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Traitement lexicographique d’emplois polémiques :les trois stades d’intégration d’endonymes1 autochtones en français du Québec

Lexicographic treatment of sensitive uses: the three stages of integration of indigenous endonyms in Quebec French
Nadine Vincent

Résumés

On compte aujourd’hui onze nations autochtones sur le territoire québécois, et elles sont toutes, à des degrés divers, en processus de réappropriation de leur identité. Dans cet article, nous présentons l’évolution des ethnonymes de quelques nations en fonction de trois stades d’intégration : l’adoption du nom choisi par chaque nation, l’adoption de la graphie de chacune des langues autochtones et le respect de chacune des grammaires de ces langues. Nous analysons comment toutes ses possibilités cohabitent en français dans l’espace québécois en présentant la position de quelques-uns des acteurs qui orientent la norme au Québec (OQLF, dictionnaires, médias, etc.). Pour terminer, nous présentons la description de quelques cas en fonction des critères du Projet porc-épic, qui propose un nouveau traitement lexicographique pour les emplois polémiques.

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Texte intégral

L’auteure remercie Serge D’Amico pour la relecture éclairée et attentive qu’il a faite de la première version de cet article.

  • 1 Si le mot ethnonyme désigne tout nom de peuple, la Commission de toponymie du Québec définit endony (...)
  • 2 Voir notamment le remplacement d’Esquimau par Inuit à la fin des années 1970. https://www.thecanadi (...)

1La question de la dénomination des nations autochtones est latente au Québec depuis environ un demi-siècle2. Si elle ne faisait pas la une de l’actualité jusqu’à tout récemment, elle a constamment représenté un défi pour les dictionnaires qui peinent à décrire un vocabulaire en constante mutation et provenant de différentes langues aux grammaires, aux graphies et parfois aux alphabets distincts.

2Le territoire québécois compte onze nations autochtones et chacune de ces nations, à des degrés divers, est en processus de réappropriation de son identité, parfois aussi de sa langue, et demande qu’on la nomme selon sa culture. Ces différentes revendications font que plusieurs possibilités de dénominations cohabitent en français dans l’espace public québécois, mais aucune source officielle ne permet de savoir de façon claire quel mot employer. Que peut-on attendre des dictionnaires dans une telle instabilité de l’usage? Y a-t-il moyen d’informer les locuteurs sans leur imposer une ligne à suivre? Pour la question des ethnonymes autochtones en français du Québec, les paramètres ne sont pas essentiellement linguistiques, mais se situent plutôt sur les scènes culturelle et politique, et sont fortement influencés par des éléments de réappropriation identitaire, de légitimité et de volonté de réconciliation.

3Nous présenterons ici trois stades d’intégration des endonymes autochtones en nous appuyant sur l’évolution des dénominations de quelques nations en territoire québécois et en identifiant différents arguments de certains acteurs importants de l’établissement de la norme du français au Québec : l’Office québécois de la langue française (OQLF), les dictionnaires, les médias et, dans ce cas, les Autochtones eux-mêmes. Nous proposerons en fin d’article une description assez souple pour permettre une compréhension des enjeux en présence sans prendre position sur les différentes dénominations en concurrence.

4L’étude de ces cas s’inscrit dans le cadre des travaux du Projet porc-épic, qui vise à proposer un nouveau traitement lexicographique pour les emplois polémiques. Le dictionnaire a souvent été considéré comme étant le miroir d’une société, mais à l’heure de la redéfinition des identités et de la remise en question des discours d’autorité, ce miroir est appelé à élargir sa capacité de réflexion s’il veut pouvoir continuer à jouer son rôle d’ouvrage de référence.

1. Les nations autochtones au Québec

  • 3 https://www.axl.cefan.ulaval.ca/francophonie/HISTfrQC_s1_Nlle-France.htm

5Au 16e siècle, à l’arrivée des Français sur le territoire aujourd’hui appelé Québec, il y avait près de 25 000 Autochtones dans la vallée du Saint-Laurent3. Les explorateurs ont alors nommé les peuples qu’ils ont rencontrés en fonction de caractéristiques physiques, géographiques ou autres : Hurons, Montagnais, Têtes-de-Boule... Au cours de l’histoire, notamment après la conquête britannique de 1760, certains noms ont changé, et les nouveaux conquérants ont pris contact avec de nouvelles nations que leurs prédécesseurs n’avaient pas encore rencontrées.

6Aujourd’hui, au Canada, sont légalement considérés Autochtones les Inuits, les Métis et les membres des Premières Nations.

  • 4 Même si certaines personnes se disent descendantes de Métis, aucune nation métisse n’est reconnue p (...)

7Aucune nation métisse n’étant reconnue au Québec4, on compte onze nations autochtones sur le territoire (les Inuits et dix Premières Nations), réparties en 55 communautés. Par exemple, Kahnawake, Kanesatake et Akwesasne sont les trois communautés de la nation mohawk au Québec. La nation huronne-wendate ne compte qu’une seule communauté, Wendake, et la nation abénaquise en compte deux : Odanak et Wôlinak.

2. Les trois stades d’intégration des endonymes autochtones

  • 5 Le mot autochtone est ici utilisé comme générique. Les mots, graphies ou grammaires dont il sera qu (...)

8Nous avons identifié trois stades d’intégration des dénominations autochtones en français au Québec qui correspondent à trois types de revendications des différentes nations : l’emprunt du mot autochtone lui-même5, l’emprunt de la graphie autochtone et l’emprunt de la grammaire autochtone. Nous présenterons chacune de ces trois étapes, leur degré d’acceptation et d’implantation dans l’usage et leur traitement dans quelques ouvrages de référence. Dans le cadre du narratif de cet article, nous adopterons les noms les plus courants, généralement privilégiés par l’OQLF, de même que les graphies francisées et la grammaire du français.

2.1 Emprunt du mot autochtone

9Au cours des dernières décennies, la plupart des ethnonymes (parfois d’origine autochtone) utilisés dans la société québécoise ont été remplacés par des endonymes autochtones en fonction de la demande de chaque nation. Les Esquimaux sont maintenant appelés Inuits, les Hurons sont devenus des Wendats, les Montagnais, des Innus. On ne note pas de résistance dans les médias, le discours public, les dictionnaires ou l’OQLF face à ce genre de revendication, mais certaines dénominations sont en flottement dans l’usage actuel et aucune source ne peut servir de repère absolu pour savoir quel emploi adopter.

2.1.1 Selon des sources officielles

  • 6 Comme son nom l’indique, l’APNQL ne regroupe que les Premières Nations, ce qui n’inclut pas les Inu (...)

10Le tableau 1 présente les onze nations autochtones du Québec, telles que nommées par quatre voix officielles : l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador6 (APNQL), Tourisme autochtone Québec (organisme financé par les gouvernements et qui travaille avec des entrepreneurs autochtones), le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada.

APNQL7

Tourisme autochtone Québec8

Gouvernement du Québec9

Gouvernement du Canada10

Abénakis

W8banaki

Abénaquis

Abénakis

Algonquins

Anishinaabe

Algonquins (Anishinabe)

Algonquins

Atikamekw

Atikamekw

Attikameks

Atikamekw

Cri

Eeyou

Cris (Eeyou)

Cris

Huron-Wendat

Wendat

Hurons-Wendats

Hurons-Wendat

Ilnu/Innu

Innu

Innus

Innus

Malécite

Wolastoqiyik

Wolastoqiyik (Malécites)

Malécites

Mi’gmaq/Micmac

Mi’gmaq

Micmacs

Micmacs

Mohawk

Kanien:keha’ka

Mohawks (Kanien:keha’ka)

Mohawks

Naskapi

Naskapi

Naskapis

Naskapis

Inuit

Inuit

Inuits

Tableau 1 : Les noms des onze nations autochtones du Québec selon quatre sources officielles

  • 11 Notons qu’entre juillet 2022 et juillet 2023, les sites de Tourisme autochtone Québec et du Gouvern (...)

11En ne nous en tenant qu’au stade 1 d’intégration des noms autochtones, nous constatons que les dénominations de cinq nations sont ici concernées (zones grisées dans le tableau 1)11.

12ALGONQUINS/ANICHINABÉS. Les dénomination Algonquins et Anichinabés (avec différentes graphies) cohabitent pour désigner cette Première Nation, parfois même à l’intérieur d’une même communauté. Tourisme autochtone Québec vient d’opter pour Anishinaabe, alors que l’APNQL et le Gouvernement du Canada utilisent encore la variante Algonquins. Le Gouvernement du Québec privilégie Algonquins, mais indique Anishinabe entre parenthèses pour permettre la transition entre la variante courante et la variante nouvelle.

13CRIS/EEYOU. La répartition est exactement la même pour les ethnonymes Cris et Eeyou. Tourisme autochtone Québec opte depuis peu pour Eeyou, l’APNQL et le Gouvernement du Canada indiquent encore Cris, et le Gouvernement du Québec indique les deux options, mettant l’endonyme entre parenthèses.

14HURONS-WENDATS/WENDAT. Lorsque les membres de la communauté de Wendake ont demandé qu’on les nomme Wendat plutôt que Hurons, la forme double Huron-Wendat a été adoptée pour permettre la transition d’une appellation à l’autre. Tourisme autochtone Québec est la seule des sources consultées à opter désormais pour Wendat seul.

15MALÉCITES/WOLASTOQIYIK. Tourisme autochtone Québec est le seule de nos sources à avoir déjà délaissé la désignation Malécites pour adopter Wolastoqiyik, nom promu depuis peu par l’unique communauté de cette Première Nation, présente dans l’Est du Québec12. Le Gouvernement du Québec indique ici encore les deux dénominations, mais contrairement à sa position pour Algonquins et Cris, c’est l’endonyme Wolastoqiyik qui est ici privilégié, Malécites étant indiqué entre parenthèses. Aucune indication ne permet de deviner en fonction de quels critères ces décisions sont prises.

16MOHAWKS/KANIEN:KEHA’KA. Enfin, les quatre sources consultées respectent leur position respective pour Mohawks et Kanien :keha’ka. Tourisme autochtone Québec ne mentionne que l’endonyme, l’APNQL et le Gouvernement du Canada que la forme Mohawk, et le Gouvernement du Québec présente les deux en mettant l’endonyme entre parenthèses pour faire la transition entre la forme courante et la forme nouvelle.

2.1.2 Selon les médias

17Les données changeant rapidement en fonction des mises à jour de chacun des sites, nous avons aussi consulté des sources qui doivent quotidiennement choisir les dénominations à adopter : les médias. Comme ils constituent un acteur important pour identifier l’usage et la norme, nous avons cherché ces dix dénominations (cinq doublets) en transition dans quatre quotidiens du Québec et sur les sites web québécois de la société d’État Radio-Canada, sur une période de trois ans (du 1er août 2020 au 31 juillet 2023). Nous pouvons observer que les usages journalistiques ne sont pas à la remorque des sites cités au tableau 1 (notamment les sites gouvernementaux), les médias prenant leurs propres décisions, qui diffèrent d’ailleurs d’un média à l’autre.

  • 13 Pour éviter la confusion avec cri au sens de « hurlement », nous nous sommes limitée à chercher « n (...)
  • 14 Dans Le Devoir et Le Journal de Montréal, Eeyou n’apparaît que dans le toponyme Eeyou Itschee, qui (...)

Le Devoir

Le Journal de Mtl

La Presse +

Le Soleil

Sites qcois de Radio-Canada

Algonquins

74

76

81

22

247

Anichinabés

129

28

64

6

126

Cris13

102

81

137

13

179

Eeyou14

4

0

2

0

0

Huron-Wendat

57

48

65

44

114

Wendat

38

15

25

16

25

Malécite

23

7

18

3

32

Wolastoqiyik

13

2

7

2

12

Mohawk

153

149

213

16

110

Kanien:keha’ka

13

10

3

0

10

Tableau 2 : Doublets des dénominations de cinq Premières Nations dans les médias québécois

18Ainsi que l’indique le tableau 2, rares sont les dénominations absentes des médias. La cohabitation entre une forme courante et un endonyme récent est donc habituelle, et bien que chaque doublet ait son propre destin, on peut supposer que petit à petit les endonymes vont s’imposer.

19Anichinabés est parmi les cinq doublets recensés l’endonyme le plus fréquent dans le discours journalistique où il fait une vive concurrence à Algonquins; sa présence est pourtant timide dans le tableau 1 où Algonquins a la préséance. Nettement dominant dans Le Devoir, Anichinabés est aussi bien implanté dans La Presse + et à Radio-Canada et présent dans Le Journal de Montréal et Le Soleil.

20Ce n’est pas le cas de l’endonyme Eeyou, qui, même s’il semble avoir la même reconnaissance qu’Anichinabés dans le tableau 1, vient d’apparaître dans l’usage français au Québec. Pratiquement absent des contextes journalistiques en août 2023, il progressera assurément dans l’avenir.

21Étant implanté depuis déjà quelques années, la forme double Huron-Wendat est encore le premier choix de tous les médias consultés, même si Wendat seul apparaît régulièrement.

22Quant à la nation malécite, bien qu’on en parle relativement peu dans les médias, l’endonyme Wolastoqiyik est déjà bien présent sur les sites de Radio-Canada et dans tous les quotidiens.

23À l’inverse, la nation mohawk est celle dont on parle le plus dans les quotidiens montréalais Le Journal de Montréal et La Presse +, les trois communautés de cette nation étant dans la grande région métropolitaine; cette proximité permet sans doute en partie d’expliquer la présence notable dans les médias du très récent endonyme Kanien:keha’ka, dont la graphie apparaît irrégulière en français.

24Qu’ils soient connus depuis quelques années, comme Anichinabés et Wendat, ou qu’ils soient apparus récemment en français au Québec, comme Eeyou, Wolastoqiyik et Kanien:keha’ka, tous ces endonymes ont fait, font ou feront leur place dans les médias locaux. S’il est prévisible qu’ils apparaitront sous peu dans les dictionnaires du français faits au Québec, il est plus hasardeux de présager s’ils franchiront un jour la frontière de la variété québécoise et s’ils s’implanteront dans l’ensemble de la francophonie.

2.1.3 Selon les ouvrages de référence

25Pour terminer cette cueillette de données, nous avons consulté cinq dictionnaires contemporains (deux sources françaises, deux sources québécoises et le Wiktionnaire) pour savoir comment ils traitaient les ethnonymes autochtones désignant les cinq nations retenues. Le tableau 3 indique quelles dénominations (et quelles catégories grammaticales) sont attestées dans quels dictionnaires.

  • 15 Nous indiquons les formes des ethnonymes au masculin singulier. Nous n’avons pas retenu les accepti (...)

ethnonyme15

Petit Larousse illustré 2024

Petit Robert 2024

Wiktionnaire

Grand dictionnaire terminologique (GDT) de l’OQLF

Usito

Algonquin

Adj. et nom propre

adj. et nom

nom

adj. et nom sous anichinabé

adj. et nom

Anichinabé

adjectif

adj. et nom

nom, sous algonquin

Cri

Nom propre

adjectif et nom masc. pl.

adj. et nom

adj. et nom

Eeyou

Huron-Wendat

adjectif et nom masc. pl.

adj. et nom

adj. et nom

Wendat

adjectif et nom masc. pl.

adj. et nom sous huron-wendat

adj. et nom

Malécite

adjectif et nom masc. pl.

nom masc. pl.

adj. et nom

Wolastoqey

Nom masc. pl.

nom masc. pl. sous Malécites

Mohawk

Nom propre

adjectif et nom masc. pl.

nom

adj. et nom

Kanien:keha’ka

nom

Tableau 3 : Attestation de doublets de dénominations de cinq Premières Nations dans cinq dictionnaires contemporains

26Nous n’analyserons pas en détail chacun des articles consultés. Un regard général suffit cependant à constater que pour ce vocabulaire en mutation, les dictionnaires faits en France ne sont pas une référence à jour, autant pour les lemmes attestés que pour les définitions de chacune des nations. À titre d’exemple, dans ses pages de noms propres, le Petit Larousse illustré 2024 (PLI2024) donne une définition essentiellement historique d’Algonquins, pouvant laisser croire que cette nation n’a pas changé depuis plus de trois siècles : « peuple amérindien du Canada (env. 7000, au Québec et dans l’Ontario). Ils furent les alliés des Français dans le commerce des fourrures et dans les guerres contre les Anglais. Ils parlent une langue algonquienne. » (PLI2024)

27De plus, comme les Premières Nations sont des peuples assez éloignés des lexicographes parisiens, il arrive souvent que les lemmes ne soient qu’attestés, sans être clairement définis en fonction du critère classique des sèmes nécessaires et suffisants, c’est-à-dire en identifiant des éléments de sens qui, additionnés, ne peuvent convenir qu’à une seule acception. Le Petit Robert définit l’adjectif algonquin ainsi : « Qui appartient à la nation amérindienne du Canada portant ce nom ». Dans la mesure où, selon l’Encyclopédie canadienne, « il existe 634 Premières Nations au Canada16 », nous conviendrons que cette définition n’est pas très distinctive.

28Le Wiktionnaire, dictionnaire collaboratif panfrancophone, est assurément la source la plus complète en ce qui a trait aux lemmes attestés, mais il ne brille pas non plus par la clarté de ses définitions. Le nom propre Algonquins y est défini comme : « (Au pluriel) (Collectivement) Peuple amérindien de l’est du Canada, de la grande famille des Algonquiens17 ». Cet énoncé pourrait tout aussi bien convenir aux Innus, aux Naskapis, aux Malécites ou aux Micmacs, et la liste n’est pas exhaustive. La palme va cependant à sa définition de l’adjectif anichinabé : « (Canada) Relatif à l’une des Premières Nations18 ». Difficile de faire plus englobant. Notons d’ailleurs que le Wiktionnaire ne fait aucun lien entre les appellations Algonquin, et Anichinabé qui désignent pourtant la même nation.

29Pour ce champ sémantique très spécifique, les sources québécoises sont assurément plus sûres. Compte tenu des ajustements constants liés à cette terminologie depuis les dernières années, Usito et le GDT s’échangent la première place en fonction de la date de leur dernière mise à jour. Au moment d’écrire cet article, le GDT avait une longueur d’avance, ayant notamment revu les fiches Anichinabés et Malécites en 2022.

30Malgré les repères importants que constituent ces sources, elles ont l’habitude – nous pourrions même dire le mandat – d’indiquer le lemme ou la graphie à privilégier. Et même si elles indiquent d’autres variantes possibles, il n’est pas toujours simple pour l’usager lambda de comprendre les enjeux en présence. Or, compte tenu des différentes dénominations qui cohabitent dans l’usage, il devient délicat de distinguer les formes admises des formes fautives, ainsi que nous pourrons le constater dans la prochaine section.

2.2. Emprunt de la graphie autochtone

31Comme nous le constations à la section 2.1, la société québécoise est encline à adopter les désignations souhaitées par les Autochtones, même si les ouvrages de référence, les sites d’organismes officiels et le discours journalistique – pour ne nommer que ces trois acteurs – ne les intègrent pas à la même vitesse, ce qui pourrait donner l’impression qu’ils ne parlent pas d’une même voix. Voyons maintenant ce qu’il en est pour les différentes graphies en concurrence.

32Doit-on écrire Abénakis ou Abénaquis? Atikamekw ou Attikamek? La position privilégiée de l’OQLF est de franciser les graphies des mots empruntés aux langues étrangères, pour faciliter leur intégration au système linguistique du français. En fait, il est habituel que chaque langue adapte à son système propre des mots qu’elle emprunte à d’autres langues. Ainsi, un Italiano est un Italien en français, an Italian en anglais et ein Italiener en allemand.

33Il en est cependant autrement des ethnonymes autochtones en français au Québec. Malgré les orientations de l’OQLF, l’usage semble hésitant, notamment parce que les différents acteurs qui fixent la norme envoient des signaux différents.

34Ainsi, en mai 2021, la Société Radio-Canada annonçait qu’elle opterait désormais pour les graphies autochtones sur toutes ses plateformes (radio, télé, web).

La direction de l'information à Radio-Canada19 a approuvé de nouvelles recommandations sur certaines appellations autochtones. La démarche avait commencé il y a quelques années, notamment avec l'arrivée d'Espaces autochtones20 en 2016. À titre d'exemple, on verra dorénavant « mi'kmaw » et « mi'gmaw » plutôt que la graphie francisée « micmac ». Pour l'auteure, ethnologue et première spécialiste-conseillère aux affaires autochtones à Radio-Canada, Isabelle Picard21, il s'agit d'une question de respect et de réconciliation, que d'appliquer ces appellations dans le travail quotidien : « Tout ce qu'on a fait, c'est qu'on a respecté le désir des communautés et des nations dans leur façon de se nommer elles-mêmes. »22

35La volonté de « réconciliation » et de « respect » pourrait-elle remplacer les règles linguistiques et suffirait-elle à assurer la lisibilité et le décodage des nouvelles formes adoptées? En quoi ces usages non intuitifs pour des francophones pourraient-ils servir de modèles aux rédacteurs? Ne manque-t-il pas un certain accompagnement pédagogique à cette décision?

36Aujourd’hui, sur les différents sites de Radio-Canada, cohabitent les variantes mi’kmaw, mi’gmaw, mi’kmaq et mi’gmaq. Alors que les plus avertis pensaient que les deux dernières étaient les formes plurielles des deux premières, les contextes rencontrés ne nous permettent de tirer aucune conclusion, ainsi qu’en témoignent les quelques exemples suivants.

Une célèbre chanson mi’gmaw s’est frayé une place inattendue sur le dernier album du violoncelliste de renommée mondiale Yo-Yo Ma, Notes for the Future, grâce au ténor canadien Jeremy Dutcher. (Radio-Canada international, 10 octobre 202123)

Le chanteur mi’kmaw Q-052 lance l’album The Storm (Radio-Canada-Espaces autochtones, 22 avril 202224)

[…] il s’est associé à une compagnie de théâtre de la Nouvelle-Écosse pour enseigner aux enfants la langue mi'kmaq à l’aide de marionnettes. (Radio-Canada, Nouvelle-Écosse, 7 août 202225)

Au cours des 40 dernières années, des ententes ont été entérinées entre le gouvernement et les Mi'gmaq pour encadrer l'industrie de la pêche et reconnaître leurs droits ancestraux. (Radio-Canada, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, 11 juin 2021)

Des Mi’kmaq se joignent à la poursuite contre Bay du Nord (Radio-Canada, Nouveau-Brunswick, 12 juillet 202226)

37La citation suivante, regroupant trois extraits d’un même article, démontre très bien la difficulté pour les journalistes et réviseurs de Radio-Canada d’uniformiser les textes avec des graphies si peu habituelles pour les francophones. En plus de la cohabitation de deux formes distinctes pour le pluriel, on note dans l’extrait suivant une apostrophe mal positionnée, ce qui fragilise la volonté annoncée de respect et de réconciliation.

Cette année, pour la première fois, les pêcheurs mi’gmaw de la zone 21B sont autorisés par Ottawa à vendre une partie de leurs prises. […] L'ajout d'un volet commercial à la pêche de subsistance des Mig’maw [sic] découle de l’entente de réconciliation et de reconnaissance des droits de pêche survenue au printemps entre Ottawa et Listuguj. […] La pêche automnale des Mi'gmaq ne semble pas susciter d'animosité sur le quai de Carleton-sur-Mer. (Radio-Canada, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, 27 septembre 202127)

38Ceci étant dit, il faut admettre que bien avant la décision de Radio-Canada, la cohabitation des formes autochtones et des formes francisées existait dans l’usage, ainsi que l’illustrent les deux diagrammes circulaires du graphique 1 qui comparent les graphies du nom de deux nations dans la presse écrite au cours des 10 dernières années.

Graphique 1 : Cohabitation dans la presse canadienne des graphies autochtones et des graphies francisées des dénominations de deux Premières Nations (10 ans)

  • 28 Eureka.cc se nomme Europresse en Europe.

39En sondant la base de données Eureka28, spécifiquement pour la presse canadienne des 10 dernières années, nous avons constaté que la forme francisée Abénaquis (incluant les formes du féminin singulier et du féminin pluriel) apparaît 3513 fois dans la presse écrite, alors que la forme autochtone Abénakis (incluant aussi les formes du féminin) apparaît 4478 fois. Le contraste est encore plus important entre les 2240 occurrences de la forme francisée Attikamek (incluant le pluriel Attikameks) et les 11 599 occurrences de la forme autochtone invariable Atikamekw.

40Nous n’avons tenu compte ici que des formes « régulières », mais pour cette dernière dénomination, on trouve aussi 2190 occurrences de la forme Atikamekws (la graphie autochtone, mais avec un s du pluriel alors que ce mot est invariable pour les Atikamekw), 258 occurrences d’Attikamekw (alors que la graphie francisée, qui prend 2 t, a éliminé le w final), 54 occurrences d’Attikamekws (avec les 2 t et la variabilité de la graphie francisée et le w de la graphie autochtone), etc. Les trois dernières graphies ne sont attestées dans aucun ouvrage de référence, ce qui ne les empêche pas de circuler parfois significativement dans l’usage.

41Ces confusions ne sont pas nouvelles puisque déjà en 1989, une communicatrice du Secrétariat aux Affaires autochtones (gouvernement du Québec), publiait un texte dans le quotidien La Presse pour rappeler que Inuit et Innu étaient les noms de deux nations distinctes, et pour commenter la graphie de la dénomination Attikamek : « les Atikameks [sic], eux-mêmes écrivent leur nom selon leur propre graphie, c'est-à-dire "atikamekw". Écrit de cette façon, le mot atikamekw est invariable. » (Dumas, 1989 : B2)

42Certains dictionnaires contemporains indiquent les variantes graphiques des noms des nations autochtones, d’autres pas. Le dictionnaire québécois Usito met les formes francisées en vedette, et précise en remarque d’entrée, pour abénaquis : « On écrit aussi abénakis » et pour attikamek : « On écrit aussi atikamekw, forme adoptée officiellement par la communauté attikamek, invariable en genre et en nombre. ». Le Wiktionnaire atteste les graphies abénakis et abénaquis, mais aussi abénaqui et abénaki, indiquant que ces deux dernières sont rares. Il fait un article par graphie et présente aussi deux articles distincts pour Attikamek et Atikamekw, indiquant sous chaque entrée l’autre vedette comme variante graphique. Dans la fiche de la graphie francisée, une citation indique : « La nation attikamek veut imposer la graphie Atikamekw, mais cette graphie avec kw en finale n'existe pas en français29. » Enfin, le PLI2024 n’atteste aucune de ces dénominations et le Petit Robert 2024 n’atteste qu’abénaquis (sans la variante abénakis) et n’atteste ni Attikamek ni Atikamekw. Face à cette description discordante des différents dictionnaires, l’usager néophyte ne peut qu’y perdre son latin.

2.3. Emprunt de la grammaire autochtone

43Passons maintenant au dernier stade d’intégration des endonymes autochtones en français, étape intimement liée à la précédente. Il s’agit de l’adoption de la grammaire des langues autochtones, c’est-à-dire de la variabilité ou de l’invariabilité d’un mot (comme nous l’avons vu avec Atikamekw) ou de l’emprunt de la forme pluriel de chacune des langues (comme nous l’avons vu approximativement avec les exemples Mi’gmaw/Mi’gmaq et Mi’kmaw/Mi’kmaq). Que doivent attester et prescrire les dictionnaires et autres ouvrages de référence? La ligne directrice de l’OQLF, telle que disponible en août 2022, semblait claire.

  • 30 https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/25335/la-typographie/majuscules/emploi-de-la-majuscule- (...)

Pour une meilleure intégration au système linguistique du français, et conformément aux principes d’adaptation énoncés dans sa Politique de l’emprunt linguistique, l’Office québécois de la langue française préconise la variation en genre et en nombre : un Inuit, des Inuits; une Inuite, des Inuites. Cette règle correspond à l’usage moderne du français, qui tend à abandonner, pour les mots empruntés, les oppositions singulier/pluriel qui existent dans la langue source (comme solo/soli, de l’italien, et barman/barmen, de l’anglais).30

44Dans le même ordre d’idées, quand le public a appris le 6 juillet 2021 qu’une nouvelle gouverneure générale avait été nommée au Canada, il s’est fait dire par la majorité des médias qu’elle était Inuite, alors qu’elle était plutôt Inuk sur les différentes plateformes de Radio-Canada.

L’Inuite Mary Simon devient la 30e gouverneure générale du Canada (Le Devoir, 6 juillet 2022)

La leader inuite Mary Simon nommée gouverneure générale (La Presse, 6 juillet 2022)

La nomination d’une Inuite incapable de s’exprimer en français au poste de gouverneure générale du Canada ne fait pas l’unanimité parmi les francophones. (Le Soleil, 6 juillet 2022)

L’Inuk Mary Simon, héritière d’une tâche plus qu’honorifique (Radio-Canada31, 6 juillet 2022)

45Entre le français et l’inuktitut, les différences sont plus importantes qu’une question de graphie ou d’invariabilité.

Rappelons qu’en inuktitut, le mot Inuk s’emploie pour désigner une seule personne, Inuuk pour désigner deux personnes, et Inuit pour désigner trois personnes ou plus. Dans sa langue d’origine, Inuit est un mot pluriel qui signifie « les hommes », « le peuple », « les gens » (Cyr et Vittecoq, 2008).

46C’est la forme inuit qui était devenue la forme au masculin singulier en français, et il était prescrit par l’OQLF d’écrire un Inuit, une Inuite, des Inuits et des Inuites. Radio-Canada, en optant pour les graphies autochtones tel qu’annoncé au point 2.2, a aussi opté pour l’adoption de la grammaire de chacune des langues autochtones. La forme désignant deux individus (Inuuk) n’a cependant pas été retenue, sans qu’aucune justification ne soit donnée.

47Cette innovation de Radio-Canada a été remarquée par les autres médias. Deux mois après la nomination de Mary Simon, la conseillère linguistique du quotidien La Presse précisait dans une chronique de langue que :

À La Presse, on suit, comme l’OQLF et d’autres sources, l’usage moderne du français et on n’écrit pas un Inuk, des Inuit, mais plutôt un Inuit, les Inuits, une Inuite, les Inuites. (Côté, 2021)

  • 32 Dans les dernières années, le seul autre cas notable, mais qui a été nettement plus important, s’es (...)

48Il est assez rare que les médias se prononcent publiquement sur des questions de régie linguistique interne32. Notons qu’on n’utilise Inuk, comme nom ou comme adjectif, que pour désigner un humain (un Inuk, une Inuk, l’avocate et militante inuk, le réalisateur inuk, etc.). Pour désigner des réalités ou abstractions non humaines, c’est l’adjectif invariable inuit qui est utilisé (langue inuit, culture inuit, territoires inuit, chiens inuit, etc.)

49Les dictionnaires n’attestent généralement pas le singulier inuk et la forme invariable inuit. Le Petit Robert 2024, le PLI2024 et Usito attestent les formes francisées (un Inuit, une Inuite, des Inuits, des Inuites). Usito précise en remarque : « L'OQLF a officialisé la forme inuit pour le masculin singulier et inuite pour le féminin singulier. » Pourtant, au cours de 2022, la position de l’OQLF a changé et l’organisme accepte maintenant les deux grammaires. « L’Office québécois de la langue française accepte les formes variables en genre et en nombre Inuit/Inuits et inuit/inuits, tout comme les formes invariables en genre Inuk/Inuit et inuk/inuit. »33 Et la même « souplesse » est maintenant appliquée par l’OQLF à tous les ethnonymes empruntés aux langues autochtones. Il est vrai que dans l’usage, on trouve aussi bien la dénomination Wendat francisée (avec les formes Wendate, Wendats et Wendates), qu’invariable comme le préconise la nation wendat elle-même (les Wendat. Une femme wendat). Pour wendat, cette double possibilité est précisée dans les dictionnaires consultés qui attestent ce mot (Usito, le GDT de l’OQLF et le Wiktionnaire).

50Pour inuk et inuit, le Wiktionnaire présente un portrait discutable, qui s’explique sans doute en partie par les sources qu’il cite. Le dictionnaire collaboratif atteste inuk, comme nom et comme adjectif, pour désigner un seul individu, masculin ou féminin. Le mot Inuit est aussi attesté comme nom et comme adjectif. Sous l’adjectif, on trouve la note : « Peut s’accorder en genre, comme l’Office québécois de la langue française le recommande, ou demeurer invariable comme le recommande l’Académie française. » Pourtant, la 9e édition du Dictionnaire de l’Académie française donne en exemples l’art des Inuits, la langue inuit34. L’Académie semble donc permettre parfois l’accord en nombre.

2.4 En bref

51Ainsi que le démontre le rapide tour d’horizon que nous venons d’effectuer, les ethnonymes autochtones sont instables en français au Québec (et à peu près absents ailleurs dans la francophonie). Depuis des décennies, suivant les revendications de chacune des nations, les mots, les graphies ou mêmes les règles d’accord fluctuent. Et nous avons vu les acteurs porteurs de la norme changer de position au cours des dernières années (sites officiels dont gouvernementaux, médias, OQLF).

52Nous pouvons aussi constater que l’usage au Québec semble très favorable au premier stade d’intégration (adoption du nom autochtone), et relativement ouvert aux deuxième et troisième stades (adoption des graphies et des grammaires autochtones), bien que ces deux derniers génèrent un grand nombre de formes arbitraires ou fautives qui cohabitent dans les contextes étudiés avec des formes plus normalisées. La volonté de « respect et de réconciliation », pour citer l’ethnologue Isabelle Picard, semble plus importante que la capacité de maîtriser différentes langues et de comprendre l’intégration des emprunts dans une langue commune.

53Compte tenu de cet état des lieux, quelles informations faudrait-il donner à un lecteur, rédacteur, usager non spécialiste pour qu’il puisse rapidement distinguer les contraintes linguistiques des autres questions présentes? C’est à ce mandat que se consacre le Projet porc-épic.

3. Le Projet porc-épic

  • 35 https://projetporcepic.wordpress.com/
  • 36 Comme pour des mots comme complotiste, racisé/racialisé ou woke, aussi traités par le Projet porc-é (...)

54Le Projet porc-épic, né en juin 2021 à l’Université de Sherbrooke, expérimente pour les emplois polémiques (incluant les emplois fluctuants comme les ethnonymes autochtones) une description plus éclatée que la lexicographie traditionnelle. Il se consacre pour l’instant exclusivement au contexte québécois. Un site est en cours de construction35 et servira de vitrine aux mots traités. Dans le cas des ethnonymes autochtones, ce n’est pas la dimension sémantique des mots qui est source d’ambiguïté36, mais leurs dimensions graphique et morphologique. Comme aucune instance normative ne parvient à orienter l’usage, il est important ici d’identifier les formes acceptées et en concurrence, et d’indiquer quels emplois sont fréquemment utilisés dans l’espace public, aussi bien par les sources spécialisées et officielles (organismes autochtones, gouvernements québécois et canadien, etc.), que par les principaux médias. Ainsi que nous l’avons démontré à la section 2, les ouvrages de référence présentent des portraits utiles, mais souvent incomplets, et l’usage atteste tout, y compris des erreurs.

55Notons que nous décrivons ici les ethnonymes et les adjectifs correspondants; nous ne tenons pas compte du nom des langues des Nations concernées.

56Dans un préambule qui reprendra, en la synthétisant, une partie du contenu des sections 1 et 2 du présent article, le Projet porc-épic présentera les trois stades d’intégration des endonymes autochtones, en indiquant les caractéristiques et les embûches propres à chacun. Dans les préambules, comme dans cet article, nous utilisons toujours les graphies et les accords privilégiés par l’OQLF (il fallait bien choisir).

57Puis, pour chacune des nations, seront présentées sur le site les options possibles, avec citations et lieux d’attestations. Nous indiquons ici quelles informations seront données pour trois cas, un par stade d’intégration. Stade 1 : Wolastoqey/Malécite; stade 2 : Atikamekw/Attikamek; stade 3 : Inuk/Inuit.

3.1 Stade 1 : Wolastoqey/Malécite

58Sur la page d’accueil du site, dans le menu déroulant, quatre formes mèneront à une même page : malécite, malécites, wolastoqey et wolastoqiyik. Cette page contiendra un préambule, texte présentant la nation – surtout la communauté au Québec - et expliquant la cohabitation des différentes formes. Le préambule sera suivi de deux articles lexicographiques, l’un présentant l’emploi autochtone en voie d’implantation et l’autre l’emploi francisé appelé à être remplacé. Voici, pour Wolastoqey/Malécite, le préambule et les deux articles dans leur version anticipée.

PRÉAMBULE

La nation malécite, présente aussi au Nouveau-Brunswick et dans l’État du Maine, ne compte qu’une seule communauté au Québec, dans le Bas-Saint-Laurent, et sa reconnaissance par le gouvernement du Québec est relativement récente.

En 1987, 130 membres se sont réunis, à Rivière-du-Loup, en vue d’élire un chef et un conseil de la nation. Le conseil a fait ensuite parvenir une demande de reconnaissance officielle au gouvernement québécois. En 1989, l’Assemblée nationale a reconnu par voie de résolution les Malécites comme onzième nation autochtone du Québec. (Gouvernement du Québec37)

Depuis 2019, les Malécites demandent à se faire appeler les Wolastoqiyik (au singulier Wolastoqey). Si cet endonyme est peu attesté dans les dictionnaires, il commence à faire son apparition dans les médias, où il est parfois accompagné du mot malécite pour assurer la transition.

D’origine wolastoqey (malécite), Dave Jenniss a souvent interrogé ses origines autochtones dans son travail. (La Presse, 202138)

Un partenariat entre Parcs Canada et les Wolastoqiyik, anciennement appelés les Malécites, s'amorce avec une entente de deux millions de dollars sur dix ans pour encourager et accroître les activités économiques et culturelles de la Première Nation sur son territoire ancestral. (Radio-Canada-Bas-Saint-Laurent, 2022)

La tendance va donc vers l’utilisation de l’emploi Wolastoqey/Wolastoqiyik. Comme on peut supposer que le dénomination wolastoqey va sous peu remplacer la dénomination malécite, les deux ethnonymes ne sont pas présentés comme étant en concurrence, mais plutôt en cohabitation passagère.

  • 39 Comme la question traitée n’est pas ici sémantique, nous empruntons la définition du dictionnaire U (...)

EMPLOI AUTOCHTONE QUI TEND À S’IMPLANTER

WOLASTOQEY, adjectif et nom invariables en genre

Au pluriel : Wolastoqiyik

Adjectif. Propre ou relatif aux membres de la Première Nation de la famille algonquienne de la région du Bas-Saint-Laurent et des provinces maritimes. (Usito39) → malécite

« "J’ai amené l’équipe avec moi à Trois-Pistoles, là où je suis né", explique l’auteur et metteur en scène d’origine wolastoqey (malécite) et québécoise » (Le Devoir, 2021)

« Les activités de rassemblement, de partage et d'interprétation de la culture wolastoqey, de même que l'aménagement d'une aire de rassemblement extérieure et d'un site d'observation terrestre des bélugas seront également permis. » (Le Nouvelliste, 2021)

« Par la force des choses, il y a dans toutes les familles wolastoqiyik (malécites) wahsipekuk beaucoup plus d'intermariages avec des non-Autochtones en comparaison avec d'autres Premières Nations plus isolées. » (Radio-Canada-Nouvelles, 2020)

Nom/ethnonyme (avec une majuscule initiale). Un, une Wolastoqey. Des Wolastoqiyik.

« Bien que les Wolastoqiyik n'aient pas été directement touchés par le drame des pensionnats, le grand chef de la nation, Jacques Tremblay, se dit solidaire envers les autres peuples autochtones. » (Radio-Canada-Bas-Saint-Laurent, 2021)

Remarque (nom propre). La seule Première Nation wolastoqey en territoire québécois est la Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk. « la communauté a changé son nom, en 2019. La Première Nation Malécite de Viger est ainsi devenue la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk. "Wolastoqiyik" signifie peuple de la belle rivière, alors que "malécite" est un mot mi’kmaw qui veut dire "ceux qui parlent mal". » (Radio-Canada-Bas-Saint-Laurent, 2021)

Remarque (graphie). Dans les médias, la graphie wolastoqiyik est souvent utilisée comme adjectif ou nom au singulier. Le temps permettra de vérifier si cet usage s’impose en concurrence avec wolastoqey ou si l’un finit par supplanter l’autre.

EMPLOI FRANCISÉ EN VOIE DE REMPLACEMENT

MALÉCITE, adjectif et nom épicènes

Au pluriel : Malécites

Adjectif. Propre ou relatif aux membres de la Première Nation de la famille algonquienne de la région du Bas-Saint-Laurent et des provinces maritimes. (Usito) → wolastoqey

Nation, communauté malécite.

« "On nous met tous dans le même panier, alors que les Premières Nations, les Métis et les Inuits, ont une histoire vraiment distincte", s'indigne Isabelle Wallace, une infirmière malécite dont le mémoire de maîtrise portait sur l'intégration de contenu autochtone en sciences infirmières. » (Le Journal de Montréal, 2021)

Nom/ethnonyme (avec une majuscule initiale). Un, une Malécite. Des Malécites.

« le cégep de Sept-Îles accueille des étudiants de différentes nations, des Inuits, des Innus, des Malécites » (Radio-Canada-Côte-Nord, 2020)

3.2 Stade 2 : Atikamekw/Attikamek

59Dans le menu déroulant de la page d’accueil du site du Projet porc-épic, on trouvera les variantes atikamekw et attikamek et la forme pluriel attikameks. Cet ethnonyme est absent du Petit Larousse illustré 2024 et du Petit Robert 2024. Les deux variantes sont présentes et acceptées dans le dictionnaire québécois Usito et dans le Wiktionnaire, dictionnaire collaboratif. L’Office québécois de la langue française a visiblement changé récemment d’avis sur la question. Dans la fiche du GDT, daté de 2021, seule la graphie francisée Attikamek est acceptée, et variable en nombre. Cependant, dans une fiche de 2022 de la Banque de dépannage linguistique, l’OQLF accepte aussi la variante Atikamekw, invariable.

La graphie de certains noms de peuples autochtones peut varier. En effet, les communautés elles-mêmes adoptent parfois des formes différentes de celles privilégiées en français. À titre d’exemples, signalons que les Attikameks optent généralement pour la variante Atikamekw (invariable en genre et en nombre), et les Abénaquis, pour Abénakis.40

60Comme nous l’avons vu à la section 2.2, la variante autochtone est dominante dans les médias. Nous détaillons ici cette information en donnant la fréquence de chacune des variantes, au cours des deux dernières années (début septembre 2021 à fin août 2023), dans les principaux quotidiens québécois et les sites régionaux québécois de Radio-Canada.

Le Devoir

Le Journal de Montréal

La Presse +

Le Soleil

Sites qcois de Radio-Canada

Atikamekw

74

39

109

17

160

Attikamek/Attikameks

16

38

8

1

7

61Pour présenter un portrait de la répartition des deux graphies, nous indiquons en remarque dans les articles lexicographiques certains organismes autochtones, gouvernementaux, et des médias québécois qui privilégient clairement une graphie (sans forcément exclure l’autre) en fonction de leur utilisation au cours des deux dernières années.

62Nous ne reproduisons pas ici le préambule pour Atikamekw/Attikamek, puisqu’il reprend essentiellement les informations que nous venons d’énoncer, mais nous présentons les deux articles tels qu’ils apparaîtront sur le site du Projet porc-épic. Comme les deux graphies sont en concurrence depuis longtemps dans les contextes québécois, nous n’indiquons pas ici qu’une variante est en croissance et l’autre en décroissance.

GRAPHIE AUTOCHTONE

Atikamekw, adjectif et nom invariable

 Adjectif. Propre ou relatif aux membres de la Première Nation de la famille algonquienne établis dans la région de la Haute-Mauricie. (Usito) → attikamek

Nation atikamekw. Communautés atikamekw.

La culture atikamekw.

« Sa déclaration a suscité la colère des leaders atikamekw » (Le Devoir, 2022)

« La trajectoire du film […] de Catherine Boivin, artiste atikamekw originaire de Wemotaci, donne un souffle à la relève autochtone. Après un passage au Festival de Cannes, cette œuvre produite en collaboration avec le Wapikoni mobile s’est taillé une place au Festival international du film de Toronto. » (Le Soleil, 2023)

Nom/ethnonyme (avec une majuscule initiale). Un Atikamekw, une Atikamekw. Des Atikamekw.

Conseil des Atikamekw de Manawan.

Organismes et médias qui utilisent principalement cette graphie : le Conseil des Atikamekw de Manawan, le Conseil des Atikamekw d’Opitciwan, le Conseil des Atikamekw de Wemotaci, le Grand Conseil de la Nation Atikamekw, l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL) et le gouvernement du Canada. Cette graphie est aussi la plus fréquente dans de nombreux médias dont Le Devoir, La Presse +, Le Soleil et Radio-Canada.

GRAPHIE FRANCISÉE

Attikamek, adjectif et nom invariables en genre

Pluriel : Attikameks

Adjectif. Propre ou relatif aux membres de la Première Nation de la famille algonquienne établis en Haute-Mauricie. (Usito) → atikamekw

Nation attikamek. La communauté attikamek de Manawan.

Origines attikameks.

« Le territoire attikamek en Haute-Mauricie et dans Lanaudière a été fortement affecté par l'industrie forestière et par le développement hydroélectrique » (Le Journal de Montréal, 2023)

Nom/ethnonyme (avec une majuscule initiale). Un Attikamek, une Attikamek. Des Attikameks.

Organismes qui utilisent principalement cette graphie : l’Office québécois de la langue française, le gouvernement du Québec.

3.3 Stade 3 : Inuk/Inuit

63Ici, ce sont bien sûr les mots inuk et inuit qui apparaîtront dans le menu déroulant de la page d’accueil du site du Projet, de même que les formes inuite, inuits et inuites.

64Nous ne reproduisons pas le préambule ici non plus, puisqu’il reprend notamment les positions de Radio-Canada, du quotidien La Presse + et de l’OQLF, telles qu’exposées à la section 2.3.

65Le français étant la 3e langue des Inuits (après l’inuktitut et l’anglais), nous n’avons pas recensé les organismes inuits en fonction des graphies utilisées, celles-ci étant trop variables sur un même site.

GRAPHIES ET GRAMMAIRE FRANCISÉES

INUIT, INUITE, adjectif et nom

Pluriel : Inuits, inuites

Adjectif. Propre ou relatif aux Autochtones de la nation qui habite les terres arctiques du Canada, du Groenland, de l’Alaska et de la Sibérie; qui est membre de cette nation. → inuk

Art inuit, sculptures inuites.

Villages inuits.

« La leader inuite Mary Simon nommée gouverneure générale » (La Presse, 2021)

Nom/ethnonyme (Avec une majuscule initiale). Un Inuit, Une Inuite. Des Inuits, des Inuites.

« L’Inuite Mary Simon devient la 30e gouverneure générale du Canada » (Le Devoir, 2021)

Organismes et médias qui utilisent principalement ces graphies et ces accords : le Gouvernement du Canada et la majorité des médias écrits (dont Le Devoir, La Presse, Le Soleil, Le Journal de Montréal).

L’Office québécois de la langue française et le Gouvernement du Québec reconnaissent les deux modèles : un Inuk, des Inuit ou un Inuit, des Inuits.

GRAPHIES ET GRAMMAIRE AUTOCHTONES

INUK, adjectif et nom singulier invariable en genre

Pluriel : inuit, invariable en genre.

Adjectif désignant des humains. Qui est membre de la nation autochtone qui habite les terres arctiques du Canada, du Groenland, de l’Alaska et de la Sibérie. → inuit

« La nomination de la militante inuk Mary Simon au poste de gouverneure générale du Canada suscite fierté, espoirs et fébrilité dans le Nord canadien. » (Radio-Canada – Grand Nord, 2021)

« À Montréal, trois femmes inuit lancent un balado en inuktitut » (Radio-Canada – Espaces autochtones, 2022)

Nom/ethnonyme (Avec une majuscule initiale). Un Inuk, une Inuk. Des Inuit.

« L’Inuk Mary Simon, héritière d’une tâche plus qu’honorifique » (Radio-Canada-Nouvelles, 2021)

INUIT, adjectif invariable

(non humain). Propre ou relatif aux Inuit.

Art inuit, sculptures inuit.

Villages inuit.

« Ce n'est pas anodin que le gouvernement du Nunavut ait fait du chien inuit son emblème officiel » (Radio-Canada, 2021)

remarques : La Société Radio-Canada utilise ces graphies et ces accords sur toutes ses plateformes.

L’Office québécois de la langue française et le Gouvernement du Québec reconnaissent les deux modèles : un Inuk, des Inuit ou un Inuit, des Inuits.

66

CONCLUSION

67Comme nous l’avons vu, les endonymes autochtones s’intègrent à des degrés divers en français au Québec. Il faut bien comprendre que les différentes désignations, modifiées sur des décennies, concernent onze nations et donc onze langues distinctes, dont les graphies et les règles d’accord sont parfois assez éloignées de celles du français.

68Nous avons identifié trois stades d’intégration de ces dénominations au français.

Stade 1

Emprunt du mot autochtone

Anichinabés ou Algonquins?

Eeyou ou Cris?

Wolastoqiyik ou Malécites?

Stade 2

Emprunt de la graphie autochtone

Abénakis ou Abénaquis?

Atikamekw ou Attikameks?

Stade 3

Emprunt de la grammaire autochtone

Des Wendat ou des Wendats?

Un Inuk, des Inuit ou un Inuit, des Inuits?

Tableau 4 : les trois stades d’intégration des endonymes autochtones au français du Québec

69Si le stade 1 ne pose aucun problème particulier, si ce n’est de prévoir le temps nécessaire pour que les nouvelles dénominations s’implantent dans l’usage, les stades 2 et 3 présentent des obstacles différents.

70Le stade 2 suppose que le français adopte des graphies qui lui sont parfois peu familières ou qui correspondent mal à la prononciation française. Ainsi, si la graphie autochtone abénakis (plutôt que la graphie francisée abénaquis) ne pose aucun problème et est même dominante dans les médias, il en est autrement des différentes graphies possibles pour anishinaabe (que certaines communautés écrivent aussi anishnabe ou anishinabeg) et qui se trouvent simplifiées par la graphie francisée anichinabé, qui permet spontanément en français une prononciation plus proche de la prononciation autochtone. De même, la dénomination Kanien:keha’ka comporte un deux-points et une apostrophe, caractères inhabituels à l’intérieur d’un mot en français, et dont l’effet sur la prononciation n’est pas connu.

71Enfin, le stade 3 demande une adaptation aux règles d’accord des différentes langues autochtones et, tout comme le stade 2, génère pour l’instant une multitude de réalisations différentes dans le discours journalistique où il est bien difficile de distinguer les formes acceptables des formes fautives. Ce flottement ne semble pas stigmatisé pour l’instant, mais on peut supposer qu’une certaine standardisation va devoir finir par s’opérer pour stabiliser l’usage. Les différences dans le système linguistique sont pourtant parfois importantes, par exemple pour la forme du singulier inuk qui désigne en inuktitut un humain (artiste inuk, un ou une Inuk) alors que la forme invariable en genre inuit peut désigner un singulier non humain (chien inuit, culture inuit) ou un pluriel, qu’il soit humain ou pas (sculptures inuit, les Inuit). On se trouve ici devant un découpage de la réalité significativement distinct de celui du français.

72Le mandat du Projet porc-épic n’est pas de déterminer la norme, mais bien de présenter les différentes options en cohabitation dans l’usage sous un angle sociolinguistique. Pour les emplois présentés, il n’y a pas de « vérité » linguistique; il n’y a que des occurrences, dictées par différentes visions du monde; l’usage finira par déterminer quels emplois s’implanteront et lesquels disparaîtront. En attendant, puisqu’il faut bien continuer à communiquer, le Projet porc-épic tente d’éclairer le chemin.

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Bibliographie

Côté, L. (2021) « Aborigène, autochtone, indigène : un vocabulaire de son époque », La Presse +, 26 septembre.

Cyr, D. et Vittecoq F. (2008) « Inuit, un mot qui ne fait plus exception », L’Actualité langagière, volume 5, numéro 2, page 9

Dumas, L. (1989) « Petit lexique autochtone », La Presse, 2 juillet, p. B2

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Notes

1 Si le mot ethnonyme désigne tout nom de peuple, la Commission de toponymie du Québec définit endonyme comme étant une « appellation toponymique exprimée dans la forme orthographique et dans la langue locales de la région où l’entité dénommée est située, indépendamment du système d’écriture ». (https://toponymie.gouv.qc.ca/ct/normes-procedures/terminologie-geographique/glossaire/endonyme.aspx [page consultée le 22 août 2022]

2 Voir notamment le remplacement d’Esquimau par Inuit à la fin des années 1970. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/esquimau [page consultée le 7 août 2022]

3 https://www.axl.cefan.ulaval.ca/francophonie/HISTfrQC_s1_Nlle-France.htm

4 Même si certaines personnes se disent descendantes de Métis, aucune nation métisse n’est reconnue par le gouvernement du Québec ou le gouvernement fédéral sur le territoire québécois. Voir https://www.rcaanc-cirnac.gc.ca/fra/1100100014427/1535467913043.

5 Le mot autochtone est ici utilisé comme générique. Les mots, graphies ou grammaires dont il sera question sont ceux de chacune des langues des onze nations concernées.

6 Comme son nom l’indique, l’APNQL ne regroupe que les Premières Nations, ce qui n’inclut pas les Inuits.

7 https://apnql.com/nations/ [page consultée le 17 août 2023]. Selon la page consultée sur le site de l’APNQL, les graphies des nations divergent et sont parfois au singulier, parfois au pluriel.

8 https://tourismeautochtone.com/nations [page consultée le 24 juillet 2023].

9 https://www.quebec.ca/gouvernement/portrait-quebec/premieres-nations-inuits/profil-des-nations [page consultée le 24 juillet 2023].

10 https://www.sac-isc.gc.ca/fra/1634312499368/1634312554965 [page consultée le 31 juillet 2022]

11 Notons qu’entre juillet 2022 et juillet 2023, les sites de Tourisme autochtone Québec et du Gouvernement du Québec ont été mis à jour, le premier modifiant quatre dénominations et le second cinq. Ces changements illustrent bien l’instabilité actuelle pour la désignation des Autochtones.

12 https://malecites.ca/fr/ [page consultée le 18 août 2023]. On notera que si le mot malécites est absent du site de la communauté, il est encore le seul mot complet de son adresse URL. On peut donc supposer que le remplacement de l’ancienne dénomination par la nouvelle est relativement récent.

13 Pour éviter la confusion avec cri au sens de « hurlement », nous nous sommes limitée à chercher « nation ADJ0 crie », « communauté* ADJ0 crie* » et « les Cris », en filtrant les contextes.

14 Dans Le Devoir et Le Journal de Montréal, Eeyou n’apparaît que dans le toponyme Eeyou Itschee, qui désigne le territoire de la nation crie au Québec, ou dans le nom de la circonscription fédérale Abitibi–Baie-James–Nunavik–Eeyou. Les deux attestations retenues de La Presse sont des formes doubles : « Les Eeyou (Cris) » et « Les Cris Eeyou », illustration d’un passage d’une variante à l’autre dans l’usage.

15 Nous indiquons les formes des ethnonymes au masculin singulier. Nous n’avons pas retenu les acceptions attestant le nom de la langue d’une nation (la langue wendate; le wendat), qui a souvent la même forme que l’adjectif ou le nom au masculin singulier de l’ethnonyme, ni un adjectif ne renvoyant qu’au territoire (ex. eeyou dans le Wiktionnaire).

16 https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/premieres-nations [page consultée le 4 août 2022]

17 https://fr.wiktionary.org/wiki/Algonquins [page consultée le 4 août 2022]

18 https://fr.wiktionary.org/wiki/anichinab%C3%A9 [page consultée le 4 août 2022]

19 La langue anglaise, du moins au Canada, opte généralement pour les graphies autochtones. La Société CBC/Radio-Canada étant bilingue et bicéphale, il est possible que le réseau anglais ait influencé le réseau français pour ces questions.

20 Espaces autochtones et un site de Radio-Canada consacré à l’actualité et aux enjeux autochtones.

21 Isabelle Picard est elle-même Wendate, de la communauté de Wendake.

22 https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/le-15-18/segments/entrevue/356201/appellations-autochtones-terminologie-premieres-nations [page consultée le 4 août 2022]

23 https://ici.radio-canada.ca/rci/fr/nouvelle/1830659/autochtone-honor-song-sony-musique-album [page consultée le 7 août 2022]

24 https://ici.radio-canada.ca/espaces-autochtones/1877978/q052-quentin-condo-musique-engagee-lancement [page consultée le 7 août 2022]

25 https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1903785/nouvelle-serie-animation-langue-mikmaq-acadien [page consultée le 7 août 2022]

26 https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1897462/petrole-projet-terre-neuve-bay-du-nord-equinox-autochtone [page consultée le 7 août 2022]

27 https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1827480/peche-automnale-commerciale-listuguj-homard-autochtones-entente-ottawa [page consultée le 7 août 2022]

28 Eureka.cc se nomme Europresse en Europe.

29 La citation est tirée du site https://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/Quebec-8Autochtones-droits_lng.htm [page consultée le 25 août 2023]

30 https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/25335/la-typographie/majuscules/emploi-de-la-majuscule-pour-des-types-de-denominations/designations-de-peuples-autochtones [page consultée le 6 août 2022]

31 https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1806893/fonction-gouverneur-general-canada-nomination-mary-simon-couronne [page consultée le 6 août 2022]

32 Dans les dernières années, le seul autre cas notable, mais qui a été nettement plus important, s’est produit au début de mars 2022, quelques jours après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, quand la majorité des médias ont senti l’obligation de justifier leur utilisation de la graphie Kiev, ou leur passage à la graphie Kyiv ou Kyïv.

33 https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/25335/la-typographie/majuscules/emploi-de-la-majuscule-pour-des-types-de-denominations/designations-de-peuples-autochtones [page consultée le 25 août 2023]

34 https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9I1889 [page consultée le 6 août 2022]

35 https://projetporcepic.wordpress.com/

36 Comme pour des mots comme complotiste, racisé/racialisé ou woke, aussi traités par le Projet porc-épic.

37 https://www.quebec.ca/gouvernement/portrait-quebec/premieres-nations-inuits/profil-des-nations/malecites

38 Nous ne donnons pas les URL en référence pour les citations journalistiques dans le Projet porc-épic.

39 Comme la question traitée n’est pas ici sémantique, nous empruntons la définition du dictionnaire Usito, qui est issu du même groupe de recherche que le Projet porc-épic, le CRIFUQ (Centre de recherche interuniversitaire sur le français en usage au Québec).

40 https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/25335/la-typographie/majuscules/emploi-de-la-majuscule-pour-d Conseil des Atikamekw de Wemotaci es-types-de-denominations/designations-de-peuples-autochtones [page consultée le 28 août 2023]

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Table des illustrations

Légende Graphique 1 : Cohabitation dans la presse canadienne des graphies autochtones et des graphies francisées des dénominations de deux Premières Nations (10 ans)
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Pour citer cet article

Référence électronique

Nadine Vincent, « Traitement lexicographique d’emplois polémiques :les trois stades d’intégration d’endonymes autochtones en français du Québec »Linx [En ligne], 86 | 2023, mis en ligne le 30 septembre 2023, consulté le 25 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/linx/10303 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/linx.10303

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Auteur

Nadine Vincent

Université de Sherbrooke

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