Nathalie Thamin, Mohammed Zakaria Ali-Bencherif, Anne-Sophie Calinon, Azzeddine Mahieddine et Katja Ploog (dir.), Mobilités dans l’espace migratoire Algérie France Canada
Nathalie Thamin, Mohammed Zakaria Ali-Bencherif, Anne-Sophie Calinon, Azzeddine Mahieddine et Katja Ploog (dir.), Mobilités dans l’espace migratoire Algérie France Canada, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2019, 160 p.
Texte intégral
1L’ouvrage s’inscrit dans le cadre du projet scientifique CEM « Dynamiques spatiales, langagières, identitaires, de la circulation migratoire étudiante (Maghreb, France, Canada) ». Les enjeux du projet sont divers et de nombreux axes de réflexion soumis (p. 16). Il est le fruit d’une collaboration entre des chercheures françaises et des chercheurs algériens : Anne-Sophie Calinon, Nathalie Thamin, Katja Ploog, Mohammed Zakaria Ali-Bencherif et Azzeddine Mahieddine qui dirigent cet ouvrage.
2Huit contributions nous sont proposées, ancrées dans des champs disciplinaires variés et complémentaires. Si toutes interrogent la mobilité étudiante, l’éclairage se fait tour à tour selon un point de vue géographique, historique, anthropologique, sociologique ou sociolinguistique. Cette approche pluridisciplinaire permet d’envisager pleinement la complexité du phénomène des migrations étudiantes entre l’Algérie, la France et le Canada. Si quasiment toutes ont pour toile de fond les rapports politiques entre la France et l’Algérie liés par le passé colonial et postcolonial (sur lequel revient longuement l’introduction et qui pourrait constitué un fil rouge dans l’ouvrage), les différentes contributions nous proposent d’explorer la question des migrations étudiantes tant d’un point de vue théorique que contextualisé dans des terrains particuliers. Si certaines approches peuvent apparaitre plus ardues par leur grande spécificité, comme celle de Katja Ploog qui centre son analyse autour des énoncés employant le mot comme pour mettre en évidence la mobilité langagière des sujets migrants, chacun.e pourra suivre son propre chemin dans l’ouvrage afin d’explorer la riche complexité du sujet.
3Deux articles nous proposent des approches plus théoriques, celui de Mustapha Ali-Bencherif qui ouvre l’ouvrage et qui analyse les textes fondateurs de l’islam afin de proposer une typologie des mobilités se rapportant à la quête du savoir selon la tradition islamique. Anne-Sophie Calinon et Nathalie Thamin explorent la notion de mobilité linguistique en sociolinguistique afin de la conceptualiser. Elles convoquent une vision épistémologique et pluridisciplinaire autour de la notion de mobilité.
4Les autres contributions rendent compte de plusieurs recherches de terrain. Celle de François Corbier propose les éléments significatifs d’une enquête anthropologique menée sur les écoles privées francophones de Tizi Ouzou. Il y développe notamment le concept d’« exil immobile ». Son étude ne prétend pas répondre de manière catégorique à des questions bien trop profondes mêlant rapport au monde, aux langues et à soi sur toile de fond politique. Mohammed Zakaria Ali-Bencherif et Azzedine Mahieddine interrogent quant à eux les représentations sociales des espaces d’origine et d’accueil. Ils s’appuient pour cela sur une sélection d’entretiens semi-directifs réalisés avec des étudiants algériens à différentes étapes de leur mobilité. Ils nous montrent, sans grande surprise, comment l’expérience migratoire fait évoluer les représentations passant d’un discours enthousiasme (pré-migration) à un discours plus raisonné (post-migration).
5Wajih Guerria met en exergue un modèle de diglossie inédit conditionné par l’espace/temps du discours de référence et explore la notion d’« intensité diglossique ». Il est particulièrement intéressant de voir comment, dans ce contexte que nous pourrions nommer de diglossie institutionnalisée entre les langues en présence (français, arabe standard, arabe algérien et amazigh), les personnes s’efforcent de mettre en œuvre des stratégies qui à la fois échappent à des schémas diglossiques simplistes et protègent leur projet migratoire et professionnel. L’article de Constance De Gourcy place au centre de la réflexion sur les migrations estudiantines la question du retour ou plus précisément des retours (une typologie est proposée). Nous envisageons ainsi comment les projets migratoires peuvent être façonnés par ces retours.
6Loin d’un discours institutionnel politiquement correct, cet ouvrage nous permet d’entrevoir les différentes logiques, multiformes, parfois contradictoires mais toujours en mouvement, à l’œuvre dans les « choix » migratoires des étudiant.e.s et de leurs familles. Si les approches sociolinguistiques sont à l’honneur, la collaboration avec d’autres champs disciplinaires apporte une réelle ouverture. Le point fort de cet ouvrage est de proposer comme le souligne Sylvie Mazzera dans la conclusion « des pistes de réflexion fécondes ». Il permet également d’envisager une poursuite et un élargissement de la recherche au public étudiant non mobile.
Pour citer cet article
Référence électronique
Christine Perego, « Nathalie Thamin, Mohammed Zakaria Ali-Bencherif, Anne-Sophie Calinon, Azzeddine Mahieddine et Katja Ploog (dir.), Mobilités dans l’espace migratoire Algérie France Canada », Lidil [En ligne], 61 | 2020, mis en ligne le 02 mai 2020, consulté le 12 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lidil/7591 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lidil.7591
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