuvent acquérir une fois décontextualisées. D’autre part, Peter Piller fonde une archive en étiquetant des photographies qui représentent une sorte de bruit de fond de notre société médiatique, en les transformant et en leur donnant la profondeur d’un absurde mais possible inconscient visuel  : la recontextualisation des images fait en sorte que cette archive bizarre devient, à chaque fois qu’on l’explore, notre archive à nous, une archive qui vise à créer «  une mémoire visuelle de notre temps présent37 ».

17Les deux travaux font donc un usage de l’archive qui s’éloigne des pratiques désormais quelque peu codifiées de l’art archivistique, dans lesquelles l’archive aussi bien que l’image photographique ­affirment leur autorité dans la mesure où elles contribuent à forger une dimension mémorielle  : c’est la proximité entre le document et le réel du passé qui est soit mise en valeur, soit critiquée et ­court-circuitée. Ici, la dimension historique et mémorielle ne constitue pas le sujet premier, mais ce sont plutôt le banal, le quotidien, le geste anodin, l’ordinaire qui se trouvent mis en scène et représentés dans leur caractère extraordinaire, aussi bien que le présent de l’image, sa résonnance avec l’ici et le maintenant, son rapport au contemporain de celui qui la regarde. La dimension matérielle des archives et des documents que ces œuvres contiennent n’est pas négligée  : on peut observer, dans les deux cas, une attention particulière à l’expérience physique et concrète de la recherche et de la classification des matériaux, aux images et aux formats dans lesquels elles étaient conservées, autant qu’à la manière de les reproduire et de les montrer. Chaque tâche archivistique est accomplie sérieusement, tout comme chaque tâche artistique qui vient secouer, bouleverser, dévoiler l’archive.

18Dans les deux cas donc, l’archive n’est pas célébrée, elle est plutôt utilisée, comme «  plénitude de possibilités » à explorer, comme «  entité paradigmatique abstraite » à questionner, comme «  institution concrète » à parcourir et à exploiter, comme «  stratification » à fouiller, pour reprendre les termes utilisés par Sekula. Evidence et l’Archiv Peter Piller témoignent, non pas sans un sourire ironique mais jamais moqueur, de la possibilité d’agir d’une manière critique sur l’archive et d’en faire un lieu vivant, qui recèle et dévoile toute la complexité et la profondeur – tel un inconscient – de notre propre culture visuelle.

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Notes

1 Allan Sekula, « Le corps et l’archive », Écrits sur la photographie : 1974-1986, Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, 2013, p. 242. Je souligne.

2 L’archive aurait le pouvoir « de réduire la nature à son essence géométrique », ibid. Cela veut dire, continue Sekula, que l’archive photographique était le candidat idéal aux yeux – par exemple – de Berthillon ou de Galton pour devenir un système efficace et fiable de classification et standardisation, y compris des corps humains et surtout des corps « criminels ».

3 « Dans quelle mesure la photographie est utile pour légitimer et normaliser les relations de pouvoir existantes ? Dans quelle mesure elle fonctionne comme la voix de l’autorité […] ? […]Comment la mémoire historique et sociale est-elle préservée, transformée, limitée et oblitérée par la photographie ? ». Allan Sekula, « Reading an Archive. Photography between Labour and Capital », dans Liz Wells (sld), The Photography Reader, Londres et New York, Routledge, p. 443-444. Je traduis.

4 La réflexion de Sekula prend pour point de départ l’archive photographique de Leslie Shedden, photographe actif en Nouvelle-Écosse entre 1940 et 1960 qui avait documenté, sur commande, les conditions de vie et de travail des travailleurs dans les mines de fer et de charbon au Cap Breton.

5 ibid., p. 444.

6 Rosalind Krauss, « Les espaces discursifs de la photographie », dans Le photographique. Pour une théorie des écarts, Paris, Macula, 2013, p. 51-74.

7 Michel Foucault, L’Archéologie du savoir, Paris, Gallimard, 1969, p. 171-172.

8 « Enfin ce qu’on appelle “pratique discursive” peut maintenant être précisé. […] c’est un ensemble de règles anonymes, historiques, toujours déterminées dans le temps et l’espace qui ont défini à une époque donnée, et pour une aire sociale, économique, géographique ou linguistique donnée, les conditions d’exercice de la fonction énonciative. », ibid., p. 153.

9 Rosalind Krauss, op. cit., p. 74.

10 Peter Galassi, Before Photography, New York, The Museum of Modern Art, 1981, p. 12. Cité par Krauss, ibid., p. 57.

11 Allan Sekula, Reading an Archive, op. cit., p. 444.

12 Sekula, ibid., p. 445. Je traduis.

13 ibid.

14 Hal Foster, « An Archival Impulse », October n° 110, automne, 2004.

15 « Peut-être que toutes les archives se développent ainsi, à travers des mutations de connexion et déconnexion, un processus que cet art même a le mérite de révéler ». Hal Foster, ibid., p. 6.

16 « Finalement, ce travail est archivistique parce qu’il fait appel non seulement à des archives informelles mais il les produit également, et il fait cela en soulignant la nature de tout matériel archivistique comme étant à la fois trouvé mais construit, factuel mais fictif, public mais privé. ». ibid., p. 5.

17 Notamment les travaux Billboards et Oranges on fire, ainsi que Replaced et How to Read Music in One Evening. Voir Thomas Zander (sld), Larry Sultan and Mike Mandel, Cologne, König Verlag, 2012.

18 Larry Sultan, Mike Mandel, Sandra Phillips, Evidence, New York, D.A.P., 2003.

19 Voir Eva Respini, Robert Heinecken : Object Matter, MoMA, New York, 2014. Voir également Pierre Bourdieu, Un art moyen. Essai sur les usages sociaux de la photographie, Paris, Minuit, 1965.

20 Entre 1963 et 1978, Ed Ruscha a publié à peu près 17 livres photographiques sur ses fameuses séries, dont la première et la plus connue est Twentysix Gasoline Stations, 1963.

21 Les photographes exposés étaient Robert Adams, Lewis Baltz, Joe Deal, Frank Gohlke, Nicholas Nixon, John Schott, Henry Wessel, Stephen Shore, Bernd et Hilla Becher. Leurs travaux représentaient un changement radical dans la photographie de paysage, où l’attention n’était plus centrée sur une représentation de type naturaliste et mystique, mais où le regard était pointé vers un paysage urbain ou suburbain, ­post-industriel, quotidien et populaire voir banal ou marginal, mais où l’action ou la présence de l’homme se faisait de plus en plus évidente ; cela avec un soin et une maîtrise des aspects techniques toujours particulièrement élevés.

22 Charlotte Cotton, « Two guys from Van Nuys », dans Thomas Zander (sld), Larry Sultan and Mike Mandel, Cologne, König Verlag, 2012, p. 10-11.

23 Charlotte Cotton, ibid., p. 19.

24 Shane Lavalette, A Telephone Conversation With Mike Mandel, http://www.lavalette.com/a-telephone-conversation-with-mike-mandel/, consulté le 20 septembre 2016.

25 ibid.

26 L’exposition présentait en plus une image supplémentaire, réalisée par les deux photographes et cachée parmi les autres. L’image est contenue dans la réédition de 2003 d’Evidence, en marge du texte de Sandra Philipps.

27 Shane Lavalette, op. cit.

28 ibid.

29 Sandra Phillips, « A History of the Evidence », dans Mike Mandel, Larry Sultan, Sandra Phillips, op. cit., p. 10.

30 Peter Piller, « Vorzüge der Absichtslosigkeit », colloque Visuelles Gedächtnis, Zentrum für Fotografie, Winterthur, 26 juin 2006.

31 Maren Lübbke-Tidow, « What remains of the image. A juxtaposition of disparate elements », dans Thomas Seelig (sld), Peter Piller Archives. Materials (G) Albedo, Cologne, König Verlag, 2015, p. 33.

32 Maren Lübbke-Tidow, op. cit., p. 36.

33 Le Centre de la photographie de Genève a consacré, en 2014-2015, une exposition à la militaria de l’Archiv Peter Piller. Voir BELEGKONTROLLE, https://www.centre photogeneve.ch/expo/peter-piller/. À propos des sujets militaires de l’archive de Piller, voir Joerg Bader, « Imagine there is a war and no one is watching », dans Thomas Seelig (sld), op. cit., p. 37-41.

34 C’est le cas par exemple de la figure du journaliste « embarqué ». Voir, parmi d’autres ouvrages, les réflexions sur la portée politique de la médiatisation de la guerre, dont la guerre en Irak de 2003, que Judith Butler développe dans Ce qui fait une vie. Essai sur la violence, la guerre et le deuil, Paris, Zone, 2010.

35 Walter Benjamin, « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique », dans Œuvres, Paris, Gallimard, 2000.

36 http://www.peterpiller.de

37 Joerg Bader, « Imagine there is a war and no one is watching », dans Thomas Seelig (sld), op. cit., p. 41.

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Table des illustrations

Légende Larry Sultan et Mike Mandel, Untitled, image tirée de la série Evidence, 1977. Courtesy The Estate of Larry Sultan and Mike Mandel
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Légende Larry Sultan et Mike Mandel, Untitled, image tirée de la série Evidence, 1977. Courtesy The Estate of Larry Sultan and Mike Mandel.
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Légende BauerwartungPeter Piller, Bauerwartung (Construction Expected), 2000-2006, série de 8 impressions pigmentées, formats divers, édition de 6 + 2 Aps.
Crédits © Peter Piller, VG Bild Bonn 2017, courtesy Capitain Petzel, Berlin.
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Pour citer cet article

Référence papier

Roberta Agnese, « Éparpiller l’archive, thématiser l’archive : deux études de cas photographiques »Marges, 25 | 2017, 103-119.

Référence électronique

Roberta Agnese, « Éparpiller l’archive, thématiser l’archive : deux études de cas photographiques »Marges [En ligne], 25 | 2017, mis en ligne le 01 octobre 2019, consulté le 22 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/marges/1325 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/marges.1325

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Auteur

Roberta Agnese

Roberta Agnese est doctorante et ATER en philosophie à l’Université Paris Est-Créteil.

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Droits d’auteur

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