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Approches théoriques des hybridités cinématographiques

L’hybridité entre la musique et l’image au cinéma : la question du support

The Hybridity Between Music and Cinematographic Image: the Question of the Medium
Violaine Anger

Résumés

Cet article compare trois œuvres marquées, à l’image, par l’abstraction, et par un travail étroit sur le lien entre la musique et l’image : certaines aquarelles de Paul Klee, images immobiles mais imprégnées d’une réflexion sur le temps ; Toccata et Fugue de Bach dans la version de Fantasia de Walt Disney ; Trama de Christian Lebrat.
La notion d’hybridité semble pertinente pour Klee, très peu pertinente pour Disney et sans doute pertinente pour Lebrat, mais au prix d’un changement d’objet : le travail sur la pellicule, contrairement à Klee qui travaille le support comme lieu d’accueil d’une énergie sans orientation, de lignes et de couleurs. Disney, focalisé sur la question de la synchronisation, contourne ces questions, préférant demeurer en fait dans le cadre de la représentation et de l’imitation. Cette comparaison permet donc de préciser l’un des enjeux majeurs de la notion d’hybridité, celle du support et de comprendre qu’elle engage, en fait, une sémiologie.

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Texte intégral

1Dans un sens premier, l’hybridité est la rencontre d’éléments hétérogènes qui s’interrogent l’un par l’autre et se transforment au contact l’un de l’autre. Il ne s’agit pas d’union ou de réunion des arts, d’influence d’un art sur un autre, de médiation entre un élément d’une nature et un autre d’une autre nature : l’hybridité implique la transformation. Celle-ci peut ne pas être convaincante : on obtient alors des monstres. Mais elle peut donner lieu à des réussites extraordinaires : ainsi l’écriture peut être considérée comme la transformation de temps, de son, d’articulations gutturales, de logos en un tracé visible sur une surface matérielle qui n’a rien à voir, au départ, avec la parole qu’elle accueille. L’écriture pourrait ainsi être considérée comme un phénomène hybride : pour écrire, quelle que soit l’écriture considérée, il faut un imaginaire spécifique du support sur lequel la parole sera rendue visible. Écrire suppose une transformation imaginaire de la pierre, du parchemin, du sable… en une surface adéquate pouvant recevoir ce qui lui est hétérogène.

2Si l’on interroge la notion au cinéma, il s’agit de comprendre comment un élément visuel immobile, celui qui est imprimé sur une surface par la photographie, est relié à du mouvement et surtout à du son organisé, sachant que ce dernier est aussi le lieu d’un travail sur le mouvement et le temps. Mouvement (et temps) sont des éléments communs à l’image qui bouge et à la musique ; l’hétérogénéité vient des sens – audition dans un cas, vision dans l’autre – et donc du travail sur la matérialité des éléments qui entrent en jeu : écran, lumière, pellicule éventuellement, production sonore vocale ou instrumentale… L’hybridité peut donc concerner toutes sortes de paramètres. Elle suppose en tout cas rencontre entre éléments au départ hétérogènes : cette rencontre implique qu’ils soient travaillés et transformés l’un par l’autre. Il ne s’agit pas de medium ni d’« intermédialité », approche qui conserve les différences sans interroger la manière dont des matières de nature différentes sont repensées (Anger, 2021). Nous voudrions montrer ici que l’un des enjeux importants de cette rencontre est, dans tous les cas, l’imaginaire du support. Là se trouve en effet le point de rencontre entre ce que l’on voit et ce que l’on entend. En fonction de ce que l’on attend du support, il y a ou non phénomène d’hybridité.

3À cet effet, nous voudrions comparer trois œuvres directement liées à une réflexion sur les liens entre musique et image, et présentant des parentés en termes de style visuel. Le peintre suisse Paul Klee, violoniste quasi professionnel, a toute sa vie poursuivi une réflexion serrée sur les liens entre la peinture non figurative et la musique. Une leçon du Cours du Bauhaus sur le rythme, en 1923, est particulièrement instructive à cet égard. Son collègue et admirateur Oskar Fischinger a émigré aux États-Unis où il a collaboré dans les studios Disney à Fantasia, long métrage d’animation dont le premier numéro est consacré en 1940 à la mise en musique de la Toccata et fugue en ré mineur de Jean-Sébastien Bach, dans une version orchestrale dirigée par Leopold Stokowski. Enfin Christian Lebrat (né en 1952) consacre son œuvre au « cinéma radical », et un certain nombre de pièces sont explicitement vouées à l’exploration du rapport entre la musique et l’image. Ces trois œuvres tentent, chacune à leur manière, de tisser un lien entre le son et la vue. Toutefois, mettant en œuvre des imaginaires très différents du support et de l’écran, leurs différences permettent d’appréhender de façon fine l’un des enjeux du travail de chaque artiste lorsqu’il affronte la question de l’hybride, même de façon souvent intuitive et non verbalisée.

Paul Klee ou l’inclusion du sonore et du mouvement dans la réflexion picturale

4La musique est présente chez Klee, de façon métaphorique, même si la métaphore peut devenir base d’une traduction intermédiale. Il n’est pas question pour lui d’associer du visuel à du sonore comme deux éléments différents que l’on relierait par une relation à construire : l’enjeu est de repenser l’image par le son et surtout par l’écriture musicale. Cette démarche est de très grande ampleur et il n’est pas question de la suivre ici en détail (Christin, 2001 ; Anger, 2011). Nous nous contenterons ici de regarder de plus près une figure du Cours de 1922.

Une image hybride

Figure 1

Figure 1

Paul Klee, Cours du Bauhaus, 16 janvier 1922 (2004, p. 56).

5À partir de l’écriture de cinq mesures de musique, caractérisée notamment par une syncope initiale, et à partir d’une réinterprétation du geste du chef d’orchestre qui dessine du temps dans une page, Klee transforme, traduit (übersetszt) les notes en ligne brisée, ici à trois temps avec une levée. Cette ligne conserve certaines caractéristiques de l’air noté, en particulier l’épaisseur qui est celle des temps forts et faibles. Chaque ligne ou plutôt chaque ruban est l’équivalent d’une note, réinterprétation visuelle de cette tache noire carrée ou ronde que sont les notes dans la partition musicale habituelle. Il y a donc traduction visuelle, au sens premier du terme, puisque chaque ligne, littéralement, « sonne » et qu’on peut même en donner un équivalent sonore, même si le paramètre de la hauteur, précis dans la partition, est réduit à une direction relative dans la réalisation plastique, sans autre précision. La ligne a un sens, un mouvement, marqué par la flèche. Le silence final devient un point. Ces lignes brisées délimitent de plus des surfaces, notées F3, F5, F7. Celles-ci deviennent des surfaces « actives » en quelque sorte, c’est-à-dire propres à recevoir de la couleur, donc, sur le plan sonore, du timbre, (Klang), un élément que la notation musicale traditionnelle ne prend pas en compte de façon visuelle. Cette réflexion intense sur le visible, travail préparatoire, donne ensuite lieu à des réalisations multiples.

Figure 2

Figure 2

Paul Klee, Schiffe im Dunkeln (1927), huile sur toile, 960 mm x 689 mm (Tate Modern, Londres).

6On a ici des bateaux à trois temps, avec un soleil bleu qui est un silence, le silence de la nuit peut-être, sur un fond noir très « vivant » dans la mesure où la couleur agit aussi sur quelques bateaux qui donnent, du coup, l’impression d’être plus éloignés. L’ensemble « sonne », de la même façon que la ligne brisée, tout en étant une image immobile. Les couleurs complémentaires ont également une dimension timbrique, renforcée par la non-figurativité des couleurs (sommes-nous le jour ? la nuit ?) et par le jaune de quelques voiles, qui agit comme un éclat de lumière sans pourtant qu’il y ait aucune figuration de la lumière, dimension qui n’est pas proprement plastique. La démarche interprétative est comparable à celle qui, dans un orchestre, associe par exemple le coup de triangle à un éclat lumineux, en dehors d’une approche figuraliste.

7On peut ici, semble-t-il, parler d’hybridité entre l’image et le son : la réflexion sur le son transforme l’image. La figuration n’est plus du tout le fait d’une représentation en perspective, qui crée un espace autonome à l’intérieur duquel sont situés les objets : elle est obtenue in fine par le travail de moyens purement picturaux, et en particulier par l’interaction entre le fond noir, très travaillé, et les lignes qui sont tracées sur lui. Le regard porté par Klee sur l’écriture musicale implique également la décantation de tout ce qui est signe conventionnel (les clés, les durées, etc.) sur la partition, pour n’en garder que ce qui a une dimension picturale ‒ le trait, son épaisseur, la création d’une surface par le geste traçant une ligne, etc., ainsi, évidemment, que l’idée d’une « ligne sonore », alliance de mots et métaphore visuelle qui préside au développement de toute la musique occidentale depuis son premier tracé lors de l’invention de l’écriture musicale au ixe siècle. Ainsi cette nouvelle image doit beaucoup à deux intermédiaires, le geste du chef d’orchestre qui est une vision du temps et l’écriture de la musique qui est elle-même déjà un travail sur l’image du son, par la note et la métaphore spatiale du mouvement puis de la hauteur.

8On pourrait montrer que cette dernière est elle-même un phénomène hybride et insister sur la construction imaginaire de cette dimension spatiale commune au support d’écriture et à l’analyse du son, ce qui permet sa visibilité. L’invention de l’écriture musicale pourrait ainsi être considérée comme le fruit d’une hybridité première (Anger, 2023), et dans ce cas l’image de Klee est en quelque sorte le produit d’une hybridation seconde.

Le fond sans directionnalité

9Dans cette recherche d’une image obtenue par des moyens « purement picturaux », le support a une importance extrême parce que la conscience de sa matérialité est renforcée. C’est peut-être l’un des reproches que Klee fait à la représentation classique (appelons-la rapidement « en perspective » pour fixer les idées) qui commence par construire un espace autonome propre à la représentation où la dimension matérielle du support, de la toile, de l'écran, tend à être oubliée. En témoignent les plans qui accueillent la couleur-timbre, selon le mot allemand Klang qui signifie les deux.

10Pierre Boulez a souligné la recherche chez le peintre d’un « fond extraordinairement développé et en même temps amorphe » (Boulez, 1989, p. 163). Amorphe, c’est-à-dire sans directionnalité : « il y a mille façons de le regarder, comme on le ferait d’un nuage, mais un nuage qui aurait été soudainement fixé, où la mobilité est dans le regard et non plus dans l’objet lui-même. Quand on regarde un nuage, le regard épouse et suit la mobilité du nuage, mais devant un fond de Klee la mobilité est dépendante de la façon dont on regarde, qui fait que l’espace s’oriente ou se désoriente au gré de celui qui regarde. Autrement dit, la puissance du regard est ce qui modifie la texture du tableau » (Boulez, 1989, p. 166). Cette insistance sur la subjectivation à l’œuvre et sur l’activité du regard rejoint un cours entier de Klee sur l’œil : « même l’œuvre la plus calme est en mouvement » (Klee, 2004, p. 135). En plus de la recherche sur la ligne évoquée plus haut, le lien avec toute une recherche musicale du son continu et pourtant en perpétuel mouvement est ici évident.

Figure 3

Figure 3

Paul Klee, Zuflucht (« refuge ») (1930), tempera, huile et aquarelle sur gaze préparée sur carton, 54 cm x 5 cm x 35,2 cm, (Norton Simon Museum of Art, Pasadena).

11Évidemment, les lignes ne bougent pas, et ce sera l’enjeu du cinéma. Mais cette recherche de dynamisme est à l’évidence centrale. Elle est étroitement liée à un questionnement sur la matérialité des éléments visuels.

La figure et l’hybridation

12On voit donc ici qu’il n’y a pas de condamnation de la figure en tant que telle, ni même de la narrativité. Le travail d’hybridation est en revanche le contournement d’une approche représentative, au profit d’un questionnement des matériaux propres à l’art visuel (le plan, la surface, la ligne, la couleur, etc.), et ce, à partir de résultats obtenus dans un autre domaine, celui du son. Le traitement du temps relève de la même démarche : il est intégré au tableau, à partir de propositions d’événements qui font émerger son orientation de l’intérieur, de la même façon que le geste temporel du chef d’orchestre construit un temps propre à la page, ceci en lien avec la construction préalable de l’espace – à la différence d’un temps préalablement orienté suivant une logique causale, de sorte que « ceci vient après cela » équivaut à « ceci vient à cause de cela ».

13Les lignes, ici, sont dynamiques, non pas en ce qu’elles bougent, mais en ce qu’elles sont étroitement liées à leur fond qui est lui-même dynamisé, soit par un contraste total, soit parce que, comme nous l’avons vu, elles délimitent un contour dont l’intérieur devient actif et les justifie.

14La notion d’hybridation est intéressante en ce qu’elle permet de rendre compte plus finement la démarche : entre l’écriture musicale et l’image, il n’y a pas influence, analogie, homologie, ni correspondance. Il y a au contraire, et c’est ce que l’hybridation suggère, une transformation profonde de la nature de l’image, par la prise en compte de son matériau spécifique, son grain pour ainsi dire, travaillé pour lui-même en lien avec un imaginaire du son.

Walt Disney-Oskar Fischinger et l’animation dans Fantasia

15Quelle est la part exacte d’Oskar Fischinger dans le premier numéro de Fantasia ? Cela semble très difficile à établir puisque le peintre a même refusé que son nom apparaisse au générique, tellement il était dégoûté par le résultat geschmacklos ‒ « totalement dénué de goût » (Moritz, 2004, p. 87). Il faut en tout cas rappeler que cet ami de László Moholy-Nagy participe à toute la réflexion allemande sur l’image et le son, dont l’un des moments importants est le Kongress für Farbe-Ton-Forschung de Hamburg en 1930, où il semble avoir déjà contacté le chef d’orchestre Leopold Stokowski au sujet de Bach (Moritz, 2004, p. 83). Celui-ci est ensuite devenu le chef de Fantasia. Fischinger était en contact avec John Cage en 1937. Sur la Toccata et fugue de Fantasia, il semble avoir dit que « ce n’[était] pas [son] travail, même si [son] travail [était] là à certains moments », mais qu’« on ne [pouvait] pas faire une vraie œuvre d’art dans les studios Disney » (Moritz, 2004, p. 85). Nous prendrons donc ici « Disney » comme nom générique d’une œuvre dont la démarche et l’unité d’inspiration restent problématiques.

La synchronisation plus que le questionnement sur les formes et les couleurs

  • 1 Pour être précis, de l’une des trois écritures musicales qui se sont juxtaposées à la fin du ixe si (...)

16Il semble qu’introduire la couleur a déjà été un pas énorme et que Walt Disney envisageait plutôt au départ quelque chose en noir et blanc avec, de façon très ponctuelle, un peu de couleurs (Moritz, 2004, p. 87). Il retrouve des intuitions profondes : celle du mythe de l’ombre comme origine du dessin (ici, les ombres des instrumentistes de l’orchestre deviennent les lignes des dessins animés), et celle, historiquement juste, des cordes de l’instrument comme point de départ de l’écriture musicale1.

Figure 4

Figure 4

Walt Disney, Fantasia (vers 3’40).

  • 2 Oskar Fischinger, Kinetica ou Poème optique.

17Walt Disney est marqué par un certain nombre de peintres « abstraits » ou proto-abstraits que l’on peut sentir au détour de telle ou telle image ‒ James Whistler, Vassily Kandinsky… ‒ qui ont été eux-mêmes portés par une inspiration sonore plus ou moins métaphorique pour penser leur propre œuvre visuelle. L’influence de Paul Klee n’est pas immédiatement détectable, sauf peut-être dans le passage des cercles et ellipses, que l’on retrouve par ailleurs dans certaines des animations d’Oskar Fischinger2.

Figure 5

Figure 5

Walt Disney, Fantasia (vers 7’).

  • 3 À la différence de Paul Klee (avec sa célèbre Fuge in rot) ou, par exemple, du vidéaste Norman McLa (...)

18Le souci essentiel de Fantasia est de trouver des éléments visuels mouvants et variés qui puissent être animés en lien avec le mouvement de la Toccata et fugue, un mouvement approché par les repères des temps forts et de la mesure ; le lien est aussi fait avec certaines caractéristiques timbriques (intensité, hauteur, rapport soliste/orchestre) de la musique de Jean-Sébastien Bach. Il semble que le travail de Disney porte avant tout sur la synchronisation : comment relier le mouvement d’une figure à tel événement sonore. Au fond, il cherche une représentation narrative de la musique, à grande échelle par l’histoire de l’arrivée de la lumière qui oriente l’écoute de la Toccata et fugue vers une écoute narrative, et à petite échelle par le fait que les événements visuels ont pour mission de souligner des événements sonores dans une visée représentative : un événement sonore trouve une sorte d’équivalent plastique à l’écran. Ce numéro de Fantasia (comme les autres du reste) est d’abord une représentation synchronisée des événements de la musique selon des principes d’analogie : si la musique est rapide, si la musique monte, etc. Le rapport à la musique demeure illustratif et synchronisé sur les temps forts. Il n’y a aucune analyse visuelle, par exemple, de ce qu’est une fugue3.

  • 4 Où l’on voit qu’il y a au moins deux façons d’aborder le terme de figuration, un débat qui se prolo (...)

19On est bien dans une image non figurative, mais cette non-figurativité n’est pas celle de Klee4. Les formes servent à une narration : partant des ombres des instruments, la visualisation de la fugue de Bach propose un itinéraire qui va vers le soleil, puis vers la lumière, ce qui accompagne visuellement la strette et la cadence finale de la fugue. Cette approche bénéficie évidemment de tout le travail des peintres abstraits, et notamment de ce qu’ils ont demandé à l’art du son pour comprendre leur propre conception de l’image. Mais elle en hérite : les formes que l’on anime en sont issues. Elle contourne en revanche la démarche profonde et radicale qui a abouti à leur élaboration. Par ailleurs, les cercles devenus ellipses se déplacent sur un plan, dans un espace qui est bien proche, au fond, de celui de la perspective.

20Les lignes peuvent devenir lumineuses. Mais cette lumière a peu à voir avec la musique de Bach : c’est bien davantage la figuration d’un reflet et de sa mouvance. Le lien à la musique, au son, est peu évident : il ne faut évidemment pas chercher une illustration visuelle de la musique de Bach, alors que pourtant la démarche globale de Disney y invite. Par exemple, il n’y a pas d’accent lumineux dans la musique. On pourrait chercher à le comprendre comme un jeu avec la lumière électrique, c’est-à-dire ce qui fait exister, techniquement, le cinéma, et avec l’espèce de transparence qu’elle permet à l’image, et nous approcherions alors le travail d’hybridation au sens défini plus haut. Mais cela semble une interprétation peu convaincante : Disney cherche plutôt, semble-t-il, à attirer notre attention sur la vie des reflets et leur figuration. Il ne s’agit pas d’un travail du support.

Figure 6

Figure 6

Walt Disney, Fantasia (vers 8’40).

21Dans le film, la lumière est plutôt symbolique : elle est la base du parcours narratif qui est celui du film. Elle envahit progressivement les images, en passant par des figurations de vitraux gothiques pour finir sur les rayons du soleil. Elle représente une évolution fictionnelle, sans provenir d’un travail sur la matière du son, travail qui serait, lui, d’hybridation.

Figure 7

Figure 7

Walt Disney, Fantasia (vers 10’17).

  • 5 Nous avons bien conscience d’employer ici des mots très travaillés, parfois dans des directions dif (...)

22L’ensemble de Fantasia est ainsi marqué par une approche illustrative, au sens où un élément visuel est signe d’autre chose que lui-même, ici, de son et parfois de la nature. En découle l’approche narrative traditionnelle et, corrélativement, une indifférence à la matière en tant que telle, qu’elle soit celle du film, celle de l’image ou celle du son. Plus qu’hybridité, il y a synchronisation, parallélisme entre deux éléments hétérogènes que l’on relie de façon représentative5.

23Le travail visuel sur la fréquence, un peu plus tard dans le film, est très révélateur de cette primauté de la figuration.

Figure 8

Figure 8

Walt Disney, Fantasia (vers 1’00’38).

24Walt Disney part de l’idée visuelle de fréquence sonore, image qui, elle, n’est pas figurative mais résulte d’une analyse du son comme phénomène périodique inscrit dans un repère orthonormé. D’horizontale, elle est à présent centrée verticalement, et surtout elle est associée, par des couleurs et des formes, aux timbres des instruments de l’orchestre, selon un imaginaire analogique (aigu/haut, grave/bas, son strident/forme piquante, etc.). Il s’agit pour Disney de trouver un artifice permettant de représenter visuellement une impression auditive, et certainement pas de repenser la nature même du dessin ou de l’animation, d’y trouver quelque chose du son. Il cherche à raconter visuellement, et à l’inverse prend par là même la musique comme une narration représentable par des analogies.

25Le résultat peut être convaincant, amusant, pédagogique, très innovant à son époque ; mais il semble difficile de parler ici d’hybridité.

Les lignes et le fond

26Du coup, la question du support, c’est-à-dire celle de la matérialité des lignes pourtant sonores au départ, se pose très peu. Le fond sur lequel elles se déplacent est généralement uni, et le plus souvent, figuratif, comme s’il s’agissait de nuages. Il est quasiment immobile. Il est parfois éclairé comme zébré par un éclair, pour suivre un événement musical. La transition des couleurs suit la transition des motifs linéaires qui accompagnent la musique.

Figure 9

Figure 9

Walt Disney, Fantasia, quelques fonds.

27Ces fonds ne sont pas la base qui engendrerait la ligne, fût-ce par un contraste total. Ils sont simplement un fond un peu neutre, figuratif, – le ciel – propice à construire une autre forme autonome qui sera mue en rythme. Il ne semble pas qu’ils soient questionnés en tant que fonds, par rapport à un équivalent sonore. Le lien entre le son et la couleur est peu évident. C’est au mouvement des lignes synchronisées que revient le soin d’être relié à la musique. Les nuages de Disney sont très éloignés de ceux que Boulez a remarqués chez Klee : ceux-ci étaient une invitation au regard.

28C’est pourquoi le film est parfaitement transposable dans un autre medium : il n’y a aucun problème pour visionner Fantasia sur un écran d’ordinateur. Les changements sont d’échelle, d’impression, mais globalement le film perd très peu, parce que le fond de l’image a été constitué pour être autonome. Il n’y a aucune référence à sa matérialité propre.

29À un moment pourtant, il y a un échange entre les lignes et le fond. L’aquarelle de la ligne déteint pour ainsi dire : on est au bord de l’hybridité. Mais c’est pour se diluer aussitôt et pour être recouvert par des lignes qui avancent de gauche à droite. De plus on ne voit pas très bien pourquoi ce mode est exploré à ce moment-là : le lien avec la musique est peu perceptible.

Figure 10

Figure 10

Walt Disney, Fantasia (vers 8’00).

30Walt Disney, Fantasia (vers 8’22).

31De même au début, l’image est constituée d’ombres superposées : là aussi, il y a un début de travail sur l’organisation propre à l’image.

Figure 12

Figure 12

Walt Disney, Fantasia (vers 3’).

32Mais il s’agit de quelque chose de très fugitif qui n’est pas approfondi et tourne vite à l’illustration synchronisée des pupitres. La conception très simple du mouvement, parallèle au mouvement du son et synchronisée, l’emporte sur tout questionnement proprement sonore de sorte que la matière du son transforme la matière de l’image, ou inversement, ce qui serait le propre de l’hybridité.

Comparaison des fonds de Klee et de Disney

33Une comparaison entre les fonds de Klee et ceux de Disney montre clairement ces différences.

Figures 13 et 14

Figures 13 et 14

Paul Klee, Begrüssung (« accueil ») (1922), 22,5 cm x 31 cm (Wadsworth Atheneum Museum of Art, Hartfort).
Walt Disney, Fantasia (vers 8’46).

Figures 15 et 16

Figures 15 et 16

Paul Klee, Zuflucht (détail).
Walt Disney, Fantasia (vers 6'30).

Figures 17 et 18

Figures 17 et 18

Paul Klee, Zuflucht (détail).
Walt Disney, Fantasia (vers 8’00).

34Klee attache tellement d’importance au travail de ses fonds qu’il en note le mode d’emploi, la recette de fabrication pour ainsi dire (Boulez, 1989, p. 164). Le dynamisme des lignes en découle :

La fonction d’une œuvre picturale est déterminée par la manière dont la construction mue temporellement de l’œuvre se communique à l’œil et donc le caractère de mobilité propre à chaque œuvre est imposé à l’œil et à la réceptivité qui se tient derrière lui. (Klee, 2004, 20 mars 1922, p. 136)

35C’est ainsi qu’une surface colorée est investie comme une surface « sonore », travaillée pour son dynamisme même. Le mouvement se trouve lié à la surface picturale, malgré son immobilité objective. Dans d’autres œuvres, la flèche donne une direction : elle est pensée en termes de force. On peut lui opposer le déploiement des vagues animées plates de Disney, sur un fond de ciel bleu, alors même que les vagues sont effectivement mouvantes. Les réalisations de Klee sont le fait d’une hybridation, en ce sens que la relation au son a permis de transformer l’image en lui donnant le statut de métaphore visuelle, en donnant à l’image quelque chose de « sonore ». Ce n’est pas le cas chez Disney où le fond reste un ciel coloré.

36Ainsi, chez Disney, la musique ne sert pas à penser le visuel : tout au plus, des analogies peuvent être déployées. Le fond est très neutre. Il semble difficile de parler ici d’hybridité visuelle et sonore : il y a illustration, représentation, synchronisation, mais pas « hybridité ». Les formes de Disney sont abstraites, mais le cinéaste demeure dans la logique de la représentation et de la figuration.

Christian Lebrat : penser le cinéma par la musique

37Christian Lebrat est cinéaste et vidéaste d’un cinéma qu’il qualifie lui-même de « radical » (Lebrat, 2008). Il travaille, pour une large part de son œuvre, sur le support du film, à savoir sur la pellicule. Les « tableaux de pellicule » que nous pouvons voir sont le fruit d’une coloration de chaque case de pellicule de 16 mm. Il travaille avant tout la pellicule, c’est-à-dire un élément matériel spécifique permettant un certain cinéma. Il aime d’ailleurs, lorsqu’il présente son travail, apporter les éléments concrets qu’il découpe et colle, contre l’écran numérique auquel nous sommes habitués.

Figure 19

Figure 19

Matérialité de la pellicule.

Le rythme visuel de couleurs et la question du support

38Une œuvre, Trama, aide à affiner la question de l’hybridité :

Comme son nom l’indique, Trama est constitué de trames. Chaque trame divise l’écran en six parties correspondant aux six couleurs du spectre lumineux. L’ordre des couleurs dans la trame peut varier. Ensuite ces trames sont déplacées ‒ image après image ‒ latéralement. Dans l’image qui suit la précédente, la trame a été déplacée latéralement soit d’une bande, soit de deux, soit de trois. Selon l’ordre des couleurs dans la trame et selon le déplacement latéral de la trame à chaque image (une, deux ou trois bandes), l’effet peut-être très différent.
C’est fait « à la main » et nous y reviendrons peut-être, le positionnement des bandes verticales varie légèrement. Il y a comme un tremblement de l’image qui vient s’ajouter aux clignotements très puissants. Et ça ne me gêne pas, au contraire ! Cela fait partie de l’œuvre, c’est fait à la main et par un être humain ! Ce n’est pas l’application d’un programme. Donc Trama est fait à la main, image par image. (Lebrat, 2020, p. 179)

Figure 20

Figure 20

Christian Lebrat, Trama, tableau de pellicule (détail).

  • 6 Voir par exemple En rythme et tout le Cours du Bauhaus sur le damier et le temps.

39On pourrait établir un lien avec le travail de Paul Klee, en particulier son travail sur le damier6. Il faut regarder ce « tableau de pellicule » comme la réunion de fragments qui, lors de la projection, sont successifs, à partir de la gauche.

La nécessité du son

40Le film projeté sur un écran blanc est ainsi un rythme de couleurs. C’est un genre de dépouillement du cinéma, de sorte à ne travailler qu’un seul paramètre de la pellicule. La projection est prévue avec un accompagnement de musique : dans Trama (1978-1980), il s’agit de tambours. C’est la recherche d’une plongée dans la couleur, dans le rythme de la couleur projetée. La musique n’est évidemment pas synchronisée, même si une synchronisation imprévue peut surgir, éventuellement même produite par l’impression sonore vécue du spectateur, sans qu’elle soit volontaire.

41Pour d’autres œuvres, comme Holon (1982), le free-jazz et l’improvisation sont, à ses yeux, préférables. La musique est présente au moment de l’élaboration de l’œuvre comme au moment de sa projection.

Une des contraintes fortes que je m’étais donnée avec ces deux films [Trama et Holon], le défi que je m’étais lancé, c’était de ne travailler qu’avec de la couleur, pas de figuration, donc pas de figure, pas d’histoire, rien que de la couleur. Je voulais plonger au cœur du support cinéma, son « noyau dur » comme dirait Peter Kubelka. Pour aller voir ce qui se passe à ce niveau-là, il faut enlever tout le superflu, faire en sorte que forme et couleurs ne forment plus qu’une seule chose.
La transmission de l’émotion passe par le geste et en musique, par exemple, écouter John Coltrane ou Jimmy Hendricks, ou encore Scarlatti, vous donne envie de jouer du saxophone, de la guitare électrique ou du clavecin. (Lebrat, 2020, p. 197)

42Ainsi les œuvres sont pensées pour être accompagnées de son : c’est du cinéma. Mais la musique n’est pas synchronisée ; elle provient clairement d’un autre lieu que l’écran. Son rôle est d’accentuer, pour que vive l’expérience du spectateur, l’immersion dans le rythme coloré. Il s’agit de créer une expérience immersive, c’est-à-dire de déréaliser, en fait, l’écran, le vis-à-vis. L’insistance sur le medium (la pellicule) se fait au détriment de l’investissement du fond, de l’écran, du support de projection. Le son a pour but de rendre ce paradoxe encore plus perceptible : comme il le dit lui-même, « le support doit se faire oublier » :

Le support est plutôt là pour révéler la perception. Mais le support doit se faire oublier, ce qui compte ce n’est pas d’affirmer le support, mais plutôt, à travers le support, d’affirmer la présence du sujet. Regardez les tableaux de Rothko, le support, la toile a complètement disparu et c’est là, dans l’oubli du support, que la couleur peut apparaître, peut vous apparaître.
[…] Trama puis Holon qui ont permis de redistribuer le potentiel de la couleur, mais cette fois-ci non pas dans l’espace de la salle de projection, mais au sein même de l’image, du photogramme, une sorte de condensation extrême de la couleur qui permet de faire imploser l’écran, pour en faire l’expérience la plus intense. (Lebrat, 2020, p. 198)

Le cinéma comme lieu paradoxal

43La musique est conviée et nécessaire. Mais le cinéaste crée avec elle une expérience d’immersion qui cherche à faire de l’écran un simple lieu de réflexion lumineuse. L’œuvre repose au fond sur le paradoxe d’un écran qu’il faudrait oublier et que, souhaitant l’oublier, on ne fait que voir et percevoir encore davantage. Même si on peut l’en rapprocher (ou bien d’autres œuvres comme les œuvres théâtrales de Kandinsky), ce travail n’a rien à voir avec la mise en lumière de salles de spectacle du genre de Bercy, où la recherche d’une plongée dans la couleur se fait en transformant les corps sur lesquels elle est projetée, un enjeu qui était d’ailleurs déjà celui du clair-obscur au xviie siècle (Noldus, 1995). Ici, nous sommes très loin d’un travail sur le corps des spectateurs ; loin aussi d’une recherche de l’oubli du monde.

Figure 21

Figure 21

Bercy, salle de spectacle.

44On reste, ici, face à un écran et assis sur sa chaise. Il y a cinéma et non immersion. Le travail de Christian Lebrat, en insistant sur la matérialité de la pellicule cinématographique, nous plonge dans la perception d’un écart entre la vue des impressions colorées et notre existence de spectateur. Ce que l’on voit n’est pas là pour accompagner visuellement des sons sur lesquels on projette une narration (Disney), ni pour accompagner une plongée vibrante des corps dans le son (ce que cherchent beaucoup de groupes rock) ; mais pour révéler une sorte de visualité pure. Christian Lebrat cherche l’expérience de la projection comme performance qui immerge le créateur et le spectateur dans un même espace de vibration, mais sans rechercher la dilution de soi, grâce à la présence paradoxale de l’écran. La projection en 16 mm rappelle que cet écran n’est ni le corps des spectateurs où se reflète la lumière, ni l’écran numérique passe-partout de l’ordinateur qui, par la narrativité, se fait oublier : il a sa matérialité propre. Le travail abstrait et purement coloré de la pellicule cherche à le révéler tout en provoquant une expérience d’immersion dans la couleur mouvante.

Hybridité et support

45L’insistance sur la matérialité de la pellicule a pour contrepoids le refus de la synchronisation, donc du point de rencontre entre ce que l’on voit et ce que l’on entend. C’est ce qui fait qu’il est impossible de transposer cette œuvre sur DVD : l’important est l’expérience d’un lien étroit mais depuis un fossé impossible à réduire entre la couleur et le son. Il est absolument nécessaire que la pellicule soit projetée sur un écran à partir d’une visionneuse de films en 16 mm et que la source sonore soit volumineuse mais clairement séparée de toute synchronisation avec ce qui est vu en projection. On ne peut faire de ces œuvres que des « tableaux de pellicule », arrêtés.

46Christian Lebrat s’est longuement expliqué sur le support cinématographique :

La vidéo est « molle », mais en tout cas elle est lisse comme de l’eau, c’est liquide, c’est du plasma, alors que le cinéma est rugueux comme de la pierre ponce, c’est du dur. On pourrait dire que le cinéaste sculpte des images, des photogrammes, alors que le vidéaste travaille avec des fréquences. Cela fait tout de même une sacrée différence ! Au cinéma, vous avez des images concrètes, la pellicule argentique, vous pouvez la prendre dans la main. (Lebrat, 2020, p. 176)

47Ce qui n’empêche pas un autre travail sonore avec la vidéo, dans d’autres œuvres. Mais il s’agit bien ici d’un travail de la matière du film.

Si vous voulez travailler avec la couleur, il est évident que les résultats obtenus seront très différents selon que vous travaillez avec le film argentique ou la vidéo numérique, ou encore la photographie argentique ou numérique. Les contraintes ne sont pas les mêmes. Si ce n’est pas le cas, alors ça n’a aucun intérêt, ça veut dire que l’idée, le concept se suffit à lui-même et n’a pas besoin de se confronter à un média (Lebrat, 2020, p. 176).

48Y a-t-il « hybridité » ? Aujourd’hui, la numérisation permet de passer immédiatement du visuel à l’auditif et à l’écrit. Christian Lebrat nomme ce dénominateur numérique commun « les fréquences » avec lesquelles on travaille. Le medium commun empêche l’idée même d’hybridité. Walt Disney réinterprétait la fréquence dans un sens mimétique, pour lui demander de faire voir le timbre, par une transformation formelle et colorée. Au contraire, ici, le travail sur « la matière », comme dit l’auteur, demande une énergie musicale qu’il restitue ensuite à la projection, de façon non synchronisée. Il y a bien une recherche pour penser un medium par l’autre. S’agit-il d’un monstre ou d’une réussite ? L’enjeu ici n’est pas l’écran ou très peu, ni le fond, mais un autre support, celui de la pellicule et, d’une manière plus large, du medium « cinéma » même dans sa matérialité.

Conclusion

49L’hybridité entre le son et l’image visuelle suppose le travail imaginaire sur le support, qu’il soit le fond, l’écran de projection, la pellicule, ou tout autre chose encore. C’est d’ailleurs ce que l’invention de l’écriture a supposé : pour écrire, il faut une surface qui accueille l’hétérogène qu’est la parole et il faut l’organiser, l’imaginer de façon appropriée, que l’on nomme ce résultat imaginaire « écran » ou que l’on cherche une dénomination (Christin, 2001).

50La confrontation de ces trois exemples montre aussi que l’hybridation est peu compatible avec la pensée mimétique-représentative et, au cinéma, avec la synchronisation qui, sans le faire totalement, a tendance à oublier le support. Elle permet aussi de mieux comprendre quelques formes propres à Paul Klee, où l’hybridation est telle que l’on peut parler de métaphore visuelle entre la ligne ou le fond et le son. Cette notion d’hybridité s’avère d’un grand intérêt dans le domaine des médias. Elle permettrait sans doute aussi, dans un travail de plus grande envergure, d’imaginer une typologie en fonction de ce qui est travaillé prioritairement (l’écran comme support ; la pellicule comme support…) et en fonction du type d’expérience subjective recherché.

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Bibliographie

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Notes

1 Pour être précis, de l’une des trois écritures musicales qui se sont juxtaposées à la fin du ixe siècle avant de fusionner, écriture neumatique, écriture alphabétique, écriture sur lignes. Ces dernières sont issues d’une élaboration visuelle des cordes de la lyre. La Musica enchiriadis est l’un des traités les plus importants à ce sujet.

2 Oskar Fischinger, Kinetica ou Poème optique.

3 À la différence de Paul Klee (avec sa célèbre Fuge in rot) ou, par exemple, du vidéaste Norman McLaren qui travaille l’écran en lien avec la musique, en particulier dans sa Fugue.

4 Où l’on voit qu’il y a au moins deux façons d’aborder le terme de figuration, un débat qui se prolonge aujourd’hui (par exemple entre Descola et Christin), mais qui existe depuis le Moyen-Âge où les mots descriptio et figura désignent ce que nous appelons aujourd’hui schéma.

5 Nous avons bien conscience d’employer ici des mots très travaillés, parfois dans des directions différentes. Par représentation, nous entendons le processus qui associe une image de la chose, à une idée de la chose et donc à la chose. La représentation est associée à la notion d’imitation, reprise vers le xiie siècle notamment par Ælred de Rievaulx (Boulnois, 2008, p. 127) et rethéorisée vers le xvie siècle en lien avec une relecture de la Poétique d’Aristote (Jacques, 1980). Dans cette approche, le souci de la matière et du support est très secondaire, surtout par rapport à celui du style (Christin, 2001). La ligne sonore, métaphore visuelle, est propre à Klee ou à la partition musicale.

6 Voir par exemple En rythme et tout le Cours du Bauhaus sur le damier et le temps.

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Table des illustrations

Titre Figure 1
Légende Paul Klee, Cours du Bauhaus, 16 janvier 1922 (2004, p. 56).
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Titre Figure 2
Légende Paul Klee, Schiffe im Dunkeln (1927), huile sur toile, 960 mm x 689 mm (Tate Modern, Londres).
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Titre Figure 3
Légende Paul Klee, Zuflucht (« refuge ») (1930), tempera, huile et aquarelle sur gaze préparée sur carton, 54 cm x 5 cm x 35,2 cm, (Norton Simon Museum of Art, Pasadena).
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Titre Figure 4
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 3’40).
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Titre Figure 5
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 7’).
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Titre Figure 6
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 8’40).
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Titre Figure 7
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 10’17).
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Titre Figure 8
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 1’00’38).
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Titre Figure 9
Légende Walt Disney, Fantasia, quelques fonds.
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Titre Figure 10
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 8’00).
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Titre Figure 11
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Fichier image/png, 190k
Titre Figure 12
Légende Walt Disney, Fantasia (vers 3’).
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Titre Figures 13 et 14
Légende Paul Klee, Begrüssung (« accueil ») (1922), 22,5 cm x 31 cm (Wadsworth Atheneum Museum of Art, Hartfort). Walt Disney, Fantasia (vers 8’46).
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Titre Figures 15 et 16
Légende Paul Klee, Zuflucht (détail). Walt Disney, Fantasia (vers 6'30).
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Titre Figures 17 et 18
Légende Paul Klee, Zuflucht (détail). Walt Disney, Fantasia (vers 8’00).
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Titre Figure 19
Légende Matérialité de la pellicule.
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Titre Figure 20
Légende Christian Lebrat, Trama, tableau de pellicule (détail).
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Titre Figure 21
Légende Bercy, salle de spectacle.
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Pour citer cet article

Référence électronique

Violaine Anger, « L’hybridité entre la musique et l’image au cinéma : la question du support »Itinéraires [En ligne], 2023-1 | 2024, mis en ligne le 15 juillet 2024, consulté le 14 septembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/itineraires/14713 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/121sb

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Auteur

Violaine Anger

Université d’Évry Val d’Essonne, centre d’études et de recherches comparées sur la création

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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