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AccueilNuméros2013-1Fiction et référenceDu fictionnel à l’autofictionnel ?

Fiction et référence

Du fictionnel à l’autofictionnel ?

Traitement de l’histoire dans la tétralogie de Patrick Deville
Bertrand Tassou
p. 138-152

Résumés

Entre 2004 et 2011, Patrick Deville a publié au Seuil une tétralogie romanesque. C’est un projet construit et cohérent consacré à des époques, des lieux et des personnages souvent négligés par l’historiographie occidentale. Mais ces textes se révèlent inclassables: s’ils s’apparentent souvent à des enquêtes historiques, ils n’hésitent pas à imaginer les faits; et ce sont aussi des récits de voyages qui jouent parfois avec les codes de l’autofiction.

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Texte intégral

  • 1Pura vida (2004), La Tentation des armes à feu (2006), Equatoria (2009), Kampuchéa (2011), tous pu (...)

1La tétralogie de Patrick Deville, publiée entre 2004 et 20111, forme un corpus littéraire cohérent et tout à fait original. Ce sont en effet des romans qui se présentent et se revendiquent comme des enquêtes, à la fois géographiques et historiques, sur des périodes et des personnages précis et réels, dans lesquels l’auteur-narrateur intervient non seulement pour commenter ou analyser mais aussi, certes plus rarement, pour se raconter. Ils exploitent donc autant qu’ils les remettent en cause le pacte fictionnel aussi bien que le pacte autofictionnel, si tant est que ces pactes puissent être définis précisément et soient faits pour être respectés.

2Résumer chacun des romans qui composent cette tétralogie relèverait de la gageure puisque, comme nous le verrons un peu plus loin ils mélangent systématiquement les époques et les personnages. Toutefois une brève présentation permettra de relever les thèmes choisis par chacun d’eux. Pura vida, sous-titré Vie & Mort de William Walker, est construit à partir de la vie de William Walker, aventurier des États-Unis qui au xixe siècle a pris le pouvoir dans deux pays d’Amérique centrale et a tenté d’unifier la région. La Tentation des armes à feu, divisé en trois parties, s’intéresse à trois personnages, tous trois suicidés par armes à feu : Baltasar Brum, Essenine et Michel Piccoli dans L’Étau d’Alfred Hitchcock. Equatoria (qui fait référence à une éphémère province africaine créée par les colonisateurs au xixe siècle) prend prétexte de l’inauguration d’un mausolée pour la dépouille de Brazza au Congo pour suivre à la fois le parcours d’aventuriers du xixe siècle en Afrique et les épisodes révolutionnaires qui ont suivi les indépendances dans la seconde moitié du xxe siècle. Enfin dans Kampuchéa, le narrateur, parti au Cambodge sur les traces de Mouhot, un explorateur français du xixe siècle, suit par presse interposée le procès des anciens dirigeants Khmers rouges.

3Nous verrons d’abord comment cette tétralogie se construit de façon cohérente autour d’un projet qu’elle met en place et illustre et comment ce projet, outre une structure spécifique, implique un choix particulier dans les personnages et les lieux qu’il met en scène. Enfin nous nous interrogerons sur la notion même de roman telle qu’elle est présentée et présente dans ces livres : qu’implique-t-elle par rapport au traitement de faits historiques ? Comment s’accommode-t-elle d’un auteur qui se met en scène dans ses romans ?

Un projet cohérent

4Cette tétralogie marque une certaine rupture dans l’œuvre romanesque de Patrick Deville qui quitte son éditeur, Minuit, pour les éditions du Seuil et la collection au nom prémonitoire de « Fiction & Cie ». Sur son projet, l’auteur aime à s’expliquer, soit dans les quatrièmes de couverture qui présentent les romans, soit dans le corps des romans eux-mêmes.

  • 2Pura Vida, op. cit., quatrième de couverture.
  • 3Equatoria, op. cit., quatrième de couverture.
  • 4Ibid.
  • 5Ibid., p. 326.

5L’auteur choisit d’écrire des vies liées à ses voyages. Soit il voyage dans ce but précis : « Je suis arrivé en Amérique centrale, il y a quelques années, avec le projet d’y écrire la vie de William Walker2 », « afin d’écrire les vies d’Emin Pacha et de Tippu Tip, je me suis rendu à Zanzibar3 » ; soit il présente l’écriture comme issue des hasards du voyage : « Voici comment, après des mois de voyages erratiques […] je me suis retrouvé, le 3 octobre 2006, à Brazza au-dessus du cercueil de Brazza […]. D’hôtels en hébergements de fortune, j’ai consigné les vies des contemporains de Brazza4. » L’un et l’autre procédé peuvent, on le voit, cohabiter dans un même roman. Et l’idée de l’écriture peut initialement avoir été donnée à Deville par une autre personne. Il parle en effet dans les remerciements d’Equatoria d’Ascencio qui lui en a « donné l’idée chez lui un soir à Miami5 ».

6Dans le cours du récit aussi le projet se trouve présenté, notamment dans les conversations qu’a le narrateur avec les personnes qu’il rencontre :

  • 6La Tentation des armes à feu, op. cit., p. 79.

Je lui parle d’un vague projet qui aborderait la tentation des armes à feu, et la disparition, par ces mêmes armes à feu, d’un assez grand nombre de poètes russes venus trouver la mort au sud du Caucase. J’imagine relier ces coups de feu à l’image d’un homme debout sur le pas de sa porte, à Montevideo, les revolvers le long de ses cuisses. Et aussi au souvenir d’une femme aux longs cheveux noirs… À des images de vieux films, à quelques chansons populaires, à un livre d’Aldous Huxley que m’avait fait découvrir une chanteuse blonde hitchcockienne… Tout cela manquait de clarté6.

Il parle de son projet ailleurs, non sans ironie, à un autre de ses interlocuteurs :

  • 7Kampuchéa, op. cit., p. 143.

Je trace pour lui les grandes lignes de ma petite entreprise braudélienne. J’aimerais mettre en perspective le procès des Khmers rouges dans une durée moyenne, sur un siècle et demi, depuis que Mouhot, courant derrière un papillon, s’est cogné la tête, a levé les yeux, découvert les temples d’Angkor7.

  • 8  Thierry Guichard, « La fabrique du héros », Le Matricule des anges, no 50, février 2004, p. 21.

7Et dans un long entretien publié au moment de la parution de Pura vida, le premier volume du corpus, Deville répond à une question sur ce livre qui « tranche radicalement avec [son] style habituel » : « C’est parce que j’ai voulu faire quelque chose que je ne savais pas faire8. »

8Ce qui est frappant à la lecture de la tétralogie c’est sa cohérence formelle même si La Tentation des armes à feu se place un peu à part du reste du corpus. Si seuls deux de ces romans, Pura Vida et Equatoria, sont divisés en parties correspondant chacune au lieu de séjour, les trois romans sont construits en courts chapitres, entre deux et dix pages, dont le titre est à chaque fois écrit en gras et sans majuscule. Pour renforcer graphiquement cette image de cohésion, le mot « et » n’apparaît pas dans les titres mais est à chaque fois remplacé par le signe esperluette : « & ».

9Cette structure d’une grande souplesse permet de passer facilement et sans rupture d’un personnage à l’autre, du présent à l’un des passés étudiés. Dans cette structure et dans cette narration, la lecture des journaux locaux par le narrateur, qui est à la fois la marque d’un ancrage géographique et un élément capital pour relier l’histoire au présent, aura une grande importance. C’est aussi une pratique quotidienne qui rythme autant la vie du narrateur que le récit. Sur cette technique, Deville s’est expliqué au moment de la parution de Pura vida :

  • 9Ibid., p. 22.

J’ai trouvé la forme du livre dès sa première version en 1999, qui consistait à prendre deux journaux à une semaine d’intervalle dans deux capitales frontalières et d’écrire à partir de ce jeu entre les deux journaux Diaro et Tiempo et de ces deux vendredis consécutifs que le narrateur passe à Managua (Nicaragua) puis à Tegucipalga (Honduras)9.

10Cette structure n’a rien d’une contrainte, elle favorise au contraire une démarche narrative qui semble vouloir se présenter dans les romans comme une improvisation.

11En outre, le deuxième roman de la série parvient à s’intégrer à l’ensemble avec une structure différente. On y trouve en effet le thème du voyage lié à l’écriture de la vie de personnages (ou l’inverse) mais ici les lieux sont éloignés (l’Uruguay, le Caucase de l’ex-URSS, l’Arabie) de même que les rapports entre les différents personnages, reliés entre eux simplement par leur suicide par arme à feu. Toutefois, le narrateur a ici un rôle un peu différent de celui qui lui est assigné dans les autres livres puisqu’un personnage de son passé récent, la Grande Infante de Castille, apparaît souvent dans ses propos : il est donc amené à parler plus qu’il ne le fait ailleurs de son passé et de ses relations. Mais le surnom qu’il lui donne montre aussi sa volonté de la fictionnaliser, de la faire sortir de la réalité.

12D’autre part, il n’y a pas ici de chapitres présentés par un titre : simplement trois parties avec un titre en gras et un sous-titre commençant à chaque fois par « vie & mort » (en référence au sous-tire de Pura vida) suivi du nom du personnage concerné. Et ce n’est pas un hasard si c’est dans ce roman que le projet est le plus détaillé par l’auteur : il est le moins linéaire, le moins cohérent géographiquement et les enchaînements laissent davantage de champ aux digressions.

  • 10Pura vida, op. cit., p. 276.
  • 11Ibid., p. 280.
  • 12  On peut aussi remarquer la publication en 2004 par Patrick Deville de Une photo à Montevideo, vie (...)
  • 13Kampuchéa, op. cit., p. 22.
  • 14Ibid., p. 158.
  • 15Equatoria, op. cit., p. 237.

13Pour renforcer l’idée de cohérence de la tétralogie, des allusions relieront ce roman aux autres : soit elles se feront par anticipation, par exemple dans Pura vida où il est question du « goût des armes à feu10 » et de « la Grande Infante de Castille11 », ce qui laisserait à penser que l’idée d’un ensemble romanesque était déjà dans l’esprit de l’auteur12 ; soit ­rétrospectivement, quand on parle dans Kampuchéa de Baltasar Brum13 ou d’un voyage en train de Moscou à Tbilissi14. Il est aussi intéressant de noter que Kampuchéa, qui (à ce jour) clôt l’ensemble, contient également plusieurs allusions à Pura vida et à Equatoria. Enfin, Equatoria fait parfois référence à la fois au Nicaragua et aux Khmers rouges15 : cela montre bien que ces périodes historiques forment un tout auquel s’intéresse l’auteur, sinon que le projet qui clôture la tétralogie était déjà en place.

  • 16Pura vida, op. cit., p. 30.
  • 17Ibid., p. 43.
  • 18Ibid., p. 115.
  • 19Ibid., p. 122.

14Le travail dans son ensemble et la structure fragmentaire qu’il implique sont étroitement liés au choix des protagonistes. S’il arrive que dans certains des romans (Pura vida et Equatoria) figure ce qu’on pourrait appeler un héros (respectivement William Walker et Brazza), ses aventures seront prétexte à raconter celles d’autres personnages : « j’avais peu à peu découvert que certaines de ces vies, emplies d’actes de bravoure admirables, de traîtrises immenses et de félonies assassines, ne le cédaient en rien à celles des hommes illustres qu’avaient rassemblées Plutarque […]. Et l’idée m’était venue de rassembler certaines de ces vies16 ». Et ces personnages annexes, qui vont prendre de l’importance dans les romans, témoignent eux aussi d’un goût pour ce que Deville appelle « les obscures coulisses de l’histoire provinciale du monde17 » et qui l’amène à s’interroger : « Pourquoi seuls les échecs peuvent à ce point me fasciner18 ? » De cela, même ceux qu’il interroge sont conscients et l’un d’eux « se demande ce que l’histoire conservera de la révolution sandiniste19 ».

15Si les romans de la tétralogie témoignent d’un certain éparpillement géographique, ils ont en commun de mettre en scène des utopistes qui ont voulu créer de nouveaux territoires ou, pour ce qui concerne les Khmers rouges, une nouvelle forme d’État. Tous ont aussi, parfois après des succès plus ou moins éclatants, échoué. Face à un projet lui aussi relativement utopiste Deville se rend bien compte, même si ce n’est pas sans ironie puisqu’il semble s’en amuser, de ce que son entreprise a à la fois d’ambitieux et de dérisoire :

  • 20Ibid., p. 174. On retrouve cette distance ironique dans une expression comme « j’essaie de surpren (...)

J’accumulais des notes pour une histoire du sandinisme ou même du Nicaragua. Ou de l’Amérique centrale dans son ensemble. Et éventuellement pour des récits qui rassembleraient un jour lointain certains couples historiques, sur le modèle des Vies parallèles de Plutarque, la vie et la mort de Simon Bolivar et de Francisco Morazan, de Narcisso Lopez et de Louis Schlessinger […]. Il ne m’échappait pourtant pas, à la présenter ainsi, qu’une entreprise d’une aussi vaste envergure devait de loin excéder les modestes forces à ma disposition20.

Le choix de l’histoire

  • 21Critique, no 767, Historiens et romanciers, vies réelles, vies rêvées, avril 2011 ; Le Débat, no 1 (...)

16Dans le récent retour à la fiction, et qui plus est la fiction historique, du roman français, le choix de Deville est assez original. En effet, deux tendances semblent se dessiner au regard de la critique, si l’on en croit deux récents numéros de revues21. D’une part, le modèle de la fiction biographique de la trilogie d’Echenoz : Ravel, Courir, Des éclairs ; d’autre part, les fictions liées à l’époque de la Seconde Guerre mondiale, avec pour prendre les exemples les plus souvent cités Les Bienveillantes, Jan Karski et HHhH.

17Le choix de Deville le porte, comme nous venons de le voir vers des lieux et des personnages moins utilisés, par les historiens ou les romanciers, que ceux liés à la Seconde Guerre mondiale. En outre, il refuse, entre autres, comme nous l’avons vu par le choix de sa structure, le modèle strict de la fiction biographique. Il ne s’intéresse pas qu’à un personnage mais à l’ensemble des acteurs qui ont marqué une période ou un lieu. Ainsi si Pura Vida est, comme l’indique son sous-titre, l’histoire de William Walker, c’est tout autant un récit autour de Che Guevara, d’Oviedo (un des « découvreurs » de la région au xvie siècle) et des poètes centraméricains du xxe siècle. Car ce roman est aussi (et peut-être même surtout) l’histoire et la description de deux lieux, le Nicaragua et le Honduras, et des habitants de ces pays (notamment des écrivains) que le narrateur rencontre lors de ses voyages. Et cela est encore plus valable pour Equatoria et Kampuchéa, dont le titre dit bien l’ancrage géographique avant que la présentation en quatrième de couverture n’en précise le cadre historique.

  • 22  Gérard Gengembre, « Histoire et roman aujourd’hui », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 132.
  • 23Equatoria, op. cit., p. 167.
  • 24Ibid., p. 188.

18Pour Deville, l’histoire d’un homme et son rôle politique ne prennent réellement leur sens que quand ils sont replacés dans un environnement géographique plus global, dans un ensemble de relations avec d’autres acteurs, qu’ils soient locaux ou coloniaux. Le romancier s’inscrit donc dans « une tradition mondiale du roman comme lieu de mise en scène, de déploiement, de problématisation des conflits, jeux de force, mouvements des nations et des peuples22 ». Afin de bien rendre compte de ces ­imbrications, de ces correspondances parfois fortuites dont il finit par faire un tout cohérent, il rappelle souvent que d’autres personnages sont auparavant passés aux mêmes endroits que les personnages auxquels il consacre principalement ses livres : « Dix ans après le dernier passage de Stanley parti secourir Emin Pacha, sept ans après le passage de Conrad, les voilà à leur tour sur le Congo23. » Parfois plus simplement et plus arbitrairement, peut-être, il établit lui-même, par le rappel d’une date, une correspondance entre deux personnages : « Le 5 avril 1905, ils embarquent à Marseille, quelques jours après l’enterrement de Jules Verne24. »

  • 25  Philippe Forest, « Le roman futur : détourner tout le passé vers l’avenir », Le Débat, no 165, mai (...)
  • 26Ibid., p. 76.

19Ce jeu avec la chronologie s’oppose à une « mise en ordre du temps » dont Philippe Forest écrit qu’elle est à la fois dans le « discours du romancier et celui de l’historien25 » et Deville rejoint finalement ceux qui ont « le projet de proposer une autre vision du temps, dont les moments se correspondent hors de l’ordonnancement falsificateur d’une récapitulation morte26 ». Mais on ne peut pas pour autant dire que son travail s’oppose à celui d’un historien, il s’inscrit simplement dans un autre rapport au temps, cultivant par l’essence même de son projet une forme de simultanéité, au moins dans l’écriture.

  • 27  Philippe-Jean Catinchi, « Itinéraire d’un voyageur artificier », Le Monde, 9 septembre 2011.
  • 28Equatoria, op. cit., p. 177.
  • 29Kampuchéa, op. cit., p. 100.
  • 30  Ainsi il obtient dans Kampuchéa « une carte de presse et une accréditation » (ibid., p. 194). Cela (...)
  • 31Le Matricule des anges, op. cit., p. 22.
  • 32  Mona Ozouf, « Récit des romanciers, récit des historiens », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 21
  • 33  Blanche Cerquiglini, « Quand la vie est un roman », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 148.

20Ce qui rapproche Deville des historiens est la démarche qu’il adopte dans la préparation de ses romans, dans la recherche factuelle qui précède ou accompagne l’écriture. En effet, « il a mis au point une méthode de travail qui est sa signature. Des années de documentation forcenée, du dépouillement de la presse – essentielle ! – aux traductions d’archives, et [il] s’imprègne d’une réalité qu’il transforme en objet littéraire, osant “le roman d’invention sans fiction”27 ». Il cite souvent, parfois longuement, les mémoires qu’ont pu écrire les personnages qu’il met en scène, par exemple dans Equatoria ceux de Brazza, Stanley, Che Guevara. Et les récits eux-mêmes montrent le narrateur se rendant aux archives où on lui a préparé « quelques documents28 », se déplaçant avec ses « archives au fond d’un sac29 ». Le narrateur est donc à la fois chercheur, voyageur et enquêteur30, quand il rencontre des témoins parmi lesquels on peut citer Monseigneur Tessier à Alger ou de nombreux poètes (qui sont aussi d’anciens hommes politiques ou révolutionnaires) en Amérique centrale. Ces rencontres sont, comme l’auteur le précise au moment de la parution de Pura vida, assez faciles : « Je rencontrais qui je voulais puisque mon projet commençait à se savoir, j’ai rencontré des personnes fascinantes, je continuais à lire, à chercher31. » Cette multiplicité des sources, il sait en tirer parti puisqu’elle lui permet de varier les points de vue sur un événement ou une action (comme il le fait aussi en citant des articles de journaux diamétralement opposés au sujet du mausolée de Brazza) mais il n’oublie jamais que les témoignages ou les mémoires peuvent être sujets à caution. Il met donc en place une sorte de « pacte de véracité », que renforcera dans La Tentation des armes à feu la reproduction de documents, notamment la photo de Baltasar Brum ou la couverture du livre Après le feu d’artifice. On serait donc presque ici, malgré l’absence de notes de bas de page dans les textes, plus du côté de la narration historique (« une narration est historique quand le narrateur accepte, ou réclame, le contrôle de son lecteur, possiblement historien lui aussi32 ») que du côté du roman : « Le romancier ne donne qu’une seule version des faits, souvent sans expression de doute. Il se réapproprie les faits historiques, sans citer ses sources. La mention de la date, si représentative du registre historique, peut être discrète33. »

  • 34Equatoria, op. cit., p. 327.

21Toujours dans cette relation ambiguë avec les sources et la véracité, on remarquera que les trois romans qui sont le plus liés formellement (La Tentation des armes à feu ayant un statut un peu à part) se finissent sur des remerciements : si l’on n’a pas ici la bibliographie des historiens, on a en revanche une mention du rôle joué par les personnes que Deville a rencontrées et dont il précise dans Equatoria que ce sont des « protagonistes [apparaissant] sous un prénom qui parfois n’est pas le leur34 ». Si les remerciements autant que l’anonymat renvoient au journalisme d’enquête, cela ne concerne bien évidemment que les parties liées aux contemporains de l’auteur, pas à la partie plus franchement historique du projet.

  • 35Pura vida, op. cit., p. 122.
  • 36  Mona Ozouf, op. cit., p. 22.

22Les nombreux témoignages lui permettent aussi de varier ses récits, de les agrémenter d’anecdotes : « Que pourrais-je vous raconter de plus, demande [un des témoins], que des anecdotes35 ? » Les romans de Deville se rapprocheraient donc de la définition qu’en donnait Nabokov, la « “démocratie de détails” ce qui veut dire que le plus chétif d’entre eux a une dignité égale aux autres36 ». Mais cela ne veut pas dire non plus que Deville cède à la dispersion. S’il cite des anecdotes, s’il parle de personnages que l’on peut considérer comme secondaires, c’est finalement pour construire à l’aide de petites touches une vision d’ensemble cohérente. Il privilégie les faits, parfois presque simplement énumérés, pour présenter finalement ce qu’est une vie dans l’histoire, n’accordant que peu de place aux développements psychologiques.

Imaginer l’histoire

23Mais même si les techniques de recherche utilisées et clairement revendiquées dans le roman rapprochent la démarche de Deville d’une démarche historienne, il demeure que ces quatre livres sont présentés comme des fictions et plus précisément des romans, même si ce n’est pas toujours aux mêmes endroits du paratexte. Pour Pura vida et pour Equatoria, cela figure à la fois sur la couverture et sur la page de titre ; pour La Tentation des armes à feu, uniquement sur la page de titre ; pour Kampuchéa, uniquement sur la couverture.

  • 37Pura vida, op. cit., p. 17.
  • 38Ibid., p. 115.
  • 39Ibid., p. 16.
  • 40Ibid., p. 157.
  • 41Ibid., p. 158.

24Surtout, des personnages dont il parle, des événements auxquels ils ont été mêlés, le narrateur ne sait pas tout. Il a certes lu leurs écrits, parfois des ouvrages qui leur ont été consacrés. Mais il y a bien des moments où l’information précise lui manque et où, comme il l’avoue lui-même, il doit imaginer. Pour s’en tenir uniquement à Pura vida, de nombreuses formules l’indiquent, soit en se rapportant à des rêveries du narrateur dont rien n’indique clairement qu’elles seront reprises dans le roman : « je venais de passer la fin de la nuit à imaginer les derniers jours de ce William Walker ridicule et sublime37 », « à essayer d’imaginer38 » ; soit en se rapportant plus précisément à l’acte d’écriture en train de se faire : « comme je me plais à l’imaginer39 », « il n’est pas insensé d’imaginer40 », « il est possible que William Walker ait vu41 ».

  • 42  On trouve aussi cette formule, qui renvoie autant à l’écriture historienne qu’à l’écriture romanes (...)
  • 43  On retrouve cela, avec plus d’insistance et moins de finesse, dans HHhH de Laurent Binet. Cette «  (...)
  • 44  Chantal Thomas, sur le site rdv-histoire.com, octobre 2010, citée par Gérard Gengembre, op. cit., (...)

25Le recours assez fréquent à ce type de formules montre deux choses, à la fois liées et faussement paradoxales. D’une part, le fait que Deville écrive à ces moments précis qu’il imagine une scène montre bien que dans le reste du récit ce qu’il raconte est vrai et qu’il fait donc bien œuvre d’enquêteur, sinon d’historien42 ; d’autre part, cela montre aussi au lecteur qu’il est bien dans un roman, que le pacte fictionnel annoncé par le terme générique de la couverture est bien respecté43. Ce qui le différencie peut-être vraiment d’un véritable ou d’un simple enquêteur, c’est qu’il comble volontairement certains vides dans le récit des aventures des personnages pour en faire son récit et ses personnages. On est donc ici « dans cet inconnu laissé ouvert par l’histoire [où] le romancier s’aventure […]. Cela relève du faux, c’est de l’ordre d’un fictif étroitement entrelacé à du réel, ou du vérifiable44 ». On peut cependant s’interroger sur la pertinence du « faux » : si Deville imagine pour combler un vide laissé par ses sources, il cherche quand même à rester dans le domaine du vraisemblable, justement à l’aide des sources qui lui sont une indication. Il y a donc bien un « fictif étroitement entrelacé à du réel, ou du vérifiable », mais rien n’indique qu’il soit faux. En tout cas, l’auteur n’essaie pas de faire passer du fictif pour du réel.

  • 45Pura vida, op. cit., p. 78.
  • 46Ibid., p. 94.

26Et pour bien affirmer aussi que ses récits sont des romans, Deville les place dans un autre système de références qui complète la filiation déjà vue avec Plutarque et Braudel. Alors que cette dernière restait au niveau du projet et était exposée de façon théorique, cette seconde filiation, fictionnelle, se fait davantage par des rappels et des allusions. Ainsi, il remarque que Castro ressemble à un personnage de García Márquez45 ou rapproche Ramirez, un personnage réel, d’un personnage de Cortázar46.

27Si dans Kampuchéa, c’est à Graham Greene qu’il fait souvent référence, notamment quand certaines ambiances le lui rappellent, c’est surtout Joseph Conrad qui apparaît dans le corpus. Il est une de ces nombreuses personnes dont les aventures sont mises en parallèle avec celles des personnages suivis. Ainsi dans Equatoria :

  • 47Equatoria, op. cit., p. 146-147.

En ce mois de juin 90, alors que Stanley, au faîte de sa gloire, regagne l’Angleterre pour aller se marier en l’Abbaye de Westminster, un marin d’origine polonaise débarque à Matadi du Ville de Maceio. Teodor Korzeniowski, comme Brazza capitaine au long cours, a déjà bourlingué sur tous les océans. C’est la première fois que Conrad se fait marin d’eau douce47.

  • 48Ibid., p. 162.
  • 49Ibid., p. 277.
  • 50  Étrangement, Deville n’est pas le seul à faire cette confusion orthographique. Ainsi dans l’éditio (...)
  • 51Pura vida, op. cit., p. 138.

28Mais c’est surtout d’Au cœur des ténèbres et de son héros dont il sera question, notamment plus loin dans le même roman. On parle en effet de « l’histoire de Kurtz, celui dont la tête était emplie du grand désordre de l’Afrique48 » et de « ce Klein dont Conrad fera son Kurtz49 ». Dans Pura vida, Balboa, un des « découvreurs » espagnols de l’Amérique en 1513 est comparé à « une manière de Kurz [sic50] perdu au cœur des ténèbres51 ».

  • 52Kampuchéa, op. cit., p. 136, 214, 233.
  • 53Equatoria, op. cit., p. 11, 148, 173.
  • 54  Blanche Cerquiglini, op. cit., p. 149.
  • 55Ibid., p. 150.

29Plus subtil peut-être dans le travail d’imagination est le rapport aux différents temps. Il y a d’une part les références continuelles au présent, dues ici à la présence du narrateur dans le texte et dans une certaine mesure dans l’histoire. On suit en effet ses errances d’hôtels en cafés, sa lecture quotidienne des journaux et Deville prend soin de jalonner son récit de dates qui marquent l’évolution de l’histoire au présent. Ainsi dans Kampuchéa : « nous sommes le 12 février 2010 », « nous sommes en juin 2010 », « aujourd’hui, 26 juillet 201052 » ; ou dans Equatoria, entre autres mentions : « le lundi 2 janvier 2006 », qui est la phrase qui ouvre le roman, « le lundi 6 mars 2006 », « nous sommes le 23 juin 200653 ». Or comme le remarque Blanche Cerquiglini « ces allers-retours entre le présent de la fiction et le futur de l’histoire sont un trait distinctif des biographies romanesques54 » et « le romancier assume sa position surplombante, dominante55 ».

  • 56Pura vida, op. cit., p. 110.
  • 57Equatoria, op. cit., p. 296.

30D’autre part, la position dominante du romancier est marquée par les fréquentes prolepses. Certes, un historien est aussi un narrateur omniscient, mais ici c’est en romancier que l’auteur met en place un effet narratif qui replace les actes des personnages dans l’ensemble de leur vie : « il lui reste quatre ans à vivre56 », « il lui reste moins de deux ans à vivre57 ». Il crée une sorte d’effet de suspens dans lequel l’écriture apparaît comme un artifice.

31C’est aussi, et non sans ironie et exagération amusée, en présentant l’histoire comme une mise en scène, et donc en se donnant le rôle du metteur en scène, que Deville s’affirme comme romancier. Dès la première page de Pura vida, le roman qui ouvre son projet, il écrit en effet :

  • 58Pura vida, op. cit., p. 13.

Le rideau de velours rouge du grand music-hall de l’histoire s’ouvre sur un monsieur Loyal en habit et chapeau claque miteux, canne à pommeau à la main, qui vient promettre au public la merveilleuse et terrible et pourtant véridique histoire du Nicaragua58.

32De l’histoire, Deville sera à la fois le metteur en scène, par ses romans et le spectateur, par ses rencontres avec les témoins. Mais il en sera aussi un critique et un commentateur, comme en témoignent ses nombreuses remarques, souvent détachées mais sans ombre de cynisme.

Le narrateur et l’auteur

33À la problématique souvent soulevée d’un auteur et d’un narrateur qui seraient une même personne, les romans de Deville ne permettent pas de répondre de façon claire et précise. Il semblerait même qu’il s’amuse à brouiller les pistes dans les paratextes. Ainsi, si les quatrièmes de couverture des trois premiers romans sont signées P. D., la dernière n’est pas signée. Celles du premier et du troisième livres sont écrites à la première personne et semblent donc faire un lien entre l’auteur et le narrateur qui, comme nous l’avons vu, explique son projet ; mais celles du deuxième et du quatrième parlent du « narrateur » à la troisième personne du singulier. Ce qui rend la chose plus troublante encore, et peut laisser penser que ce brouillage a volontairement été opéré par Deville c’est que, comme nous l’avons vu également, des allusions au sein de Kampuchéa relient ce livre au reste du corpus : tous les livres ont bien sûr le même auteur, mais aussi le même narrateur.

  • 59La Tentation des armes à feu, op. cit., p. 121.
  • 60Kampuchéa, op. cit., p. 38 et 98.
  • 61La Tentation des armes à feu, op. cit., p. 12.

34Un autre élément vient aussi appuyer le fait que, dans les deux romans dont la quatrième de couverture est écrite à la troisième personne, le narrateur et l’auteur sont une même personne. Patrick Deville est né en 1957, et le narrateur avait dans un roman « vingt-deux ou vingt-trois ans » en 197959, dix-huit ans en 1975 dans l’autre60. Enfin, le narrateur écrit dans un des romans qu’il avait « publié, quelques années plutôt, un roman [qu’il] avai[t] intitulé Le Feu d’artifice61 ». Or, c’est le titre d’un roman de Deville paru chez Minuit en 1992.

  • 62Pura vida, op. cit., p. 208-210.

35Mais le narrateur, tout auteur qu’il semble être, se raconte d’une façon particulière : s’il parle de ce qu’il vit au moment où il voyage et enquête (les hôtels dans lesquels il descend, les rencontres avec leur personnel ou avec les chauffeurs de taxi, etc.), il parle finalement très peu de sa vie antérieure. La seule véritable exception est un assez long passage de Pura vida dans lequel il évoque différents souvenirs de son enfance (l’image aperçue à la télévision du cadavre de Che Guevara, mai 68, le 14 juillet 1969 et la pêche à la ligne62).

  • 63  Serge Doubrovsky, « C’est fini », entretien avec Isabelle Grelle, La Nouvelle Revue française, no  (...)

36Difficile donc de parler d’une littérature d’introspection, malgré la présence d’un auteur-narrateur qui – s’il n’est pas toujours assumé officiellement – est présent dans les romans, comme le montrent les indices que nous avons vus plus haut. Difficile aussi de parler d’autofiction si l’on prend de ce terme la définition la plus récente qu’en a donnée Serge Doubrovsky, un « récit dont la matière est entièrement autobiographique, la manière entièrement fictionnelle63 ». Si biographie il y a, c’est celle d’autres personnages et non celle de Deville, qui intervient constamment, mais comme un personnage secondaire par rapport aux faits qu’il raconte, davantage comme un témoin – et témoin de ce qu’il voit, non des faits historiques qu’il rapporte – que comme un acteur. Quant à la manière « entièrement fictionnelle » dont Doubrovsky parle à propos de l’autofiction (ce qui nous semble un concept assez flou…), les nombreuses citations de mémoires ou de journaux la remettraient en partie en cause.

  • 64  Thierry Guichard, « La fabrique du héros », op. cit., p. 16.
  • 65  Voir l’article de Catherine Simon, « Des “je” solitaires », Le Monde, supplément « Le Monde des li (...)

37Peut-on alors parler de roman autobiographique ? Là aussi difficilement car Deville, bien qu’omniprésent dans ses textes et dans l’histoire présente qu’il raconte, n’est finalement qu’un personnage secondaire par rapport à tout l’arrière-plan historique, qui est quand même à l’origine du projet. Notons au passage que dans un entretien accordé au moment de la parution de Pura vida, et parlant de ses précédents romans parus chez Minuit, il expliquait : « Dans mes romans, je préfère garder ce narrateur qui n’est pas moi mais qui me ressemble tellement que si je commence à raconter ma vie, ce narrateur n’aura plus d’intérêt64. » Dans la tétralogie, Deville reprend un peu cela : certes, le narrateur, ne serait-ce que par les paratextes, se rapproche davantage de l’auteur. Or, le narrateur n’est peut-être finalement intéressant que par sa relative discrétion, son rôle d’intercesseur et de catalyseur. Et si Deville garde intacte la vie des autres (ou prévient quand il l’imagine), rien ne l’empêche de transformer la sienne : si pacte il y a, il est par rapport à la véracité de son travail historique, pas par rapport au ­narrateur-auteur. Mais là aussi il reste assez en marge, notamment par rapport à un auteur comme Kapuscinski dont on aurait pu le rapprocher pour tenter de situer son travail dans une production plus globale : s’il se met en scène dans ses livres, c’est avec une modestie qui l’éloigne beaucoup de l’écrivain polonais65.

Conclusion

  • 66  Antony Beevor, « La fiction et les faits, Périls de la “faction” », Le Débat, op. cit., p. 26.

38Ce sont donc des textes assez étranges, génériquement difficiles à identifier et à classer qu’a écrits Patrick Deville, à la fois romans, enquêtes, récits de voyages… S’il s’est expliqué, dans des entretiens ou dans les livres eux-mêmes sur son projet, le romancier ne l’a pas fait de façon théorique d’une part et c’était d’autre part d’une façon suffisamment ironique pour ne pas créer un cadre technique ou générique précis : il a simplement eu le projet de faire ce qu’il avait envie de faire et selon la manière qu’il avait choisie. Il n’a pas non plus « passé » un pacte avec ses lecteurs et s’est lui-même ingénié à brouiller les pistes. Mais il a établi certaines règles, précisé qu’il n’hésitait pas à imaginer et il a mis en place un flou narratif : il ne semble donc pas que ses romans ressortissent de ce qu’Antony Beevor appelle la « faction » (récits dans lesquels se mélangent sans que cela soit clairement annoncé le factuel et la fiction) et dont il dénonce de façon très convaincante les « périls », notamment le risque de « brouillage du fait et de la fiction, et de ses dangers d’un point de vue purement historique66 ».

  • 67  Patrick Deville, cité par Philippe-Jean Catinchi, op. cit., p. 1.
  • 68  Anne-Marie Garat, « Le roman du Cambodge », Le Monde, supplément « Le Monde des livres », 23 septe (...)

39Deville parvient à la fois à écrire des récits-biographies historiques et, avec beaucoup de finesse, sans ces digressions théoriques qui alourdissent parfois les récits historiques contemporains, à s’interroger et à nous interroger sur ce qu’est ou ce que peut être la fiction aujourd’hui. Il a surtout écrit des livres tout à fait particuliers : ses romans ne sont par exemple pas cités dans les nombreuses recensions faites récemment des romans historiques contemporains, notamment celles des contributeurs au numéro du Débat consacré à L’histoire saisie par la fiction. Ce désintérêt pour ce dont il parle peut s’expliquer parce qu’il n’a pas choisi des personnages et surtout des lieux familiers de l’historiographie française et occidentale. D’autre part, l’éclatement narratif et temporel (mais aussi dans une certaine mesure spatial) qu’il met en place dans ses romans produit des textes très éloignés des canons du roman historique, de ceux de la biographie romancée ou des livres-enquêtes. C’est peut-être là (plus que dans « le roman d’invention sans fiction67 » ou « le ravissement de l’histoire par le roman68 » qu’il n’est après tout pas le premier à faire) que son entreprise se révèle tout à fait singulière.

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Notes

1Pura vida (2004), La Tentation des armes à feu (2006), Equatoria (2009), Kampuchéa (2011), tous publiés au Seuil. Tous les documents cités sont publiés à Paris.

2Pura Vida, op. cit., quatrième de couverture.

3Equatoria, op. cit., quatrième de couverture.

4Ibid.

5Ibid., p. 326.

6La Tentation des armes à feu, op. cit., p. 79.

7Kampuchéa, op. cit., p. 143.

8  Thierry Guichard, « La fabrique du héros », Le Matricule des anges, no 50, février 2004, p. 21.

9Ibid., p. 22.

10Pura vida, op. cit., p. 276.

11Ibid., p. 280.

12  On peut aussi remarquer la publication en 2004 par Patrick Deville de Une photo à Montevideo, vie & mort de Baltasar Brum, plaquette offerte par le groupement de librairies Initiales.

13Kampuchéa, op. cit., p. 22.

14Ibid., p. 158.

15Equatoria, op. cit., p. 237.

16Pura vida, op. cit., p. 30.

17Ibid., p. 43.

18Ibid., p. 115.

19Ibid., p. 122.

20Ibid., p. 174. On retrouve cette distance ironique dans une expression comme « j’essaie de surprendre les progrès de la raison dans l’histoire » (Kampuchéa, op. cit., p. 12).

21Critique, no 767, Historiens et romanciers, vies réelles, vies rêvées, avril 2011 ; Le Débat, no 165, L’histoire saisie par la fiction, mai-août 2011.

22  Gérard Gengembre, « Histoire et roman aujourd’hui », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 132.

23Equatoria, op. cit., p. 167.

24Ibid., p. 188.

25  Philippe Forest, « Le roman futur : détourner tout le passé vers l’avenir », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 73.

26Ibid., p. 76.

27  Philippe-Jean Catinchi, « Itinéraire d’un voyageur artificier », Le Monde, 9 septembre 2011.

28Equatoria, op. cit., p. 177.

29Kampuchéa, op. cit., p. 100.

30  Ainsi il obtient dans Kampuchéa « une carte de presse et une accréditation » (ibid., p. 194). Cela ne fait pas pour autant de son travail un travail spécifiquement journalistique, puisqu’il ne s’intéresse pas à des personnages forcément contemporains, par exemple Mouhot dans ce roman ou certains conquérants espagnols dans Pura vida.

31Le Matricule des anges, op. cit., p. 22.

32  Mona Ozouf, « Récit des romanciers, récit des historiens », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 21.

33  Blanche Cerquiglini, « Quand la vie est un roman », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 148.

34Equatoria, op. cit., p. 327.

35Pura vida, op. cit., p. 122.

36  Mona Ozouf, op. cit., p. 22.

37Pura vida, op. cit., p. 17.

38Ibid., p. 115.

39Ibid., p. 16.

40Ibid., p. 157.

41Ibid., p. 158.

42  On trouve aussi cette formule, qui renvoie autant à l’écriture historienne qu’à l’écriture romanesque et qui précède une description de la rencontre en question : « la rencontre de Muang Sing telle que me l’ont fait imaginer mes lectures » (Kampuchéa, op. cit., p. 160).

43  On retrouve cela, avec plus d’insistance et moins de finesse, dans HHhH de Laurent Binet. Cette « technique » a été beaucoup commentée et Binet lui-même y est revenu, notamment dans « Le merveilleux réel », Le Débat, no 165, mai-août 2011, p. 80-85.

44  Chantal Thomas, sur le site rdv-histoire.com, octobre 2010, citée par Gérard Gengembre, op. cit., p. 126.

45Pura vida, op. cit., p. 78.

46Ibid., p. 94.

47Equatoria, op. cit., p. 146-147.

48Ibid., p. 162.

49Ibid., p. 277.

50  Étrangement, Deville n’est pas le seul à faire cette confusion orthographique. Ainsi dans l’édition du texte dans Jeunesse (Paris, Gallimard, coll. « L’imaginaire », 1978), s’il est bien écrit Kurtz dans le roman, Jean-Louis Boireau écrit « Kurz » sur la quatrième de couverture.

51Pura vida, op. cit., p. 138.

52Kampuchéa, op. cit., p. 136, 214, 233.

53Equatoria, op. cit., p. 11, 148, 173.

54  Blanche Cerquiglini, op. cit., p. 149.

55Ibid., p. 150.

56Pura vida, op. cit., p. 110.

57Equatoria, op. cit., p. 296.

58Pura vida, op. cit., p. 13.

59La Tentation des armes à feu, op. cit., p. 121.

60Kampuchéa, op. cit., p. 38 et 98.

61La Tentation des armes à feu, op. cit., p. 12.

62Pura vida, op. cit., p. 208-210.

63  Serge Doubrovsky, « C’est fini », entretien avec Isabelle Grelle, La Nouvelle Revue française, no 598, octobre 2011, p. 24.

64  Thierry Guichard, « La fabrique du héros », op. cit., p. 16.

65  Voir l’article de Catherine Simon, « Des “je” solitaires », Le Monde, supplément « Le Monde des livres », 11 novembre 2011, p. 1, consacré à cet auteur-enquêteur et dans lequel on parle de son « narcissisme » et de son attachement relatif à la « sacro-sainte vérité des faits ». D’autre part, et pour poursuivre la comparaison sur un plan générique, les livres de Kapuscinski ne se présentent pas comme des romans : cette mention n’apparaît pas dans les paratextes.

66  Antony Beevor, « La fiction et les faits, Périls de la “faction” », Le Débat, op. cit., p. 26.

67  Patrick Deville, cité par Philippe-Jean Catinchi, op. cit., p. 1.

68  Anne-Marie Garat, « Le roman du Cambodge », Le Monde, supplément « Le Monde des livres », 23 septembre 2011, p. 1.

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Pour citer cet article

Référence papier

Bertrand Tassou, « Du fictionnel à l’autofictionnel ? »Itinéraires, 2013-1 | 2013, 138-152.

Référence électronique

Bertrand Tassou, « Du fictionnel à l’autofictionnel ? »Itinéraires [En ligne], 2013-1 | 2013, mis en ligne le 01 octobre 2013, consulté le 05 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/856 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/itineraires.856

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Auteur

Bertrand Tassou

Université Sorbonne nouvelle – Paris 3, Sorbonne Paris Cité, Écritures de la modernité

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Droits d’auteur

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Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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