Orner et transmettre, une approche du cas dauphinois
Résumés
Le palais du Parlement de Dauphiné, rebâti à la fin du xixe siècle et resté palais de justice jusqu’en 2002, conserve décors et meubles de différentes époques. Ils attestent de l’attachement à une histoire particulière et de la volonté de manifester une forme de continuité au-delà des changements politiques. Aux souvenirs réels ou recréés s’ajoutent les témoignages représentatifs du rapport au patrimoine et de son évolution, notamment pour les années 1890 et 2000. Le corpus du mobilier, fourni, laisse transparaître le poids des magistrats dans les choix, la combinaison des achats parisiens et des artisans locaux, le reflet des préséances dans la qualité des réalisations conjugué à l’usage de gammes et d’ensembles.
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Mots-clés :
palais, justice, parlement, Dauphiné, Isère, Daumet (Honoré), Hache (Jean-François), mobilier, patrimoine, inventaireKeywords:
courthouse of Grenoble, Parliament House, Dauphiné (former province of France), Isère (department of France), Daumet (Honoré), Hache (Jean-François) family of cabinetmakers, furniture, woodwork, bust, library, clock, heritage history, judicial symbolism, reuse, inventoryPlan
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- 1 Malgré la présence de l’Isère dont le lit n’est qu’à quelques mètres du bâtiment, séparé de celui-c (...)
1Le palais du Parlement de Dauphiné, installé à Grenoble depuis le xive siècle et devenu le palais de justice après la Révolution française, a perdu sa « robe » en 2002. Après sept siècles de pratique judiciaire dans ses murs, les juridictions et les occupants ont migré vers un bâtiment neuf, laissant l’édifice [fig. 1], ses décors et ses meubles aux mains du conseil général de l’Isère. Devenue le Département, cette collectivité s’engage aujourd’hui dans une reconversion-requalification d’ampleur de cet ensemble qui a été plutôt épargné par l’eau1 et le feu. Le moment paraît donc opportun pour s’intéresser, au-delà de l’enveloppe bâtie, à ce que la marée des usages a laissé derrière elle. Le puissant remaniement pratiqué à la fin du xixe siècle sur ce monument constitue une raison supplémentaire d’y porter attention, notamment pour ce qu’il traduit de l’appréhension patrimoniale d’alors dans un grand projet.
Figure 1
La façade sud du palais du Parlement de Dauphiné (ancien palais de justice) donnant sur la place Saint-André à Grenoble, 2008.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
La mise en majesté
- 2 Honoré Daumet (1826-1911), Grand Prix de Rome en 1855, intervient à compter de 1840 au Palais de Ju (...)
2Détailler les phases constructives et leurs traces n’étant pas l’objet de cet article, l’on se contentera de rappeler que le palais du parlement de Dauphiné s’est élaboré sans plan d’ensemble, du Moyen Âge à la période suivant la Révolution française, par construction et transformation de bâtiments installés dans, puis par-delà, l’enceinte romaine de la ville. Il se présente à l’issue de cette sédimentation comme un vaste ensemble hétérogène (façades, volumes, matériaux, ouvertures…), totalement imbriqué dans le tissu urbain, notamment parce qu’il est traversé de passages publics et intriqué dans les constructions mitoyennes. C’est un morceau de quartier étiré entre une place grenobloise majeure, lieu de pouvoir avéré, et la rivière d’Isère. Vétusté, inadaptation à l’évolution des besoins et anonymisation relative, tels sont les arguments principaux justifiant du profond remodelage qui lui est appliqué entre 1890 et 1897. Les architectes Daumet2 et Riondel proposent une véritable monumentalisation du palais de justice, par un profond bouleversement de son plan, de ses élévations et de son ornementation.
- 3 Pour ce point comme pour beaucoup d’autres, les éléments proviennent de CAYOL-GERIN Anne, CHANCEL D (...)
- 4 Courrier du préfet de l’Isère au ministre de l’Intérieur du 27 juin 1895 (Archives nationales, déso (...)
- 5 CAYOL-GERIN Anne, CHANCEL Dominique & BADIN DE MONTJOYE Alain, Étude de l’aile centrale de l’ancien (...)
3L’intérêt patrimonial de l’édifice n’est pour autant pas absent du projet3. Perçu dès 1836, il est relayé par Prosper Mérimée qui s’émeut en 1841 de l’amputation de la chapelle de l’ancien parlement, puis par des élus demandant un classement au titre des monuments historiques. Celui-ci est acquis seulement le 12 juillet 1886 pour la « partie ancienne », dénomination floue et sujette à dispute. Le grand chantier de modernisation lancé imagine, entre les deux rues neuves délimitant l’espace, d’importantes constructions nouvelles [fig. 2] articulées autour de la préservation de l’aile centrale séparant les cours, laquelle demeure un invariant des différentes versions du projet. Las, l’état des maçonneries constaté en abordant cette phase des travaux est tel « qu’il a fallu les reconstruire entièrement4 ». La façon dont Daumet et Riondel intègrent néanmoins divers éléments anciens (façades, portique à arcades, décors) fournit en 1992 argument au rapporteur de la demande de protection totale qui valorise « un exemple remarquable des théories de la restauration à la fin du xixe siècle5 ».
Figure 2
Plan du rez-de-chaussée issu du grand chantier de modernisation de 1890-1897 : entrées au sud sur la place (au nord seulement pour le public des assises), accès pénitentiaire à l’ouest, espaces dévolus à trois instances différentes (avec une prééminence sensible de la cour d’appel), zone dédiée aux avocats (bibliothèque, vestiaires, bureau du bâtonnier) à l’extrémité nord de l’aile centrale, 2019.
© Anne Cayol-Gerin (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
Au-delà de la rupture
4Le palais de justice remanié s’inscrit dans une continuité qui se manifeste par bien des aspects. Ainsi il pérennise la bicéphalie historique de l’édifice, jadis incarnée par le parlement et la chambre des comptes, chacun pourvu de son entrée et de sa cour. Le maintien du principe de la double cour et du double passage d’accès permet désormais la desserte de la cour d’appel d’une part, du tribunal civil joint au tribunal de commerce d’autre part. Une forme de rivalité entre les deux juridictions principales semble même se perpétuer et là où chacune avait jadis sa chapelle et de prestigieux décors autour de son président, chacune arbore désormais un escalier d’honneur des plus spacieux et sa propre plaque d’inauguration dont seul le libellé diffère.
5Nombre de décors anciens sont remployés dans ce grand réaménagement comme les signes patents d’une pérennité assumée qui assoit aussi dans l’histoire régionale l’autorité judiciaire. Sans qu’on puisse affirmer qu’il faille relier ce fait à la rivalité sous-jacente évoquée plus haut, ces décors ne sont pas traités de la même façon dans une cour et dans l’autre. Au sein de la cour d’appel, choix est fait de les conserver (ou plutôt de les réinstaller) in situ dans l’aile centrale. Le salon bleu avec ses boiseries et son plafond du xviie siècle [fig. 3] en est l’illustration, tandis que dans la salle des audiences solennelles voisine, le plafond de la même époque hérité de la Grand’Chambre du parlement est quelque peu transformé. Ses éléments anciens viennent inscrire symétriquement leurs caissons dans une structure nouvelle tout aussi richement sculptée de symboles. L’ouvrage du xixe siècle se fond dans celui qui précède avec suffisamment de virtuosité et de crédibilité pour que l’identification de chacun soit parfois délicate, cas de figure qui se répète dans d’autres pièces. Sous ce grand ouvrage remis en scène avec une certaine liberté jointe à une réelle compréhension de ses principes, tout est en revanche refait à neuf : murs, sols et mobilier.
Figure 3
Le Salon bleu, ancienne première chambre du Parlement, 2008. Menuiseries (lambris et plafond) de Daniel et Ozias Guillebaud 1668-1670, cheminée de Victor Sappey (1835), plafond à caissons restauré par Xavier Borgey sculpteur (aidé de Lemaire menuisier) et complété par Guiffard peintre (1895), tentures de 1968 et mobilier ancien.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 6 Avec également intervention sur le plafond, plus modestement que dans la salle des audiences solenn (...)
- 7 Par exemple sur un plan du plafond à réaliser de 1896 (Archives départementales de l’Isère [ci-aprè (...)
6De l’autre côté (que l’on appellera désormais par commodité en référence à ses derniers occupants celui du tribunal de grande instance), il n’y a pas de maintien sur place spatialement, même dans des murs rebâtis. La réutilisation s’effectue en dissociant le décor du grand bureau de la chambre des comptes pour placer le plafond à caissons du xviie siècle dans une salle d’audience et les boiseries de style gothique flamboyant du début du xvie siècle dans une autre. L’idée que la raison en est une forme de remise en ordre stylistique du type « chacun chez soi » est séduisante, d’autant qu’elle correspond à la leçon de bonne pratique qu’entend donner la façade néo-Renaissance à celle qui l’a inspirée. Néanmoins, en l’absence d’une étude poussée des archives sur ce point, elle demeure à l’état d’hypothèse à vérifier. Ce remploi dissocié suggère également une hiérarchisation de la valeur patrimoniale accordée aux éléments conservés, qui fait écho à celle pratiquée dans la cour d’appel. Ici aussi en effet, le plafond se voit adjoindre boiseries et mobilier neufs6, alors que le reste est considéré comme méritant d’être valorisé par un environnement spécifique. Daumet dessine divers éléments inspirés du gothique flamboyant pour accompagner l’existant [fig. 4] : cheminée sur laquelle vient reposer l’ancien dais du président et les statuettes de lansquenets qui le gardent, grand lustre métallique, table d’audience et ses lampes… Dans son dernier état, le dais était déjà sur une cheminée mais celle-ci n’est pas remployée. Les portes de placards devenues boiseries ornementales sont en revanche pourvues d’armoiries peintes, selon un choix qui reste à éclairer par des recherches en archives, et une légende est apposée sur chacun. Cette volonté de réinterprétation des anciennes fleurs de lys par une intervention nouvelle n’est pas un vrai pastiche, non plus qu’un parti de différenciation affirmée, mais plutôt le double héritage du romantisme (une mise en atmosphère) et de Viollet-le-Duc. Certains dessins des architectes désignent de fait ce lieu sous le nom de « chambre historique7 ». D’ailleurs, quelques panneaux ne trouvent pas leur place dans cette salle reconstruite derrière une façade préservée, ce qui confirme qu’elle n’a pas été dessinée dans un esprit archéologique qui en aurait fait l’écrin destiné à présenter de la façon la plus fidèle possible ce legs. En revanche, elle a perpétué la largeur antérieure de ce corps de logis.
Figure 4
La 4e chambre civile du tribunal de grande instance, 2008. Boiseries et baldaquin de Paul Jude (1521-24) jadis dans la grande chambre de la Chambre des Comptes, agencement et complément du mobilier d’Honoré Daumet (1897).
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
7La continuité intervient également en filigrane ou ouvertement dans certains partis pris décoratifs des pièces neuves. La référence au xviie siècle, période féconde artistiquement pour le Dauphiné et son parlement, se lit dans le choix d’un plafond à voussures (salle des pas perdus haute de la cour d’appel) orné de caissons lobés, voire plus lointainement dans le grand caisson qui domine la salle des appels correctionnels voisine. De façon plus évidente, le panneau sculpté placé au-dessus du prétoire de la toute nouvelle salle des assises constitue un rappel de celui de la salle des audiences solennelles, tant par sa position (le plus ancien couvrait au départ seulement le « parc » où siégeaient les magistrats) que par ses figures d’anges encadrant un cartouche (un baldaquin dans l’original). Il ne s’agit en rien d’une copie mais bien plutôt d’une filiation autour de la mise en exergue de l’autorité de la loi. Aux assises [fig. 5], ce panneau tranche sur le tapis de caissons octogonaux et de clefs pendantes d’inspiration Renaissance qui l’environne, attire le regard et constitue un point focal décentré en écho au point nodal de l’action qui se trouve au sol au-dessous.
Figure 5
La salle des assises en 2008, telle que créée en 1890-1893. Le seul caisson rectangulaire du plafond, visible derrière la tige du lustre, est celui qui fait écho au motif du plafond de la salle des audiences solennelles.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
8Le xixe siècle pratique conjointement la copie d’éléments particuliers, dans un souci de sauvegarde ou de complément. Ainsi la série de bustes des princes dauphins réalisée au xvie siècle et dispersée à la Révolution se trouve pratiquement reconstituée et restaurée, mais ne regagne pas sa place d’origine dans les médaillons d’un des passages d’entrée. Des moulages l’y remplacent. Quant aux grands fauteuils menuisés sous Louis XVI par Achard pour les deux cours, ils continuent leur usage avec les garnitures bleues ou rouges caractérisant le parlement ou la chambre des comptes. Soit que leur nombre soit insuffisant, soit que certains soient vermoulus jusqu’à la ruine, un petit nombre paraissent fabriqués alors en complément des anciens, sans être garnis pour autant exactement de même.
Entre sur-mesure et standardisation
- 8 MARCHAL-JACOB Nadine & JACOB Robert « Jalons pour une histoire de l’architecture judiciaire », in L (...)
9Dans la majorité des pièces pourtant, décor et mobilier sont de purs produits du xixe siècle. Les salles d’audience et de délibération, les cabinets des présidents de cour et du procureur général, les bibliothèques ainsi que les principaux bureaux sont tapissés de lambris d’appui moulurés, lointains avatars des palissades de plaids et des « parcs » médiévaux8. Sous une apparente uniformité, ils s’avèrent non un assemblage de panneaux préfabriqués identiques mais un montage façon puzzle aux gabarits variables, très finement ajusté au format et aux irrégularités de chaque espace. Ceux des salles d’audience du tribunal de commerce sont dépourvus de motif central derrière le président, à l’inverse des autres (« chambre historique » exceptée). Le tribunal de grande instance use partout [fig. 6] du même médaillon ovale aux emblèmes de la justice (glaive servant de fléau à la balance, Tables de la Loi, branches d’olivier) sous deux volutes appuyées contre une torche. La ligne générale est similaire à ce qui figure à la cour d’appel, mais celle-ci ne duplique pas et enrichit le principe dans ses trois réalisations : colonnes cannelées et fronton brisé par la torche (audiences solennelles), pilastres cannelés et fronton complet (appels correctionnels), emblèmes dans un panneau rectangulaire avec colonnes cannelées mais volutes autour de la torche pour souligner la spécificité des assises.
Figure 6
Le lambris d’appui de la salle des audiences correctionnelles (tribunal de grande instance), 2018. Motif du panneau de boiserie placé derrière le siège du président regroupant les principaux symboles liés à la Justice, 1895-1897.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 9 Jean-François Soitoux (1816-1891) remporta le concours de sculpture organisé par la Deuxième Républ (...)
- 10 Badier et Paulin, horlogers grenoblois qui équipent aussi le palais des facultés (dont la tour règl (...)
10En parcourant les pièces, un sentiment de grande homogénéité se dégage des cheminées de marbre noir moulurées surmontées de leurs miroirs à cadre doré, des patères identiques, des profils de moulures cernant les plafonds, des lustres de type flamand, des bustes de Marianne répétant le modèle de Soitoux9, des horloges électriques circulaires ou de leurs équivalents à poser estampillées quasi toutes du même fabricant local10… Mais il n’est aucunement possible d’y voir une fabrication en série normée. Les lustres s’adaptent aux volumes de chaque salle, sièges, tables de réunion et bureaux diffèrent de quelques centimètres ainsi que par la couleur et la matière de leur garniture. Mieux, une subtile déclinaison permet d’assortir une gamme de sièges en conférant à chaque occupant un niveau de raffinement proportionnel à sa fonction. Il en va ainsi du fauteuil sculpté du premier président de la cour d’appel jusqu’à de modestes chaises paillées [fig. 7] dont le dossier décline sobrement le même motif d’oreilles à volutes, en passant par des fauteuils enveloppants et ornés, d’autres moins mais toujours tapissés de cuir, certains de bois nu à l’assise cannée… Toute une correspondance entre la société judiciaire et l’aisance offerte à chacun de ses séants pourrait ainsi être développée ! Les fabrications issues du grand remaniement de la fin du xixe siècle se placent ainsi à la charnière de l’artisanat sur mesure et de la production en nombre standardisée.
Figure 7
Exemple de déclinaison d’un modèle de siège en trois fauteuils, pour adapter richesse et confort à la fonction de l’occupant : imposant exemplaire sculpté enveloppant du premier président pour la salle des audiences solennelles, version droite mais à garniture conséquente, modèle canné dont les accotoirs et le dossier suggèrent les mêmes dispositions en bien plus modeste, 2002.
© Aurélie Tougne (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 11 Courrier du préfet de l’Isère au ministre de l’Intérieur en date du 13 mars 1893 (AN, F 21_5904 642 (...)
- 12 Il s’agit d’une chaise en bois très simple, existant en quatre exemplaires (no d’inventaire INV-PJ- (...)
- 13 Carreaux « de grès incrusté » d’Auneuil (Oise), Boulanger aîné fabricant (ADI, 4N 10-70).
- 14 Mémoire s.d. [1899 ?], dans l’étude citée note 3, annexe 2, p. 79.
11Le cas du palais de justice de Grenoble pourrait certainement, moyennant des recherches qui restent à faire, permettre d’affiner ce qui relève du cadre posé par la Chancellerie et ce qui relève de choix influencés par les futurs usagers. De même, il serait très intéressant d’étudier la part prise par des artisans locaux par rapport à celle confiée à de grandes maisons parisiennes. Le préfet paraît souvent prendre l’initiative de consulter des prestataires puis d’informer le ministre de l’Intérieur en indiquant le meilleur soumissionnaire. Pour les tentures, tapis et sièges des salles de la cour d’appel (hors salon bleu) par exemple, il a fait travailler ensemble le tapissier Jacob (30, rue St-Lazare à Paris), le fabricant de sièges Rebeyrotte (71, rue du Moulin-Vert à Paris) et le peintre décorateur car « l’agencement du mobilier étant subordonné à la décoration des salles11 », ils ont présenté étoffes et modèles de sièges sur place aux magistrats de la Cour et les choix ont été faits de concert avec les architectes et le premier président. Une étiquette conservée sous un siège indique en effet ce fournisseur12, comme l’est celui des carreaux employés au sol de la chapelle13 ce qui constitue un véritable affront dans ce qui est alors la capitale française de la cimenterie ! Les modèles de décors de plafond et de sculptures de façades sont réalisés en plâtre par des sculpteurs parisiens (Hamel et Florian Kalinowski) qui proposent pour la salle des pas perdus haute [fig. 8] de la cour d’appel un « grand motif à bouclier du palais de Paris »14 moulé sur la réalisation existante en vue d’une reproduction.
Figure 8
La salle des pas perdus de la cour d’appel, à l’étage de l’aile nord, 2008. Finalement c’est plutôt le modèle proposé pour le cabinet du procureur général avec son peltre à écailles qui a été retenu pour la voussure du plafond. Au fond, buste de Cujas sur pied en gaine (Paul Loiseau-Rousseau 1897), à gauche buste d’Expilly (Victor Sappey, 1835) placé un temps au plafond du Salon bleu.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 15 Xavier Borgey (1863-1941), sculpteur grenoblois, professeur, a enseigné entre autres la composition (...)
- 16 Née au xviiie siècle et pourvue de collections autres que livresques.
12N’oublions pas que Daumet intervient au Palais de Justice de Paris… Le miroitier est Kaeppelin sis rue de Buci dans la capitale. Les ressources iséroises sont en revanche très sollicitées pour les œuvres d’art. Xavier Borgey15, jeune sculpteur grenoblois chargé de superviser les démontages de plafonds et boiseries anciens est ensuite désigné, sur proposition du préfet, pour leur restauration et de leur remontage. Il réalise également les « travaux de sculpture » de la partie cour d’appel et les gargouilles néo-médiévales ajoutées à la chapelle dont le modèle en plâtre est peut-être issu du ciseau des Kalinowski. Dans la bibliothèque de cette même cour, « les ouvrages que comporte ce mobilier [fixe] ayant un caractère d’art ne sauraient être mis en adjudication publique » et le préfet indique au ministre qu’Émile Lemaire, entrepreneur en menuiserie à Rives, fait la meilleure offre. Le coffre-fort de la cour est fourni par un marchand de fer grenoblois du nom de Blanchet. Si l’État dépose quelques commandes statuaires, le musée des Beaux-Arts de Grenoble et la bibliothèque municipale16 constitueront ensuite les principaux pourvoyeurs de peintures, parmi lesquelles prendront place tardivement des œuvres d’artistes originaires de la région (Jules Flandrin, Jacqueline Marval, Jules Joanny Drevet…).
- 17 Réunions du conseil de l’ordre. La salle est dite « bibliothèque – salle de conférence ».
- 18 Antoine Barnave (1761-1793), avocat, orateur reconnu, très impliqué dans les soubresauts pré-révolu (...)
13Parmi les aménagements très caractéristiques de ce xixe siècle, on relève la création de bibliothèques, lieux spécifiques partagés de rangement et d’étude qui interviennent pour les livres trois siècles après l’organisation des archives. À Grenoble elles sont trois, distinctes dans leur sujétion, leur localisation et leur décor. Ces espaces de travail rationnels sont dotés d’un mobilier très adapté de rayonnages (ouverts, vitrés ou non, fermés de portes en partie basse), d’escabeaux pour atteindre les ouvrages les plus haut placés, de vastes tables ovales ou oblongues entourées de fauteuils confortables pour la consultation. La cour d’appel [fig. 9] s’offre une galerie haute et une réserve, signe de l’ampleur du savoir qu’il est désormais nécessaire de conserver à portée de main. Le tribunal de grande instance opte pour des plaquettes d’émail légendant les rayonnages et deux annexes. Quant aux avocats, leur bibliothèque placée entre leurs vestiaires et le bureau du bâtonnier offre des tablettes de lecture intégrées et jouit d’une disposition très particulière : une estrade avec degrés sans débouché, sans doute liée à la vie propre du barreau17. Tous ces antres du savoir s’ornent de décors aussi soignés que ceux des salles d’audience, tous ont des cheminées de modèles différents mais raffinés, exposant un buste pour lequel les magistrats oscillent entre un confrère en tenue (Nicolas Chorier, jurisconsulte viennois, avocat général et historien, 1612-1692) et une Marianne semblable aux autres. Cartel d’applique de type Boulle, symboles liés à la justice peints au-dessus des portes, lustres et appliques relèvent encore ces ensembles. Le choix du barreau renvoie pour sa part à un autre caractère, car il campe au-dessus du foyer la copie du buste de Houdon représentant Antoine Barnave18, illustre membre grenoblois de cette confrérie. C’est l’affirmation sans fard de la fierté d’une histoire spécifique, qui conduit à s’interroger sur la part du régionalisme dans cet édifice.
Figure 9
La bibliothèque de la cour d’appel, 2019. Mobilier fixe par Emile Lemaire (entrepreneur de menuiserie à Rives, Isère) et cheminée en pierre de Lens (non visible) sculptée par le valentinois Camille Rey en 1893, table d’origine.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
Une « delphinalité » recherchée ?
14L’histoire du parlement de Dauphiné a servi d’argument fort à diverses reprises. En 1539, la province contraint en son nom le roi à compléter l’édit de Villers-Cotterêts imposant l’usage du français par un texte spécifique à ces terres, l’ordonnance d’Abbeville. En 1788, pour s’opposer aux édits de Lamoignon réorganisant l’institution, les clauses du Transport du Dauphiné à la France sont invoquées et tout particulièrement le respect juré du Conseil delphinal (ancêtre du parlement) et des libertés dont il est garant. Dans un autre registre, c’est le ressort de l’ancien parlement qui a déterminé les limites actuelles de la juridiction de la cour d’appel de Grenoble. Au-delà de cet usage de l’histoire somme toute courant, il n’est pas absurde de s’interroger sur la possibilité de voir affleurer dans les choix décoratifs (anciens ou récents) un rappel, voire un attachement à un particularisme, au sein d’institutions judiciaires toujours plus centralisées et homogénéisées.
Un fil dans la trame des siècles
- 19 Douze têtes sculptées par le lombard Lorenzo da Mugiano (ou Muzzano ; actif de 1490 à 1516), aujour (...)
- 20 Titre des princes souverains du Dauphiné jusqu’à son rattachement à la France en 1349. Comme la Jus (...)
- 21 VALLIER Gustave, « Bretagne et Dauphiné. Notice sur des médailles et jetons frappés aux armes de Fr (...)
15Ainsi, au xvie siècle, la réalisation d’un certain nombre de statues alors que le palais reçoit les faveurs royales (Louis XII, Anne de Bretagne, François Ier, Henri II) peut-elle être comprise comme l’affirmation d’une spécificité, ou en tout cas la fierté et la reviviscence du souvenir de son histoire. Sur la façade, la Justice à l’épée et à la balance se trouve ainsi flanquée de Charlemagne et surtout de Louis XI, qui a transformé le Conseil delphinal en parlement. Deux galeries de bustes alignent l’une les empereurs romains19, l’autre les dauphins de Viennois20 dont les portraits d’imagination rappellent la naissance de ce Conseil… et la promesse formelle du roi de France de le préserver comme garant des libertés delphinales. Ces effigies placées dans un décor renaissant au sein du passage-rue le plus utilisé par le public gagnent à cet emplacement valeur de commémoration publique [fig. 10]. Un tel rappel rapproche le Dauphiné de la Bretagne, alors en plein processus de rattachement à la France, ce qu’étayent deux indices : les armoiries aux queues d’hermine jointes aux dauphins d’or rappelant la générosité de la duchesse Anne sur des vitraux disparus du parlement d’une part, l’existence de médailles commémoratives contemporaines joignant les titres de dauphin de Viennois et de duc de Bretagne21 de l’autre.
Figure 10
Le passage d’entrée du tribunal de grande instance, 2008. Sous ses voûtes sur croisées d’ogive (molasse), le décor renaissant (calcaire gris bleuté du Fontanil) présente comme des « imago clipeata » la galerie des bustes des dauphins de Viennois (jadis légendées sur des tablettes à l’antique, copies du XIXe siècle).
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 22 Gabriel Pech (1854-1930), surtout connu par des œuvres commémoratives postérieures à 1900.
- 23 Paul Loiseau-Rousseau (1861-1927), surtout connu pour ses sujets orientalistes, a exposé au Salon à (...)
- 24 Victor Sappey (1801-1856) premier directeur de l’école de sculpture de Grenoble et auteur de nombre (...)
16En ce qui concerne le xixe siècle, le mouvement est plus ample encore et à nouveau essentiellement statuaire. Si la Justice commandée par l’État à Louis-Joseph Convers (1860-1915) transcende les régimes politiques (main de justice et tenue Troisième République mâtinée d’antique) elle n’a rien de spécifique au Dauphiné. En revanche, les autres sculptures destinées à orner le palais remis à neuf sont bien plus révélatrices d’un lien fort avec l’ancienne province. Gabriel Pech22 exécute ainsi un buste en marbre d’Abel Servien [fig. 11] pour le cabinet du procureur général et L. Terrey, un du marquis de Valbonnais (1651-1730, président de la chambre des comptes et grand historien du Dauphiné), pour une pièce non précisée (déposé à l’ancienne chapelle). Paul Loiseau-Rousseau23 produit un Jacques Cujas (jurisconsulte, 1522-1590, enseignant en droit à Valence, maître de l’humanisme juridique) installé dans la salle des pas perdus haute de la cour d’appel. On restaure (Abraham) et ré-installe le portrait d’Abel Servien (1593-1659, né à Biviers), dérivé d’un tableau de Philippe de Champaigne, dont la tenue de ministre ne peut faire oublier qu’il fut procureur général à Grenoble et premier président à Bordeaux. Pour le plafond de la même pièce, Victor Sappey24 sculpte dès 1835 quatre trophées d’armes historicisants rapidement attribués par la vox populi à de grands hommes ayant marqué le Dauphiné (L. Munatius Plancus, Bayard, Lesdiguières…) mais aussi quatre bustes également en bois pour les médaillons. Là encore le choix est explicite : Guy Pape (avant 1432-1477, avocat et jurisconsulte) est membre du conseil delphinal puis du parlement, Claude Expilly (1561-1636) historien et poète voironnais, avocat général puis président, Denis de Salvaing de Boissieu (1600-1683) président et poète, Jean-Pierre Moret de Bourchenu, marquis de Valbonnais déjà cité. Des statuettes en plâtre d’Expilly et de Guy Pape prennent place dans les niches de la chapelle. Ainsi, ce sont les gloires locales des temps modernes liées d’une façon ou d’une autre à l’exercice de la justice dans ces murs qui sont systématiquement mises en avant. Là aussi, le parallèle avec la Bretagne peut être établi si l’on songe à la commande de 1898 passée aux Gobelins pour la tenture de la Grand’Chambre de l’ancien parlement de Rennes.
Figure 11
Le buste de Nicolas Chorier en tenue de parlementaire (marbre de Gabriel Pech de 1895) dans sa niche en médaillon, au-dessus de la cheminée de marbre du cabinet du procureur général, juste avant le déménagement des tribunaux en 2002.
© Aurélie Tougne (Département de l’Isère , direction de la Culture et du Patrimoine).
Autre temps, autres mœurs ?
- 25 Les isérois Victor Cassien (1808-1893) et Alexandre Debelle (1805-1887) sont peintres, dessinateurs (...)
- 26 FONVIEILLE René, Le Palais du Parlement de Dauphiné et son extraordinaire architecte Pierre Bucher, (...)
17Dans la décoration des bureaux en place en 2002 à la veille du déménagement des cours, il est notoire qu’un attachement territorial puissant se manifeste sur bien des murs. Sans connotation juridique quelconque, il ne peut refléter seulement le goût particulier de tel ou tel mais montre, répartis un peu partout, de nombreuses gravures et dessins. Trois cartes anciennes du Dauphiné témoignent des premières représentations fiables de son territoire au xviie siècle. Les vues des hauts lieux de l’ancienne province, dessinées (1835-1839) par Victor Cassien ou Alexandre Debelle25, font apparaître tant la Drôme et les Hautes-Alpes que l’Isère. Deux plans de 1887 montrent le projet de transformation du palais de justice dans son état presque définitif. Certains éléments de bois sculptés (panneaux, portes) provenant des anciens décors démantibulés sont installés çà et là côté tribunal de grande instance, alors que côté cour d’appel, ils sont regroupés dans l’ancienne chapelle [fig. 12] avec tout ce qui a pu être glané comme débris antérieurs à la grande mutation de la fin du xixe siècle. C’est l’œuvre initiée (ou plus probablement amplifiée) par le président René Fonvieille qui, dans les années 1960, s’est pris de passion pour l’édifice et plus largement le patrimoine, au point de fonder en 1965 le Comité de sauvegarde du Vieux Grenoble d’un prémonitoire intérêt. Il a d’ailleurs publié une monographie de l’édifice exposant sa thèse d’un magistrat architecte pour la partie xvie siècle26. Sans doute son influence n’est-elle pas étrangère aux choix de travaux effectués par la Chancellerie à l’occasion des Jeux olympiques d’hiver de Grenoble de 1968. Outre un ravalement indispensable, c’est une restauration et non une création contemporaine qui est privilégiée : tissage de tentures de satin aux lys et aux dauphins évoquant les anciennes garnitures, remise en état et dorure de motifs au plafond de la salle des audiences solennelles…
Figure 12
L’ancienne chapelle du Parlement (XVe siècle) devenue un bureau de la cour d’appel après amputation de deux travées dans la première moitié du XIXe siècle, 2008. Fauteuils de Pierre Achard et bureau Hache ont été utilisés jusqu’en 2002. Aux murs, un petit musée de l’œuvre rassemblé par le président Fonvielle dans les années 1960.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 27 GERIN Bernard, « Les avocats en Dauphiné, du transport à nos jours », in COGNE Olivier (dir.), Rend (...)
18Le cas des avocats est aussi éloquent… ce qui est bien le moins dans une telle profession ! Leur histoire dauphinoise comporte des particularités dont ils se montrent encore aujourd’hui très fiers, notamment le système des avocats consistoriaux qui préfigure au xviiie siècle le barreau27. La mise en avant de la figure de Barnave souligne le rôle qu’ils entendent continuer à jouer, au-delà du « simple » exercice de leurs fonctions. Ils ont leurs propres modèles de sièges, dont les exemplaires les plus remarquables sont installés dans le bureau du bâtonnier. Celui-ci est le seul à disposer d’un bureau marqueté et d’une horloge de parquet (1780, également marquetée) acquise en 1858. Deux tableaux représentant Grenoble et Sassenage sont mentionnés lors de l’état de 2002. Lors du déménagement, c’est le corps qui emmène avec lui le plus d’éléments de mobilier, dont tous ceux qui viennent d’être cités.
- 28 TOUGNE Aurélie & VINCENT Sylvie (dir.), Rapport d’inventaire. Le mobilier du palais de justice de G (...)
- 29 Qualité plutôt qu’ancienneté car plusieurs meubles antérieurs à la Révolution française, et non des (...)
19L’inventaire du mobilier, conduit28 dans les affres du déplacement, a pu omettre certains éléments, néanmoins sa collation récente avec les meubles et objets présents dans le nouveau palais de justice (livré meublé, rappelons-le) et ceux restés en place est éclairante. Si quelques pièces doivent sans doute plutôt à leur qualité29 d’avoir été emmenées (table à jouer, horloge de type Boulle, cartel d’applique rocaille émaillé ou grands vases et coupes de Sèvres décoratifs), beaucoup le sont pour leur dimension symbolique, qui revendique une continuité entre bâtiments mais aussi entre institutions depuis les temps du parlement. C’est le cas avant tout de la collection de timbres secs, sceaux matrices et timbres cachets (aux armes royales, impériales, à la Marianne) qui a migré de sa vitrine vers le bâtiment neuf. De même pour plusieurs urnes de tirage au sort [fig. 13], protégées comme les précédents au titre des monuments historiques et qui, pas plus qu’eux, ne peuvent prétendre à un usage matériel. Et le moulage du buste de Barnave revendiqué pour la nouvelle « Maison de l’avocat » s’inscrit dans la même volonté de filiation manifeste. Que celle-ci soit très présente à la fin du xixe siècle, dans un contexte où la forte centralisation a fait naître un intérêt nouveau pour l’histoire locale, n’est pas vraiment étonnant. Qu’elle se retrouve de façon récurrente depuis la Renaissance jusqu’au xxie siècle nous questionne sur la part de conservatisme et de goût pour l’histoire des juristes et affidés. Mais les faisceaux de constats établis ci-dessus ne vont-ils pas au-delà ? Nous le croyons.
Figure 13
Exemple d’urne de tirage au sort en forme de canthare ayant perdu son couvercle, 2005. D’autres modèles couleur bronze patiné adoptent des anses à la grecque ou dérivées des modèles antiques à enroulement.
© Sylvie Vincent (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
Meubles en panorama
20Qu’a donc finalement laissé derrière elle la marée du temps ? Dans le bâtiment de l’ancien palais du Parlement – palais de justice resté « dans son jus » (y compris les bureaux aménagés tant bien que mal dans les recoins des combles à l’extrême fin du xxe siècle) demeurent décors et salles d’audience prêtes à servir. Y sont inventoriés à ce jour presque 1 150 meubles ou objets mobiliers, à quoi s’ajoutent 125 items déplacés et les équipements fixes. La moitié d’entre eux sont des sièges, avec une forte prédominance des fauteuils sur les chaises, canapés, banquettes et bancs volants. Supports de travail indispensables, bureaux et tables avoisinent la centaine d’unités, dont une majorité des secondes du fait des multiples petites tables d’appoint disséminées dans l’édifice. Les bibliothèques, armoires et commodes (mobiles) se montent à une cinquantaine, pour une trentaine d’horloges, quatre-vingts gravures ou tableaux et plus de cent vingt sculptures ou éléments sculptés.
- 30 Dynastie installée à Grenoble au xviie siècle réputée pour ses meubles en noyer et ses pièces d’app (...)
21Au-delà des chiffres, un certain nombre de remarques s’imposent au vu de cet ensemble dont l’étude fine reste à faire. Même en excluant ce qui a été déposé au nouveau palais de justice (principe à partir duquel sont établies toutes les constatations qui suivent), un certain nombre de meubles anciens sont demeurés in situ : deux cartels de type Boulle représentant, l’un Amphitrite, l’autre Déjanire et Nessus avec leurs consoles assorties [fig. 14], deux très grandes tables rectangulaires datées vers 1700 et possiblement différentes pièces susceptibles d’être antérieures au xixe siècle (trois vitrines, quatre chaises non garnies non sculptées, une armoire de type « homme debout »…). Le bureau xviiie siècle garni de cuir attribué aux ébénistes Hache30 a servi jusqu’aux derniers jours, comme une bonne partie des trente-huit fauteuils [fig. 15], œuvres de Pierre Achard conçues pour ce bâtiment entre 1780 et 1810. La patine de l’usage s’y conjugue de ce fait à une usure importante, mais ils illustrent de belle façon, à l’instar des plafonds anciens, la qualité des fabrications locales.
Figure 14
Le cartel d’applique du salon bleu (XVIIe siècle), 2008. De type Boulle, posé sur sa console assortie, il présente un riche décor marqueté de cuivre, bronze et écaille avec sur la caisse l’enlèvement de Déjanire par le centaure Nessus.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
Figure 15
Fauteuil attribué à Pierre Achard (fin XVIIIe-début XIXe siècle), élément d’un lot créé pour le palais du Parlement et garni de textiles divers, bleus ou rouges selon l’affectation à telle ou telle juridiction, 2005.
© Sylvie Vincent (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
- 31 Non comptabilisés dans les chiffres avancés plus haut, ils regroupent tables et lampes d’audience, (...)
22Hormis les équipements de salles d’audience et ceux des geôles31, les meubles qu’on pourrait qualifier « de métier » s’avèrent peu présents. Il s’agit surtout de rangements, armoire à casiers abattants de type cartonnier ou dont les casiers accueillent des boîtes horizontales. Dans ce cas, deux étroits montants mobiles se rabattent sur quelques centimètres de chaque côté et d’un tour de clef empêchent tout retrait, tout en laissant voir l’étiquetage [fig. 16]. Les classeurs à rideaux verticaux aux poignées Art déco entrent dans la même catégorie, en plus courant. Ce peut être aussi une armoire-bibliothèque aux rayons légendés par des plaquettes émaillées ou dotée d’aménagements nécessaires à la conservation des pièces à conviction, comme c’est le cas au tribunal de grande instance. Quelques bureaux à gradins et une table au plateau encadré de hauts rebords sur trois côtés peuvent aussi dénoter une certaine spécificité, administrative plus que strictement judiciaire. Témoin de l’importance des copies et duplicata bien avant les ronéotypes et les photocopieuses, une intéressante table de copiste se distingue par son plateau inclinable garni de cuir rouge pourvu d’une réglette de butée. Économe en place, elle dissimule dans son bâti l’écritoire secondaire et ses casiers destinés au matériel d’écriture que l’on tire vers soi, ainsi que des tablettes mobiles latérales [fig. 17].
Figure 16
Meuble de rangement à casiers fermés d’abattants à étiquettes, 2018. Ses pieds en miche, ses montants cannelés et rudentés terminés par des pastilles, son bandeau inférieur et sa corniche fortement moulurés l’apparentent à plusieurs armoires et bibliothèques.
© Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
Figure 17
Table de copiste (XIXe siècle) avec tablettes et tiroir ouverts, 2002. Le plateau se relève et une crémaillère de bois permet d’en régler l’inclinaison, tandis que la réglette maintient le document original sur sa surface afin de pouvoir le copier à l’aise sur la surface aménagée du tiroir. Les tablettes et le plateau sont recouverts de cuir rouge marqué au fer d’une frise dorée ponctuée d’abeilles aux angles.
© Aurélie Tougne (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
23Au premier président de la cour d’appel est attaché un ensemble de mobilier de style Empire (acajou et bronze aux garnitures rouges) assez conséquent : grand bureau à dessus de cuir doré au fer, fauteuil, bibliothèque grillée et armoire à quatre portes, guéridon à trois pieds et dessus de marbre, console d’applique couverte du même marbre. Installés d’abord dans son cabinet où les appliques (cygnes et abat-jour vert sombre à lauriers dorés) sont assorties à la lampe de bureau, ces meubles ont émigré sous les toits lors de la forte densification du xxe siècle. C’est dans ce cabinet que figuraient, après les grands travaux de 1890-1897, les portraits en pendant d’Abel Servien (évoqué plus haut) et de son épouse, l’entrée de la seconde justifiant la posture en torsion du premier. Sans aller jusqu’à une telle homogénéité, il paraît clair que les bureaux comportant ceinture et pieds sculptés étaient réservés aux présidents, vice-présidents et procureur général, une hiérarchie qui n’est pas pour surprendre.
24Outre les gammes de sièges déjà abordées, il faut mentionner d’autres ensembles déclinant un même modèle avec des variantes d’ampleur (hauteur, nombre de portes), de support (pieds ou socle) et de richesse d’ornementation (corniche par exemple). C’est le cas notamment des douze bibliothèques dont les montants sont cannelés et rudentés. Les versions les plus riches comportent des consoles sous la corniche et deux autres meubles s’assortissent à ces montants, un buffet bas et une armoire à caissons. Une version dérivée de l’exemple de style Empire, plus modeste quoiqu’en acajou, arbore des colonnettes et un motif d’applique en bronze. Il est tentant d’en rapprocher un certain nombre de tables dont le piétement recourt également aux colonnettes, sans usage de bois précieux, voire quelques chaises non garnies. Pour les bureaux comme pour les tables, la coexistence d’exemples riches avec leurs répliques plus modestes est fréquente. Il en va de même pour les sièges, témoin le lot de fauteuils et chaises aux pieds antérieurs en « patte de grenouille » ou « en jarret » (ressaut avant très marqué sous la ceinture au-dessus de la cambrure) [fig. 18]. Les plus ornés de ceux-ci comportent des accoudoirs sans manchettes mais se refermant par de conséquentes volutes terminées en bourgeonnement. Toute une série d’accoudoirs à volutes simples, sans « patte de grenouille » ni bourgeon, constitue une galaxie de suivantes.
Figure 18
Le fauteuil du bâtonnier, siège de l’ensemble à montants antérieurs en « patte de grenouille », 2002. Ce piétement paraît une dérivation du pied « en jarret » d’inspiration égyptienne imaginé sous l’Empire.
© Aurélie Tougne (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine).
25On l’aura compris, il ne s’agit pas là d’une étude fouillée de ce corpus tout juste inventorié mais d’un tableau issu d’une fréquentation longue et assidue du bâtiment et de tout son contenu. En croisant les archives des travaux de la fin du xixe siècle, dont la plupart restent à dépouiller et étudier finement, et ce qui a été laissé en place, il serait certainement possible d’identifier des spécificités de l’une ou l’autre des trois instances occupant les lieux mais aussi d’en mieux comprendre les similitudes d’équipement. Jusqu’où peut-on parler d’une logique sérielle ? Quelle est la part exacte des magistrats en fonction dans les choix et notamment dans la fabrication « d’unicum » ? Est-il possible d’apparier, au-delà des sièges d’Achard, des réalisations du xixe siècle, tels certains bureaux d’inspiration xviiie siècle, avec des modèles plus anciens ? Les inventaires du tribunal d’instance, logé à quelque distance, et de l’ancien hôtel de ville, annexé durant plusieurs années par la justice (tous deux également déplacés en 2002) corroborent-ils, nuancent-ils ou modifient-ils le tableau ? Les ouvrages des bibliothèques reflètent-ils une même répartition chronologique d’origine que les meubles ? Les questions foisonnent ; espérons que la présente contribution ne sera qu’un premier jalon dans la connaissance de ce mobilier judiciaire lié au siège de Grenoble.
26Faut-il conclure alors qu’on mesure surtout tout ce qu’on ignore encore ? L’édifice, son décor et ses meubles sont les sédiments d’une très longue histoire. Une histoire… à suivre !
Notes
1 Malgré la présence de l’Isère dont le lit n’est qu’à quelques mètres du bâtiment, séparé de celui-ci par un quai du xixe siècle.
2 Honoré Daumet (1826-1911), Grand Prix de Rome en 1855, intervient à compter de 1840 au Palais de Justice de Paris dont il est l’architecte unique après 1879. À Grenoble, il a déjà édifié le palais des facultés (1863-1875). Hector Riondel (1833-1903), élève de Questel, est architecte départemental à la suite de son père Joseph (palais des facultés, préfecture de l’Isère…).
3 Pour ce point comme pour beaucoup d’autres, les éléments proviennent de CAYOL-GERIN Anne, CHANCEL Dominique & BADIN DE MONTJOYE Alain, Étude de l’aile centrale de l’ancien palais de justice de Grenoble – ancien palais du Parlement de Dauphiné, tapuscrit, Grenoble, conseil général de l’Isère, septembre 2008.
4 Courrier du préfet de l’Isère au ministre de l’Intérieur du 27 juin 1895 (Archives nationales, désormais AN F 21_5904 6420 à 6430).
5 CAYOL-GERIN Anne, CHANCEL Dominique & BADIN DE MONTJOYE Alain, Étude de l’aile centrale de l’ancien palais de justice de Grenoble – ancien palais du Parlement de Dauphiné. Le bâtiment est inscrit en totalité comme monument historique le 6 avril 1992.
6 Avec également intervention sur le plafond, plus modestement que dans la salle des audiences solennelles mais ce qu’attestent les cartouches au monogramme « RF », si prisés par la Troisième République.
7 Par exemple sur un plan du plafond à réaliser de 1896 (Archives départementales de l’Isère [ci-après ADI], 4 N 10-15), un projet de cheminée (non réalisé) et celui qui a pris forme (ADI, 4 N 10-64).
8 MARCHAL-JACOB Nadine & JACOB Robert « Jalons pour une histoire de l’architecture judiciaire », in La Justice en ses temples. Regards sur l’architecture judiciaire en France, Paris / Poitiers, Errance / Brissaud, 1992, p. 28-29, 33 et 36-37.
9 Jean-François Soitoux (1816-1891) remporta le concours de sculpture organisé par la Deuxième République en février 1848 avec La République, une femme au front ceint du bandeau « République » et éclairé de l’étoile de l’intelligence. Un symbole qui fait sens dans un tel lieu.
10 Badier et Paulin, horlogers grenoblois qui équipent aussi le palais des facultés (dont la tour règle la marche de celles du palais de justice) et différents bâtiments publics (mairie de Moirans).
11 Courrier du préfet de l’Isère au ministre de l’Intérieur en date du 13 mars 1893 (AN, F 21_5904 6420 à 6430) d’après l’étude citée note 3, annexe 2, p. 74.
12 Il s’agit d’une chaise en bois très simple, existant en quatre exemplaires (no d’inventaire INV-PJ-G-BE 3-5 A/D). L’étiquette indique un envoi au concierge de la cour d’appel le 31 avril 1897 par Rebeyrotte Fils, de Paris.
13 Carreaux « de grès incrusté » d’Auneuil (Oise), Boulanger aîné fabricant (ADI, 4N 10-70).
14 Mémoire s.d. [1899 ?], dans l’étude citée note 3, annexe 2, p. 79.
15 Xavier Borgey (1863-1941), sculpteur grenoblois, professeur, a enseigné entre autres la composition décorative, l’art industriel et les études d’ornements à l’École des beaux-arts de la ville qu’il a dirigée de 1890 à 1893. Membre du conseil municipal au début du xxe siècle, il est temporairement conservateur du musée des Beaux-Arts durant la Première Guerre mondiale.
16 Née au xviiie siècle et pourvue de collections autres que livresques.
17 Réunions du conseil de l’ordre. La salle est dite « bibliothèque – salle de conférence ».
18 Antoine Barnave (1761-1793), avocat, orateur reconnu, très impliqué dans les soubresauts pré-révolutionnaires de la province puis dans les assemblées parisiennes, président de l’Assemblée constituante en 1790 puis en relation étroite avec la famille royale, ce qui le conduisit à l’échafaud.
19 Douze têtes sculptées par le lombard Lorenzo da Mugiano (ou Muzzano ; actif de 1490 à 1516), aujourd’hui en partie au musée des Beaux-Arts de Grenoble.
20 Titre des princes souverains du Dauphiné jusqu’à son rattachement à la France en 1349. Comme la Justice (seule survivante de la triade de façade), ces bustes s’avèrent non en marbre mais en albâtre de Mésage, matériau très local.
21 VALLIER Gustave, « Bretagne et Dauphiné. Notice sur des médailles et jetons frappés aux armes de France, Dauphiné et Bretagne », in Congrès archéologique de France (séances générales tenues à Vannes en 1881), Paris / Tours, Champion / Bousrez, 1882, XLVIIIe session. Je remercie Yves Coativy, professeur d’histoire médiévale à l’université de Brest de m’avoir communiqué ces informations.
22 Gabriel Pech (1854-1930), surtout connu par des œuvres commémoratives postérieures à 1900.
23 Paul Loiseau-Rousseau (1861-1927), surtout connu pour ses sujets orientalistes, a exposé au Salon à partir de 1886.
24 Victor Sappey (1801-1856) premier directeur de l’école de sculpture de Grenoble et auteur de nombreuses œuvres dans la région (Valence, Chambéry, Grenoble…).
25 Les isérois Victor Cassien (1808-1893) et Alexandre Debelle (1805-1887) sont peintres, dessinateurs et lithographes, le second conservateur du musée des Beaux-Arts de Grenoble de 1853 à sa mort. Tous deux ne rechignent pas aux scènes historicistes concernant le Dauphiné, dont certaines se trouvent aujourd’hui à la préfecture ou à l’hôtel du Département.
26 FONVIEILLE René, Le Palais du Parlement de Dauphiné et son extraordinaire architecte Pierre Bucher, Grenoble, Didier et Richard, 1965. On notera que dès 1806 il était prévu dans le bâtiment une librairie et une « salle d’exposition » dont la concrétisation reste à démontrer.
27 GERIN Bernard, « Les avocats en Dauphiné, du transport à nos jours », in COGNE Olivier (dir.), Rendre la justice en Dauphiné, catalogue d’exposition (palais du département du Dauphiné, 31 octobre 2003-17 mai 2004), Grenoble, PUG, 2003.
28 TOUGNE Aurélie & VINCENT Sylvie (dir.), Rapport d’inventaire. Le mobilier du palais de justice de Grenoble, (dont la contribution de CHANCEL Dominique, « Du palais du parlement au palais de justice », p. 3-8), tapuscrit, conseil général de l’Isère, septembre 2002, 2 tomes.
29 Qualité plutôt qu’ancienneté car plusieurs meubles antérieurs à la Révolution française, et non des moindres, sont restés sur place.
30 Dynastie installée à Grenoble au xviie siècle réputée pour ses meubles en noyer et ses pièces d’apparat marquetées.
31 Non comptabilisés dans les chiffres avancés plus haut, ils regroupent tables et lampes d’audience, cloisons séparatives, barres, bancs et banquettes fixes, etc.
Haut de pageTable des illustrations
Titre | Figure 1 |
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Légende | La façade sud du palais du Parlement de Dauphiné (ancien palais de justice) donnant sur la place Saint-André à Grenoble, 2008. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 363k |
Titre | Figure 2 |
Légende | Plan du rez-de-chaussée issu du grand chantier de modernisation de 1890-1897 : entrées au sud sur la place (au nord seulement pour le public des assises), accès pénitentiaire à l’ouest, espaces dévolus à trois instances différentes (avec une prééminence sensible de la cour d’appel), zone dédiée aux avocats (bibliothèque, vestiaires, bureau du bâtonnier) à l’extrémité nord de l’aile centrale, 2019. |
Crédits | © Anne Cayol-Gerin (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 149k |
Titre | Figure 3 |
Légende | Le Salon bleu, ancienne première chambre du Parlement, 2008. Menuiseries (lambris et plafond) de Daniel et Ozias Guillebaud 1668-1670, cheminée de Victor Sappey (1835), plafond à caissons restauré par Xavier Borgey sculpteur (aidé de Lemaire menuisier) et complété par Guiffard peintre (1895), tentures de 1968 et mobilier ancien. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 312k |
Titre | Figure 4 |
Légende | La 4e chambre civile du tribunal de grande instance, 2008. Boiseries et baldaquin de Paul Jude (1521-24) jadis dans la grande chambre de la Chambre des Comptes, agencement et complément du mobilier d’Honoré Daumet (1897). |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-4.jpg |
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Titre | Figure 5 |
Légende | La salle des assises en 2008, telle que créée en 1890-1893. Le seul caisson rectangulaire du plafond, visible derrière la tige du lustre, est celui qui fait écho au motif du plafond de la salle des audiences solennelles. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-5.jpg |
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Titre | Figure 6 |
Légende | Le lambris d’appui de la salle des audiences correctionnelles (tribunal de grande instance), 2018. Motif du panneau de boiserie placé derrière le siège du président regroupant les principaux symboles liés à la Justice, 1895-1897. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-6.jpg |
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Titre | Figure 7 |
Légende | Exemple de déclinaison d’un modèle de siège en trois fauteuils, pour adapter richesse et confort à la fonction de l’occupant : imposant exemplaire sculpté enveloppant du premier président pour la salle des audiences solennelles, version droite mais à garniture conséquente, modèle canné dont les accotoirs et le dossier suggèrent les mêmes dispositions en bien plus modeste, 2002. |
Crédits | © Aurélie Tougne (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 394k |
Titre | Figure 8 |
Légende | La salle des pas perdus de la cour d’appel, à l’étage de l’aile nord, 2008. Finalement c’est plutôt le modèle proposé pour le cabinet du procureur général avec son peltre à écailles qui a été retenu pour la voussure du plafond. Au fond, buste de Cujas sur pied en gaine (Paul Loiseau-Rousseau 1897), à gauche buste d’Expilly (Victor Sappey, 1835) placé un temps au plafond du Salon bleu. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 313k |
Titre | Figure 9 |
Légende | La bibliothèque de la cour d’appel, 2019. Mobilier fixe par Emile Lemaire (entrepreneur de menuiserie à Rives, Isère) et cheminée en pierre de Lens (non visible) sculptée par le valentinois Camille Rey en 1893, table d’origine. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-9.jpg |
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Titre | Figure 10 |
Légende | Le passage d’entrée du tribunal de grande instance, 2008. Sous ses voûtes sur croisées d’ogive (molasse), le décor renaissant (calcaire gris bleuté du Fontanil) présente comme des « imago clipeata » la galerie des bustes des dauphins de Viennois (jadis légendées sur des tablettes à l’antique, copies du XIXe siècle). |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-10.jpg |
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Titre | Figure 11 |
Légende | Le buste de Nicolas Chorier en tenue de parlementaire (marbre de Gabriel Pech de 1895) dans sa niche en médaillon, au-dessus de la cheminée de marbre du cabinet du procureur général, juste avant le déménagement des tribunaux en 2002. |
Crédits | © Aurélie Tougne (Département de l’Isère , direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-11.jpg |
Fichier | image/jpeg, 621k |
Titre | Figure 12 |
Légende | L’ancienne chapelle du Parlement (XVe siècle) devenue un bureau de la cour d’appel après amputation de deux travées dans la première moitié du XIXe siècle, 2008. Fauteuils de Pierre Achard et bureau Hache ont été utilisés jusqu’en 2002. Aux murs, un petit musée de l’œuvre rassemblé par le président Fonvielle dans les années 1960. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-12.jpg |
Fichier | image/jpeg, 356k |
Titre | Figure 13 |
Légende | Exemple d’urne de tirage au sort en forme de canthare ayant perdu son couvercle, 2005. D’autres modèles couleur bronze patiné adoptent des anses à la grecque ou dérivées des modèles antiques à enroulement. |
Crédits | © Sylvie Vincent (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-13.jpg |
Fichier | image/jpeg, 221k |
Titre | Figure 14 |
Légende | Le cartel d’applique du salon bleu (XVIIe siècle), 2008. De type Boulle, posé sur sa console assortie, il présente un riche décor marqueté de cuivre, bronze et écaille avec sur la caisse l’enlèvement de Déjanire par le centaure Nessus. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-14.jpg |
Fichier | image/jpeg, 492k |
Titre | Figure 15 |
Légende | Fauteuil attribué à Pierre Achard (fin XVIIIe-début XIXe siècle), élément d’un lot créé pour le palais du Parlement et garni de textiles divers, bleus ou rouges selon l’affectation à telle ou telle juridiction, 2005. |
Crédits | © Sylvie Vincent (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-15.jpg |
Fichier | image/jpeg, 386k |
Titre | Figure 16 |
Légende | Meuble de rangement à casiers fermés d’abattants à étiquettes, 2018. Ses pieds en miche, ses montants cannelés et rudentés terminés par des pastilles, son bandeau inférieur et sa corniche fortement moulurés l’apparentent à plusieurs armoires et bibliothèques. |
Crédits | © Denis Vinçon (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-16.jpg |
Fichier | image/jpeg, 325k |
Titre | Figure 17 |
Légende | Table de copiste (XIXe siècle) avec tablettes et tiroir ouverts, 2002. Le plateau se relève et une crémaillère de bois permet d’en régler l’inclinaison, tandis que la réglette maintient le document original sur sa surface afin de pouvoir le copier à l’aise sur la surface aménagée du tiroir. Les tablettes et le plateau sont recouverts de cuir rouge marqué au fer d’une frise dorée ponctuée d’abeilles aux angles. |
Crédits | © Aurélie Tougne (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-17.jpg |
Fichier | image/jpeg, 104k |
Titre | Figure 18 |
Légende | Le fauteuil du bâtonnier, siège de l’ensemble à montants antérieurs en « patte de grenouille », 2002. Ce piétement paraît une dérivation du pied « en jarret » d’inspiration égyptienne imaginé sous l’Empire. |
Crédits | © Aurélie Tougne (Département de l’Isère, direction de la Culture et du Patrimoine). |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/36270/img-18.jpg |
Fichier | image/jpeg, 119k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Anne Cayol-Gerin, « Orner et transmettre, une approche du cas dauphinois », In Situ [En ligne], 48 | 2022, mis en ligne le 25 août 2022, consulté le 18 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/36270 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/insitu.36270
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