Roma in tabula
Résumés
L’application Roma in tabula permet à chacun de visualiser sur périphérique mobile ou sur ordinateur une partie des travaux de l’université de Caen Normandie sur la restitution virtuelle de Rome au IVe siècle apr. J.-C. Les modèles restitués sont le fruit d’une analyse la plus exhaustive possible des sources anciennes (textuelles, archéologiques, iconographiques). Les choix de restitution sont explicités à travers des documentations (sources primaires, interprétations, bibliographie…) pour que l’utilisateur puisse lui-même juger du degré de fiabilité de l’image. Il ne s’agit en aucun cas d’imposer une vérité mais de proposer des hypothèses, valables à un instant T de la recherche et destinées à évoluer.
La réalité virtuelle permet une mise en lumière originale, ludique et pédagogique des résultats académiques traditionnels. Dans le cas précis des monuments de Rome, l’utilisation de la réalité augmentée et de la visite virtuelle interactive permet une double appréhension des édifices modélisés. En réalité augmentée, il est possible de voir s’élever à travers la caméra du support mobile le bâtiment dans son état antique (élévation et textures). La visite virtuelle interactive offre une immersion à taille humaine : le temps de déplacement et l’éclairage sont mesurés pour reproduire la réalité disparue.
L’article présente le cadre scientifique dans lequel l’application a été développée, montre les enjeux de la mise à disposition de modèles interactifs et documentés à des publics pluriels et se focalise sur les technologies 3D mises en œuvre.
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Mots-clés :
Rome antique, architecture, antiquité, reconstitution 3D, réalité virtuelle, réalité augmentéeKeywords:
Ancient Rome, architecture, antique, 3D reconstitution, virtual reality, augmented realityPlan
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- 1 MADELEINE Sophie & FLEURY Philippe, « Le “Plan de Rome” de Paul Bigot à l’université de Caen et son (...)
- 2 Pour un état des lieux général sur l’utilisation de l’image de synthèse dans les espaces de médiati (...)
- 3 http://www.unicaen.fr/cireve/
1Mettre la Rome antique sur tablette (in tabula) : dans quel but et avec quelle technologie ? Tel est l’objet de cet article. Il faut d’abord préciser que le mot « tablette » ne concerne à proprement parler que la première version de l’application Roma in tabula. Le concept général est de mettre à disposition d’un large public la maquette virtuelle de la Rome antique développée à l’université de Caen depuis 19941. Jusqu’en 2017, la maquette virtuelle n’était accessible « en direct » que dans les locaux du centre de recherche normand. Elle l’est à présent non seulement sur ce que l’on appelle des « tablettes tactiles », « tablettes électroniques » (ou simplement « tablettes ») mais aussi sur smartphones ou sur ordinateurs personnels. Le « Plan de Rome virtuel » de Caen utilise la réalité virtuelle au sens propre, c’est-à-dire que le modèle est « visitable » en totale interactivité et en temps réel. Jusqu’à ces dernières années, la réalité virtuelle était surtout connue du grand public par le jeu vidéo. Depuis quelque temps, elle touche les amateurs du patrimoine par l’intermédiaire des musées qui font appel à cette technologie pour renforcer leur attractivité2. L’université de Caen Normandie, pour sa part, utilise depuis longtemps la réalité virtuelle à des fins scientifiques et pédagogiques. Le domaine patrimonial, représenté par le projet « Plan de Rome virtuel » est à la fois le point de départ de cette intrusion du virtuel dans la recherche universitaire et un des secteurs centraux du Centre interdisciplinaire de réalité virtuelle caennais (Cireve)3. Nous exposons ici pourquoi nous avons choisi d’ouvrir cette recherche aux publics pluriels et comment l’application Roma in tabula permet d’accéder, au moins partiellement, au plan de Rome virtuel.
Le contexte de la production et les enjeux scientifiques
- 4 http://www.unicaen.fr/cireve/rome
2Depuis 1994, l’équipe « Plan de Rome » de l’université de Caen Normandie travaille à la création d’un modèle virtuel interactif complet de la Rome du IVe siècle apr. J.-C.4 Si les cadres institutionnels ont évolué, jusqu’à l’état actuel où les réflexions sont menées au sein de l’Équipe de recherche sur les langues, les imaginaires et les sociétés (ERLIS - EA 4254), l’objectif est toujours resté le même au cours de ces vingt dernières années : circuler dans une ville entièrement restituée, à l’échelle 1, en intégrant un accès dynamique à la base de données justifiant les choix de restitution. Les plus sceptiques n’ont pas manqué de douter, en 1994 et durant quelques années ensuite, du succès d’une telle entreprise. Ils argumentaient sur l’immensité du travail scientifique à réaliser en amont de la production 3D et sur le fait qu’il n’existait pas de solution technique pour créer un tel modèle.
3Philippe Fleury, alors spécialiste du traitement automatique des textes latins par ordinateur, formé à Liège à ce qui se faisait de mieux pour appréhender de manière efficace un lexique complexe, a relevé le défi. Il a parié sur une évolution rapide de l’informatique, considérant que les progrès réalisés sur l’étude lemmatisée des textes anciens par ordinateur ouvraient la voie à des champs d’étude encore inexploités. Il était alors très audacieux de croire que l’on pouvait passer de l’analyse de séries de caractères à la création d’images générées pour un modèle 3D interactif. Il faut en effet rappeler que l’informatique ne permettait guère à l’époque que de produire des images fixes et quelques minutes de vidéo précalculées. L’application Roma in tabula, inédite dans sa forme et par les enjeux qu’elle porte, est le fruit de cette audace, et l’histoire est finalement cyclique, même à l’échelle d’une vingtaine d’années. En 1994, les latinistes dirigés par Louis Callebat, secondé par Philippe Fleury, alors assistant chargé des questions informatiques, étaient parmi les trois plus grands « consommateurs » du centre de calcul de l’université de Caen. En 2006, Philippe Fleury, devenu professeur, prenait la direction du Cireve, et en 2017 commandait les plus grosses stations de calcul du campus pour effectuer, à la demande des géographes, des simulations d’élévation du niveau des eaux dans des villes côtières de Normandie restituées en réalité virtuelle… Caen est aujourd’hui un centre d’attraction pour l’utilisation de la réalité virtuelle appliquée à la recherche. Elle possède la plus grande salle de réalité virtuelle de France en milieu universitaire, la seule de cette taille à être équipée d’un tapis de marche Grail à double bande de roulement, monté sur une plate-forme de forces. L’originalité est que tout est parti du projet de restitution de la Rome antique.
4Dès le départ, Philippe Fleury s’est entouré de spécialistes de l’Antiquité. Le premier comité scientifique chargé d’évaluer la faisabilité du projet était constitué de Filippo Coarelli, grand spécialiste de topographie romaine, de Claude Nicolet, de Jean-Pierre Adam, spécialiste de la construction romaine, de François Hinard et Manuel Royo, déjà historiens de renom, et de bien d’autres personnalités encore, qui n’ont cessé d’apporter leur aide à chaque fois qu’un nouveau modèle était créé. Mais pour que l’alchimie soit possible, il était capital de s’entourer d’informaticiens, de spécialistes de l’audiovisuel qui assureraient la production multimédia. Le projet fut donc au début codirigé par le directeur du centre informatique de l’université de Caen, Gérard Jean-François. C’est dans cette logique pluridisciplinaire que l’équipe a continué d’évoluer, comptant aujourd’hui des ingénieurs infographistes pour la création des modèles 3D, un ingénieur en développement d’applications pour le volet informatique / programmation et un ingénieur en analyse de sources anciennes chargé de la production des données scientifiques. Nombre d’étudiants en troisième cycle s’agrègent régulièrement au projet et la dixième thèse intégrée à ce travail d’équipe a été soutenue fin 2017.
- 5 ROYO Manuel, Rome et l’architecte. Conception et esthétique du plan-relief de Paul Bigot, Caen, Pre (...)
- 6 http://www.mediatheque-patrimoine.culture.gouv.fr/pages/bases/palissy_cible.html
5Pourquoi donc cette équipe, atypique dans sa constitution même, s’est-elle lancée dans un projet aussi ambitieux ? Pourquoi restituer la Rome antique à l’université de Caen Normandie ? 1994 est l’année où le plan relief de Paul Bigot5 a été exposé au centre de la Maison de la recherche en sciences humaines. Il s’agit d’un envoi de Rome, créé entre 1900 et 1940 à la Villa Médicis puis à Paris et qui représente déjà une forme de 3D, même si le matériau choisi pour la création de la maquette la fige à une époque donnée, le IVe siècle apr. J.-C. Si la maquette de Bigot6, de plus de 70 m2, est un outil extraordinaire pour présenter au grand public ou à des élèves et étudiants ce qu’était la topographie de Rome pendant l’Antiquité tardive, elle présente trois difficultés.
- 7 LBERATI Anna Maria, « La rappresentazione di Roma antica nel plastico di Gismondi del Museo della c (...)
6La première est son échelle 1:400, qui rend difficile l’appréhension de la ville. Outre l’impossibilité d’entrer dans les monuments, un effort intellectuel est nécessaire pour visualiser les différents secteurs à l’échelle 1. Il faut également passer outre la teinte jaune orangée, par ailleurs esthétique, que Paul Bigot a choisie pour vernir le plâtre. L’effet est saisissant pour une vue globale de Rome et il remplit exactement l’objectif fixé par Bigot, à savoir visualiser une ville méditerranéenne au soleil couchant, lorsque toutes les couleurs se mêlent dans des tons chauds, mais en même temps, il gomme la polychromie des marbres dont nous savons qu’elle participait à la perception de la grandeur de Rome. La dernière difficulté, qui est certainement la plus importante, est que la maquette est classée monument historique au titre d’objet (1978) et qu’elle ne peut donc pas être modifiée. C’est certes une chance car elle cristallise l’état des connaissances sur Rome entre les deux guerres, époque des dernières mises à jour effectuées par Paul Bigot, mais elle fige aussi l’état des connaissances à un moment donné de l’histoire7. Sur certains points, la maquette est donc obsolète.
- 8 FLEURY Philippe, « Le plan de Rome de Paul Bigot. De la maquette en plâtre de Paul Bigot à la maque (...)
- 9 Fleury Philippe, MADELEINE Sophie & LEFÈVRE Nicolas, « Forum romanum: a 3D model for educational pu (...)
7Pour « corriger » ces difficultés, l’équipe caennaise a donc décidé de présenter, à côté de la maquette de Bigot, un modèle virtuel de la même ville à la même époque, mais qui serait à l’échelle 1, texturé et à jour des dernières découvertes ou réinterprétations des sources8. Dès le départ, la maquette virtuelle a été conçue pour être interactive, en lien avec la base de données présentant les sources primaires et leur interprétation. Il était également question dès l’origine du projet de rendre ce travail accessible gratuitement à tous9. C’est à ce dernier objectif de partage de la production que répond – pour la première fois à une si vaste échelle – l’application Roma in tabula.
L’utilisation des technologies 3D comme moyens de médiation scientifique et culturelle à disposition de publics pluriels
8Les technologies 3D issues de la réalité virtuelle permettent une mise en lumière originale, ludique et pédagogique des résultats académiques traditionnels. L’emploi de la 3D temps réel offre un grand niveau d’interactivité (immersion, animation…). La diffusion des travaux de recherche au format numérique (applications interactives, panoramiques 360°, rendus 3D, etc.) est aujourd’hui envisageable par la démocratisation des smartphones et des tablettes numériques, et par le meilleur rapport performances / prix des ordinateurs personnels.
- 10 Les applications sont disponibles en téléchargement gratuit sur le site internet du Plan de Rome : (...)
9L’utilisation de deux modes d’interaction et de visualisation au sein de la même application permet d’aborder de deux manières différentes les édifices romains restitués. L’élévation 3D en réalité augmentée offre un aperçu global et une vision élargie du monument, contrairement à la visite virtuelle interactive qui propose une immersion naturelle et réaliste. Dans sa version mobile, Roma in tabula regroupe les deux types de visualisation à travers huit monuments restitués (la curie julienne, le temple de Castor et Pollux, la basilique de Constantin, la basilique julienne, la basilique émilienne, le forum de la Paix, le mausolée d’Auguste et le mausolée d’Hadrien). L’application mobile, disponible sur périphériques Android, et la version disponible sur PC et Macintosh10 favorisent le partage des recherches du Plan de Rome à destination de publics pluriels.
Figure 1
Visualisation en réalité augmentée de la curie julienne dans son état du IVe siècle apr. J.-C.
Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ».
L’utilisation de la réalité augmentée
- 11 AZUMA Ronald, « A survey of augmented reality », Presence. Teleoperators and virtual environments, (...)
10La réalité augmentée (ou « AR » pour « augmented reality ») est une notion souvent abstraite aux yeux du grand public. Pour en comprendre le principe, nous pouvons nous appuyer sur la définition de Ronald Azuma, chercheur à l’université de Caroline du Nord (États-Unis) qui définit la réalité augmentée comme « la combinaison du réel et du virtuel, de manière interactive (en temps réel) et en respectant la perspective11 ». Pour simplifier la définition, il déduit trois règles à respecter pour qu’un modèle soit visible en réalité augmentée :
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combiner le réel et le virtuel (captation de l’environnement réel avec superposition d’éléments 2D ou 3D),
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interagir en temps réel,
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utiliser l’environnement en trois dimensions (notion de perspective).
- 12 Il s’agit de stratégies d’action culturelle centrées sur les situations d’échange et de rencontre e (...)
11Depuis quelques années, la réalité augmentée se démocratise et les domaines d’application sont de plus en plus variés : industrie, jeux vidéo, médecine, culture, navigation, etc. Roma in tabula se veut être une application de médiation culturelle12 et scientifique utilisant la réalité augmentée pour restituer virtuellement un bâtiment disparu au-dessus de son plan au sol [fig. 2]. C’est ce que l’on appelle une « détection par marqueur image ». Un marqueur est une image ou une illustration en deux dimensions servant de déclencheur et de point de repère pour le bon positionnement du modèle 3D. Pour assurer une bonne détection, il convient de prendre quelques précautions : les teintes doivent être variées et l’image doit à la fois être contrastée et présenter des détails.
Figure 2
Double page du livret Roma in tabula.
Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ».
- 13 https://www.unicaen.fr/cireve/rome/pdf/FlyerRomaInTabula.pdf
12Pour le grand public, cette technologie permet d’obtenir un aperçu global du monument disparu et de l’observer sous tous ses angles. Les détails architecturaux invisibles lors de l’immersion à échelle humaine peuvent ainsi être observés [fig. 1]. Des élèves pourront par exemple devenir acteurs de leurs découvertes en choisissant différents points de vue du bâtiment. Les plans permettant l’augmentation 3D du monument sont regroupés dans un livret disponible gratuitement sur le site internet du Plan de Rome13. Comme le montre la fig. 2, une double page est attribuée à chaque édifice :
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sur la première page, sont mentionnés la dénomination du lieu et son plan au sol ;
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sur la deuxième page, un paragraphe descriptif, un plan 2D servant à localiser le bâtiment dans la ville et une photo de son état actuel sont disponibles.
13Les pastilles d’informations présentes à de multiples endroits sur le modèle permettent un accès aux documentations utilisées par les chercheurs pour donner une hypothèse de restitution. Ces documentations fournissent au public le cheminement d’un travail de recherche, partant des sources anciennes jusqu’à l’élaboration d’un modèle 3D. Le menu permet de basculer à tout moment entre le modèle en réalité augmentée et celui en réalité virtuelle.
La visite virtuelle 3D interactive
- 14 FUCHS Philippe & Moreau Guillaume, Le Traité de la réalité virtuelle, vol. 1, Fondements et interfa (...)
14Avant de parler de visite virtuelle 3D interactive, il semble pertinent de définir ce qu’est la réalité virtuelle. La réalité virtuelle (ou « VR » pour « virtual reality ») est un « domaine scientifique et technique exploitant l’informatique et des interfaces comportementales en vue de simuler dans un monde virtuel le comportement d’entités 3D, qui sont en interaction en temps réel entre elles et avec un ou des utilisateurs en immersion pseudo-naturelle par l’intermédiaire de canaux sensori-moteurs14 ».
- 15 Le lancer de rayon, en anglais « raytracing », est une technique de calcul d’optique par ordinateur (...)
- 16 Les algorithmes d’illumination globale (dit souvent « GI » pour « global illumination ») – utilisés (...)
- 17 Le choix s’est porté sur le jour du solstice d’été, où le soleil éclaire la capitale de son point l (...)
15La création de l’environnement propice à l’exploration de l’utilisateur doit se faire selon les règles et les exigences de la 3D temps réel. La 3D temps réel s’oppose à la 3D précalculée par son rendu de données immédiat. Pour gagner en fluidité lors de l’immersion, la modélisation nécessite la création d’un maillage adapté : le nombre de triangles doit être en adéquation avec la carte graphique utilisée. Le calcul des éclairages réalistes nécessite, dans la plupart des cas, des algorithmes coûteux en ressources informatiques tels le raytracing15 et l’illumination globale16. C’est pourquoi, pour optimiser la scène, il convient de réaliser un précalcul des éclairages appelé aussi « lightmapping ». Pour simuler l’illumination de l’environnement et la position du soleil, la date retenue pour Roma in tabula est le 21 juin, plus précisément à 15h17.
- 18 L’avatar virtuel est restitué avec une vue à la première personne (ou vue subjective). Cela désigne (...)
- 19 Une étude menée sur des ossements retrouvés à Pompéi montre que l’homme romain moyen mesurait, au i(...)
- 20 Le joystick de gauche permet le déplacement de l’utilisateur, celui de droite son orientation.
- 21 Le gyroscope est un instrument fondé sur le principe de la conservation du mouvement angulaire. Il (...)
16Si la réalité augmentée permet d’obtenir un aperçu global du bâtiment disparu, la visite virtuelle 3D interactive immerge l’utilisateur à échelle humaine, et lui propose de découvrir l’urbanisme et l’architecture de Rome au IVe siècle apr. J.-C. Pour naviguer au sein du monument restitué par les chercheurs, un avatar virtuel18 de 1,65 m19 est dirigé à l’aide de deux joysticks virtuels20 [fig. 3]. L’utilisateur devient alors maître de sa visite. Lorsqu’un périphérique est compatible, la navigation peut être réalisée à l’aide du gyroscope21 en orientant la tablette ou le smartphone dans la direction voulue [fig. 4]. Comme dans la réalité, le visiteur virtuel est soumis aux collisions et à la gravité : le sentiment d’immersion est alors augmenté. À l’instar du mode « réalité augmentée », l’accès aux documentations synthétisant les sources primaires et leur interprétation est présent à divers endroits du modèle.
Figure 3
Visite virtuelle interactive de la curie julienne à l’aide de deux joysticks.
Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ».
Figure 4
Navigation à l’aide du gyroscope.
Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ».
Vers une immersion totale et réaliste ?
17La visite virtuelle proposée n’est qu’au début de son développement. En effet, même si le sentiment d’immersion est important, on ne peut s’empêcher de remarquer, au cours de l’expérience, l’absence de vie et d’ambiances sonores au sein du modèle. Les ingénieurs du Cireve effectuent des tests d’intégration de personnages et de mouvements de foule afin de restituer la vie dans les rues de Rome en 320 apr. J.-C. Ce sera l’objet d’une prochaine évolution du modèle numérique.
- 22 NICOLLE Jerôme, « Les automates dans l’Antiquité : sources, fonction et restitution virtuelle », th (...)
- 23 HMD est l’acronyme de « Head Mounted Display », il s’agit d’un casque immersif de type HTC Vive ou (...)
18L’interaction avec le modèle, autre axe important de recherche, n’est pour l’instant que limitée puisque réservée à l’accès aux documentations justifiant les choix de restitution. Un travail de thèse est entrepris pour fournir une méthode de reconnaissance de gestes qui permettra à l’utilisateur d’être immergé et de naviguer au sein du modèle 3D pour interagir avec son environnement de manière naturelle et fluide22. Armé d’un HMD23 et d’une combinaison de capture de mouvement, le visiteur aura la possibilité de réaliser certains gestes courants du quotidien tels qu’ouvrir une porte, prendre un objet, s’asseoir sur une chaise, etc. L’intégration de tous ces éléments dans la maquette virtuelle aura pour conséquence de procurer une immersion plus importante et de permettre aux chercheurs d’émettre de nouvelles hypothèses de restitution qu’il était jusqu’alors impossible d’expérimenter.
Conclusion
19Vingt-trois ans après le lancement du projet « Plan de Rome », Roma in tabula marque donc le début d’une nouvelle expérience : mettre le travail de l’équipe à la portée de tous au moyen des outils numériques. Nous le souhaitions dès le début du projet, le travail assidu de l’équipe pendant toutes ces années et l’évolution des techniques nous permettent désormais de commencer à réaliser ce rêve. Nous disons bien « commencer » car l’application est dans une étape expérimentale : nous attendons les retours des utilisateurs pour l’améliorer et compléter son contenu.
Notes
1 MADELEINE Sophie & FLEURY Philippe, « Le “Plan de Rome” de Paul Bigot à l’université de Caen et son double virtuel : de l’objet patrimonial à l’outil scientifique », In Situ. Revue des patrimoines, n° 17, « Les patrimoines de l’enseignement supérieur », 2011 [en ligne], http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/840.
2 Pour un état des lieux général sur l’utilisation de l’image de synthèse dans les espaces de médiation, voir le point réalisé en 2015 par FÈVRES [DE BIDERAN] Jessica, « Infographie, images de synthèse et patrimoine monumental : espace de représentation, espace de médiation », thèse soutenue en 2012 sous la direction de Philippe Araguas à Bordeaux-III [en ligne], https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00751452/document. Pour quelques exemples récents d’implantation de la réalité virtuelle dans les musées, voir : https://www.cnc.fr/creation-numerique/actualites/la-realite-virtuelle-au-service-de-la-culture-et-du-patrimoine_826196.
3 http://www.unicaen.fr/cireve/
4 http://www.unicaen.fr/cireve/rome
5 ROYO Manuel, Rome et l’architecte. Conception et esthétique du plan-relief de Paul Bigot, Caen, Presses universitaires de Caen, 2006.
6 http://www.mediatheque-patrimoine.culture.gouv.fr/pages/bases/palissy_cible.html
7 LBERATI Anna Maria, « La rappresentazione di Roma antica nel plastico di Gismondi del Museo della civilità romana di Roma », in LECOCQ Françoise (dir.), Rome an 2000 : ville, maquette et modèle virtuel, Caen, Presses universitaires de Caen, coll. « Cahiers de la Maison de la recherche en sciences humaines », 2003, p. 243-252.
8 FLEURY Philippe, « Le plan de Rome de Paul Bigot. De la maquette en plâtre de Paul Bigot à la maquette virtuelle de l’université de Caen », Civiltà Romana, n° 1, 2014, p. 109-124.
9 Fleury Philippe, MADELEINE Sophie & LEFÈVRE Nicolas, « Forum romanum: a 3D model for educational purposes in self-service », in GILIGNY François, DJINDJIAN François, COSTA Laurent, MOSCATI Paola & ROBERT Sandrine (dir.), 42th Annual Conference on computer applications and quantitative methods in archaeology (CAA), Paris, 22-25 avril 2014, Oxford, Archeopress, 2015, p. 569-574.
10 Les applications sont disponibles en téléchargement gratuit sur le site internet du Plan de Rome : https://www.unicaen.fr/cireve/rome/
11 AZUMA Ronald, « A survey of augmented reality », Presence. Teleoperators and virtual environments, vol. 6, n° 4, 1997, p. 355-385.
12 Il s’agit de stratégies d’action culturelle centrées sur les situations d’échange et de rencontre entre les citoyens et les milieux culturels et artistiques.
13 https://www.unicaen.fr/cireve/rome/pdf/FlyerRomaInTabula.pdf
14 FUCHS Philippe & Moreau Guillaume, Le Traité de la réalité virtuelle, vol. 1, Fondements et interfaces comportementales, Paris, Presses de l’École des mines de Paris, 2003, p. 8.
15 Le lancer de rayon, en anglais « raytracing », est une technique de calcul d’optique par ordinateur, utilisée pour le rendu en synthèse d’image. Cette technique reproduit les phénomènes physiques que sont la réfraction et la réflexion.
16 Les algorithmes d’illumination globale (dit souvent « GI » pour « global illumination ») – utilisés en synthèse d’image 3D – sont ceux qui déterminent la lumière tombant sur une surface.
17 Le choix s’est porté sur le jour du solstice d’été, où le soleil éclaire la capitale de son point le plus haut.
18 L’avatar virtuel est restitué avec une vue à la première personne (ou vue subjective). Cela désigne, dans le domaine de la réalité virtuelle, la façon d’apercevoir l’environnement 3D à travers les yeux du personnage et le fait de donner au joueur une impression d’immersion.
19 Une étude menée sur des ossements retrouvés à Pompéi montre que l’homme romain moyen mesurait, au ier siècle apr. J.-C., environ 1,64 m. Voir LAZER Estelle, Resurrecting Pompeii, Londres, Routledge, 2009, p. 155-156.
20 Le joystick de gauche permet le déplacement de l’utilisateur, celui de droite son orientation.
21 Le gyroscope est un instrument fondé sur le principe de la conservation du mouvement angulaire. Il donne la position sur trois axes par rapport à un référentiel inerte.
22 NICOLLE Jerôme, « Les automates dans l’Antiquité : sources, fonction et restitution virtuelle », thèse en préparation sous la direction de Philippe Fleury (professeur de latin) et d’Olivier Lezoray (professeur d’informatique) à l’université de Caen Normandie.
23 HMD est l’acronyme de « Head Mounted Display », il s’agit d’un casque immersif de type HTC Vive ou Oculus Rift.
Haut de pageTable des illustrations
Titre | Figure 1 |
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Légende | Visualisation en réalité augmentée de la curie julienne dans son état du IVe siècle apr. J.-C. |
Crédits | Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ». |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/27392/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,1M |
Titre | Figure 2 |
Légende | Double page du livret Roma in tabula. |
Crédits | Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ». |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/27392/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,2M |
Titre | Figure 3 |
Légende | Visite virtuelle interactive de la curie julienne à l’aide de deux joysticks. |
Crédits | Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ». |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/27392/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,2M |
Titre | Figure 4 |
Légende | Navigation à l’aide du gyroscope. |
Crédits | Cliché : Université de Caen Normandie, Cireve, « Plan de Rome ». |
URL | http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/docannexe/image/27392/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 700k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Sophie Madeleine et Jérôme Nicolle, « Roma in tabula », In Situ [En ligne], 42 | 2020, mis en ligne le 12 juin 2020, consulté le 21 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/insitu/27392 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/insitu.27392
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