• 1 Pour plus de détails, Xavier Nerrière, « Algérie 1900, faute de mieux », 303 – Photographie 1842-20 (...)

2Le négatif, saturé de lumière par endroits, fait partie d’un lot de 196 pièces, essentiellement des supports souples de 6 cm × 9 cm, et quelques plaques de verre, réalisés à l’aube du XX^e siècle. L’origine de ce fonds, conservé par le Centre d’histoire du travail, à Nantes, reste assez énigmatique1, mais il présente une certaine unité dans son approche documentaire de la société de l’époque.

• 2 Nous reprenons ici les dénominations utilisées dans les légendes manuscrites, correspondantes aux a (...)

3Le ou les auteurs – cette question n’est pas réglée – sont probablement des étudiants « européens » nés en Algérie. Les quelques dates et mentions de lieux sur les papiers « d’emballage » laissent imaginer que ces jeunes gens sont venus, baccalauréat en poche, poursuivre des études de lettres en métropole, vers 1900. Leurs photographies nous font voyager entre Rouen, Le Havre, la région parisienne, Lyon, Alger, Constantine2, Bougie, Kairouan (en Tunisie).

• 3 Eugène Atget [1857-1927] est l’un des précurseurs de la photographie documentaire en France, il est (...)

4Pour quelqu’un qui a la charge d’un tel fonds, il est toujours cruel d’extraire une seule image et absolument impossible d’en décrire une sans renvoyer au tout. Nous pourrions gloser sur ce cliché qui évoque les travaux d’Atget3 sur les petits métiers parisiens. Nous pourrions relever la façon ostentatoire avec laquelle les deux personnages détournent la tête pour fuir dédaigneusement l’objectif, signifiant sans ambiguïté leur non-consentement à la réalisation de la photographie. Ce geste ne peut être fortuit, ils regardent chacun dans une direction différente alors que, compte tenu de la technologie de l’époque, ils ne pouvaient ignorer la présence du photographe. Il est ainsi facile de voir dans cette image un résumé de la société coloniale, dans une Algérie jamais tout à fait pacifiée.