• 1 Encore récemment P.-L. Brisson, Le moment unipolaire : Rome et la Méditerranée hellénistique (188-1 (...)
• 2 Ancient History from Below. Subaltern experiences and actions in context, C. Courrier, J.C. Magalhã (...)
• 3 Provinces and Provincial Command in Republican Rome. Genesis, development and governance, A. Díaz F (...)
• 4 Administrer les provinces de la République romaine (Actes du colloque de l'Université de Nancy II, (...)
• 5 G.D. Baker, Spare no one. Mass violence in roman warfare, Lanham, Rowman & Littlefield, 2021.
• 6 A Culture of Civil War ? Bellum civile and political communication in Late Republican Rome, H. Börm (...)

Les débats entourant la question de l’impérialisme romain1, les nouvelles interrogations nées des apports des subaltern studies2, la question des conséquences institutionnelles de la mise en place des gouvernements provinciaux3, la constitution de ces provinces en espaces de prédation dont purent bénéficier les élites italiennes et romaines aussi bien que les soldats et membres des couches sociales plus modestes4, la brutalisation de la société romaine5, l’émergence des grands commandements et de la figure de l’imperator, et in fine des guerres civiles6, sont quelques-unes des thématiques attachées à la question des rapports entre Rome et son empire, et qui nourrissent aujourd’hui encore dans l’historiographie contemporaine d’importants débats, impulsant un constant renouvellement historiographique.

• 7 B. Augier, « Introduction : pour une “crisologie” tardo-républicaine », Cahiers du Centre Gustave G (...)

Cependant, et paradoxalement, le concept de crise, généralement appliqué aux dernières décennies de la période républicaine, est habituellement mobilisé comme clef de compréhension de cette période dans une perspective essentiellement romano, voire italiano-centrée. Objets de récentes publications et rencontres scientifiques, notamment d’un cycle de colloques organisés par M. Bats, J.-C. Lacam et R. Laignoux (Université Paris I Panthéon-Sorbonne), les crises tardo-républicaines, conçues comme des phénomènes complexes, dotées de multiples aspects concomitants, conduisant à des changements et susceptibles de conduire à des transformations d’ensemble d’un système7, ne sont que fort rarement abordées du point de vue provincial. Les prouinciae étaient en effet souvent perçues comme de simples caisses de résonance des affrontements qui avaient lieu dans l’Urbs, situation dont les guerres civiles, qui eurent pour théâtre l’ensemble du monde méditerranéen, ne furent finalement que le paroxysme.

• 8 C. Moatti, Res publica. Histoire romaine de la chose publique, Paris, Fayard, 2018.

Le dossier qui sera proposé à la revue Kentron s’insère dans le cadre du projet CRRITIC (Crises de la République romaine : identités, transformations, imaginaires et conflits) porté par B. Augier, bénéficiaire d’un financement « Étoile montante » de la région Pays de la Loire. Il ambitionne de restituer toute leur importance aux multiples crises que connut la République romaine entre le II^e et le I^er siècle av. J.-C., en accordant une place centrale à l’événement, pour s’interroger sur les antagonismes qui parcouraient la cité, mais aussi sur les évolutions que connut Rome, alors en proie à des troubles qui dégénérèrent en guerres civiles. Les crises sont abordées dans cette perspective comme des facteurs de transformations majeures, ce qui place au centre de la réflexion une conception plurielle de la res publica, en perpétuelle reconfiguration8.

• 9 F. Cadiou, Hibera in terra miles. Les armées romaines et la conquête de l’Hispanie sous la Républiq (...)

Il s’agit de porter une attention particulière aux provinces d’Occident, un choix qui s’explique d’abord par le fait qu’il s’agit là de l’espace de domination le plus ancien, qui émergea suite à la réduction en provinces de la Sicile, puis de la Sardaigne et de la Corse après la première guerre punique. Par ailleurs, l’étude des provinces occidentales a connu un regain d’intérêt depuis le début des années 2000 et de nombreux travaux, à l’instar de ceux de F. Cadiou et de N. Barrandon pour l’Hispanie, ont permis de mieux appréhender les équilibres politiques et sociaux de ces provinces9. C’est pourquoi il s’agira de faire la part des multiples formes d’organisation politique et de la diversité culturelle des populations de ces provinces occidentales, en adoptant une vision résolument dynamique et centrée sur l’impact des événements critiques sur leur histoire particulière.