1L’ouvrage de 75 pages de Pierre Zürcher : Le besoin de musique. Compréhension et usages pédagogiques de l’énergétique musicale de l’enfant, regroupe quatre textes écrits entre 2017 et 2023, qui constituent les quatre chapitres du livre. L’ensemble développe une réflexion sur la pédagogie de la musique, appuyée sur une proposition théorique (chap. 1 et 2) et des observations dans le domaine de la musique (chap. 3) et de la parole (chap. 4).

2La pédagogie de la musique y est pensée comme un humanisme : la musique (avec le langage et la pensée posturale) participe des conduites de partage, cœur de l’humanisation. Les objets culturels (en tant qu’agents d’un mode de penser le monde) se construisent par le partage actif, de la simple participation initiale jusqu’à la co-productivité complète (avec gestion de la conduite par les objets culturels intériorisés). Du fait que l’activité musicale mobilise essentiellement des mécanismes généraux, tout être humain est apte à développer des compétences musicales dans l’interaction avec ses congénères.

3Les dynamiques d’interactions qui nous déterminent sont originellement le produit d’un espace primordial de partage, qui délimite un espace de quiétude. Le besoin de musique résulte du produit de ces interactions qui, appropriées par l’enfant, lui permettent de prolonger par lui-même cet espace.

4Les trois temps de l’appropriation musicale vont de l’inclusion dans un groupe social, jusqu’au choix d’un instrument (vers 6-7 ans), en passant par l’initiation musicale, objet de l’approche pédagogique de l’ouvrage.

5Dans une perspective piagétienne, le développement musical est présenté dans la visée de la construction progressive d’un groupe opératoire de partage, allant de l’appétence première pour l’interactivité à la gestion des invariants concrets, jusqu’aux invariants abstraits de la pensée opératoire. Les observations illustrent les cheminements de ce processus d’intégration, avec des mécanismes d’abord additionnels ou des automatismes d’alternances, et les oscillations entre action et représentation ou entre le visuo-moteur et le verbal. Mais ce processus d’intégration ne pourrait finalement être compris qu’inscrit dans la dynamique affective de la relation à l’autre. Ainsi, certaines différences observées pourraient résulter, outre de la vicariance, de la manière dont le sujet investit l’espace de partage. En ce sens, l’apprentissage musical devrait être pensé non pas seulement du point de vue des processus cognitifs mais de la manière dont un système vivant essentiellement social élabore un espace coconstruit d’habitabilité par un je-autre.

6Telle quelle, la théorie présentée par Pierre Zurcher s’inscrit dans les perspectives les plus actuelles en psychologie et apprentissage de la musique. Nul doute que ce livre, émaillé d’observations tirées de l’expérience d’enseignement de l’auteur, constitue une source riche de réflexions et de données, à même de soutenir la pensée didactique de l’enseignement de la musique.