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Notes de lecture

L’argumentation

PUF Coll., Plantin Christian, 2005, « Que sais-je ? », 127 p.
Jean-Marc Colletta

Full text

1Mieux que son titre : « l’argumentation », son sous-titre : « Histoire, théories et perspectives » éclaire sur le contenu de cet ouvrage édité dans la collection « Que sais-je ? ».

2Le premier chapitre est effectivement de nature historique. Après avoir été considérée, de l’antiquité grecque jusqu’à la fin du xixe siècle, comme un art lié à la logique (bien penser), à la rhétorique (bien parler) et à la dialectique (bien dialoguer), l’argumentation est devenue, au siècle dernier, un objet d’étude en soi. L’auteur retrace les étapes de cette évolution, qui passe par le déclin de la rhétorique face à la montée en puissance du discours scientifique positiviste, puis, en réaction aux discours des totalitarismes nazis et staliniens, par une interrogation sur les conditions de la rationalité du discours et les contraintes langagières fondant la pratique argumentative.

3Suivent deux chapitres consacrés aux principales approches de l’argumentation. Dans le chapitre deux, il est d’abord question du modèle de Toulmin, qui identifie les composantes explicites (donnée, arguments, conclusion…) et non explicites (la « loi de passage ») du discours argumentatif. Sont ensuite évoquées l’approche de Ducrot et Anscombre, réflexion sur les contraintes langagières qui pèsent sur le discours argumentatif à travers notamment l’orientation argumentative, et celle de Grize où l’argumentation, définie comme une « schématisation », est étudiée en tant que mode de construction des objets de pensée. Le troisième chapitre débute par un bref rappel du contenu du Traité de l’argumentation de Perelman et Olbrechts-Tyteca, tentative de fonder l’étude de l’argumentation sur la mise au jour des techniques argumentatives. Christian Plantin développe ensuite les notions centrales « d’enthymème » et de « topos » (toute argumentation s’appuie sur des inférences et mobilise un discours sous-jacent : loi de passage, syllogisme tronqué ou lieu commun) avant de présenter quelques typologies des arguments.

4Le quatrième chapitre donne l’occasion à l’auteur d’exposer un « modèle dialogal » de l’argumentation, modèle dans lequel sont réinjectées les notions et connaissances en provenance de la pragmatique et de l’étude du dialogue : polyphonie et intertextualité, contradiction et désaccord, proposition et opposition… L’auteur s’attarde sur ce qui, pour lui, fonde l’essence de l’argumentation : la « question », et sur les rôles actantiels de « proposant », « d’opposant » et de « tiers » qui en permettent l’actualisation et le traitement, dans le discours dialogué comme dans le discours monologué. Suivent deux chapitres dans lequel il explore les implications de ce modèle, en s’interrogeant d’abord sur la distinction classique entre argumentation et démonstration, puis sur le statut à accorder à « l’ethos » et au « pathos », c’est-à-dire aux paramètres énonciatifs et émotionnels de la pratique argumentative. Le dernier chapitre esquisse une approche comparée de l’argumentation en décrivant quelques aspects de l’argumentation théologique et juridique dans l’islam.

5Traiter de l’argumentation dans les 128 pages de la collection « Que sais-je » tient de la gageure. Christian Plantin relève habilement le défi, mais au prix d’un texte qui demeure pourtant un peu abstrait : le lecteur manque d’exemples pour se familiariser avec les nombreuses notions abordées. Par ailleurs, la complexité intrinsèque de l’argumentation, qu’on peut saisir aussi bien comme raisonnement achevé que comme activité cognitive, comme texte que comme genre textuel, comme discours que comme activité de parole, rend parfois difficile, dans certains passages, de situer les notions et de comprendre leur articulation.

6Au final et en dépit de ces réserves mineures, le lecteur désireux de connaître rapidement les théories de l’argumentation et les principales notions du domaine trouvera là un ouvrage très utile, et grâce à plus de trois pages de références, suffisamment documenté pour aller chercher ailleurs de quoi approfondir ses connaissances. Si c’était là l’objectif de l’auteur, il est pleinement atteint.

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References

Electronic reference

Jean-Marc Colletta, “L’argumentation”Lidil [Online], 32 | 2005, Online since 18 July 2007, connection on 04 December 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lidil/116; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lidil.116

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About the author

Jean-Marc Colletta

Université Stendhal-Grenoble 3 (Laboratoire Lidilem) et Iufm.

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