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Ouverture

La conservation et la valorisation des archives de la chorégraphe Mié Coquempot

An H to B, Trace et Offrande : situer, documenter, transmettre
The conservation and interpretation of the archives of Mié Coquempot, choreographer. An H to B, Trace and Offrande: situating, documenting and transmitting
Yann Calbérac et Jessica Chauffert

Résumés

Cet article retrace les questionnements toujours actuels de la Compagnie K622, fondée en 1998 par la chorégraphe Mié Coquempot qui la dirigea jusqu’à son décès en 2019. La compagnie a déposé ses archives artistiques au Centre national de la danse en 2021 : ce dépôt a suscité d’intenses réflexions qui accompagnent le nouveau projet de la compagnie consistant désormais à faire connaître et faire revivre, grâce à des transmissions et des recréations, le répertoire de Mié Coquempot. Comment ces archives participent-elles de la construction d’un patrimoine chorégraphique qu’il convient de conserver, valoriser et transmettre ? Que nous apprennent-elles sur la vie et l’œuvre de la chorégraphe ?

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Texte intégral

  • 1 Fondé en 1998 et situé à Pantin, le Centre national de la danse (CND) est une institution placée so (...)
  • 2 Ce dépôt a pris la forme d’une convention signée en décembre 2021 au Manège de Reims (la scène nati (...)
  • 3 Jérôme Andrieu rencontre Mié Coquempot alors qu’ils sont tous les deux interprètes pour Daniel Larr (...)

1À la mort de sa fondatrice, la danseuse et chorégraphe Mié Coquempot (1971-2019), la Compagnie K622 (créée en 1998 et nommée en référence au Concerto pour clarinette de Mozart) a déposé la totalité de ses archives au Centre national de la danse (CND), à Pantin1. En plus de ce dépôt2, K622 s’emploie désormais, selon les volontés de l’artiste, à poursuivre sa mission de création en soutenant, par une aide à la structuration de leur compagnie, le travail de jeunes artistes, essentiellement des femmes, qui ont généralement plus de difficulté lorsqu’il s’agit d’accéder à la scène, mais aussi à conserver, faire connaître et surtout faire vivre le répertoire chorégraphique de Mié Coquempot en poursuivant sa diffusion, en encourageant les recréations et en permettant aux chercheurs de travailler sur son œuvre. Ce dépôt joue alors un rôle central. Il a été rendu possible grâce à un important travail de collecte, d’inventaire et de conditionnement effectué au sein de la compagnie par deux proches : Lucie Mollier, sa directrice, qui s’est consacrée au classement des pièces administratives, alors que Jérôme Andrieu3, danseur, à la fois interprète, assistant de Mié Coquempot et cosignataire avec elle de pièces, a pris en charge la totalité du fonds artistique. L’un et l’autre ont mené l’exigeant travail qui a consisté à réunir des documents de natures diverses : carnets de notes, enregistrements audio ou vidéo, captations de travail et de spectacles, photographies, bibliothèque, partitions musicales et chorégraphiques, dossiers de production et de diffusion, articles de presse, feuilles de salle. Le fonds de Mié Coquempot est riche de documents qui témoignent non seulement de l’évolution de sa danse, mais aussi de ses méthodes de travail et des conditions économiques de ses productions, ce que le CND souhaite mettre en valeur en conservant la totalité des pièces. Ce sont désormais les archivistes du CND qui assurent la conservation et la valorisation du fonds, qui occupe environ 4 mètres linéaires, auxquels s’ajoutent plus de 400 supports vidéo et audio. Le CND prend en charge deux tâches distinctes en vue d’indexer et de cataloguer le fonds, le rendant ainsi accessible au public : d’une part la conversion et le stockage des enregistrements audio et vidéo sur des supports pérennes, alors même que ces enregistrements ont été faits sur différents formats (VHS, MP4…) ; et d’autre part le reclassement intégral du fonds. Alors que Jérôme Andrieu et Lucie Mollier ont établi un classement à partir de la nature des documents, les archivistes du CND organisent leur classement par spectacle. Le fonds est toujours en cours de traitement ; à terme, il sera accessible au public désireux de mieux connaître l’œuvre de Mié Coquempot.

  • 4 Le modèle que nous avons en tête est bien sûr l’extraordinaire travail de conservation et de valori (...)
  • 5 Nous renvoyons à ce numéro thématique de la revue Recherches en danse : PALAZZO Claudia & SINTÈS Gu (...)

2Le travail de valorisation des archives a également permis de structurer au sein de K622 un groupe hétérogène d’individus qui ont rencontré l’artiste ou son œuvre à différents moments, et qui sont intéressés par la question de la conservation et de la diffusion des créations de Mié Coquempot : ses interprètes, qui sont souvent bien davantage – certains co-écrivent des pièces, d’autres l’accompagnent comme assistants (Jérôme Andrieu, Maud Pizon, Agnès Coutard, Anne Laurent) –, ses collaborateurs artistiques et administratifs (Christophe Poux, Lucie Mollier et Rebecca Dutkiewicz), mais aussi des chercheurs et des représentants d’institutions (Laurent Sebillotte, Juliette Riandey et l’équipe du CND, Claude Sorin, Jessica Chauffert et Yann Calbérac) ont ainsi entrepris une réflexion autour de ces archives, pour les conserver, les valoriser et en faire un levier pour explorer l’œuvre. Ces archives sont de ce fait devenues un catalyseur de questionnements qui nourrissent le projet de la compagnie. Pour K622 comme pour les proches de Mié Coquempot qui s’investissent dans la tâche, l’objectif est en effet de passer d’un répertoire vivant à un patrimoine qu’il convient désormais de conserver et de valoriser4. Ce projet s’inscrit donc dans les réflexions en cours, portées aussi bien par des chercheurs en danse que par des artistes ou des conservateurs, à l’intersection de l’archivage de la danse, de la valorisation des archives, de la mémoire de la danse et de la recréation du patrimoine chorégraphique5.

  • 6 CAPPELLE Laura (dir.), Nouvelle histoire de la danse en Occident, de la préhistoire à nos jours, Pa (...)

3Cet article s’intègre par conséquent dans ce work in progress impulsé dès 2019 et alimenté au gré des recréations, des rencontres et des opportunités : l’appel lancé par la revue In Situ nous a donné l’opportunité, non seulement de faire le point sur les questionnements en cours, mais aussi d’en tirer des pistes de réflexion qui alimenteront nos discussions futures. Les pages qui suivent montrent comment l’archive s’est non seulement imposée comme un matériau à conserver et valoriser, mais même comme une entrée opératoire pour interroger l’œuvre que nous a léguée Mié Coquempot. Cette thématique des archives est à la fois au centre et à la périphérie du projet de K622 : au centre, car elle est au principe même du nouveau projet de la compagnie, mais également à la périphérie, car la conservation n’est qu’un moyen pour promouvoir un répertoire qui a vocation à rester vivant. Loin de présenter des résultats, ce sont des hypothèses que nous livrons ici : cette première étape collective de réflexion a été en effet pour nous l’occasion de prendre conscience de l’extraordinaire valeur patrimoniale, esthétique et scientifique de ce fonds. Sa conservation est une condition sine qua non pour non seulement faire vivre ce patrimoine, mais aussi pour comprendre la place singulière qu’occupe Mié Coquempot dans l’histoire de la danse de la fin du xxe et du début du xxie siècle6.

  • 7 À l’heure actuelle, nous n’avons pas encore exploré de manière systématique les archives.
  • 8 En effet, à la différence des autres membres de ce groupe de travail, les deux co-auteurs de cet ar (...)
  • 9 Le répertoire complet est détaillé sur le site web de K622 : https://k622.org/index.php/creations/r (...)
  • 10 LATOUR Bruno & WOOLGAR Steve, La Vie de laboratoire. La production des faits scientifiques [1979], (...)

4Ce premier tour d’horizon7 porté sur ces archives a en particulier permis de construire un regard synoptique et synthétique sur l’œuvre de Mié Coquempot dans sa durée et sa diversité alors même que chaque membre de ce groupe de travail a rencontré l’artiste ou son œuvre à des moments différents8 : ces archives contribuent ainsi à documenter à la fois l’œuvre et la vie de Mié Coquempot et donc à poser de premiers jalons et de premières hypothèses dans l’analyse de son travail. Surtout, cette plongée nous a fait comprendre à quel point le motif de la trace, du souvenir, du legs, en un mot de l’archive envisagée selon ses différentes modalités, est très présent chez Mié Coquempot dès ses premières créations. Il nous semble dès lors pertinent d’interroger les archives de K622 et de les donner à voir avec les outils esthétiques et les démarches que Mié Coquempot a elle-même mobilisés dans son travail chorégraphique. Dans l’imposant répertoire de ses créations9, nous retenons trois pièces qui scandent son œuvre et éclairent la façon singulière qu’elle a d’utiliser l’archive dans sa recherche chorégraphique, et c’est à partir de chacune d’elles que nous déploierons nos questionnements. Cela se traduit par une hypothèse méthodologique, inspirée du principe de symétrie10 : solliciter, pour interroger ce dépôt d’archives, les catégories et les questionnements que Mié Coquempot avait elle-même l’habitude de mettre en œuvre pour alimenter son travail de création. Trois fonctions de l’archive se dessinent au fil de son répertoire et donneront lieu à chacune des trois parties de cet article :

  • An H to B (1997) inscrit l’œuvre de Mié Coquempot dans une histoire des arts et de la danse, ce qui aide à situer, à partir des archives, son œuvre et à l’inscrire dans une histoire de la danse : en quoi ces archives permettent-elles de situer l’œuvre de Mié Coquempot ?

  • Trace (2002) invite à reconstituer, à partir des archives, le travail de création de l’œuvre et donc à documenter la genèse de l’œuvre dans le studio : comment les archives contribuent-elles à documenter son travail de création ?

  • Enfin, Offrande (2021) interroge l’œuvre que Mié Coquempot nous a léguée et questionne la pertinence de conserver ses archives pour transmettre ses créations : qu’est-ce qui, dans les archives conservées, rend possible cette transmission à des tiers ?

An H to B – Situer la vie et l’œuvre

5En quoi le travail de Mié Coquempot a-t-il pour point de départ l’archive de ses prédécesseurs et de ses contemporains ? Comment mobilise-t-elle ces matériaux archivistiques pour alimenter son propre travail chorégraphique ? Comment ses archives nous aident-elles à situer l’œuvre de Mié Coquempot dans l’histoire de la danse ?

6C’est en effet par un hommage crypté à William Forsythe (né en 1949) que Mié Coquempot entame sa carrière de chorégraphe en créant An H to B (qu’il faut comprendre comme An Homage to Billy) en 1997 [fig. 1] : après avoir été interprète dans une pièce de William Forsythe en 1996, Hypothetical Stream, Mié Coquempot recourt à la pratique de l’hommage – qui emprunte au travail de l’archive – et s’empare de la création du chorégraphe pour en faire un matériau de sa propre œuvre. L’archive est alors vivante : elle permet de garder vive la mémoire des artistes avec qui elle a travaillé et de leurs œuvres (alors même que le problème de la conservation du geste dansé est une question en soi) et d’en faire un matériau de création. C’est à partir des archives – qui relèvent autant du témoignage de l’artiste que de l’apprentissage de sa grammaire et de son esthétique – de celui qu’elle appelait Billy que Mié Coquempot devient chorégraphe, fonde sa compagnie et inscrit désormais son travail dans une histoire de la danse qu’elle mobilise à son profit et qu’elle vient enrichir.

Figure 1

Figure 1

Alexandra Damasse interprète An H to B dans le cadre du programme New York School au Manège de Reims, le mercredi 15 décembre 2021.

© Photographe inconnu (Manège de Reims).

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An H to B
An H to B, pièce interprétée par Alexandra Damasse au collège Georges-Braque (Paris 13e) en 2020. Mié Coquempot a transmis son premier solo An H to B à Alexandra Damasse. Dans le cadre d’actions éducatives, Alexandra Damasse le transmet à son tour.
Crédits : © Atelier de Paris / CDCN.

8La première fonction de ce fonds est donc de situer l’artiste et son travail dans une chronologie, dans une histoire de la danse, d’y chercher des ruptures et d’y déceler des influences… bref, de mener un travail d’historien. Si ces archives sont avant tout des documents de travail qui relèvent uniquement de ses créations chorégraphiques, elles permettent néanmoins, dans leurs creux et dans leurs angles, de retracer la vie de Mié Coquempot, tant sa biographie affleure dans chacun des documents conservés. Elles donnent lieu à l’articulation de deux récits : la trajectoire biographique de Mié Coquempot d’une part, et les pages d’histoire de la danse contemporaine qu’elle écrit d’autre part.

  • 11 LISTA Marcella (dir.), A different way to move. Minimalismes, New York, 1960-1980, cat. exp., Nîmes (...)
  • 12 Le dessein de notre groupe de travail est de publier une monographie sur Mié Coquempot et son œuvre (...)

9En premier lieu, son itinéraire biographique : c’est sans doute le motif de l’entre-deux qui convient le mieux pour définir la position singulière qu’elle occupe. Entre-deux culturel, pour commencer : Mié Coquempot hérite d’une double culture, à la fois européenne, par son père, et japonaise, par sa mère, et son travail consiste à relier ces deux pôles. Elle a travaillé au Japon – notamment à la villa Kujoyama, à Kyoto, où elle a été en résidence en 2002 avec Jérôme Andrieu – et a fait connaître en France des artistes japonaises comme Noriko Baba, dont elle met en scène l’opéra AOI en 2016, ou encore Yasuko Kurono dont elle réactive la performance Kuronoz en différents lieux. Sa place dans l’histoire de la danse, ensuite : Mié Coquempot a reçu des enseignements très différents, en travaillant avec Odile Duboc, Daniel Larrieu, William Forsythe, Serge Ricci, Redha Benteifour, Peter Goss, c’est-à-dire au croisement de la nouvelle danse et de la danse néoclassique forsythienne, probablement influencée par la danse postmoderne américaine – en témoignent ses Skindance et Hairdance, qui ne sont pas sans rappeler la Hand Movie d’Yvonne Rainer. Mié Coquempot est souvent considérée comme « mouvementiste » et ne prend pas part à la « non-danse » dont elle est contemporaine11. Elle travaille au croisement de ces multiples influences et fait la synthèse complexe de son héritage, ne cessant de le remettre sur le métier pour le disséquer, le transformer et l’hybrider12.

10Entre-deux disciplinaire, aussi : Mié Coquempot reçoit une formation professionnelle à la fois en danse et en musique, ce qui lui fait aborder la danse en musicienne aussi bien que la musique en danseuse et chorégraphe. La musique occupe une place centrale dans son travail : elle se forme au piano et à la théorie musicale au Conservatoire de Genève, fait un passage à la Julliard School à New York en 1989 et rentre en Europe pour rejoindre la Junior Stepping Out Jazz Dance Company. Mais plus qu’une danseuse et chorégraphe, elle est aussi musicienne et s’intéresse autant à la musique contemporaine qu’à la musique classique : elle propose avec Z’Anima sa version du Carnaval des animaux de Saint-Saëns, deux de ses dernières pièces (1080 – Art de la fugue et Offrande) s’appuient sur la musique de Bach, et Mozart lui fournit le nom de sa compagnie. Elle mobilise sa formation musicale pour entamer un dialogue fécond avec les musiciens et les compositeurs de son temps, comme Morton Feldman, Pascal Contet, Earle Brown, Ryoji Ikeda, ou encore l’ensemble 2e2m. Pierre Henry occupe une place particulière dans son œuvre : elle a mis en danse sa musique dans la pièce PH (2012) et Pierre Henry a composé une musique pour Rhythm, qu’elle co-écrit avec Jérôme Andrieu en 2015 [fig. 2]. Chez elle, la musique n’est jamais un simple appui pour la danse ; elle est souvent jouée en live et l’artiste met les musiciens sur scène et les fait interagir avec les danseurs. Les archives contiennent ainsi quelques partitions musicales soigneusement annotées, qui montrent qu’elle concevait régulièrement ses chorégraphies directement à partir de la musique écrite.

Figure 2

Figure 2

Mié Coquempot et Jérôme Andrieu interprètent Rhythm à La Passerelle (Saint-Brieuc), le 14 janvier 2016.

© Photographe inconnu (Compagnie K622).

  • 13 En marge du répertoire des créations, K622 présente une liste des « autres supports » qu’elle a uti (...)

11Mié Coquempot retient, enfin, la question de l’hybridité des formes et des langages artistiques ; l’expérimentation et l’exploration sont au cœur de son travail. William Forsythe l’a sûrement inspirée en ce sens : il développe un système d’improvisation en 1994 appelé Improvisation technologies. À la croisée de ces influences, elle tire réflexion pour alimenter des formes ouvertes, à l’image de Sans objet (2004). Plus largement, elle mobilise différents langages et différents médiums13 : la vidéo, des dispositifs numériques, des applications web, des éditions… Autant de médiums qui posent aujourd’hui la question de leur archivage.

Trace – Documenter le studio de création

12En quoi les archives permettent-elles de documenter le travail de recherche et de création mené par Mié Coquempot dans son studio ? Si le but des archives est de laisser une trace, celles relatives à Trace (2002) éclairent remarquablement la genèse du geste chorégraphique.

  • 14 L’intérêt du classement est justement de réunir dans un même dossier les très nombreux documents re (...)

13Trace (2002) est en effet une pièce marquante dans l’œuvre de la chorégraphe, une sorte de manifeste : de multiples versions de la pièce sont inscrites dans le répertoire des créations, versions dont on retrouve, logiquement, des traces dans les archives14. Trace existe sous différentes formes : Trace Piano, Trace ext (version en extérieur), Trace/# Performance in situ, Trace de toi et Mozart, Trace/Piano Version concert… La première version de cette pièce est le résultat d’un travail de co-création engagé par Mié Coquempot et Jérôme Andrieu lors de leur résidence à la villa Kujoyama où ils résident en 2002. Mié Coquempot commence sa réflexion avec Solo Table (2000) en tête : une danse qu’elle effectue sur une table ; les sons provoqués par cette dernière retiennent son attention et lui donnent envie de les rejouer sur un piano. La résidence est l’occasion d’approfondir ces questionnements : ils s’interrogent sur la trace. Que reste-t-il de la danse une fois la performance finie ? Quels seraient les moyens de faire persister dans l’espace la trace du mouvement, par nature si éphémère ? C’est le fil conducteur de leur résidence à Kyoto que les archives nous font suivre. Plusieurs pistes sont successivement explorées : d’abord Solo Table prolongé sur un piano, sur une chaise, dans l’air. La question de la transposition est une problématique constante de la chorégraphe. Puis la pièce est donnée dans un cube en plastique, à l’intérieur duquel on peut danser et laisser des traces sur les parois. Ils explorent ensuite la terre et essaient de traduire chorégraphiquement les déformations de ce pain d’argile. Enfin, ils produisent une danse au sol et étalent de la peinture, témoin graphique de leur passage.

14Dans son œuvre, Trace occupe également une place centrale parce qu’elle est à la fois pleinement danseuse, chorégraphe et musicienne. Le geste musical donne le la au geste chorégraphique. La danse existe, avant tout, pour mettre en œuvre la musique. Cette pièce est particulièrement présente dans les archives, notamment grâce à de très nombreuses vidéos de travail à la villa Kujoyama, mais aussi d’une représentation captée à La Courneuve.

15Ces vidéos – et plus largement l’ensemble des pièces du fonds – facilitent une reconstitution du studio de Mié Coquempot, ce lieu dans lequel elle crée ses œuvres et donc, la compréhension de la genèse de ses pièces, en restituant ses méthodes de travail. Les archives sont suffisamment riches pour suivre les différentes étapes de son travail, depuis les notes préparatoires sur les carnets [fig. 3], le travail de répétition jusqu’au spectacle, ainsi que le travail pédagogique qui l’a toujours beaucoup occupée en marge de ses créations. Ces archives nous font entrer dans le processus complexe de création.

Figure 3

Figure 3

Carnet de recherches de Jérôme Andrieu pour Rhythm (2015). Tenu par le danseur, ce carnet a servi à préparer le voyage des artistes dans l’Ouest américain. Il représente six images de paysages et précise les circulations des interprètes in situ.

Reproduction Jérôme Andrieu.

16Elles offrent ainsi de multiples entrées dans l’œuvre de Mié Coquempot, aussi bien à un niveau esthétique, pédagogique, qu’économique et administratif. En effet, ces documents nous aident à retracer précisément les idées et leur transformation progressive en gestes dansés et performés, qu’il s’agisse de l’analyse de ses notes d’intention, notes de travail, partitions annotées. Certains ouvrages annotés sont présents dans le fonds, tout comme de nombreux croquis et des partitions. Au-delà de leur valeur esthétique, ils permettent de comprendre comment Mié Coquempot notait ses chorégraphies [fig. 4], comment elle les préparait en amont du travail en studio, avant de les faire évoluer avec ses interprètes. In fine, ces archives renseignent aussi sur la méthode de Mié Coquempot au plateau, sa manière de travailler avec ses interprètes, de leur imposer des directions ou au contraire de leur laisser une latitude importante. Là encore, les vies professionnelle et personnelle se mêlent : d’une pièce à l’autre, on retrouve des interprètes et des collaborateurs réguliers. La compagnie réunit ainsi des artistes, mais aussi des individus singuliers, des compagnons, qu’elle choisit et qui laissent leur personnalité et leur empreinte dans chacune de ses créations.

Figure 4

Figure 4

Deux tentatives de partitions pour Solo table (2000), conservées au Centre national de la danse, Pantin. Ces partitions dessinées par Mié Coquempot représentent les mouvements et les impacts des parties du corps de l’interprète en contact avec la table.

© Pauline Chevalier.

Offrande – Conserver pour transmettre

17Comment ces archives permettent-elles de transmettre son répertoire, de le faire connaître, d’en susciter l’envie et la curiosité et donc continuer à le faire vivre ? Comment procède-t-on pour conserver à des fins de transmission le geste dansé ? Qu’est-ce qui, dans ces archives, facilite cette transmission à des tiers ?

18C’est la question que pose la dernière création, à la fois posthume et collective, de Mié Coquempot, Béatrice Massin et Bruno Bouché : Offrande, sur la musique de Bach, L’Offrande musicale (1747). La pièce réunit des danseurs qui appartiennent à chacun des univers des trois chorégraphes, et chacun d’entre eux en a écrit une partie pour tous les danseurs. En plus de sa partie, Mié Coquempot chorégraphie le final. Elle meurt aussitôt après et ne verra jamais l’œuvre créée, ce qui pose la question de la transmission.

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Bande-annonce d’Offrande
Bande-annonce d’Offrande (Mié Coquempot, Béatrice Massin et Bruno Bouché), réalisée par le Manège de Reims (scène nationale) à l’occasion de la diffusion de la pièce le 16 décembre 2021.
Crédits : © Manège de Reims.

20Ces matériaux archivés constituent ainsi un témoignage inédit sur le travail quotidien d’une chorégraphe : ils permettent notamment de reconstituer la genèse précise de l’œuvre, préalable indispensable à sa recréation et à sa transmission. C’est sans doute la question la plus aiguë que pose ce fonds. Habituellement, la transmission se fait grâce aux chorégraphes ou aux interprètes, par la mémoire du corps. Mié Coquempot n’est plus là aujourd’hui pour effectuer ce travail – que du reste, elle n’a pas tant fait : de son vivant, sa préoccupation était la création plus que la recréation – et les artistes qui ont dansé ses pièces doivent désormais les transmettre à des interprètes plus jeunes. C’est d’ailleurs le cas de 1080 – Art de la fugue (2017) dont la transmission vient d’être effectuée à des amateurs dans le cadre de « Danse en amateur et répertoire » par Alexandra Damasse et Maud Pizon15

21Dès lors, pourquoi s’efforcer de faire connaître et valoriser ce fonds ? Il peut justement être exploité pour compléter la transmission des gestes par les interprètes, en donnant à voir les séances de travail, mais surtout en éclairant les intentions de la chorégraphe : les notes qu’elle a laissées permettent de comprendre la signification des mouvements, tout comme les nombreux discours captés au gré des répétitions. La pensée de Mié Coquempot se construit dans l’action, sur le plateau et dans le studio : le dialogue entre ses notes écrites et ses commentaires nous fait saisir au mieux l’endroit où elle place son geste chorégraphique. Il est dès lors possible de faire le lien entre le geste et l’intention. Dans ces archives, une place importante est laissée aux notations, c’est-à-dire aux manières de fixer sur le papier une chorégraphie. Elle faisait notamment un grand usage du logiciel Excel : elle préparait minutieusement grâce à un tableur ses chorégraphies, avant de les tester au plateau. C’est notamment le cas pour PH, où elle dissèque les sons des trois pièces de Pierre Henry et qu’elle répartit entre les danseurs : une fois imprimé, ce tableau – qui fait plus d’une dizaine de mètres ! – est affiché en salle de répétition et devient un outil de travail à destination de la chorégraphe et des interprètes. Ces notations, plus ou moins élaborées, peuvent être mises en regard des vidéos pour reconstituer au mieux la danse, tout en saisissant les intentions de la chorégraphe.

22C’est ce qu’a expérimenté Jérôme Andrieu qui a dû coordonner la recréation de Mélange à l’initiative de L’Échangeur (Château-Thierry) et du Manège de Reims, pièce qu’il connaissait mal : c’est grâce aux archives qu’il a pu comprendre au mieux l’intention de la chorégraphe et, ce faisant, saisir la portée du geste.

Conclusion

23Ces archives constituent donc des sources exceptionnelles pour réactiver le répertoire de Mié Coquempot, encourager des recherches sur elle et sur son travail. Bien plus, elles permettent à tous les publics intéressés de s’emparer à leur tour de son œuvre afin de la mobiliser et de la mettre en application. Ces documents sont ainsi utilisés comme base de travail pour des ateliers qui ne servent pas tant à recréer ses pièces qu’à rentrer dans son effort de création. Dans cette optique, Jérôme Andrieu a organisé un workshop (« Trace Suite ») avec de jeunes interprètes, autour du rapport danse-musique si cher à la chorégraphe : huit jours de recherche avec une équipe de sept artistes-interprètes d’horizons différents, réunis autour de Trace. Ce projet a pris corps aux Moulins de Paillard, à Poncé-sur-le-Loir (Sarthe), le 21 juillet 2023 avec Anne Laurent, interprète familière du répertoire de la chorégraphe.

24Jessica Chauffert et Jérôme Andrieu ont également animé un atelier en mars 2023 avec des étudiants en design d’espace à l’École Duperré pour réfléchir à l’utilisation des outils du design d’espace afin de noter une pièce impossible à noter : comment noter le son, la place qu’il occupe sur le piano et l’intensité du geste chorégraphique et le son ainsi produit. Autant de questions qui sont au cœur des recherches de Mié Coquempot et que ses archives permettent d’explorer [fig. 5].

Figure 5

Figure 5

Proposition de partition pour Trace piano (pièce de Mié Coquempot, 2005) réalisée par des étudiantes en deuxième année de diplôme national des Métiers d’art et du design (option design d’espace) lors d’un workshop à l’École Duperré à Paris, animé par Jérôme Andrieu et Jessica Chauffert les 6 et 7 mars 2023, sur la problématique suivante : comment inventer une nouvelle façon de noter un spectacle qui échappe aux outils habituels de notation ?

© Jessica Chauffert.

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Notes

1 Fondé en 1998 et situé à Pantin, le Centre national de la danse (CND) est une institution placée sous la tutelle du ministère de la Culture. Il constitue un lieu de ressources, de recherche et de découverte de la danse qui accueille aussi bien les artistes, les chercheurs que le grand public. À ce titre, il dispose d’une vaste bibliothèque de recherche, et a entrepris la collecte, la conservation et la valorisation des archives de la danse (institutions chorégraphiques, salles de spectacles, artistes, compagnies, spectateurs…) ainsi mises à la disposition des chercheurs.

2 Ce dépôt a pris la forme d’une convention signée en décembre 2021 au Manège de Reims (la scène nationale à laquelle était associée Mié Coquempot) entre K622 et le CND. À cette occasion, l’une des trois salles du Manège a été baptisée « Studio K622 » en hommage à la chorégraphe.

3 Jérôme Andrieu rencontre Mié Coquempot alors qu’ils sont tous les deux interprètes pour Daniel Larrieu : elle écrit pour lui son deuxième solo Nothing but (1998), qui coïncide avec la fondation de la compagnie K622. Ils sont tous les deux lauréats de la villa Kujoyama en 2002.

4 Le modèle que nous avons en tête est bien sûr l’extraordinaire travail de conservation et de valorisation des archives du chorégraphe Dominique Bagouet (1951-1992) mené par ses proches, au sein du collectif des Carnets Bagouet (https://lescarnetsbagouet.org [lien valide en juin 2024]) qui s’est donné pour mission de faire connaître et d’entretenir les créations de D. Bagouet. Nous renvoyons à LAUNAY Isabelle (dir.), Les Carnets Bagouet. La passe d’une œuvre, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2007.

5 Nous renvoyons à ce numéro thématique de la revue Recherches en danse : PALAZZO Claudia & SINTÈS Guillaume (dir.), « Mémoires de l’œuvre en danse », Recherches en danse, no 7, 2019, [en ligne], https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/danse/2246 [lien valide en juin 2024] ; ainsi qu’à ce numéro thématique de la revue Repères, cahiers de danse : HAYES Marisa, « Réinterpréter / réimaginer le patrimoine chorégraphique », Repères, cahiers de danse, no 47-2, 2021, disponible en ligne, https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-reperes-cahier-de-danse-2021-2.htm [lien valide en juin 2024]. Nous renvoyons aussi à DESPRÉS Aurore, « Penser l’archive audiovisuelle pour la recherche en danse. Le Fonds d’Archives numériques audiovisuelles FANA Danse contemporaine », Recherches en danse, no 5, 2016, [en ligne], https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/danse/1307 [lien valide en juin 2024] ; SCARPULLA Mattia, « Archives, danse et recréation. Une introduction », Archives, no 46-1, 2016, p. 15-34, disponible en ligne, https://0-www-erudit-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/fr/revues/archives/2016-v46-n1-archives02423/1035720ar [lien valide en juin 2024] ; SINTÈS Guillaume, « Pratiques de l’archive en danse : l’exemple du Projet Waehner 2015-2018 », Marges, no 25, 2017, p. 76-87, disponible en ligne, https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/marges/1321 [lien valide en juin 2024]. Nous renvoyons enfin aux réflexions sur la conservation et la transmission de la performance artistique : LEVERATTO Jean-Marc (dir.), « Conserver et transmettre la performance artistique », Culture & musées, no 29, 2017, [en ligne], https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/culturemusees/1053 [lien valide en juin 2024].

6 CAPPELLE Laura (dir.), Nouvelle histoire de la danse en Occident, de la préhistoire à nos jours, Paris, Éditions du Seuil, 2020.

7 À l’heure actuelle, nous n’avons pas encore exploré de manière systématique les archives.

8 En effet, à la différence des autres membres de ce groupe de travail, les deux co-auteurs de cet article ont rencontré relativement tard Mié Coquempot : Yann Calbérac l’a rencontrée alors qu’elle était artiste associée au Manège de Reims à la faveur d’un premier atelier participatif en 2015 puis d’un second en 2017-2018, avant de rejoindre le conseil d’administration de K622 en 2018 ; Jessica Chauffert n’a pas eu de contact avec la chorégraphe, mais a connu son œuvre par l’entremise de Paul Andriamanana Rasoamiaramanana qui a créé les costumes de Z’anima et d’Offrande. L’un et l’autre ont déjà présenté un premier travail sur une pièce de Mié Coquempot cosignée par Jérôme Andrieu, Rhythm : CALBÉRAC Yann & CHAUFFERT Jessica, « L’horizon comme la seule possibilité de contenir/L’horizon, une ligne infinie. Représenter et performer la ligne dans Rhythm de Mié Coquempot et Jérôme Andrieu », colloque « Horizons contemporains. Ouverture, partition, profondeur d’espaces dans les arts de la scène et de l’écran », Université de Strasbourg, 27-30 juin 2022 (publication à paraitre aux éditions Mimésis).

9 Le répertoire complet est détaillé sur le site web de K622 : https://k622.org/index.php/creations/repertoire-des-creations/ [lien valide en juin 2024].

10 LATOUR Bruno & WOOLGAR Steve, La Vie de laboratoire. La production des faits scientifiques [1979], traduit par Michel Biezunski, Paris, La Découverte, coll. « La Découverte-poche. Sciences humaines et sociales », 1996.

11 LISTA Marcella (dir.), A different way to move. Minimalismes, New York, 1960-1980, cat. exp., Nîmes, Carré d’art-musée d’Art contemporain, 7 avril-17 septembre 2017, Berlin, Hatje Cantz, 2017.

12 Le dessein de notre groupe de travail est de publier une monographie sur Mié Coquempot et son œuvre afin de situer précisément sa place dans l’histoire de la danse.

13 En marge du répertoire des créations, K622 présente une liste des « autres supports » qu’elle a utilisés, souvent en lien avec ses créations chorégraphiques : https://k622.org/index.php/creations/autres-supports/ [lien valide en juin 2024].

14 L’intérêt du classement est justement de réunir dans un même dossier les très nombreux documents relatifs aux innombrables versions de ce projet.

15 Travail présenté le 3 juin 2023, Le Triangle, Cité de la danse de Rennes, https://www.cnd.fr/fr/program/3731-danse-en-amateur-et-repertoire [lien valide en juin 2024].

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Table des illustrations

Titre Figure 1
Légende Alexandra Damasse interprète An H to B dans le cadre du programme New York School au Manège de Reims, le mercredi 15 décembre 2021.
Crédits © Photographe inconnu (Manège de Reims).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41855/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 178k
Titre Figure 2
Légende Mié Coquempot et Jérôme Andrieu interprètent Rhythm à La Passerelle (Saint-Brieuc), le 14 janvier 2016.
Crédits © Photographe inconnu (Compagnie K622).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41855/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 140k
Titre Figure 3
Légende Carnet de recherches de Jérôme Andrieu pour Rhythm (2015). Tenu par le danseur, ce carnet a servi à préparer le voyage des artistes dans l’Ouest américain. Il représente six images de paysages et précise les circulations des interprètes in situ.
Crédits Reproduction Jérôme Andrieu.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41855/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 415k
Titre Figure 4
Légende Deux tentatives de partitions pour Solo table (2000), conservées au Centre national de la danse, Pantin. Ces partitions dessinées par Mié Coquempot représentent les mouvements et les impacts des parties du corps de l’interprète en contact avec la table.
Crédits © Pauline Chevalier.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41855/img-4.JPG
Fichier image/jpeg, 206k
Titre Figure 5
Légende Proposition de partition pour Trace piano (pièce de Mié Coquempot, 2005) réalisée par des étudiantes en deuxième année de diplôme national des Métiers d’art et du design (option design d’espace) lors d’un workshop à l’École Duperré à Paris, animé par Jérôme Andrieu et Jessica Chauffert les 6 et 7 mars 2023, sur la problématique suivante : comment inventer une nouvelle façon de noter un spectacle qui échappe aux outils habituels de notation ?
Crédits © Jessica Chauffert.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41855/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 220k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Yann Calbérac et Jessica Chauffert, « La conservation et la valorisation des archives de la chorégraphe Mié Coquempot »In Situ [En ligne], 53 | 2024, mis en ligne le 13 juin 2024, consulté le 09 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/41855 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/122pg

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Auteurs

Yann Calbérac

Institut universitaire de France, université de Reims Champagne-Ardenne, CRIMEL

yann.calberac@univ-reims.fr

Jessica Chauffert

École Duperré, Paris

jessicachauffertbis@gmail.com

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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