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Guillaume Duval, La France d’après. Rebondir après la crise

Laurence Harang
La France d'après
Guillaume Duval, La France d'après. Rebondir après la crise, Paris, Les Petits Matins, 2011, 339 p., ISBN : 9782915879902.
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Texte intégral

1A-t-on raison de se montrer pessimiste devant l’ampleur de la crise européenne ? Ne peut-on pas redouter l’ère de la mondialisation et ses conséquences pour le Vieux Continent ? Enfin, la dérégulation en matière de finance mondiale ne constitue-t-elle pas une raison de désespérer ? A ces questions, Guillaume Duval, rédacteur en chef du magazine « Alternatives économiques », entend analyser les causes profondes de cette crise européenne.

2D’emblée, la réponse s’impose par sa clarté : « Le pire n’est inéluctable ni en France ni en Europe, même si nous avons du pain sur la planche pour réussir à l’éviter. (p. 11) Il faut donc trouver des remèdes pour sortir de ce qui ne peut être une fatalité à condition de repenser le fonctionnement de l’Union européenne et de mieux mesurer l’enjeu économique des pays émergents. Il va de soi qu’il est nécessaire de revoir sérieusement l’organisation voire « l’inadéquation » de l’Union européenne.

3La structure du livre est très pédagogique et très instructive : dans les cinq premiers chapitres, l’auteur montre que la crise en Europe n’est pas seulement une crise financière mais une crise sociale et environnementale. Il faut donc favoriser une politique « coopérative » et solidaire. Ensuite, dans les quatre chapitres suivants, Guillaume Duval tente de saisir la spécificité de la France par rapport au reste de l’Europe : elle semble mieux lotie que ses voisins européens en partie notamment à la stabilité de ses dépenses publiques. L’erreur consisterait à baisser le coût du travail, réduire les indemnités des chômeurs… La solution – si elle doit exister – serait de passer à une « conversion écologique «  de l’économie afin de créer des emplois. Dès lors, comme le soutient l’auteur dans le chapitre suivant, il serait vain de prendre l’Allemagne comme modèle de l’économie par excellence ! En effet, le rapport réalisé par le ministère de l’Economie en janvier 2011, recommandait de « mettre un terme à la divergence de compétitivité entre la France et l’Allemagne. »

4Il serait faux de prétendre que la crise - comme on l’entend souvent - est une crise financière : la mondialisation a conduit à un changement radical des pays du Sud. En effet, les écarts de revenu se sont accentués et ont aggravé la pauvreté. C’est pourquoi, cette mondialisation est souvent vécue sur le mode de l’échec au Nord comme au Sud. Dès lors, l’Europe en désespoir de cause n’a pas trouvé mieux que de pratiquer « la chasse à l’étranger ». Mais c’est surtout l’économie des pays pauvres comme l’Afrique qui est en cause : la distribution des richesses ne peut avoir lieu faute d’une politique affichée de partager les revenus des classes favorisées par le biais des impôts. Au Nord, ce sont les multinationales qui ne cessent inexorablement de favoriser le jeu effréné de la concurrence au mépris des salaires et du bien-être des populations. On assiste donc à un déséquilibre de l’économie mondiale puisque la production des pays du Sud est plus importante que la consommation. Et c’est ainsi que les Pays du Sud par leur « épargne excédentaire » favorisent les pays du Nord.

5A ce tableau noir de la gouvernance mondiale, on peut déplorer la sur-consommation américaine qui par le biais de la crise des subprimes a déséquilibré l’économie mondiale. Ainsi, le principal danger de cette crise est la dérégulation qui a conduit à un dérèglement de la finance. Citons les propos de l’auteur : « Et tout l’enjeu de la sortie de crise, c’est non seulement de faire rentrer le diable de la finance régulée dans sa boîte, mais aussi, et surtout, de rééquilibrer durablement l’économie mondiale. » (P 40).

6Comment alors l’Europe peut-elle relever ce défi ? L’Europe précisément traverse une crise « écologique » Elle affronte en effet des difficultés liées à l’environnement qu’elle peut résoudre. Il ne faut pas oublier que le Vieux Continent est en mesure d’accélérer sa conversion écologique de par ses technologies avancées. Faute de matière première, l’Europe doit se résoudre à trouver ses richesses en son propre fonds. Il est dès lors possible de concilier une conversion écologique en Europe avec un développement des pays émergents.

7Certes, on pourrait penser que la forteresse de l’Europe est fort peu de chose face à la Chine et aux Etats-unis d’Amérique. Mais le remède est à chercher dans les relations entre européens. La concurrence de « tous contre tous » ne peut consolider l’Europe face au monde. L’auteur montre avec raison que les Etats membres ne sont pas prêts à renoncer à leur souveraineté mondiale au profit « d’instances européennes qui disposeraient de moyens autres que réglementaires pour agir de façon discrétionnaire dans certains domaines. » (P81).

8Un exemple s’impose : face à l’endettement de la Grèce, il aurait été nécessaire de rembourser les crédits de ce pays afin d’éviter une faillite des banques. La cohérence de l’Union européenne repose sur une autre manière de coordonner les politiques nationales. Il est évident que l’aide apportée à la Grèce, à l’Irlande devrait éviter une révolte des pays lourdement endettés. A ce titre, G .Duval recommande à l’Europe de ne pas se montrer « anti-sociale ». C’est pourquoi, il faut lutter contre les égoïsmes nationaux : l’Europe doit disposer d’un « corpus juridique » et doit parvenir à une harmonisation fiscale.

9Il est vrai que la conversion écologique de l’économie devrait permettre de créer des emplois. Il ne faut donc pas se tromper de combat et penser qu’une politique protectionniste pourrait résoudre les maux dont souffre l’Union européenne. La question est bien de savoir s’il faut penser en termes de « rapprochement des peuples » ou de « concurrence déloyale ». Or, les politiques environnementales – on peut citer les quotas d’émissions de gaz à effet de serre – pourraient assurer un système de redistribution équitable : «  A l’échelle européenne comme mondiale, l’écologie peut être un puissant vecteur d’intégration, de régulation et de redistribution qui nous permette de sortir de l’anomie marchande et libérale. » (P 130).

10En France comme en Europe, la conversion écologique de l’économie constitue une nécessité.  Il est temps de mettre fin à la concurrence de tous contre tous ; il est temps de venir en aide aux pays endettés de la zone euro. L’auteur se garde bien de toute attitude résignée et pessimiste face à la crise que traverse l’Europe. Il reste qu’il faut une politique à la mesure des enjeux du XXIème siècle : le bonheur des peuples en dépend.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Laurence Harang, « Guillaume Duval, La France d’après. Rebondir après la crise », Lectures [En ligne], Les comptes rendus, mis en ligne le 01 juillet 2011, consulté le 12 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lectures/5951 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/lectures.5951

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