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Notes de lecture

Christine Bister et Jean-Louis Dumortier (dir.), Conversations. Des dispositifs didactiques pour apprendre à distinguer les facteurs de réussite ou d’échec des interactions verbales quotidiennes

Namur, Presses universitaires de Namur, 2017, 218 p.
Sílvia Melo-Pfeifer
Référence(s) :

Christine Bister et Jean-Louis Dumortier (dir.), Conversations. Des dispositifs didactiques pour apprendre à distinguer les facteurs de réussite ou d’échec des interactions verbales quotidiennes, Namur, Presses universitaires de Namur, 2017, 218 p.

Texte intégral

1L’ouvrage de Bister et Dumortier présente, de façon originale et argumentée, avec un langage rigoureux et un détail presque « forensic », l’analyse de conversations extraites de romans : « Les invités » (P. Assouline), « La femme du dimanche » (C. Fruttero et F. Lucentini), « Dolce Vita 1959-1979 » (S. Greggio), « Le fond de la bouteille » (G. Simenon), « Une pièce montée » (B. Le Callet), « L’intéret de l’enfant » (I. McEwan), « Le week-end » (B. Schlink). Ces extraits permettent aux auteurs d’illustrer les enjeux des conversations dites ordinaires « par le truchement d’œuvres littéraires » (p. 8), en se penchant sur les échanges entre leurs personnages. Mettant en relief le rôle du scénario et du contexte (aussi bien micro qu’historique), les auteurs montrent ce qui se joue dans l’arène de l’interaction : l’interdépendance de tous les interlocuteurs, de leurs mots, du para- et du non-verbal ainsi que du non-dit. Par là même, ils mettent en évidence que l’interaction n’est pas « un long fleuve tranquille » (p. 22).

2Ainsi, comme dans la conversation dans la vie réelle, ils analysent la coresponsabilité énonciative dans les interactions fictionnelles et montrent que « toute prise de parole est réaction à la prise de parole d’un tiers, toute écoute prend en considération l’écoute d’un tiers » (p. 11). Néanmoins, « les participants ne sont pas des juxtapositions d’allocutions où les énonciateurs parlent comme si nul n’avait rien dit avant eux ou comme s’ils n’avaient rien entendu de ce qui s’est dit » (p. 11). Autrement dit, les auteurs mettent en avant tout effort de coordination ainsi que la nécessaire coconstruction du sens et des intentions dans l’interaction verbale… réussie. En effet, les extraits illustrent, par un effet de loupe, la tessiture de l’incompréhension, du malaise conversationnel, l’inversion de places et de rôles dans et pendant l’interaction. L’ironie et l’humour de certaines séquences contrebalancent le malaise, le cynisme et l’agacement des autres. Dans ces extraits, « ce qui est donné à comprendre n’est pas (mais n’en est pas moins communiqué), il faut tenir compte de la situation et de la manière de dire autant que de ce qui est dit ! » (p. 13).

3Le choix de situation de rupture conversationnelle ou de rupture éminente est justifié par le fait que « ces incidents sont susceptibles d’empêcher ou de faciliter la poursuite de la coconstruction de sens, d’arrêter ou de dévier la circulation de l’information, de distendre ou de couper, de serrer ou de rétablir le lien social, bref de déterminer l’issue de la communication » (p. 23). Les auteurs illustrent minutieusement l’évolution inéluctable du malentendu, de la rupture, voire de la ruine des interlocuteurs, à l’aide de l’autopsie de leurs dits et de leurs non-dits, d’une analyse millimétrique des sous-entendus et de tous les pas menant à la « perte » des interlocuteurs. Concernant le choix d’interactions discursives fictionnelles, les auteurs se réfèrent au fait que les textes littéraires, n’offrant pas une imitation de la réalité conversationnelle, offrent néanmoins des interactions vraisemblables où il est possible de détacher et d’analyser certains aspects en profondeur. De plus, l’étude de ces interactions permet l’analyse de la dimension pragmatique du langage et de la littérature dans sa dimension linguistique, avec une « attention systématique à l’usage que font les écrivains du système » (p. 21).

4Reste à signaler d’autres aspects positifs de l’ouvrage s’adressant « à des enseignants de français » (langue maternelle ?) : la structure homogène de tous les chapitres qui suivent la même logique de présentation et d’analyse (présentation de l’ouvrage et de la séquence, transcription de la séquence objet d’analyse, discussion entrecoupée d’exemples et propositions de tâches) ; la mise en relief des concepts considérés les plus importants pour poursuivre l’analyse de la séquence (concession, offense, face, territoire, ascendant, position, polylogue…) ; et, effet corollaire du point précédent, la présentation d’un glossaire, en fin d’ouvrage, permettant d’éclaircir les doutes terminologiques du public cible. En conclusion, il s’agit d’un ouvrage qui dépasse l’analyse stricte de ce qui est « dit » dans le texte littéraire, allant au-delà du linguicisme de quelques propositions de travail avec le texte littéraire. En approchant le littéraire du vécu quotidien, cet ouvrage développe la conscience critique des apprenants de français quant au discours et à l’interaction.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Sílvia Melo-Pfeifer, « Christine Bister et Jean-Louis Dumortier (dir.), Conversations. Des dispositifs didactiques pour apprendre à distinguer les facteurs de réussite ou d’échec des interactions verbales quotidiennes »Lidil [En ligne], 58 | 2018, mis en ligne le 02 novembre 2018, consulté le 11 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lidil/5289 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lidil.5289

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