Atlas des créatures de Taïwan
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Présentation du texte et de l’auteur
1Spécialiste de la Chine classique et de littérature populaire, traducteur et auteur, Jacques Pimpaneau possédait une profonde sensibilité pour les mythes populaires, les religions et le surnaturel. Il s’employa surtout, dans ses nombreux ouvrages, à faire découvrir la civilisation chinoise et son imaginaire. En hommage à Jacques Pimpaneau, nous avons décidé de traduire des extraits d’un ouvrage sur le folklore taïwanais, mélangeant mythes et légendes de Formose : l'Atlas des créatures de Taïwan, récit d’un tour de l’île à la recherche d’êtres et de lieux fantastiques (Yaoguai Taiwan ditu:huandao souyao tanqi lu 妖怪臺灣地圖:環島搜妖探奇錄), écrit par Ho Ching-yao 何敬堯 (1985-), publié en 2019.
- 1 Les êtres fantastiques de Taïwan dans le Cloud (Taiwan yaoguai yunduan shu 臺灣妖怪雲端書) : un livre élec (...)
2Les esprits, monstres et autres créatures sont au cœur de l’imaginaire des pays asiatiques. À Taïwan, le fantastique dans l’art et la littérature est le fruit d’influences culturelles multiples : japonaise, à travers entre autres les yōkai, bouddhiste et taoïste, mais aussi austronésienne par les traditions orales des peuples autochtones de l’île. Le yaoguai 妖怪est l’appellation utilisée en chinois pour désigner ces êtres fantastiques, abondamment présents dans la littérature et faisant également l’objet de multiples travaux universitaires. Et qui de mieux pour une introduction à la littérature du fantastique taïwanais que l’écrivain Ho Ching-yao, qui a consacré de multiples ouvrages au bestiaire fantastique de l’île ? En 2014, il publie par exemple un recueil de nouvelles sur les monstres du port (fictif) abandonné de Thô͘-kat-khut, Le port des illusions (Huan zhi gang 幻之港). En 2017, il présente une première compilation sur les êtres fantastiques et les récits qui les entourent, intitulée Les êtres fantastiques de Taïwan (Yaoguai Taiwan 妖怪臺灣), qui s’appuie sur plus d’une centaine de textes historiques du folklore autochtone et han. Dans la continuité du présent ouvrage, qui fait l’objet de notre traduction, ses derniers projets en date s’inscrivent toujours dans l’optique d’une mise en lumière du folklore taïwanais, et contribuent à nourrir un dessein qui l’anime depuis longtemps, à savoir bâtir une base de données des créatures fantastiques de Taïwan. L’objectif est de redonner vie à des êtres prisonniers dans les pages des textes anciens, afin qu’ils fassent à nouveau partie de la culture populaire. En accompagnement de son dernier ouvrage sorti le 1er juillet 2023, Cent portraits extraordinaires d’êtres fantastiques de Taïwan (Taiwan yaoguai baibao tu 臺灣妖怪百寶圖), il met gratuitement à la disposition des lecteurs l’ensemble de ses données de recherches, sur différents supports associant documents écrits, cartographie et base de données en ligne1.
3Selon Ho Ching-yao, il y a beaucoup à apprendre en étudiant l’imaginaire et l’Au-delà, et les histoires portées par l’imaginaire des gens ont autant de valeur que les faits historiques pour comprendre une civilisation. Il se sert de ces êtres comme autant d’indices tangibles permettant d’aborder le surnaturel d’une manière qui parle au public, à travers des illustrations qui invoquent une image concrète de ces mythes. Son Atlas des créatures de Taïwan présente une sélection de soixante des plus étranges phénomènes et lieux fantastiques, issus de ses recherches de terrain aux quatre coins de l’île, à suivre les traces de ces créatures et à recueillir les témoignages de la population locale. Nous en proposons une traduction inédite de cinq passages, correspondant à autant d’êtres et de lieux fantastiques, choisis dans la volonté d’offrir un aperçu de l’importance du surnaturel et de l’occulte à Taïwan : le démon Mo-sin-a et ses facéties, le pangolin doré, la forêt hantée par Sœur Lintou, âme d’une veuve trompée, le géant Alikakay, et les Anito, ces esprits de l’île des Orchidées parfois bienveillants, parfois mauvais. Tous ces êtres fantastiques entretiennent un lien fort avec l’île, ses grottes mystérieuses, ses arbres menaçants, sa faune énigmatique. Ils sont profondément ancrés dans l’environnement naturel qui a inspiré l’imaginaire des populations locales. Certains d’entre eux, forts d’une notoriété encore tangible, sont toujours connus aujourd’hui grâce aux cérémonies et traditions qu’ils ont inspirées. D’autres sont au contraire tombés dans l’oubli. Notre ambition est de porter à l’attention des lecteurs français la richesse de la culture taïwanaise à travers ses récits fantastiques, à la fois familiers et étranges, perpétués et transformés par le temps et les populations qui s’en sont appropriés. Grâce à une narration mêlant le témoignage historique et le conte, cet Atlas des créatures de Taïwan convie le public à découvrir les récits folkloriques autour des créatures fantastiques de Taïwan par le plaisir de la lecture.
Avant-propos sur la traduction
4Ce travail de traduction collective a réuni cinq étudiantes en master Études chinoises à l’Université Jean Moulin Lyon 3, chacune ayant pris en charge un extrait, guidée par sa curiosité intellectuelle et son intérêt pour une facette particulière du folklore taïwanais. La mise en commun de nos affinités respectives avec les langues source et cible, de nos interprétations et de nos sensibilités propres, a permis d’aboutir à un tout que nous espérons cohérent. Nous avons porté une attention particulière à l’homogénéité du ton et du registre, et veillé à la précision du vocabulaire de sorte que les noms propres ainsi que les termes récurrents soient toujours traduits de manière uniforme. La traduction des noms propres a été un point particulièrement délicat, en l’absence de désignation officielle en français. Dans certains cas, il existait des traductions anglaises, utilisant la transcription en pinyin, mais de manière générale, il n’y avait tout simplement pas de traduction. Nous avons donc décidé dans la plupart des cas de les transcrire phonétiquement pour éviter les noms trop longs et confus en français, comme « Litoudian » 犁頭店, que l’on peut traduire littéralement « boutique de soc », mais qui désigne en réalité un quartier de Taichung ; le traduire mot à mot pourrait donc induire le lecteur en erreur. Nous avons fait une exception pour les noms les plus imagés et sans ambiguïté, comme « Lanyu » 蘭嶼que nous avons traduit « l’île des Orchidées ». Par souci de cohérence, nous avons choisi d’utiliser le système Wade-Giles, car c’est le système de translittération officiel utilisé à Taïwan. Nous avons aussi souhaité indiquer l’écriture en chinois de certains noms propres dans des notes de bas de page afin que les lecteurs sinophones qui cherchent à en apprendre plus ou à retrouver certains lieux puissent facilement y avoir accès, sans que des caractères présents directement dans le texte rendent la lecture moins fluide pour les lecteurs non sinophones.
- 2 Pour approfondir sur le concept de fantôme en chinois, on pourra consulter l'ouvrage de Marie Laure (...)
5Il a souvent été compliqué de trouver des termes exacts pour désigner les êtres fantastiques taïwanais, car beaucoup des mots français qu’on imagine, au premier abord, équivalents sont connotés ou font appel à un imaginaire différent : les démons mentionnés dans le texte n’ont pas d’ailes ni de cornes, les fantômes ne sont pas nécessairement translucides et impalpables, les esprits ne sont pas toujours immatériels2. Certaines nuances des termes chinois sont absentes du vocabulaire français : guiling 鬼靈, emo 惡魔 et mogui 魔鬼 ont par exemple été difficiles à distinguer en français, leur sens étant très proche, et nous avons choisi de les traduire respectivement « mauvais esprit », « diable » et « démon ». Nous avons également dû adapter la traduction du terme yaoguai 妖怪 en fonction du contexte : nous avons opté la plupart du temps pour « être fantastique », parfois pour « créature » afin d’éviter les répétitions, et pour « démon » lorsque cela correspondait à ce qui était décrit.
6Nous tenons à remercier Gwennaël Gaffric, traducteur littéraire et maître de conférences à l’Université Jean Moulin Lyon 3, pour sa participation lors du choix des extraits, de la relecture et de la communication avec l’auteur, ainsi que pour ses enseignements et ses encouragements, car sans lui nous n’aurions pas pu proposer cette traduction.
Nouveau Taipei – Sur l’ancienne route de Chingtung : la grotte du démon Mo-sin-a
Études des sources
- 3 Yaoguai 妖怪 est le terme générique en chinois pour désigner les êtres fantastiques (démons, esprits (...)
7Le Mo-sin-a, célèbre démon taïwanais3, est présent depuis longtemps dans le folklore. Les humains s’aventurant dans les montagnes boisées sont facilement la cible des espiègleries de ce démon. Ils s’égarent et sont ensuite « entraînés » vers des endroits inconnus. Les disparus sont retrouvés avec de la bouse de vache, de la terre, des sauterelles et d’autres saletés plein la bouche... En ce qui concerne l’apparence du Mo-sin-a, les personnes qui l’ont rencontré ont toutes un avis différent. Certains disent qu’il ressemble à un petit singe, d’autres qu’il est de couleur bleu-vert et qu’il porte parfois un manteau et un chapeau rouge. Les avis s’accordent toutefois pour dire que le Mo-sin-a est de petite taille.
8Bien qu’il ne s’agisse là que d’un conte populaire, comme les médias évoquent souvent le Mo-sin-a dès qu’ils parlent d’alpinistes disparus ou égarés, sa réputation n’a fait que grandir. Grâce aux actualités et à Internet, le Mo-sin-a est devenu l’incarnation de l’esprit de la montagne, aujourd’hui connu de tous les Taïwanais.
9Pour ce qui est des recherches académiques sur le Mo-sin-a, le livre Mo-sin-a : une imagination anthropologique (2014), co-écrit par Lin Mei-jung et Li Chia-kai, reprend la thèse de cette dernière intitulée « Une étude sur le folklore du Mo-sin-a à Taïwan » (2010). Ces deux travaux sont le fruit de plusieurs années de recherches sur le terrain à passer au peigne fin des textes anciens pour trouver la moindre trace de l’origine de la légende du Mo-sin-a. Dans son enquête réalisée pour le Taiwan Daily News, Li Chia-kai évoque plusieurs cas d’attaques de démons recensées depuis 1899.
10À quoi ressemble le Mo-sin-a ? Quelle est son origine ? Depuis longtemps, les avis divergent concernant son histoire et il est difficile de démêler le vrai du faux. Toutefois, Lin Mei-jung et Li Chia-kai ont analysé en détail les récits concernant ce démon, faisant finalement de cet être fantastique un objet de recherche académique. Leurs enquêtes ont établi un modèle important pour l’étude des êtres fantastiques à Taïwan.
11Bien que les allées et venues du Mo-sin-a soient imprévisibles, et qu’il soit impossible de le voir à souhait, beaucoup de lieux lui sont pourtant associés. D’après le livre Mo-sin-a : une imagination anthropologique, il existe plusieurs lieux à Taipei, à Nouveau Taipei et à Tainan en lien avec le Mo-sin-a. Le plus célèbre d’entre eux est la « Grotte du Mo-sin-a », sur l’ancienne route de Chingtung à Pinghsi.
12J’ai longtemps admiré cette grotte sans jamais la visiter. Je pensais que celle-ci était située loin dans la montagne et qu’elle était donc difficile d’accès. Mais durant l’une de mes promenades, j’ai découvert que la voie d’escalade pour accéder à la grotte n’était pas aussi difficile que je l’imaginais.
13Sur la route qui y mène, il y a des panneaux d’information, un escalier en pierre et des ponts qu’on peut traverser. En partant de la gare de Chingtung et après avoir emprunté le sentier de montagne de la colline de Chingtung, il suffit de marcher vingt à trente minutes pour atteindre la destination. Cependant, l’ancienne route est assez reculée. Le sentier, boueux et glissant, est infesté de serpents et d’insectes. Pour plus de sécurité, il est recommandé de bien préparer son matériel avant d’escalader la montagne.
14En réalité, il y a deux grottes du Mo-sin-a sur l’ancienne route de Chingtung : elles sont d’ailleurs proches l’une de l’autre, situées aux extrémités d’un embranchement (que vous rencontrerez une fois passé le début du sentier sur la colline).
15Devant la première grotte, il y a un poteau en bois sur lequel sont inscrits en grand les mots « Grotte du Mo-sin-a ». Devant la deuxième, il n’y a rien de particulier. Seul le panneau d’information à l’embranchement donne la direction jusqu’à cette grotte. Mais étrangement, pour la première grotte, ce panneau d’information n’indique que le mont Sankeng. Toutefois, puisque les deux grottes sont signalées respectivement par un poteau en bois et un panneau d’information, je pense que l’appellation « Grotte du Mo-sin-a » est valide dans les deux cas.
16D’après les recherches de Li Chia-kai, l’origine du nom de la Grotte du Mo-sin-a aurait deux explications possibles : selon la première, un randonneur aurait autrefois passé la nuit dans la grotte. Les habitants au pied de la montagne s’amusaient souvent à raconter qu’il aurait été capturé par le Mo-sin-a, alors qu’en réalité, le randonneur avait dormi paisiblement. C’est en référence à cette anecdote que l’entrée de la grotte aurait été nommée « Grotte du Mo-sin-a ». Selon la deuxième explication, il y aurait souvent à cet endroit un brouillard épais, qui permettrait au Mo-sin-a d’apparaître et de disparaître facilement, ce pourquoi la grotte porterait son nom.
17Quant à l’hypothèse selon laquelle la grotte du Mo-sin-a se serait formée naturellement, elle ne tient pas, car en y regardant de plus près, on peut voir des traces anciennes du passage des hommes. Sans contestation possible, celle-ci est donc artificielle. Autrefois, l’industrie minière était prospère à Pinghsi et l’histoire raconte que la Grotte du Mo-sin-a est un vestige de cette période. Peut-être était-elle traversée par la ligne de chemin de fer qui permettait le passage des wagonnets. Cependant, le trou est assez petit et je ne suis pas sûr que des wagonnets puissent passer aussi facilement. Peut-être que la grotte n’était qu’un petit passage pour traverser la colline ? Il n’y a rien qui puisse confirmer ces allégations. La vérité est encore dissimulée par un épais brouillard.
À la recherche de pistes cachées
18La Grotte du Mo-sin-a est située sur l’ancienne route de Chingtung. Vous pouvez commencer la randonnée à partir de la gare, en empruntant le sentier de montagne de la colline de Chingtung. À l’embranchement, vous trouverez des panneaux d’information en bois, installés par le gouvernement local de Nouveau Taipei. Suivez le panneau indiquant « mont Sankeng » et vous atteindrez la première grotte où sera inscrit sur un poteau en bois « grotte du Mo-sin-a ». En suivant le panneau opposé, vous tomberez sur l’autre grotte.
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Depuis le rocher blanc, on peut apercevoir Chingtung. Sous les ponts coule la rivière Keelung et, sur la rive opposée, le bâtiment à structure en acier est le poste de police de Tianteng. Vous atteindrez la Grotte du Mo-sin-a à condition de passer derrière le poste de police. |
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Le panneau d’information sur l’ancienne route de Chingtung. |
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Sur le chemin, une carte du sentier de randonnée de la pointe des stalagmites indique la Grotte du Mo-sin-a. |
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Au bord du sentier, il n’est pas rare de tomber sur l’entrée de tunnels désaffectés, sans doute des vestiges de l’industrie minière. |
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Des bandes de tissu accrochées par des amateurs de randonnée sont visibles le long du sentier. |
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À l’embranchement, il y a un panneau avec l’inscription « mont Sankeng » et un autre avec l’inscription « Grotte du Mo-sin-a ». Il y a une grotte de chaque côté. |
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La Grotte du Mo-sin-a, indiquée par le panneau d’information, est si profonde qu’on n’en voit pas le fond. |
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En prenant la direction du mont Sankeng, vous pourrez atteindre la grotte où l’inscription « Grotte du Mo-sin-a » est écrite sur un poteau en bois. |
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Un simple coup d’œil, et vous apercevrez la Grotte du Mo-sin-a derrière le poteau en bois. |
Taichung – Le grand événement de Nantun : « Sandales de bois, réveil du pangolin »
Étude des sources
19Le pangolin vit dans les montagnes boisées de Taïwan. C’est un mammifère couvert d’écailles, à la tête fine et pointue, doté d’une longue langue effilée dont il se sert pour piéger et manger les fourmis. Le pangolin de Taïwan est une espèce endémique dont on observe les traces aussi bien à de basses altitudes que sur des sommets de deux mille mètres. Pendant la dynastie des Qing (1644-1911), Zhai Hao évoquait déjà sa timidité naturelle : « Dans les innombrables montagnes de Taïwan, on peut apercevoir le pangolin : haut de deux pieds, il présente une impénétrable carapace en écailles et une bouche pointue, mais sa tête se replie sous son ventre, timide face au regard de l’être humain. » Le pangolin est aussi présent dans le folklore autochtone de l’île, comme en atteste une légende des peuples Paiwan et Hla’alua : « Le pangolin et le singe ».
- 4 « Chuan muji, zuan lingli » 穿木屐,躦鯪鯉. Le mot lingli 鯪鯉, qui se prononce « la li » en taïwanais, est (...)
20Une autre légende concerne la vieille rue Nantun à Taichung. Elle raconte comment un pangolin pratiquant le taoïsme s’est transformé en divinité. Le quartier Litoutian, à l’intersection des routes Wanhe et Nantun, organise chaque année pendant la fête des bateaux-dragons une fête folklorique appelée « Sandales de bois, réveil du pangolin4 », pendant laquelle on piétine le sol en portant des sandales de bois pour réveiller le pangolin sous terre.
Photographie de pangolin prise à l’époque japonaise, tirée de la Présentation illustrée des mammifères de Taïwan (1932) de Horikawa Yasuichi.
- 5 Le soc est la partie tranchante de la charrue.
21Selon une vieille histoire, beaucoup d’êtres fantastiques résidaient autrefois dans la ville de Taichung, jusqu’à ce qu’à l’époque de la dynastie Qing, des Han s’approprient le quartier de Litoutian, et que les êtres fantastiques s’enfuient dans la montagne. Seul un pangolin resta sur place, trouvant refuge en creusant un terrier dans le sol sous une forge. Le nom « Litoutian », que l’on peut traduire par « Boutique de soc »5 est lié à l’importance de l’agriculture à Taichung, et de la fabrication d’outils agricoles, la forge de socs étant très courante. Le quartier tire ainsi son nom du commerce florissant d’outils agricoles qui avait lieu dans cette ville.
22D’après la tradition Han, Litoutian est « le terrier du pangolin », un lieu où le fengshui est exceptionnel. Le pangolin passe l’hiver en hibernation, et l’on dit que s’il n’est toujours pas réveillé en été, alors les récoltes seront mauvaises, et cela portera malheur au village. Ainsi, à chaque fête des bateaux-dragons, les habitants tapent dans des casseroles, produisant un énorme vacarme, pour réveiller le pangolin sous terre, afin qu’il aide à labourer la terre en creusant la sortie de son terrier. Seul le réveil du pangolin peut protéger le village des désastres, et permettre à des talents exceptionnels d’apparaître. Ces dernières années, cette tradition a progressivement évolué pour devenir une coutume locale lors de laquelle des groupes de quatre personnes tapent des pieds en portant des sandales de bois, faisant un bruit monumental, d’où son nom le plus répandu : « Sandales de bois, réveil du pangolin ».
23La Collection de Litoutian (1999), une compilation d’enquêtes de terrain sur la culture rurale de Taïwan réalisée par Lin Hui-min, spécifie que le pangolin dormant sous ce quartier est un « pangolin doré ». C’est aussi de cette manière que le dépeignent aujourd’hui les livres de contes illustrés sur le pangolin de Litoutian.
- 6 Zoubiao 走標
24En réalité, la coutume de piétiner le sol lors de cette fête n’était pas à l’origine une tradition Han : elle provient d’une tradition autochtone appelée tsáu-pio6 en taïwanais, ce qui signifie « course ».
- 7 Le terme chinois « Pingpuzu » 平埔族 regroupe de façon arbitraire plusieurs peuples autochtones vivant (...)
25D’après le chercheur Wen Tsung-han, la course était à l’origine un rite de passage à l’âge adulte chez les « Aborigènes des plaines7 » de Taïwan. Les Han ont assimilé des éléments de leur culture et les ont associés à de nouvelles légendes, comme dans le cas de cette fête de Litoutian. Autrefois, pendant la marche de la fête des bateaux-dragons, il fallait être pieds-nus pour réveiller le pangolin, et les participants frappaient dans des pots en fer et des couvercles pour faire davantage de bruit. Wen Tsung-han mentionne également qu’en 1982, à l’initiative du chef de quartier Chang Tsung-hsiung, la marche est devenue un défilé de groupes de quatre personnes portant des sandales de bois, car cette méthode permet d’organiser des compétitions et de produire un bruit important.
26D’après Wen Tsung-han, il est très probable que le folklore du pangolin soit à attribuer aux Han, et non à la cérémonie de la course des Aborigènes des plaines de Taïwan. Peut-être que le « terrier du pangolin », provenant de la croyance des Han dans le fengshui, et la cérémonie de la course des Aborigènes ont fusionné, pour devenir cette activité locale de fengshui dite du « réveil du pangolin ».
27Auparavant, comme me l’a raconté ma mère, on n’utilisait pas de sandales en bois. Il y a des années, elle habitait près du temple de Wanhe, dans le quartier de Litoutian. D’après ses souvenirs, dans les années 60, la marche de Litoutian n’était qu’une simple course. Les participants étaient pour la plupart des enfants, et il suffisait de participer pour obtenir un prix : une gomme, une trousse ou d’autres matériels scolaires.
28Les pangolins de Taïwan sont une espèce endémique, mais puisqu’ils vivent principalement en basses montagnes, ils font face aujourd’hui à de nombreuses menaces en raison de l’extension des terres agricoles. Leur habitat est détruit, ce qui les force à migrer, et le système routier très dense de Taïwan forme des routes meurtrières pour eux. Les pangolins sont également victimes de pièges pour animaux et d’attaques de chiens.
29En tant que natif de Nantun, je suis heureux de voir le gouvernement attacher de l’importance à la fête « réveil du pangolin », et l’amplifier pour devenir « la fête des sandales et des bateaux-dragons de Nantun ». Je suis également ravi que des statues représentant des pangolins soient installées partout dans le quartier de Nantun. Cependant, j’aimerais que le gouvernement en fasse davantage pour protéger l’environnement des basses montagnes, pour permettre à la ville et à l’écosystème de cohabiter, et aux animaux de ces biotopes, comme le pangolin, de coexister pacifiquement avec l’être humain. Ainsi, l’invité d’honneur de la fête « Sandales de bois, réveil du pangolin » n’en serait plus absent.
À la recherche de pistes cachées
30Lieu de la fête des sandales et des bateaux-dragons : n° 51, 1er tronçon de la route Wanhe, quartier de Nantun, ville de Taichung (de la place de Wanhe à la vieille rue Nantun).
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L’événement « Sandales de bois, réveil du pangolin », organisé sur la place devant le temple de Wanhe. |
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Pendant la fête « Sandales de bois », des employés portent un déguisement de pangolin et interagissent avec les participants. |
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Dès le début de la fête « Sandales de bois », le quartier organise une cérémonie religieuse, durant laquelle les dieux du « Temple de Litoutian » sont invités. |
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La fête « Sandales de bois », le 18 juin 2018. Ce jour-là, malgré la pluie, les habitants ont participé à l’événement, vêtus de leur imperméable. |
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Sculpture devant le bureau de quartier de Nantun, représentant la fête « Sandales de bois, réveil du pangolin ». |
Tainan – Une histoire étrange de Fucheng : la vengeance de Sœur Lintou
Légendes de fantômes et d’esprits
- 8 La période Guangxu 光緒, qui dure 34 ans, ouvre les années 1875 à 1908 de la dynastie Qing 清 (1644-19 (...)
- 9 Gâteau triangulaire à base de riz gluant farci et enveloppé dans des feuilles de bambou. Le zongzi (...)
- 10 « Sœur Lintou » : aussi connue sous les appellations « dame de la mangrove » dans la nouvelle « Le (...)
31Au cours de la période Guangxu de la dynastie Qing8, une veuve nommée Li Chao-niang élevait seule deux garçons et une fille à Fucheng, sur l’île de Taïwan. Par chance, l’argent que son mari avait gagné de son vivant en tenant un commerce était suffisant pour que la mère et ses enfants mènent une vie aisée. Mais son mari avait un ami, un homme d’affaires de Shantou nommé Chou A-szu, qui fut pris de mauvaises intentions en voyant que la famille possédait une grande fortune, et entreprit de se rapprocher de Li Chao-niang.
Après avoir gagné la confiance de Chao-niang et être devenu son amant, il lui dit qu’il voulait acheter du camphre et le revendre à Hong Kong pour en tirer un énorme profit. Chao-niang n’avait aucun doute le concernant. Elle lui confia non seulement toutes ses économies, mais emprunta aussi de l’argent à la banque et hypothéqua sa maison, réunissant ainsi plus de dix mille taels. Contre toute attente, après avoir vendu ses marchandises à Hong Kong, Chou A-szu partit pour Shantou et ne revint plus jamais.
Quand elle se rendit compte qu’elle avait été dupée, Chao-niang fut désemparée et pleura des jours durant. Lorsque les créanciers vinrent recouvrer la dette, elle fut contrainte de vendre ses vêtements et ses objets de valeur, et sa maison fut saisie. Plus tard, ses deux fils moururent de faim. Chao-niang n’eut d’autre choix que d’amener sa fille de trois ans dans la mangrove. Elle étrangla d’abord sa fille, puis attacha une corde à un arbre et se pendit.
Depuis ce jour, l’âme errante d’une femme apparaissait souvent près des arbres de la mangrove. Elle acheta un jour des zongzi de viande9 d’un vendeur ambulant qui pensa avoir fait une bonne affaire. Mais celui-ci s’aperçut, dès la vente réalisée, que l’argent reçu s’était transformé en billet funéraire. Le vendeur l’interpella aussitôt, mais quelle ne fut pas sa surprise en voyant que la femme qui se tenait face à lui avait maintenant les cheveux en bataille et une langue pendante de deux ou trois pouces… Dès lors, tous les habitants du village reconnurent l’existence de la « Sœur Lintou »10 et construisirent un petit sanctuaire en son honneur.
32Un jour, un voyant nommé Chou Tian-tao qui passait par la forêt apprit les griefs de Sœur Lintou et décida de l’aider à se venger. Chou Tian-tao sculpta une tablette ancestrale, puis la recouvrit d’un parapluie. Il appela Sœur Lintou afin qu’elle puisse l’accompagner et le suivre en bateau à Shantou. Finalement, l’homme d’affaires, Chou A-szu, vit apparaître devant ses propres yeux le fantôme de celle qu’il avait dupée. Il fut pris de folie et tua sa deuxième femme et son fils. Quant à lui, il fut étranglé par Sœur Lintou, tomba à terre et mourut.
Étude des sources
33La légende de Sœur Lintou est connue à Taïwan et en Chine, et l’histoire ci-dessus est adaptée d’un chapitre de l’ouvrage de Liao Han-chen Trois cas étranges à Taïwan sous la dynastie Qing (1955), qui est aussi la version la plus populaire. Cette légende trouverait son origine sous la dynastie Qing, mais la date, le lieu, et le personnage exacts ont été difficiles à trouver. Les versions que nous lisons aujourd’hui sont probablement le résultat d’anecdotes populaires, qui ont été répétées avec exagération et enjolivées par les lettrés.
34Nous pouvons trouver des traces de Sœur Lintou dans des documents datant de la période coloniale japonaise, comme Les coutumes et traditions de Taïwan (1921) de Kataoka Iwa, Représentations théâtrales taïwanaises et chinoises à Taïwan (1928), Le journal 3, 6, 9 (1931), Un recueil de littérature populaire taïwanaise (1935), La situation actuelle du théâtre taïwanais (1943) ... Le lettré Lin Feng-chun a également écrit un poème sur cet incident, indiquant que la Sœur Lintou « menait une existence indigne, vivait sans le sou, et était fatiguée du monde ». Son poème est le suivant :
Lasse de porter le voile de la veuve,
À tort, elle écouta la marieuse,
Maintenant, sa cithare est la seule chose qui lui reste.
Sa fortune envolée, qui se souciera d’elle à présent,
Que la voici pendue en martyre au cœur de la forêt.
- 12 Aussi connu sous le nom de « Hsiho Ilao ».
Lin Feng-chun12, à Chihkan, « Récits du sud de Chihkan en six poèmes : Sœur Lintou » (1930)
35Après la guerre, l’histoire de Sœur Lintou a continué de circuler et a même été adaptée au cinéma. En 1956, le tournage de Sœur Lintou, réalisé par Tang Shao-hua et écrit par Mujung Chung, s’est déroulé à Peitou, avec pour lieux de tournage le port d’Anping, le Fort Provintia (tours de Chihkan) et le temple confucéen. L’actrice principale du film était la célèbre chanteuse d’opéra taïwanais surnommée « la pleurnicharde », de son vrai nom Chen Hsiu-e, née vers la deuxième année de l’ère de Taishō (1913). Sa performance était unique dans le monde de l’opéra taïwanais. Elle chantait avec tristesse et ses pleurs étaient touchants. Les Taïwanais tout comme les Japonais étaient sous son charme.
L’actrice surnommée « la pleurnicharde » qui joue Sœur Lintou.
Cette photo provient d’un ancien journal intitulé Photojournalisme, datant du 1er septembre 1956. L’article précise : « Si elle est douée pour jouer dans les tragédies, cela est dû en grande partie à sa capacité à chanter en pleurant. C’est pourquoi on l’a nommée : la pleurnicharde. Lorsqu’elle est montée sur scène hier, elle a chanté et pleuré en même temps ».
36Ce film, adapté de l’histoire de Sœur Lintou écrit par Liao Han-chen, a fait sensation après sa sortie. La performance de « la pleurnicharde », qui jouait le rôle-titre, a particulièrement touché le cœur des gens. Grâce à la popularité de ce film, la légende s’est fait plus largement connaître.
37Quand j’étais petit, j’ai lu dans un livre pour enfants l’histoire de Sœur Lintou et j’ai été profondément affecté. Ce n’est qu’en grandissant que j’ai compris le contexte historique (le commerce maritime), les croyances (couvrir l’âme avec un parapluie) et les autres notions qui se cachaient derrière le conte. Cette histoire n’est pas seulement une leçon de morale sur le bien et le mal. Bien plus encore, elle permet de dévoiler des traditions insulaires propres à Taïwan.
38Afin de mieux connaître Sœur Lintou, je me suis rendu à l’endroit où, selon la rumeur, se trouve son sanctuaire à l’adresse près du bâtiment Asie de l’Est, sur la rue de Mintsu. Malheureusement, l’emplacement a bien changé depuis, et les environs de la rue de Mintsu sont encombrés par les voitures et la foule. Il ne reste plus aucune trace du sanctuaire, et même les arbres de la mangrove ont disparu. Selon la chercheuse Wang Chao-fen, qui a rendu visite à une personne âgée, Lin Yen-shan, le petit sanctuaire a été démoli après la neuvième année de l’ère Taishō (1920) en raison du développement urbain.
39Le meilleur moyen de se rapprocher de Sœur Lintou est probablement de voir l’arbre de la mangrove de ses propres yeux ! Il s’agit en effet d’un objet important sur lequel l’âme de Sœur Lintou peut s’appuyer. L’arbre de la mangrove, également connu sous le nom « Lou’er », pousse principalement sur la côte. C’est un arbuste à feuilles persistantes avec des feuilles très épineuses, et ses racines poussent à partir des tiges qui s’étendent vers le bas afin d’absorber les nutriments et d’améliorer l’adhérence au sol.
40Mais aujourd’hui avec le développement urbain, les arbres de la mangrove sans grande valeur économique ont été déterrés, et je n’ai jamais vu ces arbres à Tainan. Il y a quelques années, j’ai découvert que cette plante côtière était cultivée dans le jardin botanique de Taichung, et j’ai enfin pu voir à quoi elle ressemblait vraiment. Plus tard, j’ai aussi vu de ces arbres dans une région sauvage de l’île des Orchidées, avec des feuilles et des branches denses qui m’ont offert une image sinistre. Il n’est donc pas étonnant que les légendes utilisent la mangrove comme scène typique pour les apparitions de fantômes.
41Tout comme les arbres de la mangrove se font rares, de moins en moins de personnes entendent parler de nos jours de l’étrange histoire de Fucheng. Je pense cependant que même une légende de fantôme peut être une trace de l’histoire, et tant que celle-ci se poursuit, la mémoire de Sœur Lintou y trouvera sa place.
À la recherche de pistes cachées
42Arbre de la mangrove : les arbres sauvages sont rares en bord de mer, mais ils sont plantés devant le jardin botanique du musée national des sciences naturelles à Taichung. Nous pouvons également les voir à Kenting, Huatung, et sur l’île des Orchidées.
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Les arbres de la mangrove ont un feuillage touffu. Leur apparence est plutôt sinistre. |
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Les racines des arbres de la mangrove. |
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Les fruits des arbres de la mangrove ressemblent à de gros ananas rouges. Ces fruits sont suspendus en haut de l’arbre. Le peintre Chang Chi-ya m’a demandé un jour : « Est-ce qu’on ne dirait pas, de nuit, une tête humaine qui aurait été suspendue ? » |
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Le film dans lequel Yang Li-hua jouait Sœur Lintou est sorti en 1979. |
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Le film Le méchant homme, sorti en 1972, a été adapté de la légende de Sœur Lintou. |
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L’affiche du film Sœur Lintou en 1988 présente le costume classique de fantôme de l’actrice principale Shih Szu. |
Hualien – Le géant Alikakay de la montagne Meilun
Légendes de démons
- 13 L’auteur utilise le terme « Amis », appellation officielle pour désigner les membres de ce groupe a (...)
43Les Alikakay sont des géants aux yeux de chat et à la longue chevelure, au moins quatre fois plus grands qu’un homme de la tribu Pangcah13. On raconte qu’ils se plaisent à fumer. Ils résident dans une grotte située sur le versant ouest de la montagne Meilun, se livrant à tous les méfaits, jusqu’à user de sorcellerie pour tourmenter les femmes, au grand désarroi des membres de la tribu.
44On raconte également qu’ils sont doués pour les sortilèges de métamorphose. Il est dit qu’un jour, l’un d’entre eux traquait une mère avec son nourrisson alors qu’elle se rendait aux champs. Il ôta un poil de sa main, récita un sort et prit l’apparence de la mère. Profitant de cette distraction, il dépeça sournoisement le nourrisson pour se gorger de ses entrailles.
45Les méfaits des Alikakay se firent de plus en plus fréquents, jusqu’à en devenir intolérables pour les Pangcah qui se résolurent enfin à répliquer. Mais en dépit de raids incessants des guerriers de la tribu contre leur antre dans la montagne Meilun, ils ne purent triompher des sortilèges maléfiques des Alikakay.
Alors que tous étaient désemparés, un aîné du nom de Kalang se rendit seul sur la côte pour réfléchir, et de manière fortuite, il rêva du dieu de la mer Kafid qui lui dit : « Les Alikakay ne sont pas humains, et ne peuvent être défaits par des armes ordinaires. Seul le ma-porong, utilisé pour les sacrifices — plante eulalie servant à la confection de nœuds — pourra les vaincre. » Ayant reçu ces instructions divines, Kalang retourna dans sa tribu le cœur en liesse, et tous se mirent alors à préparer une grande quantité de ma-porong. Les Alikakay ne firent pas le poids contre le pouvoir divin du ma-porong et se replièrent après plusieurs revers successifs. Ils acceptèrent enfin de ne plus tourmenter la tribu et de quitter définitivement la montagne Meilun, sans jamais y revenir. On dit que pour remercier les Pangcah qui les avaient épargnés, ils leur dirent : « Si chaque été vous venez sur les côtes nous offrir en sacrifice des noix d’arec, du vin et des mochis, nous vous garantirons une bonne récolte de poissons. » Cette histoire devint ainsi un des mythes fondateurs de la fête Pangcah de la mer — Miladis, aussi appelée Fête de la pêche.
Étude des sources
46Les êtres fantastiques font partie de notre histoire. Bien plus encore, ils représentent un important héritage culturel local. À l’été 2018, pour la première fois à Taïwan, une exposition dédiée à l’un de ces êtres, un géant Alikakay, a ouvert ses portes avec éclat dans la ville de Hualien.
47L’exposition intitulée « La race des géants et leur provenance » fut organisée par Huang Chi-jui, fondateur du studio « O’rip, voyageur de la vie » et travaillant dans le domaine de l’histoire et de la culture. Elle incluait un espace d’exposition d’objets culturels et artistiques, un théâtre d’ombres et de lumières, des conférences thématiques et autres activités. Elle réunissait en un seul lieu presque tous les articles et travaux en rapport avec les Alikakay. Il fallait donc que je me rende à Hualien pour voir cette exposition, et que j’en profite pour étudier sur place tout paysage et élément artificiel ou naturel ayant trait au folklore des Alikakay.
- 14 Il s’agit de rapports sur la population autochtone publiés pendant la période de gouvernance japona (...)
48La transcription en anglais du nom du géant est « Alikakay » ou « Arakakai ». D’autres appellations existent, dont « Alikhahkai » et « Alikahkai ». Dans le folklore des Pangcah du nord de l’île et des Sakiraya, les Alikakay font partie de la race des géants, ils sont mangeurs d’hommes, et apprécient particulièrement les entrailles de nourrissons. Le Rapport d’enquête sur la coutume des sauvages, ainsi que la Classification des sauvages14, rapportent tous deux des observations similaires.
49Les choses se compliquent lorsque l’on s’intéresse aux différentes versions du folklore. Dans les textes datant de la période de gouvernance japonaise, l’arme mortelle redoutée par les Alikakay n’était pas le ma-porong, mais les protections hygiéniques des femmes. Certaines versions en font l’origine de la fête religieuse sportive Malishen de la tribu Pangcah. Ainsi, lors de la campagne contre les Alikakay, toutes les tribus entraînaient leurs guerriers par classe d’âge à toutes sortes de tactiques martiales, donnant alors naissance à cette fête. D’autres versions disent encore que les instructions divines venaient du dieu de la montagne Malataw. Les travaux actuels estiment quant à eux que les Alikakay seraient en fait des Occidentaux d’origine néerlandaise ou espagnole qui seraient arrivés au nord en quête d’or et, en raison de leur apparence étrange, auraient été démonisés par la population autochtone.
50Le studio « O’rip, voyageur de la vie » a installé l’exposition dédiée aux êtres fantastiques au sein de la Résidence du général, un site historique datant de la période de gouvernance japonaise, à proximité de la montagne Meilun. En plus d’exposer les paniers de bambous utilisés par les Pangcah pour la pêche, les arcs, les flèches et autres instruments, il invite également les personnalités locales à venir dessiner des Alikakay de toutes formes. Et, à l’image de l’accessoire divin qui avait vaincu les Alikakay, des volontaires sont conviés à tresser une centaine de ma-porong, qui seront ensuite exposés.
51J’ai demandé à Huang Chi-jui ce qui l’avait poussé à organiser cette exposition. Il m’a répondu que c’était un projet mûri depuis déjà plusieurs années, avec pour point de départ le constat que beaucoup de villes et villages entretenaient leur propre image communautaire, mais que peu d’entre eux proposaient des événements consacrés aux racines de leur histoire. Cela avait pour conséquence une rupture sévère avec la culture locale et la disparition de ce terreau fertile de la culture. Huang Chi-jui propose donc une démarche plus originale. Il s’agira au contraire de prendre ce qu’il y a de plus représentatif dans le folklore autochtone et de s’en servir comme étendard. Ainsi, faire connaître le folklore des Alikakay de Hualien est devenu sa priorité.
52Huang Chi-jui considère qu’aussi longtemps que l’on continuera de raconter ces histoires, ce qui fait l’essence de ces groupes autochtones sera préservé et enrichira l’identification à la culture locale. Ce n’est pas un hasard si la Résidence du général a servi de lieu d’exposition, puisqu’il suffit d’une simple marche pour atteindre la montagne Meilun, et selon la légende, l’antre des géants.
53Il est aujourd’hui impossible de retrouver le lieu précis qui aurait constitué le repaire des géants. On dit que leur grotte a depuis longtemps été comblée. La partie nord de la montagne est encore à l’heure actuelle sous contrôle militaire. On ne peut se déplacer librement que dans la partie sud. Mais l’atmosphère oppressante qui régnait par le passé s'est depuis estompée. Sur le sentier de montagne, beaucoup d’habitants s’adonnent au sport ou à la course à pied. Il y a même un terrain de badminton et une aire de jeux pour enfants. Il ne reste plus la moindre trace de la dévastation causée autrefois par les géants.
54Mais les Alikakay n’ont-ils pas laissé quelques vestiges ? Dans le livre de Chin Jung-hua, Récits populaires de la tribu Pangcah de Hualien à Taïwan (2001), Chen Kuang-yuan, habitant du canton de Chi’an et membre du groupe Pangcah, raconte ceci : « J’ai entendu dire que les Alikakay se trouvaient dans le canton de Juisui. On y trouve aujourd’hui deux grands piliers de pierre qui étaient autrefois présents dans leur habitation. » D’après le livre Le dieu du feu et le souci d’un avenir radieux : histoire orale des Sakiraya (2012), Tsai Huo-kun, habitant du village de Shuilien dans le canton de Shoufeng et membre du groupe Sakiraya, confirme le lien entre les Alikakay et les piliers de pierre : « Les piliers de pierre de Saoba sont un vestige laissé par les Alikakay. Au temps où les Alikakay coexistaient encore avec les habitants de l’île, ils possédaient du mobilier et des ustensiles, comme le pilon et le mortier, qui plus tard se sont transformés en pierre. Ces piliers étaient en fait des pilons. À leur départ, ces ustensiles, pilons, tasses, ainsi que l’endroit où ils prenaient le petit déjeuner, se sont tous changés en pierre. »
55Les piliers de pierre de Saoba sont situés dans le village de Wuhe, dans le canton de Juisui. Il s’agit de deux gigantesques piliers en pierre verticaux. Même si les personnes âgées disent que l’idée d’une association des Alikakay avec les piliers leur a été transmise par leurs ancêtres, cette explication relève sans doute d’une narration plus tardive. En effet, le lieu d’origine des géants est étroitement lié à la montagne Meilun, or cette dernière et Juisui sont éloignés de plus de soixante-dix kilomètres. Il serait par conséquent très étrange de dire que les piliers seraient les vestiges de pilons présents dans leur habitation. La plupart des légendes orales des Pangcah et des Sakiraya considèrent toujours la montagne Meilun comme le camp de base des Alikakay.
56Quant aux légendes concernant les piliers de Saoba, les Pangcah transmettent pour la plupart qu’il s’agit d’un vestige laissé par les ancêtres de la tribu Kalala. Les Sakiraya disent pour leur part qu’il s’agit des marches qui ont permis au dieu du ciel Butung d’atteindre sa demeure céleste.
- 15 À ne pas confondre avec la grotte du même nom située dans le quartier de Shihmen, à Nouveau Taipei.
57Selon l’étude de Huang Chia-mei, si on a pu propager aux quatre coins de Hualien des histoires sur les piliers de pierre de Saoba et les Alikakay, c’est peut-être parce que les vestiges, ou autres sites et pierres étranges, y sont particulièrement nombreux et que les récits concernant les géants se sont diffusés largement. Cela a donc pu donner lieu à toutes sortes d’interprétations farfelues. Ainsi, à proximité de la grotte de Shihmen dans le canton de Fengpin15, il existe une pierre étrange dont on dit que c’est le reste d’un mochi mangé par l’un des géants. En outre, au cœur du quartier n° 8 du village de Shanhsing de la tribu Cilakayan, on a découvert un grand nombre de vestiges en pierre. Ses habitants ont donc répandu la légende selon laquelle des Alikakay hantaient autrefois ces lieux.
58En dépit de récits divers et confus, ces légendes enjolivées nous permettent tout de même d’envisager quelle a été en fin de compte la « sphère d’influence » de la légende des Alikakay.
L’empreinte des Alikakay est peut-être très éloignée de notre époque, et la légende des géants peut paraître à la fois absurde et étrange. Cependant, si nous parvenons grâce à ces légendes à susciter la curiosité, peut-être arriverons-nous également à enrichir nos connaissances sur l’histoire et la culture de Hualien.
À la recherche de pistes cachées
59Parc de la montagne Meilun : 25-2 avenue Shangchih, ville de Hualien, comté de Hualien.
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Peintures représentant les Alikakay dans la salle de réunion de l’exposition « La race des géants et leur provenance ». Il s’agit de trois œuvres produites conjointement par les jeunes de la tribu Sakor et leurs aînés. Celle de droite est particulièrement remarquable. Elle dévoile l’apparence d’un Alikakay après sa transformation en femme. |
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Accessoire utilisé lors du théâtre d’ombres et de lumières « Le géant malin » de l’école élémentaire de Chingpu, supervisé par le professeur Kao Yun-hsuan et également mis en scène à la Résidence du général. |
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Apparence actuelle de la montagne Meilun : elle est devenue un parc de loisirs pour la population locale. Les récits de géants propagés par les Pangcah s’ajoutent aux légendes des Sakiraya sur la rébellion des Alikakay. Il paraît qu’au sommet de la montagne se trouve un gros bloc rocheux qui porte l’empreinte des Alikakay. En outre, dans les légendes véhiculées par le peuple Hoklo, ce lieu est également le domaine du Mo-sin-a. Les adultes diront aux enfants qui ne sont pas sages de faire attention car ils risquent d’être attrapés par le Mo-sin-a, emmenés dans la montagne et recouverts de bouse de vache. |
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Ma-porong réalisé à partir de feuilles tressées, arme sacrée qui aurait servi à repousser les Alikakay. |
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Mur à l’extérieur de la rizerie de l’association de fermiers du comté de Hualien. Il s’agit d’un site culturel de la communauté rurale de Kuofu. Sur toute la longueur du mur sont dépeints des récits captivants de la culture autochtone, ici au travers d’une peinture murale représentant le géant Alikakay. |
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Les piliers de pierre de Saoba, dans le canton de Juisui. Constitués de deux piliers dressés verticalement, ils offrent un tableau très étrange. D’après les archives orales, ces piliers seraient des restes de pilons faisant partie de l’habitat des géants. |
L’île des Orchidées – La grotte aux Cinq trous où vivent les démons
Légendes de fantômes et d’esprits
60Il y a fort longtemps, l’île des Orchidées connut une décennie sans pluie, et les Tao souffrirent de la faim. À cette époque, l’ancêtre des Tao, qui était né de la pierre et ne supportait pas la misère de son peuple, envoya ses deux petits-fils chercher une solution à leurs maux. Ces deux derniers suivirent ses ordres et marchèrent deux jours et une nuit, jusqu’à arriver, à la tombée de la seconde nuit, près de la Grotte aux Cinq trous. Les frères, alors épuisés par leur voyage, se mirent à chercher un endroit où se reposer, lorsque, soudain, ils aperçurent une lueur scintillant sur le rivage.
S’approchant, ils découvrirent un groupe d’Anito (des démons), en train d’attraper crabes, coquillages et petits poissons. Les Anito étaient gentils et leurs expliquèrent que les choses qu’ils tenaient en mains s’appelaient des torches, et qu’elles pouvaient servir à s’éclairer.
Ils conduisirent les deux frères jusque dans la Grotte aux Cinq trous, où se trouvaient d’autres démons qui les accueillirent et leur préparèrent des coquillages clair-de-lune. Ils furent émerveillés par la vue de la flamme capable de cuire leur nourriture. Le lendemain, au moment de partir, les démons disposèrent du charbon de bois dans les coquilles clair-de-lune, et leur expliquèrent comment allumer un feu pour bouillir de l’eau ou cuisiner de la nourriture.
Ayant alors en leur possession de quoi faire du feu, les deux frères retournèrent chez eux, et contèrent à tous ce qu’ils avaient vécu. Depuis, les Tao apprirent à se servir du feu, cessèrent de manger de la viande crue et réussirent à survivre ensemble.
On raconte que ces deux frères appartenaient à la tribu de Langtao.
Étude des sources
61Dans la langue Tao, « Anito » signifie « démon » ou « mauvais esprit », et sert généralement à désigner un être surnaturel maléfique et terrifiant. Pour les Tao, il peut causer malheur aux gens et est source de désastres. Quand quelqu’un meurt, il se transforme en Anito et doit alors être évité à tout prix. Ce terme permet aussi d’établir un lien entre les Tao et des groupes linguistiques des îles du Sud, tels que les Tagalog des Philippines, qui l’emploient également pour désigner les esprits des ancêtres et les démons.
62Étonnamment, bien que les Tao craignent d’ordinaire les « Anito », ceux de la Grotte aux Cinq trous de la légende semblent particulièrement bienveillants. D’après celle-ci, ces mauvais esprits auraient donné le feu aux Tao, et leur auraient même enseigné les techniques de pêche, de tissage, de poterie, etc.
63La gGrotte aux Cinq trous, située au nord de l’île des Orchidées, est un endroit que les Tao évitent tout particulièrement. Il est déconseillé aux femmes et aux enfants de s’en approcher. En langue Tao, la Grotte aux Cinq trous est appelée « Ji-Karahem », ce qui signifie « tréfonds ». En partant du nord-est, les trous sont numérotés de 1 à 5, et possèdent chacun un nom spécifique.
64Leurs noms sont les suivants :
Le premier trou est appelé « Do-Vahay no Volay », ce qui signifie « la tanière du serpent », et on raconte qu’autrefois, un grand serpent est apparu de la cavité située au-dessus.
Le deuxième trou est appelé « Ji-Alisosan », ce qui signifie « lieu de repos ».
Le troisième trou est appelé « Do Trasan » et aurait été le lieu où les tribus de Langtao et de Yehyu se retrouvaient pour régler leurs différends autour d’un combat de sumo.
Le quatrième trou est appelé « Do-Pangengsadan », ce qui signifie « printemps » ou « épine ». Les troisième et quatrième trous sont aussi connus sous le nom de « Tongan na Ji-Karahem ».
Le cinquième trou est appelé « Do Vahay no Vonko », ce qui signifie « la demeure des démons ».
65Lorsque l’on visite la Grotte aux Cinq Trous, on comprend pourquoi elle est considérée comme taboue. Avec son entrée profonde, ses parois étranges et le souffle glaçant et sinistre qui l’assaille, il n’est pas étonnant qu’elle soit vue comme le refuge de démons et d’esprits effrayants. En fait, cette grotte fut formée par l’érosion marine ; tout au long de l’élévation progressive de l’île vers la surface de l’eau résultant de la convergence des plaques tectoniques, les vagues se sont infiltrées dans les fissures déjà ouvertes au sein des parois rocheuses et les ont érodées. Puis la croûte terrestre s’est élevée et ces grottes marines ont émergé à la surface. Les parois érodées des Cinq trous sont tapissées de marques correspondant à chaque surrection de la croûte terrestre.
66Pourtant, ce n’est pas l’étrange apparence de cette grotte qui attire le plus les curieux, mais plutôt les quelques croix disposées dans certains des trous, ainsi que les croix peintes sur les murs. J’ai entendu quelques visiteurs de l’île discuter de ce lieu : ils émettaient l’hypothèse que les locaux voulaient peut-être se servir de la force du Christ pour « contrôler » cet endroit. À vrai dire, cette idée n’est pas loin de la vérité.
67J’ai discuté avec une femme tao d’environ soixante-dix ans, qui vivait dans la tribu de Yehyu, et était également chrétienne. D’après elle, les anciennes générations disaient toutes que la Grotte aux Cinq trous était un lieu occupé par les démons. Mais selon les Chrétiens, puisque le Diable avait pris possession de cet endroit, il fallait y faire entrer Dieu afin de le déloger, car la Terre appartient à Dieu, et non au Diable. Ainsi, depuis ces trente dernières années, l’Église se sert de la grotte comme d’un site de prière collective, y organisant par exemple les veillées pascales. Elle m’a également expliqué que les nombreux visiteurs de l’île des Orchidées ne connaissent pas forcément bien ses routes, et que par conséquent, lorsqu’ils prient, ils le font souvent pour souhaiter la sécurité de ceux qui les empruntent.
68Bien que cette grotte soit un lieu interdit chargé de légendes, l’évolution des croyances religieuses a permis aux locaux de la voir sous un nouveau jour.
À la recherche de pistes cachées
69La Grotte aux Cinq trous : cinq cavités situées sur la côte nord de l’île des Orchidées, à l’ouest du village de la tribu de Langtao, près de la route côtière.
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Le premier trou, « Do-Vahay no Volay », est la « tanière du serpent », dont un grand reptile serait un jour sorti. |
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Le deuxième trou, « Ji-Alisosan », comporte plusieurs cavités ainsi qu’un passage menant à la troisième grotte. La communauté chrétienne locale y a installé une croix blanche. |
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Le troisième trou, « Do Trasan », est très haut de plafond (l’équivalent d’environ quatre étages de hauteur), et ses parois déchiquetées présentent clairement les traces de l’érosion au cours du temps. |
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Le quatrième trou, « Do-Pangengsadan », est aujourd’hui un site religieux de l’île protégé par la communauté chrétienne, où les croyants organisent des célébrations. |
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Le cinquième trou, « Do Vahay no Vonko », dont la légende raconte qu’il abrite des démons, mais qui est devenu un lieu de culte catholique. |
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Une croix rouge est placée à l’entrée du cinquième trou, sur laquelle un dessin de la Crucifixion de Jésus est accroché. |
Document annexe
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Atlas des créatures de Taïwan-Passages traduits (application/pdf – 5,3M)
Notes
1 Les êtres fantastiques de Taïwan dans le Cloud (Taiwan yaoguai yunduan shu 臺灣妖怪雲端書) : un livre électronique sur Google Drive qui introduit 99 récits d'êtres fantastiques. Notes de voyage sur les êtres fantastiques de Taïwan (Taiwan yaoguai huan youji 臺灣妖怪寰遊記) : une carte numérique sur Google Maps qui indique l'emplacement de 207 créatures, et une publication des notes de recherche sur Google Blogger. Sur les traces des êtres fantastiques de Taïwan (Taiwan yaoguai sanbu dao 臺灣妖怪散步道) : une série de reportages sur YouTube sur les lieux fantastiques de Taïwan.
2 Pour approfondir sur le concept de fantôme en chinois, on pourra consulter l'ouvrage de Marie Laureillard et Vincent Durand-Dastès, Fantômes dans l’Extrême-Orient d’hier et d’aujourd’hui - Tome 1. Paris : Presses de l’Inalco, 2017, accessible en ligne à l'URL : https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pressesinalco/1274?lang=fr
3 Yaoguai 妖怪 est le terme générique en chinois pour désigner les êtres fantastiques (démons, esprits ou autres créatures). Au Japon, on utilise le terme de yōkai.
4 « Chuan muji, zuan lingli » 穿木屐,躦鯪鯉. Le mot lingli 鯪鯉, qui se prononce « la li » en taïwanais, est un autre nom pour désigner le pangolin.
5 Le soc est la partie tranchante de la charrue.
6 Zoubiao 走標
7 Le terme chinois « Pingpuzu » 平埔族 regroupe de façon arbitraire plusieurs peuples autochtones vivant traditionnellement dans les plaines, qui étaient autrefois supposés être plus « civilisés » que ceux des montagnes. Ces groupes ne sont pas reconnus par le gouvernement taïwanais qui les considère désormais comme appartenant à l’ethnie taïwanaise.
8 La période Guangxu 光緒, qui dure 34 ans, ouvre les années 1875 à 1908 de la dynastie Qing 清 (1644-1911).
9 Gâteau triangulaire à base de riz gluant farci et enveloppé dans des feuilles de bambou. Le zongzi 粽子 est traditionnellement consommé pendant la fête des bateaux-dragons.
10 « Sœur Lintou » : aussi connue sous les appellations « dame de la mangrove » dans la nouvelle « Le fantôme de la mangrove » (« Lintoucong de gui » 林投叢的鬼) de Li Ang 李昂 traduite par Marie Laureillard en 2016 dans la troisième livraison de la revue Jentayu, ou « sœur Pandanus », en référence à l’arbre Pandanus, qui pousse principalement dans la mangrove.
11 Cet ouvrage répertorie quatre des plus célèbres cas étranges de Taïwan. Trois d’entre eux se déroulent à Fucheng : « Sœur Lintou », « Le fantôme de Chen Shou-niang » et « Brûler des billets funéraires au temple de Lüzu », tandis que « Chou Cheng se rend à Taïwan » a pour théâtre Taipei. D’autres versions font mention de trois, voire cinq cas.
12 Aussi connu sous le nom de « Hsiho Ilao ».
13 L’auteur utilise le terme « Amis », appellation officielle pour désigner les membres de ce groupe autochtone. Cependant, eux-mêmes se désignent généralement sous le terme de « Pangcah », que l'on reprendra ici.
14 Il s’agit de rapports sur la population autochtone publiés pendant la période de gouvernance japonaise de Taïwan : un premier rapport, publié en cinq volumes, entre 1915 et 1922, suivi d'un second, dont la date est inconnue.
15 À ne pas confondre avec la grotte du même nom située dans le quartier de Shihmen, à Nouveau Taipei.
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Référence électronique
Linisa Bessaoud, Émilie Boyer, Marie Escure, Maeva Sandri et Jinke Song, « Atlas des créatures de Taïwan », Impressions d’Extrême-Orient [En ligne], 16 | 2024, mis en ligne le 30 juin 2024, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ideo/4075 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11z8f
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