Navigation – Plan du site

AccueilNuméros2015-3Dans la fabrique de l’ethosEthos numérique et image de candi...

Dans la fabrique de l’ethos

Ethos numérique et image de candidat dans les campagnes électroniques : le cas des élections israéliennes de 2013

Digital Ethos and Candidate Image in E-Campaigns: The Case of 2013 Israeli Election
Eithan Orkibi
Traduction de Maria Brilliant

Résumés

Cet article, qui étudie les aspects rhétoriques de campagnes électroniques, interroge la spécificité de la construction de l’image des candidats sur les réseaux sociaux. L’analyse de l’activité sur Facebook de trois candidats durant les élections israéliennes de 2013 révèle trois stratégies discursives : l’informalité, la métatextualité et la narrativité. Ces stratégies discursives transforment les microblogs de campagne en « journaux de campagne » personnels, utilisés par les candidats pour y exposer des anecdotes de « coulisses », des impressions subjectives et des réflexions privées. L’analyse montre que les candidats utilisent les microblogs personnels sur Facebook pour renforcer l’« authenticité » et la complexité de leur image, qui diffère, et même dans certains cas se démarque, de celle de leur personnage public telle qu’orchestrée par les directeurs de la campagne traditionnelle. Cet article pose que de telles images politiques ont été stratégiquement conçues en fonction d’une promesse : celle d’en finir avec les « politiques anciennes », afin de montrer l’engagement des candidats envers une « nouvelle politique ».

Haut de page

Texte intégral

Cette recherche a reçu le soutien de l’Institut pour l’étude des nouveaux médias, politiques et société, de l’École de communication de l’université d’Ariel. Je voudrais ici chaleureusement remercier Hayne Krakover de sa précieuse assistance pour rassembler les sources primaires qui ont servi à l’analyse. Je tiens à remercier également Ruth Amossy et David Kleczewski dont les conseils et suggestions ont largement contribué à ce travail.

1S’il y a un phénomène qui domine la communication politique depuis les années 2000, c’est incontestablement le rôle de plus en plus décisif et central que jouent les nouveaux médias. Peut-on imaginer, de nos jours, une campagne électorale qui n’y aurait pas recours ? Peut-on imaginer un candidat sérieux ou un parti légitime qui ne se serve pas de YouTube, Twitter, Instagram ou Facebook pour diffuser des messages et pour interagir avec le public ? L’usage des réseaux sociaux s’est désormais généralisé au point que les politologues et spécialistes de la communication politique parlent de « e-campaign », campagne électronique, comme domaine d’activité et d’expertise à part entière, qui exige des outils, des compétences et des comportements différents de ceux associés aux « campagnes générales » qui prennent place dans les « médias traditionnels ».

2Le présent article souhaite explorer les aspects discursifs des campagnes électroniques et, plus précisément, cerner la spécificité de la persuasion politique dans les nouveaux médias. À cette fin, il se focalise sur un aspect qui semble non seulement central dans les études électorales et les recherches en communication politique, mais aussi essentiel dans l’étude du discours numérique : la présentation de soi. Pour ce faire, nous prenons comme cas de figure l’usage des réseaux sociaux dans la campagne électronique de trois candidats centraux dans les élections législatives israéliennes de 2013.

3En nous concentrant sur les pages personnelles de ces candidats sur Facebook, nous analysons leur présentation de soi, tout en nous référant à deux notions principales dans l’analyse de la persuasion politique : la notion d’« image de candidat », utilisée par les spécialistes de communication politique, et la notion d’ethos, telle qu’elle est abordée dans la théorie rhétorique et dans l’approche française d’analyse du discours. Nous partons de l’hypothèse que, même si la campagne générale et la campagne électronique partagent le même objectif et visent le même résultat, la spécificité du dispositif discursif numérique, à savoir les réseaux sociaux, exige ou favorise des modalités particulières de formation d’image de candidat et de construction d’ethos. L’argument principal de cet article postule que l’ethos numérique des candidats se dégage de la campagne électronique, et qu’il remplit des fonctions précises. Parmi elles sont en bonne place la projection d’une image de candidat adapté à l’ère de la nouvelle politique, et la présentation stratégique d’une personnalité complexe et authentique capable de briser le scepticisme grandissant des électeurs par rapport au marketing politique « traditionnel » de ladite « ancienne politique ».

L’image du candidat dans les campagnes électorales

  • 1 Voir, par exemple, Funk (1999) et Mendelsohn (1996).
  • 2 Voir, en particulier, l’ouvrage fondateur de Dan Nimmo et Robert L. Savage (1976), et les deux ouvr (...)
  • 3 Nous reprenons ici la fameuse expression utilisée par Philip Kotler et Sidney J. Levy (1969 : 10). (...)

4L’image du candidat dans une campagne électorale est un domaine d’études bien établi dans les études électorales1 et la communication politique2. Dans une ère de politique médiatisée et de marketing politique, le cliché, a priori séduisant, selon lequel « les candidats sont commercialisés comme l’est le savon3 » ne peut s’évacuer aisément. Bien que la notion simpliste du « candidat équivalent à un savon » ait profondément été mise en question par des chercheurs en communication et par des politologues (Marland 2003), il est admis que « l’apparence et la manière de parler d’un candidat ont un impact considérable sur les chances d’élection de ce même candidat » (Rosenberg et al. 1986 : 108). Pour les besoins de cet article, considérons la définition donnée par Kenneth L. Hacker du terme « image du candidat » comme étant une « accumulation des perceptions des électeurs sur les candidats » (2004 : 4). Cette définition souligne les rapports dynamiques qui se forment entre les messages de la campagne et l’évaluation du candidat par le public. Les images transmises stratégiquement par les directeurs de campagne, jointes à celles diffusées par les médias, s’entrecroisent avec les impressions préexistantes des électeurs, et se transforment en des représentations cognitives socialement partagées.

  • 4 Pour un aperçu de la littérature consacrée aux rapports entre image et positionnement des candidats (...)
  • 5 Voir, à ce sujet, Hacker et al. (2000) et Serra (2010).

5Mais en quoi consistent précisément les images des candidats ? Un aperçu de la littérature scientifique relève deux catégories proches – mais cependant distinctes – dans leur teneur4. La première pourrait être décrite comme constituant les « attributs d’un homme politique », c’est-à-dire les caractéristiques du candidat associées à la perception commune d’un homme ou d’une femme politique ou d’un leader, dont les plus fondamentales sont – ainsi que l’indiquent Balmas et Sheafer (2010 : 206) – la compétence, les qualités de dirigeant, la puissance, l’intelligence, la crédibilité et la moralité5. Une autre catégorie pourrait être dépeinte comme étant celle « des attributs personnels », liée aux diverses caractéristiques du candidat en tant que personne. Il s’agit de la perception qu’a l’électeur du candidat en tant que personne privée, ses traits personnels significatifs, et ce que Bruce Buchanan dénomme « la manière d’être eux-mêmes » des hommes et femmes politiques (1988 : 251). Ces attributs personnels peuvent être, pour reprendre la typologie suggérée par Allan Louden et Kristen McCauliff, son tempérament, sa bienveillance, la dévotion à sa famille et à son conjoint ou sa conjointe, ainsi que son comportement communicationnel : humour, sensibilité, attitude amicale, apparence, politesse, élégance et apparence physique (Louden et McCauliff 2004 : 87 ; voir aussi Glad 1998, Pfiffner 2004).

6Les attributs d’un homme et d’une femme politique, et d’une certaine manière ses caractéristiques personnelles, passent généralement par la médiation d’une tierce partie : ils sont construits par les médias ou bien conçus stratégiquement par les directeurs de campagne, à travers des genres discursifs tels que des articles d’opinion dans la presse, des témoignages, des biographies ou des annonces publicitaires. Dans ce genre de message, ce sont d’autres personnes – tels des commentateurs et analystes politiques, des collègues et partenaires – qui présentent les candidats et discutent de leurs mérites. Par contraste, les attributs personnels sont le plus visibles dans la présentation de soi du candidat. Des qualités personnelles, telles la sociabilité ou l’humour, sont plus aisément discernables dans les produits discursifs dans lesquels le candidat transmet lui-même le message, en bref, lorsque le candidat parle. Ce sont les discours publics, les interviews, les débats, aussi bien que les pages personnelles sur Facebook, qui exposent le public visé à la fois aux messages de campagne, aux manières distinctes et au style personnel du candidat : le langage, le registre, le comportement langagier, la voix et l’apparence (Bimber et Davis 2003, Morreale 1993, Verser et Wicks 2006). En conséquence, une distinction peut s’établir entre une image de candidat « hétéro-attribuée » et une image « auto-attribuée » : dans la première, l’image du candidat est principalement construite par une tierce partie, tandis que dans la seconde, l’information permettant de construire une image du candidat provient directement du candidat lui-même.

Ethos rhétorique et image du candidat

  • 6 Pour une discussion sur la notion classique d’ethos dans les études anglo-saxonnes, voir Cherry (19 (...)

7Des chercheurs ont déjà reconnu la pertinence de la notion rhétorique d’ethos, caractère en grec, pour l’étude de l’image du candidat (Allen et Post 2004 : 176, Shyles 1984 : 172). Ce concept classique se réfère au souci des orateurs de garantir l’efficacité persuasive de leur discours en se représentant comme crédibles et dignes de confiance. Aristote en catégorise trois aspects qui, projetés au sein d’un discours, confèrent de la crédibilité à l’orateur : phronesis, arete et eunoia (Aristote, éd. 1991 : 108, Rhét. II, 1378a), qui signifient la sagesse, l’honnêteté, la bienveillance. Dans la tradition romaine de la rhétorique, la notion de caractère prend en compte la connaissance préalable qu’on a de l’orateur, comme sa réputation publique et son statut social, aussi bien que son style de discours, tel que l’élégance et l’éloquence6. Bien que les concepts de caractère et d’ethos rhétorique aient été sujets, au cours des siècles, à de nombreuses interprétations, le principe aristotélicien de base reste pertinent. Comme que le note Marshall W. Alcorn :

  • 7 Nous traduisons vers le français toutes les citations de l’anglais et de l’hébreu.

Il arrive souvent que ce ne soient pas les idées d’une personne mais son caractère qui transforme les gens […] Lorsque des gens s’identifient à un orateur, ils peuvent être manipulés de façon à adhérer aux valeurs et idées de l’orateur. (Alcorn 1994 : 3)7

8Dans la théorie rhétorique moderne, le concept d’ethos est surtout associé à la notion de crédibilité, et le terme ethos est fréquemment remplacé par « crédibilité de source » (Jasinski 2001 : 3), suggérant que la crédibilité que l’on perçoit de l’orateur est composée d’éléments tels que la fiabilité, la compétence et l’objectivité (Whitehead 1968), ou l’autorité et la bienveillance (McCroskey 1966). Cependant, l’ethos n’est pas simplement un instrument de persuasion, permettant aux orateurs de former une image positive d’eux-mêmes (tout en défiant l’image de leurs adversaires). En effet, dans les études empiriques menées sur la notion de crédibilité, la notion d’ethos correspond à la perception du locuteur par l’auditoire, c’est-à-dire « l’attitude envers une source de communication qu’aurait le récepteur à un moment donné » (McCroskey et Young 1981 : 24). En d’autres termes, l’ethos est stratégiquement construit par les orateurs afin de s’adapter aux valeurs et aux attentes du public visé. En ce sens, ainsi que le rappelle Alan Brinton, l’ethos d’un (bon) orateur est en fait un reflet crédible du caractère général de la société. Un tel ethos fait apparaître un (bon) orateur comme « quelqu’un à qui l’on peut se fier pour exprimer nos valeurs partagées, penser dans les mêmes termes que nous, exercer un bon jugement, et parler en notre nom » (Brinton 1985 : 55).

9Mais comment un ethos se construit-il dans les faits ? Dans son essai fondateur sur la présentation de soi dans le langage, Ruth Amossy traite de l’ethos en tant qu’« image discursive du soi », affirmant ainsi que l’ethos est bien plus complexe que la simple projection d’une image construite en fonction d’un objectif persuasif. En fait, il s’agit d’une pratique discursive multidimensionnelle reliée à des activités sociales comme le positionnement institutionnel de l’orateur ou la construction de son autorité, ce qui transforme l’ethos sur le plan discursif en une identité verbale à part entière (Amossy 2010).

10Ainsi, la tradition française d’analyse du discours permet de cerner deux dimensions distinctes dans la construction et l’analyse de l’ethos : la dimension spatio-temporelle, et la dimension textuelle. La première consiste en deux aspects de l’ethos : l’ethos discursif et l’ethos pré-discursif. De même que pour le concept aristotélicien, l’ethos discursif est défini comme étant celui qui est projeté par l’orateur dans le cadre d’un discours donné, tandis que l’ethos pré-discursif, apparenté à la tradition latine, consiste en une connaissance préalable de l’orateur : sa réputation personnelle ou les stéréotypes s’appliquant à la catégorie sociale à laquelle l’orateur est affilié (Charaudeau 2005 : 90). On part ainsi du principe qu’en raffinant son ethos discursif en fonction de la situation et de l’auditoire, l’orateur peut affirmer, modifier ou totalement transformer son image pré-discursive, une pratique qualifiée de « retravail de l’ethos préalable » (Amossy 1999).

11La dimension textuelle établit une distinction entre deux niveaux de construction d’ethos. Celui-ci peut être explicitement verbalisé : lorsque les orateurs parlent souvent d’eux-mêmes, révèlent des émotions, évoquent leurs propres mérites et qualifications, vantent ouvertement leurs qualités et capacités (ce que l’on nomme souvent « argument éthotique », voir Brinton 1986, Leff 2009). Lorsqu’il n’est pas revendiqué, l’ethos est implicite ou, plutôt, montré : une langue spécifique ou un jargon, un comportement discursif unique, un style linguistique reflètent tout de même la personnalité de l’orateur (Maingueneau 1993 : 138).

12Bien que l’image de candidat et l’ethos rhétorique soient des concepts proches l’un de l’autre, une distinction fondamentale mérite d’être soulignée : tandis que l’image de candidat constitue en elle-même l’objectif principal de la communication (elle est le message adressé à l’auditoire), l’ethos rhétorique est une représentation tactique de soi, qui vise à obtenir ou renforcer l’adhésion du public à des messages donnés. Cette distinction implique que lorsqu’on analyse la portée persuasive de campagnes électorales, on ne peut pas considérer l’ethos comme l’équivalent rhétorique du terme d’« image de candidat », mais plutôt examiner les modalités par lesquelles l’ethos rhétorique du candidat rend crédible l’« image du candidat » en tant que message. Si l’ethos rhétorique « renforce l’adhésion » à une série de messages, il importe d’étudier l’apport de l’ethos à la transmission efficace des messages de la campagne électorale, dont, comme on le voit, l’image publique du candidat.

Les élections israéliennes de 2013

La promesse d’une « nouvelle politique »

13Cette étude se concentre sur l’image de soi des candidats dans la campagne électorale israélienne de 2013. Une caractéristique typique de cette campagne électorale particulière était l’impression générale que « pour la première fois, il ne s’agissait pas de sécurité ou de problèmes sociaux » (Eyal 2013a : 2), mais plutôt qu’« elle était essentiellement centrée sur les personnalités des candidats » (Yerushalmi 2013 : 4). Plus important encore, les journalistes et experts s’accordaient à dire que la campagne électorale portait essentiellement sur le « changement », et que les résultats finaux prouvaient que « le public voulait voir de nouveaux visages, peu importe ce qu’ils représenteraient » (Kadmon 2013 : 4).

14Inspirée partiellement par le mouvement contestataire de 2011 (Gordon 2012), cette aspiration à un « changement » se reflétait dans la promesse d’une « nouvelle politique » qui – pour résumer certains des messages de la campagne – diminuerait le fossé traditionnel entre la « gauche » et la « droite » dans la politique israélienne, redéfinirait l’« intérêt public », établirait de nouvelles relations entre « citoyens » et « politiciens », et donneraient l’avantage à l’« intérêt général » sur des « loyautés partisanes » :

Les électeurs se sont exprimés clairement, et ont formulé leur préférence sans ambiguïté : assez des anciennes politiques, vive la nouvelle politique – transparence, responsabilité, tenir vos promesses et donner la priorité aux principes, et non pas aux sièges. (Plotzker 2013 : 1)

15Pour de nombreux observateurs, l’esprit de la « nouvelle politique », en tant que formule omniprésente qui balayait la campagne électorale, manifestait une nouvelle tendance dans la communication politique. Pour commencer, il semblait évident que la « nouvelle politique se sert de nouveaux médias » et que, de ce fait, des candidats qui fondent leur campagne sur le rejet de l’« ancienne politique », excluent également le « style de monologue associé à la propagande politique ancienne », en faveur d’un « dialogue avec le public » utilisant les réseaux sociaux (Leshem et Limor, n.d.). Dans une large mesure, cette nouvelle tendance a été associée aux nouvelles formes d’interaction sociale à l’ère des nouveaux médias. Un journaliste israélien célèbre commente ainsi :

Ce n’est pas une question d’idéologie, mais plutôt de langage. C’est le langage d’une génération formée par la révolution informatique des années 1990 […]. C’est le langage des gens qui se promènent le samedi avec leurs enfants et téléchargent une photo sur Facebook […]. C’est un langage à code ouvert. Vous pouvez l’écrire vers la droite, comme l’a fait Naftali Bennet. Vous pouvez l’écrire vers le centre-gauche, comme Yaïr Lapid. Il amène l’homme politique à être plus à la portée des gens ordinaires. (Eyal 2013b : 8)

Cas de figure et corpus

16Cet article se focalise sur la présentation de soi des trois candidats les plus identifiés avec la nouvelle tendance communicationnelle de la « nouvelle politique » : Yaïr Lapid, chef du nouvellement formé « parti de la classe moyenne », Yesh Atid (Il y a un futur), qui adopta la « nouvelle politique » comme slogan dominant et programme principal durant sa campagne ; Naftali Bennett, chef récemment élu du parti sioniste religieux Habayit Hayehudi (La maison juive), qui commença sa carrière politique en 2013 après une trajectoire professionnelle réussie en tant qu’ingénieur et entrepreneur high-tech ; et Shelly Yachimovich, chef du parti travailliste israélien (HaAvoda), auparavant journaliste renommée et l’une des premières politiciennes à adopter les réseaux sociaux comme outil d’interaction systématique avec le grand public.

  • 8 Sur l’usage des réseaux sociaux dans les campagnes électorales en Israël, on lira Haleva-Amir (2014 (...)

17Visant à capturer les éléments constitutifs du « nouveau langage » du marketing politique et la formation d’image du candidat à l’ère de la « nouvelle politique », cette étude présente une analyse systématique des pages Facebook personnelles de chaque candidat. Bien que d’autres réseaux sociaux, tels Twitter ou Instagram, aient été parfois utilisés par les candidats pendant la campagne, il semble que les pages Facebook aient joui de la faveur des candidats qui en ont fait un espace privilégié pour la diffusion régulière de leurs messages de campagne8. Ce choix s’explique, partiellement, par le fait que les pages Facebook permettent la création et la diffusion de messages à teneur substantielle du fait qu’elles sont particulièrement appropriées pour combiner de multiples images et illustrations, des clips vidéo et des textes relativement longs dans le cadre d’une seule publication. De plus – et ceci est notre justification principale pour donner la priorité aux pages Facebook – ces dernières constituent un domaine discursif qui facilite (ou simule) une communication directe entre les candidats et les publics visés, sans ingérence apparente d’une tierce partie. Ainsi que nous le montrerons, les pages Facebook ont été en grande partie édifiées et perçues comme des mini-blogs personnels, dans lesquels les candidats exprimeraient leur soi-disant « moi privé », et ont donc été stratégiquement conçues de manière à pouvoir se lire comme des autoportraits des candidats durant leur campagne.

Analyse

18L’analyse suit les pages Facebook des trois candidats sur une période de trois mois précédant le scrutin (22 octobre 2012 – 21 janvier 2013)9. Un survol préliminaire de toutes les interventions des candidats sur Facebook durant cette période révèle les conventions discursives utilisées par chacun d’entre eux : (1) l’emploi d’un langage informel et un style discursif brut et apparemment spontané ; (2) des remarques métatextuelles et l’établissement d’une distinction entre la « campagne officielle » et la campagne électronique ; (3) la narration et l’usage de récits et d’anecdotes.

« Salut, c’est moi… ! » : style informel et interaction décontractée

19Les publications des candidats sur Facebook ont tendance à adopter un style de communication informel, décontracté, voire même spontané, qui imite l’interaction quotidienne. Cette informalité se manifeste lexicalement par l’adoption d’un registre de langage familier et par l’utilisation récurrente de certaines expressions. Un exemple notable est l’habitude qu’avait Shelly Yachimovich d’ouvrir ses mises à jour de statut par : « Hi, c’est Shelly », s’identifiant ainsi par son prénom et saluant ses lecteurs par un « hi » (salut), qui ne sert en hébreu qu’à des interactions amicales et intimes, et n’est guère utilisé en public ni dans des contextes officiels. La formule « Hi, c’est Shelly » est culturellement perçue comme une forme de la salutation familière utilisée lors d’un appel téléphonique à un ami ou à des proches, et est par conséquent associée à la communication orale plutôt qu’écrite. De même, Naftali Bennet s’adresse constamment à ses lecteurs comme à « mes frères », terme d’adresse généralement associé à un langage vernaculaire ou à l’argot militaire, dans lequel un « frère » (Achi) est aussi un confrère combattant ; souvent adressée à des étrangers, l’expression « frère » produit une impression d’intimité et suscite un sentiment de solidarité entre frères métaphoriques ou, dans notre cas, confrères israéliens et/ou juifs.

20Cependant, l’informalité dépasse le choix de mots et d’expressions simulant des interactions quotidiennes entre amis et collègues. Elle régit aussi le rythme des mises à jour des statuts. Cette dimension est manifeste dans la fréquence aléatoire et imprédictible des publications, qui peuvent avoir lieu à raison de plusieurs fois dans la même journée, ou se limiter à quelques-unes par semaine. De plus, le rythme de ces mises à jour occasionnelles de statuts les fait paraître comme fortuites et spontanées du fait qu’elles s’écartent souvent des thèmes principaux de la campagne. Par exemple, Yachimovich, pendant une semaine particulièrement pluvieuse, afficha le 8 janvier 2013 une photo de son chien sur la plage de Tel-Aviv avec la légende : « Notre vieille chienne Luna est excitée par le temps. La voici pendant sa promenade matinale sur la plage déserte, le long de ma rue. »

Fig. 1. « Notre chienne Luna sur la plage »

Fig. 1. « Notre chienne Luna sur la plage »

Image publiée par Shelly Yachimovich le 8 janvier 2013. Reproduit avec la permission de l’auteur.

21Dans d’autres cas, le timing peut être moins arbitraire, mais le statut se portera sur un détail mineur, accessoire et plutôt anecdotique se rapportant à un événement important. Par exemple, le 9 janvier, Yachimovich afficha la photo d’un arc-en-ciel prise de la fenêtre de sa voiture durant la semaine pluvieuse précitée, en indiquant : « Je viens de prendre cette photo en route vers Bat-Hefer, où des maisons et des usines ont été inondées. Nous avons rendez-vous avec le président du Conseil régional. »

Fig. 2. « Arc-en-ciel pris de la fenêtre de sa voiture »

Fig. 2. « Arc-en-ciel pris de la fenêtre de sa voiture »

Image publiée par Shelly Yachimovich le 9 janvier 2013. Reproduit avec la permission de l’auteur.

22Alors que Yachimovich publiait un commentaire informel pour informer son lecteur qu’elle était en route vers une région endommagée par la tempête, Bennett profitait du temps orageux, dans la soirée du 8 janvier, pour partager ses pensées qui allaient vers « les milliers de combattants de l’Armée de défense d’Israël qui nous protègent dans le froid, la pluie, le vent et la neige. Envoyons-leur un énorme et chaleureux “like” ! ». Dans de nombreux cas, ces publications apparemment informelles évoquent une information personnelle ou un sujet entièrement détaché de la campagne, comme le sport ou la culture populaire. Yaïr Lapid a mis ses lecteurs au courant de son quarante-neuvième anniversaire le 5 novembre, tandis que Naftali Bennett partageait son admiration, un mois seulement avant les élections, pour un participant à un concours télévisé populaire de chant, déclarant :

On se trouve parfois face à des chansons ou à des gens auxquels on ne peut simplement pas résister. Cela m’est arrivé hier. Samedi soir le jeune Ofir Ben-Shitrit s’est produit avec une voix pure, et une personnalité charmante. J’avais besoin de partager ceci avec vous… (le 16 décembre 2015)

23L’informalité, manifestée par le rythme de publication, le choix des mots et des sujets, crée ainsi l’impression que les mini-blogs des candidats sur Facebook ne sont pas soumis à la campagne et ne sont pas subordonnés à ses messages et son programme. De nombreuses publications ne transmettent aucun message politique per se et sont constituées de remarques personnelles et de commentaires sur les thèmes en vogue sur les réseaux sociaux. En réalité, ces messages informels sont souvent perçus comme des commentaires spontanés et non programmés, qui ne font pas partie des activités du marketing politique menées par la campagne officielle. L’informalité imite l’interaction entre amis et, ce faisant, ouvre une nouvelle perspective sur la « campagne officielle » en établissant une distinction entre « officiel » et « informel » : une distinction entre, d’une part, les messages standards soigneusement traités et élaborés provenant de la campagne officielle et, d’autre part, les publications sur Facebook, qui seraient quant à elles d’ordre personnel et amical, destinées à paraître spontanées et sans retouches.

« Ici nous pouvons discuter de ce qui est réellement important » : métadiscours et making-of de la campagne

24Le discours de la campagne électronique comporte une quantité importante d’énonciations métatextuelles (ou métadiscursives), c’est-à-dire des remarques et des commentaires dans lesquels le candidat décrit, évalue ou réfléchit à son propre discours. Ces méditations apparemment introspectives des candidats sur le contenu des textes, sur leur propre fabrication intensifient plus profondément la distinction ressentie entre la « campagne officielle » sur les médias traditionnels, et la chaîne alternative de communication en ligne de l’espace virtuel. Yaïr Lapid fournit deux exemples permettant d’illustrer cette convention de métadiscours : le premier porte sur le dispositif d’énonciation (les réseaux sociaux), et le second sur le contenu de son message. À deux semaines des élections, le 8 janvier, il notait dans une publication : « Nous avons la chance de vivre dans une ère de réseaux sociaux, car nous pouvons y discuter de ce qui est réellement important. » Quand son fils a été mobilisé pour faire son service militaire, le 12 décembre 2012, Lapid a affiché une photo (de style snapshot et que tous les parents prennent dans cette situation) de son fils debout devant le portail d’entrée du centre de recrutement de l’armée israélienne avec la légende : « Ceci n’est pas un message politique. Voici mon garçon qui se joint à l’armée. En fait, ceci pourrait être un message politique malgré tout. »

Fig. 3. « Ceci n’est pas un message politique »

Fig. 3. « Ceci n’est pas un message politique »

Image publiée par Yair Lapid le 12 décembre 2012. Reproduit avec la permission de l’auteur.

25Par conséquent, des remarques métatextuelles sont souvent utilisées pour caractériser la campagne électronique comme étant une plateforme de communication immédiate qui facilite une interaction libre dans laquelle la production de sens est transparente, comme si l’on réfléchissait ensemble sur la signification des textes publiés. Dans d’autres cas, les remarques métatextuelles se rapportent à la campagne elle-même, par la description d’impressions personnelles, voire privées, de pensées et d’expériences vécues durant cette période. Naftali Bennett, par exemple, présente des commentaires sur de nombreuses activités, et affiche constamment des déclarations qui relatent son expérience en tant que candidat politique, telle cette annonce publiée après une fête de Hanoukka célébrée avec un groupe d’adeptes :

Nous avons eu une journée tellement extraordinaire aujourd’hui. […] Pour ceux d’entre vous qui pensent qu’une campagne électorale est frustrante – vous avez tort. C’est merveilleux. Cela vous permet d’entrer en contact avec la nation israélienne, de rencontrer de nouvelles personnes et de visiter d’anciens endroits. (11 décembre 2012)

Fig. 4. « Entrer en contact avec la nation israélienne »

Fig. 4. « Entrer en contact avec la nation israélienne »

Image publiée par Naftali Bennett le 11 décembre 2012. Reproduit avec la permission de l’auteur.

26Lorsque Yaïr Lapid publie, le 29 novembre, une remarque festive pour célébrer le fait d’être parvenu à cent mille adeptes sur Facebook, il note qu’il a plaisir à voyager à travers le pays, parce que « rien ne peut remplacer le contact personnel avec les gens que vous rencontrez au fil de votre chemin ». Il ajoute ensuite que « la nouvelle politique signifie de nouveaux outils [les réseaux sociaux] par lesquels on peut communiquer directement avec tant de personnes », et conclut que « c’est toujours intéressant de converser avec vous au sujet de notre avenir ». Lapid compare ses interactions en ligne à des rencontres personnelles avec des électeurs, incarnant ainsi une image qui manifeste que son personnage sur Facebook représente exactement le même Yaïr Lapid que l’on pourrait rencontrer en personne.

27En dernier lieu, des remarques métatextuelles sont utilisées pour transmettre la perception d’un processus transparent de création de message. La réflexivité perçue expose non seulement les dynamiques de la campagne en fournissant une description détaillée d’activités variées, mais aussi les motivations et la logique qui justifient diverses manœuvres persuasives. Cet usage est typique des débats en ligne entre candidats : il arrive très souvent qu’ils présentent leurs arguments, tout en expliquant leurs modes de persuasion et en « exposant » leurs mouvements rhétoriques. Une telle situation s’est par exemple produite un mois avant les élections, lorsque Yachimovich et Lapid ont débattu du système de distribution de l’eau en Israël et de son coût. Cela a commencé par une annonce de Lapid, le 16 décembre, dans laquelle il critiquait l’incapacité de Yachimovich à promouvoir des réformes en raison de ses engagements envers les syndicats. En réponse, la candidate travailliste a réfuté les accusations de son adversaire, et a avancé ses propres arguments dans une publication datant du 18 décembre :

Vous avez déjà pu vous rendre compte que je critique et me confronte en général à Netanyahu, Lieberman et Steinitz, mais cette fois-ci il faut que je réponde au message publié par Lapid au sujet du problème de distribution de l’eau. Son message était truffé d’erreurs factuelles hilarantes…

Le lendemain même, Lapid répondait en reconnaissant ses erreurs :

J’ai revérifié. Elle avait raison et j’avais tort. Cela aussi fait partie de la Nouvelle Politique – vous faites une erreur ? Manifestez-vous, excusez-vous et corrigez-vous. Et maintenant que nous savons qu’il n’y a aucune honte à reconnaître ses erreurs, quand admettra-t-elle que son programme économique se base sur des chiffres inexacts ?

28La métatextualité agit donc comme niveau supplémentaire d’interprétation, grâce auquel les candidats donnent un aperçu de leur point de vue personnel sur la « campagne officielle », caractérisent leur propre campagne électronique comme une plateforme exclusive pour réaliser une interaction directe avec leurs adeptes, et exposent le mécanisme qui produit le message. Dans une certaine mesure, les publications des candidats sur Facebook servent d’« annexes » de la campagne officielle en révélant ainsi des informations supplémentaires aux lecteurs, et en leur fournissant une sorte d’accès au « making-of », aux coulisses de la campagne, depuis le point de vue du candidat.

« J’ai une ravissante petite histoire pour vous » : récits et narrations

29Le discours en ligne des candidats abonde en narrations et anecdotes, ainsi qu’en descriptions de scènes et d’interactions diverses. Plus que le discours informatif (c’est-à-dire fournir des renseignements sur les activités et évolutions) et le discours déclaratif (c’est-à-dire l’affirmation de positions, réactions et programmes), ce mode de discours narratif offre aux candidats la possibilité de dévoiler une vaste gamme de sentiments et d’exposer leurs motivations personnelles et leur univers associatif. En tant que narrateurs, ils révèlent leurs émotions, leurs valeurs et leur milieu culturel, et se présentent comme des personnalités complexes.

30Ces narrations construites sont en premier lieu mobilisées afin de promouvoir des arguments moraux. Cela est particulièrement vrai dans le cas de Naftali Bennett, dont le compte Facebook est riche en récits et légendes qui ne sont pas nécessairement liés à la campagne ou à son programme politique, mais qui proviennent plutôt de la tradition juive et du folklore israélien. Néanmoins, tous amènent à des conclusions pertinentes pour sa campagne. Parmi ses nombreux « récits de la semaine » ou « légendes pour le Sabbat », on peut lire une « ravissante petite histoire » sur Rabbi Aryeh Levin, personnalité importante dans la section religieuse de la droite israélienne, publiée le 3 janvier 2013. Levin, selon l’histoire de Bennett, aborda un jour un jeune soldat qui avait quitté la religion et avait honte de se montrer face au rabbin sans kippa :

« Vous avez un cœur grand et bon, dit le bon Rabbin, et c’est ce qui compte. Vous êtes aussi un soldat qui risque sa vie pour nous tous en Israël. Je vous en prie, venez partager mon thé ; votre kippa est probablement plus grande que la mienne », dit-il.

31Se positionnant au cœur de la tradition folklorique et de la mémoire collective de la droite israélienne, Bennet utilise cette anecdote pour s’adresser aux électeurs laïques qui, malgré leur adhésion à ses positions stratégiques et économiques, sont toujours méfiants à l’égard d’un parti religieux.

32Alors que Naftali Bennet se sert de récits et d’anecdotes symboliques pour avancer ses idées, Yaïr Lapid utilise des illustrations scénographiques tangibles profondément ancrées dans l’imaginaire culturel israélien dans le but de promouvoir ses propres messages. Dans l’un d’eux, publié le 14 décembre, il s’en prend à l’inégalité dans la société en ce qui concerne le service militaire, en débutant par la description d’un événement banal dans une famille israélienne typique :

Vendredi midi. C’est le moment où nos enfants rentrent de l’armée […] excepté ceux que le gouvernement a exemptés de leur devoir militaire parce que nos vieux politiciens craignent trop les partis ultra-orthodoxes.

33Lapid se sert donc d’un discours narratif pour contextualiser ses messages politiques, et les insère dans les représentations sociales dominantes de la société israélienne contemporaine. Yachimovich a utilisé une stratégie similaire, mais en donnant la parole à des « gens ordinaires » et aux « Israéliens moyens », qui ont été invités à écrire directement à l’équipe de la candidate leurs histoires personnelles, une anecdote ou une expérience les encourageant à voter pour le parti travailliste. Ces textes et images ont été publiés régulièrement sur la page de Yachimovich, s’ouvrant toujours avec la formule « hi, c’est… » suivie du prénom de l’intervenant. Le résultat est une série de récits personnels d’Israéliens de divers secteurs, préoccupations, âges ou affiliations socio-ethniques, qui dévoilent leur « moment d’illumination » par rapport à la candidate :

Hi, c’est Ronna. […]. Vous connaissez les gens qui votent à chaque élection pour n’importe quel parti qui est à la mode ? J’étais comme ça aussi. J’ai voté sans savoir pourquoi, au parti qui était le plus en vogue. […] Durant la protestation [de 2011] j’étais militante à Jérusalem. C’est parmi les tentes dressées dans les rues qu’on a discuté, sur l’économie sur des sujets liés aux problèmes publics. Discussions approfondies sur les différents partis politiques et leurs programmes. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que c’était le parti travailliste, dirigé par Shelly Yachimovich qui représentait le plus mes propres valeurs et mon idéologie : justice sociale, égalité…

34Ainsi, ces récits personnels sous forme de témoignages remplissent une double fonction rhétorique. Ils placent tout d’abord les messages de la campagne au cœur d’une réalité israélienne très tangible, et ils font ensuite apparaître ces messages comme l’expression authentique des vrais Israéliens, ce qui facilite la constitution d’un argument ad populum ; de plus, ces récits illustrent la popularité (supposée) grandissante de la candidate, ce qui sert d’appel à la majorité.

Les microblogs des candidats comme journal de campagne personnel

35En plus d’informations pratiques sur les activités en cours et l’affirmation de positions, les microblogs des candidats sur Facebook fournissent une description exhaustive, à la première personne, de l’expérience qu’a le candidat de la campagne. Les aspects discursifs de la campagne électronique – informalité, métatextualité et narrativité – constituent une expérience de lecture similaire à celle que procure la lecture d’un journal intime. De même que dans d’autres formes d’écriture personnelle, telles les carnets de voyage ou les journaux intimes, le discours sur Facebook est bien moins informatif qu’interprétatif, du fait qu’il permet d’accéder au point de vue personnel de l’auteur et à sa perspective subjective sur une réalité « objective ». Effectivement, pour de nombreux spécialistes, les blogs de toutes sortes proviennent du genre littéraire du journal intime qui, depuis le xvie siècle, est défini par ces trois caractéristiques : écrire sur le présent, écrire régulièrement des chapitres consécutifs, et témoigner de l’expérience personnelle de l’auteur (Miller et Shepherd 2004). Mais c’est surtout la perspective personnelle qui fonde la ressemblance culturelle entre les journaux intimes et les blogs en général, et qui modèle l’expérience de lecture du blog comme une chronique des pensées et réflexions de l’auteur. Il apparaît que les blogs sont de plus en plus appréciés en tant que genre légitime de présentation de soi et c’est précisément le choix des mots, le style et les références culturelles qui « révèlent le caractère d’une personne », et instaurent le blog comme une forme avantageuse de représentation de soi (van Dijck 2004 : § 20).

36En tant que « journal de campagne », comme dans toutes sortes d’écriture autobiographique à la première personne, les microblogs de candidats impliquent une unité entre l’auteur, le narrateur et le protagoniste, qui ramènent tous au candidat lui-même. La pratique de production-consommation en temps réel – c’est-à-dire rapporter des événements au moment où ils ont lieu, ou immédiatement après – permet elle aussi de considérer les microblogs comme la description d’une « réalité vécue en temps réel » (Karlsson 2007) et, par conséquent, comme une réflexion, voire une représentation authentique de la personnalité du candidat (Lawson-Borders et Kirk 2005).

37Dans notre cas, il s’agit d’un effet très similaire à celui qui s’impose lorsque des écrivains célèbres adoptent des formes variées d’écriture de soi – journaux intimes ou autobiographies. Ce type de mouvement constitue une transgression, du fait que les écrivains s’écartent de leur rôle ordinaire de conteur et de leur position institutionnalisée de « narrateur » pour exposer leur « vrai moi ». De la même manière, nous maintenons ici que l’usage de microblogs par les candidats facilite le même genre de transgression, dans la mesure où ils s’écartent de leur rôle institutionnalisé de produits du marketing politique pour intégrer un espace discursif où ils peuvent, en apparence du moins, entreprendre une interaction authentique et sans mise en scène. Dit simplement, ils peuvent arrêter de jouer le rôle qui leur est assigné par le directeur de campagne et commencer à « être eux-mêmes », comme êtres empiriques dans le monde. En ce sens, les microblogs vont de pair avec la tendance à la « personnalisation » de la communication politique et des campagnes électorales en Israël (Rahat et Sheafer 2005), ainsi que dans d’autres démocraties occidentales (van Aelst et al. 2005).

38Ce sont précisément ces caractéristiques discursives des microblogs contrastant avec le perfectionnisme et le professionnalisme de la campagne traditionnelle, qui fournissent à la campagne électorale un certain degré de crédibilité (elles paraissent authentiques). Le comportement discursif des candidats sur les réseaux sociaux consolide encore plus la distinction – fréquemment affirmée par les candidats – entre la campagne « standard » ou « officielle », et la communication de la campagne électronique. Cette distinction participe aussi à la distribution des rôles et à la construction des auditoires : tandis que le public visé par la campagne « officielle » continue à être le récepteur passif d’un message persuasif diffusé aux masses, le consommateur de la campagne électronique devient un agent engagé. Outre la nature interactive des réseaux sociaux, l’acte même de « suivre » un candidat (sans même partager ou répondre) fait du lecteur un destinataire privilégié qui interagit volontairement avec le candidat ou, tout du moins, qui fait partie d’un public cible distinct, avec lequel les candidats communiquent « naturellement », dans un échange qui paraît amical et informel.

L’ethos numérique du « citoyen expert »

39Quelle est donc la fonction rhétorique de la campagne électorale ? Elle est bien plus complexe que celle qui consisterait à fournir un dispositif supplémentaire pour la diffusion de messages, ou encore à établir un lieu plus commode pour l’interaction avec des adeptes. Nous suggérons ici de considérer les microblogs des candidats comme des discours de « méta-campagne ». En premier lieu, dans une période de cynisme et de scepticisme croissants à l’égard du marketing politique, associé de très près à l’« ancienne politique » (Norris 2002), les microblogs des candidats semblent crédibiliser le contenu de la « campagne officielle ». Ils autorisent une communication directe entre le public et le candidat, au sein de laquelle ce dernier se présente comme une personnalité complexe, plutôt que comme un personnage unidimensionnel dont l’image publique est conçue stratégiquement par des directeurs de campagne, des experts des relations publiques et des spécialistes du marketing. Ainsi, du point de vue rhétorique, les microblogs des candidats ne rendent pas les contenus de la campagne « officielle » inutiles. Bien au contraire : leur apport spécifique unique à la campagne générale est lié au désir de promouvoir des images de candidats authentiques et complexes, qui sont indispensables pour l’ensemble de la campagne. Autrement dit, si la campagne générale diffuse les messages politiques du candidat, c’est bien au sein de la campagne électronique que se construit son ethos rhétorique.

40En second lieu, dans la mesure où les réseaux sociaux semblent aller de pair avec le concept de « nouvelle politique », il apparaît que les microblogs sur Facebook permettent au candidat d’afficher l’image d’un agent politique bien adapté à l’ère des nouveaux médias. En démontrant à maintes reprises leurs compétences discursives sur le Web et leur savoir-faire d’utilisateur de Facebook, les candidats se positionnent en acteurs habilités à une nouvelle culture politique. En fait, dans la mesure où les nouveaux médias caractérisent la « nouvelle politique », ce nouveau type de « politique des citoyens » (citizen’s politics) (Hay et Stoker 2009) où se manifestent les organisations de la société civile et les citoyens engagés, et où s’exprime une hostilité envers la « politique ancienne », il semble que les microblogs deviennent le lieu privilégié où les candidats peuvent construire leur ethos rhétorique en tant que « citoyens experts » (expert citizen).

41Dans leur discussion sur les nouvelles formes de participation politique, Henrik Bang (2005), suivi par Yaojun Li et David Marsh (2008), emploient la formule de « citoyen expert » pour se référer à ce type de citoyens engagés dans le militantisme politique, utilisant leurs compétences professionnelles pour aboutir à un changement social, actifs sur les réseaux sociaux, et qui peuvent influencer les institutions et le système politique (Li et Marsh 2008 : 250). C’est bien cette image qui se construit dans les microblogs des candidats : à la fois dans le style et la teneur, se dégage de la campagne électronique l’ethos rhétorique du candidat en tant que citoyen expert. Et c’est bien cet ethos de citoyen expert qui rend crédible la promesse de ces trois candidats de s’engager dans une « nouvelle politique ».

42Pour conclure, cette étude montre qu’en intégrant les règles discursives de la « nouvelle politique », les candidats cherchent à construire un nouveau discours d’authenticité, grâce à un vocabulaire propre aux réseaux sociaux. L’ethos numérique, adapté aux nouveaux médias permet ainsi aux candidats d’afficher leur appartenance – supposée – à la société civile, et de réclamer la confiance des électeurs.

Haut de page

Bibliographie

Aelst, Peter Van, Sheafer, Tamir et Stanyer, James, 2005, « Personalization of Mediated Political Communication: A Review of Concepts, Operationalizations and Key Findings », Journalism: Theory, Practice and Criticism, vol. 13, no 2, p. 203-220.

Alcorn, Marshall W. Jr, 1994, « Self-Structure as a Rhetorical Device: Modern Ethos and the Divisiveness of the Self », dans J. S. Baumlin et T. F. Baumlin (dir.), Ethos: New Essays in Rhetorical and Critical Theory, Dallas, Southern Methodist University Press, p. 3-35.

Allen, Jerry L. et Post, Daniel J., 2004, « Source Valence in Assessing Candidate Image in a Local Election », Communication Research Reports, vol. 21, no 2, p. 174-187.

Amossy, Ruth, 1999, « L’ethos au carrefour des disciplines : rhétorique, pragmatique, sociologie des champs », dans R. Amossy (dir.), Images de soi dans le discours : la construction de l’ethos, Paris-Lausanne, Delachaux & Niestlé, p. 127-154.

Amossy, Ruth, 2010, La Présentation de soi : ethos et identité verbale, Paris, PUF.

Aristote, 1991, Rhétorique, livres I et II, trad. M. Dufour, Paris, Gallimard.

Balmas, Meital et Sheafer, Tamir, 2010, « Candidate Image in Election Campaigns: Attribute Agenda Setting, Affective Priming, and Voting Intentions », International Journal of Public Opinion Research, vol. 22, no 2, p. 204-226.

Bang, Henrik, 2005, « Everyday Makers and Expert Citizens », dans J. Newman (dir.), Remaking Governance: Peoples, Politics and the Public Sphere, Bristol, The Policy Press, p. 159-179.

Bimber, Bruce et Davis, Richard, 2003, Campaigning Online. The Internet in U.S. Elections, New York, Oxford University Press.

Brinton, Alan, 1985, « A Rhetorical View of the Ad Hominem », Australasian Journal of Philosophy, vol. 63, no 1, p. 50-63.

Brinton, Alan, 1986, « Ethotic Argument », History of Philosophy Quarterly, vol. 5, no 3, p. 245-258.

Buchanan, Bruce, 1988, « Sizing-Up Candidates », PS: Political Science and Politics, vol. 21, no 2, p. 250-256.

Charaudeau, Patrick, 2005, Le Discours politique : les masques du pouvoir, Paris, Vuibert.

Cherry, Roger D., 1988, « Ethos versus Persona: Self-Representation in Written Discourse », Written Communication, vol. 5, no 3, p. 251-276.

Dijck, José van, 2004, « Composing the Self: Of Diaries and Lifelogs », The Fibreculture Journal, no 3, [En ligne], http://three.fibreculturejournal.org/fcj-012-composing-the-self-of-diaries-and-lifelogs/, consulté le 15 août 2015.

Eyal, Nadav, 2013a, « The Choice to Weaken the Emptiness », Ma’ariv, January 20, p. 2.

Eyal, Nadav, 2013b, « To Speak in a New Language », Ma’ariv – Musaf-Shabat, January 25, p. 8.

Funk, Carolyn L., 1999, « Bringing the Candidate into Models of Candidate Evaluation », The Journal of Politics, vol. 61, no 3, p. 700-720.

Glad, Betty, 1998, « Evaluating Presidential Character », Presidential Studies Quarterly, vol. 28, no 4, p. 861-872.

Gordon, Uri, 2012, « Israel’s “Tent Protests”: The Chilling Effect of Nationalism », Social Movement Studies, vol. 11, no 3-4, p. 349-355.

Hacker, Kenneth L. (dir.), 1995, Candidate Images in Presidential Elections, Westport, CT, Praeger.

Hacker, Kenneth L., 2004, « The Continued Importance of the Candidate Image Construct », dans K. L. Hacker (dir.), Presidential Candidate Images, Lanham, MD, Rowman & Littlefeild, p. 1-20.

Hacker, Kenneth L., Zakahi, Walter R. J., Giles, Maury et McQuitty, Shaun, 2000, « Components of Candidate Images: Statistical Analysis of the Issue-Persona Dichotomy in the Presidential Campaign of 1996 », Communication Monographs, vol. 67, no 3, p. 227-238.

Haleva-Amir, Sharon, 2011, « Online Israeli politics: Current state of the art », Israel Affairs, vol. 17, no 3, p. 467-485.

Haleva-Amir, Sharon, 2014, « Political Communication: E-Campaigns in the 2013 Israeli Elections », dans R. Mann et A. Lev-On (dir.), Annual Report: The Israeli Media in 2013 – Agendas, Uses and Trends, Ariel, Ariel University Press, p. 79-90 (en hébreu).

Halloran, S. Michael, 1982, « Aristotle’s Concept of Ethos, or If Not His Somebody Else’s », Rhetoric Review, vol. 1, no 1, p. 58-63.

Hay, Colin et Stoker, Gerry, 2009, « Revitalising Politics: Have We Lost the Plot? », Representation, vol. 45, no 3, p. 225-236.

Hellweg, Susan A., 2004, « Campaign and Candidate Image in American Presidential Elections », dans K. L. Hacker (dir.), Presidential Candidate Images, Lanham, MD, Rowman & Littlefeild, p. 21-47.

Herring, Susan C., Scheidt, Lois Ann, Wright, Elijah et Bonus, Sabrina, 2005, « Weblogs as a Bridging Genre », Information Technology & People, vol. 18, no 2, p. 142-171.

Jasinski, James, 2001, Sourcebook on Rhetoric: Key Concepts in Contemporary Rhetorical Studies, Thousand Oaks, CA, Sage.

Kadmon, Sima, 2013, « A Vote for the Future », Yedioth Ahronoth, January 24, p. 4.

Karlsson, Lena, 2007, « Desperately Seeking Sameness: The Processes and Pleasures of Identification in Women’s Diary Blog Reading », Feminist Media Studies, vol. 7, no 2, p. 137-153.

Kotler, Philip et Levy, Sidney J., 1969, « Broadening the Concept of Marketing », Journal of Marketing, vol. 33, no 1, p. 10-15.

Lawson-Borders, Gracie et Kirk, Rita, 2005, « Blogs in Campaign Communication », American Behavioral Scientist, vol. 49, no 4, p. 548-559.

Leff, Michael, 2009, « Perelman, Ad Hominem Argument, and Rhetorical Ethos », Argumentation, vol. 23, no 3, p. 301-311.

Leshem, Baruch et Limor, Yehiel, n.d., « Yair Lapid and Facebook: New Politics and New Media », Israel Public Relations Association website, [En ligne], http://bit.ly/1pR5j0l, consulté le 15 août 2015.

Lev-On, Azi, 2011, « Campaigning Online: Use of the Internet by Parties, Candidates and Voters in National and Local Election Campaigns in Israel », Policy & Internet, vol. 3, no 1, p. 1-28.

Li, Yaojun et Marsh, David, 2008, « New Forms of Political Participation: Searching for Expert Citizens and Everyday Makers », British Journal of Political Science, vol. 38, no 2, p. 247-272.

Louden, Allen et McCauliff, Kristen, 2004, « The “Authentic Candidate”: Extending Candidate Image Assessment », dans K. L. Hacker (dir.), Presidential Candidate Images, Lanham, MD, Rowman & Littlefeild, p. 85-103.

Maingueneau, Dominique, 1993, Le Contexte de l’œuvre littéraire. Énonciation, écrivain, société, Paris, Dunod.

Marland, Alex, 2003, « Marketing Political Soap: A Political Marketing View of Selling Candidates Like Soap, of Electioneering as a Ritual, and of Electoral Military Analogies », Journal of Public Affairs, vol. 3, no 2, p. 103-115.

McCroskey, James C., 1966, « Scales for the Measurement of Ethos », Speech Monographs, vol. 33, no 1, p. 65-72.

McCroskey, James C. et Young, Thomas J., 1981, « Ethos and Credibility: The Construct and its Measurement after Three Decades », Central States Speech Journal, vol. 32, no 1, p. 24-34.

Mendelsohn, Matthew, 1996, « The Media and Interpersonal Communications: The Priming of Issues, Leaders, and Party Identification », The Journal of Politics, vol. 58, no 1, p. 112-125.

Miller, Carolyn R. et Shepherd, Dawn, 2004, « Blogging as Social Action: A Genre Analysis of the Weblog », dans L. Gurak, S. Antonijevic, L. A. Johnson, C. Ratliff et J. Reyman (dir.), Rhetoric, Community and Culture of Weblogs, [En ligne], http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/11299/172818, consulté le 15 août 2015.

Morreale, Joanne, 1993, The Presidential Campaign Film: A Critical History, Westport, CN, Prager.

Nimmo, Dan et Savage, Robert L., 1976, Candidates and Their Images: Concepts, Methods, and Findings, Pacific Palisades, CA, Goodyear.

Norris, Pippa, 2002, « Do Campaign Communications Matter for Civic Engagement? American Elections from Eisenhower to George W. Bush », dans D. Farrell et R. Schmitt-Beck (dir.), Do Political Campaigns Matter? Campaign Effects in Elections and Referendums, Londres, Routledge, p. 127-144.

Pfiffner, James P., 2004, The Character Factor, College Station, TX, A&M University Press.

Plotzker, Sever, 2013, « A Responsible Adult Needed », Yedioth Ahronot – Mamon, 26 janvier, p. 1.

Rahat, Gideon et Sheafer, Tamir, 2005, « The Personalization(s) of Politics: Israel, 1949-2003 », Political Communication, vol. 24, no 1, p. 65-80.

Rosenberg, Shawn W., Bohan, Lisa, McCafferty, Patrick et Harris, Kevin, 1986, « The Image and the Vote: The Effect of Candidate Presentation on Voter Preference », American Journal of Political Science, vol. 30, no 1, p. 108-127.

Serra, Gilles, 2010, « Polarization of What? A Model of Elections with Endogenous Valence », The Journal of Politics, vol. 72, no 2, p. 426-437.

Shyles, Leonard, 1984, « Defining “Images” of Presidential Candidates from Televised Political Spot Advertisements », Political Behavior, vol. 6, no 2, p. 171-181.

Verser, Rebecca et Wicks, Robert H., 2006, « Managing Voter Impression: the Use of Images on Presidential Candidate Web Sites During the 2000 Campaign », Journal of Communication, vol. 56, no 1, p. 178-197.

Whitehead, Jack L., 1968, « Factors of Source Credibility », Quarterly Journal of Speech, vol. 54, no 1, p. 59-63.

Wring, Dominic, 1997, « Reconciling Marketing with Political Science: Theories of Political Marketing », Journal of Marketing Management, vol. 13, no 7, p. 651-663.

Yerushalmi, Shalom, 2013, « The Main Thing is the Participation », Ma’ariv, 22 janvier, p. 4.

Haut de page

Notes

1 Voir, par exemple, Funk (1999) et Mendelsohn (1996).

2 Voir, en particulier, l’ouvrage fondateur de Dan Nimmo et Robert L. Savage (1976), et les deux ouvrages dirigés par Kenneth L. Hacker (1995 et 2004).

3 Nous reprenons ici la fameuse expression utilisée par Philip Kotler et Sidney J. Levy (1969 : 10). Pour une discussion sur le « marketing politique » et les images, voir Wring (1997).

4 Pour un aperçu de la littérature consacrée aux rapports entre image et positionnement des candidats, voir Hellweg (2004).

5 Voir, à ce sujet, Hacker et al. (2000) et Serra (2010).

6 Pour une discussion sur la notion classique d’ethos dans les études anglo-saxonnes, voir Cherry (1988) et Halloran (1982).

7 Nous traduisons vers le français toutes les citations de l’anglais et de l’hébreu.

8 Sur l’usage des réseaux sociaux dans les campagnes électorales en Israël, on lira Haleva-Amir (2014), Haleva-Amir (2011) et Lev-On (2011).

9 Voir https://www.facebook.com/YairLapid, https://he-il.facebook.com/ShellyYachimovich, https://he-il.facebook.com/NaftaliBennett.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Fig. 1. « Notre chienne Luna sur la plage »
Légende Image publiée par Shelly Yachimovich le 8 janvier 2013. Reproduit avec la permission de l’auteur.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/docannexe/image/3039/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 416k
Titre Fig. 2. « Arc-en-ciel pris de la fenêtre de sa voiture »
Légende Image publiée par Shelly Yachimovich le 9 janvier 2013. Reproduit avec la permission de l’auteur.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/docannexe/image/3039/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 428k
Titre Fig. 3. « Ceci n’est pas un message politique »
Légende Image publiée par Yair Lapid le 12 décembre 2012. Reproduit avec la permission de l’auteur.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/docannexe/image/3039/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 540k
Titre Fig. 4. « Entrer en contact avec la nation israélienne »
Légende Image publiée par Naftali Bennett le 11 décembre 2012. Reproduit avec la permission de l’auteur.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/docannexe/image/3039/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 599k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Eithan Orkibi, « Ethos numérique et image de candidat dans les campagnes électroniques : le cas des élections israéliennes de 2013 »Itinéraires [En ligne], 2015-3 | 2016, mis en ligne le 01 juillet 2016, consulté le 10 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/3039 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/itineraires.3039

Haut de page

Auteur

Eithan Orkibi

Université d’Ariel, ADARR

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search