Navigation – Plan du site

AccueilNuméros26Comptes rendusGabriele Valle, Italiano Urgente....

Comptes rendus

Gabriele Valle, Italiano Urgente. 500 anglicismi tradotti in italiano sul modello dello spagnolo

Trento, Reverdito, 2017, 464 pages
Héloïse Elisabeth Marie-Vincent Ghislaine Ducatteau
p. 297-299
Référence(s) :

Gabriele Valle, Italiano Urgente. 500 anglicismi tradotti in italiano sul modello dello spagnolo, Trento, Reverdito, 2017, 464 pages

Texte intégral

1Le titre peut prêter à sourire : à première vue, s’attaquer à la traduction de 500 anglicismes déjà entrés dans la langue de Dante en se basant sur l’espagnol, cela ne relève-t-il pas plus d’un exercice de style pour reprendre Perec que d’une nécessité pragmatico-linguistique ? L’emulatio néologique est souvent perçue comme un bonus flattant davantage le plaisir récréatif que les soucis dont l’essentiel des locutrices et locuteurs n’a pas à se préoccuper.

2Si l’on y regarde de plus près, la démarche n’a pas surgi brusquement. En effet, elle s’appuie sur trois initiatives ayant vu le jour en 2005 (p. 34-36) : le Diccionario panhispánico de dudas, le portail virtuel Departamento de español al dia et Fundación Español Urgente, un bureau de consultation à but non lucratif permettant la résolution d’incertitudes sur l’usage des globicismes, devrions-nous presque dire, étant donné l’internationalisation exponentielle de ces emprunts dans des domaines aussi variés que le tourisme, l’industrie, la presse. La préoccupation vis-à-vis des britannicismes puis états-unianismes n’est en réalité pas nouvelle chez nos voisins transalpins comme la préface le rappelle en partant de la démarche de Paolo Monelli durant l’ère fasciste jusqu’à 2015, année de baptême de l’Incipit d’Annamaria Testa en lien avec l’Accademia della Crusca (p. 12-13). C’est avec la même institution que le projet présent a émergé : Italiano Urgente est sorti numériquement en 2015, il a alors été présenté et acclamé au Cercle linguistique de Florence créé en 1945. Un an plus tard, l’un de ses membres, Francesco Sabatini, a été jusqu’à le promouvoir sur la chaîne de télévision Rai Uno. Gabriele Valle a sinon écrit accordé un essai sur la question qui a été publié en 2013.

3L’output (étonnamment, ce xénisme, assez présent dans l’idiome français, n’est pas affiché dans la liste du présent dictionnaire) reflète bien la variété des professions occupées par l’auteur italo-péruvien allant de la philosophie du langage au journalisme en passant par l’essayisme, la traduction et la traductodidactique. Tullio De Mauro ne passe pas sous couvert le fait que Gabriele Valle n’est pas linguiste, mais admet qu’il parvient néanmoins à une analyse objective, con juicio. Les deux acolytes s’autorisent une terminologie universitaire de la linguistique de contact : sans surprise, il est question de subtrat, superstrat, pseudo-anglicismes, calques lexicaux et syntaxiques, morphologie désinentielle ; de façon plus originale, de rares mots-valises, des glottonimes (p. 9-11), sont indiqués mais leur contexte de création est esquivé. La promesse ne donne pas la normalisation linguistique pour argent comptant et rappelle que la langue pure n’existe pas (cf. Carreter et Cesarotti p. 22). Néanmoins, face à la non-adaptation des mots allophones due à des raisons aussi diverses que l’ignorance, l’opportunisme et la paresse, elle ne manque pas de culpabiliser l’ensemble des italophones. De même que Tullio De Mauro dresse une rapide historiographie des attitudes face aux anglicismes en Italie en remontant à 1963, Gabriele Valle va plus loin géographiquement et chronologiquement par une digression sur l’histoire de la langue espagnole en Amérique latine par rapport à celle péninsulaire, en s’attachant spécifiquement au développement d’un surcastillan (transcendant les divergences des deux côtés de l’Atlantique), à l’Académie royale espagnole et aux changements orthographiques concomitants. Il justifie son projet par, d’une part, le fait que la langue n’est pas un instrument pour assigner des étiquettes aux choses mais, qu’au contraire, c’est la langue qui préexiste face à notre relation au réel, d’autre part, par la très forte proximité orthographique des deux idiomes latino-méditerranéens, l’italien étant même plus efficient que l’espagnol à ce niveau (cette opinion mériterait d’être nuancée !). La fin de la promesse annonce la structure du dictionnaire : les emprunts sont en noir, les traductions italiennes proposées, qu’il s’agisse de calques ou d’adaptations grapho-phonétiques, en italique, les anglismes dotés de deux significations comme hostess (p. 216-217) ou spider (p. 369-370) sont signalés à l’aide d’un astérisque. Toute personne remarquant une erreur est invitée à la signaler à l’adresse mail indiquée.

4En achevant la lecture de l’ouvrage, l’argumentation de Gabriele Valle nous a convaincu parce que fondée sur des considérations à la fois historico-linguistiques, philosophiques. L’on regrettera toutefois que l’approche se soit trop limitée à l’espagnol, même si c’est bien le but du livre, et ne soit pas élargie à d’autres langues néolatines. Les comparaisons avec le français, voire le catalan et le portugais dans une moindre mesure, arrivent bien à propos dans certaines définitions (aftershave et AIDS p. 55, residence p. 329-330 et trojan p. 418) et la préface pour le seul français (lorsqu’il est question de la loi Toubon et de ses faibles répercussions dans Le Monde p. 15). Nonobstant, un ouvrage collectif sur des anglicismes davantage panroman (incluant aussi le roumain, le romanche et l’occitan) aurait été plus pertinent et aurait plus d’impact. Le choix des xénismes anglifuges (osons cet adjectif !) Par ailleurs, l’absence de bibliographie et de notes de bas de page décevra plus d’un désireux d’approfondir son savoir si le sujet, d’autant plus que des références classiques sont nommées le long de l’ouvrage (Migliorini, p. 15, Saussure, p. 23, Oxford English Dictionary, p. 42, The Merriam-Webster, Battaglia, Zingarelli, p. 43). C’est d’autant plus curieux que le préfacier, Tullio De Mauro, est historien de la langue de profession et Gabriele Valle enseignant à un niveau post-bac. Un autre bémol est l’unique index lexical (p. 457-463) : avec utilité, il aurait été accompagné d’un index thématique, d’un index des noms propres et d’un index grammatical.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Héloïse Elisabeth Marie-Vincent Ghislaine Ducatteau, « Gabriele Valle, Italiano Urgente. 500 anglicismi tradotti in italiano sul modello dello spagnolo »Italies, 26 | 2022, 297-299.

Référence électronique

Héloïse Elisabeth Marie-Vincent Ghislaine Ducatteau, « Gabriele Valle, Italiano Urgente. 500 anglicismi tradotti in italiano sul modello dello spagnolo »Italies [En ligne], 26 | 2022, mis en ligne le 28 mars 2023, consulté le 08 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/italies/10255 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/italies.10255

Haut de page

Auteur

Héloïse Elisabeth Marie-Vincent Ghislaine Ducatteau

Sciences Po Paris, campus européen franco-allemand

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search