Langue et transculturalité dans Un tempo gentile de Milena Agus
Résumés
Milena Agus est considérée comme l’une des voix de la nouvelle vague littéraire sarde, une expression utilisée pour désigner un certain nombre d’écrivains contemporains qui proposent, entre autres, de nouvelles formes de bilinguisme et de diglossie. Son dernier roman, Un tempo gentile (2020) est l’histoire d’une rencontre entre deux communautés malheureuses et oubliées : les habitants d’un petit village reculé de la Sardaigne et un groupe de migrants qui se retrouvent catapultés dans cette réalité à la fois hostile et solidaire. Notre analyse se concentrera sur la dimension linguistique de ce roman : la langue est-elle un moyen pour exprimer l’hybridation et la transculturalité ?
Plan
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Du côté des modestes
1Milena Agus est probablement l’écrivaine sarde la plus connue en France. Son roman Mal de pierres, paru chez Liana Levi en 2006 et objet d’une adaptation cinématographique dix ans plus tard par Nicole Garcia, eut davantage de succès dans l’Hexagone qu’en Italie.
- 1 Milena Agus, Un tempo gentile, Milano, Nottetempo, 2020 et, pour sa traduction française, Une sai (...)
- 2 https://www.lianalevi.fr/catalogue/une-saison-douce/
2Son dernier roman, Un tempo gentile, publié en Italie en août 2020, a été récemment traduit en France sous le titre Une saison douce1. Une nouvelle parution que le public français a accueillie avec enthousiasme, comme le montrent les nombreux articles que l’on peut retrouver sur la page internet de l’éditeur Liana Levi2.
- 3 Florence Noiville, « D’étranges étrangers au fin fond de la Sardaigne », Le Monde, 9 avril 2021.
- 4 Milena Agus, Un tempo gentile, op. cit., p. 41. Dorénavant, le texte sera indiqué par le sigle TG (...)
3Présenté dans Le Monde comme « un roman des migrants, bienveillant et discrètement engagé3 », Un tempo gentile est l’histoire d’une rencontre entre deux communautés tout aussi malheureuses et oubliées : accompagné de quelques humanitaires et rebaptisé les « envahisseurs » – clin d’œil ironique à une certaine rhétorique qui qualifie d’invasion l’entrée des migrants en Italie – un groupe de migrants arrive dans un hameau, dans l’arrière-pays de la Sardaigne où il entre en contact avec des villageois locaux. Si d’une part les migrants ne cachent pas leur déception pour avoir été catapultés « [in un] corno di forca di paesino sardo dimenticato da Dio4 » – où les maisons et les rues sont délabrées, la gare, désaffectée, les services, absents – d’autre part, les villageois sont tantôt surpris et effrayés, tantôt indignés et hostiles face à l’arrivée soudaine de ces inconnus venus de nulle part qui vont bousculer l’apathie grise dans laquelle les habitants et leur environnement sont désormais tombés.
- 5 Christine Ferniot, « Une saison douce », Télérama, 16 février 2021.
- 6 Cf. au moins Silvia Contarini et al. (dir.), Da ieri a oggi. Tragitti del Sud nella cultura itali (...)
4Le rôle principal est tenu par les femmes du village, dont la narratrice se fait la porte-parole dans un récit choral entièrement construit à la première personne du pluriel : ce sont les femmes, épouses et mères de famille, qui, après leur première aversion, vont apaiser les tensions entre les deux camps rivaux en prenant soin des migrants et de leurs accompagnateurs au prix de se brouiller avec les hommes du village. Par une prose empreinte de légèreté et de tendresse qui apparente l’ouvrage à un conte – comme la traduction française de son titre le témoigne –, l’auteure « se place du côté des modestes5 » et raconte une expérience de solidarité et d’empathie entre déshérités et oubliés de l’histoire. Il s’agit là d’une des thématiques les plus intéressantes du roman qui pourrait ainsi être analysé sous le prisme de la solidarité Sud-Sud et de la question du Global South6.
- 7 Eva-Maria Remberger, Maurizio Vidis, Birgit Wagner, « Il sardo in movimento: un’introduzione », i (...)
5Ici, nous nous concentrerons sur la dimension linguistique du roman, un aspect qui n’est pas sans lien avec les relations entre local et global. Agus est considérée comme l’une des voix de la nouvelle vague sarde, appellation initialement utilisée dans le domaine cinématographique et puis reprise dans le milieu littéraire, pour désigner un certain nombre d’auteurs et autrices sardes contemporains – Sergio Atzeni, Marcello Fois, Giulio Angioni, Michela Murgia, Milena Agus, entre autres – qui proposent dans leurs ouvrages des formes d’un bilinguisme « nuovo, meno didattico, più “straniante”, adoperato anche dalle letterature di paesi e culture ex-coloniali7 ». Il s’agit, plus précisément, du bilinguisme et/ou de la diglossie italien-sarde.
- 8 Cristina Lavinio, « Plurilinguismo nella narrativa in Sardegna: da negato o occultato a esibito e (...)
6Dans une œuvre qui se veut un véritable baume contre le refus de l’Autre, de sa diversité et de son étrangeté, comment le binôme identité-altérité se traduit-il sur le plan linguistique ? La langue devient-elle un moyen pour exprimer l’hybridation et la transculturalité ? Ou le plurilinguisme qu’on a tendance à évoquer lorsqu’on cite cette auteure et sa production n’aurait-il en réalité qu’une fonction « décorative8 » ?
7Dans cette contribution nous répondrons à ces questions en étudiant un roman qui a été considéré comme un véritable laboratoire de cohabitation. Une analyse linguistique nous permettra de comprendre si la langue est également affectée par cette valeur expérimentale.
L’écriture plurilingue italienne
- 9 Pour ne citer que quelques titres récents, Silvia Contarini, Scrivere al tempo della globalizzazi (...)
- 10 Il s’agit là d’un thème cher à Daniele Comberiati qui lui a consacré également son ouvrage Scrive (...)
8Le phénomène du plurilinguisme dans la littérature italienne contemporaine a fait l’objet de nombreuses études pendant ces dernières années9. Nous allons nous limiter à de brèves réflexions. Le panorama illustré par Comberiati et Pisanelli dans leur introduction au volume Scrivere tra le lingue. Migrazione, bilinguismo, plurilinguismo e poetiche della frontiera nell’Italia contemporanea de 2017 est éclairant. Les deux chercheurs distinguent quatre domaines dans la pratique de l’écriture plurilingue récente en contexte italophone : la littérature de la migration (qui comprend aussi bien les écrivains immigrés en Italie que les écrivains italiens émigrés à l’étranger, les deux étant réunis par leur choix d’utiliser la langue italienne comme moyen d’expression littéraire10) ; les scritture di frontiera, qui incluent tous les écrivains de zones géographiques frontalières dont la production littéraire est influencée par le croisement de plusieurs langues ; le binôme langue-dialecte, enrichi, depuis quelques années, par un troisième terme, l’apport des langues étrangères ; et, enfin, une quatrième catégorie, plus arbitraire et inscrite dans une perspective comparatiste, qui s’ouvre au contexte littéraire lusophone.
- 11 Daniele Comberiati, Flaviano Pisanelli, « Introduzione », in Daniele Comberiati, Flaviano Pisanel (...)
- 12 Cf. Nicola De Blasi, « Dialetto e varietà locali nella narrativa tra scelte d’autore e storia lin (...)
9La dimension que nous souhaitons explorer ici concerne les relations entre langue et dialecte, un domaine incontournable lorsqu’on traite du phénomène du plurilinguisme dans le contexte culturel italien, « da sempre al centro di discussioni e polemiche, ma anche di fervide commistioni11 ». Si les linguistes observent une réduction de l’utilisation du dialecte dans les contextes de communication ordinaire en Italie, ils constatent néanmoins une vitalité de celui-ci dans la production littéraire contemporaine, en raison également du succès planétaire d’un écrivain comme Camilleri12. Silvia Contarini attribue le choix de valoriser les dialectes et les langues étrangères par les écrivains italiens contemporains à des raisons souvent identitaires :
- 13 Silvia Contarini, op. cit., p. 38.
il caso più emblematico e probabilmente più comune nella recente produzione letteraria [… è] il dialetto con funzione rivendicativa, il dialetto come affermazione di radici, legame con terra, usi e costumi, appartenenza a un territorio e a una cultura, a una lingua orale lingua di trasmissione. Il dialetto come segno distintivo. Il dialetto che si fa custode del tempo passato, salvaguardia di un mondo che sta scomparendo, baluardo di memoria storica e affettiva, resistenza all’assimilazione, volontà di valorizzare il margine, di proteggere la minoranza e i suoi diritti ancestrali. Questa funzione del dialetto, che potremmo definire conservativa e distintiva, è fondamentalmente identitaria e spesso rivendicativa13.
- 14 Antonietta Dettori, « Plurilinguismo e sperimentazione nella produzione narrativa contemporanea d (...)
10Ces réflexions s’appliquent aisément à nombre d’auteurs sardes, comme le rappelle Antonietta Dettori qui évoque la naissance, dès les années 1980, d’« un vivace dibattito sulla rivendicazione del sardo quale lingua di minoranza e sulla necessità di mostrarne le potenzialità espressive attraverso l’impiego letterario14 ». La question est alors de savoir si Milena Agus, avec son roman Un tempo gentile, adopte, elle aussi, cette pratique.
Pour une poétique de la mesure
- 15 TG, p. 16.
- 16 TG, p. 26 et 60.
- 17 TG, p. 40.
- 18 Anna Mura Porcu, « La narrativa di Milena Agus: medietà e regionalità linguistica in Ali di Babbo (...)
- 19 TG, p. 15.
- 20 TG, p. 18.
- 21 TG, p. 38.
11Penchons-nous sur l’analyse linguistique du texte. Le registre de langue utilisé est généralement courant. Les rares virages vers le registre familier concernent davantage le lexique que les structures morpho-syntaxiques : c’est le cas d’expressions comme « bar dall’odore di tappo15 », « i figli della gallina bianca16 » ou encore « guai a toccarglielo17 ». Dans le texte, les procédés d’emphase sont fréquents. Ainsi, on peut lire des dislocations à gauche et à droite, et des phrases clivées, des phénomènes qui, comme le rappelle Anna Mura, « rispondenti in prima istanza alle finalità espressive e di messa in rilievo del parlato, sono ormai penetrat[i] largamente nella scrittura18 » : « i segni di allora li potevate ancora vedere19 », « i nostri figli emigrati li sentivamo al telefono20 », « dall’invitarli a casa nostra ci guardammo bene21 ». De même, l’emploi du pronom personnel complément d’objet indirect gli au lieu de loro à la troisième personne du pluriel, désormais largement accepté dans la langue parlée, est systématique.
- 22 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 234.
- 23 Paolo d’Achille, op. cit., p. 168.
12Nous pouvons par ailleurs constater que les modes et les temps verbaux sont utilisés correctement et avec rigueur : le subjonctif n’est pas remplacé par l’indicatif (phénomène qui est en revanche fréquent dans la langue parlée) et le passé composé n’est pas employé à la place du passé simple, une commutation que Mura considère comme un élément régional de Sardaigne22, mais que Paolo D’Achille élargit à toute la morphologie de l’italien parlé contemporain23.
- 24 Cf. Franck Floricic, « Notes sur l’accusatif prépositionnel en sarde », Bulletin de la Société de (...)
- 25 Cf. Ines Loi Corvetto, L’italiano regionale di Sardegna, Bologna, Zanichelli, 1983, p. 157-160 et (...)
13Dans l’ouvrage, nous ne trouvons aucun exemple d’accusatif prépositionnel, une structure typique des dialectes italiens méridionaux et de la langue sarde24, ni d’un suremploi du gérondif, fréquent dans la langue sarde et dans l’italien régional de Sardaigne25.
- 26 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 234.
- 27 TG, p. 20.
- 28 TG, p. 41 et 174.
- 29 « Se uno deve andare nel corno grande della forca », Marcello Fois, Sempre caro, Torino, Einaudi, (...)
- 30 Il s’agit de Tonino Guerra, Odissea. Viaggio del poeta con Ulisse, Arezzo, Bracciali, 2007.
14La présence du sarde concerne surtout la sphère lexicale, ce qui confirme une tendance que Mura avait déjà remarquée dans la production littéraire précédente de l’écrivaine : « le intromissioni di elementi locali […] svolgono un ruolo significativo, ma quasi esclusivamente nel livello lessicale e fraseologico, mentre sono meno evidenti nella morfosintassi26 ». Quelques traces de sarde sont présentes dans l’onomastique (Bissente, padre Efix) et dans la toponomastique (domus de janas27). Nous retrouvons également l’expression « corno della forca28 », calque du sarde corru ’e sa furca, déjà utilisée par Marcello Fois dans Sempre caro29, ainsi que la traduction en sarde de quelques vers du poète romagnol Tonino Guerra, dont l’original italien sert d’épigraphe au roman de Milena Agus30.
- 31 TG, p. 65.
- 32 TG, p. 68. Dans ce cas, deux lignes plus loin, une phrase en italien clarifie le sens : « Noi don (...)
- 33 TG, p. 110.
- 34 TG, p. 30.
- 35 TG, p. 44.
- 36 TG, p. 97.
- 37 TG, p. 121.
- 38 TG, p. 152.
15Les mots en sarde – nous en avons dénombré moins d’une centaine dans le roman – sont systématiquement transcrits en italique. Beaucoup de ces mots concernent la gastronomie ou les traditions locales ; ces expressions ne sont pas toujours traduites, surtout lorsqu’elles désignent des spécialités culinaires sardes connues de tous, parfois entrées dans la langue italienne en tant qu’emprunts : « fetta di civraxiu con il formaggio31 », « civraxiu, coccoi, carasau, modditzosu32 », « non potevano certo rinunciare al porceddu, ai malloreddus alla campidanese e al Cannonau. Allora i nostri uomini misero allo spiedo sia un porceddu sia un angioneddu33 ». Parfois les expressions sardes sont suivies de leur traduction, juxtaposée, le plus souvent uniquement à la première occurrence, ce qui implique pour un lecteur non sardophone qu’il se souvienne de la signification du mot, donnée auparavant : « strexus ’e fenu strumenti in paglia di grano per setacciare la farina34 », « sa monza, la suora35 ». Le mot sarde sciadau (avec ses variantes), qui veut dire “malheureux”, est celui qui revient le plus fréquemment dans le texte – « sciadaus, meschini36 », « sciadadedda, poverina37 », « sciadadedda, est a barca perdia, che in sardo significa “poverina, naviga su una barca perduta, farà naufragio”38 » – pour des raisons thématiques évidentes.
- 39 TG, p. 18.
- 40 TG, p. 69.
- 41 TG, p. 91.
- 42 Le recours au français dans la première citation est une manière pour souligner le caractère exot (...)
16Le sarde n’est pas la seule langue autre attestée dans le roman ; des mots étrangers (xénismes) tirés du français et de l’anglais, y apparaissent, transcrits en italique – « robe bustier e robe corset, […] bowler o di marseillaise39 », « non dimenticate i doggy bags40 », « la vedo seduta su una panchina di un neighbourhood garden41 » – utilisés pour caractériser certains personnages42.
- 43 Ines Loi Corvetto, « Italiano di Sardegna », in Treccani. Enciclopedia dell’Italiano, https://www (...)
- 44 Rita Fresu, « Scrittrici d’isola: tendenze linguistiche della narrativa femminile italiana in Sar (...)
- 45 Cf. Anna Mura Porcu, op. cit., p. 226.
- 46 Cristina Lavinio, art. cit., p. 143.
Les différents exemples cités témoignent d’une présence du sarde – aussi bien de la langue sarde que de l’italien régional de Sardaigne43 – quantitativement limitée à l’intérieur du roman Un tempo gentile. Cela rejoint ce que d’autres chercheuses ont constaté à propos des œuvres précédentes de Milena Agus. Rita Fresu fait allusion à une « componente regionale […] tutto sommato piuttosto contenuta44 » dans le roman Mal di pietre (2006) ; Anna Mura Porcu parle d’une « medietà linguistica45 » pour Ali di babbo (2008), et Cristina Lavinio, pour le roman Sottosopra (2011), en arrive à évoquer un plurilinguisme de surface46.
Il dialetto per diletto?
- 47 Giuseppe Antonelli, « Il dialetto non è più un delitto », in Treccani. Lingua italiana, https://w (...)
- 48 La rencontre, intitulée Écrire la Sardaigne, s’est tenue le 13 novembre 2019 à l’Institut Italien (...)
- 49 Cristina Lavinio, art. cit., p. 143.
17Parmi les différentes catégories de la neodialettalità italienne, Giuseppe Antonelli mentionne il dialetto per diletto, le definissant comme « un ritorno alla comicità del bozzetto regionale, alla caratterizzazione locale come molla del riso47 ». Il nous semble que l’emploi du sarde fait par la romancière Milena Agus rejoint cette catégorie. Lors d’une rencontre organisée en 2019 par l’Institut Culturel Italien de Paris, l’écrivaine a souligné sa tendance à utiliser le sarde campidanais en littérature dans un but de divertissement, s’agissant d’une variété « che non si presta alle cose serie, ma solo a quelle comiche48 ». Cristina Lavinio évoque une modalité « décorative » et une ligne monolingue à laquelle Agus appartiendrait, « intaccata da tentativi volontaristici di colore linguistico locale solo spennellato qua e là in modo superficiale e di maniera, ma in realtà non vitalmente controllato49 ».
18Or, ce choix en faveur de la mesure et du monolinguisme dans un roman comme Un tempo gentile qui célèbre les effets enrichissants du métissage culturel est étonnant. Dans le livre, une place importante est accordée aux différentes expériences d’échange entre les deux communautés, autour par exemple de la gastronomie :
- 50 TG, p. 67.
i piatti tipici sardi erano comunque facili da realizzare, quelli esotici quasi impossibili, per la mancanza delle spezie, finché Said Amal, con la cucina a gas che gli avevamo regalato […] fece il miracolo. Le patate, le cipolle, l’aglio, il riso e le mele, diventati impasto per degli insoliti felafel, inondarono di profumo la desolazione e l’abbandono di quel vecchio ambiente50.
- 51 TG, p. 98.
- 52 TG, p. 113.
- 53 Nous pouvons nous interroger sur la tendance, qui est constante dans le roman, à ne jamais laisse (...)
- 54 TG, p. 33-34.
- 55 TG, p. 32.
19Le métissage semble apparemment affecter également la langue : « Asad […] disquisiva nel suo italiano strambo sull’arte di coltivare i ravanelli51 » ; « battemmo le mani tutti quanti, al ritmo di quelle parole, senza sapere cosa volessero dire, ma lasciandoci rapire dal suono dell’arabo, che è una lingua dolce e melodiosa52 ». Néanmoins, l’hybridation linguistique n’est pas immédiatement visible sur la page écrite car tout est filtré par la voix de la narratrice qui, en parlant au nom des autres personnages (les habitants du village et les migrants53), joue un rôle d’intermédiaire. Les dialogues sont rares et les pensées d’autrui sont souvent rapportées à travers le discours indirect : « i volontari tradussero dall’inglese le parole di Saida54 » ; « lo capivano da soli, volevamo dirgli, che non potevamo fare nulla per loro e che chi li aveva indirizzati da noi doveva essersi informato male55 ». Dans un roman qui traite de migrations et d’hybridation culturelle, on aurait pu s’attendre à des phénomènes plus marqués de contamination et de créolisation linguistiques. Or, nous n’y trouvons aucune trace d’expérimentation expressive.
- 56 TG, p. 65.
20Par ailleurs, la communauté locale de villageois est présentée comme repliée sur elle-même et réfractaire au changement. Un isolement qui aurait pu se traduire, sur le plan linguistique, par un emploi plus abondant de la langue sarde en tant qu’élément de distinction identitaire. Là aussi, nous l’avons constaté, la présence du sarde est circonscrite dans Un tempo gentile. Ainsi, lorsqu’on lit de Mamhoud qu’il « urlava disperato, nella nostra lingua, che stava imparando con una velocità sorprendente. Quel buon formaggio glielo mettevamo sulla galletta, ma lui gridava “pulita, pulita !”56 », la nostra lingua évoquée par la narratrice est clairement l’italien, pas le sarde. Qui plus est, dans le roman, aucune thématisation de la sardophonie, du bilinguisme et de la diglossie n’est présente.
- 57 Margherita Marras, « La sardità creola in Marcello Fois », Narrativa, « Altri stranieri », Silvia (...)
- 58 Cf. Antonella Capra, « Il plurilinguismo al servizio della narrazione nell’opera di Marcello Fois (...)
- 59 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 224.
- 60 Le podcast de l’émission du 18 octobre 2020 est disponible en ligne : https://www.raiplayradio.it (...)
- 61 En réalité, depuis plusieurs années, et notamment grâce aux œuvres de Sergio Atzeni (1952-1995), (...)
21Cela montre clairement la distance qui sépare Milena Agus d’autres écrivains sardes, comme par exemple Marcello Fois, un auteur pleinement sardophone pour lequel « la parola mistilingue […], ben lungi dall’essere un fatto marginale o un semplice divertissement, [… è modellata] da un’irrompente necessità di tradurre in narrativa bisogni connaturati alla sua cultura d’origine57 ». Si chez Fois – pensons notamment à des romans comme Sempre caro (1998), Sangue dal cielo (1999) ou L’altro mondo (2002) – la langue sarde est au service de la narration58 et devient un moyen privilégié pour exprimer une spécificité identitaire, nous ne retrouvons pas cette forme d’attachement chez Milena Agus, née à Gênes d’une famille sarde. Un détail biographique qui n’est pas sans importance et que l’écrivaine elle-même n’hésite pas à mettre en avant dans ses nombreuses interviews. Concernant sa position dans le panorama de la littérature sarde contemporaine, Anna Mura Porcu rappelle qu’en 2007, Agus soulignait sa distance par rapport à la Sardaigne racontée par des écrivains comme Deledda, Niffoi et Giacobbe, et précisait son appartenance à une autre Sardaigne, « improntata forse su una maggiore spiritosaggine e allegria levantina, perché collocata in una realtà socio-culturale e linguistica diversa, quella del Sud dell’isola59 ». De même, dans une interview récente pour l’émission L’isola deserta de Chiara Valerio, l’écrivaine a affirmé que « la Sardegna non è per me quello che è sempre stato per i sardi60 ». Une volonté, paraît-il, de se démarquer d’une certaine représentation de l’île et de sa production littéraire, traditionnellement identifiée aux auteurs de la Barbagia, région centrale et montagneuse, aux traits culturels plus conservateurs et marqués sur le plan identitaire61.
Les raisons d’un succès
22Le choix en faveur d’une poétique linguistique que nous avons définie “de la mesure” reflète une caractéristique plus générale du roman de Milena Agus, traversé par la légèreté, la simplicité, l’humour. Aucune trace de la représentation politicisée, démagogique, instrumentalisée des migrants qu’en font aujourd’hui les médias et les institutions ; Agus nous plonge dans une atmosphère de conte lumineuse et merveilleuse, où toute dimension sociologique et idéologique est absente pour laisser la place à un humanisme quelque peu ingénu.
- 62 TG, p. 70.
- 63 Pour ne citer que quelques exemples de clichés présents dans le roman et abordés avec drôlerie : (...)
- 64 Letizia Vonwiller Rittatore, « Abbiamo bisogno di “Un tempo gentile” ». Intervista a Milena Agus, (...)
23« Avevamo scoperto che in ogni linguaggio umano l’essenziale è fatto di poche semplici parole e con quelle potete farci discorsi complicati62 », observe la narratrice en brossant le portrait d’une société humaine, modèle d’intégration, où le plaisir du partage serait capable d’annihiler les barrières linguistiques et culturelles. Une vision qui pourrait d’emblée paraître mièvre et naïve, que l’écrivaine essaie de complexifier, d’une part, à travers des personnages nuancés qui ne sont pas tous aimables et qui ne vivent pas tous l’expérience de la cohabitation et de la rencontre avec bienveillance et générosité, et d’autre part, grâce à une écriture ironique qui voudrait démonter les stéréotypes63 : « Cerco di smontarli [i pregiudizi]. È il modo giusto per inserirli in un libro, che non vuole essere tragedia ma commedia, con parole che facciano magari ridere, sperando che dopo la risata venga la riflessione. I pregiudizi sono ridicoli64 ».
- 65 TG, p. 194.
- 66 Ibid.
- 67 TG, p. 195.
- 68 TG, p. 195 pour la traduction en sarde, et en épigraphe pour la version italienne.
24Par ailleurs, le roman ne se termine par aucun coup de théâtre : les migrants s’en vont, en laissant un grand vide dans le village. Les habitants retournent à leurs anciennes habitudes – « il cambio degli armadi ci dà di nuovo soddisfazione. Facciamo splendere nuovamente i vetri65 » – et il n’est plus question que les puissants du village se mélangent au petit peuple, comme c’était le cas pendant le séjour des migrants. Détrompons-nous : les hiérarchies de classe sont toujours présentes et Un tempo gentile n’est pas le genre de roman qui ose les renverser. Les réflexions finales du livre transmettent ainsi le goût amer d’une prise de conscience du fait que « la mescolanza degli umani, che ci era apparsa tanto semplice allora, quando eravamo uniti e facevamo qualcosa che sembrava difficilissimo perfino ai governi, forse è impossibile66 ». Si la narratrice constate avec fierté que « la nostra vita non è stata sempre e soltanto da conigli. In fondo, ci diciamo, per una volta siamo usciti dalla tana e abbiamo dato una mano d’aiuto67 », le poème en sarde par lequel le roman se termine exprime tout le regret pour une saison douce qui fut et qui n’est plus : « Peccato che la storia sia finita. S’erba a pagu a pagu adi interrau tottu / e no ti beniada mancu de penzai / chi omminisi e femminasa / proppriu ingunisi, arrianta impari / castiendu una matta florida » / « L’erba piano piano ha sepolto tutto / e non ti veniva neanche da pensare / che degli uomini e delle donne proprio lì, appena un anno prima, / ridevano insieme / nel guardare un albero fiorito68 ».
- 69 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 244.
25Un tempo gentile est un roman discrètement engagé, où la dimension civile est certes présente, mais elle est toujours affirmée avec mesure et équilibre. Aucun excès, aucune subversion. Une tendance à la discrétion qui se traduit sur le plan linguistique par une poétique « che non eccede nessun polo del repertorio linguistico69 » et qui refuse toute valeur expérimentale. C’est probablement dans cela que réside le succès d’une écrivaine très appréciée en France – 330 000 exemplaires vendus pour Mal de pierres, 100 000 pour Battement d’ailes, 22 000 pour Terres promises. Rappelons que la parution en 2006 de la traduction française de Mal di pietre fut accueillie par ces réflexions :
- 70 Jean-Baptiste Marongiu et Robert Maggiori, « Critique. Italie roman noir et pensée éclairée », Li (...)
Milena Agus […] reste culte en Sardaigne mais inconnue en Italie. Cela ne devrait pas durer. Comment l’expliquer ? Par son talent évidemment mais aussi par une position singulière qui la rend quelque peu étrangère à l’actuelle conjoncture littéraire locale. Les écrivains sardes se sont taillés un franc succès en Italie en se coulant dans le moule du genre très porteur du noir. […]. Milena ne veut pas de cette couleur-là. Sa patrie à elle n’est ni sarde ni continentale, c’est tout simplement la littérature, où elle vit au rythme de la phrase. C’est en ce lieu et en ces temps, en Sardaigne ou ailleurs, que peuvent sourdre des chefs-d’œuvre et Mal de pierres en est un70.
26Les nombreux articles qui ont suivi la publication en France d’Une saison douce le confirment : on admire chez cette auteure son déracinement et sa capacité à franchir les frontières, réelles et imaginaires, par une prose qui raconte des sujets graves de manière discrète, bienveillante et enjouée.
Notes
1 Milena Agus, Un tempo gentile, Milano, Nottetempo, 2020 et, pour sa traduction française, Une saison douce, trad. fr. par Marianne Faurobert, Paris, Liana Levi, 2021.
2 https://www.lianalevi.fr/catalogue/une-saison-douce/
3 Florence Noiville, « D’étranges étrangers au fin fond de la Sardaigne », Le Monde, 9 avril 2021.
4 Milena Agus, Un tempo gentile, op. cit., p. 41. Dorénavant, le texte sera indiqué par le sigle TG suivi du numéro de page.
5 Christine Ferniot, « Une saison douce », Télérama, 16 février 2021.
6 Cf. au moins Silvia Contarini et al. (dir.), Da ieri a oggi. Tragitti del Sud nella cultura italiana contemporanea, Firenze, Cesati, 2018 ; Luigi Cazzato, Sguardo inglese e Mediterraneo italiano. Alle radici del meridionismo, Milano, Mimesis, 2017 ; Margherita Marras, Giuliana Pias (dir.), Narrativa, « Nuove frontiere del Sud. Genesi e sviluppo di un pensiero plurale sul Sud nella letteratura e nella cultura dell’Italia contemporanea », no 39, 2017 ; Marta Cariello, « Non arrivo a mani vuote. Tragitto da sud di Ahdaf Soueif », in Iain Chambers (dir.), Esercizi di potere. Gramsci, Said e il postcoloniale, Roma, Meltemi, 2006, p. 101-109.
7 Eva-Maria Remberger, Maurizio Vidis, Birgit Wagner, « Il sardo in movimento: un’introduzione », in Eva-Maria Remberger, Maurizio Vidis, Birgit Wagner (dir.), Il sardo in movimento, Vienne, Vienna University Press, 2020, p. 20.
8 Cristina Lavinio, « Plurilinguismo nella narrativa in Sardegna: da negato o occultato a esibito ed esasperato », InVerbis. Lingue Letterature Culture, « I confini del testo letterario plurilingue », Marina Castiglione (dir.), no 1, 2014, p. 144.
9 Pour ne citer que quelques titres récents, Silvia Contarini, Scrivere al tempo della globalizzazione. Narrativa italiana dei primi anni Duemila, Firenze, Cesati, 2019 ; Daniele Comberiati, Flaviano Pisanelli (dir.), Scrivere tra le lingue. Migrazione, bilinguismo, plurilinguismo e poetiche della frontiera nell’Italia contemporanea (1980-2015), Roma, Aracne, 2017 ; Emilio Sciarrino, Le plurilinguisme en littérature. Le cas italien, Paris, Éditions des Archives contemporaines, 2016 ; InVerbis. Lingue Letterature Culture, « I confini del testo letterario plurilingue », Marina Castiglione (dir.), op. cit.
10 Il s’agit là d’un thème cher à Daniele Comberiati qui lui a consacré également son ouvrage Scrivere nella lingua dell’altro. La letteratura degli immigrati in Italia (1989-2007), Bruxelles, Peter Lang, 2010.
11 Daniele Comberiati, Flaviano Pisanelli, « Introduzione », in Daniele Comberiati, Flaviano Pisanelli (dir.), op. cit., p. 11.
12 Cf. Nicola De Blasi, « Dialetto e varietà locali nella narrativa tra scelte d’autore e storia linguistica di fine Novecento », in Antonietta Dettori (dir.), Dalla Sardegna all’Europa. Lingue e letterature regionali, Milano, Franco Angeli, 2014, p. 16 et Giuseppe Antonelli, La lingua ipermedia. La parola di scrittore oggi in Italia, Lecce, Manni, 2006, p. 98.
13 Silvia Contarini, op. cit., p. 38.
14 Antonietta Dettori, « Plurilinguismo e sperimentazione nella produzione narrativa contemporanea di autori sardi », InVerbis. Lingue Letterature Culture, « I confini del testo letterario plurilingue », Marina Castiglione (dir.), no 1, 2014, p. 91.
15 TG, p. 16.
16 TG, p. 26 et 60.
17 TG, p. 40.
18 Anna Mura Porcu, « La narrativa di Milena Agus: medietà e regionalità linguistica in Ali di Babbo », in Antonietta Dettori (dir.), Dalla Sardegna all’Europa. Lingue e letterature regionali, Milano, Franco Angeli, 2017, p. 226. Cf. également Paolo D’Achille, L’italiano contemporaneo, Bologna, Il Mulino, 2003.
19 TG, p. 15.
20 TG, p. 18.
21 TG, p. 38.
22 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 234.
23 Paolo d’Achille, op. cit., p. 168.
24 Cf. Franck Floricic, « Notes sur l’accusatif prépositionnel en sarde », Bulletin de la Société de linguistique de Paris, t. XCVIII, no 1, 2003, p. 247-303.
25 Cf. Ines Loi Corvetto, L’italiano regionale di Sardegna, Bologna, Zanichelli, 1983, p. 157-160 et Roberta Caddeo, « Aspetti dell’interferenza sardo italiano: il gerundio nell’italiano regionale di Sardegna », Rhésis. International Journal of Linguistics, Philology and Literature, no 10.1, 2019, p. 75-112, https://www.rhesis.it/issue/linguistics-and-philology-10-1/
26 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 234.
27 TG, p. 20.
28 TG, p. 41 et 174.
29 « Se uno deve andare nel corno grande della forca », Marcello Fois, Sempre caro, Torino, Einaudi, 2009, p. 10. Cf. Anna Mura Porcu, op. cit., p. 236-237.
30 Il s’agit de Tonino Guerra, Odissea. Viaggio del poeta con Ulisse, Arezzo, Bracciali, 2007.
31 TG, p. 65.
32 TG, p. 68. Dans ce cas, deux lignes plus loin, une phrase en italien clarifie le sens : « Noi donavamo il pane ».
33 TG, p. 110.
34 TG, p. 30.
35 TG, p. 44.
36 TG, p. 97.
37 TG, p. 121.
38 TG, p. 152.
39 TG, p. 18.
40 TG, p. 69.
41 TG, p. 91.
42 Le recours au français dans la première citation est une manière pour souligner le caractère exotique du personnage du couturier du village : « i suoi capolavori, che ricordavano i costumi sardi dei nostri antenati, ma aperti al mondo », TG, p. 13.
43 Ines Loi Corvetto, « Italiano di Sardegna », in Treccani. Enciclopedia dell’Italiano, https://www.treccani.it/enciclopedia/italiano-di-sardegna_%28Enciclopedia-dell%27Italiano%29/
44 Rita Fresu, « Scrittrici d’isola: tendenze linguistiche della narrativa femminile italiana in Sardegna nell’ultimo decennio », in Antonietta Dettori (dir.), Dalla Sardegna all’Europa, op. cit., p. 219.
45 Cf. Anna Mura Porcu, op. cit., p. 226.
46 Cristina Lavinio, art. cit., p. 143.
47 Giuseppe Antonelli, « Il dialetto non è più un delitto », in Treccani. Lingua italiana, https://www.treccani.it/magazine/lingua_italiana/speciali/italiano_narrativa/antonelli.html
48 La rencontre, intitulée Écrire la Sardaigne, s’est tenue le 13 novembre 2019 à l’Institut Italien de Culture de Paris. L’enregistrement d’une partie de la conférence est disponible en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=-7yyvzZ-m-8&t=13s&ab_channel=iicparigi
49 Cristina Lavinio, art. cit., p. 143.
50 TG, p. 67.
51 TG, p. 98.
52 TG, p. 113.
53 Nous pouvons nous interroger sur la tendance, qui est constante dans le roman, à ne jamais laisser la parole aux autres et à parler à leur place. La question de la parole donnée, ou pas, aux sujets subalternes mériterait d’être explorée – et nous ne pouvons pas le faire ici – en raison de ses implications idéologiques et politiques.
54 TG, p. 33-34.
55 TG, p. 32.
56 TG, p. 65.
57 Margherita Marras, « La sardità creola in Marcello Fois », Narrativa, « Altri stranieri », Silvia Contarini (dir.), no 28, 2006, p. 124.
58 Cf. Antonella Capra, « Il plurilinguismo al servizio della narrazione nell’opera di Marcello Fois », Individu & nation, « Particularismes et identités régionales dans la littérature italienne contemporaine », no 4, 2011, https://preo.u-bourgogne.fr/individuetnation/index.php?id=241&lang=en
59 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 224.
60 Le podcast de l’émission du 18 octobre 2020 est disponible en ligne : https://www.raiplayradio.it/audio/2020/10/Lapos-ISOLA-DESERTA----Milena-Agus-c7922dcb-0ee4-45d0-a8b6-51eaf44ab7ae.html
61 En réalité, depuis plusieurs années, et notamment grâce aux œuvres de Sergio Atzeni (1952-1995), romancier et poète de Cagliari – « il primo narratore sardo moderno a lasciare le campagne per spostare il centro dell’azione in città » (Gigliola Sulis, « Bilinguismo e plurilinguismo nel romanzo di formazione sardo : Deledda, Fiori, Ledda, Atzeni, Murgia », in Eva-Maria Remberger, Maurizio Vidis, Birgit Wagner (dir.), Il sardo in movimento, op. cit., p. 284) – la littérature sarde a cessé d’être exclusivement et rigidement assimilée aux seuls écrivains barbaricini.
62 TG, p. 70.
63 Pour ne citer que quelques exemples de clichés présents dans le roman et abordés avec drôlerie : le musulman sombre et inquiétant, le Sarde sauvage assimilé à un mouton, les femmes de l’Est qui séduisent les hommes italiens. On constatera toutefois que la tentative de renverser les stéréotypes par le comique n’est pas toujours réussie : dans le roman, le binarisme de genre est très présent, expression d’une vision essentialiste du féminin. Sur ce point, nous nous permettons de renvoyer à notre article « Lo spazio al margine di Milena Agus: cura di sé e cura del mondo », Chronica Mundi, Special Issue, à paraître.
64 Letizia Vonwiller Rittatore, « Abbiamo bisogno di “Un tempo gentile” ». Intervista a Milena Agus, Il Corriere della Sera, 4 novembre 2020, https://27esimaora.corriere.it/20_novembre_04/milena-agus-suo-ultimo-romanzo-abbiamo-bisogno-un-tempo-gentile-2e829364-1e6a-11eb-9970-42ca5768e0fd.shtml
65 TG, p. 194.
66 Ibid.
67 TG, p. 195.
68 TG, p. 195 pour la traduction en sarde, et en épigraphe pour la version italienne.
69 Anna Mura Porcu, op. cit., p. 244.
70 Jean-Baptiste Marongiu et Robert Maggiori, « Critique. Italie roman noir et pensée éclairée », Libération, 16 juin 2007, https://www.liberation.fr/culture/2007/06/16/italie-roman-noir-et-pensee-eclairee_95904/
Haut de pagePour citer cet article
Référence papier
Ramona Onnis, « Langue et transculturalité dans Un tempo gentile de Milena Agus », Italies, 26 | 2022, 113-125.
Référence électronique
Ramona Onnis, « Langue et transculturalité dans Un tempo gentile de Milena Agus », Italies [En ligne], 26 | 2022, mis en ligne le 24 mars 2023, consulté le 13 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/italies/10006 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/italies.10006
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