La collecte des archives des Centres dramatiques nationaux et Scènes nationales dans les Hauts-de-Seine
Résumés
Densément peuplé, mais de superficie modeste, le département des Hauts-de-Seine compte deux Centres dramatiques nationaux (CDN), le théâtre Nanterre-Amandiers et le T2G (Théâtre de Gennevilliers) et deux Scènes nationales, le Théâtre 71 situé à Malakoff et le Théâtre des Gémeaux à Sceaux. Les archives départementales des Hauts-de-Seine conservent les archives de trois d’entre eux : les deux CDN et le Théâtre 71.
Après une présentation très synthétique de l’origine de ces établissements, aventures théâtrales du début des années 1960 qui témoignent de la réussite de ce que l’on a appelé la décentralisation culturelle, l’article aborde les étapes qui ont abouti aux versements de leurs documents aux archives départementales des Hauts-de-Seine avant d’en présenter la diversité. Cette diversité des supports collectés et le grand nombre d’images fixes ont nécessité une réflexion pour garantir une bonne conservation et se sont révélés être un enjeu pour les droits de réutilisation. Enfin, une dernière partie évoque une spécificité des archives du T2G qui disposait de son propre centre de production audiovisuelle. Cette production originale a été l’occasion de mettre en place un protocole de sauvegarde des documents qui se trouvaient sur des supports que ni les archives départementales ni le théâtre n’étaient en mesure de visionner et qui se sont révélés être d’une grande richesse non seulement pour l’histoire du théâtre, mais plus largement pour l’histoire du territoire de Gennevilliers.
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Mots-clés :
théâtres, archives départementales, Hauts-de-Seine, collecte, archives, numérisation des archivesKeywords:
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- 1 Acronyme né sous la direction de Pascal Rambert (2007-2016).
- 2 Le label « Scène nationale », décerné par le ministère de la Culture, existe depuis 1991. Il rassem (...)
- 3 Les inventaires sont consultables sur le site des archives départementales des Hauts-de-Seine, dans (...)
- 4 Le département des Hauts-de-Seine comprend 36 communes, 34 d’entre elles disposent d’un service d’a (...)
- 5 Compagnie théâtrale créée en 1984 et implantée depuis 1998 à Clichy-la-Garenne. Dirigée par Françoi (...)
- 6 Voir en ligne : https://archives.hauts-de-seine.fr/archives/archives/fonds/FRAD092_compagnie_clasti (...)
1Densément peuplé, mais de superficie relativement modeste, le département des Hauts-de-Seine compte pourtant de très nombreux théâtres publics et privés, répartis sur l’ensemble de son territoire. Parmi ceux-là, pas moins de deux Centres dramatiques nationaux (CDN), le théâtre Nanterre-Amandiers et le T2G1 (Théâtre de Gennevilliers) et deux Scènes nationales2, le Théâtre 71, situé à Malakoff, et le théâtre des Gémeaux, à Sceaux. Les archives départementales des Hauts-de-Seine conservent les archives de trois d’entre eux3 : les deux CDN et le Théâtre 71. Celles du théâtre des Gémeaux devraient être prises en charge dans les prochains mois. Le territoire comprend d’autres structures, comme le théâtre Jean-Arp à Clamart, géré par une association à sa création en 1977 et municipalisé en 1996, dont les archives, pour répondre aux obligations réglementaires, devront être versées au service d’archives de la commune de Clamart4. Les structures privées, quant à elles, n’entrent pas dans notre périmètre et sont donc libres de donner ou déposer leurs documents aux archives départementales. C’est ce qu’a fait le Clastic Théâtre5 à Clichy-la-Garenne, qui a donné 80 articles (affiches de spectacles, documents de communication, maquettes et dessins préparatoires de 1985 à 2013, sous la cote 140J6).
2Les années 2010-2011 marquent l’amorce des relations entre les archives départementales et les théâtres du territoire. Celles-ci se sont renforcées depuis lors. La prise en charge de leurs archives a permis de collecter, en plus des dossiers administratifs papier (rapports d’activité, assemblées générales…), des documents aux typologies et aux supports extrêmement variés exigeant une réflexion sur les enjeux matériels et juridiques de leur conservation, de leur classement et de leur communication (affiches grands formats, photographies, supports audiovisuels…). La collecte des archives du T2G, théâtre qui disposait de son propre centre de production audiovisuelle, a été l’occasion de mettre en place un protocole de sauvegarde des supports audiovisuels que ni les archives départementales ni le théâtre n’étaient en mesure de visionner et qui se sont révélés être d’une très grande richesse pour l’histoire de la ville de Gennevilliers.
Des théâtres aux histoires parallèles
- 7 Le département des Hauts-de-Seine a été créé, à l’instar des autres départements de la petite couro (...)
3À l’origine des trois établissements concernés, des aventures théâtrales hors normes initiées au début des années 1960 et qui témoignent de la réussite de ce que l’on a appelé la décentralisation culturelle. À l’instar du département créé en 19647, l’histoire du théâtre Nanterre-Amandiers, du T2G et du Théâtre 71 est récente.
- 8 https://theatredegennevilliers.fr/le-theatre/histoire [lien valide en mai 2024].
- 9 Pluridisciplinaire, Pascal Rambert a mis la danse contemporaine sur le devant de la scène du Théâtr (...)
4Le premier à voir le jour est l’Ensemble théâtral de Gennevilliers (ETG, devenu Théâtre de Gennevilliers, puis T2G) implanté sur la commune éponyme, dans le nord du département. Dès les années 1930, la municipalité prend la décision de construire dans le quartier populaire des Grésillons une halle de marché qui accueillerait également des manifestations culturelles. Bernard Rothstein, dit Sobel (né en 1936), recommandé par Jean Vilar auprès du maire Waldeck L’Huillier (1905-1986), y développe sa troupe, l’ETG, à partir de 19638 et en assure la direction jusqu’en 2006. Lui succéderont l’auteur et metteur en scène Pascal Rambert9, puis Daniel Jeanneteau depuis 2017.
5C’est en 1966 que l’ETG organise un premier festival [fig. 1] qui sera le point de départ d’une grande aventure théâtrale. Patrice Chéreau (1944-2013) y présente une de ses premières mises en scène, L’Affaire de la rue de Lourcine, d’après Eugène Labiche.
Figure 1
Affiche du premier festival de Gennevilliers organisé en 1956, 60 x 40 cm, conservée aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2949W887).
Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine.
- 10 Le groupe scolaire Joliot-Curie se dresse actuellement sur cet emplacement.
6L’histoire du théâtre Nanterre-Amandiers débute également par une rencontre. Le maire communiste de Nanterre, Raymond Barbet (1902-1978), soucieux de donner un éclat particulier à la fête de la Rosière qui se déroule les 5 et 6 juin 1965, charge le metteur en scène franco-belge Pierre Debauche (1930-2017) de créer et animer un festival qui se tiendra sous un chapiteau au lieu-dit « Côte des Amandiers10 ». Fort du succès rencontré, un deuxième festival est organisé en 1966 dans des hangars désaffectés du camp militaire de la Folie (site qui a depuis laissé sa place à l’université Paris-Nanterre) et un troisième en 1967 au sein du palais des sports de Nanterre.
- 11 GALLOIS Juliette, « Le théâtre Nanterre-Amandiers, un théâtre dans la ville », Bulletin de la Socié (...)
7C’est également l’époque où André Malraux lance, en 1961, de nouveaux établissements : les maisons de la culture. Leur implantation sur l’ensemble du territoire contribue à l’émergence, hors de Paris, de centres dramatiques de premier plan. La ville de Nanterre, chef-lieu du jeune département des Hauts-de-Seine, est choisie en 1965 pour accueillir une maison de la culture dont l’histoire est étroitement liée à celle du théâtre Nanterre-Amandiers11. En 1968, un théâtre provisoire est installé sur un terrain proposé par la municipalité, à l’endroit où la maison de la culture est préfigurée. Des manifestations sont d’ailleurs souvent organisées conjointement par les deux institutions [fig. 2].
Figure 2
Affiche de présentation des manifestations organisées au théâtre des Amandiers (Nanterre) et à la maison de la culture de mars à avril 1970, 60 x 40 cm, conservée aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2047W9224).
Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine.
8Contraint par le ministère de la Culture de faire un choix, Pierre Debauche, qui co-dirige la maison de la culture et dirige le théâtre, se consacre, à compter de 1974, à la maison de la culture et laisse les rênes du théâtre à Xavier Pommeret (1932-1991). Lui succèdent Patrice Chéreau et Catherine Tasca de 1982 à 1986, avant que Patrice Chéreau ne le dirige seul. Jean-Pierre Vincent (1942-2020) prend la suite en 1990, puis Jean-Louis Martinelli en 2002, Philippe Quesne en janvier 2014 (en co-direction avec Nathalie Vimeux jusqu’en septembre 2016). Christophe Rauck est le directeur des Amandiers depuis le 1er janvier 2021.
- 12 Signalons notamment l’école des Amandiers, dirigée par Pierre Romans, qui a connu deux sessions sou (...)
9Le théâtre Nanterre-Amandiers acquiert le statut de Centre dramatique national en 1971, le Théâtre de Gennevilliers en 1983, ils deviennent ainsi des lieux de premier ordre pour la création, la diffusion et la formation12.
10Si le T2G a été rénové à la suite de son changement de statut à la fin des années 1980, le théâtre Nanterre-Amandiers connaît actuellement une profonde restructuration.
- 13 La compagnie est basée à la maison des Jeunes et de la Culture de la porte de Vanves (Paris), puis (...)
11Le Théâtre 71 de Malakoff, situé dans le sud du département, est un peu plus jeune que les deux CDN. Ainsi nommé en hommage à la Commune de Paris dont on fêtait le centième anniversaire lors de son inauguration, le 5 mai 1971, son premier directeur en est Guy Kayat (1938-1983), co-fondateur, avec Claire-Lise Charbonnier, de la Compagnie Charbonnier-Kayat13. Ancrés localement, ils étaient depuis 1968, à la tête d’un festival annuel, « Le Mai culturel à Malakoff ». En 1983, le metteur en scène Pierre Ascaride prend la tête du théâtre qui devient en 1992, Scène nationale. Pierre-François Roussillon lui succède, de 2010 à 2019. Depuis le 1er septembre 2019, le Théâtre 71 s’inscrit dans la structure « Malakoff scène nationale », qui comprend également le cinéma Marcel-Pagnol et la Fabrique des arts, dirigée par Armelle Vernier.
Des premiers contacts aux versements des archives, des histoires à rebondissements
12Alors qu’il est sur le point de quitter ses fonctions de directeur du Théâtre 71, Pierre Ascaride, conscient de l’intérêt des archives produites par ses prédécesseurs ou sous son mandat, prend contact avec les archives départementales des Hauts-de-Seine. Une première visite de conseil et de contrôle en présence du directeur, de la directrice administrative, de la chargée des relations avec le public et du directeur technique est ainsi organisée en février 2010, quelques mois avant son départ. L’ensemble des acteurs qui participent au bon fonctionnement du théâtre a ainsi été sensibilisé à l’importance des documents qu’ils produisent et à la méthodologie à suivre pour préparer un versement aux archives départementales et rédiger un bordereau d’élimination. Les archives étant conservées dans une annexe non chauffée, leur collecte matérielle a été effectuée quelques mois plus tard, en mai-juin 2010 [fig. 3]. Trois mètres linéaires (ml) sont venus enrichir les fonds des Hauts-de-Seine, soit 957 articles de documents administratifs (statuts, budget) éclairant sur le fonctionnement de l’établissement et de dossiers de spectacles produits entre 1984 et 2002 (revues de presse, statistiques de fréquentation, etc.). Le fonds du Théâtre 71 est, enfin, remarquable par la quantité et la qualité de sa documentation iconographique : plus de 700 photographies et plus de 180 affiches de spectacles et de festivals, qui témoignent de sa vitalité culturelle.
Figure 3
Identification des documents à prendre en charge lors de la préparation du versement dans un bâtiment annexe du Théâtre 71 de Malakoff, mai 2010.
© Juliette Gallois.
13Parallèlement, dans le cadre de l’exercice du contrôle scientifique et technique des archives des institutions publiques, la direction des archives départementales établit des contacts avec les deux centres dramatiques. Une première visite au théâtre Nanterre-Amandiers (situé à 100 mètres à vol d’oiseau des archives départementales) permet d’avoir, en novembre 2010, une vision précise des documents conservés, de leur métrage linéaire et de leur état de conservation.
14Compte tenu du caractère public des archives de fonctionnement des théâtres et de leur ancrage territorial, ces visites ont été l’occasion de rappeler le caractère obligatoire et réglementaire de leur versement au service d’archives public territorialement compétent, en l’occurrence les archives départementales des Hauts-de-Seine.
- 14 Voir https://francearchives.fr/fr/file/11e97a82e78e5f6b0c6a936cb5a209d7f7733472/AD99-2_tableau_gest (...)
15Le T2G a été contacté en octobre 2011. Malgré la proposition de versement avec préparation et prise en charge des archives par nos soins, le théâtre nous a prévenus de son intention de les donner ou de les déposer au département des Arts du Spectacle de la Bibliothèque nationale de France. Cette décision faisait suite au fait que les archives départementales n’étaient pas en mesure, à cette époque, de traiter et numériser l’important volume de supports audiovisuels, analogiques comme numériques, étape indispensable pour leur valorisation. Pour les convaincre, il a donc été nécessaire de s’appuyer, outre le Code du patrimoine et la circulaire Culture AD 99-2 du 30 décembre 199914 relative au tri et à la conservation des archives des théâtres publics, sur la convention conclue entre le Théâtre, l’État, le Département et la Ville pour la période 2013-2015. Cette convention mentionne en effet explicitement le versement des archives au service d’archives public territorialement compétent. Ce n’est qu’en septembre 2013, soit près de deux ans après les premiers échanges, qu’une première visite sur place a pu être planifiée avec la responsable de la communication. Le souci de nos interlocuteurs était d’assurer une bonne communication au public tout en essayant de ne pas disperser les fonds, car cela aurait pu être un frein à la consultation. De nombreuses discussions, l’étude de différentes hypothèses – comme celle d’un « double versement » des documents audiovisuels via un système de copie ou de prêt à la Bibliothèque nationale de France qui se chargerait de numériser le fonds avant de le confier aux archives départementales ou celle d’un versement à l’Institut national de l’audiovisuel (INA) qui désirait développer son fonds en matière de spectacle vivant – ont abouti en mai 2019 au versement des archives antérieures à 2006, soit 2 312 articles [fig. 4].
Figure 4
Préparation du versement au Théâtre de Gennevilliers (T2G) par des agents des archives départementales. Des numéros provisoires sont collés sur les boîtes afin de les identifier et de faciliter leur déménagement en attendant de leur attribuer leurs cotes définitives une fois arrivées dans les magasins des archives départementales des Hauts-de-Seine, mai 2019.
© Vincent Lefebvre.
16L’organisation des versements a été mise en place avec les administrateurs des trois théâtres. Les préparations matérielles, effectuées par des agents et des stagiaires des archives départementales, ont parfois été acrobatiques tant les documents étaient entreposés dans des endroits inaccessibles ou surprenants : l’étage d’un ancien hangar, accessible par une simple échelle, une trouée dans le plancher et un système de poulies pour descendre les cartons [fig. 5] ; des sous-sols qui avaient connu des dégâts des eaux usées, ou encore, dans des recoins difficiles d’accès [fig. 6] ; des espaces relativement contraints, nécessitant de longues stations debout et entravant la manipulation des boîtes, des cartons ou des affiches…
Figure 5
Accès à l’espace de stockage des archives du Théâtre 71 de Malakoff lors de la préparation du versement des archives, mai 2010.
© Juliette Gallois.
Figure 6
Préparation et déménagement des archives administratives du Théâtre de Gennevilliers dans les sous-sols du T2G, mai 2019.
© Juliette Gallois.
17Ce travail a permis de verser des ensembles très complets sur les spectacles produits et joués.
18Le tri a été entrepris, selon la circulaire Culture AD 99-2 citée plus haut. Ces prises de contact et ces visites ont in fine suscité d’importants versements d’archives. Le Théâtre 71 est le premier à avoir versé ses archives (1934W, 957 articles, 3 ml, 1971-2003), suivi du théâtre Nanterre-Amandiers (2047W, 8 880 articles, 2752W, 684 articles et 3043W, 134 articles, 16 ml, 1961-2020) et du T2G (2949W, 2 312 articles, 2987W, 694 articles, 9,41 ml, 1964-2018).
19Une réflexion a été menée à Gennevilliers pour transférer, dans les meilleures conditions, les affiches de grands formats (150 x 100 cm) qui étaient roulées dans les sous-sols du théâtre. La solution, qui s’est avérée très judicieuse, a été apportée par le prestataire chargé du déménagement : des penderies [fig. 7]. Celles-ci ont un double avantage : les affiches peuvent y tenir verticalement roulées dans les cartons et elles ne s’ouvrent que sur les deux tiers de leur hauteur. Les affiches sont donc protégées pendant le transport et maintenues au fur et à mesure de leur extraction pour description et mise à plat.
Figure 7
Conditionnement des affiches du Théâtre de Gennevilliers (T2G) dans des cartons de type penderies, août 2020.
© Juliette Gallois.
20Le service de la communication du théâtre Nanterre-Amandiers a désormais pris l’habitude de nous verser régulièrement des plaquettes, invitations… des pièces jouées.
21S’agissant d’archives publiques, les visites de contrôle scientifique et technique ont été l’occasion de rappeler la nécessité de compléter, avant toute destruction physique, un bordereau d’élimination.
22Les conventions signées prévoient que les théâtres pourront, par le biais de la communication administrative, emprunter temporairement des documents versés pour des besoins pédagogiques ou pour présentation dans le cadre d’expositions.
Nature des fonds et organisation des archives
23Les comptes rendus de visites font état, pour les trois établissements (ceux de Nanterre, Gennevilliers et Malakoff), d’archives bien tenues et pas ou peu de lacunes ont été identifiées. Les documents de communication et les dossiers de spectacles sont souvent apparus mieux classés que les archives administratives.
- 15 Dès leur création, les établissements de Nanterre, Gennevilliers et Malakoff sont dirigés par des p (...)
24Chaque service (direction, communication…) a l’habitude de stocker les documents qu’il produit dans des boîtes d’archives, parfois, comme au théâtre Nanterre-Amandiers, dans des lieux distincts en fonction des services producteurs. Les travaux de classement ont respecté le rangement initial effectué dans les trois établissements culturels. Dans le but de faciliter la compréhension de la structuration des fonds, les instruments de recherche méthodiques s’organisent de manière analogue et de nouvelles parties sont créées en fonction de l’histoire administrative du lieu. L’instrument de recherche du théâtre Nanterre-Amandiers se décompose par exemple, en trois parties : la maison de la culture (1968-1982) et le théâtre des Amandiers (1965-1971), le Centre dramatique national de Nanterre – théâtre des Amandiers (1971-1982) et le théâtre des Amandiers de Nanterre, puis Nanterre-Amandiers (depuis 1982). Chacune de ces parties comprend ensuite le déroulé suivant : fonctionnement (administration générale, bâtiment, finances et personnels, communication, organisation des saisons…), direction (de manière chronologique par directeur ou co-directeur15) et enfin créations et manifestations.
- 16 La collecte des archives n’a malheureusement pas permis d’avoir une collection complète des archive (...)
25Le choix du classement de cette dernière partie s’est imposé de lui-même : par saison, puis par ordre chronologique, par pièces et enfin, pour chaque représentation, en fonction des documents versés : la préparation des éléments de décor, la musique, le dossier (dossier de presse, plaquette, invitation, cartes postales publicitaires, revue de presse, statistiques de fréquentation…), l’affiche16, les photographies (des répétitions, puis des représentations), les éléments d’organisation de la tournée et les documents audiovisuels.
- 17 Chaque planche contact et bande négative ont été comptabilisées comme étant un document, le nombre (...)
26Le traitement a concerné, pour les trois établissements, un vaste ensemble de photographies composé de tirages, de planches contacts positives ou diapositives des représentations, des répétitions ou des collaborateurs, les photographies étant le plus souvent annotées au dos avec les mentions de la pièce, du ou de la photographe, parfois de la date de prise de vue. L’ensemble comprend près de 8 000 photographies17 pour le théâtre Nanterre-Amandiers, 1 174 pour le T2G et plus de 700 images pour le Théâtre 71. Il s’agit, de toute évidence, de documents de travail, de promotion dans le cadre, notamment, des tournées.
27Chaque photographie ou planche contact a été décrite à la pièce selon les normes en vigueur (intitulé, nom du photographe, date, noir et blanc ou couleur, format) et rattachée au spectacle concerné.
28Afin d’assurer une bonne conservation, l’ensemble des documents photographiques a été reconditionné dans des pochettes en polyester et des classeurs adaptés.
29Les archives liées à la création artistique et la mise en scène des pièces sont malheureusement rares. Les productions des metteurs en scène sont en effet dispersées dans différentes institutions. Ainsi, Patrice Chéreau a-t-il déposé, de son vivant, en 1996, ses archives à l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (IMEC) (194 boîtes, 275 ouvrages). Ce même institut accueillera bientôt celles de Jean-Pierre Vincent. Le département des Arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France accueille les archives Guy Kayat et celles de la Compagnie Charbonnier-Kayat données à son décès en 1983, celles de Pierre Debauche ou encore de Xavier Pommeret.
30Les sources complémentaires, ainsi que la mise en ligne des instruments de recherche sur le site internet des archives départementales des Hauts-de-Seine et sur France Archives, permettent aux chercheurs d’identifier les différents lieux de conservation connus pour les archives de ces trois établissements culturels.
Diversité des typologies : des enjeux pour la conservation et la réutilisation des images fixes
- 18 Cote 2752W352/1.
31Les archives de l’administration et de la communication de ces trois établissements sont d’une grande richesse et complétude. Outre les dossiers de spectacles dont le contenu est détaillé ci-dessus, on y trouve également des documents relatifs à la communication des spectacles mis en scène et des différentes manifestations organisées au sein des théâtres. Les archives des spectacles comprennent plus rarement des éléments relatifs à la création elle-même comme les documents préparatoires pour les costumes (dessins, matériaux…), pour les décors et la musique. Citons, par exemple, dans le dossier de Première de cavalerie de Vsevolod Vichnevski, donnée à Gennevilliers en 1967, le calque d’un dessin pour le costume des soldats dragons de 1914-1917 [fig. 8] et la partition de musique créée pour le spectacle. Ou, plus récemment, on peut trouver, dans les archives de Princesse de Fatima Gallaire montée en 1991 aux Amandiers par Jean-Pierre Vincent, des dessins préparatoires à des décors qu’il pourrait avoir signés. Dans le dossier de On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset, monté en 1993, toujours par Jean-Pierre Vincent, sont conservés des dessins préparatoires des décors conçus pour la pièce par Jean-Paul Chambas. Pour Ithaque, mise en scène par Jean-Louis Martinelli début 2011, le classement a permis de découvrir, pliés dans une boîte avec les autres documents d’archives de la pièce, des dessins des costumes18 réalisés, sans doute, par Ursula Patzak, dont le nom est mentionné dans la plaquette en tant que conceptrice des costumes. Ces dessins sont au crayon de bois et à l’encre dorée et argentée, sur des feuilles A4 attachées entre elles par des adhésifs pour atteindre une longueur de 3,76 mètres et, en comptant les retombes, 42 cm de hauteur. Les échantillons de tissus, épinglés aux feuilles, ont été conservés, mais les éléments métalliques (épingles) ont été remplacés par un fil de coton et l’ensemble est désormais conservé, roulé autour d’une âme centrale.
Figure 8
Projet sur calque de costume pour un soldat dragon de 1914-1917, pièce Première de cavalerie de Vsevolod Vichnevski présentée au Théâtre de Gennevilliers (T2G) en 1967, 30 x 23 cm, conservé aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2049W60).
Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine.
- 19 Un ouvrage conservé dans le fonds (2752W10) y a d’ailleurs été consacré : BEJEAN Pascal & LEDOUX Ni (...)
- 20 Artiste peintre et scénographe, Titina Maselli (1924-2005) a été une grande collaboratrice de Berna (...)
32Ces archives contiennent de très nombreux documents graphiques de toute nature dont certains ne sont pas sans poser des problèmes de conservation. Ainsi en est-il par exemple des affiches : 374 affiches ont été collectées pour le théâtre Nanterre-Amandiers, 508 pour le T2G [fig. 9], et 183 affiches sont présentes dans le fonds du Théâtre 71 de Malakoff. Les plus grands formats (150 x 100 cm) ne rentrent en effet pas dans les meubles à plans prévus à cet effet et sont en trop grand nombre pour être roulés autour d’âmes centrales et conservés dans des casiers dédiés (faute de casiers en nombre suffisant). Pour l’instant et en attendant de trouver une solution satisfaisante, elles sont conservées à plat au-dessus des meubles à plans. Outre le fait que ces affiches déroulent la programmation des théâtres, elles témoignent, par leurs caractères esthétiques et leur identité graphique, de leurs directions successives. Ces affiches sont en quelque sorte la carte de visite de chacun des directeurs qui y a imprimé son style : à Nanterre, Jean-Louis Martinelli donne une identité visuelle basée sur la couleur jaune (tout ou partie du fond, police de caractères...)19, à Gennevilliers, Bernard Sobel fait appel à l’artiste Titina Maselli dont il utilise les dessins, identiques, mais avec une palette chromatique différente selon la pièce20, quand Pierre Ascaride choisit des couleurs vives et contrastées pour ses affiches au Théâtre 71.
Figure 9
Conservation des affiches du Théâtre de Gennevilliers (T2G) dans les locaux du théâtre. Les affiches sont protégées de la poussière et de la lumière grâce à aux tubes en carton dans lesquels elles sont rangées et identifiées, juin 2019.
© Juliette Gallois.
33Aux affiches s’ajoutent les ensembles photographiques stockés dans des boîtes ou classeurs qui n’offraient pas de bonnes conditions de conservation (pochettes en PVC, classeurs en plastique ou sans conditionnement). Étant donné leur grand intérêt pour la mise en scène des pièces, le jeu des acteurs, la présentation des décors ou des costumes, la question de leur collecte ne s’est pas posée. La prise en compte des questions relatives à leur réutilisation a été immédiate. Bien que conservant ces différents supports, les archives départementales des Hauts-de-Seine n’en possèdent en effet pas les droits. La plupart des tirages papier et des planches contacts comme des diapositives présentent au dos ou sur les caches un cachet mentionnant le nom du ou des photographes. Il s’agit, à quelques rares exceptions près, de photographes spécialisés dans l’art dramatique et le monde du spectacle : Brigitte et Marc Enguérand, Pénélope Chauvelot, Élisabeth Carecchio, Nicolas Treatt… Aucun contrat n’est conservé entre ces photographes et les théâtres et aucun n’a été salarié de ces établissements.
34Ainsi, à chaque demande de réutilisation en vue d’une exposition, d’un documentaire audiovisuel ou d’une publication, il est rappelé aux demandeurs la nécessité de consulter le photographe ou son ayant droit pour obtenir son autorisation et payer, le cas échant, les frais afférents.
35L’intégralité des documents graphiques (photographies, diapositives, affiches, dessins…) a fait l’objet d’une numérisation par un prestataire extérieur. La description de chaque article donnant, quand cela a été indiqué, le nom du photographe, seul le recto a fait l’objet d’une numérisation. Leur manipulation sera ainsi limitée.
36La numérisation a également été l’occasion de préciser des descriptions. Ainsi, des négatifs des années 1980, qui avaient été jusqu’alors identifiés comme étant des photographies d’un voyage d’agrément de Patrice Chéreau, évoquent en réalité un voyage que celui-ci avait effectué au Nigeria avec le dramaturge Bernard-Marie Koltès et le décorateur Richard Peduzzi pour trouver l’inspiration des décors de Combat de nègre et de chiens, pièce d’ouverture de la période Chéreau aux Amandiers. On retrouve par exemple, sur les négatifs, un exemple de soubassement d’une bretelle d’autoroute que l’on put voir sur la scène du théâtre en 1983.
- 21 Ces sujets de recherche sont notamment suivis par l’unité mixte de recherche THALIM, placée sous la (...)
- 22 https://www.arte.tv/fr/videos/107087-000-A/patrice-chereau-irresistiblement-vivant/ [lien valide en (...)
37L’exploitation des documents iconographiques, audiovisuels et des archives papier est très variée : publications, expositions, travaux universitaires – ils concernent la mise en scène, les décors, un auteur et même, par l’écoute des captations, l’analyse de l’interaction avec le public...21 – ou recherches documentaires pour d’autres théâtres – préparation d’hommages à Jean-Pierre Vincent, de cycles sur tel ou tel auteur... Les équipes de direction et de communication du théâtre Nanterre-Amandiers, essentiellement, nous adressent toutes les sollicitations qu’elles reçoivent. Les demandes les plus fréquentes ont trait à des commémorations. Les contacts ayant été pris très en amont, l’automne 2023 a vu des documents conservés dans les Hauts-de-Seine présentés dans le cadre des manifestations du dixième anniversaire de la disparition de Patrice Chéreau. Des captations et des photographies ont été utilisées pour un documentaire diffusé sur Arte22. La direction des archives départementales a été également pleinement associée à l’hommage qui lui a été rendu mi-septembre 2023 par la direction du théâtre dans la salle provisoire (lecture de textes, témoignages d’acteurs des années Chéreau…). Nous avons ainsi contribué au choix des illustrations et des documents, principalement administratifs, lus sur scène. L’école des Amandiers a, quant à elle, été mise à l’honneur au cours d’une soirée spéciale organisée le 27 avril 2024.
38L’entrée du théâtre Nanterre-Amandiers dans une longue période de travaux a coïncidé avec le début du tournage du film Les Amandiers, de Valeria Bruni-Tedeschi. N’étant pas en mesure de filmer dans le bâtiment historique, l’équipe des décors a trouvé dans les fonds photographiques conservés aux archives départementales matière à recréer les salles de répétition, l’entrée, la grande salle… Ce film, tourné au théâtre de Brétigny et à la maison de la culture de Créteil, relate ce que la réalisatrice a connu en tant qu’élève de l’école des Amandiers entre janvier 1986 et décembre 1987. Les images ont également servi à la reconstitution des costumes. Ce fut, finalement, une première pour les archives départementales qui, en plus d’être créditées au générique du film, ont, un peu par procuration, monté les marches du Festival de Cannes le 24 mai 2022.
La collecte des supports audiovisuels et la spécificité du T2G
39Le cinéma est un autre point commun entre ces deux Centres dramatiques nationaux. Bernard Sobel a réalisé, à Gennevilliers, de nombreux tournages de « pièces filmées ». L’Orestie d’Eschyle ou Hécube d’Euripide, spécifiquement filmées et adaptées dans la perspective d’une diffusion télévisuelle, se distinguent de simples captations théâtrales, car plusieurs prises sont possibles et le public est absent.
40Lors de la collecte des archives des CDN, nous avons été confrontés à un très grand nombre de supports audiovisuels (103 au théâtre de Nanterre et 947 à celui de Gennevilliers), de formats très variés (VHS, minidisque, Betacam, Betamax, cassettes audio, films 35 mm…) qu’il nous était impossible de lire, faute de matériel adéquat [fig. 10].
41Le plus souvent non identifiés, parfois sans boîtier, nous avons cependant pris le parti de les collecter sans tri préalable. L’intégralité de ces supports analogiques est directement partie pour numérisation dans les locaux d’un prestataire spécialisé. Le marché public qui lie les archives départementales des Hauts-de-Seine et ce prestataire permet, une fois la numérisation effectuée, d’identifier, trier et le cas échéant éliminer les fichiers – si la qualité est très mauvaise, si le support est vierge, si le fichier est en double exemplaire, si le document ne présente pas d’intérêt particulier ou de lien avec le théâtre comme des enregistrements d’émissions de télévision, de films… Après vérification, identification et sélection de chaque fichier, 210 ont été définitivement éliminés. Ainsi, seuls les documents exploitables et relatifs aux théâtres concernés ont été enregistrés sur des disques durs externes et conservés aux archives départementales, soit environ 680 fichiers.
Figure 10
Collecte de documents audiovisuels dans les sous-sols du Théâtre de Gennevilliers (T2G), janvier 2020.
© Juliette Gallois.
42Pour le T2G, il a été décidé, en accord avec le théâtre et après la rédaction de bordereaux d’élimination, de détruire les supports originaux pour lesquels nous ne disposions pas de moyens techniques et matériels permettant leur lecture. Seuls ont été conservés les bandes audios et les films.
43Le Théâtre de Gennevilliers présente une particularité. Son site internet précise qu’après quelques aménagements, il « doit […] permettre de disposer d’un studio de tournage au service du cinéma ou des chaînes de télévision locales ». Il est également question d’une radio locale, le tout faisant « partie de l’ADN du lieu ». Ainsi, outre les captations, parfois sous des angles différents, de pièces ou de tournage de quelques-unes de ces mêmes pièces pour la télévision, ce fonds audiovisuel renferme un très grand nombre d’informations précieuses sur l’histoire du territoire de la ville de Gennevilliers. Le théâtre abritait en effet l’entité « CDN Production », unité vidéo du théâtre sur laquelle nous n’avons pas ou peu d’informations, mais dont les archives départementales conservent de nombreux fichiers. CDN Production pouvait produire des fictions ou des adaptations pour la télévision réalisées par Bernard Sobel – citons notamment l’opéra Lucio Silla de Mozart, une co-production du théâtre Nanterre-Amandiers et du Théâtre royal de la Monnaie à Bruxelles mise en scène par Patrice Chéreau, ou Hécube, avec Maria Casarès. La société de production est aussi associée à des courts-métrages ou des objets visuels non identifiés que nous avons pris le parti de conserver, soit, car ils sont clairement labélisés CDN Production, soit du fait de leur originalité et avec l’espoir d’obtenir, un jour, des éléments d’identification. C’est le cas d’une performance artistique futuriste réalisée dans la cabine de l’aérotrain, prototype d’aéroglisseur testé à partir de la fin de l’année 1965, et sur les vestiges de son monorail, pour laquelle nous ne disposons ni de la date de réalisation ni du nom du performateur [fig. 11]. Toute information sera la bienvenue !
Figure 11
Instantané extrait de la vidéo de performance artistique autour de l’aérotrain et de son rail en béton conservé aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2987W83).
Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine.
44La numérisation des supports audiovisuels a également permis de découvrir des émissions et des programmes documentaires qui se présentent sous la forme d’interviews de personnalités internationales (le photographe suisse Jean Mohr, l’écrivain anglais John Berger, le chercheur en littérature allemande Hans Mayer…) et nationales comme Gilles Aillaud, peintre, auteur et scénographe ayant réalisé les décors de la pièce La Tragédie de Coriolan de William Shakespeare, mise en scène de Bernard Sobel en 1983. Même s’ils n’apparaissent pas toujours à l’image, les voix de Bernard Sobel ou de Yvon Davis, metteur en scène et proche collaborateur de Bernard Sobel, sont aisément reconnaissables. On trouve également des portraits, comme celui de la famille Quiqueré, sur quatre générations, dans le programme de l’émission Patatras intitulé « Portrait d’une famille gennevilloise, 1870-1984 » : Suzanne, née en 1901, Georges, résistant, jociste et conseiller municipal, qui parle de la période de l’Occupation et de son adhésion au parti communiste, Henri et François, le cadet de la famille, qui raconte, depuis sa chambre et entouré d’affiches de films, sa passion pour le cinéma.
45Tous les sujets d’actualités sont abordés : immigration, chômage, destruction de la première cité HLM, « le 74 », la cité des 3F et même « la fauche » avec des interviews de jeunes de Gennevilliers et le P.-D.G. de Carrefour, peu après l’installation de cette enseigne à Gennevilliers. L’arrivée de cet hypermarché a également donné lieu à des entretiens avec les petits commerçants voisins. Les vidéos concernent également des moments forts de la ville comme les éloges et témoignages donnés, notamment par Bernard Sobel, lors de l’enterrement de l’ancien maire de la commune, Waldeck L’Huillier.
46Vingt-neuf vidéos ont trait à la cité HLM « le 74 ». Construite en 1925, elle était située au 74 rue de l’Arbre-sec, puis au 74 rue Paul-Vaillant-Couturier. Dix-huit vidéos sont des entretiens avec les habitants de la cité. Elles pourraient avoir été tournées en 1968 et témoignent de la vie, parfois intime, des résidents. Mme Murat, 91 ans, relate devant la caméra ses deux mariages, son arrivée au 74, son licenciement en 1968, les usines Chausson, voisines de la cité. Elle présente également son intérieur et les objets décoratifs de sa salle à manger. D’autres habitants témoignent de leur quotidien : Mme Mariere, arrivée en 1926, qui a donc connu la cité dès sa construction, M. Rebel qui, lui aussi, montre son intérieur, parle de son intérêt pour la photographie… Les commerçants voisins ont également été invités à s’exprimer sur la vie du quartier : la boulangerie, l’épicerie ou le café. Les onze autres vidéos portent sur la démolition du 74 durant l’été 1988.
47Les habitants sont filmés chez eux, dans leur environnement ou en studio. Certains de ces sujets sont assurés par « Radio G », radio libre financée par la mairie de Gennevilliers sur laquelle des membres de l’Ensemble théâtral de Gennevilliers animaient des émissions, mais tous sont le témoignage d’une vie souvent révolue.
48La plupart des vidéos de CDN Production, ou apparentées, sont sous forme de prises de vue avant montage ; elles couvrent une période allant de 1968 à 1993.
49Les lecteurs peuvent ainsi nous contacter ou consulter les instruments de recherche accessibles sur le site internet des archives départementales des Hauts-de-Seine pour vérifier, en amont de leur visite, la conservation de telle ou telle archive audiovisuelle. En cas de réponse positive, ils doivent se rendre en salle de lecture où le fichier numérique aura été copié sur un ordinateur de consultation. Un casque est également mis à leur disposition.
50À l’avenir, les captations étant réalisées sous forme nativement numérique, il a déjà été décidé, avec la direction du théâtre Nanterre-Amandiers et les personnes qui en ont la charge, de ne collecter que les pièces produites par le théâtre, les événements organisés sur site – présentation des saisons, manifestations culturelles… –, les répétitions ou les travaux de l’école de comédiens. Ne seront pas conservées les captations des pièces invitées.
Conclusion
51Très riches, ces fonds rassemblent les documents administratifs éclairant le fonctionnement des institutions, mais surtout les dossiers des spectacles produits des années 1960 aux années 2000, qui témoignent de la vitalité culturelle durant cette période. Les fonds des trois théâtres sont également remarquables par la quantité et la qualité de leur documentation iconographique. Ouverts, ces fonds sont amenés à s’enrichir régulièrement.
52Des sources complémentaires conservées aux archives départementales peuvent, enfin, répondre à la curiosité des chercheurs et compléter certaines lacunes. Ainsi, les archives de la compagnie Side One, fondée en 1980 par Pascal Rambert, ont été prises en charge en même temps que celles du Théâtre de Gennevilliers (172J). Les archives départementales des Hauts-de-Seine ont également été destinataires des archives de Monique Blin (1933-2022) (3155W et 194J), proche collaboratrice de Pierre Debauche et directrice de la programmation du théâtre des Amandiers jusqu’en 1981. Ses archives, données par sa famille à son décès, sont en cours de classement, mais elles contiennent des photographies et comprennent notamment l’affiche dessinée par Picasso du premier festival de Nanterre créé par Pierre Debauche en 1965.
53Les versements permettent de garantir une bonne conservation des documents collectés, mais aussi de les mettre à disposition du plus grand nombre, sous réserve des délais légaux de communicabilité et des droits d’auteurs.
54La collecte des archives des théâtres s’inscrit dans la politique active menée par le département des Hauts-de-Seine en direction du spectacle vivant.
Notes
1 Acronyme né sous la direction de Pascal Rambert (2007-2016).
2 Le label « Scène nationale », décerné par le ministère de la Culture, existe depuis 1991. Il rassemble les anciennes maisons de la culture, les centres d’action culturelle et les centres de développement culturel.
3 Les inventaires sont consultables sur le site des archives départementales des Hauts-de-Seine, dans la rubrique « Culture » de l’état général des fonds : https://archives.hauts-de-seine.fr/archive/egf/n:238 [lien valide en mai 2024].
4 Le département des Hauts-de-Seine comprend 36 communes, 34 d’entre elles disposent d’un service d’archives municipales.
5 Compagnie théâtrale créée en 1984 et implantée depuis 1998 à Clichy-la-Garenne. Dirigée par François Lazaro, elle propose des créations avec des interprètes, des pantins, des mannequins, des marionnettes, des objets, des matériaux au service du texte contemporain.
6 Voir en ligne : https://archives.hauts-de-seine.fr/archives/archives/fonds/FRAD092_compagnie_clastic_theatre/view:fonds/n:238 [lien valide en mai 2024].
7 Le département des Hauts-de-Seine a été créé, à l’instar des autres départements de la petite couronne de Paris, par la loi du 10 juillet 1964 portant réorganisation de la région parisienne. Il comprend 36 communes, 27 appartenant à l’ancien département de la Seine et 9 à l’ancien département de Seine-et-Oise.
8 https://theatredegennevilliers.fr/le-theatre/histoire [lien valide en mai 2024].
9 Pluridisciplinaire, Pascal Rambert a mis la danse contemporaine sur le devant de la scène du Théâtre de Gennevilliers.
10 Le groupe scolaire Joliot-Curie se dresse actuellement sur cet emplacement.
11 GALLOIS Juliette, « Le théâtre Nanterre-Amandiers, un théâtre dans la ville », Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 145e et 146e années, 2018-2019, p. 149-166.
12 Signalons notamment l’école des Amandiers, dirigée par Pierre Romans, qui a connu deux sessions sous la direction de Patrice Chéreau, de novembre 1982 à octobre 1984 et de janvier 1986 à décembre 1987. À sa nomination, Christophe Rauck a remis, avec la création de « La Belle Troupe, l’atelier des Amandiers », la formation au métier de comédien au premier plan.
13 La compagnie est basée à la maison des Jeunes et de la Culture de la porte de Vanves (Paris), puis dans la commune voisine de Malakoff.
14 Voir https://francearchives.fr/fr/file/11e97a82e78e5f6b0c6a936cb5a209d7f7733472/AD99-2_tableau_gestion.pdf [lien valide en mai 2024].
15 Dès leur création, les établissements de Nanterre, Gennevilliers et Malakoff sont dirigés par des personnalités du monde du théâtre : metteur en scène, acteur, directeur de compagnie de théâtre…
16 La collecte des archives n’a malheureusement pas permis d’avoir une collection complète des archives pour les trois établissements culturels.
17 Chaque planche contact et bande négative ont été comptabilisées comme étant un document, le nombre de vues a cependant dû être détaillé en vue de leur numérisation.
18 Cote 2752W352/1.
19 Un ouvrage conservé dans le fonds (2752W10) y a d’ailleurs été consacré : BEJEAN Pascal & LEDOUX Nicolas (dir.), En jaune et noir. 8 saisons. Théâtre Nanterre-Amandiers, Paris, Pyramyd, coll. « Étapes », 2010.
20 Artiste peintre et scénographe, Titina Maselli (1924-2005) a été une grande collaboratrice de Bernard Sobel, tant pour les affiches que pour la création des décors.
21 Ces sujets de recherche sont notamment suivis par l’unité mixte de recherche THALIM, placée sous la triple tutelle du CNRS, de l’université Sorbonne Nouvelle et de l’ENS, ou l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
22 https://www.arte.tv/fr/videos/107087-000-A/patrice-chereau-irresistiblement-vivant/ [lien valide en mai 2024].
Haut de pageTable des illustrations
Titre | Figure 1 |
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Légende | Affiche du premier festival de Gennevilliers organisé en 1956, 60 x 40 cm, conservée aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2949W887). |
Crédits | Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 302k |
Titre | Figure 2 |
Légende | Affiche de présentation des manifestations organisées au théâtre des Amandiers (Nanterre) et à la maison de la culture de mars à avril 1970, 60 x 40 cm, conservée aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2047W9224). |
Crédits | Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 252k |
Titre | Figure 3 |
Légende | Identification des documents à prendre en charge lors de la préparation du versement dans un bâtiment annexe du Théâtre 71 de Malakoff, mai 2010. |
Crédits | © Juliette Gallois. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 402k |
Titre | Figure 4 |
Légende | Préparation du versement au Théâtre de Gennevilliers (T2G) par des agents des archives départementales. Des numéros provisoires sont collés sur les boîtes afin de les identifier et de faciliter leur déménagement en attendant de leur attribuer leurs cotes définitives une fois arrivées dans les magasins des archives départementales des Hauts-de-Seine, mai 2019. |
Crédits | © Vincent Lefebvre. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 243k |
Titre | Figure 5 |
Légende | Accès à l’espace de stockage des archives du Théâtre 71 de Malakoff lors de la préparation du versement des archives, mai 2010. |
Crédits | © Juliette Gallois. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-5.JPG |
Fichier | image/jpeg, 229k |
Titre | Figure 6 |
Légende | Préparation et déménagement des archives administratives du Théâtre de Gennevilliers dans les sous-sols du T2G, mai 2019. |
Crédits | © Juliette Gallois. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 233k |
Titre | Figure 7 |
Légende | Conditionnement des affiches du Théâtre de Gennevilliers (T2G) dans des cartons de type penderies, août 2020. |
Crédits | © Juliette Gallois. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 290k |
Titre | Figure 8 |
Légende | Projet sur calque de costume pour un soldat dragon de 1914-1917, pièce Première de cavalerie de Vsevolod Vichnevski présentée au Théâtre de Gennevilliers (T2G) en 1967, 30 x 23 cm, conservé aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2049W60). |
Crédits | Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 386k |
Titre | Figure 9 |
Légende | Conservation des affiches du Théâtre de Gennevilliers (T2G) dans les locaux du théâtre. Les affiches sont protégées de la poussière et de la lumière grâce à aux tubes en carton dans lesquels elles sont rangées et identifiées, juin 2019. |
Crédits | © Juliette Gallois. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-9.JPG |
Fichier | image/jpeg, 447k |
Titre | Figure 10 |
Légende | Collecte de documents audiovisuels dans les sous-sols du Théâtre de Gennevilliers (T2G), janvier 2020. |
Crédits | © Juliette Gallois. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-10.JPG |
Fichier | image/jpeg, 175k |
Titre | Figure 11 |
Légende | Instantané extrait de la vidéo de performance artistique autour de l’aérotrain et de son rail en béton conservé aux archives départementales des Hauts-de-Seine (2987W83). |
Crédits | Reproduction archives départementales des Hauts-de-Seine. |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/41357/img-11.jpg |
Fichier | image/jpeg, 202k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Juliette Gallois, « La collecte des archives des Centres dramatiques nationaux et Scènes nationales dans les Hauts-de-Seine », In Situ [En ligne], 53 | 2024, mis en ligne le 11 juin 2024, consulté le 11 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/41357 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/122p8
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