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Notes de lecture

Julie Lefebvre, La note de bas de page dans les imprimés contemporains

Limoges, Lambert-Lucas, Université de Lorraine / Crem, coll. « Études linguistiques et textuelles », 2022, 280 p.
Cécile Jullion
Référence(s) :

Julie Lefebvre, La note de bas de page dans les imprimés contemporains, Limoges, Lambert-Lucas, Université de Lorraine / Crem, coll. « Études linguistiques et textuelles », 2022, 280 p.

Texte intégral

1L’ouvrage de Lefebvre, La note de bas de page dans les imprimés contemporains, comprend cinq chapitres auxquels s’ajoutent une bibliographie fournie ainsi que huit annexes dont une description détaillée du corpus d’étude et un index numérique des exemples. L’auteure, maitresse de conférences en sciences du langage à l’Université Paris Nanterre et spécialiste de la linguistique de l’écrit, fait preuve d’une rigueur scientifique et rédactionnelle tout à fait bienvenue : la définition des concepts, scrupuleuse, ainsi que les très nombreux exemples mentionnés en guise d’illustration rendent accessible à un plus large public un livre qui, de prime abord, parait réservé aux seuls spécialistes en sciences du langage. L’objet d’étude de l’ouvrage — aussi incongru semble‑t‑il —, la note de bas de page, est abordé en cinq parties dont les titres sont nommés à partir d’une lexie unique, un verbe à l’infinitif, décrivant chacune une fonction et apportant un éclairage nouveau sur la note de bas de page : Situer, Appeler, Articuler, Énoncer et Discourir.

2Le corpus sur lequel se fonde l’étude se compose de 1 000 structures bilinéaires réunies au début des années 2000 dans le cadre de la thèse de doctorat de l’auteure et définies en tant que l’ensemble formé par « la note et la portion du corps du texte avec laquelle elle est en relation et où s’inscrit l’appel de note » (p. 22). Dans la grande variété qui caractérise l’univers des notes (note en marge, note de fin d’article, note de fin de livre, etc.), c’est à la note de bas de page que Lefebvre choisit de consacrer son ouvrage, et plus précisément à un type de note : les notes appelées. La problématique est en outre clairement formulée : il s’agit de comprendre « comment l’attention portée aux spécificités syntaxiques et énonciatives des notes appelées dans les textes permet de caractériser des genres discursifs et des écritures singulières » (p. 23).

3Ces 1 000 structures bilinéaires sont issues d’écrits imprimés rédigés en français et publiés entre 1970 et 2004 qui relèvent de genres discursifs divers. Afin de faciliter l’étude linguistique de cette masse de données très hétérogène, le corpus est divisé en deux sous‑corpus : d’une part sont analysées les structures bilinéaires d’écrits de différents types (écrits littéraires, biographiques, etc.) extraites de livres ; d’autre part sont traitées les structures bilinéaires réalisées sur un support autre que le livre tels que les écrits de presse, les écrits promotionnels, les écrits commerciaux — groupe qui inclut, et c’est là toute l’originalité de la recherche menée par Lefebvre, les étiquettes et les emballages alimentaires —, ou encore les écrits militants. Parmi l’ensemble de l’ouvrage, le chapitre 2 a piqué notre curiosité, notamment pour la réflexion menée sur un domaine de la recherche encore peu exploré, celui de la ponctuation. Dans ce chapitre, la chercheure analyse le statut de l’appel de note considéré comme un signe de ponctuation. Pour ce faire, est entre autres défini « l’appel-renvoi de note » (p. 81) qui consiste en l’association du signe d’appel de note avec celui de renvoi de note, l’ensemble qui en résulte formant une paire. Parmi les signes de ponctuation, Lefebvre (citant l’ouvrage de Catach, La Ponctuation) explique qu’il en existe trois catégories principales : les signes « fermants », « orientés vers ce qui vient d’être écrit », les signes « ouvrants », « tournés vers ce qui suit » et une troisième catégorie réservée aux signes « neutres » ou signe « janus » (p. 87) qui possèdent les deux orientations et à laquelle appartient l’appel-renvoi de note. En outre, celui‑ci est considéré dans son rôle d’articulateur de deux chaines graphiques distinctes : respectivement, celle de l’appel de note dans la chaine graphique première appelée également « corps du texte » (p. 90) et celle du renvoi (ou rappel) de note dans la chaine graphique seconde qui, en l’occurrence, contient la note. Un schéma (p. 90), très éclairant pour le lecteur néophyte, de la structure textuelle bilinéaire ainsi formée est proposé pour rendre compte de ce modèle théorique et de nombreux exemples illustrant ce concept novateur sont mentionnés. Le chapitre se clôt sur une question délicate — mais ouvrant sur des perspectives de recherche prometteuses — qui concerne le lien existant entre notes et parenthèses : est interrogée pour cela leur fonction respective, la « fonction syntagmatique » de l’appel-renvoi de note et la « fonction d’insertion » (p. 96‑97) de la parenthèse et du tiret double, l’enjeu étant de déterminer « si la zone du corps du texte qui succède à l’appel de note est le lieu de phénomènes qui témoigneraient […] d’une rupture de la syntagmatique du corps du texte, conséquence de l’insertion d’un élément décroché » (p. 97). Deux cas d’étude sont envisagés, qui pourraient provoquer cette rupture : la « relance syntaxique » et « l’accord » (p. 97). Les résultats obtenus à l’issue de l’analyse permettent de conclure que l’appel-renvoi de note se rapproche davantage des deux points, du point-virgule et du trait d’union que des parenthèses, ce qui remet en question son rôle d’articulateur qui sera décrit dans le chapitre 3.

4En résumé, l’ouvrage de Lefebvre, bien que spécialisé dans un domaine particulier des sciences du langage, s’adressant par là même à un public averti, est particulièrement novateur pour le champ de la recherche en linguistique de l’écrit. On ne soupçonnerait pas, en effet, l’importance de la note de bas de page et du petit signe qui lui est accolé, en l’occurrence un astérisque, dans la façon d’appréhender l’espace graphique qu’est la page.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Cécile Jullion, « Julie Lefebvre, La note de bas de page dans les imprimés contemporains »Lidil [En ligne], 69 | 2024, mis en ligne le 01 mai 2024, consulté le 06 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lidil/12469 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lidil.12469

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Auteur

Cécile Jullion

Univ. Grenoble Alpes, CNRS, Litt&Arts, 38000 Grenoble, France

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