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- 2 Avant la fin de la seconde guerre mondiale, l’information était réservée spécifiquement au secteur (...)
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1Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, le monde entier a assisté à la généralisation des usages de l’informatique1 relativement dans tous les domaines : militaire, économique, médical, de l’éducation et de l’enseignement2, etc. Sans aucun doute, la numérisation des ressources d’information, qui existaient jadis sous format papier, a été considérée comme l’un des avantages les plus importants du déploiement de l’informatique dans le domaine de l’enseignement en général et dans la diffusion des savoirs et des connaissances en particulier. C’est avec l’arrivée d’Internet3 au début des années 1990 que l’informatique s’est imposée comme un passage obligé pour le développement et l’évolution des moyens et des outils de diffusion à grande échelle des savoirs et des connaissances. En parallèle de cela, Internet a permis également la multiplication et la diversification des ressources d’information, qui sont devenues facilement accessibles. Selon Achard-Bayle et Paveau (2008 :4), la diffusion des savoirs et la multiplication des ressources d’information ont contribué considérablement à l’augmentation des savoirs des internautes.
- 4 Le terme web 2.0 a été utilisé la première fois par Tim Bernes-Lee en 2004 lors d’un congrès mondia (...)
- 5 Les blogs, les forums, les réseaux sociaux, les wikis, le bookmaking, la folksonomie, le podcasting (...)
2L’avènement du web 2.04, au début du XXIe siècle, a permis d’imposer un nouveau paradigme de production, de diffusion et d’accès à l’information en ligne. En fait, l’information n’est plus produite et diffusée uniquement selon un paradigme unidirectionnel, c’est-à-dire du haut vers le bas. Au contraire, et grâce aux services5 collaboratifs et gratuits du web 2.0, après avoir été considérés longtemps comme de simples récepteurs passifs des informations diffusées en ligne, les internautes sont devenus des producteurs actifs de contenus disponibles gratuitement en ligne. Par conséquent, le paradigme de la production et de la diffusion de l’information en ligne devient multidirectionnel du haut vers le bas et du bas vers le haut. Cela a permis d’arriver au stade où certains théoriciens du web 2.0 avancent et défendent réellement l’idée de la construction collective des savoirs (Paveau, 2008 ; Murano, 2014 et 2017 ; Steffens, 2017 ; Dolar, 2018).
3Nombreuses sont les disciplines scientifiques ayant été influencées par l’arrivée et l’évolution rapide et à grande échelle des services participatifs du web 2.0 qui incarnent la culture collaborative. Bien évidemment, la linguistique, en général, et la lexicographie, en particulier, font partie de ces disciplines.
4Le déploiement des services du web 2.0 dans le domaine de la lexicographie représente-t-il un passage obligé ? Si certains lexicographes restent encore prudents et critiques par rapport à cette question, c’est-à-dire, par rapport au déploiement des services du web 2.0 dans la compilation des dictionnaires en ligne (Dolar 2018), d’autres sont allés plus loin en considérant même que les services du web 2.0 constituent un passage obligé et représentent un choix inéluctable ; exactement comme c’était le cas à l’arrivée d’Internet pour l’utilisation des solutions numériques dans la constitution des corpus et dans la compilation des dictionnaires.
5Cet article porte sur les perspectives du déploiement des services du web 2.0 et donc de l’adoption de la culture collaborative dans le projet du Dictionnaire des francophones6, désormais DDF. Lancé officiellement par le ministère français de la Culture le 18 mars 2021, le DDF a été conçu pour être alimenté et enrichi par les internautes francophones dans le monde entier. C’est pourquoi il nous a semblé intéressant de proposer une feuille de route ayant pour objectif d’analyser les avantages, les limites et les défis de l’intégration de la culture collaborative ce projet.
6Pour étudier cette question, nous adoptons une méthode de recherche prospective. Il s’agira de commencer d’abord par une synthèse bibliographique des études d’observation et d’analyse menées sur des projets de dictionnaires collaboratifs en ligne. Ensuite, à la lumière des résultats de ces études, nous démontrerons comment la culture collaborative pourrait apporter une valeur ajoutée au DDF. Dans le même temps, il nous importera de focaliser notre attention sur les limites de ce déploiement et les défis qui accompagneront le développement, l’alimentation et l’enrichissement des données lexicographiques du DDF par les internautes.
7En préparant notre étude, nous avons relevé certains termes et expressions qui nécessitent d’être définis et précisés : participation, coopération et collaboration (Chapelain, 2017 ; Dolar, 2018 ; Murano, 2014). Bien que les trois notions semblent véhiculer un élément commun relatif au fait de prendre part pour faire quelque chose, pour Chapelain (2017) :
dans la coopération, on partage une production ou une création, mais dans la collaboration, on partage les processus qui ont conduit à celle-ci […] la coopération est considérée comme le partage du résultat, chacun des participants réalisant une étape sans s’intéresser obligatoirement à la chaîne de travail constituée par les autres, alors que dans la collaboration, ce sont les façons de faire, de s’organiser et d’apprendre que l’on partage.
- 7 Dans le domaine de la linguistique, Rosier (2004 : 70) utilise le terme la linguistique des profane (...)
8Par ailleurs, Dolar (2018 : 36) souligne clairement qu’il y a un débat important sur le plan terminologique autour du cadre théorique et conceptuel de l’évolution de la lexicographie à l’ère du web 2.0. Effectivement, les chercheurs parlent de lexicographie 2.0, de lexicographie profane7, de lexicographie collaborative, de lexicographie participative, de lexicographie populaire.
9L’analyse de Chapelain (2017) nous conduit à adopter le terme collaboration pour aborder la question de notre travail ; par conséquent, nous adoptons les deux termes : lexicographie collaborative et dictionnaire collaboratif.
- 8 Lancé en 1999, le projet Urban dictionary est considéré comme le premier dictionnaire collaboratif.
10Née à la fin du 20e siècle8, la lexicographie collaborative représente une méthode de compilation des dictionnaires disponibles exclusivement en ligne grâce à la collaboration des internautes, ce qui permet à ceux-ci d’être à la fois auteurs et lecteurs de dictionnaires.
11Quant au dictionnaire collaboratif, il est par définition un objet non conventionnel produit par des internautes – linguistes ou non-linguistes – avec un objectif normatif ou descriptif (Murano, 2014 : 148). Par conséquent, les internautes collaborent pour décrire la langue en fonction de leurs propres expériences en faisant appel à leurs propres styles de langue et leurs propres compétences linguistiques. Vu la nature des dictionnaires collaboratifs, ils sont compilés et disponibles uniquement et exclusivement en ligne.
12On a longtemps pensé que la lexicographie était réservée uniquement aux spécialistes, dits lexicographes. Ces derniers se chargent en effet de constituer un corpus à partir duquel ils identifient les entrées et élaborent les définitions et l’ensemble de la description.
13Margarito (2007 :172) définit la lexicographie collaborative comme une discipline indépendante située entre la lexicographie (science savante) et les productions de la linguistique populaire. En revanche, Carr (1997) considère que la lexicographie collaborative est par définition en opposition à la lexicographie traditionnelle. En fait, la lexicographie collaborative, fondée essentiellement sur le paradigme « du bas vers le haut » aurait réussi à coexister avec le paradigme « du haut vers le bas » qui caractérise la lexicographie traditionnelle.
14Il nous semble important de préciser que la lexicographie profane en tant pratique collective visant à partager des connaissances et des savoirs divers sur la langue par le biais d’un dictionnaire n’est pas liée exclusivement au web 2.0 (Murano, 2017 : 2). La lexicographie a connu, avant même l’arrivée d’Internet, des initiatives ayant pour objectif d’éditer des dictionnaires sous format papier dont le contenu était rédigé par des contributeurs non-lexicographes, au sens propre du terme (Celotti, 2008). Par ailleurs, la lexicographie contemporaine a tendance à s’intéresser plus en plus au lexique populaire, argotique et parlé (Mabrak, 2021).
- 9 Le terme corpus populaire renvoie dans notre article à tout contenu créé par les internautes sur In (...)
15La pluralité et l’hétérogénéité sont deux principes fondamentaux qui définissent et caractérisent le corpus lexicographique populaire9 en ligne (Steffens, 2017 : 3), de même que la macrostructure (nombre et structure des entrées) et la microstructure (définitions, informations, exemples et citations. Bien que les ressources collaboratives constituant le corpus populaire soient le plus souvent fixes et régies par les instructions de contribution (Abel et Meyer, 2013), la lexicographie profane a un objectif plutôt descriptif que normatif (Steffens, 2017 : 2).
16Weinreich avait déjà évoqué la possibilité, mais aussi la nécessité de faire appel à des collaborateurs non spécialistes (lexicographes profanes) quant à la description lexicographique normative de la langue.
Il semble que faire reposer tout le fardeau sur le lexicographe, ou sur n’importe quel autre descripteur sémanticien isolé, soit du gaspillage. Pourquoi ne pas recourir à l’aide d’un échantillon de locuteurs de la langue? [...] Nous avancerions volontiers que l’opération métalinguistique de la définition appartient aux universaux culturels (1970 : 85).
17Pour Steffens, les pratiques lexicographiques profanes représentent « une opportunité aux locuteurs de devenir de réels descripteurs de leurs usages lexicaux » (2017 : 2).
18Nombreux sont les termes utilisés pour faire référence aux internautes auteurs des contenus lexicographiques sur Internet. Nous citons à titre d’exemple : lecteur non-linguiste, lecteur 2.0, locuteur ordinaire (Steffens, 2017 :1), lexicographe 2.0, lexicographe profane, etc.
19Dans tous les cas, il s’agit d’une personne qui participe à la rédaction des entrées et de leurs définitions sans avoir suivi nécessairement une formation préalable spécifique en lexicographie. Margarito (2017 :17) utilise le terme « lexicographes improvisés » pour faire référence aux auteurs des dictionnaires collaboratifs.
20Par ailleurs, Steffens considère que les contributions des lexicographes profanes peuvent servir comme corpus pour des recherches scientifiques dans cinq domaines différents, à savoir : « (i) la mise à jour constantes des données, (ii) le recueil de données sur des variantes peu décrites, (iii) l’identification des normes locales, (iv) la localisation des usages, (v) l’articulation de la description de la variation et de celle du lexique commun » (2017 : 2).
21Il nous importe de rappeler que la notion de dictionnaire collaboratif s’applique à l’ensemble des types de dictionnaires traditionnels : dictionnaire monolingue ou bilingue, dictionnaire de langue générale ou de langue de spécialité, etc. (Murano, 2014 :151). Paveau utilise le terme lexicographisme pour faire référence à :
une définition lexicographique spontanée et subjective, construite en discours sans référence à un outil lexicographique ou à un appareillage rhétorique, mais prétendant en tenir lieu, et relevant d’une lexicographie populaire. Il s’agit souvent d’une reconstruction du sens prétendument dévoyé des mots, dénoncé par le lexicologisme. (2006 :153)
- 10 Cette analyse s’inscrit dans le cadre de son étude menée sur les dictionnaires collaboratifs : le d (...)
22Le dictionnaire collaboratif en tant que produit d’une pratique lexicographique collaborative profane représente, selon Dolar, un « genre dictionnairique qui intègre les contributions d’une communauté et qui crée, via Internet, un espace virtuel où les contributeurs se soutiennent et collaborent dans la rédaction » (2017 : 34). Ainsi, le dictionnaire collaboratif permet de développer un langage métalinguistique dont Dolar (2018 : 41) a analysé trois éléments10 : le caractère informel, les commentaires et les expériences (anecdotes) personnelles. Ces éléments sont spécifiques uniquement aux dictionnaires collaboratifs dont la description de l’usage de la langue est réalisée aussi bien par un métalangage scientifique que par un métalangage ordinaire.
23Par ailleurs, les dictionnaires collaboratifs se répartissent en deux catégories, à savoir : (i) des dictionnaires collaboratifs ouverts tels que le Wiktionnaire11 et Omega Wiki12 dont le contenu n’est ni rédigé ni vérifié ou contrôlé par un groupe d’experts en lexicographie ; (ii) des dictionnaires semi-collaboratifs institutionnels tels que Le dictionnaire LEO13 dont le contenu est vérifié et contrôlé par des experts avant qu’il soit publié et disponible en ligne sur le site du dictionnaire.
24De nombreux principes lexicographiques ont été impactés par la conception participative du web 2.0 : le corpus, le traitement automatique de la langue, la diffusion à grande échelle des dictionnaires et des informations lexicographiques, etc.
25Lors de son discours le 20 mars 2018, le président de la République française, Emmanuel Macron, a confié la mission de la création du DDF :à la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) et à un comité de pilotage interinstitutionnel qui a choisi comme opérateur l’Institut international pour la Francophonie (2IF), composante de l’université Jean Moulin Lyon 3. Un conseil scientifique a ensuite été réuni autour du projet, présidé par Bernard Cerquiglini14.
Figure 1 : Page d’accueil du site du DDF
26Le Dictionnaire des francophones est un projet lexicographique porté par le ministère de la Culture de France. Il est présenté comme :
un dictionnaire collaboratif numérique ouvert qui a pour objectif de rendre compte de la richesse du français parlé au sein de l’espace francophone. C’est un projet institutionnel novateur qui présente à la fois une partie de consultation au sein de laquelle sont compilées plusieurs ressources lexicographiques15, et une partie participative pour développer les mots et faire vivre la langue française16.
27Le DDF est disponible sur son site web17, via une application pour les smartphones18 et aussi sur les réseaux sociaux comme Facebook19 par exemple.
- 20 Selon le site du DDF, le nombre des francophones s’élève aujourd’hui à plus de 300 millions de pers (...)
28Cette présentation permet d’observer que le DDF représente une initiative lexicographique francophone novatrice ; il s’agit d’associer des ressources lexicographiques issues des dictionnaires traditionnels francophones avec des données lexicographiques numériques fournies par les internautes francophones20. Autrement dit, le DDF est une plateforme collaborative ayant pour objectif de permettre aux francophones de collaborer dans la description de la langue français telle qu’elle est en usage dans leurs régions francophones respectives, et ce dans l’objectif de construire une ressource lexicographique en ligne permettant d’accéder à l’usage réel et instantané de la langue française dans le monde francophone. Par conséquent, la consultation du DDF est censé non seulement permettre d’accéder à la norme de la langue française, mais de choisir les mots et les expressions qui conviennent à la situation de communication en langue française en prenant en compte les locuteurs, la zone géographique, les registres de langue, les cultures, les traditions, l’histoire, etc.
29Le DDF se distingue des dictionnaires français déjà en ligne par de nombreuses particularités.
(a) Son contenu (entrées et définitions) est mis à jour et réorganisé de façon constante, collective et collaborative.
(b) En plus des critères de recherche simple ou avancée qui existent déjà dans de nombreux dictionnaires numériques, il intègre un nouveau critère de recherche, par zone géographique ; il est ainsi possible de chercher le sens, les usages, la prononciation et l’orthographe d’un mot dans une zone géographique précise.
(c) Il permet aux internautes francophones d’interagir avec son contenu selon différentes modalités : (i) ajouter une nouvelle entrée, (ii) mettre à jour une définition d’une entrée existante, (iii) participer à la validation de l’intégration de nouvelles entrées ou du rajout de nouvelles informations lexicographiques.
(d) Il est un espace virtuel dans lequel :
tous les mots, tant qu’ils appartiennent à la langue française, peuvent […] figurer. On trouvera donc des mots de nombreux pays francophones différents, des mots de la langue courante et des termes techniques, des insultes comme des compliments, des mots nouveaux aussi bien que vieux, et même des abus de langage ! Un même mot peut être écrit de diverses manières et chacune de ces formes pourra bénéficier d’une entrée distincte, dès lors qu’une existence est prouvée par des exemples d’usage21.
(e) Sur les plans technique et juridique, ses données lexicographiques sont des données ouvertes ; elles peuvent être réutilisées par tous les internautes.
(f) Il place toutes les variétés de la langue française sur un pied d’égalité. En fait, selon le DDF, chaque variété est définie comme une norme chez ses locuteurs.
(g) Il décrit les usages de la langue française quel que soit son statut : langue maternelle, langue d’usage, langue de scolarisation, langue officielle, etc.
30Il nous semble important de revenir sur les statuts des contributeurs. En fait, selon le site du DDF, les contributeurs, dits contributorat, se répartissent en trois catégories :
(a) Les contributeurs de la première catégorie peuvent ajouter de nouvelles entrées, proposer de nouvelles informations en intégrant des exemples, des citations ou des informations complémentaires, valider des informations provenant d’autres contributeurs notamment dans le cas où ces derniers habitent la même région.
(b) Les contributeurs de la deuxième catégorie sont des administrateurs ayant la possibilité de modifier ou de supprimer si c’est nécessaire un contenu (entrée, information ou définition).
(c) Les contributeurs de la troisième catégorie sont des opérateurs ayant comme rôle de solliciter la modification ou la suppression des données inappropriées.
Figure 2 : Page de la liste des contributions de chaque internaute
31Tous les contributeurs doivent créer leur propre compte personnel pour pouvoir collaborer à l’enrichissement du contenu du DDF. Pour ce faire, chaque contributeur doit fournir un nom d’utilisateur, un courriel, un mot de passe et le lieu de vie. Après la création de son compte, le contributeur sera invité à compléter son profil en fournissant les informations suivantes : genre, année de naissance, statut du français (langue maternelle, langue seconde ou étrangère, apprentissage adulte, apprentissage scolaire), autres langues parlées et champ d’expertise. Les contributeurs peuvent à tout moment modifier et mettre à jour les informations de leur profil, notamment le lieu de vie et le champ d’expertise. Finalement, par l’entremise de son espace personnel, chaque contributeur peut consulter la liste de ses contributions.
32Le DDF propose une interface de recherche dynamique permettant de trouver un mot tout en précisant dès le départ une région ou une zone géographique. Par conséquent, les résultats seront affichés par ordre de rapprochement à la zone indiquée dans la requête.
Figure 3 : La page de recherche de DDF
33Après être identifiés, les contributeurs peuvent commencer l’enrichissement du contenu du DDF en ajoutant une nouvelle entrée et sa définition, ou en ajoutant des informations, des exemples et des précisions à des entrées préexistantes.
Figure 4 : Instruction proposée par le DDF concernant la définition des entrées
34Pour ajouter une nouvelle entrée, le DDF aide le contributeur à vérifier que l’entrée en question ne figure pas déjà dans sa base de données. Ensuite, le contributeur est invité à proposer une définition. Une fois que cette dernière est rédigée, le contributeur sera invité à indiquer la région ou la zone géographique dans laquelle l’entrée est utilisée. Enfin, il sera demandé au contributeur de préciser la catégorie grammaticale, le genre et le nombre de l’entrée.
Figure 5 : Préciser la catégorie grammaticale de l’entrée
Figure 6 : Indiquer le genre et le nombre de l’entrée
35Pour accompagner les contributeurs, notamment ceux qui n’ont pas forcément une formation en lexicographie, le DDF explique comment rédiger une définition et comment les contributeurs peuvent créer des liens sémantiques entre les entrées si c’est nécessaire.
36Le DDF prévoit deux espaces de discussion : un espace pour la discussion autour de l’étymologie de l’entrée et un espace autour de son sens et usage. En fait, chaque entrée dispose de son propre espace de discussion. Par conséquent, chaque contributeur peut participer pour des entrées qu’il a ajoutées ou dans les espaces de discussion concernant les entrées crées par d’autres contributeurs.
37Par ailleurs, dans ce même espace, tous les contributeurs peuvent valider ou signaler des entrées, des définitions ou certaines informations des définitions par leur compte. Cela s’inscrit dans le cadre d’une démarche collective et collaborative d’évaluation et d’expertise du contenu du DDF.
Figure 7 : Validation, signalement de l'entrée et espace de discussion autour de son étymologie
38Étant donné que le DDF est conçu sous la forme d’une plateforme collaborative en ligne, il nous semble pertinent de repenser les champs à remplir pour la rédaction de la définition des entrées. En fait, avec la croissance importante des contenus audiovisuels en ligne, nous proposons d’alimenter les définitions lexicographiques du DDF par des ressources audiovisuelles qui attestent l’usage réel du français par les francophones dans le monde. Cela apporterait sans aucun une valeur ajoutée à la description du français tel qu’il est en usage dans la réalité, notamment en ce qui concerne les aspects phonétique, orthographique, syntaxique et contextuel.
39Cette proposition pourrait être concrétisée selon deux possibilités, à savoir :
(a) permettre aux contributeurs d’intégrer des liens hypertextes vers des contenus audiovisuels comme attestation ;
(b) permettre aux contributeurs d’insérer directement des contenus audiovisuels au moment de la rédaction de la définition comme fichiers attachés ou démonstration.
40Finalement, il serait également pertinent de repenser les modalités et les paramètres de recherche en prenant en compte la spécificité, la nature et la structure des informations présentées sous format audiovisuel.
41Le web 2.0 se distingue d’autres services en ligne par le fait qu’il encourage la formation des communautés virtuelles autour de centres d’intérêts différents. Dans le cas du DDF, la création d’une communauté virtuelle mobiliserait les contributeurs francophones et aiderait à garantir et maintenir leur engagement dans l’enrichissement de son contenu. Ainsi, dans le cadre de cette communauté, les contributeurs francophones pourraient se réunir et échanger autour des usages du français dans les différentes régions, ce qui permettrait ensuite d’identifier et de comparer les variations du français, notamment sur les plans phonétique, orthographique et sémantique.
42Comme le concours annuel d’orthographe organisé par le ministère français de la Culture, la tenue d’un concours annuel pour la communauté des contributeurs du DDF serait une occasion importante d’encouragement pour les membres, mais aussi de promotion du contenu du DDF. À titre d’exemple, les questions et les exercices du concours pourraient être préparés par les contributeurs eux-mêmes selon une démarche collective et collaborative.
43Pour promouvoir le contenu du DDF qui est déjà créé selon une licence libre, l’ouverture du DDF à des sites et des plateformes de traduction automatique valoriserait les contributions des internautes francophones et aiderait ces sites et plateforme de traduction automatique à accéder aux usages et aux variations du français selon de nouveaux paramètres sociolinguistiques et lexicographiques.
44La lexicographie traditionnelle et la lexicographie collaborative ne sont pas à comparer ni pour ce qui est des définitions ni pour la démarche ou même pour leur apport à l’épistémologique. Chacune a ses propres spécificités, ses propres acteurs, son propre public, sa propre démarche, ses propres objectifs et ses valeurs ajoutées à l’épistémologie.
45La lexicographie francophone collaborative a marqué le domaine lexicographique par le projet du DDF. Celui-ci représente en effet une volonté explicite d’évolution des notions et des pratiques lexicographiques.
46Si le DDF a réussi sur le plan technique à intégrer de nombreux services du web 2.0 pour instaurer des pratiques lexicographiques collaboratives, ces dernières exigent plus d’implication de contributeurs francophone dans la rédaction, l’enrichissement, la validation et la diffusion des contenus du DDF.
47Finalement, la culture véhiculée et incarnée par les services 2.0 dépasse le fait d’intégrer ces services dans une plateforme en ligne. La collaboration au sens strict du terme exige une implication efficace et durable de la part de tous les membres actifs de la communauté des collaborateurs en ligne.