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Notes de lecture

James Archibald et Stéphanie Galligani (dir.), Langue(s) et immigration(s) : société, école, travail, Paris, L’Harmattan, 2009, 289 p.

Marine Totozani
p. 186-188

Texte intégral

1Le recueil Langue(s) et immigration(s) : société, école, travail, réunit sous un titre éloquent des contributions d’auteurs français et canadiens appartenant à différents horizons. Il nous place d’emblée au cœur d’un questionnement sur les rapports entre la langue et l’intégration des migrants, qui s’articule autour de deux axes : le rôle de la langue dans l’établissement et l’intégration réussie des migrants au sein des sociétés d’accueil, et la lutte contre les discriminations produites du fait des différences culturelles et linguistiques entre les migrants et ces mêmes sociétés. Cette double interrogation sur la langue se reflète dans l’organisation de l’ouvrage en deux volets : le premier est consacré aux enjeux sociaux et identitaires, alors que le deuxième se focalise sur les enjeux socioéducatifs et professionnels. Quatre chapitres, équilibrés et pertinents, prennent pour cible tour à tour les enjeux de l’intégration, les approches institutionnelles de l’intégration en France et au Québec, l’intégration par la langue et les enjeux socioéducatifs, et la langue comme compétence socioprofessionnelle, en dévoilant au fil des pages les multiples facettes d’un champ fécond où l’interdisciplinarité semble particulièrement de mise.

2Mais, avant d’aborder la problématique complexe des liens indissolubles entre la langue et l’intégration, une définition de « l’intégration » s’impose. C’est ce que se propose de faire D. Schnapper qui met l’accent sur deux dichotomies révélatrices : celle entre politiques d’intégration et processus d’intégration d’une part, et celle entre intégration structurelle et intégration culturelle d’autre part. En soulignant que ce ne sont pas tant les caractéristiques des migrants qui sont en jeu que celles de la société dans laquelle il importe qu’ils s’intègrent, elle semble annoncer dans le même mouvement le volet consacré aux enjeux sociaux et identitaires.

3Langue et discrimination se côtoient constamment, tout au long des analyses de situations ou de questions parfois très particulières qui constituent le premier volet de l’ouvrage. C’est ce qui apparait à travers la notion de « linguicisme », définie par J. Archibaldcomme un phénomène de discrimination linguistique tantôt ouverte, tantôt voilée, à l’égard de ceux et de celles qui ne maitrisent pas la langue du pays d’accueil ou qui la parlent autrement. Et pour peu qu’il revête des formes officielles, on imagine facilement les retombées de ce phénomène sur les questions identitaires. Discrimination dans les pays d’accueil, mais les pays d’origine n’échappent pas non plus à certaines formes de discrimination linguistique, comme le montrent les rapports qui existent entre diverses langues africaines, les privilèges associés à la connaissance de certaines langues dominantes au détriment d’autres langues, les formes d’appropriation des langues, les débouchés professionnels, le domaine de l’écrit – apanage de certaines langues, etc.

4La langue constitue en même temps un facteur incontournable dans le processus d’intégration et joue un rôle important dans la cohésion sociale. C’est autour de ce paradigme que le deuxième volet s’organise : « L’intégration par la langue » et les enjeux socioéducatifs et professionnels qui en découlent. Dans le cas de deux États ayant le français en partage comme la France et le Québec, l’accent est mis sur l’importance de l’apprentissage du français en tant que langue de communication, mais aussi en tant que langue de scolarisation et comme une véritable compétence socioprofessionnelle. Cette perspective traverse tous les textes de ce volet où, après la présentation des politiques linguistiques et des dispositifs institutionnels mis en œuvre pour l’accueil et l’intégration des migrants, la parole est donnée aux enquêtes et aux études de terrain. Celles-ci ne manquent pas de dénoncer les carences du système éducatif français dans l’accueil des mineurs étrangers isolés par exemple, ni de soulever des questions susceptibles d’agir sur l’amélioration des performances linguistiques des migrants, telles que la prise en compte des différences culturelles et linguistiques ou l’importance d’une didactique de l’oral adaptée aux nouveaux contextes communicationnels.

  • 1 J.-C. Beacco, « Les idéologies linguistiques et le plurilinguisme », dans Le français dans le monde(...)

5Au-delà des situations, acteurs, concepts, dispositifs, approches, etc., sollicités par l’étude de l’immigration, à travers la nécessité de « revisiter l’ensemble des conceptions sous-jacentes à la politique française des langues » (J.-L. Chiss), ce sont les idéologies linguistiques et culturelles mêmes qui sont interpellées. La priorité accordée à l’apprentissage de la langue du pays d’accueil doit s’articuler avec le maintien des liens avec les langues et les cultures d’origine et, à ce titre, comme le souligne J.-C. Beacco, « le plurilinguisme n’est pas une idéologie linguistique “comme les autres”1 ».

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Notes

1 J.-C. Beacco, « Les idéologies linguistiques et le plurilinguisme », dans Le français dans le monde, no 314, 2001.

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Pour citer cet article

Référence papier

Marine Totozani, « James Archibald et Stéphanie Galligani (dir.), Langue(s) et immigration(s) : société, école, travail, Paris, L’Harmattan, 2009, 289 p. »Lidil, 42 | 2010, 186-188.

Référence électronique

Marine Totozani, « James Archibald et Stéphanie Galligani (dir.), Langue(s) et immigration(s) : société, école, travail, Paris, L’Harmattan, 2009, 289 p. »Lidil [En ligne], 42 | 2010, mis en ligne le 31 mai 2012, consulté le 01 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lidil/3097 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lidil.3097

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Auteur

Marine Totozani

CELEC et Université Jean Monnet – St-Étienne

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Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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