1Thomas Lilti est né le 30 mai 1976, il mène ses activités de réalisateur et de scénariste en parallèle de ses études en médecine générale. Entre 1999 et 2004, Il réalise trois courts métrages et travaille comme scénariste pour huit films de fiction, c’est avec ses deux derniers longs métrages tournés sur le travail en milieu médical, Hippocrate en 2014 et Médecin de campagne en 2016, que son cinéma est plébiscité par le grand public. Au cours de cet entretien, Thomas Lilti revient sur son parcours de jeune médecin, sur les conditions d’exercice de ce métier à l’hôpital comme en milieu libéral tout en portant un regard critique sur les études de médecine qu’il a suivies. Toujours un peu en marge et en décalage par rapport aux attentes professionnelles et familiales de son milieu, jamais complètement médecin mais déjà toujours cinéaste, c’est à partir de cet entre-deux qu’il forgera son regard pour filmer à bonne distance et mettre à l’épreuve du cinéma son expérience personnelle du système de soin actuel.
2La relation soignants-soignés en milieu hospitalier, traitée dans le film Hippocrate est pour lui souvent prétexte à installer des scènes intimes révélant les sentiments profonds des personnages, des moments où l'on accède à une autre réalité, une autre ambiance, dévoilant par exemple les coulisses, les normes et les codes des relations hiérarchiques interprofessionnelles entre médecins, internes, infirmières et aides-soignants. Thomas Lilti revient également sur ses influences cinématographiques qui semblent moins marquées par le documentaire que par les images de reportage télévisuel qui laissent selon lui bien plus apparaître certaines ambiances, des éléments de décor, des attitudes, des gestes, véritables sources d’inspiration et de possibles projections pour son travail d’écriture cinématographique.
3Dans Médecin de campagne, l’auteur dresse le portrait de l’exercice d’une médecine en contexte rural et d’un médecin confronté à sa propre maladie. Thomas Lilti rappelle dans l’entretien les moments marquants, les points de bascule dans le récit marqué par des transformations physiques et mentales d'un personnage à la fois soignant et soigné. Dans ces films de fiction, les relations de soin se dévoilent comme des scènes sociales prétextes à des réflexions sur la vie, la mort, l'assistance sociale de la maladie, les frontières entre le normal et le pathologique. Sont ainsi abordées les relations tissées entre science, santé et société : la complexité des relations de soins, des gestes médicaux et des dispositifs thérapeutiques met finalement le spectateur à l’épreuve de ses propres représentations sociales et culturelles, de la santé, de la médecine et de la maladie.
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